Séance du
vendredi 27 juin 2003 à
8h
55e
législature -
2e
année -
10e
session -
58e
séance
La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Robert Cramer, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Bernard Annen, Luc Barthassat, Marie-Paule Blanchard-Queloz, Caroline Bartl, Blaise Bourrit, Thomas Büchi, René Desbaillets, Renaud Gautier, Michel Halpérin, René Koechlin, Nicole Lavanchy, Christian Luscher, Claude Marcet, Blaise Matthey, Alain Meylan, Mark Muller, Jacqueline Pla, Patrice Plojoux, Pierre Schifferli, Patrick Schmied, Louis Serex, Ivan Slatkine et François Thion, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, tels qu'exposés dans mon rapport, les comptes 2002 de l'Etat de Genève se soldent par un excédent de 12,3 millions après opérations exceptionnelles, provisions et réserves. C'est cet excédent qui a été accepté par la majorité de la commission avec les abstentions du groupe UDC, du groupe radical et celle, partielle, du groupe libéral.
Par ailleurs, je tiens à souligner que la conformité des comptes n'a pas été mise en cause. Au sujet des commentaires de l'ICF sur les 455 millions de déficit en lieu et place des chiffres indiqués par le Conseil d'Etat, il s'agit essentiellement d'un problème de non-respect de l'étanchéité des exercices, les produits et les charges doivent en effet être comptabilisés dans l'exercice en question. Des décalages se sont produits cette année, comme les années précédentes, sans que cela soit volontaire, aux dires de l'ICF. Ces 455 millions correspondent notamment à 288 millions de produit provenant d'un changement de méthode pour la comptabilisation des débiteurs de l'IFD et de l'impôt à la source. Ce changement de méthode comptable a été opéré afin de respecter les principes d'engagement, d'échéance et de délimitation des exercices prévus par la LGAF. Il faut ajouter 153 millions qui proviennent de la différence entre l'estimation et la production de l'impôt ordinaire des personnes morales pour l'imposition 2000. Ce montant, déjà considéré comme fiable en 2001, aurait dû être comptabilisé dans les comptes de cet exercice.
Il est à relever que l'ICF note une amélioration constante, depuis un certain nombre d'années, de la lisibilité des comptes d'Etat et de la concordance entre ceux-ci et la réalité économique qu'ils sont censés représenter. Toujours selon l'ICF, cette amélioration est probablement plus importante au niveau des comptes de fonctionnement qu'en ce qui concerne la situation patrimoniale, c'est-à-dire au niveau du bilan de l'Etat.
Les chiffres qui vous sont soumis dans le rapport indiquent des tendances qui, lors de nos prochains travaux, devraient être prises en considération: un tassement des recettes et une augmentation des dépenses, notamment en ce qui concerne la santé et le social. Le nombre des sans-emploi ne cesse en effet d'augmenter, de même que la précarité à laquelle les services sociaux doivent faire face.
Au sujet des recettes, le tout est de savoir si ce tassement est conjoncturel ou structurel. Concrètement, quelle est la limite de notre assiette fiscale compte-tenu du tissu économique? Ce que l'on peut déjà confirmer, c'est que cette situation s'aggravera avec les projets fiscaux de baisse d'impôt que la majorité actuelle tient à faire passer. Aujourd'hui déjà, ces différentes baisses prétéritent les recettes d'environ 400 millions annuellement, sans que la promesse d'un effet de relance ou d'une augmentation des recettes due à cette baisse puisse être vérifiée.
S'agissant de la dette, ce n'est pas moins de 1,412 milliard qui a été soustrait à son possible remboursement, somme correspondante aux baisses d'impôt de l'IN 111 et à la valorisation des actifs de la BCGe de ces trois dernières années.
En ce qui concerne les dépenses, en analysant le ratio que le département a produit, on constate que les dépenses de fonctionnement, en francs constants et rapportées au nombre d'habitants, n'ont pas augmenté mais se sont plutôt stabilisées et ce depuis 1991. La proportion des dépenses sociales par rapport à la population résidente a diminué pour la première fois alors que nous assistons à une dégradation sociale due, entre autre, à la crise que nous traversons.
Il faut souligner encore que les projections démographiques 1995-2000 de l'OCSTAT sont dépassées. En effet, pour la seule année 2002, on enregistre un dépassement de 5% des prévisions de l'OCSTAT. La population aurait du être en 2002 de 405 832 habitants selon les projections, elle a été de 424 670, soit 18 838 habitants supplémentaires, c'est-à-dire environ plus 5%. Cette population devait se tasser aux alentours de 2010 pour atteindre en 2020 les chiffres de 1999, soit 400 000 habitants; rien n'est moins vrai.
Rappelons que la plus grande partie de nos dépenses correspondent à des obligations légales. Ainsi, la marge de manoeuvre est relativement restreinte pour les futurs exercices à moins de s'attaquer à des dépenses de fonctionnement avec les conséquences que l'on suppose.
Pour le reste, je vous renvoie à mon rapport et vous recommande, au nom de la majorité de la commission des finances, de bien vouloir accepter ces comptes. Enfin, qu'il me soit permis de remercier tant le service du Grand Conseil que le département des finances pour l'aide qui m'a été apportée. Je veux aussi rendre hommage à la conseillère d'Etat Martine Brunschwig Graf pour la gestion de son département pendant l'intérim.
M. Robert Iselin (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il nous incombe aujourd'hui de répondre à une demande du gouvernement, à savoir l'approbation ou la non-approbation des comptes de l'Etat pour l'exercice 2002. La mission est d'importance, car il ne s'agit pas simplement de se prononcer sur la véracité des documents comptables qui nous ont été soumis, mais bel et bien de dire, à travers l'examen d'ailleurs malaisé de ceux-ci, si l'Etat en 2002 a été convenablement géré.
La tâche d'analyser les comptes de l'Etat qui ne brillent pas par leur clarté et leur transparence est d'une ingratitude considérable, même pour un vieux briscard de la finance internationale. Elle nécessiterait, pour que l'analyse soit faite convenablement, un nombre de semaines substantiel. Pour pallier ce défaut, les députés qui nous précédés il y a quelques législatures ont porté sur les fonts baptismaux l'inspection cantonale des finances, laquelle, depuis un certain nombre d'exercices procède à une analyse approfondie des comptes de l'Etat et y consacre le temps nécessaire. Pour l'exercice qui nous occupe, l'inspection cantonale des finances a consacré 6 000 heures en chiffres ronds à l'examen des comptes. C'est dire que si une seule personne, un député par exemple, était chargée de la tâche, il y passerait trente mois de travail à condition qu'il ne prenne pas de vacances. On ne sera donc jamais assez reconnaissant à l'ICF du travail de bénédictin accompli ces derniers mois - à marche forcée peut-on dire! - pour que la commission des finances, quelques autres instances étatiques, et avant tout le Conseil d'Etat aient en main ce texte essentiel avant la discussion portant sur les comptes de l'exercice écoulé.
Le PDC, qui visiblement n'apprécie pas la rigueur financière propre à l'UDC, affirme que nous donnerions une importance biblique à ce rapport. Loin de moi l'idée de vouloir faire de M. Bordogna un nouveau Saint-Paul, l'Epître aux Romains pèse, humainement parlant, beaucoup plus que le rapport de l'ICF. Il n'en reste pas moins que ce dernier représente une analyse particulièrement perspicace de la manière dont sont observés, dans la confection des comptes de l'Etat, les principes comptables les plus élémentaires, fort bien rappelés par la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat. Je ne vous infligerai pas des citations en nombre infini, ce serait harassant. Je me bornerai à six ou sept d'entre elles.
Je cite donc l'ICF: «Si l'Etat avait déterminé son résultat dans le respect de l'ensemble des principes comptables définis par la LGAF - entendez par là a contrarioqu'elle n'est pas respectée - et notamment en tenant compte uniquement des éléments imputables à l'exercice 2002, le résultat du compte d'Etat serait un déficit d'environ 455,8 millions en lieu et place du bénéfice de 11,2 millions présentés dans les comptes publiés.»
Manque de précision de l'estimation de la production fiscale des personnes morales; absence d'évaluation précise du besoin en provision pour les débiteurs douteux de l'AFC; des subventions sont versées sans bases légales suffisantes; pas de règles claires pour distinguer les dépenses qui doivent être comptabilisées en investissement ou en fonctionnement, etc. A cela, l'ICF ajoute: «Nous avons constaté de nombreux dépassements budgétaires pour lesquels une demande préalable de crédit supplémentaire à la commission des finances n'a pas été faite. Les demandes de crédits supplémentaires a posteriori constituent une infraction aux dispositions légales en vigueur (art. 49 LGAF) de plus, elles ne permettent pas au parlement viala commission des finances d'examiner valablement la justification des dépassements et mettent dès lors le parlement devant le fait accompli.»
Subventions tacites! «L'Etat octroie également des prêts gratuits et des dotations mobilières et immobilières sans demande de contrepartie.»
Et maintenant, la cerise sur le gâteau! «Les prestations entre services administratifs ne sont pas systématiquement comptabilisées dans les comptes d'imputations internes. A contrario, les comptes d'imputations internes sont massivement employés afin de comptabiliser des opérations financières qui n'ont pas les caractéristiques d'imputations internes.» Le montant total de celles-ci est de 395,4 millions de francs pour l'exercice 2002; or la quasi-totalité de ce montant correspond à des opérations financières ne répondant pas à la définition des imputations internes.
Je m'arrête ici et je demande à cette assemblée: qui est prêt à donner l'absoute à des comptes qui font l'objet de pareilles critiques? Dans sa manie de tout vouloir arranger depuis le bon Dieu, tous les saints et les hérétiques comme moi; dans sa manie de ménager la chèvre et le chou, le PDC parle, en ce qui concerne ce rapport, de la recherche d'un formalisme qui, s'il était suivi, paralyserait totalement l'Etat, à moins d'engager des milliers de spécialistes...
Désolé, ce n'est pas l'avis de l'UDC. Convenablement menée par une poignée de gens compétents, munis des pouvoirs requis, une telle action prendrait six à neuf mois alors que la procédure actuelle - voyez le rapport de l'ICF - consiste, pour le moindre problème soulevé à créer un comité qui discute pendant des mois, pour ne pas dire des années et qui oblige l'ICF à constater que rien n'a été fait à ce jour.
Dans ce tableau d'une noirceur de seau à charbon, un développement du rapport de l'ICF ressort: ce sont les observations relatives au système de contrôle interne. Les principes rappelés sous ce chapitre - pages 104 et suivantes - sont du plus haut intérêt et apportent une note un tout petit peu positive à un rapport extrêmement décourageant, bien qu'il faille relever que la mise en place de ces procédures a été proposée en 1997 déjà, qu'un projet devait faire l'objet d'une décision émanant d'un Conseil d'Etat et qu'il devait être piloté par un ou plusieurs de ses membres. Comme le relève l'ICF quelque peu désabusée: «La situation n'a pas évolué de manière significative depuis l'exercice 1997». La chose serait en cours d'étude, d'après le département des finances, apparemment depuis sept ans...
Pour qui sait lire un rapport, une chose est certaine; il règne dans certains secteurs de l'Etat un désordre regrettable, aussi bien l'UDC ne voudrait-elle pas que cette intervention se termine sans que soit mentionnée à nouveau la proposition qu'elle a faite de s'atteler de toute urgence à la réorganisation d'un Etat, celui de Genève, qui a parmi les cantons suisses la plus grande proportion de fonctionnaire par tête d'habitant. Oh! je sais bien qu'on m'objectera trente-six arguments pour refuser toute tentative ou suggestion de réorganisation de l'Etat, depuis le rôle des communes jusqu'aux frontières que nous avons alors que le canton de Schwytz n'en a pas mais qui a par contre des routes de montagne fort coûteuses au demeurant. Il faudra, pour que nous regardions la situation en face, que nous nous trouvions dans la situation de 1936 où après quatre ans d'un régime de gauche, le gouvernement en place envisageait d'hypothéquer l'Hôtel de ville pour payer les fonctionnaires.
En attendant, pour bien marquer sa désapprobation et de la manière dont les comptes sont bouclés et de la politique dispendieuse qui est menée - si on ne m'avait pas bêtement inculqué quelques principes de politesse, j'aurais envie de dire digne des écuries d'Augias - l'UDC refusera d'approuver les compte 2002.
A titre personnel en vous parlant ce matin, je pense à la précédente titulaire du département qui, il y a un an, m'a dit, en me regardant dans le blanc des yeux - ce qui était très agréable...
Une voix. Vieux cochon!
M. Robert Iselin. Elle m'a dit que la dette de l'Etat de Genève était de 9,2 milliards de francs. Elle est aujourd'hui de 10,2 milliards, c'est-à-dire un milliard de plus.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
Le président. Il reste une minute au groupe des démocrates du centre. J'ajoute, Monsieur Iselin, qu'avant l'Epître aux Romains, c'est l'Ecclésiaste qui devrait être lu par certains députés.
M. Jean-Marc Odier (R). J'aimerais dire tout d'abord que le travail de la commission des finances n'a pas été facile et je pense qu'il l'est de moins en moins, puisque nous disposons de moins de temps qu'auparavant pour étudier deux livres d'environ cinq à dix centimètres d'épaisseur. Or, le nombre d'heures dont nous disposons est restreint de même que notre disponibilité.
Cela étant dit, tous les écarts constatés ont été très très bien expliqués par le Conseil d'Etat. J'imagine que n'importe quel comptable trouvera toujours des explications aux écarts. Le groupe radical alerte ce Grand Conseil depuis plusieurs années en soulignant que les recettes fiscales tendent à diminuer. (Brouhaha.)Même lorsque nous étions au sommet de la pyramide, nous annoncions que ces recettes allaient diminuer. Lors du débat sur le budget 2002, en décembre 2001, nous avons dit qu'il était impossible de continuer comme cela. Nous avons demandé que le Conseil d'Etat fasse des propositions pour restreindre les charges. Nous avons dit que nous ne pouvions pas voter ce budget. Nous avons proposé de reporter l'examen du budget en votant deux douzièmes provisionnels. Nous n'avons pas été suivis, ni à gauche, ni à droite, et pourtant, aujourd'hui, les comptes sont là, malgré tous les discours démagogiques qui ont été tenus, notamment celui du rapporteur de majorité de l'époque. Les comptes sont là et si nous n'avions pas augmenté la dissolution de provisions, ils ne présenteraient pas un léger boni. C'est sans compter le non-respect de l'étanchéité des exercices qu'indique l'ICF.
Je dois dire que c'est quelque chose d'assez grave, parce que ce que nous révèle le rapport de l'ICF - que nous avons reçu à la fin de l'examen des comptes en commission - c'est simplement que la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat n'est pas respectée. Si l'on respectait cette loi, ce ne seraient plus quelques millions de boni que nous aurions, mais ce seraient 450 millions de déficit.
J'aimerais donc vous demander comment nous pouvons envisager l'exercice suivant, sachant que le passage au système d'échéance pour la perception des recettes fiscales ne se reproduira pas. C'est, selon l'expression d'un conseiller d'Etat bien connu, un système one shot. L'année prochaine, nous n'aurons plus ces recettes-là. Que va-t-il se produire? Comment pouvons nous construire des budgets alors que les comptes ne sont pas justes, puisque les recettes fiscales inscrites en 2002 proviennent d'autres exercices?
Pour l'instant, je vous confirme ce que nous avions envisagé dans la déclaration finale à la commission des finances: nous ne pouvons pas voter ces comptes. La présentation des comptes du Conseil d'Etat est erronée et nous ne pouvons pas les voter. Il nous faut avoir l'engagement du Conseil d'Etat qu'il va remanier ces comptes et les représenter de manière qu'ils soient conformes à la loi. Nous ferons une proposition dans ce sens qui sera présentée par M. Kunz. Nous verrons ensuite ce que décide ce parlement: s'il est responsable ou pas; s'il entend faire respecter la loi que nous avons votée.
Mme Mariane Grobet-Wellner (S). Tout d'abord, je voudrais rassurer M. Iselin qui se demandait qui serait prêt à donner absout au Conseil d'Etat au sujet des comptes 2002. La réponse est à la page deux du rapport général de l'ICF sur le compte d'Etat 2002. L'ICF elle-même est prête à accepter ces comptes. En ce qui concerne les différences dans les recettes, qui figurent sur la même page, il s'agit uniquement de recettes qui auraient dû être comptabilisées dans les exercices antérieurs, c'est-à-dire qu'il aurait fallu faire apparaître un bénéfice plus important en 2001 par exemple.
Il faut ensuite rappeler que concernant le budget nous avions craint de ne pas avoir de budget 2002 tant l'élaboration de celui-ci fût laborieuse. Ce n'est que la veille de la séance du Grand Conseil en décembre 2001 que la commission des finances a finalement su trouver un terrain d'entente pour voter ce budget. Le Grand Conseil a fait de même ce qui nous a évité de nous infliger le régime des douzièmes provisionnels qui est un non-sens économique. Ces votes ont été précédés de nombreux amendements dans le sens d'une réduction des charges. Ils ont été proposés aussi bien par le Conseil d'Etat que par la nouvelle majorité. Le groupe socialiste n'était pas ravi - c'est le moins que l'on puisse dire - de certains de ces amendements, mais il a estimé que le budget final était globalement réaliste et acceptable. D'une manière générale, les mécanismes salariaux et la compensation du coût de la vie pour les fonctionnaires ont été respectés. Pour notre groupe, c'était une condition absolue compte tenu de la perte de pouvoir d'achat de plus de 12,8% subie par les fonctionnaires pendant les années de crise, depuis 1990. Les salaires du personnel soignant ont été revalorisés pour des motifs justifiés et l'office des poursuites et faillites a été doté de personnel supplémentaire indispensable pour assurer un fonctionnement correct. Dans un souci constant de garantir le maintien de la grande qualité de l'enseignement de nos écoles, une augmentation importante des postes d'enseignement a été prévue pour tenir compte de l'augmentation du nombre d'élèves. Les difficultés rencontrées par les services de l'office de la jeunesse n'ont en revanche été que partiellement résolues et il reste encore bien du chemin à faire pour assurer un fonctionnement correct, aussi bien pour la population que pour le personnel. L'effort supplémentaire indispensable pour assurer la qualité des soins dans les EMS et l'aide à domicile est aussi insuffisant compte tenu des besoins croissants consécutifs au vieillissement de la population. Aujourd'hui, il s'agit non pas de refaire le budget 2002, mais de déterminer dans quelle mesure il a été respecté. Pour cela, nous verrons en détail les comptes de chaque département et examinerons les raisons des écarts à l'intérieur des départements. Nous allons en quelque sorte nous assurer que le montant attribué dans le budget pour telle dépense n'a pas été utilisé pour une autre.
Les comptes 2002 sont dans leur ensemble conformes au budget bien que l'attribution à la réserve conjoncturelle soit moindre que celle prévue au budget. Elle est de 12,2 millions - pour ma part j'arrondis vers le bas, M. Velasco a fait l'inverse - au lieu de 31,8 millions. Ces dotations sont indispensables pour pouvoir faire face à des conjonctures difficiles avec des besoins accrus et urgents de la population sur le plan social conjugués avec des diminutions, également conjoncturelles, des recettes sous forme de rentrées fiscales. Il est hélas à craindre que nous devions y recourir ces prochaines années. La différence comptes-budget est de 26 millions pour les charges ce qui représente un dépassement de 4,3 pour mille. La différence pour les recettes est de 13 millions et représente une insuffisance de 2,1 pour mille. Les provisions sont maintenues à un niveau correct et sur la même base que dans le passé.
Je tiens ici à remercier et à féliciter notre nouvelle cheffe des finances, Martine Brunschwig Graf, de ne pas avoir succombé à une quelconque tentation de modifier ces bases en établissant les comptes 2002. Ceci aurait faussé l'image et rendu impossible la comparaison des chiffres, aussi bien avec le budget 2002 qu'avec les résultats des années précédentes.
En conclusion, nous constatons que les comptes 2002 respectent globalement le budget 2002 voté par notre parlement. Sous réserve des réponses quant aux écarts à l'intérieur des différents départements, le groupe socialiste se déclare satisfait et votera les comptes 2002 en vous invitant, Mesdames et Messieurs les députés, à faire de même.
Le président. La parole est à M. Catelain qui dispose d'une minute.
M. Gilbert Catelain (UDC). Je serai donc bref...
Lors du vote du budget 2002, le groupe UDC avait émis des doutes sur l'évolution de la situation économique et donc sur l'estimation des recettes. Force est de constater que le temps nous a donné raison. Les comptes 2002 sont donc le résultat du vote de ce parlement de droite, notamment de l'Entente qui en la matière ne s'est entendue sur rien. Le groupe PDC en particulier, sorte d'électron libre, que nous pourrions qualifier de neinsagerparce qu'il dit toujours non aux mesures de rationalisation et toujours non aux impôts supplémentaires. Je pense notamment au refus de ce groupe de lier l'octroi d'une subvention à des contrats de prestations. Les comptes 2002 font donc apparaître une croissance non maîtrisée des dépenses dans différents domaines pour des prestations quasiment semblables.
Je m'abstiendrai de donner des chiffres. Ils figurent dans le rapport que vous avez sous les yeux. De ce dernier, il résulte la chose suivante: les gains de productivité à Genève sont très faibles. On pourrait citer un exemple, au DIP. Il existe encore aujourd'hui, dans ce canton, 1 200 bibliothèques avec des horaires différents, etc. C'est dire que dans ce domaine, des gains de productivité peuvent être rapidement réalisés au profit des utilisateurs et des finances publiques et je crois que le DIP est en train de s'y atteler. J'invite le Conseil d'Etat à s'engager dans cette voie.
Dans la mesure où ces comptes ne nous donnent pas satisfaction, le groupe UDC les refusera.
M. Pierre Kunz (R). Au vu de la loi votée par ce parlement en 2001 sur la surveillance de la gestion administrative et financière et l'évaluation des politiques publiques, au vu du rapport de l'ICF concernant les comptes - déjà arrangés et déjà stigmatisés par l'ICF en 2001 - on aurait pu penser que, pour la présentation des comptes 2002, le Conseil d'Etat aurait modifié sa façon de travailler et qu'il aurait entrepris de se conformer à la loi. Eh bien non!
Dans son rapport relatif à ces comptes 2002, l'ICF a une nouvelle fois mis en évidence les procédés comptables illégaux et il a dénoncé l'administration des finances qui s'est jouée du principe de l'étanchéité des exercices en faisant figurer en 2002 des recettes fiscales afférentes à l'année précédente. C'est ainsi, pas seulement pour cette raison, qu'un déficit réel de 455 millions s'est transformé en un excédent fictif de 12 millions. Il s'agit là d'une nouvelle jonglerie succédant à beaucoup d'autres, notamment à celles du Conseil d'Etat monocolore. Ces jongleries, vous le reconnaîtrez, Mesdames et Messieurs, les radicaux n'ont jamais cessé de les condamner depuis 1996.
Dans le rapport issu des travaux de la commission des finances, on lit que plusieurs commissaires sont peu inquiets au sujet des dérives comptables soulignées par l'ICF. Cette absence d'inquiétude ne peut qu'inquiéter à plus d'un titre. Comment par exemple ne pas comprendre qu'élaborer un budget 2004 sur la base de comptes 2002 fortement déficitaires dans la réalité ce n'est pas du tout la même chose que de construire ce budget sur l'hypothèse fictive d'un excédent de 12,3 millions, surtout lorsque ce déficit provient d'une insuffisance de recettes.
Les propos de certains commissaires aux finances inquiètent également parce qu'ils indiquent une lecture curieuse des textes de l'ICF. Contrairement à ce que ces commissaires prétendent, l'ICF ne dit nulle part qu'il faut approuver les comptes 2002.
Une voix. Si elle le dit...
M. Pierre Kunz. L'ICF dit expressément qu'au contraire ces comptes sont approuvés uniquement moyennant la formulation de réserves. Or, ces réserves sont suffisamment graves pour que ce Grand Conseil ne les écarte pas de quelques effets de manches et de quelques formules bien trempées.
Mesdames et Messieurs, dans le contexte que je viens de rappeler et dans le but d'obliger le Conseil d'Etat à prendre en considération les recommandations de l'ICF, les radicaux ont préparé, à l'attention du Grand Conseil, l'amendement qui vous sera distribué dans quelques instants. D'une part, cet amendement concrétise les réserves qu'il convient d'apporter à l'approbation des comptes 2002 par ce Conseil et, d'autre part, il invite le Conseil d'Etat à retraiter ces comptes conformément aux recommandations de l'ICF et tout simplement conformément à la loi. Nous reviendrons sur cet amendement le moment venu et nous vous remercions d'avance de l'accepter.
M. Philippe Glatz (PDC). Tout d'abord je tiens à souligner, Monsieur le président, que vous avez pour l'UDC des largesses en terme de temps de parole dont j'ose espérer que vous les accorderez aussi au PDC.
J'entends relever l'extraordinaire travail accompli par l'administration cantonale dans le cadre de l'examen de ces comptes. Nous, commissaires aux comptes, avons pu le mesurer. Cela a été souligné ici, il est difficile d'appréhender ces comptes dans leur ensemble et de manière synthétique dans le cadre des horaires de travail qui nous sont impartis. Nous y sommes parvenus de façon satisfaisante grâce au soutien du département des finances et de Madame la présidente qui nous a apporté toutes les explications nécessaires sur ces comptes.
Aujourd'hui, nous entendons un certain nombre de groupes manifester une certaine mauvaise humeur - pour ne pas dire plus - et chercher à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, de refuser ces comptes. Or, si l'on analyse la situation, quels sont les cas de figure dans lesquels on peut refuser les comptes ? Il n'y a en effet pas d'alternative: on les accepte ou on les refuse. Le seul cas de figure dans lequel on peut les refuser, c'est lorsqu'ils sont faux. Dans tous les autres cas - les comptes étant le reflet de la réalité - on a beau être insatisfait de la réalité telle qu'elle apparaît, il ne sert à rien de la refuser; c'est un acte gratuit et qui n'est pas porteur de progrès. Par conséquent, nous ne pouvons que prendre acte du fait que les comptes qui nous sont présentés aujourd'hui sont bien réels et sont exacts.
J'ai entendu beaucoup de choses. J'ai entendu M. Kunz faire accroire que les comptes sont faux, parler de dérive comptable, de réserves graves de l'ICF. J'aimerais simplement lui rappeler que, comme dans tout organe de révision, l'ICF émet quelques réserves sur des remarques qu'elle fait quant aux procédures comptables, quant à la ventilation de certaines sommes qui devraient être inscrites ici ou là. Pour qui sait lire, comme dit si clairement M. Iselin, l'ICF écrit en page sept: «Il sied de souligner que ces observations ne concernent qu'une partie du service du SCI, procédures comptables et financières des services.» Qu'une partie, Mesdames et Messieurs !
Il y a dans ce rapport des remarques d'ordre général et des recommandations qui sont faites pour tenter d'améliorer cette présentation, mais j'aimerais rappeler à toutes et à tous qu'il faut savoir d'où nous venons. La présentation des comptes au début des années 1990, si nous écoutons les anciens membres de la commission des finances, tenait sur quelques pages. Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, vous disposez d'informations considérables, vous avez des moyens extraordinaires pour pouvoir mieux appréhender l'ensemble de l'appareil d'Etat et le travail qu'il accomplit. En plus, vous avez cet extraordinaire rapport de l'ICF qui dit des choses tout à fait intéressantes et qui seront certainement génératrices dans le futur de progrès qui s'installeront au fil des ans. Ceci, Mesdames et Messieurs de l'UDC et du parti radical, vous refusez aujourd'hui de le reconnaître par votre attitude que je qualifierais d'irresponsable, d'inélégante, de peu courtoise et de totalement inadéquate eu égard au fait que vous cherchez surtout, par cette attitude, à viser la précédente ministre des finances, Mme Calmy-Rey. Je trouve cette manière de manifester votre mauvaise humeur particulièrement inélégante, parce que Mme Calmy-Rey n'est pas là pour justifier la manière dont elle a fait établir ces comptes.
M. Pierre Weiss. Elle a suffisamment de défenseurs apparemment!
M. Philippe Glatz. Non seulement vos remarques, Mesdames et Messieurs, sont inélégantes, mais elles sont aussi fausses. Je prends un seul problème, celui des provisions. Mesdames et Messieurs, vous le dites vous-mêmes: s'il n'y avait pas eu de provisions, les comptes auraient présenté des bénéfices extraordinaires dans les années précédentes. Vous étiez pourtant bien contents d'avoir ces provisions, parce qu'elles vous permettaient de dire que les comptes de l'Etat n'étaient pas aussi bons qu'il y paraissait, qu'il ne fallait pas accorder d'augmentations de salaires, qu'il fallait retenir toutes les dépenses. Ce jour-là vous étiez très satisfaits qu'il y ait des provisions et aujourd'hui, dans un mouvement d'humeur, vous les critiquez. Ceci est une attitude irresponsable.
Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs, que refuser les comptes est un acte gravissime qui signifie que vous considérez que ces comptes sont faux. Or, nul ne peut se permettre dans cette enceinte de dire que ces comptes sont faux. C'est pourquoi, dans une attitude raisonnable - au contraire de celle de l'UDC qui est démagogique et simplement destinées à la galerie - le PDC vous recommandera d'approuver ces comptes.
Vous pouvez, Mesdames et Messieurs, faire toutes les remarques que vous voulez quant à la présentation, quant à l'amélioration de tel ou tel point, quant à la gestion. Vous avez la légitimité pour ce faire. De là à refuser les comptes, il y a un pas qu'il ne faut pas franchir.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Une fois n'est pas coutume, j'ai beaucoup apprécié l'intervention de M. Glatz. Je diverge avec lui sur une toute petite chose: M. Glatz suppose que le groupe radical et autres étaient très content qu'il y ait des réserves. Je pense que ce n'est pas le cas. Ces gens sont même très malheureux qu'il y ait eu un boni l'an dernier et durant les quatre années précédentes. Cet exercice 2002 achève une période de cinq ans de boni et je saisis cette occasion pour rendre hommage à Mme Calmy-Rey qui a apporté une très très importante contribution au redressement des finances publiques.
La réalité, c'est que ce sont ceux qui ont voté les déficits de 300, 400, 500 millions des années 1990, notamment les radicaux, qui viennent aujourd'hui nous faire la morale par rapport aux comptes 2002.
Si je devais croire ce que M. Kunz et d'autres ont dit du rapport de l'ICF, si je devais suivre leur interprétation, je pense qu'il faudrait peut-être envoyer le Conseil d'Etat à Champ-Dollon pendant un certain temps. (Rumeur.)Vous avez, Monsieur Kunz, une lecture spéciale et curieuse des comptes et de tout ce qu'il y a derrière. Moi, je veux m'intéresser précisément à tout ce qu'il y a derrière les comptes, c'est-à-dire à la politique. Ce que vous cherchez en réalité - je m'adresse au groupe UDC, au groupe radical, et peut-être à une partie du groupe libéral - ce n'est pas que les finances publiques soient redressées; ce que vous voulez, c'est quasiment réduire l'Etat à néant, c'est que l'Etat se décharge de ses responsabilités sociales, de ses responsabilités éducatives. Cela vous le dites, Mesdames et Messieurs, et cela se voit chaque jour dans vos interventions, dans les projets de lois que vous déposez. Hier, un député libéral disait qu'il faudrait mettre quarante élèves par classe. D'autres, peut-être, diront qu'il faut mettre deux malades par lit et je ne sais quoi encore.
Les représentants de l'UDC parlaient de cette terrible période, selon eux, où la gauche majoritaire a imaginé hypothéquer l'Hôtel de ville pour payer les fonctionnaires. Eh bien, Messieurs les députés de l'UDC, vous ne savez peut-être pas que la fonction publique a apporté une contribution, en 1992 et 1998, de l'ordre de 2,7 milliards, c'est-à-dire l'équivalent des dégâts causés par la gestion de la Banque cantonale.
J'aimerais maintenant rappeler, notamment aux députés qui ont participé aux travaux de la commission des finances, que, lors de toutes les auditions et de toutes les visites que les commissaires ont faites dans les départements, il est apparu de façon constante qu'il manque des effectifs. Les gens sont surchargés, les conditions de travail se sont dégradées. Parallèlement, les difficultés sociales, la précarité, les besoins de la population sont en très forte augmentation. La population elle-même a augmenté de quasiment 70 000 personnes depuis une dizaine d'années. Cela fait que l'Etat a des charges, a des responsabilités, a une mission de plus en plus lourde à assumer. Dans ce contexte, Mesdames et Messieurs les députés anti-sociaux, anti-Etat social, vous nous proposez quoi? Des centaines de millions de cadeaux fiscaux à une toute petite minorité. Je ne mets pas tout le monde dans le même sac. Je sais qu'il y a des nuances dans tous les partis, mais je m'adresse ici à ceux qui sont fondamentalement anti-sociaux. 3% des contribuables genevois, Mesdames et Messieurs, possèdent 76% de la fortune totale qui se monte à plusieurs dizaines de milliards tandis que 76% des contribuables genevois n'ont aucune fortune imposable. Systématiquement, on fait en sorte que les riches le soient encore plus et que les autres soient encore plus dans la précarité. Sur ce chemin, nous ne vous suivons pas.
Je ne vais pas entrer dans le détail des chiffres. Je dis simplement que ce que nous avons entendu ces derniers jours, que les projets de lois que vous avez présentés montrent bien qu'il y en a qui s'apprêtent à mener une guerre sociale. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que vous voulez vous attaquer aux prestations fournies à la population: santé, social, éducation, sécurité. Vous voulez vous attaquer aux conditions de travail et de vie des gens. Vous voulez mettre beaucoup de gens à la porte des services publics. Vous voulez privatiser! Je le dis aujourd'hui et nous verrons si je me trompe ou pas, mais vous aurez beaucoup, beaucoup de gens en face de vous et la population ne sera pas dupe des objectifs que vous visez!
Bref, quoi que vous en disiez, les comptes 2002 présentent un boni et ils clôturent une période de cinq ans de boni; et c'est cela qui vous dérange! Vous serez très contents quand il y aura des déficits, mais nous ferons en sorte que la population soit consciente des dangers et des dégâts que vous vous apprêtez à faire subir à la République et canton de Genève!
Le président. Il reste quatre minutes à l'Alliance de gauche.
M. David Hiler (Ve). Prenons d'abord le problème de la présentation des comptes. Sur ce point, j'imagine que le Conseil d'Etat saura défendre la légalité de ses décisions et remettra les choses au point avec toute l'autorité que l'on connaît à Mme Brunschwig Graf sur ces questions. En fait, si on en revient au fond, chacun sait de quoi il s'agit. Les comptes 2002 sont bons, parce que nous avons pu obtenir des résultats de nature extraordinaire qui viennent d'un changement comptable. Effectivement, les recettes qui auraient été comptabilisées - et non pas qui auraient dû l'être - en 2001 selon le précédent système apparaissent en 2002. A part cela, j'imagine tout de même que dans cette salle tout le monde sait à peu près lire ce genre de compte de résultat et sait en tirer les conclusions, à savoir que sur le résultat opérationnel de 2002 il nous manque 450 millions. Cela ne nous dit pas qu'en 2003 il n'y aura pas d'autres résultats extraordinaires ou d'autres moins-values. Nous savons cependant qu'en période de mauvaise conjoncture nous avons des difficultés à atteindre l'équilibre. 450 millions, on songe évidemment tout de suite aux 350 millions qui viennent de la baisse de 12% des impôts. On a donc constaté d'un point de vue purement objectif que lors d'une période de haute conjoncture la baisse de 12% était parfaitement supportable et qu'en période de conjoncture maussade, elle ne l'est pas. Il faudra donc que ceux qui l'ont voulue vivent avec et proposent les solutions qu'ils voudront, pour autant qu'ils arrivent à se mettre d'accord, entre partisans des baisses fiscales, sur des solutions concernant les dépenses...
Pour notre part, c'est évidemment avec inquiétude que nous regardons vers l'avenir. La crise n'est pas en train de se résorber, ni au niveau international, ni au niveau genevois. La courbe du chômage semble effectivement rejoindre les maximaenregistrés pendant les années 1990. Ceci ne nous fait pas plaisir, vous le pensez bien, Mesdames et Messieurs, mais nous ne pensons pas pour autant qu'il faille se précipiter sur des mesures comptables visant à réduire très rapidement le déficit. Parce qu'au fond, si nous le faisions, cela deviendrait un jeu sans fin. Aussitôt qu'un équilibre sera rétabli, certains demanderont une nouvelle baisse d'impôt. Le paquet est d'ailleurs déjà déposé à la commission fiscale. On peut économiser 300 à 400 millions aujourd'hui. Le Conseil d'Etat peut se livrer à l'exercice, je me réjouis de voir ça... Immédiatement après, on voudra, pour d'excellents motifs, des baisses d'impôt pour 300 à 400 millions. M. Blanc et d'autres feront pleurer Margot sur le sort des pauvres contribuables qui se retrouvent dans la misère à cause du fisc. En ce qui nous concerne, nous trouvons ce jeu excessivement dangereux et, par rapport à la maîtrise des dépenses, nous ne croyons pas que le problème réside essentiellement dans des prestations qui seraient inutiles ou dans des dépenses mal placées.
Nous pensons fondamentalement que ce qu'il faut améliorer à l'Etat de Genève, c'est la capacité à mesurer l'activité de chaque service et de chaque association subventionnée. Ce qu'il nous faut, c'est donc améliorer le management- excusez-moi du terme - de l'Etat; c'est-à-dire qu'il faut fixer les tâches, savoir combien elles coûtent, combien elles coûtent dans d'autres cantons et savoir à quoi tient la différence. Est-ce qu'elle tient à la différence de niveau de vie qu'il peut y avoir entre deux cantons? Est-ce qu'elle tient à une mauvaise organisation? Auquel cas, il y a quelque chose à faire. Cette option-là exige la comptabilité financière intégrée et des outils analytiques que nous n'avons pas encore. Elle exige des contrats de prestations, non seulement pour les associations, mais aussi pour les services de l'Etat. Cela non plus nous ne l'avons pas encore. Si on remet le couvert des années 1990, avec des baisses linéaires, comme le proposent MM. Kunz et Iselin...
M. Pierre Kunz. Pas du tout!
M. David Hiler. Bien sûr ! A l'évidence, si cette voie est choisie, nous rencontrerons un blocage total au sein de l'appareil d'Etat sur une quelconque réforme nécessaire. Nous aurons une paralysie, un déficit et nous aurons - M. Mouhanna a raison - des conflits extrêmement durs et, M. Mouhanna aurait pu l'ajouter, lui comme moi en seront. Il n'y a aucune raison de faire payer à un certain nombre de gens, qu'ils soient dans les associations ou dans la fonction publique, le fait que certaines forces politiques veulent constamment réduire les moyens de l'Etat. Nous ne sommes pas du tout dans la situation des années 1980 où c'était une crise qui entraînait véritablement les difficultés. Aujourd'hui, nous étions redevenus solides et ce sont bel et bien les baisses fiscales qui produisent des difficultés financières.
En ce qui nous concerne, nous jugerons, aujourd'hui et pour l'avenir, la capacité du Conseil d'Etat à organiser l'Etat de manière que l'on puisse mesurer l'efficacité de chaque service, de chaque subvention, sachant qu'il s'agit là d'un chantier de trois ou quatre ans. C'est sur cette base, et sur cette base seulement, que nous accepterons des modifications, des transformations qui certainement amélioreront le rapport entre les prestations fournies et les coûts.
Ce n'est pas, à l'évidence, ce que propose l'UDC. Pour les discours catastrophistes, Monsieur Iselin, vous êtes très fort! Mais j'aimerais entendre les solutions que vous proposez. Les seules que j'ai entendues, c'était hier, par la bouche de M. Marcet, sauf erreur, qui proposait de supprimer les subventions à un certain nombre d'associations oeuvrant dans le domaine social dont l'activité serait mal maîtrisée par l'Etat - il faudra cela transmettre à M. Unger. Eh bien on se réjouit de voir ça! On se réjouit de voir ces propositions concrètes. On se réjouit de voir quel groupe social vous visez: est-ce que ce sont les retraités, les gens qui sont à l'assistance, les gens qui ont le sida? Nous sommes très intéressés de vous voir venir, mais pour le moment nous n'avons rien entendu en commission des finances. Monsieur Iselin, vous le savez très bien!
Au sujet du groupe radical qui, comme au niveau national d'ailleurs, devient un très joli clone du groupe UDC, nous attendons avec autant d'impatience ses propositions. Venant, je dois dire du parti qui aux dernières élections à encore soutenu M. Gérard Ramseyer dont aujourd'hui on mesure l'ampleur des dégâts qu'il a causés. La seule excuse de Mme Spoerri pour présenter son département - et elle est valable - c'est que son héritage est terrible. Ce groupe donc, qui jusqu'à la fin a soutenu son magistrat, vient nous donner des cours de bonne gestion, des cours d'économie. C'est simplement, Mesdames et Messieurs, invraisemblable.
(Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L). Lorsque ce parlement a été appelé à se prononcer sur le budget 2002, le groupe libéral avait dit ce qu'il en pensait. Il avait dit qu'il était mauvais; il avait dit qu'il était imprévisible quant à ses recettes et que la stabilité de la dette pouvait être mise en question. Le groupe libéral avait donc refusé le budget 2002. Aujourd'hui, les comptes pour la même année 2002 arrivent. Lors de notre intervention en débat de préconsultation, nous les avions considérés à la fois comme inquiétants et incertains. Après un examen attentif de ces comptes, après une large consultation de la députation libérale, nous sommes arrivés à la conclusion que, par un acte politique important, nous devions refuser ces comptes.
Deux arguments essentiels nous ont amenés à cette conclusion. Je vais les préciser, mais j'aimerais d'abord nuancer deux interventions précédentes. Premièrement, nous n'avons pas eu des boni durant les cinq derniers exercices, soit durant la période où l'ancienne responsable des finances était en charge. Il y a eu trois boni et deux années de déficit. Deuxièmement, on peut parler de guerre sociale, mais je crois qu'avant d'utiliser de grands mots il s'agira simplement de savoir, face aux décisions d'affectation des ressources publiques par ce Grand Conseil, ce que la population en pense. Si elle accepte des diminutions de recettes, il nous incombera de choisir les domaines dans lesquels celles-ci peuvent être répercutées. Je remarque au passage que l'on peut faire pleurer Margot, mais que personne n'a relevé, parmi les secteurs dans lesquels des diminutions de dépenses peuvent être effectuées, celui des transports. Il n'y a pas que le social. (Rumeur.)Il faut ne pas être trop sélectif dans le panorama des activités de l'Etat. Il y en a plusieurs. Il y en a d'ailleurs d'autres que je vous laisse le soin de citer.
En ce qui concerne les deux arguments essentiels pour lesquels le groupe libéral entend refuser ces comptes, il y a d'abord la dette. Vous vous rappelez peut-être, Mesdames et Messieurs, que lors des débats que nous avons eus le 13 décembre 2002, M. Iselin était intervenu cette question. Il avait dit qu'elle atteignait 10 voire 12 ou 13 milliards. La précédente responsable du département lui avait répondu ceci: «La dette du canton n'est pas de 10, 12, 13 ou 14 milliards, mais de 9,2 milliards.» Je m'étonne qu'en date du 13 décembre, cette affirmation ait pu être proférée. Quelques jours plus tard l'«Agefi» est revenu sur la question avec des chiffres faisant état d'une augmentation de la dette de 800 millions. On savait pertinemment que la dette n'était pas de 9,2 milliards; pourquoi l'avoir dit devant ce Grand Conseil, pourquoi avoir trompé ce Grand Conseil? Au passage, j'ajouterai que cette intervention lénifiante s'ajoute à une gestion de la dette, en matière de SWAPS notamment, qui n'est pas particulièrement parcimonieuse.
Par ailleurs, il faut parler de la gestion comptable. L'ICF a été amplement citée auparavant. L'ICF a écrit plusieurs choses. Dans son rapport, nous trouvons notamment qu'au cours des cinq derniers exercices, si nous en faisons le total, il y a pour 440 millions de différences entre le bilan de l'Etat tel que présenté au Grand Conseil et le bilan tel qu'il ressort des comptes réajustés par l'ICF. Ce montant de 440 millions est l'addition de 27 millions de déficit en 2002, de 110 millions de boni en 2001, de 108 millions de boni en 2000, 198 millions en 1999 et 50 millions en 1998. Cela montre bien qu'il y a des inexactitudes, ou en tout cas des divergences, entre la présentation des comptes par le Conseil d'Etat et par l'ICF. Ces divergences vont cesser puisque pour la première fois des réponses sont données dans le rapport de l'ICF par la nouvelle responsable des finances. Cette dernière nous indique la volonté du Conseil d'Etat de mettre fin à l'existence de ces divergences, sinon aux raisons de celles-ci. Je crois que nous devons lui en savoir gré.
J'ai pour ma part une petite divergence d'interprétation avec mon collègue Glatz. Celui-ci était absent lorsque M. Bordogna est venu expliquer à la commission des finances que les auditeurs avaient une échelle à quatre degrés pour apprécier des comptes.
M. Philippe Glatz. J'étais là.
M. Pierre Weiss. Alors vous l'avez mal entendu. Dans cette échelle à quatre degrés, il y a l'approbation sans réserve, l'approbation avec critiques, l'approbation avec réserves et le refus. L'ICF en était au troisième degré. C'est bien montrer, pour un organe interne à l'Etat, sa préoccupation quant à ces comptes. En ce qui nous concerne - qui ne sommes pas internes à l'Etat, mais qui essayons de diriger l'activité de l'Etat dans un sens qui convient au souhait de la population - il est nécessaire de franchir le quatrième degré et par conséquent d'arriver au refus. En d'autres termes, vous comprenez, Mesdames et Messieurs, qu'il y a un besoin de transparence, qu'il y a un besoin de règles respectées et acceptées. Je crois que nous nous dirigeons, du point de vue de cette deuxième raison fondamentale de refus de ces comptes, vers des années différentes. La direction qui est prise actuellement par le département des finances laisse bien augurer en ce sens.
J'ai encore deux arguments complémentaires. En premier lieu, il y a la différence entre les dépenses telles qu'elles avaient été prévues au budget et celles inscrites dans les comptes. Cette différence n'est pas acceptable et il y a certains secteurs qui en sont particulièrement responsables dans le domaine des subventions. C'est la raison pour laquelle plusieurs partis ont décidé de déposer un projet de loi concernant les subventions.
En second lieu, il y a l'incertitude quant aux recettes. Nous ne savons toujours pas quelles sont les recettes exactes qui doivent être inscrites aux comptes 2002. Je ne parle même pas de ce qui se passera avec le budget 2003 dont le caractère fantaisiste avait sauté aux yeux de beaucoup.
En d'autres termes, et j'aimerais conclure ainsi, le moment est venu de davantage de rigueur. Une rigueur qui corresponde... ou plutôt qui correspond aux voeux de la population. Le projet de loi sur les subventions que j'ai mentionné y répond. Différents actes législatifs, concernant notamment les dépenses ou l'endettement, tâcheront d'y répondre. Enfin une réflexion sur le catalogue des activités de l'Etat et sur les priorités à y mettre devra elle aussi contribuer à rapprocher les dépenses des recettes que les contribuables sont prêts à payer, car je crois que ceux-ci sont au fond nos grands mandants. Nous ne devons pas l'oublier et c'est en leur nom que j'aimerais conclure cette intervention.
M. Albert Rodrik (S). Permettez-moi, Mesdames et Messieurs, de commencer par une note un peu légère... Je suggère que l'on organise à l'avenir des cours de lecture du rapport de l'inspection cantonale des finances! en premier lieu pour les nouveaux membres de la commission des finances et peut-être aussi pour les anciens. Je trouve qu'il y aurait profit. Les outils de lecture nous manquent. Une ancienne cheffe du département de l'instruction publique devrait comprendre ce souci pédagogique. (L'orateur est interpellé.)
J'étais à la même audition de l'ICF que M. Weiss. Nous étions à l'échelon deux...
M. Pierre Weiss. A l'échelon trois!
M. Albert Rodrik. Non, deux! (L'orateur est interpellé.)Alors je vous concède l'entresol entre deux et trois, mais nous étions plutôt au deux qu'au trois... Ceci dit, qu'est-ce que l'on nous demande? De faire un exercice théorique consistant à embellir 2001 pour noircir 2002! Mais que n'aurait-on dit? Que Mme Calmy-Rey, prestidigitatrice, a donné un coup de bichon sur 2001 pour rendre moche, moche, moche 2002, alors qu'elle n'est plus là? Allons, allons, soyons raisonnables!
Quelle est la principale leçon de ces comptes? C'est que nous sommes dans l'antichambre de temps extrêmement difficiles. Nul n'exposera cela mieux que M. Hiler ne l'a fait hier soir, sans d'ailleurs ébranler beaucoup la majorité spoliatrice qui s'était formée; mais il l'a extrêmement bien décrite. Pourquoi sommes-nous dans l'antichambre de temps difficiles? Parce que, le temps de faire un budget, les conjonctures économiques changent. Je vous rappelle qu'il faut, entre les premières instructions aux services et la mise sous toit par le Grand Conseil, plus de douze mois. Aujourd'hui, l'économie mondiale n'a cure de ces rythmes et de ces manières de faire. On pourrait, Mesdames, Messieurs et chers collègues, garder nos énergies pour le budget 2004, qui sera particulièrement difficile pour de nombreuses raisons, au lieu de chercher de mauvaises querelles.
Je me demande si la grande intelligence de l'Entente et de ses alliés n'est pas de faire rentrer dans les faits le scénario que nous a décrit notre collègue Mouhanna et qui pourrait effectivement constituer une réalité. Ceux qui se souviennent de l'année 1992 sauront que c'est tout à fait possible. Et comme l'a dit M. Hiler, nous saurons bien de quel côté nous sommes dans ce genre de chose.
Maintenant, permettez-moi de rappeler, en guise d'autocritique, un épisode de juin 1998. La nouvelle majorité de l'Alternative voulait, comme certains dans cette salle, pour montrer sa désapprobation de la gestion du gouvernement monocolore, refuser les comptes de 1997. Nous avons dû tirer quelques sonnettes d'alarme au sein de l'Alternative et ramener les gens à la raison. Refuser des comptes - pas un budget, mais des comptes ! - signifie que l'on a fait de la cavalerie dans les rubriques, que l'on s'en est mis dans les fouilles. C'est de cela qu'il s'agit. Et il y a pire. Je me souviens encore de mes collègues de l'Alternative que j'ai dû convaincre et qui me tenaient le discours suivant: «Mais ce n'est rien du tout! Refusons les comptes! On va donner un exemple et on va sanctionner politiquement!». Non, Mesdames et Messieurs, cela ne se passe pas ainsi! Refuser des comptes, cela a des conséquences pour l'Etat de Genève. Cela veut dire qu'on le paralyse sur les marchés financiers, au niveau de son fonctionnement et de sa réputation. Ce n'est donc pas anodin. Je vous rappelle cela en guise d'autocritique. C'est ce qu'a cru devoir faire l'Alternative. Elle a cependant rebroussé chemin au dernier moment, s'est récupérée et ne l'a pas fait.
Non, Mesdames et Messieurs! Je vous le dis amicalement et sincèrement, vous ne sanctionnerez pas la gestion de Mme Calmy-Rey, vous ne sanctionnerez pas tel ou tel dépensier, mais vous sanctionnerez l'Etat de Genève, la collectivité genevoise. Si vous avez envie de vous livrer à ce genre d'exercice doctrinaire, faites-le! Pour notre part, Mesdames et Messieurs, et surtout monsieur le président du Grand Conseil, nous demanderons l'appel nominal sur le vote final, en particulier du budget d'investissements. Ce petit exercice avait été fait pour le budget 1998 par notre collègue Champod, alors chef de groupe. C'est très étonnant ce que l'on voit lorsqu'on demande l'appel nominal sur les budgets d'investissements. Sur les comptes, c'est bien sûr moins spectaculaire.
Voilà, Mesdames, Messieurs, nous disons que ces comptes sont bons, mais qu'ils ne présagent rien de bon...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Albert Rodrik. Je vais conclure. Gardons donc nos énergies pour ce qui nous attend cet automne et ne vous laissez pas aller aux chimères de sanctionner Dieu sait qui, car c'est bien l'Etat de Genève que vous sanctionnerez et vous en porterez la responsabilité ! (Applaudissements.)
M. Claude Blanc (PDC). Combien de temps est-ce qu'il me reste?
Le président. La parole est à M. Spielmann.
M. Claude Blanc. Non, non! Je veux simplement savoir combien de temps il me reste!
Le président. Il vous reste cinq minutes et demie, Monsieur.
M. Claude Blanc. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le débat d'aujourd'hui porte beaucoup plus sur le rapport de l'inspection cantonale des finances que sur celui de la commission des finances. Or, je veux tout de même vous rappeler que ce rapport de l'ICF nous a été remis à la veille du vote final en commission sur le compte d'Etat. Nous avons donc procédé au vote après quoi nous avons consacré une séance à l'examen du rapport de l'ICF.
Alors ce rapport, Mesdames et Messieurs, puisqu'on ne parle que de ça, ce rapport soulève un certain nombre de problèmes et notamment celui de la véracité des comptes annuels les uns après les autres. Ce n'est pas nouveau et je me souviens d'avoir fait remarquer en commission des finances il y a deux ans que j'avais de la peine à accepter ce genre de comptabilité avec des réserves et des provisions. On m'avait expliqué - et tout le monde avait l'air d'accord à ce moment-là - qu'il était normal de lisser un peu les comptes, parce qu'un budget est un budget - je crois que c'est M. Rodrik qui l'expliquait - et que la conjoncture a d'autres lois qui ne coïncident pas forcément. La véritable question qu'il faudrait se poser, c'est si notre budget ne devrait pas être pluriannuel. Est-ce que nous ne devrions pas trouver un moyen d'étaler les recettes et les dépenses sur plusieurs années, en sachant qu'une année ce sera bon et une autre moins? C'est d'ailleurs pratiquement ce qui se fait, mais ce n'est pas fixé ainsi juridiquement. C'est ce qui fait dire à certains que les comptes sont falsifiés. En réalité, les comptes sont lissés, c'est exact. Personnellement, je le regrette, je l'ai toujours regretté, mais je suis bien obligé d'admettre que si le véritable boni était apparu l'an dernier, on aurait eu deux attitudes. Je les connais assez. D'une part mes collègues d'en face - si j'ose dire - qui auraient voulu dépenser cet argent; d'autre part mes collègues de gauche - si j'ose dire aussi - qui auraient proposé de diminuer les recettes. C'est d'ailleurs un petit peu ce qui a été fait quand même...
Bref, il est facile aujourd'hui, sur la base du rapport de l'inspection cantonale des finances, de prétendre que les comptes sont faux. En réalité, ils sont justes sur plusieurs années. C'est à cela qu'il faudra qu'on s'attèle: prévoir nos budgets d'une manière quadriennale au moins.
J'ai beaucoup aimé entendre M. Mouhanna s'attaquer à l'UDC tout à l'heure. Hier soir vous utilisiez l'UDC pour satisfaire vos besoins... (Rires et exclamations.)C'est à ce niveau-là que je l'aime, M. Mouhanna. Hier soir donc vous utilisiez l'UDC et aujourd'hui vous la vomissez. Moi personnellement, vous savez ce que je pense des méthodes politiques de l'UDC. Je ne varie pas. Les gens ne sont pas mes amis quand j'en ai besoin et mes ennemis quand ça m'arrange. Je ne varie pas dans mes positions. Monsieur Mouhanna, je pense que vous aurez peut-être l'occasion de regretter certaines habitudes.
Maintenant, je m'occuperai de l'UDC plus particulièrement. Hier soir à 21h, l'UDC nous présentait un projet de loi, le 8989, prévoyant 70 millions d'investissements. D'un coup d'un seul! Cela correspond au cinquième des investissements annuels de la République. Cette UDC qui a refusé le budget et qui refuse les comptes; qui a refusé le budget d'investissements et qui refuse les comptes d'investissements, cette UDC qui prétend que nous dépensons plus que ce que nous pouvons assumer, c'est la même qui vient nous proposer 70 millions de dépenses d'un coup d'un seul. Je l'ai déjà dit hier soir, mais je le répète parce que la nuit m'a renforcé dans ma conviction: cette proposition ne méritait même pas d'aller en commission et j'ai trouvé étrange qu'il n'y ait même pas de réaction. Vous savez très bien, Mesdames et Messieurs, que ce projet n'est pas étudiable. C'est un coup d'épée dans l'eau! Un coup médiatique et vous avez tous accepté de le renvoyer en commission. Eh bien, Mesdames et Messieurs, vous en tirerez les conséquences! Moi je dis que l'UDC est totalement inconséquente. L'UDC est malhonnête, parce qu'elle refuse les comptes au prétexte que l'Etat dépense trop et que, dans le même temps, elle propose de dépenser le cinquième des investissements de l'Etat dans un seul projet de loi mal foutu et mal étudié. Oui, Mesdames et Messieurs de l'UDC, vous êtes malhonnêtes, vous n'êtes dignes ni de confiance ni d'intérêt.
(Vifs applaudissements.)
Le président. La parole est à M. Jean Spielmann auquel il reste quatre minutes avec un léger boni.
M. Jean Spielmann (AdG). Tout d'abord j'aimerais préciser une chose qui n'a pas été mentionnée jusqu'à présent. Les questions et les remarques de l'ICF expriment très clairement un problème que nous n'avons pas résolu. Les orateurs précédents ont très bien lu les documents, mais ils les interprètent à leur manière. M. Weiss est encore revenu sur la question de l'incertitude des résultats fiscaux de cette année. C'est qu'en fait, ce qui a changé, c'est le principe d'échéance. Cela signifie qu'on ne calcule plus, dans les recettes de l'Etat, les rentrées fiscales au moment où elles arrivent, mais elles sont inscrites au moment où elles sont échues. Autrement dit, on inscrit maintenant les recettes fiscales produites par ceux qui paient les impôts maintenant. Dans un certain délai, quand tout aura été encaissé, on les mettra dans les comptes de l'année passée. C'est exactement ce qui est arrivé pour 300 millions parmi les 440 millions dont parle l'ICF. Ce ne sont pas des malversations, ce ne sont pas des fautes, c'est une décision politique qui est prise et cette décision pose un problème d'étanchéité entre les exercices. On a décidé de replacer certaines sommes dans les comptes de l'année précédente et l'ICF nous dit que cela pose problème parce que, dans le fond, les comptes de 2002 ne sont pas exacts. Bien sûr! En 2002, on a encaissé 441 millions sur les impôts payés et on nous dit il aurait fallu les mettre dans les comptes de l'année passée en fonction du principe d'échéance. On peut bien le faire comme cela, mais ça ne change rien au résultat!
Mesdames et Messieurs les députés des bancs d'en face, vous cherchez, par des arguties de ce genre-là, à faire croire aux gens que les comptes ne peuvent pas être acceptés, parce qu'il y a des malhonnêtetés. Voilà la politique que vous mettez en place. C'est vous qui êtes malhonnêtes! Vous êtes malhonnêtes parce que vous savez ce que vous dites et vous savez ce qui est fait. Dans les documents, vous n'avez qu'à relire les pages deux et trois - inutile de tout lire - les pages deux et trois vous permettront de comprendre. En fait, vous avez compris, mais vous falsifiez la réalité des faits en venant dire ici des absurdités!
Le fond du problème est beaucoup plus clair. Au niveau national comme au niveau cantonal, la liaison des partis UDC, radical et libéral est évidente. Heureusement d'ailleurs - et c'est peut-être une réflexion que vous pourriez faire d'ailleurs, Monsieur Kunz - que les radicaux ne sont plus aux affaires publiques depuis un moment dans ce canton. Vous vous référiez à 1996, Monsieur, je me permets de vous rappeler que c'est effectivement une période où l'on faisait plus de 500 millions de déficit par année! Et c'était votre gestion! Tout à l'heure, M. Hiler vous en a précisément expliqué les conséquences. C'est peut-être bien pour cette raison que la population genevoise ne vous élit plus aux affaires.
Quelles sont les propositions que vous avez faites, Mesdames et Messieurs? Revenons sur la coalition des trois partis, UDC, radicaux, libéraux. Vos propositions, ce sont les théories du livre blanc de M. de «Pourri»... (Brouhaha.)...ce sont ces théories que vous reprenez constamment et que vous appliquez. Ce qui est pire, c'est qu'à cause des décisions prises ces derniers mois sous l'impulsion des radicaux aux Chambres fédérales, les recettes fiscales seront réduites de 2,5 milliards en faisant des cadeaux aux propriétaires d'immeubles, en attaquant de nouveau les familles et en proposant des cadeaux fiscaux aux milieux financiers et aux banquiers.
Il y a un exemple qui illustre bien ce qui arrivera si on continue à porter aux affaires publiques les gens qui sont responsables de cette politique. Cet exemple, c'est Swissair. On a réuni tous les meilleurs spécialistes des finances radicaux de ce pays pour gérer une entreprise. Ce sont des gens qui sont quasiment, aujourd'hui, traités comme des irresponsables et qui malheureusement sont partis avec des millions de francs dans la poche après avoir réussi la plus belle et la plus grande des faillites de tout le pays.
Le président. Il est temps de conclure.
M. Jean Spielmann. C'est à cela qu'il faut s'attendre si on continue avec votre politique de baisse d'impôts, Mesdames et Messieurs. On verra les conséquences de ces 2,5 milliards de diminution pour le canton de Genève. Ce sont 240 millions pour le canton de Berne! Et vous allez continuer! Une motion a été votée aux Chambres fédérales par les radicaux encore une fois...
Le président. Monsieur Spielmann, je vous prie de conclure!
M. Jean Spielmann. Ces 2,5 milliards ne sont pas encore suffisants pour vous, Mesdames et Messieurs... Je comprends que ça vous gêne, Monsieur le président, que j'attaque les radicaux, mais vous devez faire appliquer le règlement. (Vif brouhaha.)
Le président. Je suis là pour faire respecter le règlement.
M. Jean Spielmann. Ces 2,5 milliards de cadeaux fiscaux, vous allez les doubler. Oui! Il est prévu, par une majorité des Chambres fédérales, de doubler cette diminution des recettes!
Le président. C'est invraisemblable! Vous squattez le micro, Monsieur.
M. Jean Spielmann. M. Weiss affirmait encore tout à l'heure, et je conclurai par là, que c'est insuffisant de baisser les impôts et qu'il faut poursuivre dans cette voie. Votre politique, la vraie, c'est que vous voulez couper les ailes de l'Etat social et arranger la haute finance. Hier soir, ici même, vous avez encore fait des cadeaux fiscaux et vous continuez à baisser les impôts, Mesdames et Messieurs. M. Weiss nous a dit qu'il fallait d'abord baisser les impôts et qu'on verrait ensuite où couper dans les dépenses.
Mesdames et Messieurs, un proverbe chinois dit qu'il ne sert à rien d'aboyer quand on est incapable de mordre. (Rires.)Au moment du budget, vous êtes incapables de faire des propositions concrètes pour réduire les dépenses, alors ne venez pas ici couper les recettes. C'est mettre la charrue avant les boeufs et c'est mener une fausse politique qui ne vous conduira nulle part.
Le président. Vous avez largement outrepassé votre temps de parole, Monsieur le député. La parole est à M. Pierre Weiss.
M. Pierre Weiss (L). J'aimerais revenir sur certaines interventions en quatre remarques. Tout d'abord sur celle de M. Rodrik au sujet de la dégradation du ratingde l'Etat. Ce n'est pas, Monsieur le député, le refus ou l'acceptation des comptes qui contribue à cette dégradation. C'est là une pure spéculation que vous faites. Ce qui y a contribué, c'est l'augmentation de la dette, alors que celle-ci était annoncée comme stable.
Ensuite, il faut dire que si nous refusons ces comptes, c'est principalement en raison de cette évolution non contrôlée de la dette et non pas à cause du rapport de l'ICF. Ce dernier est un élément supplémentaire important, mais ce n'est pas la raison principale.
En outre, il est important que ce Grand Conseil inscrive dans les budgets annuels des recettes qui soient conformes aux demandes de la population. La population est là, de temps en temps, pour sanctionner tel ou tel écart dans un sens ou dans un autre. Je ferai simplement remarquer qu'actuellement, la population souhaite une réduction du poids de la fiscalité. C'est cela que nous entendons continuer à faire et c'est en fonction de cette volonté de la population que nous modifierons le catalogue des prestations de l'Etat.
Enfin, à l'attention de l'ensemble des partis de l'Entente, je crois qu'il faut bien se rendre compte que nous ne devons pas nous laisser aller à certaines disputes intestines. Il y a des différences d'appréciation en fonction de nos sensibilités, mais les uns et les autres nous avons pris des engagements. Nous sommes comptables de ceux-ci devant la population et elle saura s'en rappeler.
Le président. Je suis désolé pour les orateurs du PDC qui souhaitent intervenir, mais votre parti a épuisé son temps de parole. Seuls ont encore du temps de parole disponible les Verts et les radicaux. La parole est à Mme Brunschwig Graf, car M. Glatz n'a plus de temps de parole.
M. Jean Spielmann. Il a sept minutes!
Le président. Non Monsieur! Il y a des accords entre les chefs de groupe. Je sais bien que vous vouliez revenir dessus hier, mais c'est encore moi qui donne la parole.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je vois que ces comptes sont une occasion de s'échauffer. J'allais dire que c'est regrettable vu la difficulté que nous avons à maintenir une température correcte dans cette salle...
Je ne vais pas entrer dans tous les détails et dans toutes les explications que j'ai eu l'occasion de donner en conférence de presse et en commission des finances. J'aimerais simplement rappeler ici un certain nombre de principes qui ont guidé la clôture de ces comptes 2002. Je veux, préalablement, rappeler aussi ce que l'ICF dit pour l'opposer à ce que vous souhaiteriez lui faire dire, Mesdames et Messieurs. Tout d'abord, personne semble-t-il n'a cité l'ICF - mais je n'y étais pas donc je me réfère au procès-verbal de l'audition - lorsqu'elle affirme que, sans être totalement satisfaite de toutes les pratiques, il lui apparaissait que le canton de Genève était le meilleur canton suisse en ce qui concerne la visibilité et le reflet de la réalité économique. L'ICF l'a dit dans la même séance où elle a expliqué aux députés les raisons pour lesquelles un certain nombre de choses devaient être corrigées.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, il y a au moins une chose que vous pouvez reconnaître pour la clôture de ces comptes 2002, ce sont les efforts du Conseil d'Etat pour se conformer aux demandes de l'ICF. Je le dis surtout pour l'Union démocratique du centre qui exprimait, dans une forme plus ou moins fleurie, son inquiétude par rapport à la légalité. C'est une chose de répondre simultanément à toutes les exigences de la LGAF et c'en est une autre de répondre aux demandes de l'ICF. Mesdames et Messieurs, c'est la première année où les députés ont disposé, pour chaque département, du rapport des comptes au sujet des départements avant le vote final de la commission des finances. C'est la première année où les commissaires ont disposé du rapport global de l'ICF sur les comptes de l'Etat avant le vote final de la commission des finances. Ceci explique cela: comme vous disposez, Mesdames et Messieurs les députés, de ces informations plus tôt, vous pouvez en débattre durant le débat du vendredi matin à 8h !
N'inversons pourtant pas les rôles. Ce qui est «reproché» dans ce rapport, c'est à peu près la moitié de ce qui est dit dans les rapports précédents. Tout simplement parce que cette année, un certain nombre de choses ont été prises en compte, parce que le Conseil d'Etat a pris position très clairement sur ce qu'il entendait faire par rapport aux recommandations de l'ICF - cela aussi c'est une première, puisque désormais la loi nous y oblige.
Moi, je pense qu'on peut regarder le verre à moitié vide ou à moitié plein par rapport aux efforts à accomplir. J'aimerais vous poser un dilemme, Mesdames et Messieurs les députés, en ce qui concerne les recommandations de l'ICF. Celle-ci dit elle-même qu'il fallait changer de méthode comptable s'agissant du principe d'échéance et du principe de caisse. C'était une demande de l'ICF depuis plusieurs années. Effectuer ce changement implique un effet de seuil, mais ne nous permet pas de réécrire les comptes des années précédentes. Le fait même de se plier à la loi implique, d'une certaine façon, que la transparence des comptes comparables pour les années précédentes ne peut pas être respectée. Est-ce que vous connaissez, Mesdames et Messieurs les députés, des entreprises qui réécriraient leurs comptes des exercices précédents, année après année. Vous n'en connaissez aucune! Il se trouve qu'un modèle comptable public ne permet pas de faire les choses différemment, tout comme il ne permet pas de laisser en suspens des recettes définitives qui doivent être inscrites lorsqu'elles sont constatées. Lorsqu'on est en postnumerando on les constate deux ans plus tard. Que devons-nous faire alors? Les ignorer? Ressortir les comptes d'il y a deux ans et les modifier? On peut aussi trouver des solutions, c'est ce dont nous avons essayé de discuter et que nous allons mettre sur pied avec l'ICF. Il n'est pas facile de répondre en même temps à toutes les exigences de la loi. L'ICF elle-même le reconnaît. Elle indique qu'il faut trouver des formules, mais cela n'est pas simple.
Lire le rapport de l'ICF, c'est reconnaître honnêtement aussi qu'il y a plusieurs principes dans la loi qui peuvent se contrecarrer lorsqu'il s'agit de les appliquer tous en même temps.
L'engagement que prend le Conseil d'Etat, et c'est le plus important, c'est de faire en sorte que, là où c'est possible, notamment en matière de provisions, les règles soient désormais lisibles, constantes, durables et comparables. Il ne devrait pas y avoir de provisions, faites uniquement pour empêcher les députés de dépenser davantage. Les provisions doivent respecter des principes établis. Il faut bien dire encore une chose: lorsque nous passons en postnumerando, cela demande un travail différent. Cela demande des provisionnements différents et cela demande aussi de réévaluer totalement la provision. Nous faisons tout cela et si vous lisez le rapport de l'ICF, vous verrez qu'il rend hommage à cette décision du Conseil d'Etat au moment du bouclement des comptes.
Pour ces raisons, quel que soit votre vote sur ces comptes, je me refuse à penser que vous estimiez que ceux-ci violent la loi. J'ai peine à croire qu'un groupe quelconque de ce Grand Conseil imagine volontiers que le Conseil d'Etat et tous ses fonctionnaires soient passibles d'incriminations pénales, au seul prétexte que vous avez envie de livrer un combat politique dans ce parlement. Je ne crois pas pouvoir interpréter les menaces de refus de cette façon. Je pense qu'aucun groupe raisonnable dans ce parlement n'envisage les choses ainsi. Ce d'autant plus que certains groupes qui refusent les comptes aujourd'hui se sont abstenus l'année dernière où les remarques de l'ICF étaient identiques, voire plus nombreuses. J'en déduis que, sur la voie du progrès, vous admettrez que, Mesdames et Messieurs, les efforts consentis doivent être considérés comme un élément positif.
Mesdames et Messieurs les députés, je ne referai pas tout le parcours des comptes, je ne redirai pas ce qu'ils signifient ou non. J'aimerais vous dire simplement que les comptes sont le reflet de ce que fait une collectivité à différents niveaux. Ils montrent ce que sont les dépenses, comment celles-ci progressent, si elles sont maîtrisées ou non - à ce sujet je maintiens qu'il y a des efforts à faire et qu'il n'est pas admissible qu'entre ce qui est mis au budget et ce qui est inscrit dans les comptes les différences soient si importantes. Les comptes montrent aussi la capacité de la collectivité à prélever l'impôt, mais encore le dynamisme économique de cette collectivité. Tous ces éléments sont reflétés par les comptes, qui sont aussi les signes de ce que seront les budgets futurs, en partie en tout cas. Ceux qui disent que le vrai débat interviendra au budget 2004 ont raison aussi. En effet, le rendez-vous sera difficile et il s'agira de travailler de façon cohérente.
Pour aujourd'hui, j'aimerais tout de même, car vous l'avez peu fait, Mesdames et Messieurs, rendre hommage à l'ensemble des fonctionnaires qui travaillent à l'Etat de Genève et à celles et ceux qui travaillent dans les collectivités publiques qui lui sont proches. Quels que soient vos débats, ces gens se sont engagés pendant une année. Ils l'ont fait avec âme et conscience et au mieux de ce qu'ils savaient. Qu'il faille encore réformer l'Etat, qu'il faille améliorer la qualité des prestations, qu'il faille moderniser certaines choses, chacun en est conscient et beaucoup de fonctionnaires le sont aussi. Il s'agira de le faire. Il s'agira de conduire ces améliorations. Cela ne veut pas dire qu'au moment des comptes on ne puisse pas dire merci. J'ose espérer que tous les groupes politiques, au-delà de leurs opinions, s'associent à moi pour dire cette satisfaction. Je veux dire merci en particulier aussi aux services qui ont contribué au bouclement de ces comptes.
(Applaudissements.)
Mis aux voix, à l'appel nominal, le PL 8958-A est adopté en premier débat par 53 oui contre 6 non.
La loi 8959 est adoptée en premier débat.
La loi 8959 est adoptée article par article en deuxième et en troisième débat.
La loi 8959 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 42 oui contre 18 non.
La loi 8960 est adoptée en premier débat.
La loi 8960 est adoptée article par article en deuxième et en troisième débat.
La loi 8960 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 44 oui contre 18 non.
Deuxième débat
CHAPITRE 1: CHANCELLERIE D'ETAT
Comptes de fonctionnement
Les comptes de fonctionnement de la Chancellerie d'Etat sont adoptés.
CHAPITRE 2: DEPARTEMENT DES FINANCES
Comptes de fonctionnement
Office du personnel de l'Etat (Rub. 260000)
M. Rémy Pagani (AdG). J'aurai toute une série de questions au sujet de la nouvelle politique que semble adopter le Conseil d'Etat en ce qui concerne les enquêtes administratives visant des hauts cadres. Je reviendrai dans le détail, département par département, puisque ces derniers mois plusieurs hauts cadres ont fait l'objet d'enquêtes administratives. Il m'est cependant apparu une différence, de manière générale, dans la politique de traitement de ces enquêtes administratives. Il me semble notamment qu'auparavant, lorsqu'une enquête administrative était dirigée contre un haut cadre, celui-ci était de fait suspendu, parce qu'il pouvait se trouver qu'il influence le déroulement de l'enquête, par exemple en abusant du rapport de subordination de ses employés. Or, depuis quelque temps, si mes informations sont exactes, la politique du gouvernement consiste simplement à ouvrir des enquêtes administratives sans suspendre ces hauts cadres.
J'aurais donc aimé avoir des explications générales sur cette nouvelle politique. Quels sont les arguments qui ont fait que le Conseil d'Etat procède de cette façon, en prenant des mesures, disons, lightpar rapport à la politique précédente? Je reviendrai dans le détail sur les différentes enquêtes administratives qui ont été déclenchées ces derniers mois.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Il m'est difficile de répondre en détail à une question qui ne m'a pas été posée en détail. Ce que je peux dire en tous cas, c'est qu'il n'y a jamais eu de politique de l'Etat consistant à suspendre systématiquement les hauts cadres visés par des enquêtes administratives. Il n'y a pas non plus actuellement de politique de l'Etat consistant à ne pas suspendre ces hauts cadres.
Chaque fois qu'il y a une enquête administrative, elle fait l'objet d'une discussion, d'une évaluation et d'une décision en fonction de la situation, des faits qui sont reprochés et en fonction de la problématique dans laquelle peut se dérouler l'enquête administrative. Nous décidons d'une suspension lorsque nous estimons que l'enquête administrative ne peut pas se dérouler dans les conditions nécessaires. Je n'ai pas le souvenir que le Conseil d'Etat ait eu ni à se prononcer ni à ne pas se prononcer sur des éléments qui viseraient à changer tout à coup de politique. Pas plus donc qu'il n'y avait de politique systématique auparavant, il n'y en a aujourd'hui. Notre conduite est extrêmement adaptée aux cas qui se présentent et à la nécessité ou non de suspendre. Ceci est valable aussi bien pour les employés que pour les cadres supérieurs.
Les comptes de fonctionnement du département des finances sont adoptés.
CHAPITRE 3: DEPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
Comptes de fonctionnement
Secrétariat général et services administratifs (Rub. 310000)
M. Rémy Pagani (AdG). J'ai appris dernièrement qu'un des responsables du centre horticole de Lullier avait fait l'objet d'une enquête administrative. J'aurais aimé avoir des précisions en ce qui concerne cette enquête: où en est-elle, quels en sont les motifs et quelles sont les mesures que le gouvernement a mises en route pour remédier aux dysfonctionnements de cette institution.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Je veux bien répondre sur la question de Lullier bien que, vous l'aurez noté, Monsieur Pagani, il ne s'agisse pas directement des comptes ou de l'activité 2002, puisque vous m'interrogez sur des éléments qui relèvent de l'activité du département en 2003. Il me semblerait préférable qu'on en reste aux activités de 2002.
Maintenant, comme vous visez, Monsieur le député, une démonstration sur la question générale de la politique du Conseil d'Etat en matière d'enquêtes administratives, je vous répondrai également sur un plan général. Si le département - ou plus exactement le Conseil d'Etat, puisqu'il est compétent en cette matière - a déclenché une enquête, c'est précisément que le Conseil d'Etat a pris les choses en main. La responsabilité du Conseil d'Etat c'est que l'on puisse enquêter, le cas échéant, dans de bonnes conditions. Par ailleurs, une enquête administrative ne doit préjuger en rien de la culpabilité ou non des personnes qui en sont l'objet. J'aimerais qu'on garde tout de même en tête un élément important, c'est qu'un cadre ou un directeur ne peut pas être livré, comme ça, en pâture publiquement. Or, le fait de suspendre pourrait aussi donner une indication de «pré-culpabilité».
J'aimerais donc simplement vous dire, Monsieur Pagani, que le but était de prendre les choses en main, sans stigmatiser et sans préjuger, parce que nous n'avions pas d'éléments tels qu'ils nous permettraient de penser que la présence de la personne en question pourrait contrecarrer l'enquête. Tout ce que nous avons enregistré, y compris de la part du personnel, c'est plutôt la satisfaction face aux mesures prises. Je crois que nous ne devons pas nous substituer aux responsabilités des directions d'école, voire du partenariat social à l'intérieur des établissements.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je constate que M. Pagani a l'intention, à chaque département, de faire ce type d'intervention. J'aimerais donc rappeler quelque chose dans le droit fil de ce que vient de dire notre collègue Charles Beer.
J'ai eu, au début de cette année, à intervenir dans ce parlement au sujet de la façon dont parfois on mettait les cadres sur la place publique - il en va d'ailleurs de même pour les collaboratrices et les collaborateurs. J'ai eu l'occasion de dire que quels que soient les remarques, les reproches ou les procédures en cours, il convenait de prendre, vis-à-vis de ces personnes, les précautions nécessaires. Comme vient de le rappeler notre collègue, on ne préjuge pas, au moment d'ouvrir une enquête administrative, du résultat de celle-ci. Les dégâts humains que peut entraîner l'exposition publique de ces cas commencent à devenir inadmissibles. Je le dis pour tous les cadres qui sont traités ainsi comme je le dirais pour toutes les collaboratrices et tous les collaborateurs. Je pense que c'est malsain de porter ces cas sur la place publique; parce que l'instrument même de l'enquête administrative sert à protéger aussi bien la personne visée que le service et son bon fonctionnement ou encore les droits de l'Etat.
Si vous continuez, Monsieur le député, à user de cet instrument en place publique, parce que politiquement cela a pour vous du sens, vous détruirez l'instrument de l'enquête administrative qui est propre à la fonction publique, qui n'existe pas ailleurs, et vous conduirez finalement la fonction publique à engager des procédures que vous ne souhaiteriez pas vous-même. Je pense qu'il faut faire très attention à ce que vous faites ici en séance plénière. Pour ma part, je m'élève avec beaucoup de fermeté contre l'utilisation des comptes 2002 ou du budget ou de n'importe quelle séance du Grand Conseil pour traiter de problèmes sur lesquels vous pouvez par ailleurs être informé d'une autre façon si vous le souhaitez, Monsieur le député, et si, dans le cadre de vos fonctions syndicales, vous avez des inquiétudes à énoncer. (Applaudissements.)
Les comptes de fonctionnement du département de l'instruction publique sont adoptés.
CHAPITRE 4: DEPARTEMENT DE JUSTICE, POLICE ET SECURITE
Comptes de fonctionnement
Services des autorisations et patentes (Rub. 430800)
M. Rémy Pagani (AdG). Je suis pour la transparence, contrairement à ce qui vient d'être dit par Mme Brunschwig Graf. Je trouve que conduire des enquêtes administratives en catimini est malsain. La question de la suspension se pose certes autrement. Permettre en revanche à des hauts cadres de faire pression sur leurs subordonnés, de continuer certaines pratiques sans que personne sache rien en dehors des alcôves de la République, je trouve cela extrêmement désagréable.
Faire pression en disant que nous n'avons pas à étaler les dysfonctionnements de la République dans le débat sur les comptes est tout à fait malvenu. Je vous prie de m'excuser: le débat sur les comptes est là aussi pour prendre acte de l'ensemble des comptes de l'Etat et je pense que les enquêtes administratives et tout le travail qui est fait pour lutter contre les dysfonctionnements au sein de l'Etat doivent être rendus publics. Il est évident que dans tout organisme il y a des dysfonctionnements.
A mon sens, et c'est pour cela que je continuerai, Madame Brunschwig Graf, quoi que vous pensiez, il est essentiel que ce Grand Conseil ait une information précise sur la politique qu'entend mener et qu'a menée jusqu'à maintenant le gouvernement.
Je pose donc la question à Mme Spoerri de savoir où en est l'enquête administrative diligentée contre le responsable du service des patentes. J'aimerais aussi savoir quelles mesures Mme Spoerri a prises pour éviter que ce directeur n'exerce des pressions sur le personnel durant l'enquête.
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Je ne veux rien ajouter à ce qu'a excellemment dit tout à l'heure Mme Brunschwig Graf. Au reste, l'enquête est en cours, par définition. Nous avons pris deux précautions supplémentaires: la présidence du département s'est attachée les services de M. Bongard qui est en train de restructurer nos services; une commission du personnel au sein du service des autorisations et patentes a été créée précisément pour que les collaborateurs n'aient pas à subir les effets douloureux du dysfonctionnement du service, sans toutefois préjuger de l'issue de l'enquête.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Juste une précision pour M. Pagani. Je vous prie de m'excuser, Monsieur le président, si je reviens un peu en arrière, car ce n'est évidemment pas sur les autorisations et patentes que je souhaite m'exprimer.
Aujourd'hui, quand on ouvre une enquête administrative, il n'y a aucune procédure publique. Si le Grand Conseil souhaitait en instituer une, je pense qu'il devrait passer par un projet de loi. Cela dit, pour votre information, Monsieur Pagani, vous évoquez des secrets d'alcôves. J'aimerais tout de même dire que dans le cas que vous avez cité tout à l'heure dans mon département, l'alcôve a été la commission de l'enseignement et de l'éducation qui a été informée par une voie ordinaire de l'ouverture de l'enquête. Nous avions souhaité, je l'ai dit au nom du département, que cette annonce ne prenne pas plus d'ampleur dès lors que la commission était informée. Il ne me semble donc pas qu'on puisse parler d'alcôve ou de catimini quand le département prend soin d'informer la commission parlementaire adéquate.
M. Christian Brunier (S). Je prolongerai l'intervention de Mme Spoerri qui nous a indiqué qu'une restructuration était en cours dans le service des autorisations et patentes. On le sait tous, cela a d'ailleurs été étalé dans les médias, il y a plusieurs dysfonctionnements dans ce service. J'aimerais en savoir un peu plus sur le contenu de cette restructuration et sur sa planification.
J'ai une deuxième question un peu plus précise relative à la loi sur les taxis. Vous vous rappelez, Mesdames et Messieurs, que lors de la dernière législature nous avions voté une nouvelle loi sur les taxis. On le sait toutes et tous, Mme Spoerri l'a reconnu d'ailleurs, que la loi est mal appliquée. Certaines mesures devaient toutefois être mises en place pour qu'elle soit enfin appliquée. Il s'agissait notamment d'effectuer un certain nombre de contrôles.
Les chauffeurs de taxi reconnaissent qu'il y a un petit peu plus de contrôles la journée. Il n'y a en revanche aucun contrôle, à première vue, ni le soir ni le week-end. J'aimerais donc entendre Mme Spoerri sur le manque de mobilisation des forces pour vérifier l'application de la loi le soir et les week-end, périodes durant lesquelles se produisent sans doute les plus grandes violations.
Mme Loly Bolay (S). Madame la conseillère d'Etat, je vous interroge à propos de la location des patentes qui est devenue monnaie courante à Genève alors que la loi l'interdit formellement. Ce qui m'inquiète, c'est qu'aujourd'hui même les professionnels se demandent s'il ne faudrait pas introduire la clause du besoin. Je pense que s'il y avait un contrôle beaucoup plus strict de la part de votre département sur les locations de patentes - qui se louent à 1500F, 2000F ou 500F alors que les titulaires ne sont pas sur place - alors il serait inutile de revenir sur cette idée de clause du besoin.
Ma question est: y a-t-il véritablement des contrôles de la part de votre département au sujet de ces locations de patentes qui sont totalement illicites?
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Monsieur le député Brunier concernant les détails que vous me demandez, ils seront consignés dans un rapport intermédiaire, six mois après le début de l'opération, sachant que M. Bongard a commencé au département le 1er février.
Concernant les taxis, le premier rapport que j'ai confié à Maître Roulet visait à effectuer une collecte des problèmes liés à la profession de taxi. Son rapport, après consultation des milieux intéressés, doit être rendu fin juin, c'est-à-dire dans quelques jours. Le 1er septembre, je viendrai devant le Conseil d'Etat puis la commission des transports de votre Grand Conseil pour proposer un projet de modification de la loi dont on ne peut pas, aujourd'hui, définir l'ampleur.
La question de Mme Bolay est absolument capitale. Moi, je suis convaincue que nous sommes arrivés à cette situation précisément parce que le contrôle de l'Etat était insuffisant. D'ailleurs, en ce qui concerne les taxis, je partage également l'idée qu'il n'est pas forcément nécessaire de tout revisiter dans la loi, mais force est de constater que les contrôles adéquats et, peut-être, aux moments opportuns ont été abandonnés. Je regrette en particulier que certains contrôles aient été théoriquement confiés à des inspecteurs des autorisations et patentes qui, sans préjuger de leurs compétences ou de leur qualité morale, ne peuvent en aucun cas se substituer à la police pour certains contrôles.
Pour en revenir à la question de Mme Bolay, je ne pense pas que la clause du besoin soit d'actualité. Cela ne touche d'ailleurs pas seulement les taxis; c'est généralement parce que les choses n'ont pas été contrôlées suffisamment par l'Etat qu'on en arrive à des situations pareilles.
Je reviens maintenant à la question du SAP en général. Il faudra que dans le rapport d'activités on tire certaines conclusions. Pour ma part, je suis d'ores et déjà convaincue qu'il faudra réaffecter à la police certains contrôles au niveau des patentes des établissements publics. En effet, si nous ne faisons pas respecter la loi, alors dans certains établissements publics, tout y passe: les problèmes de jeu, les problèmes de consommation d'alcool en particulier chez les mineurs, le trafic de drogue, et c'est le début de l'escalade.
C'est ce que je peux vous répondre aujourd'hui.
Corps de police (Rub. 440000)
M. Ueli Leuenberger (Ve). Je voudrais intervenir sur la rubrique corps de police.
On peut lire, dans le rapport de la commission des finances que les rapporteurs chargés du DJPS sont sortis quelque peu inquiets de leur entrevue au département tant les différents services semblent confrontés à des problèmes extrêmement sérieux. Je partage l'avis que les sources de dysfonctionnements et d'insuffisances sont antérieures à l'arrivée de la nouvelle cheffe de ce département. A mi-parcours de cette législature, je pense qu'on peut se poser toute une série de questions quant à l'avancement de certains travaux. La nouvelle loi sur la police, que je considère toujours, vous le savez, comme une sorte de convention collective de travail plutôt que comme une loi sur la police, n'apportera pas de réelles solutions aux problèmes auxquels nous sommes confrontés.
J'ai donc des questions très précises relatives à l'avancement de certains travaux. Quand la campagne de recrutement pour les femmes va-t-elle commencer? Quand commencera la campagne de recrutement de titulaires de permis C pour la police genevoise? Et, avant tout, voyant que le rapport mentionne beaucoup la prévention, je me demande quand va-t-on à nouveau valoriser les îlotiers et en particulier les îlotiers interethniques?
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. On peut en effet se poser la question de ce que j'ai fait depuis que je suis arrivée, cher Monsieur. Je crois qu'il est un peu tôt pour vous en rendre compte.
(L'oratrice est interpellée.)Oui, cher Monsieur, mais vous savez, quand il faut remonter des courants d'au moins dix ans, cela ne va pas aussi vite qu'on le voudrait. Une partie d'ailleurs de ce mouvement dépend essentiellement du parlement et de la rapidité avec laquelle il traite les dossiers. Je pense notamment au travail de la commission judiciaire pour la police.
En ce qui concerne le recrutement des permis C, je vous rappelle, Monsieur, qu'il ne s'agit pas d'un problème lié à la législation et je peux vous indiquer qu'il y a des gens, titulaires de permis C, qui sont candidats pour des postes dans la police. C'est-à-dire que le seul fait d'avoir annoncé il y a quelque temps que j'avais l'intention d'ouvrir cette profession aux permis C a déjà généré le dépôt d'un certain nombre de candidatures. La plupart de ces candidats sont d'ailleurs en cours de naturalisation.
Pour ce qui concerne la promotion des femmes, c'est un tout petit peu plus compliqué. Vous n'ignorez pas, en effet, que les conditions de travail sont difficiles à aménager pour la femme, en particulier si elle a des enfants à charge. Cela fait partie des travaux en cours.
Le problème des îlotiers devient un peu tabou pour moi. Je suis en fait convaincue que c'est toute la police genevoise qui doit être une police de proximité. Si, à l'intérieur des postes de quartier ou de secteur, il est important que l'un ou l'autre des gendarmes soit affecté à des activités particulières du quartier ou du secteur, il n'en reste pas moins que ces îlotiers ont été mis en place au détriment de la police de proximité en général, de son accessibilité en général, de l'ouverture des postes en général, et de la façon dont les policiers sont présents dans les rues en général. Il y a donc eu, là encore, une certaine dérive. Nous sommes dans une ville internationale, et la police doit assumer à la fois cette tâche de proximité - et c'est pour moi la priorité des priorités - mais elle doit également permettre, dans le cadre d'événements internationaux, pas forcément d'ailleurs de nature politique, d'assurer la sécurité des citoyens et des missions diplomatiques. On ne peut pas avoir les yeux plus gros que le ventre. Aujourd'hui, Genève vit au-dessus de ses moyens dans ce domaine. Je l'ai clairement indiqué au Conseil d'Etat en début d'année. A la vue du nombre d'événements qui nous attendaient, je pense que c'est incontestable.
Par conséquent, à l'avenir, nous devons pouvoir recourir à plus de collaboration intercantonale pour les événements internationaux. Pour Genève, la priorité doit être une police de proximité. Cela ne demande pas forcément non plus, Monsieur le député, de changer la loi. C'est pourquoi, si je peux partager l'avis selon lequel le projet de loi sur la police est insuffisant, je pense aussi qu'on n'est pas toujours obligé de légiférer, en particulier au niveau des missions, pour adapter le besoin de Genève à sa réalité.
Voilà ma réponse. Je dis une fois encore et une fois pour toutes, que je ne suis pas opposée à l'activité des îlotiers. Je dis que c'est la police de proximité toute entière qui doit revenir en force à Genève et que c'est dans cette perspective que j'entends bien continuer la suite de ma politique.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Ce que je viens d'entendre de la part de Mme Spoerri me semble frappé au coin du bon sens. En effet, il faut que la police genevoise soit proche des citoyens et soit, de ce fait-là, une police citoyenne. Seulement, il y a un certain nombre de besoins dans ce domaine, je voudrais savoir s'il est prévu de faire en sorte que les postes de police soient ouverts en permanence et, dans certains endroits, la nuit également. Comme vous le savez, Madame, c'est une demande de l'Alliance de gauche et ce serait une concrétisation de ce que vous venez de dire concernant cette police de proximité et que j'approuve totalement.
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Je souhaiterais rappeler que je ne pourrai pas aller vers cet objectif d'un seul coup, cela demande un petit peu de temps, mais c'est bel et bien le sens de ma démarche. C'est la raison pour laquelle, dans un premier temps, je souhaite l'ouverture du poste de Cornavin comme un pôle ouvert en permanence ainsi que l'ouverture d'un deuxième pôle sur le canton pour un certain nombre de besoins de la population.
Pour le reste, il est aussi question de réouvrir 24 heures sur 24, peut-être pas l'ensemble des postes existants sur le territoire du canton, mais une partie d'entre eux. C'est du moins l'intention que j'ai. Cela nécessite non pas des changements législatifs, mais une réorganisation, purement interne, de la façon dont les missions sont faites, dont les postes sont organisés. C'est en tout cas bien dans ce sens-là que nous allons aller.
Fondation pour la construction et l'exploitation des parcs de stationnement (Rub. 495200)
M. Rémy Pagani (AdG). Mon intervention concerne donc la Fondation des parkings. J'aurais aimé que l'on soit un peu informés sur cette institution et ses dysfonctionnements, en particulier sur l'enquête administrative diligentée contre un des responsables de cette fondation.
Le président. C'est M. Cramer qui va vous répondre puisqu'il est vrai que cela relève maintenant de son département.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Pour reprendre les propos de mon collègue Charles Beer, je me dois de relever que cette enquête n'a pas été diligentée en 2002, mais en 2003. Je vous réponds cependant bien volontiers, Monsieur le député.
L'enquête est arrivée à son terme. Le juge Peila qui était le juge enquêteur nous a indiqué en conclusion qu'il y avait un juste motif de licenciement avec effet immédiat du directeur de la Fondation des parkings. Il y a quelques jours, le Conseil de fondation a été saisi de ce rapport et également des observations du directeur de la fondation des parkings quant à ce rapport. Le conseil a ainsi pris la décision, à l'unanimité, de suivre la proposition qui lui était faite par le juge Peila. En d'autres termes, le directeur de la fondation des parkings a été licencié avec effet au mois de février dernier, c'est-à-dire à la date du début de l'enquête administrative. Pour le surplus, la fondation se réserve de tirer les conséquences de cette situation, aussi bien sur le plan du droit pénal que sur le plan des dommages économiques qu'elle a subis, devant les juridictions compétentes.
Les comptes de fonctionnement du département de justice, police et sécurité sont adoptés.
CHAPITRE 5: DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT
Comptes de fonctionnement
Office cantonal du logement (Rub. 560000)
M. Rémy Pagani (AdG). Je demande à nouveau des informations sur l'office cantonal du logement et sur les enquêtes administratives dirigées contre l'un ou l'autre de ses cadres.
M. John Dupraz (R). J'aimerais intervenir sur un problème particulier du logement à Genève, celui du logement des étudiants. L'Université, au cours de l'année précédente, s'est émue, s'est souciée du problème du logement des étudiants, notamment de ceux qui viennent de l'étranger. Vous savez, Mesdames et Messieurs, que notre Université a quatre-vingts ou nonante accords avec d'autres universités de l'Europe et du monde en vue d'organiser des échanges entre étudiants. Des étudiants genevois vont à l'étranger et des étudiants de l'étranger viennent chez nous. Il est clair que si nous n'avons pas la capacité de loger les étudiants qui viennent de l'étranger, nous aurons de la peine à faire accepter les étudiants genevois en échange.
Ma question est de savoir quelles sont les mesures que le Conseil d'Etat a prises ou va prendre pour la rentrée de cet automne. Le Conseil d'Etat a-t-il recherché parmi les immeubles de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale si l'un ou l'autre objet pouvait être mis à disposition pour loger les étudiants? J'évoquerai une troisième piste qui est, peut-être, un peu plus délicate: la façon la moins coûteuse pour l'Etat et les collectivités publiques, c'est que les étudiants soient logés chez des privés. Pour faciliter et encourager cette solution, ne serait-il pas possible d'envisager la défiscalisation du loyer d'une chambre, d'un petit studio ou d'un petit appartement loué à des étudiants? C'est à mon avis ce qui coûterait le moins cher à la République et canton de Genève.
M. Gabriel Barrillier (R). On voit dans les comptes de l'office cantonal du logement sous la rubrique 36 «subventions accordées» que le budget prévoyait 82 millions alors que seuls 75 millions ont été employés. J'aimerais demander au président du DAEL pourquoi toute cette subvention n'a pas été utilisée. Y a-t-il une modification dans la pratique du département, dans les taux de subventionnement? Ou alors ce non-dépensé traduit-il un effort moins important en faveur du logement, notamment du logement social?
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Pour répondre à la question de M. Pagani, j'indiquerai qu'il n'y a pas d'enquête administrative en cours, à ma connaissance, visant des cadres de l'office cantonal du logement. Il y a en revanche un consultant qui a été chargé d'un audit, car il est exact que quelques problèmes sont apparus dans cette direction. Je tiens à souligner que ces problèmes n'ont pas eu de conséquences sur les prestations fournies au public. Le délai de reddition du rapport est fixé à la rentrée, cet automne.
Vaste question, Monsieur Dupraz, que le logement étudiant. Vous me demandez ce qui a été fait. Vous savez qu'il existe une conférence des directeurs de foyers qui regroupe l'ensemble des structures existantes et avec laquelle nous avons été en contact dès que la sonnette d'alarme a été tirée, c'est-à-dire dès la rentrée de l'an dernier. Dans ce cadre, un certain nombre de pistes ont été examinées, parmi lesquelles la possibilité d'acquérir des immeubles de la fondation. Nous avons pris la décision d'acquérir l'immeuble du 15 Glacis-de-Rive qui doit être exploité, selon toute vraisemblance, par la FULE. Celle-ci examine un certain nombre d'autres propositions. J'ai personnellement reçu la Cité universitaire qui a un projet d'agrandissement extrêmement important, puisqu'il s'agit de la construction d'un immeuble identique à celui existant sur la parcelle arrière. Cette opération semble n'avoir que peu d'obstacles devant elle, mais évidemment le temps de la construction fait que le bâtiment ne sera pas habitable pour cette rentrée, je vous l'accorde, Monsieur Dupraz.
Le rectorat de son côté voulait mettre en vente un immeuble de la rue de Candolle. Il semble accepter de plus en plus l'idée que le Conseil d'Etat lui avait communiqué il y a longtemps et selon laquelle il était plus opportun que cet immeuble soit précisément réservé au logement étudiant compte tenu de son emplacement.
Nous avons eu aussi des contacts avec quelques communes, soit inquiètes du développement de projets de logement étudiants soit au contraire nous signalant tel ou tel intérêt ou disponibilité.
Cela pour dire que ce problème n'est pas méconnu, qu'il est suivi et qu'effectivement, sous réserve de mise à disposition de chambres existantes, tout ce qui passe par des projets constructifs n'a pas l'effet le plus rapide qui soit. Il faut tout de même noter que, à l'inverse de projets de logements pour d'autres catégories de la population, les projets de logements étudiants vont mieux et plus vite que les autres, parce qu'ils sont portés par l'unanimité de votre Grand Conseil. C'est une réalité.
Vous m'avez interpellé, Monsieur, sur la question d'un encouragement fiscal. Je ne suis pas capable, maintenant, d'apprécier l'impact d'une telle mesure. Je la transmets volontiers à ceux qui se préoccupent de cette question afin qu'elle soit examinée.
Enfin, Monsieur Barrillier, la différence entre la somme portée au budget et la somme dépensée pour les subventions ne provient pas d'une erreur d'estimation, mais du regrettable non-démarrage ou du démarrage tardif d'un certain nombre d'opérations subventionnées.
Les comptes de fonctionnement du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement sont adoptés.
La séance est levée à 10h15.