Séance du
vendredi 16 mai 2003 à
20h30
55e
législature -
2e
année -
8e
session -
49e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Robert Cramer, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Thomas Büchi, Antoine Droin, John Dupraz, Pierre Froidevaux, Robert Iselin, Ueli Leuenberger, Alain-Dominique Mauris, Mark Muller, Pascal Pétroz, Jacqueline Pla et Patrice Plojoux, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
Le président. Je souhaite que le débat reste digne et posé pour tout le monde.
M. Jacques Pagan (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il n'est pas question pour nous de créer un climat d'agitation quel qu'il soit et j'aimerais profiter de ce moment de calme et de dignité pour préciser notre philosophie politique générale: nous trouvons normal que des personnes veuillent manifester, les thèmes à aborder sont importants suscitant un intérêt certain - nous éprouvons, dans nos rangs, une certaine sympathie à l'égard de ces thèmes - mais le problème est de savoir ce qu'on peut faire pour éviter tous les débordements qui risquent objectivement d'accompagner la manifestation.
C'est le souci de notre motion 1543, déposée en même temps que les textes dont nous avons parlé samedi dernier - je rappelle qu'il y avait la motion 1535, «Proposition de motion sur l'accueil des manifestant-e-s à Genève à l'occasion du sommet du G8 et pour une Genève, Ville de paix»; il y avait une proposition de motion 1542 «sur la stratégie d'engagement des forces de l'ordre lors des manifestations d'opposition au G8»; il y avait la proposition de résolution «pour une attitude responsable des élus genevois dans le cadre du G8 d'Evian et sur la mise en place d'observateurs/trices parlementaires lors des manifestations autour du G8»; et il y avait enfin un projet de loi qui a été renvoyé en commission.
Samedi passé, nous nous sommes déclarés opposés à ces différentes motions et dans le cadre de notre prise de position en huit points, nous avions indiqué quelle était déjà, dans les grandes lignes, cette motion 1543 sur laquelle nous sommes appelés à nous prononcer.
Cette motion porte le titre «Manifestation anti-G8: responsabilité civile et pénale des organisateurs». Il est clair, en vertu du principe de précaution, que nous devons agir de manière préventive ou en tout cas inviter le gouvernement à faire de la sorte: nous nous sommes permis, dans le cadre de ce texte que vous avez sous les yeux, d'inviter le Conseil d'Etat à «exiger, aux frais des organisateurs, une étude d'impact en préalable à tout octroi d'autorisation, ensuite, à exiger des organisateurs qu'ils concluent des polices d'assurance prévoyant une couverture conforme à l'ampleur de leur obligation de réparation civile, encore, de leur obligation de mettre sur pied, à leurs frais, un service d'ordre idoine. Il y a encore deux autres invites: à s'engager à poursuivre, pénalement et civilement, tout responsable, individuel ou solidaire, de tout dommage constaté et enfin, à informer régulièrement le Grand Conseil des démarches qui seront entreprises par l'Etat dans le cadre du recouvrement de son propre dommage, consécutivement aux actes illicites commis dans le cadre des manifestations anti-G8».
Je remercie la majorité de ce Grand Conseil d'avoir accepté l'urgence, parce que nous sommes à seize jours de cette manifestation dont nous espérons qu'elle se passera sans heurts. Il faut malheureusement prendre en compte les risques inhérents à un déferlement de personnes - encore aujourd'hui, Mme la conseillère d'Etat chargée du département de justice et de sécurité nous disait qu'on évalue le nombre de manifestants à plus ou moins 100 000.
Il est clair qu'il peut y avoir des débordements, la masse est quelque chose qu'il est horriblement difficile à maîtriser et qui ne se maîtrise pas d'elle-même. C'est pour cela que nous nous sommes permis d'attirer l'attention du Conseil d'Etat sur ces précautions préalables, pour nous indispensables à titre de garantie, avant d'être à même de délivrer l'autorisation de manifester.
Nous vous demandons de bien vouloir réserver un accueil favorable à cette motion, comme je l'ai dit, il ne s'agit pas ici d'interdire la manifestation, il s'agit uniquement de faire en sorte que celle-ci se déroule dans les meilleures conditions. C'est pour cela que nous sommes heureux de pouvoir recueillir la prise de position du pouvoir exécutif, qui a la très lourde responsabilité de la mise en place d'un système de sécurité.
M. Antonio Hodgers (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes repartis pour un tour sur cette question du G8 - j'espère qu'il sera un peu plus bref que celui de samedi matin.
Bien que cette motion UDC pose une bonne question, à mon sens elle y répond mal: il s'agit de la responsabilité des organisateurs et des participants et de l'Etat dans le cadre de cette manifestation anti-G8, prévue le 1er juin.
On parle des organisateurs et on nous prédit «l'arrivée imminente de 300 000 manifestants anti-G8 qui déferleront sur Genève à l'invitation d'organisateurs genevois et confédérés notamment». Je sais que M. Pagan nous témoigne une grande estime, mais que la gauche genevoise soit capable de convoquer une manifestation composée de 300 000 personnes... excusez-nous, mais: on aimerait bien ! Il est évident qu'en l'espèce une manifestation de cette importance ne peut être convoquée que par un mouvement large et européen, voire mondial, qui est le mouvement social européen, qui, en l'occurrence, et c'est avéré, est l'organisateur de cette manifestation. Je rappelle que le choix de Genève a été fait par ce mouvement social européen lors de sa réunion, il y a quelques mois, à Florence. Dès lors, les Genevois qui prennent part à l'accueil de cette mobilisation ne le font que dans ce cadre-ci, ils n'ont pas eux-mêmes invité les gens à venir à Genève.
On parlait de la responsabilité. Nous sommes d'accord avec cette idée. Mais jusqu'où ? Jusqu'au bout, vous avez raison. Cependant, quel droit s'exerce lors de ce cortège ? Il s'agit du droit individuel à manifester et à s'exprimer librement. A ce titre, les gens qui y participent le font dans le cadre d'une responsabilité individuelle avant tout. Le droit individuel - aussi constitutionnel - au libre choix du mode de transport, à la liberté de circuler, est également un droit que vos partis appellent fréquemment à utiliser dans le cadre du débat politique. Vos partis développent et argumentent auprès de la population pour dire, finalement: «Prenez vos voitures». Mais est-ce que l'on peut alors dire que vous pourrez être solidaires de ces chauffeurs qui commettent des accidents parce qu'ils sont en état d'ébriété... (Exclamations.)...ou parce qu'ils conduisent de manière imbécile pour autant ? Evidemment que non ! Il s'agit d'un droit individuel qui s'exerce avec une responsabilité individuelle. Il en est de même pour le stade de foot: le stade de Genève accueille un match de foot important avec des équipes...
Le président. Messieurs les députés, un peu de calme, s'il vous plaît !
M. Antonio Hodgers. On connaît la tradition chez certains supporters de ces équipes - heureusement ce n'est pas l'habitude des équipes suisses, mais plutôt celle de quelques équipes étrangères. Ainsi, à l'issue du match que ces gens perdent, une bande de hooligans se déchaîne et démolit une bonne part d'un quartier de Genève. (Brouhaha.)Est-ce que la responsabilité de l'organisateur ou du président de la Fondation du stade de Genève serait-elle engagée à ce niveau-là ? Je n'en suis pas sûr, parce qu'à chaque fois il est évident que des gens responsables proposent un cadre strict et limité, et que des gens irresponsables en profitent pour commettre des débordements.
Ici, on est dans ce cas de figure: aujourd'hui, les organisateurs genevois, en collaboration avec la police, sont en train de prévoir un cadre clair et précis pour la manifestation du 1er juin. Ce cadre contiendra un service d'organisation qu'on peut appeler «service d'ordre interne», qui est présent afin de baliser le cortège de la manifestation et l'accompagner pour que tout se déroule pour le mieux. Il n'est pas exclu, nous en sommes parfaitement conscients, que des gens utilisent cet événement pour commettre des actes répréhensibles par la loi et que nous condamnons aussi politiquement. Ces personnes n'engageront que leur responsabilité.
Encore un mot sur le troisième considérant, parce que la motion évoque l'exemple de Gênes, et je trouve particulièrement insultant à l'égard de nos institutions et de la police genevoise que vous utilisiez cet exemple, car les enquêtes tant parlementaires que journalistiques qui ont été effectuées sur Gênes démontrent que les débordements ont été largement orchestrés avec la collaboration de la police de cette ville. (Manifestation dans la salle.)Aujourd'hui, il y a plus d'une dizaine de personnes - jusqu'à des officiers de la police gênoise - qui sont inculpées pour avoir organisé les émeutes et je trouve insultant que vous puissiez songer que ce qui s'est passé à Gênes puisse se reproduire à Genève. Il n'y a pas de groupes néo-fasciste dans les rangs de la police genevoise. J'espère que ceci est clair pour vous, car sinon je commencerai vraiment à avoir peur.
M. Guy Mettan (PDC). Le parti démocrate-chrétien accepte cette motion, qui complète utilement le dispositif de motions que nous avons adopté samedi dernier. En effet, elle rappelle de façon opportune les responsabilités qui incombent aux organisateurs des manifestations. Toutefois, le parti démocrate-chrétien, en compagnie du parti radical, souhaite apporter un amendement qui vise à supprimer les deux premières invites de cette motion.
En effet, la première invite exige, aux frais des organisateurs, une étude d'impact, en préalable à tout octroi d'autorisation. Or, il faut le souligner, à dix jours des rassemblements, à quinze jours de la manifestation prévue, il est évident qu'une étude d'impact est impossible à réaliser. Par conséquent, pour des motifs pratiques et chronologiques, cette première invite doit tomber. De surcroît, même si nous pouvions souhaiter qu'une étude d'impact soit effectuée avant une manifestation, celle-ci s'avèrerait impossible, puisqu'il s'agit d'un problème éminemment subjectif car il est impossible de savoir à l'avance si une manifestation donnera lieu à des dégâts. C'est la raison pour laquelle la décision de l'étude d'impact relève de la pure subjectivité, ne s'appuyant sur aucune analyse concrète. En outre, comme vous le savez, les assureurs et les personnes qui sont préposées aux analyses prévisionnelles s'appuient sur le calcul des probabilités, qui ne peut pas être exercé en l'occurrence: comme il y a très peu de manifestations en Suisse, nous ne pouvons pas nous appuyer sur un nombre d'événements statistiques suffisants pour tirer des conclusions. Nous souhaitons par conséquent que cette première invite soit supprimée.
Quant à la deuxième invite, elle engage les organisateurs à conclure des polices d'assurance pour prévoir une couverture conforme à l'ampleur de leur obligation de réparation civile, en sus de leur obligation de mettre sur pied, à leurs frais, un service d'ordre idoine. Nous sommes d'accord pour qu'il y ait un service d'ordre, mais en ce qui concerne les assurances, nous ne disposons d'aucune compagnie, en Suisse, qui soit capable d'assurer des problèmes liés à des événements de ce genre. Il y a plusieurs assureurs, dans cette salle, qui pourront vous le confirmer. Dès lors, je ne vois pas comment on peut exiger une couverture d'assurance de la part des organisateurs de manifestations. La seule assurance qui en serait capable est la Lloyds, qui est à Londres, et cela me semble pour le moins surprenant de recourir à une compagnie anglaise pour couvrir des manifestations en Suisse. Il existe encore le MIGA, au sein de la Banque mondiale, mais je crois que le fait d'assurer des risques et les dégâts ayant des origines politiques ne fait pas partie de ses objets.
Une voix. Le MIGA ?
M. Guy Mettan. Cela s'appelle le MIGA, oui, je peux vous en parler tout à l'heure, cher ami. Etant donné ces circonstances, je vous invite à accepter cette motion mais sans les deux premières invites.
M. Christian Brunier (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, M. Pagan nous a presque touchés. Le seul problème, c'est que la sincérité ne se décrète pas, elle se démontre. M. Pagan nous dit que l'UDC est soucieuse de répondre aux questions que les Genevoises et les Genevois se posent et qu'il faut parler du G8 durant cette session. C'est quand même étonnant, puisque nous avons fait une session spéciale G8 tout un samedi, pendant laquelle l'UDC s'est opposée à tout, refusant la motion sur l'accueil, la motion sur la sécurité, la résolution permettant d'avoir une observation parlementaire, refusant au fond de permettre au gouvernement de répondre aux questions que les Genevoises et les Genevois se posent sur ce G8.
Lorsqu'on lit l'exposé des motifs, on comprend rapidement de qui vient ce projet et où il veut en venir. L'exposé des motifs mentionne «la convocation de la manifestation». Monsieur Pagan, je suis désolé, mais, à part les dictatures, qui convoquent des fausses manifestations, des rassemblements non spontanés - Saddam Hussein l'a démontré plusieurs fois - à Genève, heureusement, les manifestations... (Brouhaha. Exclamations.)
Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît.
M. Christian Brunier. ...à Genève, les manifestations, fort heureusement, ne se convoquent pas, ce sont des rassemblements pluralistes, spontanés, ce que je considère comme sain pour la démocratie. (Exclamations.)Monsieur le président, s'il vous plaît...
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en séance plénière du Grand Conseil, veuillez écouter l'orateur, on clôturera la liste dans un moment, et on parlera des amendements. Je vous signale qu'il y a un amendement pour supprimer les deux premières invites, et un amendement pour supprimer les deux dernières. (Rires.)
M. Christian Brunier. Monsieur le président, vous avez annoncé l'amendement que je voulais annoncer, c'est vrai que nous soutiendrons l'amendement du PDC, qui va dans le sens positif, et nous avons d'ailleurs travaillé avec les PDC, soucieux de pouvoir amener un peu de calme et de sérénité au niveau de ce canton, lors de la dernière session. Nous proposons aussi de supprimer les invites 3 et 4, car elles ne résolvent aucun problème lié à l'organisation de ce G8. Il est évident, Messieurs de l'UDC, que demander une étude d'impact par rapport à un événement dont on ne connaît pas grand-chose, selon la ministre de la justice et de la police, deux semaines avant le début de cet événement, je crois que c'est totalement démagogique, vous en conviendrez, mais ceci correspond bien à ce que vous vouliez faire ce soir. Par ailleurs, M. Hodgers a fait une très bonne démonstration sur la responsabilité des organisateurs de manifestations, qu'on peut vraiment comparer aux matchs de football... (Exclamations.)M. Luscher n'a peut-être pas l'habitude d'avoir beaucoup de supporters... (Rires. Exclamations.)Nous ne donnons pas de billets gratuits pour la manifestation... (Rires. Applaudissements.)L'exemple du match de football est tout à fait éloquent, je crois que si demain il y avait des hooligans au Servette, ce qu'on ne souhaite absolument pas, ce serait dommage que M. Luscher se retrouve en prison, au lieu des casseurs qui seraient dans son stade. (Rires. Applaudissements.)Vous le voyez, votre motion amène au moins la bonne humeur, il faut dire qu'elle n'est pas très sérieuse. Par conséquent, nous vous proposons d'adopter nos amendements, à savoir la suppression des invites 3 et 4, et de soutenir les amendements du PDC... (Rires.)...c'est-à-dire la suppression des invites 1 et 2. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nous avons deux urgences, ce soir, celle-ci n'est que la première, la liste est clôturée, c'est fini. Il ne faut pas me dire ensuite que Chêne-Bougeries est une urgence. (Exclamations. Brouhaha.)Vous pouvez vous amuser, Mesdames et Messieurs les députés, vous avez voté une urgence pour Chêne-Bougeries, je n'y étais personnellement pas favorable, nous la voterons, mais la séance est levée à 23h, vous en ferez ce que vous voudrez. M. le député Pagani...
M. Rémy Pagani (AdG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous n'allons pas passer des heures sur cette motion (Rires.)...puisqu'il y un autre sujet qui doit être voté, quoi qu'il advienne. Cela étant, et je serai rapide, je crois que cette motion, bien qu'elle soit prise à la légère, constitue un pas supplémentaire dans le processus sécuritaire auquel on assiste ces derniers jours, et je le déplore. Comme nous l'avons fait samedi matin, nous allons dire encore une fois ce que nous ferons dans cette manifestation, ce que les organisateurs se sont engagés à faire et, en fonction de cela, chacun prendra ses responsabilités.
Tout d'abord, au niveau du service d'ordre, il a été décidé...
Le président. Monsieur Gros et Monsieur Brunier, écoutez M. Pagani ou allez à la buvette ! Ils vont à la buvette...
M. Rémy Pagani. Je lis le texte des organisateurs: «Nous sommes opposés à toute atteinte aux personnes et aux biens, autant lors de la manifestation que lors d'actions de blocage». Un service d'ordre de 5 000 personnes sera organisé, des bandeaux, qui désigneront ces 5 000 personnes, seront distribués, pour appliquer les consignes lors de cette manifestation et lors des blocages qui auront lieu ensuite, comme cela a été expliqué dans les journaux aujourd'hui. Il est évident que l'ensemble des participants seront rendus attentifs aux consignes que je viens de donner, et nous espérons que les 5 000 personnes désignées pour effectuer un service d'organisation - et non d'ordre - se sentiront responsabilisées par rapport à ces consignes, mais en plus... Bon, j'arrête de parler si vous voulez...
Des voix. Oui ! (Applaudissements.)
Le président. Il serait judicieux que les députés qui forment comme un essaim autour du président du Conseil d'Etat puissent se retirer. Merci, Messieurs et Madame. Si Monsieur Blanc veut suivre le petit cortège... C'est bien, merci. Monsieur Pagani, j'ai tenté de faire un peu d'ordre pour qu'on vous écoute.
M. Rémy Pagani. Merci Monsieur le président, je le répète, au cas où certains ne l'auraient pas entendu... (Rires.)Les organisateurs feront ce qui leur est matériellement possible de faire, et au niveau des textes, et au niveau de la pratique. Je voudrais revenir aux deux dernières invites, puisque les premières auront le sort qu'elles méritent.
Les deux dernières invites sont intéressantes, parce que, parmi les députés de l'UDC, il y a des juristes, des avocats même, qui sont censés connaître le droit actuel. La législation actuelle permet, dans la mesure où les responsabilités sont identifiées, de prendre des mesures contre ceux qui auraient participé à quelque dégradation que ce soit des biens et des personnes. C'est pour cela que ces deux invites n'ont aucune valeur juridique, d'une part, parce que c'est une motion qui ne contraint le gouvernement d'aucune manière, d'autre part, parce que dans la législation actuelle des mesures sont prévues afin de régler des problèmes survenant lors d'actions ne correspondant pas aux orientations des organisateurs.
A notre avis, ces deux invites sont nulles et non avenues, et nous vous proposons de les rejeter parce qu'elles ne correspondent pas à ce qui se pratique déjà d'un point de vue légal.
M. Pierre Schifferli (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous invitons à accepter cette proposition de motion sans modification.
Nous avons appris, non sans intérêt, de la part de M. Brunier, qui a probablement une plus grande expérience de ce genre d'événements que nous, qu'une manifestation ne se convoquait pas, ce qui signifie qu'il décline toute responsabilité dans l'organisation de cet événement. Quant à M. Hodgers, sa réponse manquait vraiment de substance, parce que tout ce que nous avons appris de lui, c'est qu'il ne savait pas très bien ce qui allait se passer et qu'il espérait que cela se passerait bien. C'est vrai que M. Hodgers cumule les talents, puisqu'il est à la fois organisateur, membre du service d'ordre, pardon d'organisation, observateur, arbitre, au fond vous faites un peu tout vous-même ! C'est bien !
Nous n'avons que quatre modestes invites, qui ne devraient pas susciter d'opposition aussi décidée que celle de M. Pagani. Ce dernier nous explique qu'il n'y a pas de raison de maintenir l'invite numéro 3, qui exhorte, je la lis, le Conseil d'Etat «à s'engager à poursuivre, pénalement et civilement, tout responsable». Bien sûr que la législation existe, encore faut-il vouloir l'appliquer. Il ne s'agit pas de modifier le droit, il s'agit de demander au Conseil d'Etat de prendre un engagement de type politique.
Il en est de même pour la quatrième invite. Nous ne comprenons pas très bien pourquoi vous la refusez, puisqu'il s'agit d'une demande d'information, et nous pensons que le Conseil d'Etat devrait continuer à informer le Grand Conseil des démarches qui sont entreprises par l'Etat.
La première invite est celle de l'étude d'impact. Il ne s'agit pas de faire quelque chose de compliqué. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas la réaliser en quelques jours: on peut peut-être accélérer le rythme helvétique habituel.
Quant à l'exigence des organisateurs qu'ils concluent des polices d'assurances, Monsieur Mettan, vous êtes en général bien informé, mais cette fois-ci vous accusez une lacune. En effet, il y a toute une série de compagnies d'assurance qui peuvent être prises en considération pour assurer ce type d'événements. Je suis prêt à vous en fournir la liste. Je ne comprends pas pourquoi, Monsieur Mettan, puisque vous prétendez que vous acceptez la deuxième partie de l'invite, voulez-vous supprimer la totalité de la deuxième invite ? Cela me semble manquer de logique.
C'est vrai, nous sommes opposés au déroulement de la manifestation. Nous respectons la décision contraire du Grand Conseil, c'est l'exécutif qui prend la décision finale à cet égard et il y a une décision, qu'à titre personnel et comme sans doute beaucoup de citoyens suisses, je regrette qu'il ait prise: je me suis trouvé en décembre 1985, en tant que capitaine, avec mon bataillon de chars... (Huées.)...sur la plaine de l'aéroport de Cointrin. Il faisait vraiment froid, nous étions mobilisés afin d'assurer la sécurité de la rencontre Reagan-Gorbatchev. Je dois dire que cette rencontre marquait la fin de la guerre froide, c'était par conséquent un événement considérable et je me souviens qu'à cette époque les autorités fédérales et genevoises considéraient encore que l'armée suisse pouvait assurer la sécurité et qu'il n'était pas nécessaire d'appeler une force de police étrangère en renfort.
Il y a, du point de vue psychologique, un problème qui ne relève pas de la seule responsabilité du Conseil d'Etat, mais qui incombe aussi au Conseil fédéral. Cela est regrettable parce qu'il est possible que les manifestants et les policiers allemands se tapent dessus sur le territoire suisse; qu'ils aillent en Allemagne, mais pas chez nous ! (Exclamations.)Franchement, c'est regrettable, mais je comprends aussi le souci du Conseil d'Etat, qui consiste à vouloir organiser une sécurité maximale de l'aire de l'aéroport. Il est cependant navrant de constater que nous sommes obligés de faire appel à des forces de police étrangères, et je ne suis pas sûr que cela ne provoque pas un accroissement de la tension.
M. Georges Letellier (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais remercier M. Pagani pour sa révélation au sujet de la constitution d'un service d'ordre: si vous l'aviez dit avant, il y aurait peut-être un peu moins de grabuge ce soir. En fait, bravo, si vous réussissez à le faire, c'est très bien, je vous en félicite.
J'aimerais maintenant faire un aparté à tous les discours que l'on entend aujourd'hui. Après les révélations du pseudo-Guillaume Tell vert Chaïm Nissim, qui a avoué ses relations passées avec le terroriste révolutionnaire Carlos... (Exclamations.)...après les révélations de la presse européenne, dénonçant les liaisons passées du leader charismatique allemand Daniel Cohn-Bendit, avec le même réseau terroriste Carlos, nous avons de bonnes raisons de douter de la véritable identité de votre mouvement vert, dit pacifiste. (Exclamations. Huées.)Un parti vert débonnaire, non violent, en plus non polluant, symbole de l'immaculée conception, auquel nous avons donné naïvement le Bon Dieu sans confession... (Huées.)...en lui apportant nos suffrages, qui nous apprend avoir frayé avec le diable terroriste incarné par Carlos. Qui l'eût cru ? (Exclamations. Rires.)A partir de ce constat, l'UDC ne veut tout simplement pas que Genève soit transformée en quartier latin soixante-huitard... (Exclamations.)...au nom de l'Internationale socialiste trotskyste-léniniste. (Huées.)
Par cette motion, nous voulons responsabiliser les auteurs-compositeurs-acteurs genevois de la manif pour les éventuels débordements, débouchant sur des dommages et intérêts. Nous ne voulons pas que le citoyen soit, en finalité, le dindon de la farce, par le biais de l'impôt. Par cette motion, nous nous inspirons du slogan écologiste-populiste, le «pollueur-payeur», en établissant un parallèle logique entre le pollueur et le casseur. Par cette motion, nous exigeons, par respect du citoyen, que la responsabilité civile et pénale des organisateurs soit engagée.
Mesdames et Messieurs les députés de gauche, vous n'avez pas seulement le droit de manifester, vous avez surtout le devoir absolu de contrôler vos actions, et d'en assumer la responsabilité à tous les niveaux, selon le principe «qui casse, paie». J'en ai terminé.
M. Michel Halpérin (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, M. Brunier disait tout à l'heure que les Genevois se posent des questions sur le G8. A vrai dire je crois qu'ils ne s'en posent pas tant sur le G8 - certains savent ce que c'est et ont compris pourquoi il se réunissait, d'autres n'ont pas encore très bien compris de quoi il s'agissait ni de quoi on allait parler à Evian - j'ai plutôt l'impression qu'ils s'interrogent, encore et toujours, sur la manifestation anti-G8, qui les concerne beaucoup plus directement, puisque, comme j'ai déjà eu l'honneur de le rappeler dans cette enceinte, la Suisse ne fait pas partie du G8 et Evian ne fait pas encore partie des frontières cantonales. De sorte qu'une partie de notre population se demande encore aujourd'hui, malgré le vote de samedi dernier, s'il est logique que le droit de manifester, revendiqué par certains, se traduise par la prise en otage de notre collectivité publique, et à cette question des tentatives de réponse ont été données, j'en ai entendu plusieurs ce soir.
Dans l'ordre, des déclarations enfin claires, d'un certain nombre d'organisateurs de cette manifestation qui promettent que des services d'organisation et d'ordre seront mis en place, que des consignes sont données pour protéger les personnes et les biens: c'est un progrès. Je dirai qu'à soi seul cela justifie que nous nous soyons interrogés à voix haute. Malheureusement cela ne suffira probablement pas et ceci pour au moins deux raisons.
La première, c'est que l'enfer est pavé de bonnes intentions et qu'ici les bonnes intentions sont assez limitées et assez relatives. Outre que, si j'en crois ce qui est publié dans les journaux au sujet des organisateurs, il s'agit tout de même d'une nébuleuse assez difficile à concrétiser, M. Pagani n'est pas seul, M. Hodgers non plus, on parle d'un secrétariat, au sein du Forum social lémanique, de trente personnes, d'une assemblée de soixante à quatre-vingt, mais d'une vingtaine de syndicats, trente-six mille membres au niveau national, le SIT ou Comedia, et puis des partis politiques, bref, la question reste posée: qui organise et qui assume ?
Parce qu'après tout c'est intéressant de nous dire que la liberté de manifester est un droit individuel et donc la responsabilité qui en découle est une responsabilité individuelle. J'en suis resté, pour ma part, à un adage très ancien qui veut que «qui sème le vent, récolte la tempête», d'ailleurs, dans cette salle, ceux-là mêmes qui nous expliquent avec des accents que je ne leur connaissais pas, mais que je me réjouis de leur rappeler à l'occasion, que la responsabilité individuelle est un des grands profits de la société moderne et démocratique, j'allais dire libérale, ceux-là mêmes rappellent en toutes circonstances le devoir d'assumer sa responsabilité collective, mieux encore, le principe de précaution. Le principe de précaution, qui constitue aujourd'hui le seul discours politiquement correct sur les rangs qui me font face, ce discours qui veut que l'on prenne toutes les précautions possibles, que l'on chasse, loin de nos frontières, ceux qui sont susceptibles de contaminer les visiteurs d'une exposition nationale ou ceux qui voudraient que l'on punisse très sévèrement, y compris par le biais de mesures pénales coercitives, ceux dont la négligence très éventuelle aurait pu causer des dommages à l'un ou l'autre de nos concitoyens, ce sont les mêmes qui nous expliquent aujourd'hui que leur responsabilité individuelle, tout organisateurs qu'ils soient, ne serait pas engagée du fait des errements commis par d'autres, quand bien même ils ont appelé les autres à se réunir. C'est ce que j'appelle un sens des responsabilités à géométrie variable. Dans ce sens, la proposition qui nous est soumise par nos collègues UDC est pertinente, parce qu'elle dit: «Vous avez voulu qu'une manifestation ait lieu, elle aura lieu, alors tirez-en toutes les conséquences».
Le seul amendement sur lequel mon groupe entrera en matière, c'est le premier de M. Mettan lorsqu'il dit que c'est probablement un peu tard pour faire une étude d'impact. Encore que l'idée soit juste et qu'elle devrait plaire à la gauche qui en est friande. Quand il s'agit de prévoir un nouveau tracé, un accès à une propriété privée, il faut une étude d'impact. Mais ici, pour faire débarquer entre 30 000 et 300 000 pékins dans la République et canton de Genève, une étude d'impact vous paraît superflue. Comme je reconnais là la cohérence de vos idées ! Vous nous dites que «ça n'est pas la peine, parce que tout cela s'organisera très bien, et puis si ça s'organise mal, cela relève des désordres naturels qui suivent le droit de manifester». Nous ne sommes pas d'accord avec cela, mais nous nous inclinons devant le critère du temps, et, par conséquent, nous suivrons la proposition d'amendement de M. Mettan, qui n'en mérite pas autant, vu le sort qu'il réserve habituellement aux nôtres. (Rires. Applaudissements.)
Nous adopterons avec plaisir la deuxième invite, qui nous est proposée par l'UDC, parce que la moindre des choses, c'est de s'assurer, quand on prend le risque de créer du dommage à autrui - je signale aux amateurs d'automobiles, et je sais bien qu'ils ne se situent pas sur les rangs verts...
Une voix. Quoique...
M. Michel Halpérin. ...que le véhicule privé est considéré comme un danger public, raison pour laquelle les détenteurs sont obligés de s'assurer en responsabilité civile, sans quoi, ils ne bénéficient pas du droit de rouler. Ce qui est vrai pour un automobiliste individuel pourrait l'être pour des manifestants collectifs, me semble-t-il.
Evidemment, il y a ensuite les deux propositions d'amendement qui nous ont été soumises par la gauche. Je dois avouer que j'ai d'abord pensé que c'était une plaisanterie, et puis, quand j'ai vu le texte, je dois dire que j'ai de plus belle pensé que c'en était une. Je recommande à ceux d'entre vous qui n'auraient pas eu le temps de le faire de lire la demande d'amendement présentée par MM. Brunier, Pagani et quelques autres, et de lire la manière dont le texte est calligraphié, cela nous indique l'état de santé de celui qui a calligraphié. Au moment de calligraphier, il était probablement déjà terriblement pris de boisson, et il ne faut pas lui en vouloir, nous sommes vendredi soir. (Rires.)C'est la raison pour laquelle vous pourrez, en toute sobriété, refuser ces amendements dictés dans un moment d'ivresse, et qui n'engagent pas leur auteur, car il y a des irresponsabilités dues à l'alcool qui ne sont pas répréhensibles.
Mesdames et Messieurs les députés, à l'exception du premier amendement de M. Mettan, le groupe libéral votera la motion telle qu'elle vous est présentée par le groupe UDC. (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette motion constitue en effet une mesure de précaution ou de prévention, en matière de sécurité, et cela devrait vous faire plaisir. Il est de notre devoir de rendre attentifs les manifestants quels qu'ils soient que leur responsabilité peut être engagée dans le cadre de l'article 260 du code pénal, si d'aventure l'exercice du droit de manifester devait se transformer en guérilla urbaine. Le 10 mai dernier la majorité de ce parlement a accordé sa bienveillance aux manifestants en invitant le Conseil d'Etat à prendre des mesures logistiques favorisant le déroulement de cette manifestation. Ce faisant, la majorité de ce parlement a estimé que la manifestation serait pacifique et les risques d'un débordement quasi nuls.
Malheureusement, aucune étude d'impact n'est venue corroborer ces propos, et je le déplore. En effet, dans d'autres domaines, pour construire le moindre logement, on nous demande une étude d'impact. Dans la question qui nous intéresse aujourd'hui, on sait qu'on attend environ 100 000 personnes, sans aucune étude d'impact, ne serait-ce qu'au niveau des coûts logistiques: cela peut concerner la surface des terrains à mettre à disposition, le problème des transports dont on voit aujourd'hui dans la Tribune qu'il n'est toujours pas résolu, rien n'a été demandé, sans compter la pollution.
Une simple analyse de risques, à la lumière des événements passés, permet de nier le bien-fondé des affirmations faites par les députés assis sur les bancs me faisant face. Nous relevons d'ailleurs que le Conseil d'Etat n'a pas estimé, contrairement à certaines entreprises privées, les dégâts dont il pourrait faire l'objet: aucune provision n'a été budgétée dans le cadre du budget 2003. Or nous savons que plusieurs services de l'Etat, d'après les bruits qui courent, seront fermés, pendant la durée du G8, notamment le Tribunal - comme par hasard, il n'y a pas de procès au Tribunal civil pendant la durée du G8 - il semblerait même que l'hôtel des finances soit fermé pendant cette période, preuve en est que la situation risque de ne pas être aussi calme que prévu. L'analyse de la situation du Conseil d'Etat a évolué défavorablement au cours des dernières semaines.
Le risque de dommages contre des infrastructures de l'Etat, comme ça a été le cas à Gênes, en 2001, est avéré. Nous souhaitons que l'Etat engage des poursuites pénales, civiles, contre les auteurs de tels actes, et qu'il informe le Grand Conseil des mesures prises.
Nous relevons également que les relations entre le Conseil d'Etat et les organisateurs des manifestations du 1er juin ne sont pas au beau fixe: à ce jour, les organisateurs font preuve d'une certaine intolérance en posant des exigences démesurées concernant le tracé et les modalités du déroulement de la manifestation - je vous renvoie à la Tribune d'aujourd'hui - cette situation conflictuelle, due à l'intransigeance des uns ou des autres n'est pas pour nous rassurer. Le citoyen contribuable peut s'attendre au pire, il n'est certainement pas prêt à se laisser tondre deux fois.
Si nous devions croire à l'angélisme des organisateurs, et si ces derniers devaient effectivement croire en leur propre angélisme, ils devraient aisément se convaincre d'apporter les garanties financières nécessaires et soutenir les quatre invites qui leur sont proposées.
M. Christian Bavarel (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le monde a changé. Aujourd'hui, le monde est organisé en réseaux. Vous avez l'exemple du réseau Internet, vous ne dirigez plus les choses de la même manière qu'à une certaine époque.
Nous, les Verts, qui sommes face à des événements que nous n'avons pas forcément convoqués, nous appartenons à deux mondes: le monde altermondialiste et le monde institutionnel, et nous voulons que les manifestations contre la réunion du G8 se déroulent le mieux possible. Nous bossons pour que tout se passe bien.
Nous nous sommes engagés, aujourd'hui, avec d'autres pour organiser, pour que les choses se déroulent en négociation avec la police, en négociation avec les autorités.
Et ici, dans cette salle, on parlote, on baille, on s'amuse, alors que des choses sérieuses sont en train de se passer. Nous voulons que cette manifestation se déroule dans le calme, que les gens puissent exprimer leurs opinions, pour que la démocratie soit exercée.
Je dois dire que la police, l'Alternative et le PDC s'associent afin que l'événement se déroule de la manière la plus adéquate possible.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai toujours été admiratif de l'éloquence de M. Halpérin, mais je suis au regret de lui dire qu'éloquence n'est pas forcément synonyme de rigueur intellectuelle et scientifique.
Vous savez, en physique, il y a des lois qu'on dit empiriques: ce sont des lois que l'on vérifie par le biais de l'expérience, à différents moments et à différentes reprises, et on finit par obtenir une formule qui donne telle cause à tels effets. Or, dans le domaine qui nous préoccupe ce soir, nous pouvons prendre les exemples de Seattle, Gênes, Florence et en faire des lois empiriques. Nous savons que, lorsqu'il y a des réunions de ce type, il y a des manifestations. Par conséquent, les causes sont les réunions de ce type, les effets sont les manifestations.
Cela m'amène à dire que des réunions comme celles du G8, où quelques-uns se réunissent afin de décider du sort du monde, des dirigeants qui veulent accaparer les richesses de zones immenses de cette planète - ils auraient d'ailleurs pu se réunir dans le désert irakien, puisqu'ils l'ont pacifié, à moins qu'ils n'aient peur d'y trouver des armes de destruction massive. Or vous savez très bien que ceux qui se réunissent aujourd'hui pour le G8 sont ceux qui ont installé Saddam. Cela m'amène donc à dire que, parmi les gens qui se réunissent à l'occasion du sommet du G8, certains d'entre eux se sont arrogé le droit de décider du sort de populations entières, ont détruit des pays entiers, ont tué des milliers voire des millions de personnes, et ils viennent maintenant se réunir à côté de notre canton.
De sorte que, Mesdames et Messieurs les députés, et en lisant cette motion, j'ai eu des idées de correction que je m'apprête à vous soumettre, il y en a très peu, vous verrez.
D'après la démonstration que je viens de vous faire, lorsque je lis «manifestation anti-G8: responsabilité civile et pénale des organisateurs», j'ajouterais simplement «du G8».
Ensuite on parle de «l'arrivée imminente de 300 000 manifestants anti-G8 qui déferleront sur Genève, à l'invitation des organisations du G8» et non des «organisateurs genevois et confédérés».
Je laisse le deuxième considérant tel quel, tout comme le troisième: je maintiens l'exemple de Gênes, parce que j'ai à peine décrit qui étaient les responsables.
En ce qui concerne «l'obligation constitutionnelle de l'Etat de protéger les personnes, leur vie et leurs biens», j'ajouterais «les manifestants, leur vie et leurs biens».
Je laisse le considérant suivant.
Pour ce qui est de «l'article 260 CPS (émeute) punissant de l'emprisonnement toute personne prenant part à des attroupements», j'ajouterais «tels que le G8, élargis au G21, au cours desquels des atteintes ont été portées à des personnes ou à des biens».
Je maintiens le considérant suivant.
«La responsabilité personnelle des organisateurs», j'ajoute «du G8», «pris conjointement et solidairement avec les manifestants qu'ils convoquent», ce sont eux.
J'ajouterais plusieurs fois «le G8», mais j'arrive enfin aux invites. Dans la première invite, j'ajouterais «à exiger, aux frais des organisateurs du G8,une étude d'impact en préalable à tout octroi d'autorisation de se réunir à Evian».
On dit que les pollueurs sont les payeurs; s'il s'agit de faire payer ceux qui polluent notre atmosphère, la mer, les océans, j'espère que vous adopterez la même attitude à l'égard de ces multinationales qui polluent le monde par culte du profit, exclusivement.
Je souhaite que les manifestations anti-G8 soient d'une ampleur telle que la réunion du G8 ne restera pas sans frais pour ses organisateurs. (Applaudissements.)
M. Philippe Glatz (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis surpris de la teneur de ces débats, compte tenu du fait que nous avons affaire à un événement exceptionnel, qui mobilise notre attention et qui suscite aussi énormément de fantasmes. Au-delà des imprécations des uns et des autres, il y a des inquiétudes réelles au sein de la population, face à un événement que nous n'avons pas l'habitude de vivre. Je suis également surpris de la légèreté avec laquelle nous le traitons ce soir.
Nous avons eu l'occasion d'en parler souvent ici, mais je remarque que nous sommes, d'un côté comme de l'autre, les champions du «pas nous, pas nous !». D'un côté, nous avons M. Hodgers qui nous dit: «Oui, nous allons organiser des choses, mais nous ne sommes pas responsables de ce qu'il adviendra», c'est la responsabilité individuelle qui prévaut.
De l'autre côté, il y a certaines personnes, sortant un mouchoir blanc - comme cela était exprimé dans un très bon journal de la République - qui disent «Ne venez pas à Genève, barricadons-nous, que l'on n'accueille personne !». M. Halpérin sait se faire le chantre de la Genève internationale, mais lorsqu'il s'agit d'assumer les responsabilités de la Genève internationale, il préfère fermer les frontières.
Au-delà de ces deux attitudes, il y a celle que je qualifierais d'attitude responsable, celle qui consiste à dire qu'il est légitime que le G8 tienne réunion, il s'agit de chefs d'Etat élus. Il est également légitime que ceux qui ont une opinion différente puissent manifester cette différence d'opinion. Notre responsabilité consiste en fait d'assumer la Genève internationale et de prendre en compte toutes ses composantes.
Je suis aussi surpris par l'attitude de M. Brunier qui déclarait aujourd'hui: «Il s'agit d'un rassemblement spontané envers lequel nous n'avons aucune responsabilité». M. Brunier intervenait pour critiquer l'état d'impréparation des autorités. Or, s'il s'agit d'un rassemblement spontané, vous ne pouvez pas adopter deux logiques. Une qui consiste à dire: «Nous ne pouvons pas savoir ce qui va se passer». Et une autre, vis-à-vis des autorités: «Vous êtes responsables, vous devez prendre toutes les mesures qui s'imposent». Il y a une incohérence dans votre raisonnement à laquelle je ne peux pas souscrire, Monsieur Brunier.
M. Pagani parle du processus sécuritaire et se soustrait, lui aussi, aux responsabilités qui lui incombent quant à l'organisation de cette manifestation. Il est possible d'organiser d'importantes manifestations populaires en toute responsabilité, l'exemple de la France, ce week-end dernier, nous l'a montré - il y a eu plus de 400 000 personnes qui ont défilé dans le calme et sans aucun débordement, parce que les organisateurs avaient pris leurs responsabilités en constituant des services d'ordre conséquents.
Nous souhaiterions que les organisateurs de cette manifestation, plutôt que de se soustraire à leurs responsabilités, fassent preuve de la même cohérence.
J'ai pu lire, ce matin, dans un excellent journal, que M. Josef Zisyadis, soudainement conscient des risques de dérapages, a quitté le comité vaudois anti-G8; que M. Daniel Brélaz, écologiste éminent, déclarait. «Nous n'avons plus, en face de nous, que des anars et des marginaux». Il s'agit, à un moment donné, de savoir ce à quoi vous devez vous attendre, Mesdames et Messieurs les organisateurs, et nous comptons sur vous pour que vous preniez toutes les responsabilités qui vous incombent.
C'est pourquoi, lorsque M. Mettan propose de supprimer les deux premières invites, le groupe PDC estime qu'il est parfaitement logique, mais il n'y a aucune raison de supprimer les deux dernières invites - vous l'avez dit vous-même, Monsieur Pagani, elles vont d'elles-mêmes.
Je vous invite donc à suivre la position raisonnable du parti démocrate-chrétien.
M. Sami Kanaan (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en janvier, alors que nous savions tous que ce fichu sommet aurait lieu à nos frontières, deux textes ont été déposés dans ce Grand Conseil, un par l'Alternative, un autre par le groupe socialiste.
A l'époque, il était encore possible de faire des grands débats de fond statuant pour ou contre le G8, ou portant sur la nature d'une manifestation - le texte socialiste disait à cet égard que dès lors que ce sommet nous était imposé, nous pouvions nous poser la question de ses conséquences.
Certains ont joué la politique de l'autruche: du moment que le sommet a lieu à Evian, on souhaite que tout ce qui peut toucher le G8 ait aussi lieu à Evian, mais surtout pas à Genève, parce qu'on y a des visions très sélectives de nos responsabilités en matière de Genève internationale et de démocratie. En effet, lorsque la démocratie consiste à accueillir des chefs d'Etat, démocratiquement élus ou non, on est ouvert, quels que soient les encombrements pour les citoyens, mais lorsqu'il s'agit d'assumer le pendant démocratique de la population qui souhaiterait manifester, on est nettement moins enthousiaste.
La manif est une conséquence de ce sommet, comme l'a dit le collègue Mouhanna, et nous n'avons pas choisi cela. Vous parlez sans arrêt des organisateurs, mais, sans en faire partie, je peux toutefois vous dire que les organisateurs dits genevois ont pris acte d'une réalité, à savoir qu'il y a probablement une manifestation d'une certaine importance et qu'il fallait prendre toutes les mesures, à tous les niveaux - pratiques, logistiques, sécuritaires et autres - pour que tout se déroule au mieux.
Il reste encore une minorité d'irréductibles qui amènent des débats complètement décalés: soit c'est de la naïveté ou de l'incompétence, soit c'est du machiavélisme, parce que cela en arrangerait tant qu'il y ait des problèmes afin que leur vision du monde soit entérinée.
Nous apprenons, Mesdames et Messieurs les députés, en matière de manifestation. Effectivement, il y a eu pas mal de problèmes et tous apprennent de ceux-ci: les manifestants, les mouvements, les autorités... Et ce qui ressort de cela, c'est que lorsqu'il y a de la casse, ce sont des petits groupes qui en sont responsables, et pas forcément du bord politique auquel vous en attribuez toujours la responsabilité. Gênes en a été le meilleur exemple, le plus flagrant et le mieux documenté. Il y en a eu d'autres, cependant, parce qu'il y des gens qui ont objectivement intérêt à ce qu'il y ait de la casse, et ce sont des saboteurs qui n'ont plus rien à voir avec la gauche ou la droite. Et je n'aimerais pas arriver au soupçon que certains ici se trouvent du côté des saboteurs, consciemment ou inconsciemment. Nous avons tous intérêt à ce que cela se passe bien pour la réputation de Genève, et cette motion ne va pas du tout dans ce sens, parce que vous savez très bien que ça n'est pas praticable, réaliste ou légitime.
Me Halpérin est brillant sur le plan rhétorique, cela cache cependant mal la réalité. Quelle compagnie d'assurance se chargerait d'un pareil événement ? Soyons sérieux ! Il y a plein d'autres événements, nettement moins importants, que les compagnies d'assurance hésitent beaucoup à assurer. Les compagnies d'assurance ne couvrent des événements que lorsqu'elles ont une chance de pouvoir assigner une responsabilité. D'ailleurs, et cela constitue une des vraies bonnes nouvelles de la semaine, vous avez dû observer que les assureurs commencent à s'inquiéter des conséquences du réchauffement climatique et à poser des questions aux compagnies industrielles, car, dans ce cas, il y a des responsabilités imputables directement.
Mais comment voulez-vous attribuer une responsabilité lors d'une manifestation sans criminaliser les organisateurs, toutes les personnes pacifiques qui sont allées manifester ? Cela entraîne que beaucoup de gens, qui souhaiteraient manifester le plus pacifiquement du monde, renoncent à aller manifester, jeunes ou pas.
Oui, il y a des risques, mais, de grâce, arrêtez d'en faire un tel plat, c'est totalement irresponsable. Ou bien alors, il faut demander à ce que MM. Bush et Poutine, qui sont des casseurs de bien plus grande envergure, souscrivent une police d'assurance pour toute la casse qu'ils produisent, et dans ce cas il est possible de commencer à discuter... (Huées. Applaudissements.)
Le président. Bien, Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis de deux amendements qui peuvent chacun se diviser en deux. Je ferai voter ce maintien des quatre invites successivement.
Premier amendement de M. Mettan, suppression de la première invite, qui est à la page deux. Je fais voter par vote électronique, pour qu'il n'y ait pas de contestation et que tout le monde reste à sa place.
Mis aux voix, cet amendement (suppression de la première invite) est adopté par 50 oui contre 10 non.
Le président. La seconde invite, également dans l'amendement de M. Mettan et de M. Büchi, qui propose de supprimer la seconde invite, que je vous relis: «à exiger des organisateurs qu'ils concluent des polices d'assurance prévoyant une couverture conforme à l'ampleur de leur obligation de réparation civile, en sus de leur obligation de mettre sur pied, à leurs frais, un service d'ordre idoine». Celles et ceux qui acceptent cet amendement voteront oui et l'invite sera supprimée, les autres voteront non.
Mis aux voix, cet amendement (suppression de la deuxième invite) est adopté par 45 oui contre 32 non et 2 abstentions.
Le président. Nous passons au vote de l'amendement relatif à la troisième invite, c'est l'amendement de MM. Pagani, Grobet, Charbonnier, Hodgers et Brunier. Celles et ceux qui acceptent la suppression de la troisième invite voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront.
Non, Monsieur Hodgers, nous sommes en procédure de vote, je ne vous ai pas donné la parole, veuillez vous rasseoir ! Veuillez vous rasseoir !
M. Antonio Hodgers. J'ai le droit de parler !
Le président. Pas lorsqu'on est en procédure de vote... Monsieur Hodgers, veuillez vous asseoir !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 43 non contre 37 oui.
(Huées. Exclamations.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous continuons le vote sur la quatrième invite.
Nous passons maintenant au vote de l'amendement relatif à la quatrième invite. (Huées.) (Le président agite la cloche.)Maintenant, je fais lancer le vote sur la suppression de la quatrième invite.
Une voix. Vous n'en avez pas le droit !
Le président. Je l'ai. Le vote démarre. Un peu de calme !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 42 non contre 33 oui et 1 abstention.
Le président. Je fais maintenant voter sur l'ensemble de la motion (Huées.)Bon. Je suis saisi d'un nouvel amendement de M. Hodgers. Je vous rappelle simplement qu'il y a un débat sur Chêne-Bougeries prévu, et qu'à 23h, quoi qu'il arrive, la séance est levée, et je vous informe qu'il y aura une petite surprise après le vote qui n'est pas de ma part. Alors, troisième invite...
Des voix. Ahhhh... (Le président agite la cloche.)
Le président. Bon, je sais que c'est la nuit de la pleine lune, mais quand même. L'amendement de M. Hodgers serait: «invite le Conseil d'Etat à s'engager à poursuivre pénalement et civilement tout responsable individuel de tout dommage constaté». C'est tout ce que j'ai. Alors, Monsieur Hodgers, sur votre amendement.
M. Antonio Hodgers (Ve). Merci de respecter enfin scrupuleusement le règlement !
Il est vrai que les gens qui en viendraient à commettre des dommages sur des personnes ou sur des biens, dans le cadre de cette manifestation, doivent être poursuivis, pénalement et civilement. Ce que nous refusons, c'est de déclarer qu'il y a une responsabilité solidaire jusqu'où ? Jusqu'où, vu que la police collabore aujourd'hui avec les organisateurs: serait-elle inclue ? Ce «solidaire» n'a aucun sens, mais l'individuel est tout à fait justifié, et il me semble important que ça soit précisé.
Le président. La parole est à M. Christian Grobet sur cet amendement. Non, c'est une erreur. Très bien, je mets aux voix l'amendement qui vient d'être présenté par M. Hodgers, dont les chefs de groupe recevront le texte. Celles et ceux qui acceptent cet amendement voteront oui, les autres voteront non ou s'abstiendront.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 41 non contre 28 oui et 12 abstentions.
Le président. Je mets l'ensemble de ce qui reste de la motion, à savoir la quatrième invite telle qu'elle figure dans le texte des motionnaires. Oui, trois et quatre, excusez-moi.
Je mets donc l'ensemble de cette motion, qui n'a plus que deux invites. Celles et ceux qui l'approuvent voteront oui, les autres voteront non.
Mise aux voix, la motion 1543 ainsi amendée est adoptée par 42 oui contre 36 non.
Premier débat
Le président. J'ai le plaisir, à 21h45, de vous annoncer que le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement présente un nouveau plan de délimitation des zones à l'appui de ce projet de loi. Je m'étonne du travail de la commission. (Le président est interpellé.)Ecoutez, on ne sait plus sur quel document on travaille.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je suis désolé, Monsieur le président, vos facéties n'amusent plus personne. Le projet, que je présente comme amendement, est celui qui a fait l'objet d'un vote par la commission.
Par la suite, la commission a changé d'avis, ce qui est son droit, et elle est arrivée par conséquent à un autre projet.
L'amendement correspond à la position qui est celle du département depuis le début. Cet amendement est simple, c'est un numéro de plan différent, c'est celui que l'on avait voté en première séance.
C'est pourquoi, de grâce, épargnez-nous vos commentaires. (Applaudissements.)
Le président. Bien, il s'agit donc d'un amendement du département, parce que c'est encore quand même la position de la majorité de la commission qui est l'objet du débat que nous devons encore faire ce soir. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que la commission s'est prononcée sur plusieurs possibilités de périmètre, concernant ce projet de loi. Dans un premier temps, je voudrais rappeler que le périmètre qui était proposé au déclassement était à peu près quatre fois plus important que celui qui nous est soumis ce soir.
A la suite d'auditions, la commission s'est rendue à l'évidence et a admis que la moitié nord du périmètre ne pouvait pas être déclassée pour toutes sortes de raisons que vous trouverez dans le rapport que je vous ai présenté. Je n'entrerai donc pas dans le détail des motifs qui ont incité la commission à réduire le périmètre de moitié.
Puis, nous avons poursuivi les auditions, et - notamment après avoir entendu et la commune, et le représentant des propriétaires et des constructeurs du périmètre concerné, ainsi qu'un certain nombre de voisins opposants - la commission s'est rendu compte que, si l'on voulait être réaliste et si l'on voulait vraiment construire quelque chose à cet endroit, il fallait faire la proposition qui vous est faite ce soir, à savoir de prolonger la troisième zone de développement, qui existe le long du chemin de Grange-Canal, et de maintenir le reste en l'état pour toutes les raisons que j'ai exposées dans mon rapport.
Cette solution a l'avantage - et je pense que c'est un avantage qui n'est pas négligeable - de recueillir l'aval de la commune, l'aval des propriétaires et des constructeurs et l'aval des voisins. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons instamment à voter ce qui est proposé par la majorité de la commission. Car, Mesdames et Messieurs les députés, on n'aménage pas le territoire à coups de force et contre l'avis de ceux qui réalisent ledit aménagement sur le terrain, à savoir les constructeurs et les propriétaires, ni contre mais avec l'aval des autorités communales. Si vous proposez un autre déclassement à périmètre plus large, Mesdames et Messieurs les députés, nous le savons, parce que la commune l'a dit et répété, elle s'opposera au plan localisé de quartier.
Vous savez que ces derniers font l'objet d'une délibération du Conseil municipal, soumise à référendum; et lorsqu'un plan localisé de quartier ne reçoit pas l'aval d'une commune, il est extrêmement difficile de le faire aboutir et de faire en sorte qu'on le réalise jamais.
Mesdames et Messieurs les députés, il faut donc faire de la politique réaliste, et la politique réaliste consiste à essayer de construire des logements le plus rapidement possible. La proposition qui vous est faite ce soir par la majorité de la commission vise exactement cet objectif; nous pensons que c'est la seule voie pour l'atteindre.
Le président. Bien. Nous continuons le débat. Le rapporteur de minorité Pagani m'a demandé de d'abord donner la parole au rapporteur de première minorité M. Etienne. Messieurs les rapporteurs de minorité, vous demandez le retour à la proposition initiale du département, je vous rends attentifs au fait que le département a fait ce soir une proposition d'amendement qui est entre le plan initial, auquel vous vouliez revenir, et le plan de la commission. Il y a donc bel et bien trois plans ce soir.
M. Alain Etienne (S), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la question qui est posée ici est de savoir si oui ou non nous devons construire des villas sur ce secteur. En ce qui nous concerne, c'est non. Si des mesures conservatoires ont été prises par le département, c'est bien pour éviter de gaspiller le potentiel à bâtir qui existe sur cette parcelle.
Nous étions prêts à trouver un consensus par rapport au projet initial déposé par le Conseil d'Etat. La proposition de couper le périmètre en deux a été faite dans un premier temps, et nous étions d'accord de la suivre. Dire que l'on peut construire, ici, rapidement, des logements est à première vue une évidence, mais revient à hypothéquer sur le long terme les possibilités de construire un nombre plus grand de logements. Je ne comprends par conséquent pas la position de la majorité: lorsque l'aménagement du territoire est fait au coup par coup, vous nous dites qu'il nous manque une vision globale - c'était le discours libéral, lors de l'étude du plan directeur; et lorsque nous cherchons à avoir une vision globale, vous préconisez un aménagement au coup par coup, au gré des relations particulières que vous entretenez avec les milieux immobiliers et les propriétaires fonciers.
Vous pratiquez constamment un double discours que nous devons dénoncer sans cesse. Il ne s'agit pas d'aménager le territoire de manière autoritaire, mais de faire face à nos responsabilités: les plans localisés de quartiers, que vous craignez tant, permettent de dire comment il est possible d'aménager ces périmètres clairement identifiés. Le PLQ qui sera fait sur la petite partie que vous nous proposez ne pourra pas garantir un aménagement cohérent dans ce secteur.
La crise du logement que nous vivons mérite en effet que l'on trouve des solutions pour mettre rapidement des logements sur le marché, mais la solution que vous nous imposez ici est un leurre. Le projet de loi que vous nous proposez ce soir est inacceptable en regard de la politique d'aménagement et de développement de notre canton.
J'invite alors ce Grand Conseil à opter pour une solution plus raisonnable et à suivre la proposition du Conseil d'Etat qui nous est proposée ce soir. Il n'est pas admissible de laisser construire ces villas à cet endroit.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je rappelle que l'aménagement - parce que, bien évidemment M. Koechlin a essayé de cacher cette problématique - l'aménagement qui constituait au départ la proposition du département s'appelle PAC de Frontenex et La Tulette. L'objectif du département était de déclasser des terrains qui pourraient accueillir mille cinq cents logements. Aujourd'hui, ce qui nous est proposé, et nous le regrettons, c'est de construire vingt villas de super luxe et deux cents appartements de luxe.
Celles et ceux - c'est-à-dire les programmes du PDC, des radicaux et des libéraux - qui se sont battus pendant la campagne électorale pour faire croire à leurs électeurs qu'ils voulaient résoudre la crise du logement sont aujourd'hui au pied du mur et présentent à leurs électeurs le résultat de leurs élucubrations - parce que ce sont bien évidemment des élucubrations - c'est-à-dire deux cent vingt logements au maximum, sur un terrain qui aurait pu en compter mille cinq cents, Mesdames et Messieurs les députés.
Vous avez beau rigoler, Monsieur Muller, le périmètre du premier projet de loi du département, c'était mille logements, mais La Tulette, si on la prend en considération, c'est au bas mot cinq cents logements supplémentaires. Je trouve parfaitement scandaleux que certains, qui prônent encore aujourd'hui la lutte contre la crise du logement et le don de tous les moyens aux constructeurs pour mettre à la disposition des habitants des logements relativement bon marché, soutiennent aujourd'hui cette proposition, cela d'autant plus que nous nous trouverons dans quelques mois devant des propositions de déclassement de la zone agricole.
Certains de ces mêmes partis, et en l'occurrence le parti démocrate-chrétien, ont inscrit dans leur programme qu'ils préféraient déclasser des terrains se trouvant en zone villa non construite - et nous sommes en zone villa non construite - plutôt que de déclasser de la zone agricole. Or aujourd'hui ceux-là mêmes qui prétendaient ça font le contraire, en facilitant la construction de villas sur des terrains qui sont excellemment situés - parce que, je le rappelle, ce terrain est situé à moins de cinq cents mètres de la gare des Eaux-Vives, près d'infrastructures scolaires, dans un lieu qui est déjà urbanisé et qui se trouve dans la couronne suburbaine.
En réponse à tous ceux qui veulent arrêter le développement outrancier et la densification de la ville, nous prétendons que c'est un terrain excellemment bien situé, qui permettra à tous ceux qui rouspètent, parmi les bancs me faisant face, en disant qu'il n'y a pas de possibilité de circuler, qu'en implantant en tout cas mille logements sur cette superficie on met les futurs habitants de ce lieu à quinze minutes de toute infrastructure de la région genevoise.
La suppression des pendulaires commence par ici: donner des solutions au transport pendulaire et au déséquilibre qui subsiste dans notre ville entre le travail et le logement, ça commence par ce type d'infrastructures.
Que nous propose-t-on aujourd'hui ? On nous propose de rendre service à un promoteur qui a fait d'excellentes affaires, ayant acheté un terrain, parce qu'il y avait une banque en situation de déséquilibre. Ce promoteur veut maintenant viabiliser cette affaire et obtenir encore plus de bénéfices sur ce terrain en construisant des logements de haut standing pour une catégorie minoritaire de la population.
Je juge cela irresponsable du point de vue des engagements que ces partis ont pris et des mauvais procès qu'ils ont fait à la gauche. C'est aussi irresponsable du point de vue de la crise du logement que nous subissons aujourd'hui de plein fouet, de même que cela l'est vis-à-vis des familles qui s'entassent dans des deux ou trois-pièces et vis-à-vis des demandeurs de logement.
Il faut savoir ce que l'on se veut: il y avait un consensus jusqu'à maintenant à la commission de l'aménagement qui visait à faire en sorte de prioriser le déclassement des terrains non construits de zone villa en zone de développement. Ce consensus a été rompu, c'est la première fois, et je le déplore. Chacun doit prendre ses responsabilités dans le débat de ce soir.
Le président. Monsieur Pagani, j'aimerais quand même être sûr de ce que vous demandez. Demandez-vous ce qui figure dans votre rapport, à savoir le retour au plan initial, ou vous demandez, comme M. Etienne, l'acceptation de l'amendement de ce soir ?
M. Rémy Pagani. Je reviendrai, dans le cadre des amendements, sur notre position. Nous estimons que notre tâche consiste à déclasser des terrains pour les mettre à disposition des potentialités à bâtir dans ce canton sur le long terme et non pas immédiatement à la construction. J'estime donc qu'il est vital de déclasser l'ensemble de ce terrain, comme l'avait proposé le Conseil d'Etat dans un premier temps, et c'est pourquoi nous proposons donc de revenir au plan initial, Monsieur le président.
Le président. Vous me ferez bien l'amendement, parce que je n'ai pas les numéros de ces plans, c'est pourquoi je ne peux pas faire voter le dernier article, l'article numéro 4, qui parle du plan.
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, depuis quatre ans que je siège à la commission d'aménagement, j'ai appris qu'en matière d'aménagement du territoire il fallait se méfier des idées toutes faites ou des solutions qui semblent simples à première vue. Dans les faits, non seulement il n'en est rien, mais j'ai également eu maintes fois l'occasion de vérifier que, même si l'aménagement est de la responsabilité du pouvoir du canton, dans la réalité, on ne fait rien, ou presque, sans la complicité et l'accord plus ou moins forcé des communes.
Certes, il faut des principes, des règles, des plans directeurs, mais, à coup sûr, ces bonnes intentions ne peuvent et ne doivent pas être des dogmes. Le pragmatisme doit également intervenir dans nos prises de décision. Même si nous devons être fermes, volontaires et déterminés pour défendre au maximum nos principes d'aménagement, dans la plupart des cas, une attitude butée, ne concédant rien, ne provoque que le blocage des procédures ou des oppositions sans fin.
Nonobstant la crise du logement, notre population, bien souvent relayée avec force par les autorités de nos communes ou par des associations, cherche à s'opposer avec détermination à nos nécessaires tentatives d'urbanisation. Il faut donc composer, arbitrer et parfois trancher. Sans contexte, le projet de loi 8667 initial, visant au déclassement d'un large périmètre constitué de onze parcelles représentant une superficie totale de 91 890 mètres carrés, représente une intention fort louable et susceptible d'être une des réponses importantes à la grave crise du logement.
Ce projet a pourtant le défaut majeur de cumuler les difficultés, puisque, par exemple, il met en opposition des propriétés publiques ou privées aux intérêts fort divergents. La présence, dans ce périmètre, d'installations sportives, nécessaires à l'équipement public de la Ville de Genève, de maisons de valeur patrimoniale incontestée, tout comme celle d'arbres plus que centenaires, rendent le traitement d'un tel projet extrêmement délicat. Qui plus est, les difficultés ont été encore renforcées par la volonté de l'un des propriétaires de valoriser une partie de ce terrain le plus rapidement possible, volonté par ailleurs parfaitement respectable, Monsieur Pagani, même si elle est difficilement conciliable avec nos impératifs, qui consistent à construire de manière aussi dense que possible, dans un périmètre proche de la ville et déjà bien équipé.
Mais des impératifs, nous en avons également d'autres, comme celui de réaliser rapidement des logements, et des logements de toutes catégories, ou encore de préserver au mieux ce patrimoine vert tant apprécié, plus particulièrement ses arbres, indispensables à la vie.
Or, Mesdames et Messieurs les députés, ce qui vous est présenté aujourd'hui pour approbation par la majorité de la commission d'aménagement, c'est la synthèse de ces éléments. C'est une première solution pour l'intérêt du plus grand nombre. Contrairement à ce que prétendent les deux rapporteurs de minorité, les intérêts de toutes les couches de la population sont préservés.
Tout d'abord, il convient de préciser que les constructions, prévues sur la surface d'environ 17 000 mètres carrés restant en zone villa, ne seront pas des villas individuelles, comme vous le prétendez, mais des maisons en habitat regroupé dont les implantations préservent la totalité des chênes et autres arbres, ce qui n'est pas la moindre des qualités du projet, lequel prévoit plus de trente logements et non pas vingt, comme cela a été faussement affirmé par M. Pagani. Ces trente logements, construits sous forme de «clusters», comme les désigne lui-même M. Gardet, le patron de l'aménagement au DAEL, viendront rapidement répondre à une demande importante de ce type de logements.
En outre, le sol du périmètre, faisant l'objet de cette loi de déclassement, en première étape du PAC Frontenex-Tulette, permettra, à très court terme, la construction de deux cents logements sociaux. Je dis «à court terme», car nous savons que si vous votez ce déclassement ce soir, les propriétaires sont prêts à se mettre au travail dès lundi, afin de définir, avec le département et la commune, un PLQ intelligent, reprenant les premières remarques de l'urbaniste chargé du PAC de Frontenex. Or ce PLQ sera rapidement défini, ce à quoi je crois, car tant les promoteurs, dont c'est l'intérêt évident, que la commune - par la voix de sa conseillère administrative déléguée et par celle de tous les horizons politiques de sa commission d'urbanisme - s'y sont engagés devant notre commission. Cela est d'ailleurs évoqué en page 6 du rapport de majorité.
Il convient également de rappeler qu'aménager à 0,4, pour une part, et à 1,2, pour l'autre part, l'ensemble de cette parcelle, produira une densité d'environ 0,82, ce qui, compte tenu de la nécessaire préservation des arbres, représente une densité confortable pour tous les futurs habitants de ce secteur et ne péjore en rien la suite du développement de l'ensemble du secteur.
En première conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, ce que nous proposons ce soir, et qui est le fruit d'une première réflexion et d'une pesée d'intérêts, n'est pas, contrairement à ce qu'affirment MM. Etienne et Pagani, une trahison par rapport aux intentions de nos programmes électoraux. Si nous partageons tous l'idée de construire, nous divergeons quant aux moyens: à une vision figée, sans prise en compte des réalités du terrain, des réalités sociologiques, économiques ou simplement pratiques, nous opposons ce soir une solution pragmatique, pouvant être rapidement mise en oeuvre, mettant, à court et à moyen terme, deux cent trente logements à la disposition de notre population, laquelle, en ce moment, a un besoin urgent de ce type de solutions, plutôt que de se lancer dans de grandes envolées urbanistiques que les groupes de travail mettront des années à concrétiser d'un seul coup.
La progression par étapes, tout en préservant les possibilités à venir, est, avec d'autres, l'une des solutions, pour, patiemment mais plus sûrement, répondre à la forte demande de logements de tous types. C'est une attitude que les démocrates-chrétiens sont prêts à assumer, avec, nous l'espérons, la majorité de notre Grand Conseil.
Pour terminer, j'aimerais revenir sur l'amendement de dernière minute du département. Monsieur Moutinot, malgré tout le respect que je vous dois, vous parlez des facéties de notre président du Grand Conseil: eh bien, moi, ce soir, en tant que président de la commission de l'aménagement, j'estime que c'est une mauvaise farce que vous faites à ce Grand Conseil... (Manifestation dans la salle.)...en arrivant avec cet amendement - même si vous en avez parfaitement le droit, je vous le concède - parce que c'est faire fi de tout le gros travail - je vous rappelle que nous avons consacré neuf séances de commission d'aménagement à ce sujet - issu de la commission et de la majorité de cette dernière.
Encore une fois, je ne vous dénie pas le droit de ne pas partager l'opinion de la majorité de la commission, mais je trouve que c'est vraiment peu respectueux de notre travail.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de vous dire combien je suis sidérée par les derniers propos de M. Portier, s'agissant de la proposition d'amendement du département. Nous y reviendrons tout à l'heure. Malheureusement, c'est aussi une illustration de la façon dont travaille la majorité de droite de cette commission de l'aménagement: d'abord on affirme qu'il est impératif de construire des logements en cette période de pénurie - tout en incriminant les lourdeurs de procédure, les tracasseries administratives - et lorsqu'on se trouve face à un projet raisonnable, où il s'agit de déclasser de la zone villa pour permettre une certaine densification, on met les pieds au mur sous des prétextes fallacieux.
Le projet qui était initialement proposé par le département correspondait au plan directeur de l'aménagement - qui a été voté, je vous le rappelle, il y a plus de deux ans - car les terrains concernés se situent en prolongement du tissu urbain avec la présence d'équipements de quartier dans un endroit attrayant et proche des transports collectifs, qui seront encore développés à cet endroit.
Au lieu de se rendre à ces raisons, la majorité de droite de la commission a préféré écouter les chantres du quant-à-soi de la commune de Chêne-Bougeries, qui ne souhaitent pas contribuer au développement de notre canton et laissent à d'autres communes moins favorisées la responsabilité de construire des logements.
M. Etienne rappelle très justement, dans son rapport de minorité, que la commune de Chêne-Bougeries a, dans sa zone à bâtir, 80% de zone villa. Je crois que cette proposition de densification était tout à fait acceptable et justifiée.
Lors de la deuxième audition de la commune de Chêne-Bougeries, on s'était même entendu dire qu'il fallait préserver des espaces de verdure pour la population. Cela est le comble de l'hypocrisie quand on sait que ces espaces de verdure se trouvent sur des terrains privés: il faudra qu'on nous explique comment cela profitera à la population. Tout cela n'est absolument pas crédible. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons été élus pour défendre l'intérêt général, et non pas le pré carré de certains, qui veulent préserver des intérêts purement égoïstes.
Dans le cours des discussions, néanmoins, et contrairement à ce que dit M. Portier, nous étions prêts à faire des concessions et à accepter de scinder ce projet en deux - cela va dans le même sens que la proposition de M. Moutinot, qui ne tombe donc pas du ciel - et nous étions prêts à ce consensus, à l'issue d'une séance de la commission d'aménagement. Et voilà que, la semaine suivante, les députés de l'Entente ont eu des nouvelles messes basses avec les représentants de la commune, et ont décidé qu'il fallait encore scinder une fois le projet en deux, si bien que nous sommes maintenant dans un mouchoir de poche.
Vraiment, ce sont des manières de travailler qui ne sont pas crédibles du tout, et je pense que c'est une façon tout à fait désastreuse de concevoir l'aménagement, parce que cela est de l'aménagement au coup par coup, décrédibilisant de surcroît le monde politique. Nous étions tout à fait ulcérés par cette attitude, et c'est pourquoi nous avons décidé de revenir au projet initial, mais maintenant nous sommes prêts à entrer en matière sur la proposition du département.
Mme Anne Mahrer (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, Mme Fehlmann Rielle vient de dire, pour l'essentiel, ce que je souhaiterais redire: ce périmètre a été défini, dans le plan directeur, comme périmètre à urbaniser, qu'il fait l'objet d'un PAC - et les Verts sont très attachés à la concertation - et qu'il est effectivement bien desservi par les transports publics, qu'on pourrait imaginer une station RER avec le projet CEVA et, enfin, qu'il est proche du centre-ville.
On peut donc imaginer une urbanisation nuancée, il est vrai que ce site est sensible, qu'il a de grandes qualités paysagères, que l'on peut parfaitement respecter avec un aménagement adapté.
Nous étions aussi prêts à accepter de scinder ce projet en deux, et nous nous rallierons, ce soir, au projet du département. Je vous remercie.
M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais placer le débat à un autre niveau. Lundi prochain - la semaine prochaine - aura lieu, à 17h, une deuxième séance de concertation sur le PAC de Frontenex-La Tulette, qui réunit plus de septante personnes faisant partie des communes, des associations et des partis politiques concernés. Cette séance de concertation fait suite à un premier séminaire qui a eu lieu le 1er octobre 2002. Il s'agit de ce qu'on appelle les «plans d'aménagement coordonnés» - il y a quelques années, c'étaient des «plans d'aménagement concertés».
Je vous rappelle, et je rappelle à la majorité d'alors, que le plan directeur voté en 2001 a prévu ce nouvel outil d'aménagement. J'aimerais tout de même vous rafraîchir la mémoire: «Les périmètres d'aménagement coordonnés sont des espaces porteurs d'enjeux de première importance, significatifs pour l'ensemble du canton. Une planification directrice de quartier y est nécessaire, de manière à garantir un aménagement de qualité et à instituer un cadre prénégocié» - prénégocié ! - «permettant ensuite de traiter les projets de construction de manière transparente. Cette planification est à formaliser progressivement, en assurant une large place à la concertation». Voilà pour le rappel du cadre.
Lors du premier séminaire sur ce périmètre, le président du département, M. Moutinot - je cite le procès-verbal de cette séance, à laquelle j'avais participé, comme d'autres ici - a dit textuellement: «A l'heure actuelle, l'image d'aménagement du secteur n'est pas définie, et tout reste à faire. C'est précisément dans ce but que va oeuvrer le groupe de concertation. Ce processus, que le département est en train d'expérimenter dans les PAC, est en cours d'étude». La synthèse de cette première séance - composée de septante personnes, je vous le rappelle - dit la chose suivante: «Il est maintenant indispensable de réfléchir sur l'aménagement de ce périmètre en termes d'analyse et de propositions, sans s'attarder plus longtemps sur des discussions préalables quant aux choix définitifs du statut juridique des zones de construction. Ces discussions semblent effectivement stériles avant que l'on ait pu parler des principes d'urbanisme», et enfin - et je terminerai ici mes citations - «il devrait être possible de contredire l'opinion qui prévaut parfois que les Genevois ne savent vivre que dans un grand immeuble ou dans une villa».
Mesdames et Messieurs les députés, j'ai dit que j'avais un problème de méthode, parce que j'avais participé à l'élaboration de ces plans d'aménagement concerté dans les années 96-97, et qu'à l'époque, en tant que membre de la commission consultative sur l'aménagement du territoire, je m'étais laissé convaincre - moi, le bétonneur ! - qu'on pouvait se concerter. C'était d'ailleurs le président M. Moutinot qui m'avait convaincu en disant: «Voyez-vous, Monsieur Barrillier, la seule méthode d'avancer à Genève, c'est de convaincre, c'est de réconcilier les habitants avec l'acte d'aménager et de construire».
Alors maintenant, en tant que député, je ne sais plus quoi faire, j'ai une concertation PAC, qui a toujours été voulue par la gauche: la concertation, l'autogestion, la participation, et puis, en même temps, Monsieur le président, le Conseil d'Etat nous dépose un projet de densification qui couvre la moitié du périmètre en concertation actuelle dans un PAC et qui plombe la concertation. Que faut-il faire ?
La commission a eu la sagesse de réduire au maximum la décision de déclassement pour permettre une concertation véritable, parce que, si on fait un coup de force dans cette affaire, je vous dis que je ne participerai plus au plan d'aménagement concerté ou coordonné. Lundi prochain, à 17h, que va-t-on faire si on accepte votre proposition ? Pour quelle raison réunissez-vous septante personnes ? Quel est cet instrument et quel est le rôle du PAC ? J'aimerais bien le savoir.
En conclusion, je vous invite à suivre la majorité de la commission. (Applaudissements.)
Le président. Nous continuons notre débat sur le projet de loi, et celui-là seul.
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais corriger un certain nombre de déclarations qui ont été faites par certains de mes préopinants.
M. Pagani, rapporteur de la deuxième minorité, tient à l'évidence un discours électoral, alors que nous sommes en dehors des élections, en parlant de 1500 logements que l'on pourrait construire. Comme ses camarades de l'Alternative, il vogue en plein délire, celui qui l'incite à prendre ses désirs pour des réalités.
Monsieur Pagani, on n'aménage pas le territoire au forceps. Il faut réaliser des logements, mais il faut les construire avec, premièrement, les personnes qui construisent et, deuxièmement, si possible, avec l'aval des communes concernées. Ce sont deux principes fondamentaux. Or vous proposez d'agir contre la volonté d'une commune, et encore, ce qui est pire, contre la volonté des constructeurs, qui sont les seuls à réaliser les logements que vous appelez de vos voeux.
Cela est si vrai, Mesdames et Messieurs les députés, que, dans ce canton, il existe des dizaines d'hectares de terrain qui sont déjà situés en zone de développement, certains depuis trente ans, d'autres depuis plus de cinquante ans, et qui ne sont pas construits. Et beaucoup de ces terrains ont fait l'objet d'études de plans localisés de quartier, qui, aujourd'hui, n'ont pas encore abouti. Ce sont des plans localisés de quartier qui ont été proposé depuis des années. Quant à d'autres de ces terrains en zone de développement, Mesdames et Messieurs les députés, on n'y construit pas, tout simplement parce que les propriétaires s'y trouvent bien et n'entendent pas construire: beaucoup y habitent et entendent y finir leurs jours; c'est leur droit - même s'ils sont en zone de développement, et parfois même avec un plan localisé de quartier en force. Il y a même, je vous le cite, tout près, un périmètre de deux hectares, vingt mille mètres carrés de terrain, Mesdames et Messieurs les députés, ce qui représente vingt-quatre mille mètres carrés de plancher.
Il y a eu trois plans localisés de quartier, M. Grobet les connaît bien, parce que le premier a été élaboré du temps où M. Vernet était chef du département. Puis, un deuxième plan localisé de quartier a été élaboré lorsque M. Grobet l'était à son tour, et puis il y en a eu un troisième, toujours sous le prétexte d'actualiser les choses, sous la présidence de M. Joye. Mesdames et Messieurs les députés, on n'a encore rien construit sur ce terrain, simplement parce que le propriétaire y habite et qu'il entend y finir ses jours. Des exemples comme ceux-là, Mesdames et Messieurs les députés, il y en a une quantité.
Or ce que la Gauche propose ce soir, avec M. Pagani, tenez-vous bien, attachez vos ceintures, parce que c'est surréaliste, c'est de déclasser l'ensemble de ce périmètre, qui comporte deux propriétés comprenant chacune une villa, qui a une valeur patrimoniale, dont il est exclu d'envisager la démolition. (L'orateur est interpellé.)Oui, mais vous proposez de reprendre le projet. Attends... (Le président agite la cloche.)C'est moi qui parle, ce n'est pas vous !
Le président. Monsieur Pagani, laissez parler le rapporteur, on ne vous interrompt pas trop, alors qu'il y aurait de quoi.
M. René Koechlin. Ce que vous proposez, c'est exactement ce qui se passe sur le plateau de Frontenex, c'est-à-dire de déclasser deux parcelles, parmi les autres, qui contiennent chacune une villa, qui a une valeur patrimoniale, et dont les propriétaires ont clairement dit qu'ils n'entendaient pas construire ni faire quoi que ce soit, mais qu'ils comptaient vivre dans ces maisons. Et vous voulez les déclasser pourquoi, alors ? Pour que l'on attende cinquante ans avant que, enfin, on y fasse quelque chose de bien. Il sera toujours assez tôt de le faire à ce moment-là.
Autre propriétaire de ce terrain dont vous proposez le déclassement: la Ville de Genève. Elle est venue déclarer devant notre commission... (Huées.)
Une voix. C'est faux !
M. René Koechlin. ...le terrain de football ?
Une voix. C'est de l'autre côté... Il n'est pas dans le périmètre...
Le président. Monsieur Pagani !
M. Christian Luscher. En plus, il est vulgaire !
Le président. Monsieur Luscher !
M. René Koechlin. Mesdames, Messieurs, je regrette qu'un conseiller administratif ne connaisse pas mieux le dossier. (Manifestation dans la salle.) (Le président agite la cloche.)...le terrain de football de la Ville fait partie du périmètre qui a été proposé au déclassement.
Des voix. Non !
M. René Koechlin. Oui !
M. Christian Grobet. Tu ne connais pas le dossier, va te rasseoir !
M. René Koechlin. Mais c'est vous qui ne connaissez pas le dossier !
Le président. Monsieur Grobet, Monsieur Hediger, vous prendrez la parole après, si vous le voulez.
M. René Koechlin. Mais c'est tout de même extraordinaire ! J'espère que M. Moutinot aura l'honnêteté de confirmer ce que je dis.
Une voix. Il n'est pas ici, le terrain de football, il est là !
M. René Koechlin. Mais non ! Il est... (Le président agite la cloche.)Mettez votre crayon de l'autre côté... Le périmètre est là et le terrain de football est ici. (Manifestation dans la salle.)Il est de l'autre côté... (L'orateur est interpellé.)Mais c'est inouï, quand même ! De mentir aussi effrontément ! (Manifestation dans la salle.)C'est faux !
Une voix. Allez, continue !
M. René Koechlin. J'y passe tous les jours, je le connais par coeur ! (Manifestation dans la salle.)Mais venez ici que je vous explique ! Monsieur Hediger, venez ici que je vous explique !
Le président. Monsieur le rapporteur, vous vous adressez au Grand Conseil ou à moi-même !
M. René Koechlin. C'est inouï. Des gens vous montrent...
M. Christian Grobet. Il est là, le terrain ! Ceci, c'est le projet de classement... Il est là... C'est le truc de l'UBS !
Le président. Monsieur Grobet !
M. René Koechlin. Mais non, l'UBS est ici !
M. Christian Grobet. C'est ça, l'UBS...! Tu ne connais pas ton dossier !
Le président. Je constate, en tout cas, que les rapports de la commission de l'aménagement sont peu clairs. Monsieur Koechlin, vous avez deux minutes.
M. René Koechlin. Monsieur le président, je déplore que des députés mettent en doute des évidences, et je me demande pour quels motifs, Mesdames et Messieurs, nous aurions dû auditionner le Conseil administratif de la Ville de Genève, qui venait défendre son terrain de football - et on sait très bien duquel on parlait. Alors vous êtes quand même incroyables, venez à la commission de l'aménagement et suivez les dossiers un petit peu mieux que de la manière dont vous le faites.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. René Koechlin. Oui, c'est scandaleux. Et quand je pense que c'est l'ancien maître de sport de la Ville de Genève qui vient nous dire des choses ! (L'orateur est interpellé.)Non, ce n'est pas de l'UBS. (Le président agite la cloche.)C'est un scandale d'entendre des choses pareilles. (Brouhaha.) (Manifestation dans la salle.)Bien, Mesdames et Messieurs les députés, toujours est-il que les quatre propriétaires concernés, dont la Ville de Genève fait partie, sont venus dire qu'ils n'entendaient pas qu'on déplace leur terrain de sport. Ils ont demandé qu'on ne déplace pas leur terrain de sport, au même titre que l'UBS, qui a aussi des terrains de sport, qui est un club de tennis, et qui a demandé qu'on ne les déplace pas.
Une voix. On va voir sur place !
M. René Koechlin. Mais non ! Ils ne connaissent pas le dossier, c'est évident. (Manifestation dans la salle.)
Une voix. Mais arrête !
M. René Koechlin. Ils ne connaissent pas le dossier, c'est quand même inouï qu'ils viennent perturber un débat avec des contrevérités. C'est inouï.
Le président. Je vais quand même vous dire, Monsieur Koechlin, qu'il est plus facile, pour des députés, de mettre en doute des évidences que de mettre en évidence leurs doutes. (Exclamations.) (Applaudissements.)
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que M. Hediger se fera un plaisir de prendre M. Koechlin... André, André, André ! (Exclamations.) (Brouhaha.)Dis-moi que ça te fera plaisir de prendre M. Koechlin par la main, de l'amener du côté du Pré-Picot, qui est la propriété de la Ville de Genève, et de lui montrer de quel côté du chemin...
Le président. Messieurs Hediger et Koechlin, veuillez, s'il vous plaît... (Le président est interpellé.)Vous vous raconterez vos histoires après. Bien, Monsieur Grobet, continuez ! Je vous rappelle qu'à 23h, soit c'est renvoyé en commission soit c'est voté, mais en tout cas nous lèverons la séance.
M. Christian Grobet. Les minutes se comptent à partir du moment où on peut parler... (Exclamations.)...et, si vous ne m'interrompez pas, cela ira d'autant plus vite. Ce que je voulais dire, c'est qu'on peut être fatigué, ça nous arrive à tous, et je comprends que, parfois, le soir, on confonde les choses, cela arrive à d'autres députés dans cette enceinte. Vous avez confondu, ça peut arriver, le terrain de sport de l'UBS qui était prévu dans le projet... (Exclamations.)
Une voix. Mais non !
M. Christian Grobet. ...dans le projet de déclassement initial et le terrain Pré-Picot, propriété de la Ville de Genève, qui n'était pas compris dans le périmètre initial. Bref, ce n'est pas grave, M. Hediger m'a promis de vous prendre par la main pour vous amener au Pré-Picot. Comme ça vous connaîtrez mieux le plateau de Frontenex. Cela étant dit, je n'aimerais pas faire de peine à M. Pagani et à l'autre rapporteur de minorité, mais je ne suis pas d'accord avec vous sur un point essentiel, à savoir que je ne pense pas, contrairement à ce que vous avez dit, que le PDC a trahi son programme électoral. Je crois qu'au contraire le programme électoral des partis de droite est parfaitement clair, on l'a compris, notamment du côté du PDC, qui, il est vrai, il fut un temps, avait des magistrats remarquables comme M. Jean Dutoit et M. Jean Babel... (Exclamations. Brouhaha.)...menaient activement... (L'orateur est interpellé.)...j'allais arriver à M. Dutoit, parce que j'allais arriver aux radicaux. J'ai fait un petit saut trop rapide, je voulais dire Emile Dupont et Jean Babel... (Exclamations.)Je voulais dire que les radicaux avaient un éminent magistrat qui s'appelait Jean Dutoit, et c'était des constructeurs de logements, et ces deux partis peuvent être fiers de ce que ces magistrats ont fait. Mais depuis, il faut bien dire que l'intérêt général... (Brouhaha.) (Le président agite la cloche.)
Le président. Messieurs les libéraux, je vous en prie !
M. Christian Grobet. Je ne cite pas les libéraux, parce qu'effectivement les logements sociaux ça n'a jamais été votre tasse de thé, donc là il n'y avait rien de surprenant. Je voulais simplement dire que les PDC et les radicaux ont complètement tourné casaque depuis un certain temps, et votre politique est claire: vous voulez favoriser les promoteurs, parce qu'ici, et je crois que M. Koechlin a été très clair, pour lui, pour vous, c'est le promoteur qui doit décider. Et on doit lui laisser faire son projet, même si cela va à l'encontre de l'intérêt général.
Je dois dire, Monsieur Koechlin, que ce soir vous vous êtes révélé dans toute votre splendeur, parce que d'habitude on vous entend vous lever, pousser des jérémiades sur les projets qui sont bloqués, l'impossibilité de construire des logements à Genève, enfin, tous ces discours que vous tenez d'habitude. Or ce soir, vous voulez diminuer des trois quarts le projet de déclassement, pour ne plus utiliser qu'une petite partie du terrain affecté à la construction de logements, et vouer le reste en priorité à la construction de logements de luxe. Vous savez aussi bien que moi, et que de nombreux autres députés dans cette enceinte, que la zone villa représente 50% de la zone de construction de ce canton. Il y a beaucoup de terrains pour la construction de villas: ce n'est pas la priorité aujourd'hui. La priorité c'est de construire des logements locatifs répondant aux besoins de la grande majorité de la population, non des logements de luxe.
Aujourd'hui, vous ne voulez pas du tout faire un projet de concertation, vous voulez simplement exécuter les désirs d'un promoteur, qui a mis la main sur une parcelle et qui sait qu'il fera plus de profit en construisant des logements de luxe qu'en construisant des logements locatifs pour les besoins de la population. Quant à M. Barrillier, qui est tout le temps en train, aussi, de gémir, de faire des auto-proclamations des métiers du bâtiment: vous avez vraiment perdu une bonne occasion de vous taire, ce soir, parce que, quand vous venez aussi prétendre qu'il faut dynamiser la construction, je constate qu'entre vos propos et vos votes c'est le grand canyon.
J'aimerais encore ajouter une ou deux remarques à propos de cette affaire. Vous nous avez fait du bluff, Monsieur Barrillier, avec M. Muller, de prétendre que vous alliez mettre 500 logements sur le marché si la modification de la LDTR, destinée à augmenter les loyers, avait été adoptée par le peuple. Et vous avez encore osé, oséentretenir ce mythe, et, lorsque, le soir de la votation, vous avez perdu sur cette modification de la LDTR, vous vouliez encore faire croire que vous alliez mettre 500 logements sur le marché. D'abord, ç'aurait été des logements existants qu'on aurait retapés, donc ce n'était pas des nouveaux logements, et quand on vous a demandé, parce que je savais que tout ça c'était du bluff, de nous donner la liste des appartements qui auraient pu être rénovés en vertu de cette loi, vous étiez incapable de citer un seul immeuble.
Alors, vous comprenez, votre discours, on commence à le connaître. Vous prétendez que des logements vont être construits, pour démanteler la protection des locataires, et puis quand il s'agit de construire, tout à coup, vous êtes les défenseurs du patrimoine, vous êtes les défenseurs des zones vertes - j'entends M. Koechlin vouloir sauver une villa, alors que dans le périmètre dans lequel vous parliez de ce plan d'aménagement vous vouliez démolir ces villas. J'ai dû me battre contre vous avec la Ville de Genève pour sauver ces deux maisons, et aujourd'hui vous faites semblant de porter intérêt à des maisons que vous auriez été les premiers à démolir. Alors, vous comprenez, ce double langage, ça prend peut-être auprès de certains, mais pas auprès de nous et, comme cela a été dit tout à l'heure, ce double langage commence à devenir intolérable.
Pour le surplus, quand vous dites, et cela est vrai, qu'il y a un certain nombre de terrains qui ne sont pas bâtis en zone de développement - d'abord la plupart ne sont pas des terrains non bâtis, vous le savez, ce sont des territoires où il y a des villas, des maisons existantes, et c'est vrai que ce sont des opérations très difficiles de démolir des villas et de reloger les gens, leur trouver des autres terrains pour construire - laissez-moi vous dire qu'il n'y en a pas autant que ça et je vous défie de me donner, sur-le-champ, dix exemples de terrains de vingt mille mètres carrés non bâtis, en zone de développement et, si possible, à l'intérieur d'un plan localisé de quartier. Vous me donnerez la liste tout à l'heure et on la vérifiera ensemble.
Le président. Il faut conclure.
M. Christian Grobet. Pourquoi faut-il déclasser l'autre moitié que le Conseil d'Etat a proposé ? Vous le savez très bien. D'habitude, vous jouez au maître d'école ici en disant: «Il faut voir l'avenir, il faut prendre les dispositions nécessaires pour préserver et permettre la construction de logements», alors que ce soir vous dites «non, il ne faut pas déclasser des terrains, on ne veut pas bâtir, on attendra». Jusqu'à ce qu'un architecte vienne nous proposer de faire des villas sur ces terrains que vous refusez de déclasser ? Puis après on nous dira, avec une voix désolée: «Oh, c'est trop tard, on ne peut plus les déclasser, et, vous vous imaginez, ce pauvre promoteur, qui a imaginé de faire des villas, et qui ne pourra pas les construire, mais c'est horrible !» (Rires.)
Alors, vous avez raison, il ne faut surtout pas déclasser ! (Applaudissements.)
M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je n'aimerais pas rentrer dans des polémiques stériles. Je voudrais tout d'abord m'arrêter sur un certain nombre de propos et de contrevérités que j'ai relevés dans les deux rapports de minorité.
Tout d'abord, M. le rapporteur Etienne parle du fait que les groupes de l'Entente voulaient servir en priorité des intérêts privés. Non, bien sûr que non ! Vous vous asseyez, vous me laissez parler et, quand j'aurai fini, vous vous adresserez aux députés. Merci, Monsieur Sommaruga.
Non. Ce que nous voulons, et certains de mes préopinants l'ont déjà dit, c'est construire rapidement des logements pour tout le monde. Nous avons parlé des périmètres d'aménagement, comme l'a rappelé M. Barrillier tout à l'heure, nommés autrefois «périmètres d'aménagement concertés» et par la suite, pour des raisons connues, rebaptisés «périmètres d'aménagement coordonnés». J'aimerais tout simplement rappeler que ces périmètres, M. Moutinot le sait d'ailleurs aussi bien, puisqu'il y a eu treize périmètres. Sur ces treize, six sont déjà passés, et ont été acceptés, et pourquoi ? Tout simplement, parce qu'ils ont fait l'aval des communes concertées, des propriétaires et de tous les partenaires concertés. Par conséquent, quand il y a concertation, on arrive à des résultats.
Quant au rapport de M. Etienne, il parle de la commune de Chêne-Bougeries en la citant comme une commune qui reste comme un petit village. Monsieur Etienne, j'aimerais quand même vous rappeler que la commune de Chêne-Bougeries a été pionnière dans la construction massive de logements, puisque les immeubles de la Gradelle étaient, après le Lignon, un des premiers grands projets de logements collectifs à Genève. Alors ne dites pas que la commune de Chêne-Bougeries veut rester un petit village !
J'aimerais aussi vous rappeler, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a sur la même commune un projet de développement, qui s'appelait la Garance, et qui a été rebaptisé les Hauts de Malagnou. Et qui bloque ce projet aujourd'hui, qui pourrait mettre plusieurs centaines de logements sur le marché ? Ce sont les Verts. Il faut donc rendre à César ce qui est à César, et la commune de Chêne-Bougeries, qui n'est pas un petit village, a montré des efforts certains pour la construction de logements collectifs, de toutes catégories confondues.
M. Etienne, dans son rapport, parle de 50 à 60 logements. Alors là, je dois rendre honneur à M. Pagani, qui lui, au moins, a eu l'honnêteté, dans son rapport de deuxième minorité, de donner le bon nombre, c'est-à-dire de 220 logements en tout. Ne mettez donc pas de contrevérités aussi grosses que celle-ci en parlant de 50 à 60 logements qui pourraient être réalisés.
Quant à M. Pagani, comme le dit le proverbe populaire de circonstance, «c'est au pied du mur que l'on reconnaît le maçon». Eh bien, le maçon - oui je suis un maçon - est un maçon qui aimerait construire. (L'orateur est interpellé.)On se passe de tes commentaires. Et nous avons, en effet, Monsieur Pagani...
Une voix. Un franc-maçon !
Une voix. Exactement !
Le président. Messieurs, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés !
M. Olivier Vaucher. M. Grobet, tout à l'heure, a demandé à M. Koechlin, de lui faire une liste d'au moins dix objets qui pourraient être réalisés dans un délai très bref: nous avons justement déposé, M. Koechlin, Mme Hagmann et moi-même, une motion, que le président Moutinot a acceptée, pour construire des logements dans un endroit où ils peuvent se faire immédiatement, avec l'aval de la commune, du Conseil municipal et des propriétaires. La liste pourra donc vous être donnée, sans aucun problème.
C'est pourquoi le maçon que je suis peut vous dire qu'il y a des possibilités de construire rapidement, là où il y a eu concertation, avec des partenaires désireux de faire quelque chose à Genève.
Enfin, M. Etienne dit qu'il n'y a, dans le secteur qui nous occupe pour le moment, que des villas qui peuvent se construire. Bien sûr que non, Monsieur Etienne, je veux bien que l'on plaisante, qu'on attaque certains promoteurs, les spéculateurs - oui, c'est du passé, et ils ont fait beaucoup de mal à la République, mais, heureusement, il n'y a pas seulement des spéculateurs, il y a aussi des promoteurs, qui essaient de construire des logements toutes catégories confondues. Il n'y a donc pas de double discours, chez nous. Il y a eu, sur treize, six périmètres d'aménagements concertés qui ont déjà été réalisés. Pourquoi ? Parce que tous les partenaires étaient d'accord.
Il n'y a pas de concertation, Mesdames et Messieurs les députés, sans un consensus. Ce consensus se travaille. C'est la raison pour laquelle ce périmètre a été réduit momentanément à une portion congrue, qui permet de réaliser immédiatement 220 logements, comme cela a justement été dit.
Une possibilité de périmètre élargi reste ouverte, puisque, comme M. Barrillier l'a rappelé tout à l'heure, il y a un groupe de travail, il y a des séminaires, il y a une commission ad hoc, il y a des personnes intéressées qui travaillent sur le périmètre, et peut-être que d'ici quelques mois, quand la concertation sera terminée, l'on arrivera, dans ce périmètre, à réaliser d'autres logements. J'aimerais bien sûr rappeler ceci à M. Pagani qui ne parle que de logements de luxe qui seront réalisés dans ce périmètre: non, Monsieur Pagani. Oui, pour quelques villas, appelez-les comme vous voulez, que ce soient des «clusters», comme les appelle M. Gardet, ou autre dénomination, mais il y a aussi des immeubles - et M. le président Moutinot est assez intelligent, et il le sait, comme vous et moi, quels sont les besoins en matière de logement à Genève, pour négocier - il y a déjà, dans les constructions du promoteur, des logements sociaux qui seront prévus.
Alors de grâce, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je conclurai ainsi: laissez la concertation se faire et nous aurons des logements dans des délais bien plus brefs que si nous les imposons à ceux qui n'en veulent pas. Merci Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais rapidement revenir sur les propos de Mme Fehlmann Rielle et de M. Grobet.
Madame Fehlmann Rielle, vous dites que nous avons une façon désastreuse de concevoir l'aménagement. J'en prends acte. Il y a six ans, qui est donc arrivé au pouvoir, dans cette République ? Il me semble que c'est la gauche, l'Alternative. (L'orateur est interpellé.)Vous aviez, pendant quatre ans, tout loisir d'appliquer vos propres concepts d'aménagement. Combien de logements avez-vous construits pendant cette période ? Une misère, Mesdames et Messieurs les députés, une misère qui fait que nous sommes, sur le front du logement, dans un jus noir, actuellement. Alors, s'il vous plaît, ne venez pas nous donner des leçons à cet égard !
Deuxième chose, Madame Fehlmann Rielle: vous dites qu'il faut revenir à l'amendement du Conseil d'Etat. Bon. Mais vous ne dites pas, Madame Fehlmann Rielle, combien de temps il faudra pour mettre tout le monde d'accord, combien de temps il faudra pour déjouer toutes les oppositions qui se cumuleront - celles de la commune, celles des privés. Ce dont la population a besoin, c'est de logements maintenant, Madame Fehlmann Rielle, pas à la Saint-Glin-Glin. (Applaudissements.)
Monsieur Grobet, vous dites de notre projet qu'il est croupion. Non, Monsieur Grobet, vous tentez de tromper les gens, les téléspectateurs, notamment. Vous savez très bien qu'il ne s'agit là que d'une première étape, M. Vaucher l'a rappelé. Cela s'inscrit comme une première étape dans un PAC, comme l'a soulevé également M. Barrillier. C'est donc tromper les gens que de parler comme ça.
Enfin, Monsieur Grobet, vous vous moquez de nous en faisant le guignol, parce que nous sommes soi-disant tout à coup les défenseurs de l'environnement. Monsieur Grobet, je n'ai personnellement pas attendu ce projet de loi pour me soucier de l'environnement.
En tant que magistrat communal, avec l'aide de mes collègues, j'ai construit le groupe scolaire, qui est certainement le plus écologique du canton. A cette occasion, nous avons instauré une politique qui mettait en oeuvre une concertation et une collaboration entre les propriétaires privés et publics des bois de Veyrier. Ce concept a d'ailleurs été aidé dans sa croissance par les services de M. Cramer et a été cité en exemple par d'autres communes. Actuellement, l'école, à laquelle je faisais allusion précédemment, est chauffée avec le bois de notre commune. Alors ne dites pas que nous avons attendu longtemps pour nous soucier de l'environnement et passer à la pratique.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il y a un préambule à faire dans ce dossier. J'essaie de me tenir au plus près des informations qu'on nous donne au département, et les chiffres que nous avançons, nous ne les avançons pas par objectif idéologique, nous essayons de nous y tenir.
Je vous rappelle qu'à plusieurs reprises - encore il y a un mois - on m'a reproché de mettre cet amendement, et on se retrouve aujourd'hui avec le même amendement que je proposais, proposé par le département sur un autre dossier. Et il y en a une multitude d'éléments comme ça. Il faut arrêter, une fois pour toutes, de nous faire des procès d'intention. Quand on dit que, sur ce terrain, avec le PAC de Frontenex-La Tulette, il s'agit de 1500 logements qui pourraient être construits, c'est ça l'enjeu de la discussion aujourd'hui. Et malheureusement, concernant le projet qui nous a été soumis par le Conseil d'Etat - et là encore M. Koechlin me dit que j'affabule, alors que je me base simplement sur le projet de loi du Conseil d'Etat, qui, lui, propose de déclasser l'ensemble du terrain - je ne fais que reprendre, avec l'amendement de l'Alliance de gauche, le projet de loi du Conseil d'Etat. Vous dites, en m'insultant, au Conseil d'Etat, je ne me souviens pas de vos termes, parce que ça me passe dessus, mais toujours est-il que là encore, vous ne partez pas de la réalité et je le déplore.
Ceci étant...
Une voix. Cela étant...
M. Rémy Pagani. Ceci étant...
Une voix. Cela étant...
M. Rémy Pagani. Ceci étant, prenons le discours de M. Barrillier, parce que je le trouve excellent du point de vue de la rhétorique - parce que nous nous situons au niveau de la rhétorique - pour dire à M. Barrillier qu'il est, comme moi, enfin, je ne l'ai jamais vu dans des séances de participation, des assemblées populaires de concertation avec les autorités, toujours est-il que s'il rallie notre camp ce soir, je l'en félicite, et je suis prêt à discuter avec lui.
Toutefois, en l'occurrence, ce qui va se passer en votant ce projet de loi, c'est que vous allez laisser la possibilité de construire vingt villas sur le secteur ouest de cette parcelle et deux cents trente appartements ou villas de luxe et même de super luxe - même si vous les mettez sous un terme anglais qui permet de bien cacher la situation. Enfin pas villas, «habitats groupés» ! Mais, une fois à l'intérieur de leurs petits lofts, ces gens feront opposition et bloqueront tous les processus: quoi que M. Barrillier ait discuté dans ses séances de concertation, tout le périmètre sera bloqué. De sorte qu'on retrouvera M. Barrillier en train de dire: «Nous avons bien essayé, mais ce sont les autorités qui ont décidé de faire autrement».
Parce que là aussi, il y aura le double discours pour trahir une deuxième fois les personnes qui sont venues honnêtement à ces séances de concertation. En votant ce projet de loi, Monsieur Barrillier, vous donnez toutes les conditions aux futurs habitants, qui seront bien évidemment riches et privilégiés, de se payer des avocats pour s'opposer à toute densification sur le haut de la parcelle, voire sur le terrain de La Tulette, qui ne fait même pas partie du projet de loi qui nous est soumis ce soir.
Il faut être honnête, Monsieur Barrillier. En vous faisant le chantre de la concertation... (L'orateur est interpellé.)...vous trahissez les personnes en votant ce projet de loi. (L'orateur est interpellé.) (Le président agite la cloche.)Vous trahissez les personnes, qui, elles, viennent honnêtement discuter d'évaluation.
Cela étant, Monsieur Koechlin, je trouve que, une fois de plus, quand on veut suivre les travaux et qu'on se permet de dire que les gens disent des contrevérités, c'est-à-dire qu'ils mentent - vous m'avez traité de menteur - il faudrait quand même regarder ses dossiers plus précisément. L'UBS, dont le terrain est une zone de loisir au nord de cette parcelle, partira. Et la parcelle devrait pouvoir être urbanisée à ce moment-là, mais malheureusement, avec ce que vous allez voter, ça ne sera pas possible.
Il y a le terrain de la Ville de Genève: le terrain de sport. La ville de Genève est venue en commission dans un premier temps pour nous dire qu'elle ne voulait pas que nous touchions à ce terrain. Puis, quand elle a compris que ce n'était pas de ce terrain de sport-là qu'il s'agissait mais du terrain de sport qui était à l'extérieur du périmètre - le terrain de sport de Frontenex - elle a revu sa position. Malheureusement le rapporteur ne fait pas figurer cela dans son rapport. (L'orateur est interpellé.)J'espère que vous reconnaîtrez votre erreur, Monsieur Koechlin.
La Ville de Genève nous a dit qu'elle ne s'opposait pas au déclassement de ce périmètre, parce qu'effectivement elle y a intérêt, elle aussi, pour essayer de se désenclaver. Là encore, Monsieur Koechlin, quand vous traitez les autres de menteurs, vous êtes prié de vérifier... (L'orateur est interpellé.)Oui, vous avez dit que je disais des contrevérités.
Au final, je trouve regrettable, une fois de plus, qu'on fasse passer à la trappe un objectif qui est une de nos responsabilités de parlementaires, à savoir d'estimer dans quel lieu de notre canton on a envie que la ville se développe pour satisfaire aux besoins des demandeurs de logement. J'appartiens à une fondation d'habitations à loyers bon marché. Nous avons 2500 personnes qui demandent à être logées aujourd'hui. Il y a un véritable besoin de logements. Et, avec ces 1000 logements que vous sacrifiez sur l'autel du profit et de la spéculation, Monsieur Vaucher, comme vous l'avez reconnu, je trouve que vous trahissez les Genevois une fois de plus.
M. Carlo Sommaruga (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'avoue que je suis extrêmement surpris de la position du rapporteur de majorité. Ce dernier arrive à écrire une chose et son contraire dans les pages de son rapport, et je tiens à citer ces quelques éléments.
En page 8 de votre rapport, Monsieur Koechlin, vous dites ceci, en citant la loi: «Les autorités cantonales et communales sont tenues d'appliquer les principes et les objectifs du plan directeur cantonal, notamment en veillant à ce que les plans d'affectation du sol soient conformes au plan directeur cantonal et à son concept de l'aménagement cantonal (art.11A, al.1, LaLAT). Au vu des réserves limitées de terrain à bâtir aux fins de construction de logements collectifs répondant aux besoins prépondérants d'intérêt général, elles prennent les mesures nécessaires afin de promouvoir une utilisation rationnelle des réserves de terrains en 5e zone de construction (zone résidentielle destinée aux villas; cf. art. 11A, al. 2, LaLAT). Cela, au besoin, par le biais d'une mesure de déclassement en une zone plus dense...». Il rappelle, une page plus loin, quels sont les objectifs du plan directeur cantonal, et quel est le concept directeur cantonal. En bas de la page 9, vous dites «en périphérie urbaine»...
Des voix. On peut le lire, on l'a lu ! On a dit qu'il fallait être bref !
Le président. Ecoutez M. Sommaruga !
M. Carlo Sommaruga. Donc vous vous rappelez que le parlement doit respecter le plan cantonal, le concept et le plan directeur cantonaux, et plus loin, vous rappelez: «en périphérie urbaine: en 5e zone destinée aux villas, densifier les terrains libres qui s'y prêtent par modification du régime des zones». Aujourd'hui, ce que vous faites et ce que vous proposez, c'est un plan de zone qui n'est pas conforme au plan directeur cantonal. Dans le plan directeur cantonal, et vous le savez, il est prévu de densifier toute la zone, et ce que vous faites, en coupant en quatre, pas les cheveux, mais le terrain tel qu'il a été prévu et la zone telle qu'elle a été prévue, c'est simplement permettre à un promoteur privé de réaliser ces trente villas, parce qu'il s'agit de villas, de trois cent mètres carrés, destinées à des personnes avec des moyens. Et vous savez très bien qu'en construisant... (Manifestation dans la salle.)Vous savez très bien qu'en construisant ces villas il y aura une réalisation contraire au plan directeur cantonal, ceci au détriment du logement locatif destiné à la classe moyenne. Vous le savez pertinemment, et vous tentez de l'occulter.
Je m'adresse maintenant à M. Portier et à M. Barrillier. Derrière vos discours qui consistent à faire attention à la concertation, vous démontrez un manque de courage. Vos prédécesseurs, qu'ils aient été radicaux ou PDC, eux, avaient du courage au moment où il s'est agi de construire pour l'ensemble de la population. Et effectivement, si l'on a construit la Gradelle, c'est parce qu'il y a eu des magistrats locaux et des députés qui ont eu le courage de placer l'intérêt public et général avant l'intérêt individuel. Lorsque l'on observe ce qui est prévu sur ces terrains, et la partie haute des terrains, vous savez pertinemment qu'ils appartiennent à des membres du parti libéral. Or aujourd'hui, le parti libéral s'engage à défendre les intérêts de ses membres à titre individuel, avant de défendre l'intérêt collectif. Et c'est ceci qui est l'enjeu. Tout ceci se fait au détriment de la population en général.
Ce dont Genève a besoin aujourd'hui, ce sont des logements pour la classe moyenne, répondant aux besoins prépondérants de la population. En procédant à un déclassement, soit un déclassement au minimum, comme le propose le Conseil d'Etat, de la moitié de la parcelle initiale, cela permettrait, à terme, de construire beaucoup plus de logements que les trente proposés. De plus, en un lieu où il y a une desserte de transports publics, où il y aura bientôt l'axe du CEVA. Plutôt que de laisser ce périmètre à une minorité, il faut produire un aménagement qui permettra, à terme, de loger quelques centaines de personnes.
Cependant, c'est le profit immédiat et le soutien de ceux qui réalisent ce profit immédiat qui vous intéresse aujourd'hui. A quoi sert-il d'en construire trente si demain on ne peut pas construire quelques centaines de logements ? Et vous savez très bien que la majorité de ce canton n'aura pas accès à trente logements de luxe.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a neuf orateurs inscrits, il est 23h, nous n'arriverons à l'évidence pas à terminer ce soir. Je suspends les débats et nous reprendrons à un moment déterminé lors de notre prochaine session.
La séance est levée à 23h.