Séance du
vendredi 28 mars 2003 à
17h
55e
législature -
2e
année -
6e
session -
32e
séance
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Bernard Lescaze, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, Robert Cramer, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Florian Barro, Janine Berberat, Erica Deuber Ziegler, René Ecuyer, Jacques Follonier, Pierre Froidevaux, Morgane Gauthier, Philippe Glatz, André Hediger, David Hiler, Pierre Kunz, Alain-Dominique Mauris, Pierre Schifferli, Patrick Schmied et Ivan Slatkine, députés.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons une adjonction à notre ordre du jour: le tirage au sort d'un membre suppléant de la commission de grâce en remplacement de Mme Jacqueline Pla. En effet, Mme Pla avait été tirée au sort comme membre titulaire, par erreur, le 30 janvier 2003, pour remplacer M. Dominique Hausser, démissionnaire, alors qu'elle était déjà membre suppléante de cette commission. Ce tirage au sort figure au point 11 bis de notre ordre du jour, mais nous allons le traiter tout de suite pour dissiper l'angoisse terrible qui plane...
Le président. Le sort désigne M. Christian Brunier, socialiste, membre suppléant de la commission de grâce en remplacement de Mme Jacqueline Pla. (Rires.)
Déclaration du Conseil d'Etat
Le président. Monsieur le président du Conseil d'Etat, vous avez la parole.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez déposé diverses interpellations urgentes concernant le G8. Il vous sera répondu par Mme Micheline Spoerri, mais le Conseil d'Etat tient néanmoins à vous faire une déclaration générale.
Le Conseil d'Etat a pour responsabilité première de tout mettre en oeuvre pour garantir la sécurité, la liberté et la prospérité de la population genevoise. C'est en gardant constamment à l'esprit cette tâche fondamentale que le Conseil d'Etat prendra les mesures qui lui incombent, dans le cadre de la préparation du G8 à Evian et en prévision des manifestations d'opposition à ce sommet.
Concrètement, cela signifie que nous assurerons nos obligations de garantir la sécurité des hôtes étrangers de passage et les libertés d'expression et de réunion des manifestants par des mesures proportionnées, de manière à entraver le moins possible la vie quotidienne des habitants du canton. Nous ne cèderons pas aux dérives sécuritaires ni ne tomberons dans l'angélisme. Certaines mesures de sécurité entraîneront inévitablement des désagréments que nous nous efforcerons de limiter au maximum. Il faut toutefois se souvenir que ces désagréments sont sans commune mesure avec l'importance pour Genève de démontrer qu'elle est capable, même dans des circonstances difficiles, d'assumer tout ce qui fait le renom de la Genève internationale, ville de rencontre entre tous les acteurs de la politique mondiale: Etats, organisations internationales, organisations non gouvernementales, groupements de la société civile ou de l'économie.
L'ouverture de Genève au monde, qui - faut-il le rappeler ? - est l'un des piliers de sa prospérité, commande que chacun à Genève, résident ou hôte de passage, voie sa sécurité assurée et sa liberté d'expression garantie. Il s'agit, à n'en pas douter, d'un défi considérable, relevé de concert avec la Confédération et les cantons de Vaud et Valais, en relation constante avec la France.
Le Conseil d'Etat vous exhorte, Mesdames et Messieurs les députés, au-delà de vos appréciations respectives sur la légitimité du G8, à soutenir ces efforts, pour que, dans notre monde troublé, Genève reste ce lieu où il est toujours possible de dialoguer, de négocier, de se retrouver, quels que soient les antagonismes qui séparent les interlocuteurs. Il en va de la réputation de Genève, ville d'ouverture.
(Applaudissements.)
Correspondance
Néant.
Annonces et dépôts
Néant.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. En ce qui concerne l'interpellation urgente écrite de M. Brunier, je confirme que quatre cent cinquante familles se sont déclarées intéressées à devenir familles d'accueil, entre la période d'octobre 2001 et le mois de décembre 2002, auprès de la Fédération Genève-Enfants. Vos relevés à cet égard sont donc parfaitement exacts. Cela dit, le Service de protection de la jeunesse a enregistré très exactement quatre-vingt-six réponses au moment de confirmer les demandes. Donc, sur quatre cent cinquante familles intéressées seulement quatre-vingt-six ont confirmé leur démarche. Après un sondage réalisé auprès de quelques dizaines de familles, il a été confirmé qu'aucune famille n'avait réellement renoncé devenir être famille d'accueil parce qu'elle aurait été découragée par les normes du Service de protection de la jeunesse...
Il ressort donc des éléments que vous avez indiqués le décalage entre le nombre des familles intéressées et le nombre des celles qui concrétisent leur démarche. L'intérêt ne fait pas l'engagement, surtout lorsqu'on découvre les conditions posées pour être famille d'accueil.
A cet égard, j'aimerais faire remarquer à M. Brunier que la réponse à long terme se trouve dans le projet de loi concernant la petite enfance, au niveau du canton, mais également dans la possibilité de transformer le statut des familles d'accueil. En effet, ce point est encore aujourd'hui une zone grise, une zone de non-droit, puisque les familles d'accueil remplissent certaines tâches, mais ne sont pas considérées comme salariées, ne sont pas soumises à cotisations, et n'ont pas, non plus, de réelle sécurité sociale. A cet égard, la réponse est donc politique: le projet de loi renvoyé en commission de l'enseignement avec le projet de loi socialiste sur la petite enfance, ainsi que les différentes motions afférentes à ce sujet, seront un excellent cadre pour régler la question du statut des familles d'accueil si l'on entend réellement prendre en compte les déclarations d'intérêt des familles et qu'elles se concrétisent.
Cette interpellation urgente écrite est close.
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Comme le Conseil d'Etat l'avait déjà précisé, il a décidé de poursuivre les contrôles qui accompagnaient le moratoire, et même de les renforcer nonobstant la décision du Tribunal fédéral.
S'agissant de la question relative au dispositif mis en place pour faire respecter la loi... (Brouhaha.)
Le président. Je vous prie d'écouter Mme Micheline Spoerri ! M. Blanc nous signale qu'il y a un chien... Moi, je ne vois pas le chien et ne l'entends pas... (Des aboiements fusent de toutes parts.)J'en étais sûr ! (Rires.)Bien, les huissiers font sortir le chien dans la cour... Nous pouvons maintenant écouter Mme la conseillère d'Etat.
Mme Micheline Spoerri. S'agissant de la question relative au dispositif mis en place depuis le mois de janvier 2003 pour faire respecter la loi, le groupe Transports et environnement de la gendarmerie affecte des ressources équivalant à deux postes à plein temps. Le Service des autorisations et patentes affecte, pour l'instant, des ressources équivalant à deux postes à mi-temps pour effectuer ces contrôles. Ce dispositif est prévu dans un premier temps jusqu'au 30 juin prochain, date à laquelle aura lieu une première évaluation. Ces contrôles portent sur les infractions qui étaient visées dans le moratoire - que vous connaissez - et sur d'autres dispositions de la loi, notamment des infractions consistant à refuser une course, violation du devoir général de courtoisie, plaques d'identification, tarifs, utilisation abusive de la voie publique.
Enfin, d'autres distorsions moins visibles, plus subtiles, à l'exercice de la profession sont actuellement à l'examen au département.
Les chiffres que je peux vous donner à ce jour sont les suivants:
- Entre le 27 janvier et le 14 mars, le groupe Transports et environnement a effectué cent trente-neuf contrôles, dénoncé dix infractions à la loi sur les services de taxis et trente-quatre autres infractions liées à la législation fédérale. Nonante-cinq chauffeurs respectaient donc les normes en vigueur.
- Le Service des autorisations et patentes a effectué trois cent nonante-six contrôles, dénoncé cent sept infractions à la loi sur les services de taxis. Deux cent quatre-vingt-neuf chauffeurs n'avaient donc pas commis d'infraction.
Enfin, votre troisième question, Monsieur le député, concerne la date à laquelle le Conseil d'Etat rendra son rapport sur l'application de la loi. Je considère que nous devrions la fixer ensemble. Je demanderai de nouveau au président de votre commission à être auditionnée, de façon que le timingchoisi nous soit utile pour permettre, dans les meilleurs délais bien sûr, l'amélioration des prestations tant attendues et l'assainissement de la profession.
Cette interpellation urgente écrite est close.
Le président. Madame la conseillère d'Etat, vous avez la parole. Il vous suffit de donner une date.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je réponds à l'interpellation urgente écrite de M. Froidevaux concernant les Etablissements publics médicaux et la déclaration faite par le directeur général des HUG à propos de l'application de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève.
Les propos suivants ont été prêtés à M. Gruson: «Lors des travaux en commission des affaires sociales, les députés ont appris de la bouche du directeur général des HUG que les hôpitaux établissaient déjà leurs comptes selon les normes internationales telles que précisées dans la LGAF, mais le Conseil d'Etat semble retarder la décision de les présenter selon les normes pourtant votées par ce parlement en 1999»...
M. Gruson estime pour sa part que les propos relatés ne correspondent pas exactement à ce qu'il a dit. Il rappelle que les HUG n'appliquent effectivement pas, pour le moment, les normes comptables internationales, cela conformément aux instructions reçues par son autorité de tutelle, le DASS. Il précise en revanche que la comptabilité analytique qui répond à la révision de la LAMal est appliquée. Il a aussi confirmé que les normes de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat étaient appliquées, les normes IAS étant abandonnées.
Cela m'amène à faire une observation déjà émise dans ce cadre. Vous avez voté - dans l'enthousiasme et la bonne humeur - dans la loi sur la gestion administrative et financière l'obligation pour les institutions subventionnées d'appliquer les normes IAS. Depuis lors et durant plusieurs années, le Conseil d'Etat attendait, notamment de l'Inspection cantonale des finances, que nous soient indiquées les normes à appliquer exactement, et dans quelle proportion s'agissant des normes IAS. Leur nombre est considérable, et elles peuvent avoir des conséquences importantes. Dans l'intervalle, les normes IPSAS, qui sont la copie des normes IAS, mais adaptées aux administrations publiques - ce qui n'est pas le cas des normes IAS - ont été émises.
Le Conseil d'Etat, lors de son séminaire, a dû débattre des conséquences des normes IAS ou IPSAS pour l'Etat de Genève et pour les institutions subventionnées sur la base d'une étude préliminaire qu'il avait demandée. Le Conseil d'Etat constate que ce dossier doit encore être repris et approfondi, car certains éléments méritent une sérieuse discussion par rapport à l'ampleur que nous souhaitons donner à l'application de ces normes.
C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas mettre en cause les hôpitaux, pas plus que d'autres institutions subventionnées, parce qu'ils n'appliquent pas encore aujourd'hui les normes IAS dans leur totalité étant donné que le cadre doit impérativement être fixé et les directives données. Il appartient au Conseil d'Etat de faire ce travail. Il ne va pas s'y dérober, mais il souhaite l'effectuer de façon planifiée car il ne veut pas mettre en route un processus administratif qui dépasserait en volonté de transparence l'objectif visé. Nous cherchons donc à répondre à ces exigences de transparence dans la continuité et de façon comparative. J'ajoute que ce même débat a lieu au sein de la Confédération et à la Conférence des directeurs des finances de Suisse.
Cette interpellation urgente écrite est close.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. La question de l'étude PISA n'est pas véritablement, pour la première fois, au centre des travaux du parlement ou des interpellations urgentes.
Au titre d'exercice de lecture, j'aimerais en premier lieu rappeler aux députés de l'UDC qui déposent cette interpellation qu'il leur est possible de consulter le Mémorial, où ils trouveront un certain nombre de réponses.
Ce sujet est toutefois sérieux puisque l'étude PISA tente de mesurer les capacités de lecture des élèves.
Il faut retenir les éléments suivant: en Suisse, les résultats ont, en gros, été ni mauvais ni bons, c'est-à-dire intermédiaires. La moyenne étant représentée par le chiffre 500, la Suisse se trouve très légèrement en-dessous de la moyenne avec 494 points. Toutefois, la situation est encore un peu moins bonne à Genève, puisque nous atteignons péniblement les 479 points...
A partir de ce constat, comme cela avait été annoncé il y a un certain nombre de mois, pour ne pas dire d'années, le canton de Genève se penche sur «l'évaluation de l'évaluation» pour connaître les conséquences à en tirer. Au niveau genevois, le SRED est chargé de cette mission avec les différents services au niveau romand, de manière à pouvoir analyser ces résultats qui - je tiens à le relever au passage - sont meilleurs dans le canton de Fribourg, nettement, et dans le canton du Valais. Certains enseignements au niveau romand devraient nous éclairer.
Cela dit, il faut tenir compte de la situation particulière de Genève, notamment de son tissu urbain, du fait qu'il s'agit d'une ville internationale, multiculturelle, qui a de multiples richesses liées à ces différentes cultures, mais aussi un certain nombre d'obligations qui découlent directement de cette volonté et de cette capacité d'accueil. Pour faire une comparaison plus adéquate, il faudrait donc la comparer à une ville comme Toronto, dont le tissu urbain est plus similaire au sien.
Dès lors, les résultats, qui seront connus au niveau de l'observation genevoise et romande dès cet été, seront communiqués à la commission de l'enseignement, qui reste bien entendu à votre disposition.
Afin de faire taire un certain nombre de rumeurs liées à l'étude PISA, je relève que les élèves qui ont passé ce test - il n'y a aucune gloriole à cela - sont âgés de 15 ans et qu'ils ont reçu un enseignement traditionnel. (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente écrite est close.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Je ne souhaite pas faire à nouveau de l'ironie en préambule à ma réponse, mais j'ai beaucoup de peine à y résister...
Je me suis interrogé sur l'urgence de votre interpellation écrite. Est-ce l'étude de 1998 qui en explique l'urgence ou est-ce le fait qu'il s'agit pratiquement d'une copie de l'interpellation urgente orale déposée au mois de février par M. Baud ? En tous les cas, cette dernière est presque mot pour mot identique aux questions développées dans votre interpellation urgente écrite. Après l'exercice de lecture, je vous invite à faire un exercice de mémoire, Mesdames et Messieurs les députés. (Rires.)
Cette problématique ne prête vraiment pas à sourire, et j'aimerais dire ce qui suit sur le fond. Le département de l'instruction publique ne constate pas de recrudescence des actes de violence ou d'incivilité. En revanche, nous avons des moyens d'appréhender la réalité de manière plus complexe, les cas de violence sont traités et médiatisés d'une façon beaucoup plus virulente et l'objet de plaintes plus systématiques. Il ne faut donc pas confondre l'observation de la réalité et la manière dont celle-ci est relayée, mais il faut tenir compte du message.
En ce qui concerne les dispositions prises par l'école à cet égard, je souligne que l'école genevoise développe de multiples interventions préventives qui vont des conseils d'école aux règlements sur la civilité, en passant pas les capacités de discussion et d'accueil à l'intérieur des établissements, sans parler des différentes chartes et rappels à la responsabilité des parents et des enfants régulièrement effectués par le département de l'instruction publique.
Pour ce qui est de la répression, Messieurs les députés de l'UDC, je vous dirai que le règlement actuel permet de sévir, de dénoncer, cas échéant, les cas graves à la police et, en dernier lieu, de décider de l'exclusion d'un élève. Ces mesures me semblent largement suffisantes, et la question du règlement qui serait dépassé par rapport à l'actualité n'est précisément pas d'actualité.
Serait-il judicieux pour autant que les familles participent aux coûts éventuels des dégâts causés par leurs enfants ? Messieurs les députés de l'UDC, votre interpellation laisse penser que les familles dont les enfants seraient la preuve de leur laisser-aller devraient payer, de manière à diminuer les risques d'actes de vandalisme, cela pour mener une véritable campagne de prévention...
Or, nous constatons qu'aucune famille n'a envie de laisser les choses! Par contre, il y a des familles dépassées par les évènements. Et en rien la pénalisation financière, malheureusement développée par certains pays d'Europe, ne montre un quelconque résultat positif! C'est une politique qui ressemble plutôt à l'amour de la répression pour la répression, mais sans aucun résultat ! (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente écrite est close.
Le président. Nous abordons l'interpellation urgente de M. Christian Brunier concernant l'engagement politique d'un organisme subventionné... Je ne sais pas s'il s'agit de l'Institut d'étude du développement et de M. Ziegler... Qui répond ? (Exclamations.)Je n'ai pas la réponse ! Ah, il s'agit de M. Lamprecht et du département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures. Ce n'est pas de la polémique, je n'ai pas les réponses ! Mais je vois que certaines interpellations se perdent ! (Exclamations.)Je donne la parole à M. le conseiller d'Etat Lamprecht.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. M. Brunier a raison: comme il le mentionne dans son interpellation urgente, Genève Tourisme étant effectivement un organisme subventionné par l'Etat, son président se doit d'agir avec réserve et neutralité... Il n'est pas acceptable que le président d'une institution subventionnée par l'Etat tienne des propos visant à prendre fait et cause pour telle ou telle formation politique.
Un courrier lui a été adressé en ce sens en début de semaine, lui demandant à l'avenir de s'abstenir, en sa qualité de président de Genève Tourisme, de toute intervention ayant pour but de prendre position par rapport à une formation politique. (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente est close.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Je propose de traiter l'interpellation urgente de M. Vanek en même temps que celle de Mme Roth-Bernasconi, puisque celui-ci voulait - je reprends ses termes - «taper sur le clou» en traitant le même sujet.
Je répondrai globalement à ces deux interpellations urgentes. J'essaierai même d'anticiper l'interpellation de la semaine prochaine à propos des manifestations et de la manière dont elles ont pu être vécues dans certaines écoles, y compris à l'Ecole des Eaux-Vives...
Mesdames et Messieurs les députés, le jeudi 20 mars dernier était un jour marquant, non en raison de la prestation de serment d'un conseiller d'Etat mais en raison de l'entrée en guerre d'une partie de la planète contre l'Irak et du fait que cette agression est contraire au droit international. Aujourd'hui, la quasi-unanimité - l'unanimité totale, devrais-je dire, pour enfoncer une porte ouverte et commettre un pléonasme - de tous les partis en Suisse s'est faite contre la déclaration de guerre de ce jeudi 20 mars. Il en est de même pour toutes les églises de Suisse, qu'elles soient officielles ou non. Nous pouvons constater une belle unanimité dans notre pays pour s'indigner contre cette guerre.
Dès lors, est-il étonnant que cette déclaration de guerre ait été suivie par un flux important de collégiens et élèves du Cycle d'orientation - presque dix mille - manifestant dans les rues, entre 10h30 et 14h ? La réponse du département est : non! D'abord, en termes de comparaison, je relève que ce fut le cas dans presque toutes les grandes villes de Suisse, mais aussi en Europe et dans le monde. Cette indignation a été pratiquement unanime, et le fait que la jeunesse ait réagi en dépassant le cliché dont elle est affublée, selon lequel elle serait égoïste et repliée sur elle-même, devrait nous pousser à mettre en avant sa capacité responsable et citoyenne, comme le relèvent les deux interpellations urgentes de Mme Roth-Bernasconi et de M. Vanek.
Pour ma part, je tiens simplement à relever, de même que le département qui a, sous la plume de son secrétaire général, mis les choses au point, le caractère légitime de cette démarche. Quel enseignement en tirer ? Par la circulaire du secrétaire général du département de l'instruction publique, en accord avec son président, il a été rappelé aux directions générales du cycle d'orientation et de l'enseignement post-obligatoire qu'il ne convenait en aucun cas de sanctionner les élèves qui avaient manqué les cours du jeudi après-midi, en raison de la manifestation ou pour toute autre manifestation directement périphérique qui aurait pu avoir lieu juste avant ou juste après. En effet, il y a encore eu une manifestation le vendredi matin.
Nous avons donc considéré l'esprit plutôt que le règlement.
Mais vous m'avez interpellé, Madame Roth-Bernasconi, sur le soutien du département à cette opération... Je rappelle, puisque cela va dans le même sens que la préoccupation de M. Vanek par rapport à la circulaire de Mme Extermann - je me permets de la citer, puisque cela a déjà été fait - que le département de l'instruction publique fonctionne en vertu d'un certain nombre de règlements. Alors, que l'autorité scolaire rappelle les obligations des uns et des autres, il n'y a pas, à mon avis, à s'en émouvoir ! Cette autorité ne doit d'ailleurs pas forcément encourager le développement de telles manifestations. Il ne faut pas confondre la transgression avec la volonté de faire transgresser. C'est un point que je vais être amené à développer davantage tout à l'heure.
La circulaire de Mme Extermann du début mars faisait référence non pas à la manifestation du 20 mars, Monsieur Vanek, mais bel et bien aux manifestations du 31 janvier et du 5 mars - si je ne me trompe - qui avaient donné lieu à un certain nombre d'informations à l'intérieur des établissements scolaires. Cette circulaire prend appui sur le règlement du cycle d'orientation qui stipule que lorsqu'un élève ne se présente pas à une épreuve il est sanctionné par la note 1. Cette circulaire rappelle le règlement, et elle n'a donc pas à être retirée.
Si, en fonction d'évènements particuliers - comme cette déclaration de guerre qui a ému une bonne partie de la planète - l'autorité, qu'elle soit administrative ou politique, est amenée à reconsidérer la situation, c'est possible. Cela a du reste été le cas, puisque nous avons considéré qu'il n'y aurait pas de sanctions pour les manifestations contre la guerre en Irak, ces dernières ayant été jugées comme un engagement citoyen positif. Ne confondons pas ce qui est de l'ordre de la capacité des élèves à transgresser une règle avec l'encouragement de l'autorité et des enseignants à la transgresser!
Cela m'amène à l'interpellation urgente que j'anticipe. Je ne sais donc pas encore à qui je réponds. Mais je tiens à mettre d'ores et déjà les choses au point pour ce qui est de l'Ecole des Eaux-Vives... (Le président est interpellé.)Pas de problème, Monsieur Weiss, vous l'avez pensé très fort, cela me suffit !
Concernant cette école, il s'est passé ceci : les élèves ont été accueillis le jour de la déclaration de guerre, comme tous les enfants de toutes les écoles primaires, et ils se sont trouvés, avec les enseignants, dans une situation où régnait une préoccupation par rapport à la guerre. Les enfants de cette école n'ont pas fait exception. Les enseignants ont lu un certain nombre de textes, pas sur la guerre, pas sur les Etats-Unis d'Amérique ou l'Irak, mais sur la paix - comme Flon-Flon, pour être précis - en harmonie avec ce qui se passait ailleurs. Et ce point doit être relevé.
Lorsque les enfants sont sortis dans le préau à 10h30, ils ont fait des dessins, des collages, des banderoles, toujours relatifs à la paix - jamais par rapport à la guerre et sans jamais citer le moindre slogan - donc de manière à donner un cadre permettant un minimum de discussions, mais aussi d'interactions entre les adultes, censés rassurer, et des enfants parfois angoissés en raison de certaines déclarations - ce qui ne veut pas dire que les adultes ne le sont pas, vous l'aurez certainement remarqué.
L'ensemble de la mission pédagogique a dès lors été remplie, parce que s'il n'y avait pas eu de communication - et je vais revenir sur ce point - il n'y aurait eu aucun souci, aucun émoi et aucun article de presse en la matière.
Mais une énorme maladresse a été commise: en effet, une lettre, disons plutôt un tract, a circulé pour annoncer très clairement qu'une manifestation aurait lieu dans le préau à cette heure-là. Or il n'y a pas eu de manifestation. Les enseignants concernés que nous avons contactés nous ont montré que tout a été assuré sur le plan pédagogique: l'encadrement, les activités et la discussion. En revanche, ils ont reconnu que la lettre-tract avait largement dépassé leur pensée, que c'était une erreur qu'ils regrettaient... Je trouve donc dommage que cette affaire ait pris une telle proportion et jette le discrédit sur leurs activités pédagogiques qui ne le méritent pas.
En fonction de cela, et notamment pour faire le lien avec les deux interpellations urgentes concernant les collégiens et le cycle d'orientation, nous ne devons jamais oublier que l'article 4 de la loi sur l'instruction publique, plus particulièrement sa lettre d), invoque la nécessité que les enfants puissent acquérir une liberté de jugement, une indépendance d'esprit. C'est la leur! Et il n'appartient pas aux adultes de la commanditer, même si, par ailleurs, elle repose sur une unanimité politique ou religieuse. Que les élèves transgressent un règlement, telle est leur liberté! Quand les salariés, qu'ils soient organisés ou non, décident de faire grève, ils font également usage de leur liberté constitutionnelle, mais le mélange de l'un et l'autre nous amène très exactement aux confins de la violation de l'article 6 duquel le département doit également être garant.
Je terminerai donc ma réponse à ces deux interpellations urgentes en disant qu'il est difficile de marier la force de conviction et la liberté de conscience d'autrui. Le département doit en être le garant dans le cadre scolaire, et j'ai entière confiance dans le corps enseignant pour assumer cette mission avec perspicacité, clairvoyance et lucidité, et je le remercie de son action. (Applaudissements.)
Ces interpellations urgentes sont closes.
Le président. Je me permets respectueusement de rappeler au Conseil d'Etat qu'en principe le temps imparti pour répondre aux interpellations urgentes est de trois minutes, soit six minutes pour deux interpellations, et non neuf minutes. De plus, il faut répondre aux interpellations déposées urgentes et non aux interpellations qui risquent de l'être, sinon notre ordre du jour sera véritablement impossible à tenir!
Nous passons maintenant à l'interpellation urgente suivante. Je vous donne la parole, Madame Spoerri!
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Comme l'a souligné tout à l'heure le président Laurent Moutinot dans sa déclaration liminaire sur le sommet du G8, le premier souci du Conseil d'Etat est d'assurer la sécurité de la population genevoise et de garantir ses libertés. Par ailleurs, l'exécutif cantonal doit également veiller à la sécurité de ses hôtes étrangers, garantir la liberté d'expression des citoyens et autres mouvements organisés qui restent le fondement d'une société démocratique.
En vertu du droit international et des obligations incombant à la Suisse, en sa qualité d'Etat hôte, le canton de Genève doit aussi apporter sa contribution à la protection des missions diplomatiques, des organisations internationales, des délégations officielles étrangères de passage sur son sol. Dans le respect de ces principes, le Conseil d'Etat, conscient de ses responsabilités, tient tout particulièrement à ce que tous les évènements liés au Sommet d'Evian s'inscrivent dans une logique de non-confrontation qui doit permettre à la fois le bon déroulement du sommet et l'expression démocratique des manifestants altermondialistes et pacifistes.
Cette volonté de permettre une autre expression démocratique a d'ailleurs déjà été exprimée, du côté français par le président de la République française qui a précisé que les manifestations devaient se dérouler dans le calme et ne pas compromettre la sérénité des travaux du G8 et la sécurité des délégations des invités. J'observe à cet égard qu'un certain nombre de pays émergeants seront cette année associés aux travaux du G8 et que leurs représentants seront hébergés sur territoire suisse.
Pour répondre à vos questions, je confirme qu'à Genève le droit de manifester sera bien évidemment garanti avec les habituelles réserves d'usage sur le port de certains accessoires dits «belliqueux». La liberté de mouvement aux frontières sera également préservée puisque seuls certains postes feront l'objet de restrictions de circulation et qu'il n'y aura, en principe, pas de contrôles accrus pendant la période du G8.
Pour ce qui concerne plus particulièrement les mesures d'encadrement des manifestants sur sol suisse, des concertations conjointes franco-suisses sont en cours pour coordonner l'accueil, l'hébergement et le transport. Au niveau cantonal, la coordination relève de la compétence du Conseil d'Etat. Les communes concernées seront associées le moment venu.
Le Conseil d'Etat a d'ores et déjà décidé, dans sa séance du 26 mars dernier, de la mise sur pied réduite du dispositif Osiris, relatif à l'engagement de l'intervention dans des situations exceptionnelles pendant la période du Sommet d'Evian.
C'est dans le cadre de ce dispositif que seront notamment traités les aspects sanitaires, logistiques, liés à la présence de manifestants sur le territoire cantonal. Des informations plus détaillées vous seront communiquées au fur et à mesure de la concrétisation du dispositif.
Par ailleurs et par souci de maintenir un dialogue permanent avec les opposants au G8, les trois cantons concernés - Genève, Vaud et Valais - sont convenus de la désignation de personnes plus spécifiquement chargées des contacts avec les représentants des altermondialistes avant et pendant les manifestations. De tels contacts existent également du côté français.
Cette interpellation urgente est close.
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Je tiens à préciser quelques éléments par rapport à ce que nous avons lu dans la presse à propos d'une banderole portant l'inscription «No War ».
Tout d'abord, il faut dire que ce n'est pas sur demande spéciale que les gendarmes sont intervenus. Ils sont intervenus dans un premier temps parce que l'alarme a été donnée suite à une effraction au musée qui se trouve à proximité du château de Penthes. De telles actions, qui mettent en péril le patrimoine, sont malheureusement assez fréquentes aujourd'hui...
Dans le cadre de cette opération, les policiers engagés ont remarqué, après avoir terminé leur intervention, la présence d'une banderole portant l'inscription «No War », non pas sur une villa mais sur certains bâtiments du château de Penthes. Ils ont pris contact avec leur hiérarchie et, d'entente avec leur officier, ils demandé au locataire de bien vouloir enlever cette banderole pour éviter qu'une polémique ne s'installe dans les sphères diplomatiques, sachant qu'en perspective - comme vous l'avez souligné - il y avait la mission américaine. En réalité, le locataire ne semble pas avoir vu d'inconvénient à cette opération. Il s'est simplement refusé à le faire lui-même, mais il ne s'est pas opposé à ce que la police s'en charge. C'est ce qui s'est passé, et, semble-t-il, il aurait même fourni aux policiers de quoi grimper sur le toit pour aller enlever cette banderole.
A votre question annexe concernant les Conventions de Vienne, je réponds par l'affirmative. C'est vrai que dans le cadre de la formation des policiers, un cours est dispensé par le jurisconsulte de la mission permanente de Suisse auprès de l'ONU sur tout ce qui concerne les Conventions de Vienne.
Cette interpellation urgente est close.
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Je me contenterai cette fois de répondre aux interpellations urgentes déposées - au nombre de deux - et non à une interpellation future...
S'agissant du Conservatoire de musique de Genève, j'aimerais remercier M. le député Mouhanna de ses deux interpellations urgentes qui me paraissent relativement importantes.
Quant à la structure du Conservatoire, il convient de rappeler qu'il s'agit d'une fondation de droit privé qui assume toute la gestion opérationnelle, et le département de l'instruction publique n'est pas consulté lorsque des mesures de licenciement doivent être prises. C'est un simple rappel juridique qui fait abstraction de la réalité telle que vous la soulevez. En tant que tel, le département n'a donc pas à être consulté, et il ne l'a pas été.
En ce qui concerne cette institution - et je mêle là les deux interpellations urgentes - nous relevons que le département de l'instruction publique rencontre des difficultés avec cet organisme sur le plan de sa gestion, à notre connaissance depuis octobre 2001, puisqu'il fallait rendre les comptes et que, à cette date, ceux de 2000 n'étaient toujours pas bouclés, notamment parce que des sommes faramineuses d'écolage étaient dehors, représentant un contentieux particulièrement alarmant.
Aujourd'hui, des mesures ont été prises en ce qui concerne le Conservatoire. La part des débiteurs a été fortement réduite, mais n'a pas forcément encore atteint le but que l'on peut espérer dans le cadre d'un redressement.
Cela dit, depuis lors, des rapports réguliers ont lieu entre le Conservatoire de musique de Genève et le département de l'instruction publique qui est soucieux de la gestion de cet organisme. Cela a conduit à des rencontres régulières, la dernière datant du 6 décembre 2002, et il n'a jamais été question d'une quelconque volonté de licencier qui que ce soit lors de cette dernière rencontre. Cet entretien a été suivi de deux correspondances, les 14 et 20 janvier 2003, dans lesquelles le Conservatoire de musique de Genève expliquait sa volonté de restructuration, sans jamais évoquer la question des licenciements, je le répète.
C'est le 31 janvier 2003 que le département de l'instruction publique a reçu en copie un communiqué comportant les mesures de licenciement à l'encontre du personnel. Ces décisions nous sont donc parvenues en copie à cette date.
Cela amène le département de l'instruction publique à vous faire part des éléments suivants.
1. Le département de l'instruction publique a écrit au Conservatoire de musique de Genève pour connaître la réalité de ces licenciements et vérifier dans quelle mesure ils s'inscrivent dans le respect des statuts, ce qui, a priori, soulevait quelques questions mais ne semble plus être le cas. Les réponses ne nous sont pas encore parvenues.
2. La gestion générale du Conservatoire de musique de Genève a amené le département, au cours de cette semaine, à mandater le Service de surveillance des fondations pour examiner la manière dont est géré Conservatoire de musique de Genève.
3. En fonction de la volonté d'adaptation HES et de l'ensemble de la problématique de la Fédération des écoles de musique de Genève, je tiens d'ores et déjà à annoncer que le rapport des experts mandatés par le département suite au rapport de la commission d'évaluation des politiques publiques sera remis à la totalité des députés très exactement à fin avril 2003, c'est-à-dire dans moins d'un mois.
Le président. Mme Martine Brunschwig Graf souhaite compléter cette réponse à propos de la Fondation du conservatoire.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je dois répondre - si j'ai bien compris la question - à ce qui touche au Service de surveillance des fondations par rapport à ses activités antérieures vis-à-vis du Conservatoire.
Je tiens à dire que le Service de contrôle des fondations s'est manifesté auprès du Conservatoire depuis le 2 octobre 2000 déjà et que, depuis cette date, à réitérées reprises et en collaboration avec le département de l'instruction publique, il a soulevé toute une série de problèmes. Il a donc rendu le Conservatoire attentif à ces derniers, lequel s'est engagé à plusieurs reprises à régler la question des débiteurs, élément central sur le plan financier. M. le conseiller d'Etat Charles Beer a rappelé que le Conservatoire s'y était engagé. La résorption du compte débiteur est en cours mais, pour avoir examiné le rapport que m'a fourni le Service de surveillance des fondations, je dois dire que non seulement celui-ci a fait son travail, mais qu'il a rendu à plusieurs reprises le Conservatoire attentif aux problèmes et qu'il a reçu des engagements de sa part. Il n'a donc en aucun cas failli à sa tâche dans ce dossier.
Ces interpellations urgentes sont closes.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Ma réponse à M. le député Charbonnier se fera en trois parties.
Premièrement, comme je l'ai effectivement déclaré dans «Le Temps», je constate que les emplois temporaires et les allocations de retour en emploi sont loin de remporter le succès que la loi escomptait.
Par rapport aux emplois temporaires, il est reconnu que leur capacité de réinsertion professionnelle est faible, car les collectivités publiques qui en font l'usage ne disposent que rarement des postes nécessaires pour pouvoir les engager de manière définitive dans la fonction publique. De surcroît, l'effort de formation consacré aux bénéficiaires des emplois temporaires, dans les services étatiques et para-étatiques, est jugé insuffisant ou inadéquat pour pouvoir aboutir à une réinsertion professionnelle dans le marché de l'emploi privé, devenu extrêmement exigeant.
Les emplois temporaires sont davantage considérés comme un outil permettant à l'assuré d'obtenir un deuxième délai d'indemnisation sur le plan fédéral. Je ne suis pas le seul à faire ce constat puisqu'aussi bien le rapport Flückiger que celui de la CEPP vont dans ce sens.
Au niveau des allocations de retour en emploi dont vous faites mention et qui sont certainement la meilleure formule de réinsertion professionnelle, malgré les multiples démarches de mes services - quatorze mille deux cents entreprises contactées en cinq ans, PME, PMI, multinationales, établissements bancaires et de services, secteur industriel y compris, ce qui représente à peu près 80% du marché du travail - force est de constater, suite aux nombreux courriers, contacts directs, sans parler des campagnes répétées de promotion à travers Léman Bleu auprès des associations professionnelles et des entreprises, que le nombre de contrats signés est nettement insuffisant par rapport au nombre de demandeurs d'emploi actuellement sur le marché.
Ce phénomène, Mesdames et Messieurs les députés, s'est encore aggravé depuis septembre 2001, la tendance de tous les secteurs de l'économie étant plutôt à la réduction des effectifs qu'à l'embauche.
Pour que les allocations de retour en emploi fonctionnent, c'est-à-dire que les personnes à la recherche d'un emploi soient engagées dans le cadre de cette mesure, il faut à la fois que le marché du travail soit demandeur, que les employeurs veuillent bien adopter cette mesure, mais aussi que le profil des chômeurs de longue durée corresponde aux besoins réels des entreprises. Or, au vu de la situation économique actuelle, la tendance n'est guère favorable au recrutement, et l'administration n'a pas la maîtrise de ces paramètres.
Vous m'interrogez également sur la commission tripartite chargée de la délivrance des permis frontaliers. Je sais qu'elle fait son travail au plus près de sa conscience pour satisfaire la demande du marché local à ce niveau.
Je dois tout de même vous faire part, Mesdames et Messieurs les députés, de ma profonde inquiétude par rapport à ce phénomène. Je reçois de nombreux courriers de Genevois et de Confédérés qui se plaignent de ne pas avoir accès à un emploi alors que le nombre de frontaliers ne cesse d'augmenter de manière spectaculaire. Ils peuvent légitimement se poser des questions à ce sujet sans arrière-pensée, et nous devons, nous aussi, nous poser des questions. Au niveau de l'entreprise, il est plus que souhaitable, dans la difficile période que nous connaissons aujourd'hui, de prêter une attention encore plus soutenue au marché local du travail, pour éviter les dérapages et les préjugés qui commencent à prendre naissance au sein de la population. Je demande pour ma part également un effort particulier dans ce sens à l'office cantonal de l'emploi, pour mieux mettre en valeur les atouts des demandeurs d'emploi locaux et pour favoriser le recrutement du personnel sur place.
Je suis conscient, Monsieur le député, que les partenaires sociaux associés aux préavis à donner aux demandes de permis ont les mêmes préoccupations afin que les travailleurs locaux ne soient pas défavorisés. Je suis conscient également que l'économie genevoise ne peut se passer des compétences et de l'apport des travailleurs frontaliers. Mais tout doit être mis en oeuvre aujourd'hui pour que nos demandeurs d'emploi puissent retrouver à leur tour une activité professionnelle, ce d'autant plus qu'un très grand nombre d'entre eux présentent des qualifications au-dessus de la moyenne!
Pour conclure, vous signalez dans votre intervention l'arrivée de nouvelles entreprises. Mais celles-ci, contrairement à vos dires, n'arrivent pas seulement avec leurs cadres et leurs employés: elles engagent une partie de leur équipe sur le marché local ! J'en veux pour preuve les deux dernières installations en date: Gillette et Ralph Lauren, qui doivent engager ces jours-ci respectivement quatre-vingts emplois environ et deux cents emplois sur le marché local! Vous le savez, ces entreprises ne font pas que créer des emplois pour répondre à leurs besoins. Comme je l'ai dit à multiples reprises, elles permettent également la création de nombreux emplois induits, aujourd'hui bienvenus dans cette période de marasme économique. (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente est close.
Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat. Le Sommet du G8 se tiendra du 1er au 3 juin prochain à Evian, à l'invitation - vous le savez - de la France. Sollicitée, la Suisse a accepté d'apporter son soutien à l'organisation et à la sécurité de l'évènement.
A partir de ce constat, ni la Suisse, qui n'est pas l'Etat invitant, ni, à plus forte raison, le canton de Genève ne sont en mesure d'influencer l'agenda du sommet. Cela étant dit, le déroulement du conflit dans les semaines suivantes sera évidemment déterminant dans le calendrier international.
Dans ce contexte et dans tous les cas, nous devrons tout mettre en oeuvre pour assurer le bon déroulement des évènements, la sécurité des personnes et des biens et la libre expression, comme Monsieur le président et moi-même l'avons indiqué tout à l'heure.
Cette interpellation urgente est close.
Le président. Ni l'interpellatrice ni le répondant ne sont là ! On va pouvoir dire que l'interpellation urgente est close... Voici M. Beer. Monsieur Beer, vous répondez à une absente, mais cela ne fait rien. Allez-y !
M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Effectivement, il y a une interpellation urgente prospective, que je salue, sur la maturité bilingue. Pourquoi «prospective» ? Parce que nous en sommes aujourd'hui non pas aux inscriptions mais aux préinscriptions qui nous donnent les éléments d'appréciation suivants: cent septante-quatre élèves sont annoncés à ce jour pour le cycle d'orientation pour la filière anglais, et cinquante pour la filière allemand. Toutefois, ces chiffres vont évoluer régulièrement, puisque les inscriptions ne sont pas closes.
La question de Mme de Tassigny portait plus particulièrement sur les moyens dont allions nous doter pour faire face à la demande.
J'aimerais donc rappeler ceci: ce qui nous intéresse en premier lieu, c'est la capacité d'assumer cet enseignement bilingue qui correspond, sur quatre degrés, à pouvoir donner quatre heures de cours hebdomadaires de façon bilingue. Cela veut dire que des matières comme les mathématiques ou l'histoire pourront être enseignées soit en français et en allemand soit en français et en anglais. Les critères de sélection sont d'être en priorité francophone et d'avoir les notes suffisantes de manière à pouvoir s'inscrire dans lesdits degrés.
Avant d'évoquer les moyens, il faut parler des capacités du corps enseignant d'enseigner dans les deux langues, de manière à correspondre aux très exactes recommandations et directives qui découlent de la maturité sur le plan fédéral, et nous ne saurions prendre des libertés à cet égard. La priorité aujourd'hui est celle annoncée, c'est-à-dire de pouvoir faire face et de satisfaire aux exigences de la Confédération en la matière.
En dernier lieu, je tiens juste à dire que je salue la question de Mme de Tassigny, parce qu'elle montre qu'après les velléités du groupe radical de stopper toute réforme sa volonté est bien réelle pour soutenir certaines de ces réformes... (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente est close.
Premier débat
M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. Je vous signale tout d'abord que nous avons encore eu une séance supplémentaire pour étudier ce projet de loi, le 28 août 2002, mais que cette date ne figure pas dans mon rapport. Cela peut être utile, car c'est ce jour-là qu'est intervenu le vote final sur ce projet de loi.
Ensuite, je tiens à dire que je ne suis pas certain que nous ayons bien avancé, puisque nous nous retrouvons au même point qu'avant le renvoi en commission de ce projet de loi... Et je suis aujourd'hui rapporteur de la majorité... Apparemment, les commissaires de l'Entente n'ont pas défendu leur point de vue...
Le but de ce projet de loi est d'examiner comment doivent se développer les secteurs de serres. Le plan directeur identifie les secteurs et les plans localisés déterminent exactement les conditions dans lesquelles peuvent se faire ces développements. Les autorisations de construire pourront ainsi être délivrées plus rapidement. Apparemment, certaines contestations ont été exprimées par rapport aux périmètres qui devraient être déterminés.
Je rappelle également que nous parlons ici des constructions et installations servant à une production non tributaire du sol, mais excédant ce qui est admis au titre de développement interne, ce qui correspond à une activité principale. Il n'est ainsi pas question, dans ce projet de loi, d'interdire aux agriculteurs qui cherchent à diversifier leurs activités d'avoir quelques serres.
Nous estimons donc qu'il faut accepter ce projet de loi tel qu'il ressort de la commission afin d'apporter un soin particulier à l'aménagement de notre territoire.
M. Hubert Dethurens (PDC), rapporteur de minorité. Pourquoi ce rapport de minorité ? Pour deux raisons qui figurent dans mon rapport, mais que je vais tout de même rappeler...
Tout d'abord, j'aimerais répondre à une question posée tout à l'heure par M. Sommaruga, bien qu'il soit absent pour le moment. Il a demandé pourquoi nous devions revenir sur un projet de loi voté à l'unanimité et accepté par Agri-Genève... Non, Monsieur Sommaruga! Agri-Genève n'était pas entièrement d'accord avec ce projet de loi, mais, comme nous étions en minorité, nous avons négocié tout ce qu'il était possible et nous n'avons malheureusement pas pu tout obtenir !
Après les élections, nous avons décidé de revenir sur deux points qui, à mon avis, ne bouleversent pas ce projet de loi.
Ce dernier porte sur les zones agricoles spéciales. Genève est le seul canton, avec le Tessin, a avoir adopté un plan directeur qui identifie ces zones agricoles spéciales, contrairement à tous les autres cantons suisses qui le font par défaut en indiquant où il ne faut pas implanter ces serres. C'est un choix qui n'est pas très heureux parce qu'un secteur peu étendu risque d'être complètement couvert de serres. Il vaut mieux qu'elles soient implantée, sans pour autant être disséminées, sur de petites surfaces, en plusieurs lieu du canton.
Mon premier amendement suggère de supprimer l'avis du conseil municipal, dans la mesure où ces zones agricoles spéciales sont identifiées et adoptées par le plan directeur - c'est la Confédération qui nous le demande. Lorsqu'une demande d'autorisation de construire une serre est déposée, c'est en fait comme une demande d'autorisation pour un immeuble en zone 3: le conseil municipal ne se prononce pas, c'est le conseil administratif qui donne son avis, ou le maire et les adjoints pour les plus petites communes. Il ne s'agit donc pas, à proprement parler, de la suppression d'un droit, puisque ce droit n'existe pas - je le répète - pour toutes les autorisations de construire. Dans le cas précis, il s'agit de zones définies par la Confédération et le canton indiquant où les serres peuvent être construites. Comme je le relève dans mon rapport, la commune peut simplement émettre un préavis et d'éventuelles réserves par rapport à une route, une école, etc.
Mon deuxième amendement porte sur l'article 20, alinéa 9, nouveau, et concerne les exploitations existantes. En effet, dans la loi telle que votée en commission, le canton devrait payer le déplacement des exploitations non situées dans les périmètres définis. Nous pensons que cette mesure engendrera d'énormes frais pour l'Etat. C'est pourquoi nous suggérons - c'est le but de l'amendement - d'inscrire dans la loi la possibilité de déroger à ce règlement pour les exploitations existantes. M. Moutinot, président du Conseil d'Etat, m'a adressé une lettre à propos de cet amendement pour me dire que tel que proposé à la page 11, il ne serait pas en conformité avec la législation fédérale, ce que j'admets volontiers. C'est pour cela que je propose un sous-amendement à mon amendement qui consiste à ajouter : «après adoption d'un plan localisé agricole» après «délivre», ce qui donne: «Conformément à l'article 27C de la présente loi, hors des secteurs de zone agricole désignés à cet effet par le plan directeur cantonal, le département, par voie dérogatoire, délivre, après adoption d'un plan localisé agricole, des autorisations de construire pour des exploitations existantes et portant sur des constructions et installations dépassant le cadre de ce qui peut être admis au titre du développement interne au sens de l'article 16a de la LAT.» Ainsi, l'amendement est conforme à la loi fédérale en la matière.
Voilà ce que j'avais à dire pour l'instant, Monsieur le président.
M. Rémy Pagani (AdG). M. Dethurens a failli faire un lapsus, et je crois qu'il est significatif de le relever. Il a parlé de serres «disséminées» dans le territoire...
L'implantation des serres soulève un problème de fond. En effet, la loi fédérale qui a été votée, je le rappelle, par un parlement à majorité de droite - et pas de gauche ! - impose aux cantons de regrouper les serres dans des zones spécifiques, non pas parce que cela embellit ou non le paysage, mais parce qu'il a été compris - et je soutiens cette position - que ce type d'agriculture nécessitait un regroupement forcé, précisément pour obliger les agriculteurs qui pratiquent ce type, à se transmettre leur expérience afin d'obtenir des masses critiques suffisantes pour résister à la libéralisation du marché. Une association a compris depuis bien longtemps qu'il était nécessaire de se regrouper: je veux parler des maraîchers du canton de Genève ! Ils sont la preuve vivante qu'il ne faut pas rester isolé face à la dérégulation du marché... (L'orateur est interpellé par M. Vaucher.) ...etface à la globalisation, je ne vous le fais pas dire, Monsieur Vaucher ! Ces maraîchers ont été auditionnés, et ils nous ont dit combien il était essentiel pour eux d'avoir regroupé leurs forces durant une période de l'histoire de notre canton, d'avoir fonctionné en terme de coopérative pour résister à la dérégulation du marché.
Et maintenant, vous venez nous dire qu'il faut laisser des possibilités à certains agriculteurs d'implanter une serre à un endroit, d'obtenir une dérogation ailleurs... Pourtant, du point de vue fédéral, comme je l'imagine du point de vue des associations - de celle des maraîchers en tout cas - il est évident qu'un regroupement de forces permettra d'obtenir à terme une masse critique capable de faire face à la dérégulation du marché prônée par certains. C'est malheureusement la réalité.
Pour ma part, je ne comprends pas la bataille d'arrière-garde menée par M. Dethurens, si ce n'est pour, une fois de plus, privilégier un certain nombre de personnes qui, ici, à Bardonnex ou ailleurs - je ne vais pas citer de noms parce que ce n'est pas le lieu de le faire - veulent maintenir leurs petits privilèges, leur petite exploitation et rester isolées. Il n'est pas nécessaire de répéter ce qui a été très justement dit dans le courant de l'après-midi par M. Desbaillets: dans certains villages, la moitié des agriculteurs sont partis... Alors, si nous voulons continuer à faire en sorte que les agriculteurs restent isolés et ne puissent pas mettre leurs expériences et leurs machines en commun, continuons comme cela !
Pour notre part - la majorité de circonstance - nous trouvions important de donner un signe fort de regroupement, d'unification de ce secteur, pour pouvoir faire face à l'avenir. C'est pourquoi nous vous proposons d'en rester à la décision de la majorité.
Encore un petit détail: j'aimerais bien que l'amendement proposé soit distribué, Monsieur le président, parce que ce n'est pas le même que celui qui figure dans le rapport de minorité. Et, d'après ce que j'ai cru comprendre en l'entendant, la modification apportée change relativement sa portée. J'aimerais donc bien que nous l'ayons sous les yeux pour pouvoir en débattre sérieusement.
Le président. Ces quelques mots ne modifient pas... Les chefs de groupe et les gens vont le recevoir. Il s'agit simplement d'ajouter, à l'article 20, alinéa 9, nouveau, après «délivre» : «après adoption d'un plan localisé agricole», ce qui donne: «Conformément à l'article 27C de la présente loi, hors des secteurs de zone agricole désignés à cet effet par le plan directeur cantonal, le département, par voie dérogatoire, délivre, après adoption d'un plan localisé agricole, des autorisations de construire pour des exploitations existantes et portant sur des constructions et installations dépassant le cadre de ce qui peut être admis au titre du développement interne au sens de l'article 16a de la LAT.»
Cet amendement vous sera distribué dès que les photocopies seront faites. Il est un peu difficile de travailler avec des rapports de majorité, de minorité, et, en plus, avec des sous-amendements présentés en séance plénière. Alors, on fait comme on peut !
Nous sommes toujours en premier débat. La parole est à vous Madame Fehlmann Rielle.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Vous vous rappelez sans doute que ce projet de loi, aussi, s'est retrouvé à la case départ, alors même qu'il avait été accepté lors de la précédente législature... Contrairement à ce que dit M. Dethurens, Agri-Genève, qui avait été auditionnée, avait apparemment accepté le principe des plans localisés agricoles. Ils étaient d'ailleurs même à l'origine du changement de termes, les plans localisés agricoles s'appelant auparavant «zones agricoles spéciales». Et pendant la deuxième discussion en commission - suite au renvoi en commission - il y a eu de nombreuses résistances de la part des partis de l'Entente concernant le problème de ces plans localisés agricoles, résistances que nous n'avons pas comprises puisque ces mesures nous semblent plutôt favorables aux agriculteurs et devraient leur permettre d'avoir une meilleure maîtrise de leurs exploitations et une vision du territoire plus cohérente.
En fin de compte, cela n'a pas été remis en question et le projet de loi, tel qu'il est issu des travaux de commission avec le rapport de majorité de M. Etienne, était tout à fait acceptable. C'est pour cela que nous vous proposons de l'approuver sans entrer en matière sur les amendements de M. Dethurens. Il vous l'a dit, il cherche à empêcher le conseil municipal de donner un préavis s'agissant des plans localisés agricoles.
Soit dit en passant, M. Dethurens présente un nouvel amendement en plénière à l'alinéa 9, nouveau, de l'article 20, alors qu'il avait tout loisir de proposer cela en commission puisque ce projet de loi y avait été renvoyé ! Ce n'est pas du travail sérieux !
En ce qui nous concerne, nous pouvons souscrire aux arguments développés par M. Pagani. Nous nous opposons au régime dérogatoire tel qu'il est proposé dans l'alinéa 9, nouveau. Nous vous invitons donc à accepter le projet de loi tel qu'issu des travaux de commission avec le rapport de majorité de M. Etienne.
M. René Koechlin (L). Nous nous sommes abstenus de nous prononcer sur ce projet de loi pour exprimer notre hésitation. Je vais commencer par l'élément qui nous fait hésiter, à savoir qu'une fois que les zones spéciales sont délimitées, conformément aux prescriptions fédérales, on se propose, au niveau cantonal, d'élaborer des plans localisés agricoles - c'est l'appellation qu'on leur a conférée - mais, du point de vue de la procédure, cela revient à des plans localisés de quartier... Nous hésitons donc, car nous connaissons la durée interminable d'élaboration et d'adoption de ce genre d'outils d'aménagement, et il nous semble contraignant que cette pratique soit étendue à la zone agricole pour les malheureux agriculteurs qui voudraient construire des serres ou des exploitations un peu particulières... Ce serait franchement très lourd pour eux ! Il nous semble suffisant que des zones spécifiques soient délimitées pour implanter des serres. Il nous paraît trop compliqué de subordonner cette possibilité d'aménagement à l'adoption d'un plan localisé agricole. Pour nos amis agriculteurs, nous étions donc plutôt opposés à cette pratique.
Maintenant, d'un autre point de vue, celui de l'aménagiste - je suis aussi architecte à mes heures - je dois avouer que certains endroits de notre canton, couverts de serres, un peu partout, ne sont pas les plus relevants dans le paysage et du point de vue de l'aménagement du territoire. Je dois reconnaître que, si les serres pouvaient être implantées de manière un peu plus ordonnée, le résultat ne pourrait être que plus satisfaisant.
Alors, nous hésitons : d'un côté, nous pensons que cela peut apporter une amélioration, mais, d'un autre, nous trouvons que les procédures risquent d'être trop lourdes pour les agriculteurs. C'est pourquoi nous nous sommes abstenus. Je vous dirai qu'encore aujourd'hui je n'ai pas tranché en ce qui me concerne. Et je pense que notre groupe, dans sa majorité, s'abstiendra.
Le président. Eh bien, vos amis agricoles s'inscrivent ! M. Dethurens, M. Blanc, M. Desbaillets... Ensuite, nous écouterons Mme Künzler, M. Grobet, M. Pagani et M. Moutinot. Je pense que nous pourrons en rester là pour le premier débat...
Monsieur Dethurens, vous avez la parole.
M. Hubert Dethurens (PDC), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. J'aimerais répondre sur deux ou trois points...
Monsieur Pagani, vous parlez de l'audition des maraîchers qui auraient exprimé la nécessité de se regrouper... Il s'agit de M. Jaquenoud - moi, je cite les noms - président de l'Union maraîchère. Et s'il a bien dit qu'il fallait se regrouper pour faire une coopérative, il n'a pas dit que toutes les serres devaient être implantées au même endroit, à Lully ou à Bardonnex ! Il me semble que vous avez confondu ! De plus, M. Jaquenoud a parlé des maraîchers, mais il n'y a pas que les maraîchers ! Il n'a pas parlé au nom des fleuristes, et le problème n'est pas le même pour les maraîchers que pour les fleuristes !
Quand vous parlez de petits privilèges... Certaines familles sont installées depuis plus de cent ans à un endroit, et vous pensez que leur permettre d'installer une serre de 6 ou 7000 m2 serait un petit privilège ! Si vous appelez cela un privilège, alors... Les agriculteurs jugeront vos dires !
J'ajoute que ces dérogations concernent quatre ou cinq exploitations seulement. Alors, le canton ne va pas être couvert de serres ! (Exclamations.)Quatre ou cinq ! On ne parle que des exploitations existantes et non de nouvelles exploitations créées en dehors de ces zones. Cette mesure, je le répète, n'a d'autre but que de permettre à des exploitations déjà existantes de continuer à vivre là où elles sont installées depuis plus d'un siècle !
Quant au sous-amendement, Madame Fehlmann Rielle, je fais partie d'un parlement de milice, et je n'ai pas la prétention de tout savoir et de tout faire comme il faut. Je pense que c'est aussi le cas dans votre groupe ! Et si je présente ce sous-amendement, c'est simplement pour être en conformité avec la loi fédérale. Je ne comprends pas très bien pourquoi le fait de présenter un sous-amendement de trois mots pour être en conformité avec la loi fédérale vous paraît excessif...
Pour terminer, j'aimerais quand même dire que lorsque vous construisez une serre, c'est provisoire, contrairement à un immeuble en zone à bâtir qui, lui, reste définitivement en zone à bâtir! A moins qu'on ne la classe ou qu'on ne la mette à l'inventaire, le sort d'une serre qui ne serait plus affectée à de l'agriculture est d'être démolie. Elle n'a pas un caractère pérenne, elle ne va pas rester ad vitam aeternam! Des serres sont d'ailleurs démolies au Grand-Lancy. Je le redis encore : la construction d'une serre n'a rien à voir avec la construction d'un immeuble dans une zone à bâtir. La serre a un caractère provisoire, elle est liée à l'exploitation; quand l'exploitation cesse, la serre n'a plus lieu d'être.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je rappelle que la liste est close. Se sont encore vite inscrits, subrepticement, Messieurs Pierre Guérini et Louis Serex. La liste est maintenant close.
La parole est à vous, Monsieur Blanc.
M. Claude Blanc (PDC). Dans ce débat, il me semble que certains veuillent ignorer délibérément les nécessités, je dirai même les contraintes, auxquelles sont soumis les agriculteurs de ce pays, d'une manière générale, et de ce canton en particulier.
Certains pensent que l'on peut changer d'orientation facilement, qu'un agriculteur maraîcher dont l'exploitation ne se trouve pas dans la zone destinée à la construction des serres n'a qu'à se déplacer et s'y installer... C'est confondre une exploitation agricole avec une exploitation industrielle ou artisanale ! Je rappelle qu'une exploitation industrielle ou artisanale peut se déplacer dans la zone adéquate moyennant des investissements nécessaires. Mais l'agriculteur, Mesdames et Messieurs les députés - vous feignez de l'ignorer - lui, il est cloué à sa terre et il ne peut pas la déplacer ! Il est obligé de travailler là où est sa terre ! Et quand on sait toutes les difficultés que rencontrent les agriculteurs aujourd'hui, cela fait mal d'entendre ce qu'on entend ! C'est dommage que M. le conseiller d'Etat Cramer soit absent de ce débat, lui qui se fait le chantre de la diversification de l'agriculture, seule garante de sa survie, alors qu'on entend certains d'entre vous défendre un système qui tente d'enfermer les agriculteurs dans un carcan au sein duquel ils ne pourront plus se développer et où, à terme, ils finiront par «crever»... En définitive, c'est cela que vous voulez: vous voulez les faire «crever» ! (Exclamations. Applaudissements.)Oui! D'ailleurs, sur le plan fédéral on a bien vu les levées de boucliers s'agissant de l'activité de la Confédération par rapport à l'agriculture. L'agriculture coûte trop cher, et il faut aller produire les produits agricoles dans les pays où cela coûte moins cher. Voilà le langage de la gauche aux Chambres fédérales !
Alors, Mesdames et Messieurs, si c'est cela que vous voulez, il faut le dire ! Si vous voulez faire «crever» une partie de l'agriculture, allez jusqu'au bout de votre raisonnement, et nous en tirerons les conséquences ! (Exclamations.)
Le président. Bien ! On ne s'excite pas... Monsieur Serex, je viens de dire à l'intention de tout le monde qu'il ne fallait pas s'exciter !
Monsieur Desbaillets, vous avez la parole.
M. René Desbaillets (L). Merci, Monsieur le président. Tout à l'heure, j'ai été tout à fait pratique dans mes propos... Je me montrerai un peu plus philosophe sur ce sujet... (Exclamations.)
On a vu, à droite comme à gauche, ce que donnaient les ghettos urbains - comme c'est le cas dans les grandes cités françaises où les Français sont d'un côté, les Algériens de l'autre, etc., cela fait des zones ingérables... Et l'on voudrait faire des ghettos avec les maraîchers ! Tous les maraîchers d'un côté et, pourquoi pas, tous les vignerons d'un autre; les mécaniciens dans un autre secteur et les hôpitaux ailleurs... Ce n'est pas possible ! Il faut conserver une certaine mixité, un marché de proximité qui se développe de plus en plus! Avec tous les accidents alimentaires de ces dernières années: la vache folle, les hormones, etc., les gens veulent pouvoir se procurer des produits frais et avoir une sécurité en matière d'approvisionnement... Et la meilleure des sécurités, c'est d'avoir un contact avec le producteur! Il faut donc, au contraire, absolument décentraliser. Il vaut mieux avoir une multitude de maraîchers dans tout le canton, pour permettre aux consommateurs de s'approvisionner directement en produits frais! C'est le slow foodface à la malbouffe. Et je suis favorable au slow foodcontre la malbouffe, contre le Mac Do ! Je ne suis pas encore allé en démolir, mais je suis prêt à y aller ! (Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Je rappelle à M. Etienne que nous avons clôturé la liste. Madame Künzler, vous avez la parole.
Mme Michèle Künzler (Ve). Merci, Monsieur le président. Nous nous en tiendrons au rapport de majorité, parce que nous avons découvert en commission qu'un ou deux cas seulement étaient concernés. M. Dethurens vient de parler de quatre ou cinq... Mais on ne va tout de même pas changer la loi pour deux ou trois cas - c'est une moyenne. Ensuite, ces plans localisés agricoles n'ont rien à voir avec les plans localisés de quartier qui sont en zone de développement ! Il s'agit d'une mesure beaucoup plus légère qui me semble plutôt favorable aux agriculteurs qui sauront où ils peuvent installer leurs serres de la manière la plus judicieuse.
Par ailleurs, des arrangements ont été proposés aux agriculteurs qui doivent déplacer leurs serres, parce qu'à certains endroits il est vrai que c'est tout à fait inadéquat, comme, par exemple, sous le château de Compesières. Tout le monde est d'accord sur ce point, et des arrangements sont toujours possibles.
Je le répète, nous nous en tiendrons au rapport de majorité, et j'espère que nous trouverons bientôt un arrangement négocié pour les quelques cas problématiques.
M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais dire, à l'appui des propos de M. Koechlin et sans vouloir mettre en cause les besoins de l'agriculture, que la prolifération des serres a totalement détruit le paysage à certains endroits. C'est une réalité. A partir de cela, il a semblé logique de remédier à la situation. Et puisque des sites ont été totalement sacrifiés, autant y concentrer les serres à ces endroits pour ne pas abîmer d'autres. Du reste, cela répond aux préoccupations du législateur fédéral qui a précisément voulu que soient définis des secteurs ayant des affectations particulières dans la zone agricole.
Alors, je trouve un peu paradoxal que le plan directeur prévoie de tels secteurs et qu'on veuille, par ailleurs, chercher à obtenir des dérogations dans d'autres secteurs. Je pars de l'idée que le DAEL fait bien son travail, consulte les milieux agricoles et définit les sites qui seront des secteurs spéciaux en zone agricole. A partir de là, il n'y a pas à remettre en cause, au coup par coup, une démarche parfaitement cohérente.
Monsieur Dethurens, vous dites que les serres sont démolies lorsqu'elles ne sont plus utiles... Je ne sais pas s'il y a eu beaucoup de cas de ce genre, mais, en tout cas, à l'époque où j'étais au département des travaux publics, je ne me souviens pas que ce soit arrivé. Peut-être M. Moutinot l'a-t-il constaté, mais, en ce qui me concerne, j'ai plutôt constaté que l'affectation de certaines serres avait été changée. Non seulement elles n'étaient pas démolies, mais elles devenaient des abris pour du matériel agricole ou autre, étaient utilisées pour des activités qui n'avaient rien à voir avec la zone agricole, des garden centers, etc. Vous me permettrez donc, Monsieur Dethurens, de ne pas souscrire aux propos optimistes que vous avez tenus quant à la démolition éventuelle des serres.
Monsieur Blanc - on le sait - dès que l'on se permet de vouloir mettre un peu d'ordre et de veiller à ce que la zone agricole reste bien compatible avec ses buts, vous nous tenez des grands discours en prétendant que la gauche serait contre l'agriculture... Vous me permettrez de dire qu'en matière d'aménagement du territoire nous en avons été les meilleurs soutiens, et vous n'avez certainement pas de leçon à nous donner en la matière ! C'est plutôt dans vos milieux politiques que des atteintes ont été portées à la zone agricole, sans parler des promesses non tenues...
Mais vous avez fait allusion, aux Chambres fédérales, au récent débat sur la politique agricole... A ce sujet, pendant longtemps - en effet, je siège sur les bancs de la gauche à Berne - nous avons été très solidaires avec les agriculteurs puisque nous sommes pour la préservation de cette activité. Or ils ne faut pas pour autant que les agriculteurs se comportent en privilégiés et considèrent que les subventions sont dues dans le cadre d'une solidarité qui se justifie, mais que, par contre, la solidarité n'existe pas pour d'autres secteurs. Alors, c'est vrai, une lassitude est apparue dans nos rangs à l'égard de gens qui viennent réclamer des subventions et qui refusent de se montrer solidaires avec d'autres secteurs! Par exemple, en matière de logement - c'est un sujet qui nous tient à coeur - les agriculteurs étaient de ceux qui demandaient la réduction de l'aide fédérale... Alors, voyez-vous, les agriculteurs ne peuvent pas à la fois réclamer de l'argent pour eux et, simultanément, vouloir diminuer les subventions accordées par la Confédération dans un domaine tout aussi important que le leur ! Je pourrais évidemment citer d'autres exemples que le logement social, Monsieur Blanc, mais ce n'est pas le propos. Je tenais simplement à vous répondre.
M. Rémy Pagani (AdG). Si je comprends bien - en tout cas, M. Dethurens l'a indiqué - on est en train de discuter d'un amendement qui concerne quatre personnes...
Une voix. C'est important !
M. Rémy Pagani. C'est important, mais le rôle de notre parlement est-il de légiférer pour préserver les intérêts de quatre personnes seulement ? Au demeurant, vous essayez tout de même de détourner les choses, car il ne s'agit pas ici de faire enlever les serres déjà en place - et M. Moutinot l'a garanti en commission - votre amendement veut ménager la possibilité de construire des serres nouvelles. On est bien d'accord sur ce point. Votre proposition ne concerne que quatre personnes et, de plus, c'est simplement pour leur laisser la possibilité de construire éventuellement des serres sur leurs terres. Je trouve cela un peu spécial...
Monsieur Blanc, sur le fond, vous nous reprochez de vouloir tuer l'agriculture... Il faut quand même dire qui est à la tête du gouvernement suisse! Une majorité de droite - M. Couchepin en tête! - qui ouvre les frontières pour prétendument introduire la concurrence sur tous les marchés... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)C'est-à-dire des représentants de vos milieux !
Monsieur Blanc, je trouve assez insensé que vous osiez reprocher à la gauche de tuer l'agriculture alors que, vous le savez très bien, c'est vous qui la tuez en ouvrant le secteur agricole! Parce que vous la mettez en concurrence - pour ne parler que des tomates ou d'autres produits - avec des producteurs européens, voire mondiaux, qui peuvent faire venir, en utilisant des moyens déloyaux, n'importe quel produit à des prix défiant toute concurrence! Alors, Monsieur Blanc, je trouve malvenu de votre part que vous osiez nous faire un tel procès d'intention, d'autant plus que cette politique de dérégulation du marché agricole est le fer de lance des représentants de votre parti ! Il faut le dire et le redire... (Exclamations.)Oui, les amis de nos amis sont nos amis...
Et puis, vous nous avez aussi chanté votre couplet habituel, selon lequel les agriculteurs n'ont pas de flexibilité pour bouger puisque ce sont des terriens avec les pieds bien implantés dans leur terre! Alors je vais vous donner un exemple, parce qu'il faut bien que l'on examine les conséquences des décisions prises.
Nous avons voté il y a quatre mois une subvention en faveur des milieux viticoles pour l'arrachage des vignes, pour aider à résorber le surplus viticole dans notre canton.. Eh bien, je peux vous citer un exemple de reconstitution... (L'orateur est interpellé.)...de reconversion, voilà !
Les gens de la majorité attendaient, la bouche en coeur, que des viticulteurs destinent leur champ au régime agricole... Or, il y a des petits malins qui ont divisé leur parcelle en trois ou en quatre; ils ont effectivement arraché leurs vignes sur un tiers ou un quart de leur parcelle, de manière très ciblée - et, là, ils ont montré de la flexibilité - de manière à bénéficier des subventions tout en restant à l'intérieur du cadastre viticole. Cela leur permettra éventuellement, dans cinq ou dix ans, de remettre ces parcelles, alors que la subvention était destinée à résorber le surplus vinicole... Ça, c'est de la flexibilité, Monsieur Blanc ! Vous nous faites de beaux discours, mais les gens qui sont sur le terrain sont plus malins que vous et moi réunis... Ils montrent une certaine flexibilité quand il s'agit de bénéficier des subventions tout en gardant une marge de manoeuvre pour remettre, le cas échéant, leur parcelle en exploitation. C'est la réalité, Monsieur Blanc ! Alors, sur ces problèmes, il faudrait passer de l'idéologie pure et bête au réalisme qui fait voir les choses autrement!
M. Pierre Guérini (S). Tout d'abord, je trouve que les termes utilisés de «faire crever» les agriculteurs ne sont pas très acceptables dans cette enceinte... Et laisser penser que la gauche veut la mort des agriculteurs, c'est mal connaître notre pensée et notre action en faveur de cette catégorie de personnes.
Pour revenir à l'avis des conseillers municipaux et sans vouloir entraîner une prolongation des procédures, il me paraît important que les conseillers municipaux soient consultés lors de telles procédures d'enquête. En effet, il arrive fréquemment que les conseillers municipaux ne soient pas d'accord avec l'avis des conseillers administratifs. C'est vrai dans le cas qui nous occupe mais c'est aussi vrai dans d'autres circonstances. Sur le plan démocratique, le fait de demander l'avis des conseillers municipaux aura au moins pour effet premier de les tenir au courant de ce qui se passe dans leur commune. Car les conseillers municipaux sont souvent bien plus proches des administrés que les conseillers administratifs et, surtout, ils reçoivent rapidement les plaintes des administrés.
En conséquence, il faut refuser l'amendement concernant l'alinéa 8 de l'article 20.
M. Louis Serex (R). J'ai presque tout entendu... Certains nous aiment, d'autres nous aiment beaucoup... Comme le disait mon grand-père : on aimera longtemps les agriculteurs genevois parce qu'on ne les aime qu'un petit peu à la fois. Mon ami Rémy, quand je t'entends blasphémer... (Rires.)
Toujours tout réglementer, tout légiférer, tout discipliner... Mais nous, agriculteurs, tous les cinq ans nous devons repenser notre avenir ! C'est un combat permanent, pour donner envie à nos enfants de poursuivre ce métier. Pour qu'il y ait encore des agriculteurs à Genève, des viticulteurs, des maraîchers ! C'est à chaque fois pareil: dès qu'il y a un débat sur l'agriculture dans ce parlement, ce sont des heures de débats pour des bricoles ! Mais je suis persuadé qu'on va bientôt voter un crédit de 36 millions pour acheter quatre ordinateurs à Mme Brunschwig Graf afin qu'elle puisse nous dire combien on a perdu et les moyens de récupérer le fric qui doit dormir je ne sais où... C'est toujours comme cela: l'agriculture fait beaucoup parler en séance plénière, pour des résultats moindres !
Vous avez parlé de l'utilisation malheureuse des subventions à la reconversion... Vous n'avez pas tout à fait compris de quoi il est question, Monsieur Pagani ! Mais je le répète, c'est toujours ainsi: les viticulteurs, les agriculteurs et les maraîchers de ce canton veulent simplement vivre! Etre concurrentiels, participer à l'économie de ce canton, et être des artisans de ce beau paysage ! Or vous nous imposez chaque fois des règlements... (Exclamations.)C'est toujours pareil !
J'espère simplement que ce parlement finira par «foutre la paix» aux agriculteurs et leur laissera la souplesse suffisante pour qu'ils puissent exercer leur métier ! (Applaudissements.)
Le président. Je vous rappelle que la liste des orateurs a été close, en vertu de l'article 78A. La parole est à M. le président du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Il conviendrait tout d'abord de rappeler que les zones agricoles spéciales, telles qu'elles ont été déterminées à ce jour, rencontrent l'adhésion de l'Union maraîchère pour l'essentiel. Il est certain aussi qu'elles sont très largement dimensionnées pour répondre aux besoins de l'agriculture. Il est vrai qu'il y a encore un litige sur quelques zones que nous sommes en train d'étudier, en particulier celle, très sensible, de Compesières, en raison du paysage. Je pense toutefois que nous arriverons à régler ce problème.
Le litige porte sur un seul point actuellement, à savoir le cas des serres ou autres installations de cette nature qui se trouveront hors des zones agricoles spéciales. Nous savons que ces situations sont délicates pour quelques personnes et qu'il faudra forcément trouver des solutions le jour où l'un ou l'autre de ces exploitants voudra transformer, agrandir, faire une nouvelle serre. Il n'est pas question qu'un agriculteur dans cette situation puisse rencontrer des difficultés économiques, mais il n'est pas question, non plus, de laisser indéfiniment des serres à des endroits dont nous sommes tous d'accord de dire qu'ils ne sont pas adéquats - et notamment Compesières.
La question est de savoir comment régler le problème. Je ne suis pas du tout convaincu, Monsieur Dethurens que votre amendement, même corrigé - et, entre parenthèses, alourdi, puisque vous demandez un plan localisé agricole en plus - permette de régler le problème ! Je ne vois pas comment le législateur cantonal peut décider de bâtir dans une zone qui n'est pas une zone à bâtir ! Par contre - je m'y suis engagé en commission et je le confirme aujourd'hui, tout simplement en vertu des principes généraux du droit suisse, notamment du principe de proportionnalité - on ne condamnera pas à la faillite un agriculteur qui devrait reconstruire une serre hors zone agricole spéciale. Dans un tel cas, on essayera de voir si elle peut être construite ailleurs - parce qu'il y a de la place dans les zones agricoles spéciales - s'il est possible de l'indemniser pour cela ou, troisième option, on l'autorisera à rester où il est. Mais je crains de votre disposition qu'elle n'ait l'effet inverse de celui que vous cherchez à obtenir, parce que, si quelqu'un contestait cette base légale, il aurait de fortes chances de parvenir à ses fins. Il vaut mieux, à mon avis, que nous poursuivions la discussion avec Agri-Genève dans le sens d'une certaine souplesse quant à l'application de cette mesure, plutôt que d'inventer une règle consistant à dire que les lois d'aménagement doivent être appliquées sauf quand il ne faut pas les appliquer... C'est un peu ce que signifie votre amendement, Monsieur Dethurens.
En ce qui concerne l'autre amendement, à savoir l'intervention des conseillers municipaux, je rappelle que, dans le texte que votre commission a voté, ce n'est que s'il le demande que le conseil municipal peut être appelé à donner ce préavis, car, dans toutes les autres hypothèses, c'est le maire et les conseillers administratifs qui se prononcent. J'ai toujours compris que vous souhaitiez que les communes aient les plus larges pouvoirs possible et soient le plus largement écoutées, et il me semblait que cette disposition allait dans ce sens. Si vous n'en voulez pas, cela ne change pas fondamentalement le système, et je m'en rapporte à votre appréciation.
Toutefois, je vous demande de suivre les conclusions de la majorité de votre commission sur l'article 20, alinéa 9, et, par conséquent, de voter ce texte tel qu'il ressort du rapport de majorité.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 73 oui et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 13 et 15.
M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. Monsieur le président, vous avez jugé bon de clore la liste... Toujours est-il qu'après ce long débat, j'avais demandé la parole, de même que le rapporteur de minorité, et je pense que vous auriez pu nous l'accorder...
Je voulais simplement insister sur le fait que ce projet de loi traite de la production non tributaire du sol et que cela implique, justement, que l'on perd la terre arable sur laquelle les agriculteurs peuvent travailler, qui est un outil de travail.
Il est donc tout à fait normal que l'implantation des serres se fasse dans des secteurs bien déterminés.
M. Hubert Dethurens (PDC), rapporteur de minorité. Un petit mot à l'intention de M. Koechlin à qui je n'ai pas pu répondre non plus. Comme lui, je déplore le fait qu'on doive ajouter une procédure supplémentaire en demandant des plans localisés agricoles. Je le regrette, mais la loi fédérale nous l'impose, et je ne peux qu'en prendre acte.
Je vous demande simplement d'accepter mes amendements pour alléger quelque peu cette procédure.
Je le répète, je ne supprime pas des compétences, je demande simplement qu'il y ait égalité de traitement. En effet, lorsqu'une demande d'autorisation de construire est déposée en zone 4B ou autre, c'est le conseil administratif ou les maires qui se prononcent. Alors, moi je veux bien que les conseils municipaux soient impliqués, mais il faut le faire pour toutes les demandes d'autorisation de construire ! Et vous verrez alors les blocages inimaginables que cela provoquera !
Chaque citoyen a le droit de faire opposition pour un motif de non-conformité à la loi ou en raison de quelque chose qui ne vous plaît pas - la couleur rouge de la maison voisine, par exemple - mais ce n'est pas le rôle des conseils municipaux. Je suis désolé, mais ce point est défini dans la loi sur les communes, sauf erreur.
J'insiste : mon amendement ne consiste pas à supprimer un droit. Son but est simplement que la procédure soit la même que pour toute autorisation de construire.
Le président. Bien, nous votons sur l'amendement de M. Dethurens, à l'alinéa 8 de l'article 20, que vous trouvez à la page 10 du rapport. Il consiste à supprimer la fin de la phrase: «le cas échéant du conseil municipal si celui-ci en fait la demande pendant l'enquête publique»après «la commune concernée». Le reste est inchangé. Nous votons au moyen du vote électronique.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 42 oui contre 32 non.
(Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons maintenant à l'amendement de M. Dethurens à l'alinéa 9, nouveau, de l'article 20, qui a modifié un peu l'amendement tel qu'il figure dans le rapport à la page 11. Je vous le lis: «Conformément à l'article 27C de la présente loi, hors des secteurs de zone agricole désignés à cet effet par le plan directeur cantonal, le département, par voie dérogatoire, délivre, après adoption d'un plan localisé agricole, des autorisations de construire pour des exploitations existantes et portant sur des constructions et installations dépassant le cadre de ce qui peut être admis au titre du développement interne au sens de l'article 16a de la LAT.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 41 oui contre 31 non et 1 abstention.
Mis aux voix, l'article 20 ainsi amendé est adopté par 43 oui contre 28 non et 4 abstentions.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
Troisième débat
La loi 8437-2 est adoptée par article.
La loi 8437-2 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 43 oui contre 32 non
(Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous n'allons pas lever la séance tout de suite. Vous avez demandé à 14h quels étaient les projets de lois du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement que Monsieur le président du Conseil d'Etat considérait comme prioritaires. Il y en a trois. Ce sont:
- le point 27, projet de loi 8644-A;
- le point 33, projet de loi 8677-A;
- le point 34, projet de loi 8791-A.
Formellement et pour la bonne forme, car il faut les deux tiers de l'assemblée, je les mettrai aux voix à 20h30 et, si vous êtes d'accord... (Vives exclamations.)
Une voix. Maintenant !
Le président. Excusez-moi, Mesdames et Messieurs les députés, nous n'avons pas le droit de modifier... Enfin, nous pouvons le faire en tout temps. Nous allons donc procéder au vote électronique pour être sûrs que les deux tiers sont atteints. Si vous êtes d'accord avec cette proposition, à savoir traiter ces trois projets de lois au début de la séance de 20h30, vous êtes priés de voter oui, sinon non. Ensuite, nous poursuivrons l'ordre du jour normalement, au point 25. Le vote électronique est lancé.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée par 66 oui, 2 non et 5 abstentions.
Le président. La majorité des deux tiers est largement atteinte. Il en sera donc fait ainsi.
Mesdames et Messieurs les députés, nous nous retrouvons à 20h30. Je vous souhaite un bon appétit.
La séance est levée à 18h55.