Séance du vendredi 14 juin 2002 à 17h
55e législature - 1re année - 9e session - 45e séance

La séance est ouverte à 17 h, sous la présidence de M. Bernard Annen, président.

Assistent à la séance: Mmes et MM. Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Robert Cramer, Micheline Spoerri et Pierre-François Unger, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Erica Deuber Ziegler, René Ecuyer, Yvan Galeotto, Alexandra Gobet Winiger, Georges Letellier, Claude Marcet, Souhail Mouhanna, Mark Muller, Jean Rémy Roulet, Pierre Schifferli, Carlo Sommaruga et Pierre Vanek, députés.

Discussion et approbation de l'ordre du jour

M. Christian Grobet(AdG). Nous avons distribué aux chefs de groupe une proposition de motion 1465 concernant les camps de vacances. Nous souhaiterions que cette motion, visant à faire bénéficier les organisateurs de 100 000 F sur le crédit budgétaire prévu à cet effet, soit traitée ce soir en urgence.

Le président. Le texte est en train d'être distribué. Je mets aux voix cette proposition.

Mise aux voix, cette proposition est adoptée par 32 oui contre 23 non et 1 abstention.

Le président. Nous traiterons donc encore ce soir cette motion.

E 1160
Prestation de serment de M. BLASER Patrick, Juge suppléant à la Cour de justice

M. Patrick Blaserest assermenté. (Applaudissements.)

Annonces et dépôts

Néant.

IU 1261
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de M. Gilbert Catelain : Scolarisation des enfants clandestins dans le post-obligatoire (Réponse du Conseil d'Etat)

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Si je m'en tenais à la lettre des propos de M. Catelain, je pense que je pourrais répondre avec peut-être autant d'excès qu'il en a mis dans ses propos. En l'occurrence, je vais plutôt m'attacher au sujet et à sa gravité.

Pour vous dire en premier lieu, Monsieur le député, que comme tous les citoyens de ce pays, je suis soumise aux lois et que comme magistrate, je m'emploie à les respecter; vous n'avez, en aucune manière, la preuve qu'il en est autrement. Vous avez cru bon, dans votre interpellation, de fonder vos propos à mon égard et finalement à l'égard du gouvernement dans son ensemble, sur le paragraphe suivant, cité, venant de l'Office fédéral des étrangers. Je vous cite tout d'abord et je poursuivrai la citation ensuite: «Notre pays étant un Etat de droit, il n'est en principe pas acceptable que des prescriptions légales, en l'occurrence la loi sur le séjour des étrangers, ne soient pas respectées, voire que le non-respect de ces prescriptions soit sciemment couvert par une administration.» Sur cette base-là, vous m'accusez d'illégalité.

Monsieur le député, l'honnêteté intellectuelle voudrait que vous citiez le reste du paragraphe qui vient du même auteur. «Cependant, dit l'auteur du paragraphe, dans la problématique délicate qui nous occupe - ce que je viens de lire - les autorités cantonales ont également à tenir compte du bien de l'enfant et du droit que lui octroie l'article 19 de la Constitution, lesquels seraient bafoués si les étrangers clandestins, de peur d'être découverts et dénoncés de manière systématique par les autorités scolaires, n'envoyaient plus leurs enfants à l'école.»

Vous avez choisi de baser votre démonstration sur une partie de ce paragraphe. La deuxième partie montre, à l'évidence, qu'entre une loi fédérale et l'article constitutionnel 19 cité, il y a, à un moment donné, de la part des cantons et des autorités cantonales, un devoir qui s'inspire de l'humanité avant de s'inspirer d'autres éléments.

Mais j'ajoute un autre élément, puisque nous parlons de l'école obligatoire et que vous voulez faire quelque subtil distinguo entre l'école obligatoire et l'école post-obligatoire.

Monsieur le député, dans mon intervention précédente, je n'ai pas parlé que de la Constitution fédérale. J'ai bien sûr parlé de la loi sur l'instruction publique, mais j'ai aussi parlé d'une convention que nous avons ratifiée, la Convention des droits de l'enfant, entendez par là que les enfants sont des enfants jusqu'à l'âge de leur majorité.

J'ai représenté la Suisse, l'autre jour, devant le comité qui contrôle l'application de la Convention des droits de l'enfant qui, je vous le rappelle, relève de l'ONU. J'ai donc eu, à ce moment-là, à répondre de l'ensemble de la politique de la Suisse et, notamment, de l'article 28 de cette convention sur laquelle nous n'avons pas fait de réserve. Et cette convention dit ceci à son article 28:

«Les Etats parties reconnaissent le droit de l'enfant à l'éducation», soit jusqu'à sa majorité et certains de ces élèves sont dans le post-obligatoire. «Ils rendent l'enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous. Ils encouragent l'organisation de différentes formes d'enseignement secondaire, tant général que professionnel, les rendent ouvertes et accessibles à tout enfant et prennent des mesures appropriées telles que l'instauration de la gratuité de l'enseignement et l'offre d'une aide financière en cas de besoin.» La lettre C nous dit encore «qu'ils assurent à tous l'accès à l'enseignement supérieur», dont je peux dire qu'il n'est pas obligatoire, «en fonction des capacités de chacun par tous les moyens appropriés».

Alors, lorsque nous avons le sens de la légalité et du droit supérieur, que nous avons décidé, il y a plusieurs années, de ratifier la Convention des droits de l'enfant et que nous avons maintenant à justifier de notre politique à l'égard de ceux qui suivent l'application de cette convention, je vous affirme que je ne me sens pas dans l'illégalité, pas plus que l'administration, et pas plus que les vingt-six cantons qui, dans cette affaire, ont plutôt une politique coordonnée. (Applaudissements.)

Cette interpellation urgente est close.

IU 1264
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de M. Rémy Pagani : Crise du logement : prêts octroyés par la Banque cantonale (Réponse du Conseil d'Etat)

Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Les normes internes de la Banque cantonale de Genève imposent une part de fonds propres minimums obligatoire de 20% en matière de financement de logement, que ce soit pour des immeubles, des appartements ou des villas. En plus, la Banque cantonale de Genève, dans l'analyse des dossiers, est extrêmement rigoureuse. Des expertises sont systématiquement effectuées et les états locatifs sont calculés sur le long terme, de manière à pouvoir prendre en compte des risques à long terme. La Banque cantonale de Genève est très sensible aux problèmes spéculatifs, car, comme vous le savez, Monsieur le député, «chat échaudé craint l'eau froide».

Cette interpellation urgente est close.

IU 1268
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de Mme Marie-Paule Blanchard-Queloz : Camping du Bois-de-Bay : demande d'intervention immédiate de l'Etat (Réponse du Conseil d'Etat)

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. J'avais donné l'essentiel de la réponse lors de l'interpellation urgente de M. Serex. Depuis lors, j'ai pris connaissance des pièces du dossier plus en détail. Je peux vous répondre, Madame la députée, que l'Etat de Genève a effectivement conclu une convention avec la Fédération suisse de camping et de caravaning, mais que, au-delà, l'Etat de Genève n'a évidemment aucune relation contractuelle ni aucune capacité d'intervention dans les relations entre cette fédération et les employés, mandataires ou gérants, qu'elle place dans ce camping.

Lorsque nous avons appris que les gérants avaient reçu leur congé, ce qui est toujours une situation difficile, nous avons envisagé d'intervenir, mais il ne nous a pas paru très raisonnable de nous en mêler. La seule chose que nous avons faite, comme je l'ai dit, c'est de reloger ce couple, qui a accepté un appartement à partir du 2 juillet dans un immeuble propriété de l'Etat.

Intervenir aujourd'hui au titre de médiateur ne serait pas envisageable, puisque, d'une part, les intéressés sont relogés et que, d'autre part, à notre connaissance, la fédération a d'ores et déjà engagé les successeurs du couple actuel de gérants. Donc, de toute façon, il serait trop tard.

Si vous souhaitez de plus amples renseignements, j'ai ici le contrat d'exploitation avec la fédération, ainsi qu'un certain nombre d'autres documents en la matière.

A un moment donné, vous avez dit que la fédération ne payait pas son loyer. Ce n'est pas tout à fait exact, car dans la convention il était prévu que l'Etat ne perçoive pas la redevance pendant la période de démarrage. Elle ne devait être perçue qu'à partir de la troisième année d'activité. Mais, compte tenu des mauvais résultats financiers, à savoir des pertes intervenues, nous avons accepté de ne percevoir cette redevance qu'à partir de la quatrième année. Voilà un développement un peu plus précis que la réponse donnée à M. Serex, et qui confirme les informations que je vous avais données hier sur la situation en ce qui concerne le camping du Bois-de-Bay.

Cette interpellation urgente est close.

IU 1269
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente de Mme Laurence Fehlmann Rielle : Cercle de qualité médecins/pharmaciens : Qu'en est-il à Genève ? (Réponse du Conseil d'Etat)

M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Merci, Madame la députée, de m'avoir posé cette question qui m'a donné l'occasion de faire le point sur ce qui se passe à Genève.

Qu'est-ce qu'un cercle de qualité ? L'idée centrale, vous la connaissez, est de mettre ensemble un certain nombre de partenaires, en l'occurrence des thérapeutes, sur la base d'un volontariat, afin qu'ils partagent leurs connaissances, leurs compétences sur des sujets de santé, dans le but de trouver les meilleures réponses possibles, tant en termes d'efficacité que d'efficience, c'est-à-dire d'une efficacité pour un coût optimalisé; c'est ce qui se fait dans le canton de Fribourg et qui a été annoncé au Téléjournal l'autre jour.

Concrètement et de façon non exhaustive, les objectifs de ces cercles sont le développement continu de la qualité des soins; l'amélioration de l'ensemble des processus entre le médecin et le pharmacien, en particulier; la formation continue interdisciplinaire et l'utilisation des critères d'économicité, tout en préservant absolument le patient comme étant le centre des préoccupations des soignants, qu'ils soient médecins ou pharmaciens.

C'est au fond, si je devais résumer, une démarche de rationalisation librement consentie, plutôt que de rationnement imposé. Et à Genève, je me suis renseigné, il existe en effet des cercles de qualité qui sont nés il y a peu de temps, six mois environ. Ils sont au moins au nombre de trois et le plus connu d'entre eux est le réseau Delta.

Il regroupe une cinquantaine de médecins, c'est quand même déjà important, et huit pharmaciens, et il travaille notamment sur la formation continue des soignants, par exemple, en cherchant à inciter les médecins à adopter de nouveaux comportements quant à l'octroi des médicaments.

Dans le cadre de ses travaux avec les pharmaciens, ce cercle a notamment dressé une liste de génériques qui ont permis des économies substantielles sur le prix des traitements administrés aux malades.

A ce jour, et comme je vous l'ai dit, ces démarches sont toutefois trop récentes pour mesurer un véritable impact économique. En revanche, l'impact sur la satisfaction de ceux qui participent à ces cercles de qualité a déjà été mesuré et cet impact est extrêmement positif. A noter que les trois cercles de qualité qui fonctionnent à Genève le font dans le domaine du privé. Il en existe également au niveau des hôpitaux universitaires; mais dans le domaine du privé ils se sont constitués spontanément, ne bénéficient d'aucune aide financière particulière et démontrent donc la responsabilité que les thérapeutes prennent à l'établissement du bilan général économique de la santé.

Cette interpellation urgente est close.

R 420-A
Rapport de la commission législative chargée d'étudier la proposition de résolution de Mmes et M. Christian Brunier, Laurence Fehlmann Rielle, Françoise Schenk-Gottret en faveur d'une TVA réduite pour les transports publics (initiative cantonale)
Rapport de M. Christian Grobet (AdG)
Proposition de résolution: Mémorial 2000, p. 2480

Débat

M. Jean-Michel Gros (L). Le groupe libéral n'est pas persuadé qu'il faille donner suite à cette proposition d'initiative cantonale. Bien sûr, il pourrait paraître opportun d'exonérer les transports publics de la TVA, tant il est vrai que de telles prestations largement subventionnées n'auraient pas, en toute logique, à restituer les subventions sous forme d'impôt. On pourra dire en quelque sorte que l'Etat reprend de la main gauche ce qu'il donne de la main droite. De plus, en ce qui concerne en particulier les TPG, le canton s'acquitte d'un impôt en faveur de la Confédération.

Une telle démarche est-elle opportune ? Demander à l'Assemblée fédérale de réviser une loi entrée en vigueur aussi récemment semble aléatoire. Ce d'autant que cette loi a demandé plus de trois ans d'intenses travaux au parlement. En outre, la question de l'exonération des transports publics a déjà fait l'objet de débats acharnés. Je crois même me souvenir, et M. Grobet pourra me le confirmer, que cette question a constitué une des dernières divergences entre le Conseil national et le Conseil des Etats. C'est dire si le pour et le contre ont été pesés. On voit donc mal les Chambres y revenir. M. Grobet lui-même l'admet dans son rapport succinct, lorsqu'il dit que le texte original de la proposition de résolution n'avait guère de chance d'être adopté à Berne.

Je me permets de douter que cette nouvelle mouture proposée par la commission ait davantage de chance. Soumettre les transports publics à un taux réduit, comme le proposait le texte original, ou geler dans la loi le taux actuel de 7,6%, comme le demande le nouveau texte: les deux propositions me semblent également vouées à l'échec pour les motifs suivants. Les Chambres ne voudront pas modifier une loi aussi récente. Par ailleurs, je vous rappelle que, s'il devait y avoir une augmentation du taux de la TVA, une modification de la constitution devrait être effectuée, et une telle modification requiert l'accord du peuple et des cantons. Je peux vous assurer, Mesdames et Messieurs les députés, que si une telle augmentation devait être proposée, elle ferait l'objet de mesures d'accompagnement, notamment en ce qui concerne les transports publics mais aussi le tourisme, voire même les biens de première nécessité.

J'ajouterai que la crainte de voir le taux de TVA grimper jusqu'au minimum de 15% imposé par l'Union européenne s'est largement estompée depuis le vote du 4 mars 2001 sur l'initiative «Oui à l'Europe». Or, l'actuelle modestie du taux suisse a été un des arguments aux Chambres fédérales contre la multiplication des taux spéciaux. Le tableau qui est joint en annexe au rapport nous montre bien que les réductions de taux accordées aux transports publics dans les pays de l'Union européenne concernent des taux variant de 15% à 25%. Rappelons enfin que la dernière hausse de la TVA de 0,1%, entrée en vigueur le 1er janvier 2001, est uniquement là pour favoriser les transports publics puisqu'elle est affectée à la construction des transversales alpines.

Je suis donc d'avis de ne pas envoyer cette initiative à Berne. Je suis conscient qu'elle est destinée à ne pas se concrétiser mais je sais aussi qu'en cas de hausse de la TVA décidée par le souverain, cette question des transports publics refera alors surface. Je vous demande par conséquent de refuser cette résolution.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Mon avis est forcément différent de celui de M. Gros : qui ne tente rien n'a rien.

Nous avions une grande ambition dans notre première proposition de résolution. Nous invitions les autorités fédérales à revoir la législation relative à la taxe sur la valeur ajoutée afin que les prestations des transports publics soient soumises à un taux de TVA réduit.

Il n'est pas inutile de rappeler les motivations de notre démarche. Elle se fonde sur la nécessité de développer les transports publics pour améliorer la qualité de vie, lutter contre la pollution de l'air et les nuisances sonores en milieu urbain. J'ajoute que l'application en Suisse d'un taux de TVA intégral sur les prestations de transport public, la probable augmentation du taux de la TVA suisse afin de le rapprocher des taux européens, l'exonération qui se pratique déjà dans plusieurs pays européens, dont l'Irlande, la Norvège ou le Danemark, ainsi que la réduction du taux pratiquée dans les autres pays de l'Union, tous ces éléments nous légitimaient dans notre démarche. A contrecoeur, il faut l'avouer, nous avons donc revu notre ambition à la baisse. Il ne s'agit plus désormais que de demander aux autorités fédérales de geler le taux actuel de la TVA pour les transports publics. Cette proposition aurait dû recueillir l'unanimité de vos suffrages, comme cela a été le cas en commission législative.

Je vous propose toujours, Mesdames et Messieurs les députés, de voter cette résolution telle qu'elle est issue des travaux de la commission.

M. Jean-Marc Odier (R). Je ne sais pas si cette résolution a beaucoup de chance d'aboutir devant le Parlement fédéral...

Une voix. Aucune !

Jean-Marc Odier. Je pense pour ma part que la formulation actuelle de cette résolution présente, outre ceux qui ont déjà été mentionnées, un inconvénient supplémentaire. Sur le principe, les auteurs entendent promouvoir un type de transport particulier : le transport collectif. Je suis d'accord avec ce principe, mais quand on écrit «transport public» comme le font les auteurs de cette résolution, on fait la distinction avec les transports collectifs privés. Les entreprises de transport privées s'occupent également de transport collectif et rejoignent ainsi les mêmes buts et les mêmes objectifs que les TPG, par exemple. C'est pourquoi je propose un amendement qui remplace dans l'invite à l'Assemblée fédérale le mot «publics» par le mot «collectifs». La formule devient donc: «...afin que les prestations des transports collectifs soient à tout le moins soumises à un taux de TVA gelé...»

Avec cet amendement, nous pourrons voter cette résolution, sinon le groupe radical s'y opposera.

M. Christian Brunier (S). Je ferai deux remarques sur les interventions que nous venons d'entendre sur les bancs d'en face. Premièrement, je note le fatalisme de M. Gros qui reconnaît qu'il existe un problème, mais qui estime qu'il n'est pas possible d'intervenir: la loi ayant été votée il y a moins de deux ans, on ne va pas y revenir. Quand on constate un problème, Monsieur le député, il faut le corriger d'urgence. Il y a toute une série de problèmes avec la TVA et comme n'importe quelle loi, lorsqu'elle est mauvaise, il faut l'adapter. Il faut le faire pour les transports publics parce qu'il est indispensable de réduire leurs coûts au minimum, mais il faudra certainement la revoir sur d'autres aspects, notamment sur la taxation des associations. Il y a en effet toute une série d'associations qui organisent des manifestations sportives ou culturelles et qui, alors qu'elles sont largement subventionnées, sont aujourd'hui en danger parce que la TVA veut les faire passer à la caisse. Arrêtons ce fatalisme ! S'il y a des dysfonctionnements causés par des lois, il faut les corriger et le canton doit faire pression dans ce sens. Peu importe si le canton a peu de chance, nous avons déjà vu des résolutions auxquelles on accordait peu de chance aboutir, ainsi que des résolutions considérées comme gagnées ne donner aucun effet. Les prévisions des parlementaires genevois dans la réussite ou l'échec des résolutions ne doivent donc pas être écoutées.

J'en viens à la proposition de M. Odier. Il n'est pas correct de comparer les transports publics aux transports collectifs, parce que, parmi les transporteurs collectifs, il y a toute une série de privés qui ont un but lucratif, ce qui n'est pas le cas des transports publics. (Brouhaha.)De ce fait, il n'y a aucune raison que ces personnes bénéficient d'avantages fiscaux. J'ajouterai, Monsieur Odier, que cette proposition ne devrait pas venir de vous. Vous êtes vous-même un transporteur collectif et vous êtes en train de vous accorder une baisse fiscale. Je trouve qu'il est incorrect que vous fassiez vous-même cette proposition. En tout cas, nous rejetterons cet amendement. (L'orateur est interpellé.)Non, Monsieur, je n'ai jamais voté sur l'énergie !

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur. Comme M. Gros l'a annoncé, le texte initial qui avait été déposé par les députés à l'origine de cette résolution a été sensiblement modifié. En effet, entre le moment où la résolution a été déposée et le moment où elle a été traitée en commission, il y a eu un vote du Parlement fédéral qui a exclu ce que la résolution demandait à l'origine. Dès lors, tout le monde a été convaincu, même en étant d'accord avec le fond de la résolution, que proposer quelque chose qui venait d'être rejeté était peine perdue. Nous avons quand même demandé à M. Stucki, directeur général des TPG, s'il voyait quelque chose d'utile que nous aurions pu faire. En réalité, la proposition que nous traitons ce soir a été suggérée par M. Stucki, qui estimait qu'il serait bien, pour l'avenir, de pouvoir éviter des hausses de la TVA.

Sinon, je partage l'avis de M. Brunier selon lequel on a étendu la TVA de manière exagérée à une série de prestations qui n'en sont pas. Je crois qu'à un moment on payait même la TVA sur des examens scolaires... Enfin, je ne sais pas où en est cette affaire. Je vous rappelle qu'il y a eu des demandes, qui ont d'ailleurs été appuyées par ce Grand Conseil, pour que les associations caritatives organisant des brocantes soient libérées de cette TVA qui ne se justifie pas. M. Brunier évoque à juste titre le problème des clubs sportifs et autres associations. Cela semble un peu contradictoire de vouloir promouvoir les transports publics en les subventionnant et, en même temps, de majorer le prix du billet à cause de la TVA. Sur le fond la démarche est bonne et le texte final est très modéré. Je pense que cette résolution peut donc être votée.

Vous êtes un peu pessimistes, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente, sur les chances que le Parlement fédéral change d'avis. C'est vrai que parfois - nous l'avons vu pour l'assurance-maternité - cela prend vingt ans. Dans d'autres circonstances, cela a pourtant été plus vite, précisément pour la TVA par exemple. Il y a déjà eu des adaptations un peu plus rapides. Actuellement, par exemple, on parle d'une nouvelle modification du droit du divorce. Je crois d'ailleurs que vous y êtes favorables, alors même qu'on a voté cette modification du code civil il y a à peine un an ou deux. Je ne veux pas dire que la résolution que nous traitons ce soir sera forcément acceptée dans l'enthousiasme à Berne. Je pense cependant que ça vaut la peine de poser le problème.

Maintenant, ce n'était peut-être pas à M. Odier de proposer cet amendement, mais, quitte à décevoir M. Brunier, je pense que cet amendement est juste, dans la mesure où, à Genève, on a toujours parlé dans la loi des transports collectifs et pas uniquement des transports publics. Il s'agit du terme retenu dans notre législation. Au niveau de la politique des transports, on a intérêt à avoir des transports collectifs, qu'ils soient assurés par des prestataires publics ou privés. Notez bien que la différence n'est d'ailleurs pas toujours aisée, puisque des compagnies privées de transports collectifs ont bénéficié de sous-traitances, notamment de la part des TPG. En Suisse, on appelle d'ailleurs souvent «privés» des chemins de fer qui appartiennent en fait à des cantons. Il n'est donc pas facile de distinguer entre les transports publics et les transports privés, pour employer le jargon suisse. C'est pourquoi je pense que le terme utilisé par M. Odier est le plus adéquat. A titre personnel, je m'y rallie.

M. John Dupraz (R). Il faut savoir que toutes les résolutions que nous avons votées à l'attention des Chambres fédérales n'ont jamais eu beaucoup de succès jusqu'à présent... (L'orateur est interpellé.)Non, ce n'est pas une initiative cantonale, Monsieur Grobet, il s'agit d'un amendement que j'ai proposé au parlement à titre individuel. C'est différent.

Je dois dire que je préfère utiliser les termes de transports collectifs parce que le but est quand même, dans le cadre d'une vision globale du développement durable avec une limitation de l'émission de CO2, d'éviter que les gens utilisent leur voiture. Il est vrai que les autocaristes privés, qui assurent un transport collectif parfois complémentaire aux transports publics, voire qui sous-traitent des tâches affectées à ces derniers, jouent aussi un rôle significatif dans l'amélioration de l'environnement et des conditions de circulation, notamment en milieu urbain.

Je dirai cependant qu'il est un peu utopique de croire que l'on va pouvoir, comme cela, réviser la loi sur la TVA, mais je pense qu'il faudrait effectivement que l'on évite, à l'avenir, d'augmenter la TVA sur les transports publics. En effet, augmenter la TVA, c'est augmenter les subventions publiques pour combler le manque à gagner, ou le coût qui ne peut pas être couvert, étant donné que le service public ne peut pas lui-même financer le coût réel de sa prestation. Sinon, il ne s'agit plus d'un transport public et les prix étant trop chers, les personnes retournent au transport privé.

Cette résolution me semble être plutôt un signal que nous donnons en disant qu'il faut faire attention avec les transports publics et arrêter de les taxer. Envoyer ce signal aux Chambres, c'est aussi une façon de soutenir les transports collectifs et dans ce sens le groupe radical acceptera cette résolution avec l'amendement qui est proposé par M. Odier, parce que nous croyons que les transports collectifs jouent un rôle significatif dans l'amélioration des conditions de vie dans notre pays.

M. Pierre Weiss (L). Il se trouve que pour la deuxième fois cet après-midi je suis d'accord avec les propos tenus par M. Brunier, en qui je découvre un disciple du baron de Coubertin. Après tout, il n'est pas toujours nécessaire d'espérer pour entreprendre, Monsieur Brunier, et parfois on peut même se lancer tête baissée. Cela dit, dans cette opération, si la loi est mauvaise, on peut imaginer changer la loi, c'est le raisonnement développé hier soir à propos de la LIPP. En revanche, si le changement est mauvais, il faut le refuser. C'est, je crois, le raisonnement que certains avaient développé hier soir pour refuser le projet libéral. Je m'étonne donc que certains députés soutiennent cette résolution, dans la mesure où d'une part elle n'a que peu de chances d'aboutir et où, d'autre part, il est difficile de trouver de bons arguments en faveur de ce gel du taux de TVA pour les transports publics.

M. Jean Spielmann (AdG). Le problème de la TVA et de la taxation des transports publics pose aussi un problème au niveau de nos relations internationales. Il est tout à fait clair que si les transporteurs suisses ou les voyageurs transportés dans notre pays payent une TVA totalement différente de ce qu'elle est en France ou en Italie, il se pose un problème de concurrence, pas seulement pour les entreprises de transports mais aussi pour le passager lui-même. Or, les pays européens ont aujourd'hui des taux de TVA sur les transports publics très différents du taux suisse. Ces taux sont réduits parce que ces pays entendent favoriser les transports publics et que ce n'est pas particulièrement intelligent de subventionner un transport d'un côté et de le taxer de l'autre côté.

La TVA est un impôt particulier parce qu'il est centralisé. Il est versé dans les caisses fédérales et ne reste pas dans la région où le transport public est utilisé. Comme la Confédération a décidé récemment de transférer le coût des transports régionaux du niveau fédéral au niveau cantonal, il est assez difficile d'accepter que ces cantons qui financent les transports publics doivent prélever la TVA qui est ensuite reversée à la Confédération. Partant de là, l'argumentation en faveur d'un taux différent de TVA commence à devenir pertinente.

Imaginons un autocar qui traverse la Suisse de Bâle au Tessin ou de Genève à Zurich et retour: les passagers ne payeront pas de TVA si le transporteur est français, tandis qu'ils s'acquitteront de la TVA au plein tarif si le transporteur est suisse. Alors, il y a peut-être un certain nombre de divergences sur lesquelles il serait utile de discuter, d'autant plus que les bilatérales permettent aux entreprises françaises de venir faire du cabotage et de charger en Suisse. Je ne suis pas sûr, Monsieur Odier, que vous n'ayez pas intérêt à ce qu'on discute de ce problème à la lumière des changements de lois qui sont en train de s'opérer. Le transport public en tant que tel doit être pris en compte de manière sérieuse.

Je fais une dernière observation. Quand un canton décide de modifier le mode de financement du transport public en passant par exemple, comme nous l'avons fait, à un contrat de prestations et à une autonomie des entreprises, il est clair que ce n'est plus un service de l'Etat, mais une prestation que l'entreprise offre au canton. Et c'est pour cette raison que la TVA est prélevée sur le prix des billets, ce qui va fatalement faire augmenter ce dernier. Il me semble donc intelligent, compte tenu des nouvelles orientations de la Confédération dans le domaine du transport, compte tenu du transfert des charges du transport régional vers les cantons ainsi que des possibilités de cabotage offertes par les bilatérales, d'examiner si notre TVA est toujours adaptée et s'il ne vaudrait pas mieux prendre une mesure permettant de coordonner, avec nos voisins français, allemands et italiens, le mode de financement et de taxation des transports publics.

Nous entendons, ces prochaines années, développer les transports urbains en réalisant de nouvelles voies de chemin de fer et de bus; il ne serait donc pas vraiment judicieux que nous financions ce développement et que la Confédération encaisse la TVA issue des transports publics. Cette initiative nous semble par conséquent tout à fait intelligente et je ne suis pas sûr qu'il n'y aura pas quelques représentants des cantons et des régions à Berne qui seront intéressés à discuter d'un taux réduit de TVA pour les transports publics.

Le président. Je vais vous faire voter sur l'amendement présenté par M. Odier qui, dans l'invite à l'Assemblée fédérale, change le qualificatif de «publics» par celui de «collectifs», ce qui donne: «à réviser la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA) afin que les prestations des transports collectifssoient à tout le moins soumises à un taux de TVA gelé...»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mise aux voix, la résolution 420 ainsi amendée est adoptée. Elle est renvoyée à l'Assemblée fédérale.

M 1440
Proposition de motion de MM. Thomas Büchi, John Dupraz, Louis Serex demandant l'installation de panneaux solaires sur le toit de la halle 6 de Palexpo

Débat

M. John Dupraz (R). Après avoir réalisé une expérience personnelle en matière d'énergie solaire, il me semblait que l'immense surface du toit de la Halle 6 pouvait être un lieu adéquat pour l'installation de panneaux solaires. Vous savez que, soit le département de M. Cramer, soit les Services industriels, s'activent intensément pour promouvoir et développer les énergies renouvelables, notamment en matière de production d'énergie photovoltaïque.

Dernièrement, le parking de l'Etoile a inauguré une magnifique installation sur son toit. C'est une véritable réussite. Alors pourquoi ne pas utiliser le toit de la Halle 6 pour de telles installations, étant donné qu'il y a une clientèle pour l'énergie solaire dans ce canton ? Beaucoup m'ont reproché, ou s'inquiètent de l'investissement qui serait lié à de telles installations, mais il faut savoir, d'une part, qu'il existe un fonds pour les économies d'énergie et que, d'autre part, le prix de vente de l'énergie permet pratiquement d'amortir les investissements réalisés en la matière.

Mesdames et Messieurs, il s'agit d'une modeste motion qui essaye de promouvoir les énergies renouvelables dans ce canton. Je vous demande donc de lui réserver un bon accueil et de la renvoyer directement au Conseil d'Etat, car je crois qu'il n'y a pas grand-chose à discuter à son sujet.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Monsieur Dupraz, il vous a semblé absolument tout juste !

Nous soutenons bien entendu cette motion, qui est d'ailleurs pratiquement réalisée si mes sources sont bonnes. Nous allons même plus loin: nous venons de déposer une motion qui demande une étude de faisabilité succincte pour recenser tous les toits publics susceptibles d'accueillir des panneaux solaires, photovoltaïques ou thermiques.

J'en profite pour rappeler que ceci est entièrement conforme à notre conception générale de l'énergie qui prône l'augmentation de la production locale d'électricité de 5% d'ici 2010. Cette augmentation passera entre autres par des installations solaires. Vous êtes donc en plein dans la cible, Monsieur Dupraz.

Je profite aussi de l'occasion, car je me soucie des PME, pour rappeler qu'il est important que la politique des Services industriels genevois en matière d'ouverture des marchés soit suffisamment souple et attentive pour que les petites entreprises puissent aussi se positionner sur ce marché de l'énergie solaire, et que celui-ci ne soit pas réservé à des entreprises du type BP Solar.

M. Sami Kanaan (S). Je serai bref car je rejoins entièrement ma préopinante. Le groupe socialiste salue cette motion qui est une excellente idée. Il serait dommage de ne pas utiliser une surface pareille à cette fin. De plus, ce n'est certainement pas là que nous aurons des problèmes esthétiques tels qu'ils peuvent surgir dans ce type de dossier.

Nous pensons également qu'il n'y a pas de problème de principe sur le financement. Il n'est donc pas nécessaire de passer en commission à ce stade. Nous attendons le projet de loi du Conseil d'Etat. Cela dit, selon les mêmes sources que Mme Leuenberger, les intentions actuelles sur cette surface sont extrêmement modestes par rapport aux possibilités en mètres carrés. Je pense que cette motion peut donc inciter le Conseil d'Etat à aller plus loin que ce qui est prévu. Il est d'ailleurs aussi question, du côté des SIG, d'utiliser les surfaces créées par le stade de La Praille. C'est une excellente idée et il faut donc vraiment recenser les surfaces où il serait possible d'installer des panneaux solaires.

M. Jacques Baud (UDC). Je désire juste vous donner une petite indication technique. L'amortissement des panneaux solaires se fait sur une vingtaine d'années et ils deviennent obsolètes au bout de vingt-trois ans, après quoi il faut les changer. Il faut donc tenir compte du fait qu'il faudra changer les panneaux solaires tous les vingt-trois ans.

M. Rémy Pagani (AdG). Au risque d'incommoder un certain nombre de mes collègues députés, je souhaiterais soulever un point problématique. J'ai participé à la discussion de la commission à propos de la Halle 6. Nous avions alors étudié l'option de mettre des panneaux solaires mais, vu les coûts supposés pour renforcer le toit, cette option a été abandonnée. Il me semble donc que le toit ne pourrait pas supporter ces panneaux solaires puisque nous avions abandonné cette option au moment de la construction, en raison du coût déjà important de cette halle.

Sur le fond, je suis d'accord d'installer des panneaux solaires où cela est possible, mais avant de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, il faudrait être cohérent avec le travail effectué en commission. Je vous propose donc de renvoyer cet objet en commission en vous souvenant de nos travaux et de nos choix, et ensuite de le renvoyer au Conseil d'Etat. Cela me semble plus judicieux que de voir le Conseil d'Etat nous renvoyer le bébé, et il n'hésitera pas à le faire en raison de notre rejet de cette option au début de la construction de la Halle 6.

Le président. Nous sommes devant une demande de renvoi en commission. Je donne la parole à une personne par groupe sur ce renvoi.

Mme Janine Berberat (L). Le groupe libéral se rallie à la proposition de M. Pagani de renvoyer cette motion en commission de l'énergie. Effectivement, j'ai le même souvenir que lui: nous avions déjà parlé de cette éventualité lors de la législature précédente. Nous avions dit qu'il fallait mettre des panneaux solaires aux endroits où cela se présentait bien et la question avait déjà été posée relativement à la Halle 6. Je trouve donc peu raisonnable de faire de telles recommandations sans avoir une évaluation des possibilités et du coût.

M. John Dupraz (R). Je ne comprends pas très bien l'objectif de ce renvoi en commission puisqu'on demande au Conseil d'Etat d'évaluer si ce projet est réalisable. En cas de réponse négative, nous en resterons là. Mais qu'allons-nous faire en commission ? Nous allons perdre notre temps ! Renvoyons cette motion au Conseil d'Etat, qui a bien plus de moyens que nous pour traiter un dossier qui ne nécessite plus qu'une simple étude. Il y aura une étude de faisabilité et le Conseil d'Etat nous dira si l'installation de panneaux solaires est techniquement et financièrement possible.

M. Sami Kanaan (S). Nous nous rallions à la position de M. Dupraz de renvoyer directement cette motion au Conseil d'Etat puisque, si celle-ci est suivie d'effet, nous aurons un projet de loi d'investissement qui nous donnera amplement l'occasion de vérifier les données de ce problème. Ce n'est pas la peine de perdre du temps à ce stade. Renvoyons ce texte directement au Conseil d'Etat !

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je soutiens également le renvoi au Conseil d'Etat, parce que renvoyer la motion en commission n'aurait pas de sens et ferait perdre du temps et de l'argent.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je tiens tout d'abord à remercier M. Pagani de nous avoir rappelé qu'il y a eu toutes sortes de volontés de diminuer les coûts au moment de la construction de la Halle 6. Il est possible que l'une ou l'autre des économies envisagées ait eu pour effet de réduire la capacité de la dalle constituant le toit de la halle. Cela dit, ce n'est pas tout à fait certain, car j'ai entendu parler de toutes sortes de projets pour cette dalle, y compris celui consistant à y installer de nouvelles constructions. Il n'est donc pas exclu que la portance de la dalle soit suffisante. Quoi qu'il en soit, je ne pense pas qu'un renvoi en commission soit de nature à nous éclairer, à moins que quelques-uns des architectes, des entrepreneurs ou des ingénieurs participant à la construction de la Halle 6 siègent dans la commission en question. A ma connaissance, ce n'est pas le cas.

Il me semblerait donc plus efficace et plus rapide de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat qui procédera aux études nécessaires. S'il s'avère qu'il n'est pas possible d'installer cette centrale photovoltaïque sur le toit de la Halle 6, nous vous le dirons. S'il s'avère, au contraire, que techniquement on arrive à trouver des procédés pour le faire, nous vous le dirons également, le cas échéant en accompagnant notre réponse du projet de loi d'investissement évoqué dans la motion. Il va de soi qu'avant de demander au Grand Conseil d'adopter un projet de loi d'investissement nous allons chercher les autres sources de financement possibles et il y en a un certain nombre. C'est donc dire que, si votre Grand Conseil entend donner un message en faveur de l'installation de ces cellules photovoltaïques, il faut qu'il renonce à renvoyer cette motion en commission et qu'il la renvoie directement au Conseil d'Etat.

J'ajoute deux mots suite à l'intervention de M. Baud. Effectivement les cellules photovoltaïques, comme tous les procédés visant à produire de l'énergie et notamment les chaudières, ne sont pas éternelles. Quand on installe de tels dispositifs, il faut imaginer qu'il sera nécessaire un jour ou l'autre de les remplacer. En d'autres termes, il faut tenir compte d'un amortissement dans les frais financiers. C'est ce que nous faisons habituellement en matière d'installation photovoltaïque.

Le président. Je mets aux voix la proposition de renvoyer la motion en commission.

Mis aux voix, le renvoi en commission est rejeté.

Mise aux voix, la motion 1440 est adoptée.

M 1443
Proposition de motion de MM. Pierre Froidevaux, Jean-Marc Odier, Louis Serex, Jacques Jeannerat, Hugues Hiltpold, Gabriel Barrillier visant à renforcer le transfert modal et à réaliser des P+R dans les secteurs de Bardonnex-Perly et douane d'Anières-La Pallanterie

Débat

M. Jean-Marc Odier (R). Cette motion se fonde sur un constat impressionnant et inquiétant : 419 000 personnes traversent quotidiennement la frontière genevoise. Selon l'OTC, qui calcule ce chiffre, ce dernier pourrait augmenter de 40% dans les dix à quinze prochaines années. C'est dire si la pression des déplacements est énorme sur le canton et si nous avons tout avantage à les organiser au mieux. C'est ce que nous essayons de faire. Cependant, en fonction de ces chiffres, on constate également que le passage aux frontières est beaucoup plus important sur la rive gauche que sur la rive droite. Paradoxalement, la rive gauche est la moins bien desservie par les transports publics, ou collectifs, puisque maintenant on peut aussi dire collectifs...

Effectivement, seules 4% des personnes qui passent les frontières utilisent un moyen de transport collectif sur la rive gauche, alors que 16% le font sur la rive droite. Cela m'amène à vous proposer deux axes de développement de P+R en combinaison avec les transports publics. Il s'agit du secteur Bardonnex-Saint-Julien et du secteur Pallanterie-route de Thonon.

A cela s'ajoute la constatation que le P+R de la Nautique, qui est également sur cet axe, est situé, comme le parking de l'Etoile, entre le centre-ville et la frontière. Je pense que ces parkings ne sont pas suffisamment à proximité des frontières pour remplir pleinement leur rôle, particulièrement pour le déplacement des pendulaires. Il faut en effet savoir que le P+R qui fonctionne le mieux, celui de Moillesulaz, est rempli à 98%. Il se situe à la frontière et est desservi par une ligne de transport public très efficace. C'est pour cela que cette motion souhaite ouvrir le débat sur la localisation des P+R, et particulièrement sur les deux axes évoqués puisqu'il semble que là ils font actuellement défaut. Je vous remercie donc de faire un bon accueil à cette motion et de la renvoyer au Conseil d'Etat.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Nous aimons beaucoup quand nos collègues radicaux tiennent le même langage que nous concernant l'extension des lignes de tram, le transfert modal et la réalisation de parkings relais. La prolongation du tram en direction de Plan-les-Ouates et Saint-Julien, la concrétisation d'un P+R permettant le transfert modal, une prolongation du réseau de tram en direction de La Pallanterie avec un P+R nécessairement plus proche de la frontière que celui de la Nautique, ne peuvent que recevoir l'adhésion totale du groupe socialiste.

Je suis sûre que le conseiller d'Etat Cramer, avec la belle majorité, voire l'unanimité que nous allons avoir sur ce projet de motion, sera ravi de concrétiser ainsi les projets qui lui tiennent à coeur dans le cadre de la vision ambitieuse qu'il dit avoir pour le développement du réseau des TPG. C'est pourquoi nous voterons ce projet de motion avec enthousiasme.

Mme Anita Frei (Ve). Nous ne pouvons que nous associer à cet enthousiasme et saluer la motion radicale. Nous ajoutons seulement un petit bémol sur la question de la hiérarchie dans la démarche: il nous semble qu'elle met un peu la charrue avant les boeufs. En effet, il ne suffit pas de construire des silos à voiture en pleine campagne, si beaux soient-ils, pour voir le report modal se faire. Nous apprécions donc tout particulièrement la troisième invite de cette motion qui doit, à notre sens, recevoir une attention particulière. Elle demande au Conseil d'Etat de planifier en même temps les parkings d'échange et leurs dessertes par les transports collectifs. En effet, au-delà du Bachet-de-Pesay, comme l'a signalé M. Odier, la route de Saint-Julien est certes desservie par un bus, mais dont la fréquence et le confort n'encouragent guère les automobilistes prêts à se convertir à une forme de mobilité plus collective. Quant à la rive gauche, entre les Eaux-Vives et Douvaine-Thonon, c'est quasiment le désert; quelques bus s'y frayent un chemin, presque honteusement, peut-être pour ne pas effrayer les automobilistes. Il est temps que cette région soit desservie de manière moderne et intense, afin que les frontaliers puissent choisir de laisser leur voiture privée dans des P+R et emprunter un bus confortable pour aller travailler en ville.

La politique de déplacement doit être régionale et elle doit voir loin tant du côté de Saint-Julien que du côté de Douvaine et Thonon. Nous souhaitons donc que le Conseil d'Etat revienne au plus vite avec des propositions allant dans ce sens. Nous vous invitons donc à lui renvoyer sans plus tarder cette motion.

M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC est favorable au transfert modal et soutiendra donc cette motion.

J'aimerais cependant me prononcer sur la seconde invite en complément des propos de mon collègue radical. Effectivement, le parking d'échange de Moillesulaz est celui qui fonctionne le mieux parce qu'il est à proximité de l'arrêt du tram. Je me demande alors si dans le secteur de Perly, sachant qu'il s'agit d'une zone déjà fortement urbanisée et que la ligne se poursuit sur France, on ne devrait pas envisager la possibilité, dans le cadre du Comité régional franco-genevois, de réaliser ces P+R sur le territoire français, dans la mesure où la traversée de Saint-Julien est totalement saturée. Je propose donc que l'on modifie l'invite dans ce sens.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je ne peux que me réjouir de cet enthousiasme unanime sur un projet qui relève de la politique de la mobilité ou des transports. C'est suffisamment rare pour être souligné.

Pour le surplus, je relève que la première invite de la motion concerne le plan directeur 2003-2007. Depuis le dépôt de la motion en février, ce plan a été présenté au Grand Conseil et a été examiné en commission. Evidemment, le rythme de travail de ce Grand Conseil, qui l'amène à examiner au mois de juin une motion déposée au mois de février, explique cette discrépance entre les propos de l'invite et la réponse donnée par le Conseil d'Etat, qui pourrait dès lors paraître anticipée.

Ceci dit, sur le fond, comme l'a relevé M. Odier, cette motion nous invite à vous faire part de la politique du Conseil d'Etat en matière de parkings d'échange, mais aussi de la politique du Conseil d'Etat à court terme et à long terme. Nous sommes actuellement, avec la Fondation des parkings, en train de déterminer les priorités et les nécessités de réalisations de nouveaux parkings relais et d'examiner la façon dont nous pourrons les financer. Répondre à cette motion nous permettra donc, dans le même temps, d'engager avec le Grand Conseil le débat nécessaire sur la planification de ces futurs ouvrages. C'est en ce sens que j'accepte bien volontiers cette proposition de motion.

Le président. Malheureusement, nous n'avons pas reçu d'amendement, même s'il y a eu une allusion à une modification de la seconde invite... Je fais donc voter cette motion telle quelle.

Mise aux voix, la motion 1443 est adoptée.

I 2026
Interpellation de M. Jean Spielmann concernant la responsabilité de l'Etat

M. Jean Spielmann (AdG). Nous avons déjà beaucoup parlé des dysfonctionnements de l'office des poursuites et faillites. Très souvent, il a été question de responsabilité ou de problèmes financiers. Il y a cependant aussi des dossiers qui regardent des individus et je voudrais interpeller le Conseil d'Etat sur un dossier qui me semble particulièrement préoccupant, ce d'autant plus qu'il dure depuis un certain nombre d'années. Je vais rapidement vous rappeler les faits avant de poser quelques questions au Conseil d'Etat, que je remercie d'avance pour ses réponses.

Mon interpellation concerne une dame qui est arrivée en Suisse à la fin des années septante, avec toute une série de problèmes qu'elle a rencontrés au cours de sa vie. Ses parents d'origine russe ont quitté la Russie. Malheureusement son père a été interné dans un camp de concentration et, à la fin de la guerre, il s'est retrouvé en Israël avec d'autres prisonniers. Cette dame et sa mère décident alors de le rejoindre. A la suite du décès du père, la fille et la mère viennent s'installer à Genève avec tous leurs avoirs, ce qui représentait plusieurs tonnes de matériel. Cette dame et sa mère ont rapidement eu des problèmes avec leur régie. Cela n'était pas grave jusqu'au moment où ce litige est arrivé à l'office des poursuites et faillites. Un huissier s'est présenté pour saisir tout le contenu de leur appartement. Des problèmes importants liés à leur patrimoine et à leurs papiers ont alors commencé, puisque l'office des poursuites a simplement tout pris.

A l'époque déjà, cette personne était intervenue auprès de nombreux députés, c'est ainsi que beaucoup d'entre nous connaissent cette dame.

Le problème dans cette affaire est qu'elle n'a jamais pu récupérer l'ensemble de ses biens à l'office des poursuites parce qu'ils avaient été mis en vente. Nous avons été interpellés en 1984 et nous nous sommes rendus à l'office des poursuites de Carouge pour essayer de retrouver une partie des biens de cette dame. Malheureusement, on avait procédé à des ventes de gré à gré et rien n'a pu être retrouvé. Il y avait des choses relativement chères et anciennes, comme des tapis, de la vaisselle en vermeil, de l'or, etc. Tout cela a été vendu par l'office des poursuites et par des personnes qu'on connaît aujourd'hui puisque cette femme tenace a remonté petit à petit la filière et a réussi à racheter une partie du matériel qui lui avait été volé par l'office des poursuites.

Ce qui est plus grave, c'est que non seulement ce matériel a été pris et revendu, mais que les papiers de cette dame ont aussi été pris, dont notamment des diplômes professionnels, mais aussi des dossiers de ses parents, qui avaient été entre temps réhabilités et dont le nom - c'est un événement important - a été donné à une rue de Moscou. La mère de cette dame était en effet enseignante et chercheuse à un niveau assez important pour que l'URSS décide de donner son nom à une rue. La mère de cette personne est ensuite décédée, mais comme ses papiers lui avaient été volés et jamais retrouvés malgré des années de recherches, il n'a pas été possible de l'ensevelir. La fille n'a pu obtenir qu'une urne qu'elle garde chez elle parce qu'elle n'a pas de dossier, pas de papiers et qu'elle n'existe plus puisqu'on lui a tout volé. Elle a tenté de retrouver ses documents; elle a entretenu toute une correspondance, que je tiens à disposition du Conseil d'Etat, avec le président du Conseil d'Etat de l'époque, M. Vernet, avec l'ambassade d'Israël ou avec le département fédéral des affaires étrangères. Tout le monde a reconnu que ses papiers avaient été volés par l'office des poursuites. Depuis, une série de dossiers, dont les diplômes de ses parents, des photos et des affaires personnelles ont pu être rachetés au marché aux puces. D'autres affaires, dont la valeur est considérable, ont tout simplement disparu.

Je pose ici le problème du désarroi d'une personne dépouillée par l'office des poursuites depuis 1984, qui n'a aujourd'hui pas de papiers, qui ne peut pas se déplacer, qui n'a pas pu faire ensevelir normalement sa mère et à qui on refuse de redonner ses papiers et ses documents. Au début, l'office des poursuites et l'Etat ont nié avoir pris ses papiers avant de le reconnaître. Il a ensuite été demandé à l'office des poursuites, par l'ambassade d'Israël et par le département des affaires étrangères, de rendre ces documents. Il suffisait que l'office des poursuites reconnaisse avoir fait des erreurs et avoir pris des affaires personnelles. La dame a bien tenté de les récupérer, mais ces documents n'existent plus, ils ont tout simplement disparu.

Rendez-vous compte, Mesdames et Messieurs les députés: cette dame a dû racheter ses diplômes et ses affaires personnelles au marché aux puces ! Aujourd'hui encore, on continue de vendre le patrimoine de cette personne sans qu'elle puisse faire valoir ses droits. Elle doit, année après année, faire des recours pour rentrer dans son droit.

Je pose donc la question suivante au Conseil d'Etat. Tout d'abord, ne considérez-vous pas, après avoir promené cette personne pendant vingt-six ans, après lui avoir confisqué l'ensemble de ses biens, qu'il serait logique de rétablir aujourd'hui la situation et de lui offrir un papier lui permettant de vivre décemment, de pouvoir enterrer sa mère comme elle aurait le droit de le faire, et enfin de retrouver une partie du patrimoine qui lui a été volé, car on connaît les personnes qui ont pris ses affaires et on sait de quelle manière elles ont été vendues. Toute la liste de ses affaires est d'ailleurs à disposition du Conseil d'Etat.

Il y a eu des problèmes de dysfonctionnement, mais il y a aussi le désarroi de personnes touchées de manière ignoble. Je demande donc au Conseil d'Etat de rétablir la justice et d'intervenir, parce que la responsabilité est à son niveau. Il faut permettre à cette dame de vivre normalement dans notre société.

Mme Micheline Calmy-Rey, présidente du Conseil d'Etat. Les faits que vous évoquez, Monsieur le député, sont extrêmement douloureux. Vous permettrez que le Conseil d'Etat vous réponde lors d'une séance ultérieure.

Le président. Ce sera donc, en application du règlement, lors de la prochaine session.

PL 8700
Projet de loi de Mme et MM. Janine Berberat, Thomas Büchi, Gilles Desplanches, Olivier Vaucher, Pierre Kunz, Jean-Michel Gros, Pierre Weiss, Christian Luscher, Jean Rémy Roulet, Blaise Matthey, Blaise Bourrit, Robert Iselin, Ivan Slatkine modifiant la loi générale sur les contributions publiques (D 3 05)

Préconsultation

M. Christian Luscher (L). Ceux d'entre nous qui étaient déjà députés lors de la dernière législature se rappelleront du vote de la loi visant à taxer différemment, d'une part, les voitures de tourisme et les motos et, d'autre part, les camions et les véhicules de livraison. En ce qui concerne les voitures de tourisme et les motos, le législateur est passé du principe de la taxation de la cylindrée à la taxation de la puissance, tandis qu'il passait pour les camions et les véhicules de livraison du principe de la charge utile à celui du poids total. Pour présenter ce projet à la commission fiscale, on nous avait montré des simulations qui semblaient indiquer que le changement du principe de taxation était neutre. Je ne sais pas si cela vous rappelle quelque chose, mais j'ai entendu récemment que le Grand Conseil traitait de ce sujet... Il n'en demeure pas moins que, lorsque cette question avait été analysée en commission fiscale, des simulations avaient été faites afin d'arriver à la neutralité de ce changement. D'ailleurs, la seule personne qui s'est méfiée de cette neutralité, et qui l'a fait savoir, est Mme Janine Hagmann. Il est vrai qu'en matière fiscale on devient méfiant avec l'expérience. L'expérience nous démontre que la méfiance est la seule attitude qu'on puisse avoir.

En l'occurrence, que constate-t-on? On constate que certains véhicules ont fait l'objet d'augmentations absolument délirantes, la taxe auto passant de 200 F à 800 F, ou même de 400 F à 1500 F, voire 2000 F et plus. Bref, il s'agit d'augmentations insoutenables, qui font passer ce prélèvement du rang de taxe au rang d'impôt. En effet, lorsque la taxe augmente à ce point, elle ne peut justifier aucune contre-prestation de l'Etat, de sorte que ce n'est plus une taxe. Nous sommes ainsi arrivés à un stade où visiblement il s'agit d'un impôt. D'ailleurs, plusieurs personnes s'en sont émues et ont écrit au Conseil d'Etat. Lorsque nous avons déposé ce projet de loi, nous étions, nous aussi, envahis de lettres ou de coups de fil de gens qui visiblement n'étaient pas du tout contents de cette nouvelle augmentation. Cette dernière ne touche d'ailleurs pas uniquement les ménages mais aussi les entreprises. J'ai eu personnellement des remarques d'un entrepreneur de ma commune qui a une entreprise de toiture avec une quinzaine de véhicules. Il m'a fait la démonstration, tableau Excel à l'appui, et je le produirai en commission fiscale s'il le faut, que son augmentation était de l'ordre de 50%. Peut-être ne payait-il pas assez avant, mais il n'empêche que cette personne a une vingtaine d'employés, paie ses impôts et crée des emplois à Genève... (L'orateur est interpellé.)J'imagine volontiers que vous n'êtes pas du tout sensible à ce genre d'argument, Monsieur Spielmann !

Il y a également le problème des véhicules de livraison et des camions, qui sont souvent la propriété de petits entrepreneurs qui emploient aussi beaucoup de personnel. Je crois que ce n'est pas tenir des propos fascisants des années trente que de dire que ces personnes méritent aussi notre protection. Dans le domaine des véhicules de livraison et des camions, des hausses absolument explosives ont été constatées. Manifestement, ce n'était pas la volonté du législateur et les simulations qui nous avaient été présentées ne nous permettaient pas de prévoir de telles augmentations.

Il faut tout de même relever certaines incohérences dans la loi telle qu'elle a été votée. Je vous donne l'exemple d'une voiture d'une cylindrée de 1,8 litre, mais d'une certaine puissance, consommant entre huit et dix litres aux cent, qui est soumise à un impôt beaucoup plus élevé qu'une grosse américaine, qu'on peut qualifier de veau, si vous me permettez cette expression, ...

Des voix. De vache à lait !

M. Christian Luscher. ...qui consommera entre vingt et trente litres aux cent. Est-il vraiment raisonnable, sous l'angle écologique, de taxer davantage une voiture qui consomme dix litres aux cent qu'une voiture qui consomme vingt à trente litres aux cent ? Avec ce système de la puissance, nous sommes arrivés à ce type d'incohérences qui doivent être corrigées. Notre projet de loi propose par conséquent la correction suivante: si nous conservons le nouveau système de taxation, car il a une certaine forme de légitimité, il faut en revanche plafonner les hausses qui n'avaient pas été prévues par le législateur.

Je remercie les deux ou trois personnes qui ont été attentives à mes propos...

Mme Maria Roth-Bernasconi (S). Quand les moteurs ne vrombissent plus, on respire enfin. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, ce que j'avais envie de dire.

Vous vous plaignez, Monsieur le député, du fait que certaines personnes ont protesté quand elles ont reçu la notification de la taxe frappant les voitures de tourisme sans distinction de classe sociale, semble-t-il. J'ai failli pleurer, Monsieur Luscher, surtout pour le club des Porsche...

Une voix. C'est un scoop ! (Rires et exclamations.)

Mme Marie Roth-Bernasconi. Il m'arrive de pleurer de temps en temps... Permettez-moi de dire que je n'ai pas entendu ces protestations mais plutôt le contraire. Les voitures de forte puissance roulent vite, démarrent en trombe, consomment beaucoup et polluent notre air. Le thème de la sécurité est aujourd'hui dans la bouche de tous les politiciens et de toutes les politiciennes, mais un élément est toujours oublié : la sécurité sur la route. Où est votre cohérence, Messieurs les passionnés de la voiture puissante ? Je dois vous avouer que ma plus grande crainte était, quand mes enfants étaient petits, qu'ils se fassent écraser sur la route par un fou du volant... (Commentaires.)Monsieur Dupraz, écoutez-moi jusqu'à la fin, je n'ai pas fini mon raisonnement. Je ne vous ai d'ailleurs pas interrompu.

Or, plus une voiture est puissante, plus le danger qu'elle roule trop vite sans que le conducteur s'en rende compte est grand. (L'oratrice est interpellée.)Si, c'est vrai ! J'en ai moi-même fait l'expérience.

Le transport privé a transformé nos villes et nos campagnes. Il absorbe une part croissante de nos ressources vitales, notamment les énergies fossiles. Le projet de loi que les Verts avaient déposé à l'époque, et qui est à la base de la taxation actuelle des voitures, avait justement pour but de faire diminuer la consommation des énergies non renouvelables. En effet, plus une voiture est puissante, plus elle consomme cette énergie qui ne sera pas éternellement à disposition. Le groupe socialiste regrette donc qu'après la belle unanimité qui avait pu se former à l'époque cette loi soit mise à rude épreuve par le club des Porsche.

En commission, nous avons pu constater que les personnes ayant subi les hausses de taxation les plus importantes roulent dans des voitures de luxe, BMW, Bentley, Mercedes ou Porsche. Lors de la discussion au sujet de cette loi, le député Blanc avait d'ailleurs dit, avec raison... (Exclamations.)...que si l'on peut dépenser 100 000 F pour une voiture, on peut également assumer une augmentation de la taxe de quelques centaines de francs, pour contribuer au développement durable. (Applaudissements.)

Cette nouvelle loi avait été louée pour son caractère moderne et eurocompatible. Selon les discussions de l'époque, que j'ai d'ailleurs lues dans l'excellent rapport de Mme Blanchard-Queloz, la taxation selon les kilowatts va dans le sens d'un impôt écologique. Il y a un rapport entre la puissance d'une voiture et les dégâts qu'elle cause à l'environnement. A part les libéraux, tous les partis étaient unanimes à l'époque à propos de ce système. Les temps ont cependant changé et les radicaux - ce n'est pas la première fois - tournent malheureusement leur veste. (Exclamations.)

M. John Dupraz. Je n'ai pas de veste !

Mme Maria Roth-Bernasconi. Je ne savais pas que M. Dupraz représentait le parti radical à lui seul... Je ne parlais pas de vous, Monsieur Dupraz !

Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris, le groupe socialiste est extrêmement sceptique par rapport à ce projet de loi. Nous ne pensons pas que ces propositions vont dans le bon sens. Nous avons plutôt l'impression qu'elles font partie de tout le train de projets de lois destinés à diminuer les impôts et à favoriser les clients du parti libéral, c'est-à-dire les personnes aisées. Pour notre part, nous préférons de loin les propositions du conseiller d'Etat Cramer - peut-être pas forcément sur la traversée de la rade !- qui visent à favoriser les innovations techniques en exonérant d'impôt par exemple les véhicules qui ont moins d'impacts négatifs sur les humains et sur l'environnement. Nous préférons les mesures qui incitent les automobilistes à prendre conscience de l'influence de leurs comportements sur le bien-être de tout le monde.

Le président. Il va falloir conclure. Je vous ai déjà accordé quelques secondes de plus parce que vous avez été dérangée...

Mme Maria Roth-Bernasconi. Les mesures fiscales peuvent être incitatives, peuvent inciter les automobilistes à changer de moyen de déplacement et à être plus conscient de leur responsabilité par rapport aux générations futures. Un parlement responsable et tourné vers l'avenir doit principalement se préoccuper de ce genre de mesures.

Malgré toutes nos réticences, nous sommes prêts à discuter en commission pour examiner si effectivement des effets non voulus par la majorité de l'époque se font sentir aujourd'hui. Nous voulons également examiner si ces mesures prétéritent réellement les entreprises ou s'il s'agit uniquement d'un prétexte pour défendre une fois de plus les intérêts des riches. (Applaudissements.)

M. Pierre Kunz (R). Si j'ai bien compris, le procès du club des Porsche a déjà été fait, de même que le procès de la couleur des vestes radicales...

Je ne comprends pas pourquoi Mme Roth-Bernasconi veut envoyer ce projet en commission. J'aimerais simplement lui rappeler ce que M. Brunier disait tout à l'heure : quand une loi est mauvaise, il faut la changer. Nous nous sommes aperçus hier que quand une loi comme la LIPP est mauvaise, c'est souvent parce qu'elle est fondée sur des simulations ou des estimations incorrectes. C'est le cas de cette loi-ci, il faut donc l'envoyer en commission pour la changer. Mme Roth-Bernasconi est-elle d'accord ?

Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Il y a quelques semaines, nous déposions une interpellation urgente pour connaître les répercussions de la réforme de l'impôt auto, car nous avions effectivement l'impression que cette réforme avait conduit, dans certains cas, à des augmentations qui n'avaient pas été prévues dans les simulations. On nous avait alors donné quelques éléments de réponse, notamment en commission, mais il faut reconnaître qu'ils étaient insuffisants.

Le groupe démocrate-chrétien a eu à plusieurs reprises l'occasion de plaider pour une réforme fiscale de l'impôt auto dont l'incidence soit neutre. A ce sujet, il s'intéressera plus particulièrement aux répercussions du projet libéral sur les finances de l'Etat. Même si nous doutons de la neutralité de ce projet de loi, nous voyons cependant un intérêt à ce projet : celui de permettre un éclaircissement sur les effets financiers de la réforme de l'année dernière, notamment les répercussions sur l'imposition des voitures. Car, dans les quelques éléments de réponse qui nous ont été donnés, il était dit que le parc automobile avait considérablement augmenté, ce qui expliquait notamment l'augmentation des recettes. En fait, il apparaîtrait qu'il s'agit surtout d'une augmentation du nombre de deux-roues. C'est le nombre de deux-roues qui a explosé. Cette augmentation pourtant ne saurait expliquer à elle seule l'augmentation totale des recettes de l'impôt auto. Nous sommes donc d'accord avec le renvoi de cette loi en commission, afin de pouvoir examiner les répercussions de la réforme de l'année dernière. Cela étant, nous doutons de la neutralité du projet libéral, mais également des intentions du parti libéral.

M. Jean Spielmann (AdG). Je vais commencer par répondre à mes préopinants. Il me semble que moins M. Luscher connaît les problèmes, plus il est arrogant. Je voudrais vous dire, Monsieur Luscher, que vous trouvez les réponses à la plupart de vos questions dans le rapport de Mme Blanchard-Queloz, tant sur le plan technique que sur les questions de fond.

A propos du renvoi en commission proposé par M. Kunz, je voudrais dire qu'il est clair qu'une loi sur la taxe automobile doit effectivement avoir une certaine orientation et permettre de corriger ce qu'on appelle souvent les coûts externes du trafic. Il y a effectivement une série de mesures qui doivent être prises pour qu'on arrive à l'objectif qui devrait être naturellement accepté par tous, celui du pollueur-payeur. Chacun doit en effet, dans une société, assumer le coût et les répercussions sur les autres du mode de déplacement choisi.

Le fait qu'il y ait maintenant des problèmes techniques suite à la manière avec laquelle on a mis en adéquation la puissance et la cylindrée indique que la loi doit certainement être réexaminée. Nous sommes pour le renvoi en commission parce que nous considérons que ce projet de loi permettra tout à fait, et de manière pertinente, d'examiner la question de la taxation des véhicules de notre canton par rapport au niveau national. Nous pourrons ainsi harmoniser les différentes taxes de manière à ce que les pollueurs passent davantage à la caisse et qu'on puisse mieux, au moment de faire le choix d'une automobile et du mode de déplacement, connaître les conséquences que cela aura sur la partie de la population qui subit les nuisances.

Je crois qu'il est nécessaire de modifier cette loi sur le fond, d'adapter les tarifs et de les mettre en adéquation avec ceux des cantons voisins. Cela permettra de trouver des recettes substantielles pour notre canton qui en a besoin, mais surtout de mettre en place des dispositifs de réduction de la pollution et d'inciter les gens à choisir un mode de déplacement qui nuise moins aux autres.

Nous refuserons en revanche ce projet de loi tel qu'il est. Il ne repose en effet sur rien de sérieux, si ce n'est la volonté de dispenser les riches de payer ce qu'ils doivent payer. Ceux qui choisissent un mode de déplacement polluant doivent payer pour les pollutions qui résultent de leur choix. Par conséquent, nous proposerons en commission des modifications qui permettront à l'impôt auto d'être plus neutre: il ne faut pas que notre canton soit le seul à favoriser les automobilistes. Je crois que ce sont des modifications que chaque citoyen genevois comprendra.

M. David Hiler (Ve). Lorsque nous avions déposé notre projet de loi, nous avions prévu effectivement deux démarches. L'une était de corriger la manière de calculer la taxe, l'autre était de l'augmenter pour la remettre à niveau par rapport aux autres cantons suisses. Nous nous sommes contentés - dans le but de réunir une large majorité dans ce parlement - de baser la taxe sur un indicateur de puissance, le kilowatt, qui est incontesté. Lorsque nous avons pris cette décision en commission, à une très large majorité, nous avions un tableau. Celui-ci indiquait, à l'évidence, que beaucoup de gens allaient profiter de ce changement de barème et que d'autres allaient payer plus.

Vous admettez le système, Monsieur Luscher, et vous avez raison. Dans ce cas, vous admettez que le précédent était injuste. Nous avons donc corrigé le système et nous avons obtenu quelque chose de cohérent. Evidemment, vous avez utilisé des pourcentages pour montrer que certaines augmentations étaient insupportables. Mais l'augmentation de quelques centaines de francs que subissent certaines personnes est cependant à rapprocher, dans la plupart des cas, du prix d'achat du véhicule, en l'occurrence plusieurs dizaines de milliers de francs. On peut donc prétendre que les augmentations sont dramatiques quand on les exprime en valeurs relatives, mais ces augmentations ne dépassent pas quelques centaines de francs et si c'est le prix d'un système cohérent, il n'est pas trop élevé. Pour la majorité des gens, et on ne l'a pas assez dit, qui payaient trop pour des puissances faibles, il s'agit d'une amélioration. Ceci est bien, car il faut encourager les gens à avoir des voitures de faible puissance.

En outre, le million supplémentaire que produit la taxation est alloué au Conseil d'Etat et au service concerné afin de supprimer - ce qui me paraît incitatif - la taxe pour les véhicules les moins polluants. On prend donc d'un côté, mais on redonne de l'autre, de façon à mettre en place une politique incitative que vous ne pouvez pas désapprouver.

Evidemment, je comprends que vous avez une clientèle à satisfaire, mais, sur le fond, j'espère que la majorité de ce parlement en restera à un système qui est bon et qu'elle admettra, comme M. Blanc, qu'il y a toujours des mécontents et qu'ils se feront toujours plus entendre que les personnes satisfaites, surtout quand les mécontents ont un peu plus d'argent que les autres. C'est la démonstration du débat de ce jour. (Applaudissements.)

Le président. J'estime que M. Luscher a été pris à partie... (Exclamations.)Je lui accorde donc quelques minutes. (Protestations.)Je vous laisse une minute.

Une voix. C'est inadmissible !

M. Christian Luscher (L). Je voulais ajouter une chose. En réalité, ce n'est pas faire preuve d'arrogance que de dire que ceux pour qui le système... (Brouhaha.) ...est aujourd'hui le plus favorable... (Chahut. L'orateur est empêché de poursuivre.)

Il est vrai que certains supportent assez mal la contradiction dans ce parlement... (L'orateur est interpellé.)Cela ne vous a pas plu. C'est vrai que lorsqu'on tape où ça fait mal, il y a des réactions... (Chahut.)

Le président. Mesdames et Messieurs, dans ces conditions, je suspends la séance !

La séance est suspendue à 18 h 35.

La séance est reprise à 18 h 40.

Le président. Mesdames et Messieurs, veuillez regagner vos places. Je maintiens que M. Luscher a été pris à partie... (Protestations.)Oui, sinon je ne sais pas ce que ce mot veut dire ! D'entente avec M. Luscher, il ne reprendra pas la parole. Mais je demande quand même à tous les députés de mettre quelques formes lorsqu'ils parlent à leurs collègues... (Le président est interpellé.)J'ai assez de peine, Monsieur Grobet, à m'occuper de ce qui se passe au parlement sans m'occuper de ce qui se passe à l'extérieur... (Brouhaha.)

S'il vous plaît, c'est terminé, Mesdames et Messieurs ! Ce projet de loi est renvoyé à la commission fiscale. Nous interrompons nos travaux et nous les reprendrons à 20 h 15.

Le projet de loi 8700 est renvoyé à la commission fiscale.

La séance est levée à 18 h 40.