Séance du
jeudi 31 août 2000 à
17h
54e
législature -
3e
année -
9e
session -
39e
séance
No 39/VI
SEANCE EXTRAORDINAIRE
Jeudi 31 août 2000,
soir
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : Mme et MM. Carlo Lamprecht, Martine Brunschwig Graf, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
Le président. Je vous prie de rester debout.
Nous avons appris le décès de M. Jean Brülhart, ancien député, qui siégea sur les bancs du parti socialiste de 1973 à 1974 et de 1977 à 1980. Nous avons transmis nos condoléances à sa famille.
Pour honorer sa mémoire, je vous prie d'observer un instant de silence.
(L'assemblée, debout, observe un moment de silence.)
Je vous invite à vous asseoir.
Mesdames et Messieurs les députés, en ouvrant cette séance extraordinaire, je rappelle que notre Grand Conseil ne peut s'occuper que des objets pour lesquels il a été convoqué.
Je rappelle également que l'ensemble des objets à l'ordre du jour doivent être traités ce soir ou plus précisément lors de ces deux séances, cela en plein accord avec les chefs de groupe. Je vous remercie donc d'organiser la durée de vos interventions en conséquence.
Nous passons au point 2 de notre ordre du jour.
3. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme et MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, Gérard Ramseyer, Micheline Calmy-Rey, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Thomas Büchi, Régis de Battista, Hervé Dessimoz, Marie-Françoise de Tassigny, Jean-Pierre Gardiol, Alain-Dominique Mauris, Véronique Pürro, Jacques-Eric Richard et Charles Seydoux, députés.
4. Déclarations du Conseil d'Etat et communications.
Le président. Vous avez trouvé sur vos pupitres les amendements qui avaient été déposés lors des dernières séances des 22 et 23 juin. Il s'agit d'un récapitulatif qui vous permettra d'être plus à même de traiter les objets de ce soir en connaissance de cause. (Brouhaha.) (Le président agite la cloche.)
J'ai le plaisir de vous rappeler que notre traditionnelle sortie - notre course d'école - aura lieu dans le canton de Neuchâtel, le samedi 16 septembre, avec une escale à Auvernier et une visite des caves du château accompagnée d'un bon déjeuner. Nous prendrons ensuite le bateau jusqu'à Morat - pour voir si l'Arteplage tient toujours - où un car nous attendra. Nous serons de retour à Genève aux environs de 18 h 15.
Nous nous réjouissons tous de nous retrouver pour cette journée sympathique ! Je prie les personnes qui n'auraient pas encore pu s'inscrire de le faire au moyen des formulaires qui se trouvent à cet effet sur la table des rapporteurs. Vous pouvez aussi vous adresser à M. Thierry Brichet, qui prendra très volontiers votre inscription.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons reçu une lettre de notre collègue, M. Bénédict Fontanet qui nous communique sa décision de démissionner de ses fonctions de député, avec effet à l'issue de notre séance de 17 h.
Je vous prie, Madame la secrétaire, de donner lecture de ce courrier.
Annexe lettre de M. Fontanet
page 1
Le président. Il est pris acte de cette démission.
M. Bénédict Fontanet siège sur les bancs du parti démocrate-chrétien depuis 1985. Il assura la présidence de la commission judiciaire en 1993/94, celle de la commission fiscale en 1998/99, ainsi que la présidence de la commission du logement, en 1999.
Nous le remercions de son activité parlementaire tout au long de ces quinze années et lui souhaitons pleine réussite pour la suite de ses activités, qu'elles soient politiques, professionnelles ou encore familiales.
Mon cher ami Bénédict, je vais t'offrir le traditionnel stylo-souvenir. Mais, auparavant, je donne la parole à Mme Nelly Guichard.
Mme Nelly Guichard(PDC). Cher Bénédict, au nom des députés démocrates-chrétiens, je tiens à te remercier pour le travail remarquable que tu as accompli au sein de ce Grand Conseil. Beaucoup d'entre nous regrettent de voir partir un orateur hors pair et un député brillant dont les grandes compétences et les larges connaissances sont reconnues de tous.
Durant douze ans, tu as été un des meilleurs députés de ce parlement, un excellent chef de groupe, apprécié pour la qualité de son travail, sa disponibilité, son écoute des autres et aussi - et c'est une qualité précieuse - son humour.
Au cours des années, cependant, tes obligations professionnelles sont devenues de plus en plus lourdes. Ta charge de député s'en est ressentie. Tu as bien tenté, par l'intensité de tes interventions, de compenser tes absences qui augmentaient au fur et à mesure que croissait le nombre de séances plénières et des innombrables commissions.
Au début de l'été, tu as eu la sagesse de prendre une décision très difficile : renoncer pour le moment à cette charge politique.
Au nom du groupe démocrate-chrétien, je te dis merci pour le temps, l'énergie et les grandes compétences que tu as mises au service de ce canton. Nous te souhaitons beaucoup de satisfactions dans tes nombreuses activités et nous nous consolons en nous disant que ce n'est peut-être qu'un au revoir. (Applaudissements.)
(Le président remet le stylo-souvenir à M. Bénédict Fontanet et lui fait la bise.)
Mme Mireille Gossauer-Zurcher (S), rapporteuse. La commission des droits politiques s'est réunie hier pour examiner la compatibilité de M. Membrez. Conformément au règlement en vigueur, rien ne s'oppose à ce que M. Membrez siège parmi nous.
Liens d'intérêts :
Liste 1 DEMOCRATE CHRETIEN
______________________________________________
MONSIEUR MEMBREZ Etienne
Avocat
Retraité
Comité Suisse Tourisme
Fondation communale Collonge-Bellerive-Meinier
Président de la Fondation pour le cyclisme romand
Le président. Il est pris acte de ce rapport. Nous procéderons ce soir à 20 h 30 à la prestation de serment de M. Etienne Membrez, nouveau député remplaçant M. Bénédict Fontanet, député démissionnaire.
Annexe PL 7697-A tel qu'issu des précédents débats
page 2
Suite du troisième débat
Le président. Je vous prie, Messieurs les rapporteurs, de bien vouloir vous asseoir à la table des rapporteurs. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que M. Bernard Lescaze remplace le rapporteur de majorité, Mme Marie-Françoise de Tassigny. M. Jean-François Courvoisier est le rapporteur de minorité.
Je précise que lors de notre dernière séance du 23 juin, nous avons accepté deux amendements à ce projet de loi, que vous avez sur vos places. Toutefois, nous n'avons pas formellement voté respectivement chaque article et nous n'avons pas procédé au vote d'ensemble. En conséquence et conformément à l'article 134 de notre règlement, je procéderai au vote des différents articles de ce projet de loi en troisième débat.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. Monsieur le président, je déduis des phrases sibyllines que vous venez de prononcer qu'à votre avis les alinéas 1 et 2 de l'article 53 sont adoptés, mais que l'alinéa 3, nouveau, qui nous serait présenté par Mme de Haller pourrait être débattu maintenant.
Evidemment, je préférerais que Mme de Haller explique d'abord comment le mot «progressivement» correspond à une durée de deux ans, alors que j'avais moi-même dit qu'il ne s'agissait pas d'une durée de quinze ans mais plutôt de cinq ans. A la suite des explications données par Mme de Haller, je me permettrai de reprendre la parole, si telle est bien la procédure que vous envisagez.
M. Jean-François Courvoisier (S), rapporteur de minorité. Si l'exposé des motifs de ce projet de loi met en évidence les difficultés rencontrées par les élèves de culture générale à trouver des débouchés à la fin de leur scolarité obligatoire, je pense qu'il y a une autre raison toute aussi importante de voter ce projet de loi.
En effet, beaucoup de jeunes sont désespérés de ne pas trouver un emploi, mais, avec le développement des machines et de la technique, de moins en moins d'emplois pourront apporter une satisfaction à ceux qui auront la chance d'en trouver. La grande majorité des travailleurs ont en effet l'impression d'être des robots anonymes, comme l'illustre le film «Les temps modernes» de Charlie Chaplin.
Puisque notre distingué collègue, M. Michel Halpérin, s'est plu à citer Bernanos, je citerai aussi cet auteur que je connais bien et qui a écrit : «Une civilisation gagnée par la technique est perdue pour la liberté.» ! La seule manière de conserver cette liberté est de donner à tous nos enfants une instruction qui leur permettra d'accéder à la culture. Cette culture devrait permettre de connaître ce qu'il y a de plus noble et de plus beau dans l'histoire de l'humanité.
La grande Simone Weil - je ne parle pas de la ministre gaulliste, mais de l'auteur de «L'enracinement et de la condition ouvrière» - souhaitait que chaque enfant normalement doué puisse, à la fin de sa scolarité, lire une page de grec accompagnée d'une bonne juxtaposition, car pour elle cette langue était le summum de la beauté. Au sortir d'une journée de travail abrutissant, les jeunes qui auront la possibilité d'accéder à la culture - qui est celle de notre civilisation - courront moins le risque de devenir des cas sociaux, des délinquants ou des drogués. Dostoïevski écrivait : «Tout le monde dit que celui-ci boit, mais personne ne se demande pourquoi il boit.» C'est la première question que nous devrions nous poser au sujet des drogués avant de chercher des mesures de substitution et de répression. (Brouhaha.) (Le président agite la cloche.)
Il est évident que la 7e hétérogène ne doit être qu'un début rapidement réalisable et que le groupe socialiste soutiendra par la suite l'extension de l'hétérogénéité aux classes de 8e et 9e. Mais nous sommes conscients que cette extension demandera un grand nombre de classes et d'enseignants supplémentaires et que la 7e hétérogène représente déjà un réel progrès.
Si ce projet tient particulièrement à coeur du groupe socialiste, c'est parce qu'il correspond au voeu de la grande majorité des enseignants du cycle d'orientation. Par ce voeu, les enseignants ne demandent pas d'avantages matériels : augmentation de salaire ou diminution du travail. Ils ont seulement le louable désir d'assurer à chaque élève une instruction de qualité, nécessaire autant à son avenir professionnel qu'à son équilibre psychique.
C'est pourquoi nous espérons que, pour le bonheur de notre jeunesse, ce projet sera voté ce soir et appliqué aussi rapidement que possible.
D'après les renseignements que j'ai reçus à la commission de l'enseignement du parti socialiste, et qui émanent de l'étude d'une commission d'enseignants du cycle d'orientation, le coût supplémentaire lié au passage de classes à sections en classes hétérogènes en 7e année serait de 4 174 424 F, soit une variation de 3% par rapport à la situation actuelle. L'importante reprise économique annoncée par les milieux économiques doit nous permettre d'envisager des rentrées fiscales correspondantes qui devraient couvrir sans problème ces dépenses supplémentaires. D'autant plus que, comme je l'ai écrit dans mon rapport, une meilleure instruction pour tous diminuera la délinquance juvénile et permettra de sérieuses économies au département de justice et police et des transports, ce dont M. Ramseyer devrait se réjouir.
Mme Jeannine de Haller (AdG). Avant de parler d'amendements, je voudrais dire, au nom de l'Alliance de gauche, que je m'insurge contre le diktat du président du Grand Conseil de suspendre la séance, à la fin du mois de juin... (Exclamations.) ...suite aux provocations grossières de la droite, en opposition flagrante avec son rôle d'impartialité ! (Chahut.)
Une voix. T'occupe pas d'eux, t'occupe pas d'eux !
Le président. Madame, je vous en prie ! Mesdames et Messieurs les députés, s'il vous plaît ! (Le président agite la cloche.) J'aimerais que nous en restions aux objets que nous devons traiter ce soir ! Nous en avons beaucoup, alors essayez de vous y tenir ! Il sera difficile de nous entraîner ce soir dans des problèmes de procédure et autres discussions.
Madame, poursuivez s'il vous plaît !
Mme Jeannine de Haller. Je termine ce que je disais : le président, contrairement à ce qu'exige son rôle d'impartialité, a cédé aux pressions... (Exclamations.) ...de ceux qui ne veulent pas voir ce projet de loi aboutir ! (Chahut.)
Une voix. Présente ton amendement !
Une voix. Il n'a qu'à présider ! Arrête-toi ! Laisse-le présider !
Mme Jeannine de Haller. Bien ! Malgré ces tergiversations, ce débat a enfin lieu ce soir !
Enormément de choses ont déjà été dites lors des débats précédents. Toutefois, je voudrais encore une fois préciser les raisons qui nous font accepter ce projet de loi avec enthousiasme.
L'hétérogénéité en 7e du cycle d'orientation - on l'aura compris - maintient le mélange de tous les élèves, comme dans le primaire, quels que soient leur niveau scolaire et leurs difficultés d'apprentissage. L'hétérogénéité permet ainsi de retarder la sélection. Elle favorise une orientation progressive de chaque enfant par la prise en considération de ses voeux, de ses intérêts et de son développement, tout en encourageant la solidarité et la collaboration entre élèves, tout en évitant l'exclusion et la marginalisation de ceux qui ont plus de difficultés. Elle permet à tous d'avoir un accès égal au savoir et à une formation de base.
Actuellement, les élèves des sections générale et pratique sont lourdement pénalisés par rapport aux débouchés de formation professionnelle et de recherche d'apprentissage, à cause de la forte diminution du pourcentage d'élèves dans ces sections et de la perte d'homogénéité dans les autres sections.
Les conséquences sont la démotivation et la stigmatisation encore plus importantes des enfants, qui ont déjà une image passablement négative d'eux-mêmes et qui sont issus en majorité des couches socio-économiques les moins favorisées.
L'expérience réussie des trois cycles d'orientation pratiquant l'hétérogénéité depuis plus de vingt-cinq ans a suffisamment montré qu'il n'y a pas nivellement par le bas, comme le prétendent certaines et certains, puisque statistiquement aucune différence n'a été relevée jusqu'à présent dans les résultats des élèves issus de l'un ou l'autre système.
Au contraire, il semblerait même que ce soit le niveau des élèves en difficulté qui se trouve amélioré par le contact avec les autres enfants. Mais l'avantage incontesté des classes hétérogènes réside surtout dans le fait que ce système empêche de creuser les différences entre les catégories sociales, et, comme je viens de le dire, il empêche la stigmatisation, l'étiquette de «mauvais élève» et le sentiment d'être nul. Sans préjuger des résultats du rapport final du service de recherche en éducation quant à la position des enseignants de Bois-Caran - cycle en réforme II - il ressort déjà des rapports annuels 1999/2000 que plus de 90% des enseignants sont favorables aux classes hétérogènes ! Ce chiffre est d'autant plus significatif que la plupart d'entre eux connaissent vraiment bien l'hétérogénéité puisqu'ils la pratiquent et qu'ils ont souvent travaillé auparavant dans le système à sections.
Je voudrais également rectifier une affirmation réitérée et parfaitement fausse exprimée par la présidente du département... André Chavanne a dû renoncer à l'introduction de l'hétérogénéité non pas parce qu'aucun des résultats ne laissait à penser qu'elle apportait quelque chose de plus mais seulement pour pouvoir faire passer le projet de cycle d'orientation qui suscitait déjà en lui-même une forte opposition politique ! André Chavanne aurait tout à fait souhaité étendre cette réforme, mais il a dû sacrifier l'idée de tronc commun pour que le cycle d'orientation puisse exister.
La nécessité de modifier aujourd'hui les structures du cycle s'impose pour plusieurs raisons, liées entre autres aux changements introduits ces dernières années dans les écoles du post-obligatoire - nouvelle maturité sans section au collège, accroissement du nombre d'élèves prolongeant leur cursus scolaire dans un dixième degré - ou bien liées aux changements dans les écoles du primaire avec l'introduction dès la rentrée prochaine de l'innovation : la suppression des degrés et des notes.
Pour la cohérence du système scolaire genevois, il faut donc impérativement et urgemment supprimer les sections qui sont un obstacle à l'intégration de l'ensemble des élèves et se donner les moyens nécessaires à la réussite de cette réforme, entre autres par des effectifs de classes de dix-huit élèves au maximum.
A la rentrée scolaire de cette année, Mme Brunschwig Graf a imposé une nouvelle grille-horaire au cycle en faisant fi de la demande de moratoire des enseignants et des parents. Tous sont mécontents des décisions ressenties comme arbitraires et peu judicieuses, mais ils sont surtout très inquiets du contenu déséquilibré, élitaire et mal ficelé de cette réforme ! La demande de moratoire n'a bien sûr pas été entendue, puisqu'en introduisant aujourd'hui cette nouvelle grille-horaire, la cheffe du département voulait faire d'une pierre deux coups... Par le biais de sa réforme, elle favorisait une sélection accrue, tout en espérant retarder l'introduction de l'hétérogénéité !
En définitive, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons un choix purement politique à faire. Si notre but est de dégager une élite et de privilégier les élèves les plus forts, continuons à réaliser des classes de niveau fort pour une petite proportion de la population ! Si, au contraire, notre but consiste à élever le niveau des acquis moyens de l'ensemble d'une génération sans privilégier une catégorie d'élèves, choisissons le système hétérogène ! C'est ce que je vous propose de faire sans plus hésiter ! (Applaudissements.)
Mme Nelly Guichard (PDC). Je l'ai déjà dit dans cette enceinte, prendre une telle décision, sur la base d'un débat qui n'a rien à voir avec un travail de commission, ici en plénière est insensé et totalement irresponsable vis-à-vis du système scolaire qui doit être considéré non pas sur une seule année mais dans sa globalité ! C'est également irrespectueux des avis des personnes qui ont été consultées, les chercheurs du SRED, les enseignants, les parents d'élèves, tous les intervenants de l'école. Rien ne justifie une telle méthode de travail ! On ne joue pas avec la scolarité des jeunes, particulièrement des adolescents !
Se servir de la grille-horaire pour se donner bonne conscience comme d'un écran de fumée, c'est un peu facile ! La grille-horaire, précisément, peut se modifier à court terme, et on verra bien, au bout d'une année, quels sont ses effets pervers et si elle s'avère réellement élitiste. Il sera temps de vérifier vos hypothèses...
On peut lire, aujourd'hui même, dans un quotidien bien connu et plus lu sur les bancs de l'Alternative que dans les rangs de l'Entente, je cite : «Il devrait être plus facile d'être promu au cycle d'orientation - sous-entendu, donc, avec la nouvelle grille-horaire - car des simulations montrent que les normes de promotion au cycle ont été allégées si l'introduction de l'anglais en 7e le permet.» On peut également lire un peu plus bas : «Avec cet allégement des normes, un cycle comme celui des Marais - cycle qui est loin d'être un cycle favorisé - aurait à gagner avec les nouvelles normes qui ont été fixées.» Quoi qu'il en soit, ce dont je suis certaine, c'est qu'André Chavanne à qui vous vous référez constamment n'aurait jamais cautionné un tel procédé, une manière aussi inique de travailler !
Vous nous avez reproché de ne pas être entrés en matière... Je vous rappelle que nous étions en mars. Si nous l'avions fait à ce moment-là, les travaux seraient de toute manière déjà terminés depuis belle lurette et le rapport serait devant ce Grand Conseil sans que nous ayons en main tous les éléments pour nous déterminer. Et je vous rappelle que je vous avais demandé en commission de reporter le traitement de cet épineux problème à la fin de l'année, afin, justement, de pouvoir nous prononcer en connaissance de cause. L'Alternative a refusé ma proposition, et je le déplore !
Et pour mémoire, je voudrais citer un exemple. Je rappelle aux députés qui étaient présents lors de la dernière législature que nous avons trouvé un terrain consensuel pour élaborer, certes longuement et laborieusement, une loi sur la culture approuvée par une large majorité, alors qu'elle avait auparavant fait l'objet de discussions très difficiles et très partisanes. Si je prends cet exemple, c'est pour souligner que sur des sujets complexes, pédagogiquement délicats et politiquement difficiles, il faut laisser le temps aux discussions et même aux disputes d'avoir lieu. Mais cette enceinte n'est certainement pas le lieu pour effectuer ce travail de fond et de réflexion qui doit se faire par un long mûrissement et en commission bien évidemment.
Alors que certains cantons renoncent à l'hétérogénéité dans les classes, nous serions à l'exception du Tessin le seul canton de Suisse à introduire ce système en nous moquant, une fois de plus, de la coordination intercantonale pourtant réclamée à cor et à cri par les parents depuis des lustres ! Et pourtant, vous vous réclamez souvent de l'avis des parents... Quand ça vous chante vous en tenez compte, mais aujourd'hui vous n'en avez rien à faire ! Vous dites que les enseignants y sont favorables à 90%... Dans les cycles en rénovation, c'est normal, évidemment ! Ceux qui n'y sont pas favorables travailleraient dans d'autres cycles...
Puisque nous n'avons pas le résultat de l'étude, nous ne savons donc pas du tout quel est le taux d'enseignants qui est favorable ou pas à la 7e hétérogène ! La moindre des courtoisies voudrait qu'on tienne non seulement compte des réponses des chercheurs et de leurs travaux mais aussi et surtout de toutes les personnes interrogées avant de prendre une quelconque décision ! Au mépris des personnes interrogées s'ajoute encore le gaspillage des deniers publics pour une étude inutile et, de surcroît, on ne sait même pas si la formation des maîtres est en adéquation avec de pareils changements !
L'égalité des chances et le souci d'éviter de discriminer et de démotiver des élèves en les cataloguant inutilement préoccupent aussi les démocrates-chrétiens, mais on ne joue pas avec l'avenir des jeunes par dogmatisme politique et sur des impressions ou des idéaux égalitaristes.
L'évolution du cycle d'orientation est en discussion depuis des années. Une décision qui permette de tenir compte de tous les paramètres pouvait parfaitement attendre le début de l'année prochaine ! (Applaudissements et bravos.)
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. Je vous le précise, je remplace pour la seconde fois Mme de Tassigny atteinte dans sa santé.
Je regrette que Mme de Haller n'ait pas lu l'intéressant récit de M. Marc Nicole, ancien directeur général du cycle d'orientation, qui consacre plusieurs chapitres aux réformes perpétuelles du cycle d'orientation, auquel j'avais fait allusion lors du précédent débat, au mois de juin. Elle en aurait peut-être tiré quelques réflexions ! Je lui rappelle que nous ne savons en réalité toujours pas exactement de quelle hétérogénéité il s'agit d'après le projet de loi, puisque trois cycles d'orientation pratiquent, certes, l'hétérogénéité depuis vingt-cinq ans mais avec certaines différences et certaines particularités. Et nous ne savons toujours pas quel est le système qui serait choisi : il pourrait y avoir dix-sept pratiques différentes, ce qui serait tout de même un véritable problème.
Je constate qu'il y a vingt-cinq ans que l'on parle de la réforme du cycle qui a bientôt quarante ans : les choses avancent extrêmement lentement et c'est - Ô mystère ! Ô stupeur ! - au moment même où, pour la première fois depuis vingt ans, une réforme se met en place - celle de la nouvelle grille-horaire, mais en réalité celle de la suppression des sections et de l'insertion de niveaux différents - que tout d'un coup - est-ce pour mieux saboter cette première réforme ? - on veut aller plus vite et plus avant dans une autre réforme. Je dis bien plus vite et plus avant, parce que vous nous parlez de résultats, mais sans pouvoir les mettre sur la table, puisque vous avez refusé d'attendre le rapport !
Je suis au moins sur un point d'accord avec vous : quand on connaît les effectifs du service de la recherche en éducation, quand on connaît l'importance de ce problème, on ne peut être que mécontent - même sur nos bancs, moi en particulier - de voir que ce service nous annonce son rapport pour la fin de l'année seulement. C'eût été peut-être l'occasion de mettre les bouchées doubles, car il est vrai que nous aussi, comme vous, nous sommes démunis d'arguments chiffrés, concrets. Il est probable qu'effectivement les cycles hétérogènes sont un petit peu plus chers, mais quant à savoir s'ils réussissent un petit mieux - ou un petit peu moins bien, comme on nous l'a dit aussi - j'aimerais bien avoir des statistiques à ce sujet pour pouvoir prendre une décision en connaissance de cause. Je suis vraiment désolé de ne pas disposer des résultats de cette enquête menée sur une période de vingt ans. Vous n'avez donc pas le droit d'avoir des a priori et de faire des déclarations péremptoires : c'est comme ci ou comme ça ! Moi, je m'en garde bien, parce que je constate que je ne connais pas les résultats, et je le regrette vivement - je le répète - car cela serait véritablement intéressant !
Je remarque un certain nombre de phénomènes qui devraient faire réfléchir aussi bien les parents d'élèves que les enseignants. Nous pensons tous ici - du moins je l'imagine - que c'est l'intérêt de l'élève qui doit être au centre de nos préoccupations.
Or je constate que les écoles privées, notamment à la fin des niveaux primaires et au début du secondaire, n'ont jamais eu autant de succès, au point que plusieurs d'entre elles ont dû refuser des élèves pour la rentrée. Alors, j'aimerais savoir la raison de ce phénomène curieux ? Et pourquoi cela se passe en même temps ? Cela correspondrait-il à une certaine inquiétude des parents qui ont les moyens de mettre leurs enfants dans des écoles privées, alors qu'auparavant ils les laissaient dans des écoles publiques ? Pourtant, je le rappelle, l'école publique genevoise est certainement une des meilleures au monde : du cousu main, du sur mesure, et nous espérons bien que nous pourrons la conserver ainsi, alors que dans de nombreux autres pays voisins c'est véritablement de la confection de masse. Mais, tout d'un coup - ce sont des renseignements très précis que l'on m'a donnés - il y a un afflux d'élèves dans certaines écoles privées. C'est tout de même inquiétant !
Autre phénomène. On a pu voir au moment de la réforme - que j'approuve personnellement, contrairement à d'autres dans cette enceinte - consistant à supprimer les notes à l'école primaire, que beaucoup de parents d'élèves y étaient défavorables, parfois même de petits élèves de l'école primaire. Les parents sont en effet souvent relativement conservateurs en matière de réformes pédagogiques. Mais Mme de Haller sera certainement d'accord avec moi sur le fait qu'on ne met pas des notes pour les parents. En conséquence, le nouveau système d'appréciation mérite d'être défendu.
Si j'ouvre cette petite parenthèse, c'est pour vous dire qu'en réalité je ne suis pas du tout certain, comme vous, que la majorité des enseignants du cycle d'orientation - je ne parle pas de ceux des trois collèges de Bois-Caran, de Coudrier et de Budé - soient si favorables que cela à cette réforme. D'ailleurs, il y a un signe qui ne trompe pas : vous n'en êtes pas non plus vous-mêmes convaincus !
En effet, si vous l'aviez été, dans le fameux - comment l'appelez-vous déjà ? - comité de suivi que vous nous préparez, en bons démocrates, vous auriez prévu des représentants élus par l'ensemble des enseignants de chaque cycle. Mais, non, vous ne prévoyez que des représentants syndicaux désignés - on le sait bien - par des procédures beaucoup plus complexes et beaucoup plus opaques, même si vous prévoyez aussi des députés ! (Exclamations.) Beaucoup plus complexes et beaucoup plus opaques, parfaitement ! Les représentants des syndicats font aussi de la politique, et ils savent bien comment cela se passe !
Alors - j'insiste - si vous étiez sûrs de votre affaire, vous auriez proposé que chaque collège ait un représentant - un enseignant du collège - au comité de suivi. Permettez-moi de penser, alors que dans d'autres cas vous prônez la démocratie de quartier, que si vous ne proposez pas la démocratie de collège c'est que vous avez vos raisons. Et vous avez vos raisons, parce que vous savez très bien que ce n'est pas nous qui allons le proposer, tout simplement parce que nous n'y croyons pas et parce que nous pensons que, dans certains cas, les réformes pédagogiques, après avoir été mûrement réfléchies, mûrement pensées, doivent pouvoir être établies sans qu'il y ait forcément vote démocratique de telle ou telle personne.
Personne ici ne songerait à prendre autrement l'avis des parents que d'une manière consultative, sinon on n'en serait encore probablement à l'école du XIXe ! Vous le savez très bien et nous sommes tout à fait d'accord avec ce point de vue : les réformes pédagogiques doivent d'abord venir de l'institution et - il faut être clairs - l'école genevoise réfléchit sur le sujet. C'est pourquoi le Grand Conseil, qui fait partie des institutions a aussi son mot à dire dans cette affaire. Mais, en réalité, vous refusez aux maîtres la possibilité de se prononcer.
J'ai dit que cette réforme devait être introduite progressivement et j'ai même précisé et expliqué que cela devait s'étaler sur un laps de temps raisonnable, soit trois à cinq ans et non quinze comme cela a été le cas dans le passé. Dans certains cycles, elle pourrait être appliquée dans le délai que vous préconisez, soit un ou deux ans.
Vous le savez très bien, la situation démographique - si je puis dire ainsi - des enseignants, c'est-à-dire leur âge moyen, fait qu'un certain nombre d'entre eux ne sont qu'à quelques années du PLEND ou de la retraite, et il est en effet très probable que ces enseignants ne souhaitent pas modifier la manière dont ils enseignent d'ailleurs à satisfaction depuis des années. (Exclamations.) Dans ces conditions, il fallait leur permettre de s'adapter et à l'école de s'adapter avec qu'eux. Je ne crois en effet vraiment pas que nous pourrons imposer des réformes à tous les enseignants. Nous devons tout de même être clairs : vous ne pourrez pas faire des réformes aussi fondamentales que celles que vous voulez introduire sans l'appui d'une majorité d'enseignants - et je prétends que vous ne l'avez pas aujourd'hui - et sans l'accord au moins tacite des parents, du moins ceux qui comprendront le système qui est malgré tout assez compliqué.
Dans ces conditions, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que l'amendement déposé par Mme de Haller, est en réalité une pure manoeuvre politicienne pour empêcher que cette mesure ne soit appliquée progressivement de manière raisonnable, mais cette manoeuvre va à l'encontre de l'intérêt des élèves et du cycle d'orientation. La disposition transitoire sur le comité de suivi devra également être fondamentalement modifiée.
Madame de Haller, je vous rends d'ailleurs attentive au fait que pour toute personne normalement constituée et qui parle le français, la durée de deux ans qui serait le laps de temps couvert par le mot «progressivement» est évidemment une contradiction parfaite avec cet amendement qui est clair et qui a été voté en troisième débat. Il y aurait évidemment sur ce point également des possibilités juridiques de casser un délai aussi court. En effet, c'est un moyen que vous essayez d'utiliser pour faire un quatrième débat, ce qui n'est pas admissible. Mais ce n'est probablement pas vous qui le voulez : c'est le dogmatisme de ceux qui veulent absolument imposer à toute allure les classes hétérogènes.
Je remarque la chose suivante : c'est qu'en réalité personne n'a déclaré dans cette enceinte, sur les bancs de l'Entente, que le système de Bois-Caran, des Coudriers ou de Budé, était mauvais. Personne n'a dit qu'il fallait l'abolir ! Nous avons simplement dit qu'avant de l'étendre aux quatorze autres cycles - cela fera quinze, avec Montbrillant - il fallait véritablement avoir un bilan, ce que vous ne manquez pourtant pas de demander à beaucoup d'occasions. Puisque le public se trouve ici pour vous applaudir et me maudire... (Applaudissements à la tribune.) ...puisque le public manifeste sans que le Bureau réagisse, je dis ici clairement que vous refusez des rapports et des études lorsqu'il s'agit de l'enseignement, alors que vous ne cessez de les réclamer lorsqu'il s'agit du système de santé ! En conséquence, vous n'êtes pas crédibles et vous n'êtes pas fiables lorsque vous réclamez de tels renseignements. De toute façon, quels que soient les résultats qui seront indiqués dans ces rapports, vous ne les suivrez pas s'ils vont à l'encontre de vos idées !
Je persiste donc à dire que M. Segond avait raison de faire ces réformes sanitaires, que vous avez essayé de lui mettre des bâtons dans les roues en demandant des rapports, et que, tout à coup, vous utilisez la tactique inverse pour essayer de saboter les réformes que le département de l'instruction publique veut introduire. (Applaudissements.)
Mme Janine Hagmann (L). Je vois que nous refaisons un débat général pour la troisième fois, mais, comme l'a dit mon préopinant, le débat de ce soir a lieu devant un public relativement nombreux...
Je fais deux remarques. Premièrement, il y a deux jours, un journal titrait : «Le cycle est à deux jours de sa plus grande réforme.» Ne trouvez-vous pas, Mesdames et Messieurs les députés, irresponsable de décider une si grande réforme du cycle en discussion immédiate, comme cela, sans avoir l'avis des partenaires ? (Brouhaha.) C'est invraisemblable !
D'autre part, les enseignants qui se sont mobilisés ce soir - on les félicite tous - montrent leur intérêt pour la profession qu'ils exercent, mais ils m'étonnent tout de même un peu... En effet, qu'ont-ils fait pour nous pousser à étudier ce dossier depuis vingt et un ans que les trois cycles avec des classes hétérogènes existent ? Y a-t-il eu une pétition à ce sujet ? Moi, je n'ai jamais entendu parler de rien ! Qui a pleuré la sélection déplacée en 6e année primaire ? Ce sont les maîtres primaires, parce que c'est à eux qu'incombe cette tâche ! Mais, à mon avis - et je connais un peu la situation - les maîtres du cycle sont tout à fait heureux d'avoir des sections et de ne pas avoir les tâches qui sont sur les épaules des maîtres du primaire !
Je l'ai déjà dit, mais, puisque le débat est à nouveau général, je le redis - et vous m'en voyez navrée - je trouve totalement aberrant de modifier une structure scolaire sans avoir défini au préalable les buts pédagogiques que l'on veut obtenir ! Le débat qui s'est instauré prend exactement le chemin inverse : vous voulez généraliser une structure nouvelle pour la majorité des collèges sans vous soucier des fondements pédagogiques qui devraient la sous-tendre ni vous préoccuper de l'adéquation de la formation du corps enseignant à une réforme importante qui n'a pas été préparée sur le terrain !
Pourquoi, au lieu de légiférer, ne pas laisser aux partenaires de l'école le soin de mener à bien des expériences voulues, préparées, pilotées et évaluées, à l'instar de la rénovation de l'enseignement de l'école primaire, qui, pour l'instant, est une réussite ? (Rires.) Certains collèges se penchent d'ailleurs déjà sur la question, et, comme le collège de la Gradelle, ont mis en place des expériences intéressantes.
Les buts de l'instruction publique sont définis dans la loi sur l'instruction publique. Il est habituel de citer l'article 4 qui parle d'égalité des chances, mais en oubliant souvent qu'il insiste aussi sur l'acquisition des savoirs. La scolarité, en particulier dans sa période obligatoire, ne peut certes se contenter d'enseigner des savoirs ou des savoirs-faire, mais se doit de penser aux savoirs-être. Chacun des dix-sept cycles a une spécificité, une identité, une culture propre à son établissement. Chacun essaye d'offrir la meilleure formation possible aux adolescents qui lui sont confiés. A quel moment faut-il opérer une sélection ? Il est vrai que cette question est à nouveau d'actualité ! Quoi qu'il en soit, le fait de déplacer purement et simplement l'orientation de la fin de la 6e primaire à celle de la 7e paraît être une solution pour le moins simpliste et vraisemblablement peu efficace. Généraliser une 7e hétérogène sans introduction progressive, sans - et j'insiste sur ce point - formation adéquate des enseignants et, surtout, sans l'avis et la motivation des personnes concernées et des spécialistes, apparaît comme une décision reposant davantage sur des considérations purement politiques que fondée sur de véritables préoccupations pédagogiques.
C'est pour cela, comme vous l'avez compris, que le groupe libéral refusera ces amendements et le projet de loi dans sa globalité.
M. Charles Beer (S), rapporteur de majorité. Je suppose que le rapporteur de majorité a commis une petite erreur lorsqu'il a parlé de la complexité des élections et de la démocratie syndicale... Sans doute pensait-il aux prochaines assemblées du parti radical pour désigner le prochain conseiller d'Etat qu'il a lui-même d'ores et déjà qualifié de «bal des médiocres», sauf erreur de ma part ! (Rires.)
Plus sérieusement, je reviens au sujet qui nous occupe. Il convient de dire, puisque M. Chavanne a beaucoup été cité, notamment par vous, Madame Guichard, que, malheureusement, la droite ne reconnaît les qualités des hommes et des femmes de gauche au pouvoir que lorsque ceux-ci sont décédés depuis longtemps ! Il en va ainsi de la réforme du cycle d'orientation qui a quand même été, il faut le rappeler, drôlement combattue par une bonne partie de la droite du parlement. (L'orateur est interpellé par M. Lescaze.) Une bonne partie, mais pas la totalité... Effectivement, Monsieur Lescaze, il faut le préciser !
Alors, Madame Guichard, appeler M. Chavanne à votre secours pour étayer votre argumentation m'étonne quelque peu ! Pour ma part, je resterai plus modeste : je me contenterai de dire que la démarche de la gauche aujourd'hui vise à généraliser de façon pragmatique, pour les 7e années, une expérience que M. Chavanne a lancée, il y a déjà plus de vingt-cinq ans, sauf erreur, dans trois cycles d'orientation. Pour le reste, laissons la volonté projective, ou hypothétique, ou phantasmatique, de nos anciens là où elle est, mais ne la mêlons pas à nos débats !
Je reviens sur le fond même de la discussion sur la 7e hétérogène qui est un passage extrêmement pragmatique, parce qu'il s'agit d'une généralisation d'une réforme pédagogique, dans un contexte où l'enseignement, vous le savez bien, est plus qu'en réforme : il est en chamboulement. Après l'école primaire, après le collège, après, il faut le dire, des débats et des réorganisations qui tardent sur le 10e degré, force est de constater que personne ne considère dans cette salle qu'une sélection puisse être sérieusement envisagée à l'âge de 12 ans !
J'en veux tout simplement pour preuve le fait que les représentants du marché du travail - et la droite est en général sensible à un certain nombre d'arguments des représentants du marché du travail - n'acceptent plus de prendre des apprentis de 15 ans. Il faut donc attendre 16, 17 ou 18 ans pour entrer dans la vie active, parce qu'il n'y a pas preneur d'apprentis de 15 ans ! Cela veut dire que la sélection aujourd'hui a dans les faits bel et bien lieu en 8e en 9e et dans un 10e degré extrêmement mal organisé qui a une fâcheuse tendance à ressembler à Beyrouth sous les bombes...
Si nous voulons généraliser la 7e, il faut bien dire que pour ce qui est de la 8e et de la 9e nous devons encore étudier la chose, et c'est là que le rapport du SRED a tout son sens. Nous avons eu la première partie du rapport qui nous indique un certain nombre de tendances générales, qui effectue une analyse davantage axée sur l'aspect pédagogique que sur l'expérience elle-même, et nous attendons la deuxième partie avec impatience, précisément, pour voir les résultats - et vous savez pourtant à quel point notre conviction est ferme - avant de généraliser cette réforme pédagogique aux 8e en 9e degrés. Mais pour ce qui est de la 7e, il s'agit d'une question d'âge ; c'est une simple question d'adaptation à l'évolution du système scolaire.
On nous reproche de faire la discussion immédiate... Excusez-moi de le préciser, mais cela fait bientôt quatre mois que dure cette discussion immédiate ! Alors, avec une telle approximation de langage, vous nous autoriserez à voter, aujourd'hui peut-être, une mesure applicable sur deux ans.
Parlons maintenant du contexte ! Il faut le redire, ce débat a été mal engagé en raison du contexte. Ce projet, qui a été déposé il y a trois ans, intervient un peu à la hâte, en raison de la nouvelle grille-horaire qui a été introduite. Nous n'allons pas y revenir, car nous avons déjà largement eu l'occasion de parler du désordre occasionné par cette grille. Il a donc fallu mettre les bouchées doubles pour s'opposer à la démarche technocratique, à la démarche de la rapidité et du coup de force - je parle de coup de force, car il faut bien constater que la base légale sur laquelle repose la nouvelle grille-horaire, c'est-à-dire le règlement, n'est pas adaptée à cette nouvelle grille. C'est dire que même le Conseil d'Etat a été pris de vitesse et qu'il n'a pas adapté le règlement de la loi sur l'instruction publique à cette nouvelle grille-horaire !
Alors, oui, nous préférons la généralisation d'une réforme pédagogique engagée il y a plus de vingt-cinq ans pour la seule 7e année et nous préférons le débat politique qui rétablit la pédagogie à la technocratie, qui ressemble à la culture de la tomate hors sol... On peut malheureusement imaginer qu'elle a quelques connotations transgéniques ! (Applaudissements.)
M. Jean-François Courvoisier (S), rapporteur de minorité. Mme Guichard parle abondamment de la grille-horaire, ce qui n'est pas à l'ordre du jour, puisque Mme la présidente du département de l'instruction publique nous a dit que la 7e hétérogène ne changerait rien du tout à cette grille-horaire. Nous devons donc nous prononcer uniquement sur la 7e hétérogène !
Par ailleurs, M. Lescaze a dit que nous n'avions pas de résultats... Pourtant, je lis dans le rapport intermédiaire : «Quant aux résultats des élèves, il apparaît que la 7e hétérogène offre plus de stimulation pour les élèves moyens et faibles sans pour autant handicaper les bons élèves. Les collèges à sections favorisent par contre les bons élèves, mais font obstacle à une meilleure intégration sociale de l'ensemble des élèves qui permet de mieux réaliser la structure à niveaux et à options.» Enfin, en ce qui concerne l'origine sociale, les chercheurs relèvent que : «Le système réformé n'atténue guère l'influence du niveau social sur la réussite et l'orientation des élèves, notamment parce qu'il maintient une différenciation extrême en niveaux et options.» Il est donc tout à fait clair que les élèves faibles et moyens sont favorisés par les classes hétérogènes et que cela n'a aucune conséquence négative pour les bons élèves.
C'est pour une raison sociale que nous voulons absolument établir cette 7e hétérogène, et nous verrons ensuite comment faire pour la 8e et la 9e, lorsque nous aurons le nombre d'enseignants et de locaux suffisants.
M. Christian Brunier (S). La droite nous engage à ne pas céder à l'empressement... La droite nous dit qu'en matière d'enseignement nous ne devons pas céder au dogmatisme... Eh bien, je suis d'accord avec elle ! Le problème, c'est que l'empressement aujourd'hui n'est pas dans notre camp.
Mon fils a malheureusement la malchance de débuter le cycle d'orientation cette année et, donc, d'être un cobaye de la nouvelle grille-horaire. J'ai vu, Mesdames et Messieurs les députés, de nombreux professeurs complètement déstabilisés, qui ne comprennent pas la réforme, qui n'en comprennent pas les buts, qui ne comprennent pas ce qu'ils doivent faire... Au point même qu'une enseignante, avec qui j'ai eu l'honneur de déjeuner dimanche à midi, me disait qu'elle avait une réunion lundi matin, jour de la rentrée, durant laquelle le directeur de son collège devait présenter la réforme ! S'il y a empressement, c'est donc bien du côté du département de l'instruction publique, ce n'est en tout cas pas du côté de la majorité parlementaire !
La droite dit également - deuxième message - que nous refusons d'attendre l'étude du SRED... Mesdames et Messieurs les députés, je ne sais pas si vous avez pris connaissance du planning qui a été fixé à ce service pour faire l'étude, mais le délai imparti est tel qu'il ressemble fort à un conseil très clair de traîner les pieds ! Cela ne constitue pas une organisation convenable du travail ! De plus, des gens éminents du SRED ont fait des déclarations très nettes. Par exemple, M. Norberto Bottani, directeur du SRED, a déclaré il y a quelques jours aux médias, je cite : «En résumant, on peut dire que les classes hétérogènes ne péjorent en rien l'avancement et les acquis des élèves doués ; en revanche, ceux-ci tirent les autres vers le haut.» Il ne faut pas nier aujourd'hui l'avis de cet homme expert, qui est souvent écouté ! Le rapport intermédiaire du SRED va d'ailleurs dans ce sens.
Autre scoop de la soirée : la droite nous dit qu'un sondage est effectué auprès des enseignants du cycle et que nous devons tenir compte de l'avis des enseignants... Je suis vraiment ravi d'entendre cela, mais alors, on devrait tenir compte de leur avis sur toutes les réformes de l'enseignement ! Jusqu'à présent, Mme Brunschwig Graf - ni son département - n'a pas souvent tenu compte de l'avis des professeurs. Je suis prêt, en ce qui me concerne, à en tenir compte, mais à propos de toutes les réformes. A mon avis, si on en avait tenu compte, beaucoup de réformes, qui ont été menées au département de l'instruction publique ces dernières années, n'auraient jamais abouti, car les professeurs, que ce soit dans le primaire, au collège ou au cycle, n'en voulaient tout simplement pas ! (Applaudissements.)
Le président. S'il vous plaît ! Les personnes à la tribune ne sont pas autorisées à manifester. Je vous remercie. Monsieur Brunier, continuez !
M. Christian Brunier. Pour finir, je rappelle que la 7e hétérogène permet de reculer l'âge de la sélection scolaire. Et vous comprendriez vite l'urgence de reculer cet âge de sélection, si vous rencontriez des enfants de 11/12 ans. Cette 7e hétérogène permet aussi de désynchroniser psychologiquement le passage au cycle - il me semble que c'est une chose très importante pour les enfants - qui est une étape importante de la sélection. Et puis, finalement, puisque nous avons d'un côté une école primaire hétérogène et de l'autre côté du cycle, un collège à options, il paraît normal de travailler sur un cycle hétérogène et à options, et c'est dans ce sens que nous voulons agir aujourd'hui ! Il n'y a à mon avis pas d'empressement : il y a juste une volonté d'agir pour le bien des enfants de ce canton !
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Je n'ai pas l'intention de rallonger ce débat qui, si ma mémoire est bonne, a déjà eu lieu à plusieurs reprises...
J'aimerais tout de même répondre à propos du manque de consultation des professeurs. Je rappelle que les parents et les professeurs n'ont pas été consultés pour mettre en place la nouvelle grille-horaire. C'est maintenant que nous l'expérimentons et, d'après ce que j'ai pu constater par ma propre expérience, elle pose quand même un certain nombre de problèmes qu'il faudra réexaminer lorsque la 7e hétérogène sera mise en action. Je signale à Mme Brunschwig Graf que les élèves trouvent difficile de commencer trois langues à la fois. Je le dis, car bien que cette nouvelle grille-horaire soit en place, il faudra réfléchir à cet élément, mais aussi au nombre des matières et à leur répartition, lors de l'introduction de la 7e hétérogène.
Je comprends bien l'inquiétude de certains parents et de certains enseignants vis-à-vis de la 7e hétérogène, et il ne faut pas nier cette inquiétude. Ils craignent une baisse du niveau des élèves dans certaines matières, dont ils se plaignent d'ores et déjà. Il semble en effet que l'on peut constater une certaine baisse de niveau en orthographe, en expression orale ou écrite et dans certaines autres matières, et certains parents pensent que l'introduction de la 7e hétérogène va encore accentuer cette baisse de niveau.
Il me semble que nous pouvons leur répondre que l'expérience des cycles en réforme II doit être prise en considération et peut être rassurante à cet égard, puisque l'on a vu que le niveau des élèves qui sortent des cycles en réforme II n'est pas plus bas que celui des élèves qui sortent des cycles en réforme I. Les enseignants l'ont dit maintes fois, et les premières études que nous avons le confirment également, mais il faudra naturellement encore consulter l'étude finale.
Pour rassurer les personnes inquiètes, j'aimerais dire aussi que cette réforme devra bien évidemment être mise en place de manière réfléchie, raisonnable, c'est-à-dire en tenant compte d'un effectif réduit des élèves par classe. Pour ma part, je considère que c'est important. En effet, les choses seront sans doute plus difficiles qu'avant et probablement impossibles pour les enseignants qui devront tout d'un coup gérer des classes hétérogènes avec vingt-cinq élèves par classe. Le nombre maximum d'élèves par classe est un élément dont nous devrons nous préoccuper au sein du parlement, même si cela ne peut pas se faire dans le cadre d'une loi. C'est probablement à l'occasion du budget que nous pourrons fixer ce nombre.
Autre élément dont nous devrons tenir compte : la commission de l'enseignement est saisie du projet de loi des Verts et de Mme de Haller concernant les 8e et 9e années du cycle, et à l'occasion de ce projet de loi nous allons bien sûr reparler de ces différentes réformes. Cela sera fait, je l'espère, dans le courant de l'automne et de l'hiver. Nous étudierons à nouveau entièrement la question et la meilleure manière de procéder pour que cette réforme soit un plus et ne constitue pas une baisse du niveau de connaissance des élèves.
M. Pierre Vanek (AdG). Je serai bref, Monsieur le président, et je ferai gagner du temps à cette assemblée. Tout ce qui devait être dit l'a été, il faut maintenant que chacun prenne ses responsabilités et que nous votions ce projet.
Dans ce sens, je n'interviendrai que pour dire que l'amendement proposé par Mme Jeannine de Haller dans le feu de notre débat précédent et que vous avez dans le dossier est retiré. Il est remplacé par un autre amendement, qui a été déposé ce soir et qui vous a été distribué. Il est signé par moi-même mais aussi par Mme Caroline Dallèves et par M. Charles Beer : les trois partis de l'Alternative sont donc signataires de cet amendement. Il a la même teneur que celui qui avait été déposé par Mme de Haller, mais il prévoit une entrée en vigueur de cette réforme progressivement sur deux ans.
M. Lescaze a évoqué cet amendement tout à l'heure en le qualifiant de «manoeuvre politicienne». Il ne s'agit pas d'une manoeuvre, mais d'une volonté politique qui se manifeste clairement. Celles et ceux qui appuient cette volonté politique voteront donc cet amendement.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. On fait dire beaucoup de choses aux textes, aux hommes, surtout lorsqu'ils sont disparus.
Je vais d'abord simplement - il ne m'appartient pas de donner des cours d'histoire à M. Charles Beer - rappeler que M. André Chavanne a été élu en novembre 1961. Le cycle d'orientation a été inauguré - dans son système - en septembre 62, soit huit mois plus tard. Pourquoi ? Parce que la réforme a été préparée entièrement par M. Extermann, qui en avait été chargé par M. Alfred Borel, conseiller d'Etat radical. M. Chavanne a trouvé dans ses cartons le dossier du cycle d'orientation tout prêt. (Exclamations.)
Mais ce n'est pas cela qui est important : ce qui est important, c'est qu'à cette époque - je l'avais dit, mais je le rappelle puisqu'il y a un auditoire quelque peu nouveau - il y avait eu un grand débat pour savoir s'il fallait maintenir une 7e primaire ou placer une 7e au cycle d'orientation. Et je prétends malgré tout que, vingt-cinq ans après, avec les 7e hétérogènes vous rétablissez la 7e primaire de jadis - dans l'esprit, pas dans les formes pédagogiques bien entendu ! Et je me demande même si on ne pourrait pas considérer que le projet de loi des Verts et de Mme de Haller, qui veut continuer dans cet esprit pour la 8e et la 9e, ne serait pas, au fond, de rétablir - ou d'établir, parce que ça n'avait jamais été le cas - une 8e ou une 9e primaire sous un autre nom.
J'aimerais quand même vous dire, Monsieur Beer, pourquoi les entreprises ne veulent plus d'apprentis de 15 ans ! Vous avez raison : en effet, les banques demandent en tout cas un 10e degré et veulent des gens qui ont 16 ans, car il faut bien constater que, dans beaucoup de matières élémentaires, les jeunes de 16 ans aujourd'hui ne sont probablement pas mieux formés que ceux de 15 autrefois - ou en tout cas ils le sont différemment. Cela ne signifie pas qu'ils soient moins bien formés, mais pas comme l'économie privée le souhaiterait pour ce qui est des matières élémentaires, comme c'était le cas autrefois à 15 ans. C'est en effet un débat intéressant et une question importante : comment se fait-il, alors que les jeunes font une année scolaire de plus avec des professeurs qui se consacrent à eux, que le résultat ne soit pas très bon ? C'est une question qu'il faudrait poser au service de la recherche en éducation pour qu'il nous fasse un rapport...
Je dis clairement que l'on fait dire ce que l'on veut aux textes et notamment à ce rapport intermédiaire, dont je n'avais pas totalement connaissance puisque je n'ai pas assisté aux débats de la commission - je vous rappelle que je suis un rapporteur intérimaire. Mon métier d'historien me conforte dans l'idée que les textes doivent être analysés, et je constate pour ma part que la conclusion de ce rapport intermédiaire - sur plusieurs pages - est intitulée : «Réserves et obstacles quant à l'institution d'un tronc commun en 7e».
Je vois que le premier paragraphe est intitulé : «Le flou des concepts». Et, de ce premier paragraphe, je ne vous lirai qu'une seule phrase : la première, je cite : «Les concepts qui ont souvent servi à motiver la création d'un tronc commun, par exemple, sélection, orientation continue, démocratisation, intégration sociale, sont imprécis et vagues ; leur signification varie selon les acteurs et les époques.»
Et puis ensuite, les auteurs de ce rapport intermédiaire s'interrogent sur les déficiences de la stratégie de réforme, sur le manque d'articulation entre la 7e et les degrés suivants du cycle d'orientation - tout mériterait d'être cité et d'être reproduit dans nos débats ! - sur la fonction prioritaire du secondaire et l'articulation avec le poste obligatoire, soulignent l'isolement que nous aurions dans le paysage scolaire suisse et concluent que le tronc commun présente certaines limites et ne résout pas certains problèmes...
On lit notamment, contrairement à certaines affirmations présentées tout à l'heure par la députée Caroline Dallèves - qui, elle, avait certainement lu ce texte mais qui en retient autre chose - je cite : «De ce point de vue, il n'est pas possible d'affirmer sans autre précaution que l'introduction de classes indifférenciées en 7e ne freinerait pas les éléments les plus capables sur le plan scolaire. Les recherches consultées font apparaître qu'une structure en classe hétérogène évite d'augmenter les différences scolaires ou sociales entre élèves, mais, selon ces mêmes recherches, il ne faut cependant pas s'attendre à ce que l'introduction d'un tronc commun améliore globalement le niveau de performance des élèves ou assure l'égalité des chances.»
Et les auteurs ajoutent encore que les études qu'ils ont consultées montrent, je cite : «que les pays qui ont maintenu des classes indifférenciées au-delà de la 6e, par exemple : la France ou l'Italie, l'ont fait essentiellement à partir de prises de position politiques ou sociales plutôt que sur la base de données démontrant la supériorité de ce mode d'organisation sur le plan des performances.» Je vous rappelle que les effectifs par classe dans ces pays sont bien supérieurs à ceux que nous connaissons à Genève, et je pense que, de ce point de vue, personne ne voudrait prendre pour exemple le modèle scolaire français ou italien, ou alors, il faudrait nous le dire : ce serait intéressant pour établir nos budgets !
On ne saurait être plus clair : en réalité, les études restent indécises et, à l'évidence, les auteurs qui dans l'ensemble seraient évidemment plutôt favorables à ce projet de réforme sont quand même contraints de reconnaître que les performances ne sont pas celles que l'on pourrait attendre. Je déplore donc le dogmatisme qui sous-tend cette volonté politique.
J'ai pris bonne note - nous sommes quand même ici non pas pour refaire tous les débats que nous avons déjà faits en juin mais pour essayer de conclure - du retrait de l'amendement de Mme de Haller.
J'aurais voulu savoir de M. Vanek - car je n'ai pas obtenu de réponse claire de la part de certains auteurs de l'amendement - si «progressivement» part du 27 août 2001 et s'il estime que l'on aura fini d'appliquer cette mesure en 2003 ou en 2004. En effet, je viens d'avoir les deux versions, et j'aurais voulu avoir son appréciation sur ce point, puisqu'il est aussi signataire. Je suis tout de même un peu inquiet de voir qu'un amendement est modifié - ce n'est d'ailleurs pas fini, puisqu'il y a encore la disposition transitoire - sans que les auteurs soient tout à fait d'accord sur le contenu réel de celui-ci !
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Je reprends la parole, ce dont vous voudrez bien m'excuser !
Monsieur Lescaze. je suis tout à fait d'accord : on ne peut pas s'attendre à une amélioration globale du niveau de performance des élèves. Mais ce n'est pas ce que nous attendons : nous voulons simplement que ce niveau reste stable ! L'amélioration attendue se situe ailleurs : au niveau socio-culturel général ; un niveau d'acquisition de connaissances autres que strictement scolaires. Mais nous souhaitons tout de même que le niveau des connaissances scolaires reste stable. C'est exactement ce que dit le rapport !
M. Michel Halpérin (L). J'étais très attentif tout à l'heure lorsque M. le rapporteur de minorité évoquait la double citation de Bernanos.
Monsieur Courvoisier, je ne peux pas être plus d'accord avec vous que je ne le suis quand vous citez Bernanos, soucieux de ne pas transformer l'humanisme en technique. Je suis aussi d'accord avec votre choix de citation quand vous allez emprunter à Simone Weil le souci d'un enseignement humaniste, là encore, donnant à chacun presque comme une exigence minimale le droit - peut-être le devoir aussi - de pouvoir lire une page de grec et d'accéder ainsi au savoir, à un niveau qui permette d'échanger raisonnablement entre êtres humains.
Ce n'est nullement incompatible avec l'autre citation de Bernanos que je vous avais proposée à l'occasion d'un débat récent et qui disait autre chose : il disait, je crois - et vous en êtes ensemble, de ce côté-là du parlement, une bonne illustration ! - que : «Les hommes de notre temps ont la tripe sensible et le coeur dur.» !
Et si je me suis permis cette remarque sévère, en l'empruntant à Bernanos, c'est parce que j'aime la bonne volonté, j'aime les bonnes intentions - même si je ne suis pas sûr qu'elles ne pavent pas l'enfer plus souvent qu'on ne voudrait - mais je n'aime pas du tout l'hypocrisie ! Et je n'aime pas du tout les discours un peu patelins que j'ai entendus tout à l'heure dans la bouche de M. Brunier, ou de M. Vanek, ou de Mme Dallèves, ou de Mme de Haller, disant qu'après tout cette réforme ne se fera pas vraiment au pas de charge, qu'elle répond à des nécessités sociales, qu'elle est soutenue par des enseignants, que les pré-rapports semblent l'orienter dans la bonne direction...
Tous ces arguments ne tiennent pas la route : leurs auteurs le savent pertinemment ! C'est la raison pour laquelle ils leur donnent un air bonhomme, parce qu'ils savent que de vouloir les asséner avec trop de brutalité n'ajouterait pas beaucoup à leur crédibilité. C'est peut-être aussi la raison pour laquelle on réunit le ban et l'arrière-ban - un peu de claque - pour faire effet... (Exclamations.)
Je me souviens, Monsieur le président, que lors de l'une des dernières séances de ce Grand Conseil, où la tribune était abondamment garnie de fonctionnaires de la police - à propos des fonctionnaires de la police, du service des automobiles ou des ambulances - j'avais trouvé, je l'avais dit à cette occasion, que le parlement n'avait pas à siéger sous la pression de la police ou d'une partie de la police, pas plus qu'il n'a à siéger sous la pression de quelque partie que ce soit du corps enseignant ou de n'importe quelle autre composante de la fonction publique, même si, dans les rangs de ceux qui sont présents, il est probable qu'il n'y ait pas de professeurs d'instruction civique... (Rires.) ...sinon ils connaîtraient l'article 57 de notre règlement, qui interdit aux personnes qui sont à la tribune - n'est-ce pas, Monsieur le président ? - de s'exprimer et de faire autre chose que d'écouter en gardant le silence les débats des élus du peuple ! (Exclamations.)
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le débat sur lequel nous allons trancher maintenant - débat que vous avez voulu hâtif, mal préparé, mal réfléchi, scandaleusement superficiel - a traîné parce que ses vertus sont telles que nous nous en sommes aperçus... (Exclamations.) Mais il aboutit aujourd'hui à son terme naturel. Je vous l'ai dit à notre dernière séance, je vous le répète aujourd'hui : ce que vous aurez accompli en cette occasion est méprisable, parce que conçu exclusivement pour des satisfactions d'ordre de politique immédiate ! Et les confusions qui ont été faites par plusieurs d'entre vous tout à l'heure, au point de jeter dans la plus parfaite contradiction le rapporteur de majorité, M. Courvoisier lui-même, ces confusions que vous avez faites entre le débat sur la grille-horaire et le débat sur la 7e hétérogène, sont la meilleure révélation de vos vraies pensées - je n'ose même pas dire de vos arrière-pensées !
Il n'est pas nécessaire d'être freudien ou lacanien pour comprendre que c'est un mauvais coup qui, dans votre propre esprit, n'a d'autre intérêt que de déstabiliser, si possible, la direction du département de l'instruction publique et, par conséquent, aucune des seules vraies questions qui sont intéressantes n'est posée : à savoir ce qui est bon pour vos enfants ou pour les miens ! Ce débat, disais-je, est méprisable, parce que vous avez pris vos propres enfants en otage d'une mauvaise politique. Vous en assumerez la responsabilité ! Ce qui est malheureux, c'est que vos enfants et les nôtres l'assumeront avec vous ! (Applaudissements.)
M. Jean-François Courvoisier (S), rapporteur de minorité. Je voulais dire que si nous donnons l'impression de mener cette discussion au pas de charge, c'est parce que la droite a refusé d'entrer en matière en commission, où nous aurions eu tout le temps d'étudier cette question tranquillement plutôt que devoir faire une si longue séance plénière ! (Exclamations.)
Mme Martine Brunschwig Graf. En venant aujourd'hui dans cette enceinte, je croyais connaître comme vous l'enjeu du débat...
Un journaliste m'interrogeait l'autre jour sur ma position en cas d'acceptation de ce projet de loi. Je lui ai répondu qu'il était du devoir d'un élu - ou d'une élue - d'appliquer la loi et qu'il allait de soi qu'elle le serait. Cela signifie que le fait de voter ce soir implique pour chacun d'entre vous - c'était l'objet du débat de la dernière fois avec M. Vanek - une certaine responsabilité.
Je ne vous cache pas que si ce débat est si difficile, c'est moins en raison du thème, voire même des propositions qui sont faites, que par le sentiment douloureux que, parmi ceux qui soutiennent ce projet de loi officiellement, un certain nombre de personnes le font avec une conviction pour le moins peu fiable. En effet, les attaques sont normales dans le cadre politique et lorsqu'elles sont anormales, elles sont supportables. Mais ce qui m'a fait le plus mal jusqu'à présent, c'est de voir certains d'entre vous soutenir ce projet de loi pour des raisons politiques, alors que vous répondez que vous êtes loin d'être convaincus que c'est une bonne solution pour les enfants dont nous avons la responsabilité lorsqu'on vous pose la question en aparté.
Je dois vous dire que l'engagement pris ce soir par trois partis représentés ici de poursuivre leur action en mettant rapidement en place deux autres classes hétérogènes, à savoir la 8e et la 9e, a provoqué chez moi davantage d'inquiétude encore que tout ce que vous avez pu dire jusqu'ici. En effet, on peut débattre et on peut proposer à l'envi, mais on ne peut pas aligner les projets comme des noix sur un bâton, quelle que soit sa position ! (Exclamations.) Non, Mesdames et Messieurs ! Il y a des débats et des décisions, et les décisions ne sont pas prises dans un coin, même si elles peuvent déplaire - je peux le concevoir.
Mais faire un débat sur les classes hétérogènes comme vous le faites en annonçant d'ores et déjà que vous envisagez, sans en avoir débattu, d'introduire les 8e et 9e hétérogènes est tout à fait irresponsable. Cela va nous obliger à préparer dès aujourd'hui la mise en place de la loi que vous allez voter tout en attendant la fin de l'année et le début de l'an prochain les décisions que vous avez l'intention de prendre s'agissant des 8e et 9e. Vous pouvez désirer que les choses se fassent rapidement, mais il faut au moins vous donner du temps pour avoir une vision globale de la question ! Vous pouvez ne pas être d'accord sur les moyens, sur la démarche pédagogique, sur l'organisation, mais vous n'avez pas le droit de me dénier, pas plus que je ne me permettrais de le dénier à quiconque ici, le fait que mon objectif est que nos enfants puissent sortir de l'école obligatoire en ayant au moins une voie de formation à suivre ! Comme je l'ai dit la dernière fois, nous devrions au moins être d'accord sur ce point.
Il y a eu des années et des années de débat à ce sujet, mais il n'y a pas eu, c'est vrai, de décision d'étendre les classes hétérogènes. Du reste, dès mon arrivée au département, j'ai demandé les raisons pour lesquelles cette décision n'avait finalement pas été prise. Je n'avais alors pas d'opinion bien tranchée à ce sujet, mais j'avais le souci de résoudre le problème, ce qui n'est pas si simple. En effet, l'expérience montre que si dans certains collèges et dans certaines conditions tout à fait favorables le système des classes hétérogènes, qui se veut généreux, se révèle positif, le doute subsiste toujours sur le fait qu'il profite véritablement à ceux qui en auraient le plus besoin dans certains autres, et cela dans la durée.
Je vous ai dit qu'il n'était pas raisonnable d'imposer les classes hétérogènes pour une bonne raison : c'est que les collèges qui les ont introduites l'ont fait sur la base d'une réflexion pédagogique et d'un projet de collège et non sous la contrainte. Les collèges qui se proposent d'introduire des classes hétérogènes le font sur les mêmes bases et en utilisant la même méthode de travail, mais les collèges qui ne l'envisagent pas - et il y en a, tout comme il y a des enseignants qui ont des avis divergents - se demandent aujourd'hui sur quel projet pédagogique on peut baser l'introduction de classes hétérogènes alors que plane une nouvelle incertitude s'agissant des travaux de ce parlement durant les six mois à venir...
Il n'est effectivement pas raisonnable d'envisager que le département puisse exécuter votre volonté dans une telle situation. En effet, nous sommes dans l'incapacité de dessiner les moindres perspectives d'avenir, car trop d'enseignants ne sont pas d'accord - lisez tous les rapports des collèges, Mesdames et Messieurs les députés ! Ce sont des enseignants qui se sont engagés dans des projets pédagogiques, avec des classes de générale et de pratique et qui montrent les résultats positifs qu'ils obtiennent. Tout autant d'enseignants sont très convaincus et vous parleront de la réussite des classes hétérogènes. Et, entre les deux, nous ne pouvons pas trancher si facilement !
Nous ne pouvons pas, en l'état, envisager d'appliquer une loi, comme vous le souhaitez, sans même être capables de dire ce qu'il adviendra des classes qu'on met en place à la rentrée 2001 dès lors que les professeurs devront ensuite assumer la 8e et la 9e ! L'alinéa 3 de l'article 53, qui préconise d'introduire les classes hétérogènes progressivement sur deux ans, n'est pas raisonnable, parce qu'il implique que cette mesure devrait être mise en oeuvre dans dix-sept collèges, alors qu'aujourd'hui seuls trois sont bien engagés et deux ou trois autres pourraient l'envisager. Alors, qu'allons-nous faire des onze autres, de ceux qui mettent aujourd'hui en place des plans d'étude auxquels ils ont largement contribué et pas simplement une grille-horaire ?
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi - vous l'avez rappelé - existe depuis 1997, alors je ne suis pas d'accord que vous laissiez entendre que le mandat qui a été donné au service de la recherche en éducation l'a été avec l'arrière-pensée de retarder je ne sais quelle opération ! En effet, la lettre adressée audit service - si vous aviez l'honnêteté de la lire - demandait qu'il nous donne des délais de faisabilité. En commission, ce service nous a fait part des raisons pour lesquelles le retard avait été pris, et l'une des raisons, Mesdames et Messieurs les députés, c'est qu'il a fallu convaincre sur le terrain de la nécessité qu'une enquête soit effectuée et qu'il fallait y participer ! A la lumière de ces explications, on peut mesurer la sensibilité de ce problème !
Vous me permettrez d'ajouter une dernière chose. Vous pouvez penser ce que vous voulez de la politique que nous essayons de mettre en place, mais, je vous le dis encore une fois, notre objectif essentiel est le parcours de formation après le cycle d'orientation. Et le pire, par rapport au signal que vous donnez dans votre amendement, est que le groupe de suivi ne compte que cinq députés, alors qu'il y a six partis dans ce parlement, et qu'il oublie complètement que les enseignants du postobligatoire sont partie prenante. Et je ne crois pas que vous ayez été nombreux à vous intéresser beaucoup à ce que ces derniers pensent des décisions que vous prenez aujourd'hui.
Mesdames et Messieurs les députés, si vous décidez aujourd'hui de poursuivre votre action - vous n'êtes pas obligés de le faire, même si vous avez pris la décision de débattre, et de débattre dignement, il faut le dire ici - je vous demande en tout cas de garder présent à l'esprit qu'une réforme ne peut être mise en place sans projets pédagogiques dans les collèges et qu'un projet pédagogique ne peut être élaboré sans qu'il y ait débat dans les collèges. En effet, de telles décisions n'appartiennent pas à la présidence du département de l'instruction publique, mais bel et bien à celles et ceux qui dispensent l'enseignement au quotidien.
C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous ai suggéré d'attendre, car, je vous le répète, il n'y a pas véritablement d'urgence.
Pour conclure, je ne sais quelle est la décision que vous prendrez, mais je souhaite vraiment du fond du coeur que vous votiez - si vous persistez à le faire aujourd'hui - en votre âme et conscience et que vous soyez ensuite capables de défendre votre position vis-à-vis de celles et ceux qui souhaiteraient vous interpeller ! C'est la seule chose qui compte lorsqu'on est député ! (Applaudissements.)
Le président. Monsieur Halpérin, vous avez la parole ! (Exclamations.)
M. Michel Halpérin (L). Vous n'avez pas envie de m'écouter parler ! Ce n'est pas grave, ce n'est pas pour vous que je parle, Madame !
Etant donné la dernière phrase de Mme la cheffe du département de l'instruction publique, je propose le renvoi en commission de ce projet. (Rires.)
Le président. Je mets immédiatement au vote la proposition de renvoi en commission de ce projet qui vient d'être faite.
Mise aux voix, cette proposition est rejetée.
Le président. Nous passons au vote de ce projet de loi en troisième débat.
M. Michel Halpérin (L). Monsieur le président, je demande l'appel nominal pour que nos enfants connaissent le nom de ceux qui auront voté leur avenir ! (Appuyé.)
Article 1 (souligné)
Mis aux voix, l'alinéa 2 de l'article 53 (amendé le 23 juin) est adopté.
Art. 53, al. 3 (nouveau)
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement consistant en un alinéa 3 nouveau, qui remplace l'amendement qui avait été présenté par Mme de Haller. Cet amendement est présenté par Mme Dallèves, M. Vanek et M. Beer. Il consiste en un alinéa 3 nouveau, dont la teneur est la suivante :
«3L'organisation du septième degré en classes hétérogènes prendra effet à la rentrée scolaire du 27 août 2001 et sera mise en place progressivement sur deux ans.»
Mme Janine Hagmann (L). Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande une dernière fois d'être réalistes... Vous rendez-vous compte de ce que vous demandez ? Une modification de structure mise en place sur deux ans !
Cela veut dire que vous sous-estimez totalement cette modification de structure et que, d'une certaine façon, vous méprisez et la formation des enseignants et leur travail. En effet, pour arriver à avoir une vision totalement globale de leur classe, les enseignants devront vraiment avoir une formation spécifique. Jusqu'à maintenant dans les cycles qui n'ont pas de 7e hétérogène, c'est-à-dire dans les cycles à sections, les professeurs enseignent une seule branche et n'ont pas vraiment une vision de la classe globale. Comment voulez-vous que cette réforme soit mise en place en deux ans avec le nombre de personnes supplémentaires qu'il faudra prévoir ? Mme Dallèves l'a très justement dit : les cycles hétérogènes ont une très grande différence de fonctionnement avec les autres, en ce sens que le nombre d'élèves par classe est limité à dix-huit.
Mesdames et Messieurs, pour quelle raison l'enseignement est-il si bon à Genève ? Vous le savez très bien : l'encadrement des élèves est optimalisé. En section générale on ne dépasse pas quatorze élèves par classe, alors que dans les sections latino-scientifiques on peut arriver à vingt-quatre ou vingt-cinq élèves ! Il s'agit là d'une réelle différence. La généralisation de 18 élèves par classe qui sera forcément demandée, pour les 7e hétérogènes, créera de gros problèmes.
Et maintenant, vous demandez à la cheffe du département de mettre une mesure comme celle-ci sur pied en deux ans ? Vous manquez sacrement de sens des responsabilités !
Le président. Bien, je mets au vote l'amendement que je viens de vous lire à l'article 53, alinéa 3.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'alinéa 3 de l'article 53 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 54, alinéa 1 (nouvelle teneur) est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
Article 2 (souligné)
Le président. A l'article 2, souligné, disposition transitoire, nous sommes saisis d'une proposition d'amendements de divers députés de l'Alliance de gauche.
M. Pierre Vanek (AdG). J'ai dit tout à l'heure que l'amendement de Mme de Haller serait remplacé par un amendement collectif des partis de l'Alternative. J'annonce donc que l'Alliance de gauche retire cet amendement. Nous reviendrons lors d'une séance ultérieure avec un certain nombre de propositions communes à l'Alternative à la fois sur le suivi de cette réforme et sur une question qui avait fait l'objet du débat par rapport à un amendement précédent lors du volet précédent de cette séance concernant les effectifs dans ces classes. Pour ce soir, cet amendement est donc retiré.
Le président. Je prends acte de ce retrait. Je donne la parole à M. Lescaze, qui nous avait soumis un sous-amendement à cet amendement.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. J'aimerais savoir si M. Vanek fait bien allusion à sa disposition transitoire. En effet, il parle d'effectifs, alors que dans sa disposition transitoire à laquelle j'ai fait un sous-amendement il s'agissait exclusivement de la composition du comité de suivi. Je voudrais donc être éclairé à ce sujet, mais peut-être ai-je raté une marche !
M. Pierre Vanek (AdG). Je vais mettre le pied ou les deux sur la marche en question !
Je précise que l'amendement signé par une série de députés de l'Alliance de gauche, qui figure sur la feuille que vous avez sous votre nez est retiré, politiquement. J'annonce que les partis de l'Alternative reviendront sur cette disposition transitoire et sur la question des effectifs probablement sous forme d'une motion qui sera déposée ultérieurement. En l'état, cet amendement est retiré. Nous n'avons donc pas à en débattre à moins que vous vouliez le reprendre, Monsieur Lescaze ?
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité ad interim. Je ferai ce qu'il me plaira de faire !
Je ne vais pas reprendre votre amendement, mais je tiens à souligner que l'Alliance de gauche qui se plaint souvent que les représentants du peuple, à savoir les députés, devraient être représentés dans certaines commissions, voire au Bureau du Grand Conseil pour chaque parti représenté au Grand Conseil, n'a prévu dans son amendement que cinq députés élus par le Grand Conseil. Mon sous-amendement prévoyait simplement que le comité de suivi soit composé par un député par parti représenté au Grand Conseil, ce qui me paraissait élémentaire et démocratique ! Comme vous cessez de vouloir un comité de suivi - inefficace d'après la composition - et que sur ce point vous devenez momentanément raisonnables - sans doute provisoirement - je retire mon sous-amendement !
Le président. Nous sommes à l'article 2, souligné. Nous avions été saisis d'un amendement que nous avions accepté. Etant donné l'acceptation de l'article 53, alinéa 3, je présume qu'une adaptation doit être faite.
Mme Jeannine de Haller (AdG). Monsieur le président, cet amendement n'a plus de sens maintenant que l'alinéa 3 de l'article 53 a été voté. Je le retire donc.
Le président. Merci, Madame. L'article 2, souligné, comprend donc le texte initial, je cite :
«La présente loi entre en vigueur dès sa promulgation.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 (souligné) ainsi amendé est adopté.
Le président. Nous allons procéder au vote d'ensemble de ce projet de loi par appel nominal.
Celles et ceux qui l'acceptent répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Ce projet est adopté en troisième débat dans son ensemble par 46 oui contre 42 non.
Ont voté oui (46) :
Esther Alder (Ve)
Charles Beer (S)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Christian Brunier (S)
Fabienne Bugnon (Ve)
Nicole Castioni-Jaquet (S)
Alain Charbonnier (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Anita Cuénod (AG)
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
Jeannine de Haller (AG)
Erica Deuber Ziegler (AG)
René Ecuyer (AG)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Luc Gilly (AG)
Alexandra Gobet (S)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Mariane Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Cécile Guendouz (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
Antonio Hodgers (Ve)
Georges Krebs (Ve)
Pierre Meyll (AG)
Louiza Mottaz (Ve)
Chaïm Nissim (Ve)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Albert Rodrik (S)
Christine Sayegh (S)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Myriam Sormanni-Lonfat (S)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Salika Wenger (AG)
Ont voté non (42) :
Bernard Annen (L)
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Janine Berberat (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Juliette Buffat (L)
Gilles Desplanches (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Pierre Ducrest (L)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Bénédict Fontanet (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Philippe Glatz (DC)
Nelly Guichard (DC)
Claude Haegi (L)
Janine Hagmann (L)
Michel Halpérin (L)
Yvonne Humbert (L)
René Koechlin (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Pierre Marti (DC)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Vérène Nicollier (L)
Jean-Marc Odier (R)
Michel Parrat (DC)
Catherine Passaplan (DC)
Pierre-Louis Portier (DC)
Jean Rémy Roulet (L)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Louis Serex (R)
Walter Spinucci (R)
Micheline Spoerri (L)
Olivier Vaucher (L)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Personne ne s'est abstenu
Etaient excusés à la séance (9) :
Thomas Büchi (R)
Régis de Battista (S)
Hervé Dessimoz (R)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Véronique Pürro (S)
Jacques-Eric Richard (S)
Charles Seydoux (R)
Etaient absents au moment du vote (2) :
Anne Briol (Ve)
Jean Spielmann (AG)
Présidence :
M. Daniel Ducommun, président.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7697)
modifiant la loi sur l'instruction publique (C 1 10)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur l'instruction publique, du 6 novembre 1940, est modifiée comme suit:
Art. 53, al. 2 et 3 (nouveaux)
2 Afin d'éviter une sélection trop précoce, le septième degré est organisé progressivement dans tous les collèges en classes hétérogènes, sans section.
3 L'organisation du septième degré en classes hétérogènes prendra effet à la rentrée scolaire du 27 août 2001 et sera mise en place progressivement sur deux ans.
Art. 54, al. 1 (nouvelle teneur)
1 L'orientation continue des élèves est notamment assurée par l'observation directe, par l'évaluation formative ainsi que par des entretiens avec l'élève, sa famille et les conseillers en orientation scolaire.
Article 2
La présente loi entre en vigueur dès sa promulgation.
Troisième débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que pour être en compatibilité avec le Grand Conseil vaudois, nous votons ce projet en troisième débat, ce dernier l'ayant adopté le 20 juin 2000.
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur. Je suppose que nous allons attendre que le public ait quitté la salle, puisqu'il n'est pas intéressé par ce projet de loi sur une réforme universitaire de très grande importance pour ce canton. Je vous demande donc un tout petit peu d'attention et de silence. (Brouhaha.)
Le président. La parole est-elle demandée ?
M. Bernard Lescaze, rapporteur. Oui, Monsieur le président, mais j'attends ! Chacun met ses priorités où il le veut, et je pense que le projet que nous allons traiter, même s'il fait effectivement l'objet de moins de contestation, est très important ! (Exclamations.)
Une voix. Scandaleux !
M. Bernard Lescaze, rapporteur. Monsieur le président, j'aimerais que vous fassiez taire la dame aux cheveux noirs à la tribune ! Nous sommes des représentants élus ! Elle pourra nous biffer dans une année et demie ! Madame, vous pouvez sortir ou rester, mais vous ne devez pas parler !
Le président. Monsieur Lescaze, s'il vous plaît ! Mesdames et Messieurs, un peu de calme ! (Exclamations.) S'il vous plaît, veuillez sortir de la tribune si vous n'êtes pas intéressés par la suite de nos débats ! (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, on se calme et on s'organise ! (Exclamations de Mme Gossauer-Zurcher.) Voilà, Monsieur Lescaze, je vous donne la parole !
M. Bernard Lescaze, rapporteur. Merci, Monsieur le président ! Je pense effectivement que les discussions ont été suffisamment longues tant en commission qu'au sein de ce Grand Conseil pour que ce projet de loi puisse être adopté formellement en troisième débat.
Nous sommes tous d'accord sur son contenu, et je ne vais pas rallonger le débat, mais je tiens tout de même à dire qu'il s'agit d'un projet important, parce que, pour la première fois, deux projets de lois ont été discutés, débattus et votés en parallèle. C'est donc déjà une procédure intéressante.
Ensuite, quant au fond, les conditions d'admission entre les deux universités de Lausanne et de Genève sont sinon totalement unifiées du moins... (Le président agite la cloche.) Vous voyez, Monsieur le président, j'avais raison, quand je voulais attendre cinq minutes ! (Brouhaha.) ...fortement harmonisées, et je pense qu'elles seront complètement unifiées de part et d'autre dans un laps de temps de quelques années.
Je répondrai volontiers aux questions des députés qui désireraient avoir des précisions par rapport au système retenu, finalement assez compliqué. Si ce n'est pas le cas, je vous propose de passer immédiatement au vote du troisième débat.
Mme Martine Brunschwig Graf. Je tiens à vous dire brièvement tout d'abord que ce projet remporte l'adhésion de l'ensemble de ce Grand Conseil, comme d'ailleurs beaucoup de projets en matière d'enseignement, quoi qu'on en dise...
Deuxième chose : je souhaite remercier le Grand Conseil vaudois qui a accepté de revenir sur un amendement qu'il avait lui-même voté, au nom de la collaboration intercantonale et de l'harmonisation des lois. Je crois que c'est suffisamment nouveau pour le souligner et remercier nos collègues du Grand Conseil vaudois.
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8084)
modifiant la loi sur l'université (C 1 30)(étudiants et auditeurs)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi sur l'université, du 26 mai 1973, est modifiée comme suit :
Art. 5, al. 4 (nouvelle teneur)
4 Afin de couvrir les frais de la formation continue, l'université peut percevoir des émoluments qui tiennent compte des coûts induits par ces enseignements. Il sont fixés par le rectorat sur proposition des facultés, écoles et instituts.
Art. 58 à 61 (abrogés)
Art. 62, al. 1 Droit de recours (nouvelle teneur)
1 Les décisions individuelles concernant les candidats à l'admission à l'université, les étudiantes ou étudiants, les auditrices ou auditeurs, peuvent faire l'objet d'une opposition ou d'un recours dont les modalités sont fixées par le règlement de l'université.
Art. 63A Définition de l'étudiante et de l'étudiant (nouveau)
Est étudiante ou étudiant la personne qui est immatriculée à l'université et inscrite dans une faculté, une école ou un institut en vue d'obtenir un grade universitaire.
Art. 63B Conditions d'accès à l'université (nouveau)
1 L'université est ouverte à toute personne remplissant les conditions d'immatriculation et d'inscription.
2 En cas de nécessité, lorsque le nombre de places l'exige, le Conseil d'Etat peut limiter par un arrêté valable pour une seule rentrée universitaire l'accès aux études dans une faculté de l'université. Dans ce cas, le Conseil d'Etat et l'université veillent à atténuer dans toute la mesure du possible les conséquences de cette limitation, notamment dans le cadre de la coordination entre les hautes écoles universitaires suisses.
Art. 63C Définition de l'auditrice et de l'auditeur (nouveau)
Est auditrice ou auditeur la personne qui, sans être immatriculée, est autorisée sur décision de la faculté, de l'école ou de l'institut concerné, à s'inscrire pour suivre certains enseignements.
Art. 63D Immatriculation (nouveau)
1 Sont admises à l'immatriculation les personnes qui possèdent une maturité gymnasiale, un diplôme de fin d'études délivré par une haute école spécialisée (HES) ou un titre jugé équivalent.
2 Les personnes qui ne possèdent pas un des titres mentionnés à l'alinéa 1 peuvent cependant être admises à l'immatriculation, pour autant qu'elles remplissent les conditions spécifiques fixées dans le règlement de l'université. Une évaluation périodique de ces conditions spécifiques est effectuée par le département concerné.
3 Pour le surplus, les conditions d'immatriculation, d'exmatriculation, d'inscription et d'élimination des étudiantes et étudiants et des auditrices et auditeurs sont fixées par le règlement de l'université.
Art. 63E Sanctions (nouveau)
1 L'étudiante ou l'étudiant, ou l'auditrice ou l'auditeur qui enfreint les règles et usages de l'université est passible des sanctions suivantes, prononcées par le conseil de discipline, compte tenu notamment de la gravité de l'infraction:
2 Le conseil de discipline est composé d'un président extérieur à l'université et désigné par le rectorat, de deux membres du corps professoral, de deux collaboratrices ou collaborateurs de l'enseignement et de la recherche et de deux étudiantes ou étudiants désignés par le conseil de l'université.
Art. 63F Participation financière aux formations à caractère professionnel (nouveau).
1 Les étudiantes et étudiants suivant une formation à caractère professionnel menant au diplôme d'études supérieures spécialisées participent au financement de celle-ci.
2 Le montant de cette participation financière est fixé par le rectorat et soumis à l'approbation du département de l'instruction publique.
Art. 99, al. 4 (abrogé)
Ce projet de loi a été envoyé à nouveau en commission pour examiner une proposition d'amendement émanant d'un député de l'Alliance de Gauche. La commission a donc repris la discussion dans sa séance du 7 juin 2000 sous la présidence de M. Rémy Pagani en présence de M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot et avec l'assistance de MM. Jean-Charles Pauli, juriste et Gilles Gardet, directeur et urbaniste cantonal.
Discussion de la commission
L'amendement soumis à la commission a la teneur suivante :
Art 15A, al.6
Un député peut également déposer un projet de loi, accompagné d'un plan de zone, portant sur une modification de limites de zone. Si le Grand Conseil accepte de le renvoyer en commission, le département est tenu d'engager et de mener à terme la procédure prévue à l'art. 16. Au préalable, il s'assure de la conformité du projet, sur le plan formel, par rapport aux exigences légales et apporte, le cas échéant, les adaptations nécessaires après en avoir informé son auteur. Sitôt l'enquête publique terminée et le préavis communal communiqué, conformément à l'art. 16, al.3, le département transmet le dossier complet à la commission du Grand Conseil chargée de l'examen du projet de loi, qui fait rapport à ce dernier.
Afin de faciliter les travaux, le DAEL a soumis à la commission un projet de modification de l'alinéa 5 à discuter en parallèle avec cet alinéa 6.
Art 15A, al. 5 Proposition du Grand Conseil (nouveau)
Lorsque le Grand Conseil le demande par voie de motion, le département met au point un avant-projet conformément à l'alinéa 2 et en liaison avec la commission d'aménagement du canton. Sans retard, le département s'assure de la conformité du projet, sur le plan formel, par rapport aux exigences légales, notamment au plan directeur cantonal, apporte, le cas échéant, les adaptations nécessaires après en avoir informé la commission d'aménagement du canton et met l'avant-projet de loi à l'enquête publique, selon la procédure prévue à l'article 16.
Le chef du département explique la démarche proposée : en effet, concernant le droit d'initiative du Grand Conseil en matière d'aménagement, il y a deux types de blocages possibles par le département :1) celui-ci peut ne pas donner suite à la motion et 2) il peut ne pas déposer de projet de loi après l'enquête publique. Les premiers travaux de la commission ont permis de lever le premier verrou dans le sens où le département a l'obligation de préparer un avant-projet en liaison avec la commission d'aménagement et de le mettre à l'enquête publique.
La majorité des commissaires sont peu convaincus par le libellé de l'al.6 qui inclut deux étapes du processus dans le même alinéa et donne la possibilité à un député de déposer un projet de loi alors que l'usage actuel prévoit que ce soit le rôle du Grand Conseil.
L'amendement de l'AdG, à savoir l'art 15A, al. 6 est rejeté par 9 voix (3 L, 1 R, 1 DC, 2 S, 2 Ve) contre 3 (AdG) et une abstention (S).
La nouvelle proposition de l'al. 5 est en revanche acceptée par 8 voix (3 S, 2 Ve, 3 AdG) contre 5 (3 L, 1 R, 1 DC).
Pour lever le second verrou, une proposition de modification de l'art 16, al.4 est présentée par le département, à savoir :
Art. 16, al 4
Au terme de la procédure prévue aux alinéas 1 et 3 ci-dessus, le Conseil d'Etat examine s'il entend saisir le Grand Conseil du projet et s'il y a lieu d'apporter des modifications à celui-ci pour tenir compte des observations recueillies et du préavis communal. Si ce dernier est négatif, le Conseil d'Etat procède au préalable à l'audition du conseil administratif ou du maire de la commune. Si la modification des limites de zone fait suite à une proposition du Grand Conseil, le Conseil d'Etat est tenu de déposer un projet de loi, sauf si la commission d'aménagement du canton y renonce. Le dépôt du projet de loi devant le Grand Conseil est ensuite annoncé par voie de publication officielle dans la Feuille d'avis officielle et d'affichage dans la commune.
Certains députés pensent qu'il n'est pas judicieux de donner à une commission la compétence de renoncer au dépôt d'un projet de loi en cas de préavis négatif d'une commune. Si c'était le cas, on se trouverait en présence d'un nouveau droit. Le chef du département explique que cette proposition aurait l'avantage d'éviter un débat en plénière pour des cas particulièrement controversés mais il reconnaît que cela pose quelques difficultés institutionnelles.
Mis aux voix, cet alinéa est adopté mais avec la suppression de la dernière partie de la phrase, à savoir "; sauf si la commission d'aménagement y renonce ". Huit commissaires acceptent cet alinéa ainsi modifié (3 S, 2 Ve, 3 AdG) et 5 le refusent (3 L, 1 R, 1 DC)
Au bénéfice de ces explications, nous vous proposons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter ces deux alinéas et le projet de loi ainsi amendé.
Projet de loi(8073)
modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (L 1 30)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
La loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, est modifiée comme suit :
Art. 15A, al. 5 Proposition du Grand Conseil (nouveau)
5 Lorsque le Grand Conseil le demande par voie de motion, le département met au point un avant-projet conformément à l'alinéa 2 et en liaison avec la commission d'aménagement du canton. Sans retard, le département s'assure de la conformité du projet, sur le plan formel, par rapport aux exigences légales, notamment au plan directeur cantonal, apporte, le cas échéant, les adaptations nécessaires après en avoir informé la commission d'aménagement du canton et met l'avant-projet de loi à l'enquête publique, selon la procédure prévue à l'article 16.
Art. 16, al. 1 et 4 (nouvelle teneur)
1 L'avant-projet de loi doit être soumis à une enquête publique de 30 jours, annoncée par voie de publication dans la Feuille d'avis officielle et d'affichage dans la commune. Des avis personnels sont envoyés par le département, sous pli recommandé, aux propriétaires des terrains compris dans le périmètre lorsque le nombre de communications individuelles n'excède pas 50.
4 Au terme de la procédure prévue aux alinéas 1 et 3 ci-dessus, le Conseil d'Etat examine s'il entend saisir le Grand Conseil du projet et s'il y a lieu d'apporter des modifications à celui-ci pour tenir compte des observations recueillies et du préavis communal. Si ce dernier est négatif, le Conseil d'Etat procède au préalable à l'audition du conseil administratif ou du maire de la commune. Si la modification des limites de zone fait suite à une proposition du Grand Conseil, le Conseil d'Etat est tenu de déposer un projet de loi. Le dépôt du projet de loi devant le Grand Conseil est ensuite annoncé par voie de publication dans la Feuille d'avis officielle et d'affichage dans la commune.
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons maintenant en main un rapport écrit alors que, pour la dernière séance, nous avions un rapport oral.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse. Je rappellerai brièvement que ce projet de loi a été renvoyé en commission pour examiner un amendement qui avait été présenté par l'Alliance de gauche et qui devait donner aux députés la compétence d'initier des modifications de zone tout comme c'est le cas pour les communes - c'était donc à la suite du problème de Troinex.
Les travaux qui sont issus de la commission ont abouti à un article 15A, alinéa 5, nouveau, qui vous est soumis, et également à une modification à l'article 16, alinéa 4, qui oblige le Conseil d'Etat à déposer un projet de loi suite à la mise à l'enquête publique quand c'est le Grand Conseil qui la demande. Je crois que ces questions ont suffisamment été débattues en commission, aussi je m'arrêterai là pour l'instant.
M. Walter Spinucci (R). L'examen de ce projet de loi nous permet de constater le changement d'attitude de certains en fonction des circonstances... En effet, lorsque l'un des auteurs du projet de loi 8073 dirigeait l'ancien département des travaux publics, il était opposé à ce que le Grand Conseil, voire un député, puisse user de son droit d'initiative en matière d'aménagement du territoire. Mais aujourd'hui, les choses changent !
Pour quelles raisons ? La principale tient certainement au fait que l'Alternative, incapable de s'imposer au niveau des exécutifs communaux, essaye d'imposer aux communes sa politique en matière d'aménagement du territoire !
Nous ne pouvons pas accepter cela, et c'est la raison pour laquelle le groupe radical refusera ce projet !
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Déjà en décembre 1999, lors du premier examen de ce projet de loi par la commission de l'aménagement, le groupe démocrate-chrétien avait d'emblée non seulement exprimé ses réticences face à ce projet mais les avait concrétisées par un refus d'entrer en matière.
Nous laissant ensuite convaincre par les propositions d'ajout et de modifications proposées soit par le président Moutinot soit par le département, nous avions alors estimé, malgré l'avis défavorable de l'Association des communes genevoises, que les propositions remaniées qui ressortaient de la séance étaient acceptables, cela quand bien même la volonté à peine voilée de mettre un peu plus les communes sous la tutelle du Grand Conseil ne nous avait pas échappé. Nous étions donc prêts à voter ce projet de loi modifié en début d'été.
Vous le savez, c'est à ce moment de la procédure que, tout comme vous, nous avons été, une fois de plus, confrontés à l'un de ces amendements chers à l'Alliance de gauche visant, en phase finale, à intégrer dans les projets des modifications l'autorisant ensuite à mener la politique excessive que nous lui connaissons. Si cette manoeuvre de dernière minute a eu pour effet immédiat le renvoi en commission, l'effet secondaire fut de rendre cette modification de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire inacceptable, et les efforts certes tout à fait louables du président du département et de ses services pour édulcorer en commission le texte de l'amendement ne nous ont pas convaincus.
En effet, outre le fait qu'à un moment donné des travaux l'on envisageait d'octroyer à une commission le pouvoir de renoncer ou non au dépôt d'un projet de loi ou encore que nous avons échappé de peu à l'éventualité qu'un seul député puisse déposer un projet de loi portant sur une modification de limites de zone, nous continuons de penser que le texte qui nous est présenté ce soir est malsain.
Il est malsain, parce qu'il ne vise qu'à faciliter la mainmise de l'actuelle majorité de ce Grand Conseil sur l'aménagement du territoire dans les communes de ce canton et, par ce biais, résoudre son problème de sous-représentation dans la plupart des conseils exécutifs et délibératifs communaux. Tout ceci aux dépens du nécessaire dialogue que le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement et son actuel président ont, eux, toujours préservé : je me dois de le relever.
Aussi longtemps donc que vous tenterez d'abuser de votre majorité pour imposer vos vues aux communes, vous ne trouverez pas le groupe démocrate-chrétien parmi vos alliés et certainement pas non plus la grande majorité des élus locaux de ce canton !
Ceci pour vous confirmer, Mesdames et Messieurs les députés, que notre groupe ne votera pas le projet 8073 amendé, même après les tentatives évoquées de le rendre acceptable.
M. Rémy Pagani (AdG). Je tiens à dire seulement que je ne comprends pas le procès d'intention qui nous est fait ! (Exclamations.)
En fait, le Grand Conseil qui légifère en tout, à ma connaissance, au niveau du canton, ne pouvait pas dans le passé légiférer en matière de changements de zones, ce qui était une aberration. Nous reprenons d'une certaine manière le pouvoir qui a été délégué à l'exécutif cantonal. Le principe de fond qui est proposé ce soir, c'est que des députés puissent proposer - et non imposer - des changements de zones, inviter et faire en sorte que l'exécutif mette en place ces plans de zones et revienne devant notre Grand Conseil pour qu'il tranche et décide. Je ne vois donc pas en quoi cela prétériterait le pouvoir des communes : cela donne simplement aux députés les mêmes possibilités que les communes !
Je saisis l'occasion pour dire que le but de l'amendement qui est proposé est simplement de définir la notion de motion de notre Grand Conseil, qui est aujourd'hui vague, et de rendre contraignante une telle motion proposée par un député.
M. Olivier Vaucher (L). Les préopinants Spinucci et Portier ont parfaitement évoqué la raison pour laquelle notre groupe, lui aussi, s'oppose très fermement à ce projet de loi.
M. Pagani ne semble pas comprendre qu'il représente une ingérence totale dans l'indépendance des communes. Je m'en étonne d'autant plus que certains députés des bancs d'en face sont les premiers à vouloir défendre l'autonomie communale. Pourtant, avec ce projet de loi, ils enlèvent les prérogatives des communes. Les prérogatives des communes sont déjà très peu nombreuses, et elles doivent conserver celles qui concernent l'aménagement de leur territoire. Ce n'est pas aux cent députés de ce Grand Conseil de s'occuper de l'aménagement du territoire. ! Nous risquerions de nous trouver dans une situation inextricable si nous donnions cette possibilité au Grand Conseil !
Notre position sera d'autant plus déterminée qu'une fois de plus la proposition d'amendement complémentaire est déposée en dernière minute par M. Pagani, et par l'Alliance de gauche !
Etant donné que l'Alliance de gauche n'est pas capable de faire son travail en commission et qu'elle présente de nouveaux amendements en plénum, je me vois obligé de demander un nouveau renvoi de ce projet en commission. Monsieur le président, je vous demande donc formellement de bien vouloir faire voter le renvoi de ce projet en commission pour étudier cet amendement.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S), rapporteuse. Les amendements qui sont proposés ne changent vraiment pas le fond. Ils ne font que modifier la forme. Il est donc tout à fait possible de les adopter sans renvoyer à nouveau ce projet en commission. Les discussions ont été faites. Nous pouvons concevoir que les groupes de droite ne soient pas d'accord, mais, je le répète, il ne s'agit pas d'enlever des prérogatives aux communes. Il s'agit seulement de donner des compétences supplémentaires au Grand Conseil, puisqu'il n'en avait pas en matière d'aménagement du territoire !
Les préopinants des bancs d'en face prétendent que nous voulons nous ingérer dans les affaires des communes : c'est faux ! Je ne vois pas l'utilité de la commission de l'aménagement qui est censée s'exprimer sur des modifications de zones, si nous n'avons pas les compétences nécessaires.
Je demande que nous puissions nous prononcer sur ces amendements qui sont, j'insiste, des amendements de pure forme.
Le président. Nous allons le faire, Madame, mais, auparavant, je dois soumettre à ce Grand Conseil la proposition de renvoyer ce projet de loi en commission.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet en commission est rejetée.
M. John Dupraz (R). Je suis très étonné par cette proposition d'amendement...
On peut admettre que les pouvoirs des députés soient étendus : à la limite, pourquoi pas ? Mais alors que chacun ici se pose en défenseur de l'autonomie communale, je ne vois pas pourquoi le Conseil d'Etat aurait l'obligation de déposer un projet de loi, quel que soit l'avis de la commune, simplement parce qu'une motion émanerait du Grand Conseil ou d'un député ! C'est véritablement une atteinte à l'autonomie des communes ! C'est profondément scandaleux !
La gauche veut s'arroger un pouvoir qui est dévolu avant tout à l'exécutif. Nous sommes des proposants, et je ne vois pas pourquoi, je le répète, le Conseil d'Etat aurait l'obligation de déposer un projet de loi s'il estime, après avoir entendu les personnes concernées, qu'il faut déposer une modification du régime des zones. Je trouve cela profondément scandaleux !
Déjà en matière d'autorisations de construire, on peut constater que les communes ne peuvent donner que des préavis, dont tout le monde se moque excepté le Conseil d'Etat, mais, lorsqu'il y a des procédures de recours, on ne tient compte que du préavis de la CMNS et on se moque bien des communes ! La proposition qui est faite ce soir est une insulte à l'autonomie des communes et à la responsabilité des magistrats dans les communes !
C'est pourquoi je propose un amendement à l'article 16, alinéa 4, qui consiste à biffer la phrase : «Si la modification des limites de zone fait suite à une proposition du Grand Conseil, le Conseil d'Etat est tenu de déposer un projet de loi...». Il faut que les choses soient claires : c'est au Conseil d'Etat d'apprécier s'il faut déposer un projet de loi, même si la demande émane d'un député ou de la commission d'aménagement ! Ainsi, l'égalité de traitement envers les communes sera respectée !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous interrompons nos travaux que nous reprendrons à 20 h 30 !
La séance est levée à 19 h.