Séance du
vendredi 23 juin 2000 à
17h
54e
législature -
3e
année -
9e
session -
36e
séance
No 36/VI
Vendredi 23 juin 2000,
après-midi
La séance est ouverte à 14 h 15.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Guy-Olivier Segond, président du Conseil d'Etat, Carlo Lamprecht, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
La présidente donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mmes et MM. Nicolas Brunschwig, Juliette Buffat, Bénédict Fontanet, Pierre Froidevaux, Jean-Pierre Gardiol, Luc Gilly, Alexandra Gobet, Claude Haegi, David Hiler et René Koechlin, députés.
3. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Suite du premier débat
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que vous deviez vous prononcer sur le renvoi de ce projet de loi en commission des transports.
M. Walter Spinucci (R). En tant que magistrat communal, je devrais me réjouir de ce projet de loi qui tend à augmenter l'autonomie communale. Mais nous avons une certaine logique dans les communes. Or, la procédure que vous nous proposez ne correspond pas à cette logique. Nous pensons que les deux projets de lois 8014 et 8148 devraient être traités simultanément. C'est la raison pour laquelle nous appuierons la demande de renvoi en commission des transports.
J'aimerais encore dire à l'intention de M. Brunier, qui se gargarise de l'autonomie communale et qui nous a rappelé l'existence des projets de lois visant à augmenter cette autonomie communale, que je mesure l'étendue de l'autonomie communale sur le terrain. Qu'avez-vous fait de cette autonomie communale dans le cas de la modification du régime de zone de Chêne-Bougeries, de Choulex ou encore de la commune de Cartigny ? Permettez-moi une expression un peu vulgaire : vous vous êtes assis dessus et c'est ce que nous regrettons !
La présidente. Je vous remercie, Monsieur le député. Je suppose que vous soutenez le renvoi en commission...
M. Walter Spinucci. Oui !
La présidente. Je vous rappelle que c'est sur le renvoi en commission que vous êtes invités à vous prononcer. Il n'est toutefois pas interdit de vous réchauffer un peu sur le fond du sujet !
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. Je répondrai rapidement aux différents arguments qui ont été invoqués, pour motiver le non-renvoi en commission.
Tout d'abord à propos de l'attaque contre la modération du trafic. Toutes les excuses mentionnées ont été avant tout invoquées parce que l'on ne veut pas modifier le trafic en ville. Vous savez que plusieurs villes suisses ont créé des zones piétonnes importantes. Les commerçants ont résisté au début, mais il en va différemment aujourd'hui. Je citerai comme exemple la ville de Neuchâtel. Les commerçants y sont très heureux. Non seulement les femmes peuvent aller faire leurs commissions avec leurs enfants sans avoir peur du trafic, mais de telles zones dynamisent en outre le commerce des villes qui tentent cette expérience.
La commission législative, qui n'est pas habituée à traiter des problèmes de transport, a été saisie de ce projet de loi en raison de l'étude des questions de compétences. Certains députés ont invoqué le fait que le canton ne serait pas compétent pour déléguer aux communes cette possibilité de décider en matière de zones piétonnes. C'est une erreur. Nous avons étudié de manière très consciencieuse ces problèmes, notamment la conformité au droit supérieur. J'ai annexé à mon rapport la lettre que nous avons reçue de l'office fédéral des routes, lequel précise bien que l'article 3, alinéa 3 LCR permet aux cantons d'interdire complètement ou de restreindre temporairement la circulation des véhicules automobiles et qu'une compétence peut effectivement être déléguée du canton à la commune.
Je me permets ensuite de répondre à M. Balestra, qui a défendu les commerçants avec beaucoup de verve. Vous êtes à la limite de l'article 24, Monsieur le député Balestra, puisque vos véhicules sont des ayants droit qui peuvent passer partout pour déménager et pour livrer ! Vous n'êtes donc pas concerné par ce projet de loi. Si vous voulez déménager des bureaux, vous pourrez accéder aux zones concernées. Si vous devez livrer, vous pourrez aussi y accéder. Une réserve est ainsi prévue dans la loi. Je tenais à rassurer M. Balestra, en lui précisant que son activité ne sera pas péjorée par ce projet de loi.
Enfin, vous avez invoqué le problème de la création de parkings au sous-sol de chaque immeuble. Vous oubliez - vous ne l'oubliez pourtant pas lors de certaines campagnes électorales - que cela engendrerait une augmentation du prix des loyers et de surcroît du prix des marchandises pour les consommateurs.
Ce projet de loi ne donne pas les mêmes compétences que le projet de loi soumis à la commission des transports. Il en est totalement indépendant. La seule chose que nous avons faite en commun, c'est l'annexe. Il s'agit d'un plan qui ne concerne que la Ville de Genève et non pas l'ensemble des communes. C'est la raison pour laquelle il peut tout à fait être voté de manière autonome. Il n'y avait ainsi pas à consulter l'Association des communes genevoises, la Ville de Genève étant seule concernée et ne disposant elle-même pas d'une hiérarchie de ses routes.
Je vous invite donc à voter ce projet de loi.
La présidente. Notre président étant de retour, je lui passe les rênes pour la suite de nos travaux.
Présidence de M. Daniel Ducommun, président
Le président. C'est vraiment dommage, parce que tout se passait très bien !
M. Gilles Desplanches (L). J'aimerais que les commerçants neuchâtelois, dont Mme Sayegh nous a parlé, puissent être auditionnés à la suite du renvoi du projet en commission. Ils pourront ainsi expliquer comment ils ressentent les contraintes au niveau de la circulation.
J'aimerais également préciser, afin peut-être de rassurer tout le monde et surtout de légitimer ma demande de renvoi en commission, qu'une pétition a été formulée par les milieux du commerce et les milieux économiques. Cette pétition parle de mobilité. Je vais vous en lire les cinq invites principales. Vous verrez que ce n'est pas du pro-bagnoles. Les personnes qui l'ont rédigée et qui la font actuellement circuler - cette pétition sera diffusée dans les commerces au cours des prochains jours - le font dans un but de cohérence totale. Je vous donne lecture des invites de cette pétition : « Développer une politique de transport sauvegardant le trafic de proximité, tenir compte des intérêts économiques dans les décisions en matière de circulation, assurer une politique cantonale des transports cohérente, sauvegarder les places de stationnement existantes et l'accès à ces dernières, augmenter les places de stationnement à proximité des commerces. » Mesdames et Messieurs les députés, vous ne pouvez pas être contre cette pétition.
Je vous demande instamment, pour sauvegarder le tissu commercial et surtout les petits commerces, ceux qui m'importent le plus, de renvoyer le projet de loi en commission, afin que l'on puisse travailler, afin que l'on puisse auditionner les commerçants, plus particulièrement les commerçants neuchâtelois. C'est une demande qui ne vous engage pas à grand-chose, puisque l'on traitera certainement cet objet au mois de septembre. Mais un tel renvoi donnerait une certaine légitimité à la démarche. Et il signifiera surtout que le Grand Conseil prend en compte la vie des commerces de détail, la vie de ceux qui vivent du commerce de détail et de ceux qui croient en une profession. Merci d'avance pour eux !
M. John Dupraz (R). Je suis un peu surpris de voir M. Grobet figurer sur la liste des auteurs de ce projet de loi. En ce qui concerne les problèmes d'aménagement du territoire, nous savons en effet que M. Grobet a plutôt été un centraliste...
Une voix. Comme Dupraz !
M. John Dupraz. Exactement ! Comme Dupraz ! Il n'a jamais été favorable, pour une question de cohérence de l'aménagement du territoire, à la distribution de compétences au niveau des communes. Je crois qu'il en va de même en matière de circulation et de zones piétonnes.
Ce projet de loi constitue en fait plus une opération commando législative destinée à renforcer les pouvoirs de M. Ferrazino en Ville de Genève suite au projet qu'il a présenté à la presse. Si l'on donne ces pouvoirs à M. Ferrazino, pour lequel les zones piétonnes constituent un moyen de lutter contre les bagnoles, on peut être assuré de la désertification de la Ville. Elle deviendra une réserve d'Indiens. Les entreprises vont partir.
Tout à l'heure, Mme la rapporteuse a fait référence à Neuchâtel. Je vous rappelle qu'une autoroute y traverse la ville, ce qui n'est pas le cas chez nous. On y trouve aussi des parkings. Si vous voulez mener une telle politique chez nous, nous devons développer en parallèle une politique active de parkings près des commerces, au risque sinon de tuer cette activité. Il est cependant vrai que l'activité économique préoccupe peu M. Ferrazino, ancien militant de la Ligue marxiste révolutionnaire qui voulait faire sauter la planète. Maintenant qu'il est au pouvoir, il cherche par d'autres moyens à paralyser l'économie de ce pays. C'est pourquoi je pense, Monsieur le président, qu'il est urgent d'aller en commission et de reprendre ce projet, néfaste, portant préjudice aux intérêts de la cité et de ses habitants. Il ne sert que les intérêts égoïstes de quelques élus souhaitant se mettre en valeur.
M. Jean Rémy Roulet (L). Juste quelques remarques. La première à Mme Sayegh. L'article 24 s'applique certes à mon ami transporteur Balestra, mais peut-être aussi à vous-même, en tant que piétonne ! Je crois en fin de compte que nous sommes tous concernés, dans cette séance, par l'article 24. C'est ma première remarque.
Ma deuxième remarque me permet d'enchaîner sur l'intervention de l'excellent pâtissier Gilles Desplanches. J'ai ici trois cents feuillets d'une pétition, munis de huit signatures par feuillet, ce qui fait 2 400 signatures. Si pour vous, Mesdames et Messieurs d'en face, vox populi égale vox dei, je vous demande simplement de renvoyer ces projets et d'attendre la pause d'été pour travailler sereinement et pour mesurer le poids de la décision que vous vous apprêtez à prendre.
J'ajouterai encore une chose. La Ville de Genève a perdu 15 000 emplois en dix ans, non seulement dans le secteur du commerce de détail, mais également dans le secteur tertiaire. Ce n'est donc pas uniquement le commerce de détail qui est visé par ces projets de lois, mais tout un tissu économique citadin.
En conclusion, je constate que la ville de Lausanne, qui a su, elle, précéder ce qui risque de se passer à Genève en terme de mobilité et d'interdiction de mobilité, a perdu ces dernières années 400 entreprises, dont de nombreux commerces. J'espère que ces quelques chiffres auront frappé vos esprits et je vous invite donc à repousser l'ensemble de ces projets et à voter le renvoi en commission.
M. Pierre Ducrest (L). Je ne serai pas long sur le renvoi en commission. Je reviens simplement sur les propos de Mme Sayegh. Vous orientez le navire à votre gré, même si ce n'est pas sur le lac de Neuchâtel ! Il n'est pas normal, Madame, de dire que le plan fourni à la commission législative et à la commission des transports, plan qui n'a jamais été approuvé, ne situe la chose qu'en Ville de Genève. Il se trouve par hasard qu'il n'y a pas de hiérarchie des routes en Ville de Genève. Mais l'on parle de la même chose pour toutes les communes. Par conséquent, comme ce plan fait partie du projet de loi qui parle de toutes les communes, la boucle n'est pas bouclée et il faut poursuivre, sur ce plan, la discussion en commission des transports.
M. Christian Ferrazino (AdG). Mesdames et Messieurs... (L'orateur est interpellé.) Monsieur Balestra, vous direz cela à Mme Hagmann lorsqu'un projet concernant Vandoeuvres sera traité dans cette assemblée !
Je voulais tout d'abord répondre à M. Dupraz pour lui dire que je n'ai pas besoin qu'il me donne le pouvoir, puisque la population l'a démocratiquement fait avant lui. Voyez-vous, Monsieur Dupraz, elle savait d'autant mieux ce qu'elle faisait qu'elle m'a élu sur la base d'un programme politique ! Et ce programme politique, voulu par les électeurs, est en train de se réaliser. C'est peut-être cela qui vous chagrine. Je peux le comprendre, mais vous devez à votre tour l'admettre, ce d'autant plus que ce n'est pas seulement la politique de celui qui vous parle qui est appliquée, mais la politique du Conseil administratif de la Ville de Genève. Je vous rappelle en effet que le plan piétons a été présenté, non pas par mon département, mais par le Conseil administratif lui-même, qui se reconnaît pleinement dans cette politique. J'espère que le Conseil municipal, Monsieur Dupraz... (L'orateur est interpellé.) Calmez-vous un peu, Monsieur Dupraz, vous aurez l'occasion de me répondre. J'espère donc que vous pourrez très prochainement constater que le Conseil municipal, démocratiquement élu, pas par vous il est vrai, pourra donner à son tour son aval à ce plan piétons.
On nous dit que les compétences générales doivent rester au canton. M. Dupraz s'étonne que nous puissions tenir un autre discours. Eh bien, non, Monsieur Dupraz, nous nous rejoignons ! C'est parce que nous avons également pour objectif de faire en sorte que le canton conserve des compétences générales que nous avons proposé ce projet de loi, dont la modestie ne vous aura pas échappé. Mais il y a apparemment une confusion dans votre esprit. Il est donc nécessaire de la lever immédiatement.
Pourquoi les compétences entre les communes et le canton seront-elles respectées ? Précisément parce que les seules compétences que les communes obtiendront avec ce projet de loi visent des voies de circulation à l'intérieur des quartiers. La compétence du canton est bien évidemment d'assurer la circulation sur les grands axes et de prendre des mesures de vitesse, sur ces grands axes et non pas à l'intérieur des quartiers. Par conséquent, nous n'avons pas voulu, ni demandé de compétences qui doivent manifestement rester au niveau cantonal. M. Ramseyer le sait bien. Nous en avons suffisamment parlé ensemble. Mais M. Ramseyer et ses services ne peuvent pas s'occuper de toute la problématique des petites rues de desserte à l'intérieur des quartiers. Le département n'en a pas les moyens matériels.
Nous constatons aujourd'hui que certaines compétences demeurent au canton, canton qui n'a ni la volonté, ni la possibilité de les mettre en oeuvre. Il y a un défaut de compétences au niveau des communes, qui ont non seulement la possibilité, mais aussi la volonté de les mettre en oeuvre. Par conséquent, un renvoi en commission serait bien évidemment totalement dilatoire, dans la mesure où, Monsieur Desplanches, les pétitions que vous faites remplir à ceux qui viennent manger des pâtisseries dans vos magasins, on en a pris note ! (Brouhaha.) Nous sommes prêts... (L'orateur est interpellé.) Mais oui, Monsieur Halpérin ! Je ne vous suis plus, Monsieur Halpérin ! Il n'est pas péjoratif de manger des pâtisseries. Vous avez tout à fait le droit de manger des pâtisseries. Je vous conseille d'ailleurs de le faire ! Je dirais même à M. Halpérin de manger davantage de pâtisseries plutôt que de rédiger des pétitions. Vous excellerez certainement tout aussi bien dans le première démarche que dans la seconde !
Nous avons eu l'occasion de prendre connaissance de votre pétition. Vous êtes d'ailleurs là pour nous répéter un discours assez coutumier dans cette enceinte dès que nous abordons ce genre de problématique. Nous n'avons cependant pas attendu que M. Desplanches vienne dans ce Grand Conseil pour entendre ce discours. Si vous reprenez les débats qu'il y a eu dans cette enceinte il y a douze ou quinze ans environ, au moment où l'on parlait de la fermeture de la place du Molard, vous constaterez que les personnes assises sur les bancs qu'occupe actuellement M. Desplanches expliquaient que les commerçants du Molard allaient être égorgés par la création d'une zone piétonne à cet endroit.
Je comprends que certains aient tenu ce discours à l'époque, puisque l'on ne pouvait alors pas prendre comme exemple un autre lieu pour montrer qu'une place piétonne permettait aux commerçants de s'y retrouver. A cette époque, la crainte pouvait par conséquent être légitime. Mais, Monsieur Desplanches, douze ans plus tard, vous devriez quand même aller voir les commerçants de la place du Molard. Ce sont aujourd'hui les premiers à applaudir le statut piétonnier de cette place. (Brouhaha.) Nous sommes prêts à entendre vos doléances, Monsieur Desplanches, mais nous sommes prêts à les entendre d'un point de vue pratique et constructif. Si vous voulez réitérer un discours idéologique... (Brouhaha.) ...vous perdrez non seulement votre salive, mais vous perdrez aussi votre énergie, Monsieur Desplanches !
Il y a une réelle volonté de la part de la Ville de Genève d'associer l'ensemble des intéressés et des partenaires, y compris les commerçants. Cette concertation-là est toujours ouverte, vous le savez, lors de chaque projet présenté par la Ville de Genève.
A présent, cessons peut-être de discuter et passons aux actes ! Vous êtes très forts au niveau de la discussion, peut-être un peu moins au niveau des actes et de la réalisation. Par conséquent, Monsieur le président, un renvoi en commission ne ferait que retarder davantage ce transfert de compétences que certaines communes appellent de leurs voeux. Donnons aujourd'hui la possibilité à ces communes de pouvoir réaliser ce que beaucoup attendent au sein de la population et qui ne se fait pas !
Le président. Quatre intervenants sont encore inscrits. La liste des intervenants sera alors close, tout le monde ayant pu s'exprimer. Nous passerons ensuite au vote.
Mme Janine Hagmann (L). Demander le renvoi en commission ne constitue absolument pas une mesure dilatoire. Ceci dit, je signale que la présidente de la commission des transports, Mme Briol, a pris la peine d'envoyer un questionnaire à toutes les communes. Celles-ci ont beaucoup apprécié que leur avis soit sollicité. Les communes doivent en effet pouvoir se déterminer.
Ce plan n'est pas définitif. Je sais que vous devenez, en ce moment, spécialistes des décisions prises avant d'avoir obtenu en retour les questionnaires adressés tous azimuts. Dans le cas d'espèce, il serait vraiment ridicule de faire du forcing. Je crois que tous les magistrats siégeant dans cette enceinte, à part vous, Monsieur Ferrazino, sont absolument d'accord et me suivent dans ma demande de renvoi en commission. Au nom des magistrats siégeant dans cette enceinte, je vous demande donc de renvoyer ce projet en commission.
Le président. Monsieur Desplanches, vous vous êtes déjà exprimé trois fois ce soir. Nous considérons cependant que vous avez été interpellé. Vous avez donc un droit de réponse.
M. Gilles Desplanches (L). J'aimerais répondre à la remarque relative à l'article 24. M. Ferrazino nous parle très clairement des commerçants. Je crois cependant que vous ne faites pas référence, Monsieur Ferrazino, en matière de commerce. Si vous faisiez référence en cette matière, vous tiendriez un discours différent. Si vous étiez soucieux du commerce de détail, vous auriez pris soin d'auditionner ces commerçants ou vous demanderiez que ceux-ci soient auditionnés. Vous vous comportez au contraire comme un fossoyeur de l'économie et comme un tueur du commerce de détail ! Vous voulez travailler dans l'urgence. Nous avons compris pourquoi ! Vous ne voulez pas qu'un référendum soit lancé et que celui-ci soit traité après l'été. Si vous étiez vraiment sûr de votre coup, si vous étiez vraiment convaincu de votre fait, Monsieur Ferrazino, si vous travailliez en réalité pour l'intérêt de Genève et pas simplement pour vos intérêts personnels, vous attendriez le mois de septembre, vous mettriez tout cela à plat, on en parlerait en commission des transports et on travaillerait pour l'intérêt public général, pas simplement pour vos intérêts particuliers.
M. Jean Rémy Roulet (L). Juste une correction de fait à l'intention de M. Ferrazino, que je remercie d'ailleurs d'avoir fait de la publicité pour le meilleur pâtissier de la République ! Les 2 000 signatures que nous avons récoltées jusqu'à présent l'ont été en l'espace de 48 heures, ce dans tous les milieux socio-professionnels du canton et pas seulement en Ville de Genève. Je crois donc encore une fois que vous auriez intérêt à modérer vos ardeurs et à attendre sagement la pause de l'été pour reprendre ce dossier en septembre.
M. Michel Balestra (L). Je ne vais pas reprendre ce que j'ai dit tout à l'heure sur le fond. Au niveau de la technique parlementaire par contre, j'aimerais quand même que nous réfléchissions cinq minutes sur ce que nous devons faire. Cela concerne le renvoi en commission au sens strict.
Mesdames et Messieurs les députés, je rappelle qu'il y a deux projets de lois. Le projet de loi 8148 vise à déléguer la compétence de la modération du trafic aux communes et le projet de loi 8014 vise à déléguer la compétence de réaliser des zones piétonnes aux communes. L'un de ces projets de lois a été renvoyé à la commission législative, afin qu'elle détermine sa conformité au droit supérieur, l'autre projet est pendant devant la commission des transports, qui discute de son opportunité, de la portée réelle de la modération du trafic et de la nécessité de procéder à des auditions. Les deux projets ont des dispositions légales qui s'appuient sur un plan. Ce document est tiré du plan « Circulation 2000 ». Il vise à identifier le réseau secondaire communal, parce que toutes les routes de la Ville de Genève sont communales. La réflexion relative à ce plan, dans le cadre de la commission des transports, n'a pas encore abouti.
La proposition que je vous soumets n'est pas une mesure dilatoire. Nous nous étriperons politiquement sur le fond de ces deux projets. Mais ne votons pas un projet qui s'appuie sur un plan tiré de la commission des transports, que celle-ci, qui réfléchit sur le fond, ne considère pas comme étant abouti et qu'elle continue à négocier avec les opérateurs extérieurs ! Pour le surplus, vous êtes maîtres des ordres du jour des commissions et du Grand Conseil. Vous l'avez prouvé pas plus tard qu'hier soir. Je vous propose donc de laisser aux citoyens genevois le temps de s'exprimer, de manière à ne pas commettre d'erreur. De toute façon, si vous n'acceptez pas ce renvoi en commission, je pense que le chef du département aura la lumineuse idée de ne pas demander le troisième débat. Ainsi, ce projet sera quand même reporté au mois de septembre. Mais avec une différence : si vous le renvoyez à la commission des transports, vous pourrez dire que vous êtes démocrates ; si vous ne le faites pas, nous serons obligés de dire que vous ne l'êtes pas !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je soumets au vote la proposition de renvoi de ce projet de loi à la commission des transports.
Mis aux voix, le renvoi du projet à la commission des transports est rejeté.
M. Gérard Ramseyer. Au-delà du débat de fond se pose une question simple de méthode de travail et de respect des règles démocratiques. Le projet de loi 8014 est étroitement lié au projet de loi 8148. Le premier modifie la loi sur le domaine public, le second modifie la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière. Le premier vise à créer des zones piétonnes, le second vise à édicter des mesures d'interdiction ou de restriction de circulation. Ces deux projets sont d'autant plus liés qu'ils ont un plan commun. Le premier projet est sorti de commission. C'est celui qui fait l'objet de la présente discussion. Le second projet est en consultation avec le plan. Il est donc parfaitement possible, voire même probable, que le plan en consultation revienne avec des propositions de modification, ce qui serait évidemment la moindre des choses pour toutes les communes suburbaines jouxtant la Ville de Genève. C'est la raison pour laquelle il aurait été souhaitable que ces deux projets de lois soient débattus ensemble avec un plan qui soit le même pour les deux projets de lois, sans quoi nous serons appelés à devoir rediscuter du projet de loi 8014 à la lumière du résultat de la consultation sur le projet de loi 8148. La sagesse eût voulu que nous en discutions en commission. Vous en avez décidé autrement. Je ne demande pas le troisième débat. (Applaudissements.)
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Le président. Le texte du projet de loi figure à la page 8 du rapport. Une erreur s'est glissée dans le numéro du projet : il s'agit bien du projet de loi 8014 et non 8015.
Mis aux voix, ce projet est adopté en deuxième débat.
Le président. Le troisième débat n'étant pas demandé, cet objet est renvoyé à une séance ultérieure.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Actuellement, face au nombre croissant de détentions de jeunes à la prison de Champ-Dollon et au manque de solutions alternatives à l'internement, la nécessité de mettre à disposition des lieux de détention réservés exclusivement aux mineurs est devenue urgente.
Rappelons pour mémoire qu'un nouveau bâtiment de détention de mineurs vient d'être construit à la Clairière, à la suite du crédit libéré par le Grand Conseil à cet effet, mais la capacité de celui-ci n'est pas beaucoup plus importante que celle de l'ancien bâtiment, soit une vingtaine de détenus. De sorte que la Clairière ainsi que les foyers de placement pour jeunes délinquants doivent continuer à sélectionner les entrées de manière drastique et discriminatoire, avec pour conséquence que des mineurs continuent à être emprisonnés à Champ-Dollon. De plus, il semble qu'une incarcération à la prison de Champ-Dollon, même si elle est contrôlée, soit vécue comme valorisante par les adolescents face à leurs camarades, ce qui peut ainsi créer, sur le long terme, des dommages plus grands encore.
Or l'établissement de Champ-Dollon n'est prévu légalement que pour l'accueil exceptionnel de mineurs. Pourtant, en 1998, il a accueilli 115 mineurs de 15 à 18 ans (filles et garçons) et actuellement encore ces chiffres n'ont pas beaucoup variés. De plus, cet établissement ne dispose ni d'équipement ni de ressources humaines pour gérer une prise en charge adéquate.
Ce travail ne peut être entrepris que par des éducateurs spécialisés capables d'offrir, au sein d'une structure adaptée, un appui éducatif et des activités utiles dans la perspective d'une future vie d'adulte.
C'est pourquoi, la présente motion entend s'opposer à l'affectation prévue de l'ancien bâtiment de la Clairière à des détenus sous régime de mesures de contrainte et a pour but que celui-ci conserve son affectation de maison de détention pour mineurs afin d'augmenter la capacité de la Clairière et par là éviter la détention de mineurs, sauf cas exceptionnels, à Champ-Dollon.
Nous tenons à signaler pour terminer que nous ne sommes pas les premiers à nous inquiéter de la situation des mineurs incarcérés à Champ-Dollon et que le groupe GEODE (groupe d'étude et d'observation des droits de l'enfant) publiait il y a plus d'une année un rapport alarmant à ce sujet.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous réserverez un bon accueil à la présente motion.
Débat
M. Rémy Pagani (AdG). Je constate que le débat précédent a été passionné. Le présent débat ne devrait pas l'être moins. Il concerne les ados et les mineurs, plus d'une centaine par année, enfermés dans un établissement pour adultes. J'entends par là la prison de Champ-Dollon. J'avais interpellé Mme Brunschwig Graf et M. Ramseyer au mois de décembre de l'année passée, et même bien avant, pour leur demander ce qu'ils comptaient faire pour mettre un terme à ce non-sens et à cette aberration consistant à placer ensemble des délinquants mineurs et des adultes plus aguerris. Il m'avait été répondu que le département de l'instruction publique envisageait toutes les solutions pour mettre un terme à cette situation. D'autre part, j'avais aussi interpellé voici quelques mois M. Ramseyer dans les couloirs de ce parlement pour lui demander si le phénomène était encore d'actualité. M. Ramseyer avait alors indiqué qu'il n'y avait plus que quatre ou cinq mineurs à Champ-Dollon, alors que les derniers éléments dont je dispose montrent que la statistique n'a pas baissé. On est toujours au niveau d'une centaine d'adolescents par année qui sont malheureusement envoyés à Champ-Dollon, parce que nous ne satisfaisons pas à la demande, si j'ose dire, au besoin d'éducateurs dans notre République.
Nous estimons que cette situation est intolérable. Je demande d'ailleurs la lecture de deux lettres à ce sujet, qui nous ont été adressées par la Ligue suisse des droits de l'homme et par la commission d'enquête que nous avons mise sur pied pour ce qui concerne l'ensemble des affaires de Champ-Dollon. Ces deux lettres réclament à cor et à cri les mesures que nous allons adopter ces prochains mois. La situation est la suivante. Nous avons besoin d'un signe politique fort. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter la motion et de la renvoyer telle quelle au Conseil d'Etat, parallèlement au renvoi en commission du projet de loi 8268 visant à interdire purement et simplement la détention de jeunes mineurs à Champ-Dollon et à imposer au département concerné des modalités concrètes d'application de façon à mettre un terme à cette aberration. Ce projet de loi devrait être traité en urgence à la commission judiciaire. Nous pourrions alors envisager l'utilisation de l'ancienne Clairière, sa mise en conformité. L'ancienne Clairière serait ainsi utilisée en synergie avec la nouvelle Clairière, entrée en fonction ces derniers jours. Nous pourrions réaffecter l'ancienne Clairière à la prise en charge de ces mineurs.
Le président. Nous procédons comme convenu à la lecture, demandée par M. Pagani, des lettres adressées au Grand Conseil par la commission d'experts instituée par la résolution R 413 et par la Ligue suisse des droits de l'homme.
Commission d'experts, p. 1
p.2
Ligue des droits de l'homme
Mme Christine Sayegh (S). Le droit pénal des mineurs et la maîtrise de ce droit sont très importants pour notre société. Le rôle du juge des mineurs n'est pas un simple rôle de juge pénal. Il doit en effet aider les jeunes à s'insérer socialement. Il ne s'agit pas d'une réinsertion, mais d'une insertion sociale. C'est même une justice souvent négociée. La privation de liberté concerne ici les adolescents, les jeunes âgés entre 15 et 18 ans, voire 14 ans, parfois les enfants dans quelques cas graves et pour les besoins de l'instruction. Cette mesure de privation de liberté peut avoir des conséquences importantes sur le psychisme de ces jeunes personnes. C'est la raison pour laquelle il leur faut non seulement un encadrement, mais il leur faut également des lieux appropriés. Nous constatons aujourd'hui, lorsque des jeunes sont détenus à Champ-Dollon, qu'ils se mettent en fin de compte en valeur du fait d'avoir été privés de liberté dans un établissement accueillant des majeurs. C'est grave. Cela signifie que la mesure éducative ou la prévention ne sont pas du tout respectées, ni réalisées. En cas de promiscuité avec les majeurs, leur exemple attire le jeune, parce qu'il ne peut pas résister au majeur qui le domine en âge et en expérience. Et lorsque l'expérience se situe au niveau de la délinquance, c'est grave !
C'est la raison pour laquelle il est urgent de ne plus placer de jeunes mineurs à Champ-Dollon, ou très exceptionnellement lorsqu'il n'y a vraiment pas de place ailleurs et qu'ils ont près de 18 ans. Cela doit cependant rester une exception.
Vous avez sans doute lu le rapport du pouvoir judiciaire genevois. Nous enregistrons très peu de récidives. Nous parvenons à encadrer tous ces jeunes qui, souvent, lorsqu'ils ont commis une infraction pénale, reflètent avant tout un malaise dans leur intégration sociale.
Je crois savoir que M. le conseiller d'Etat Gérard Ramseyer acceptera cette motion. Je souhaiterais, même s'il doit s'agir d'une situation temporaire pour la Clairière puisqu'il y a d'autres engagements à respecter, que celle-ci soit laissée à la disposition de la détention des mineurs, quitte à trouver une autre solution par la suite. Il ne faut pas en rester à la situation actuelle, qui s'avère vraiment dramatique, notamment le week-end pour les juges de permanence.
M. Olivier Vaucher (L). Notre groupe a précédé cette motion depuis plusieurs mois déjà, voire depuis une année. Nous avions alors expliqué qu'il serait indispensable de prendre des dispositions pour que la Clairière, qui a bénéficié à l'époque d'un budget d'agrandissement et dont les travaux sont malheureusement à présent terminés, fasse l'objet d'une réflexion globale. Tous les moyens étaient à disposition pour pouvoir y aménager davantage de chambres. On n'a pas voulu le faire pour différentes raisons. Nous le regrettons vivement. En effet, permettre à des jeunes de côtoyer les grands du crime à Champ-Dollon, pour rouler ensuite des mécaniques vis-à-vis d'autres jeunes, c'est peut-être une bonne chose pour certains, mais il serait préférable qu'ils bénéficient d'un programme socio-éducatif à la Clairière. Notre groupe ne peut donc que soutenir une motion comme celle-ci, ce d'autant plus que le conseiller d'Etat en charge du département concerné a déjà fort bien avancé dans les travaux allant dans ce sens-là.
Je voulais juste rappeler que nous nous étions préoccupés de ceci bien antérieurement à cette motion.
M. Gérard Ramseyer. Il va de soi que cette motion est la bienvenue. Mais j'aimerais attirer votre attention sur le fait que ce parlement ne peut pas voter tout et son contraire en trois ans. Je m'explique.
A la demande du Tribunal de la jeunesse et de l'office fédéral de la justice, nous avions à l'époque transformé Montfleury pour favoriser la mixité au niveau de la détention des mineurs. Pourquoi ? Parce que cet établissement permettait ce type de détention et parce que c'était celui qui offrait le plus de places et les meilleures possibilités d'accompagnement psycho-social. La renonciation à utiliser l'actuelle Clairière pour la détention des mineurs s'imposait notamment par le fait que les installations sanitaires dans les cellules ne correspondaient pas aux règles pénitentiaires usuelles en Europe et que l'on ne pouvait plus, à terme, détenir des mineurs dans cette maison. Ce constat est toujours d'actualité. Alors pourquoi a-t-on utilisé la Clairière pour autre chose ? C'est parce que la Clairière est adaptée à la détention administrative des étrangers moyennant quelques modifications des volumes. Ce type de détention ne requiert pas que les cellules soient fermées. On peut par conséquent avoir accès à des installations sanitaires communes dans les couloirs, ce qui n'est pas possible si ce sont des cellules fermées.
C'est pour cette raison que Genève s'est engagée depuis longtemps à mettre l'établissement de la Clairière à disposition du concordat romand sur l'exécution de la détention administrative des étrangers. Ce concordat est signé, nous avons requis l'avis du Tribunal de la jeunesse, nous avons transformé la Clairière en lieu de détention administrative. Ce lieu de détention administrative est actuellement subventionné à hauteur de 85 % par la Confédération et ce subventionnement ne porte que sur l'établissement dans sa destination de détention administrative. Alors, Madame la députée, autant j'applaudis la motion, autant j'aimerais immédiatement vous faire part de mes doutes quant à l'emploi de la Clairière. A ma connaissance, mais je vais le vérifier, la transformation est terminée. Le concordat est signé et les travaux ont en partie déjà été subventionnés par la Confédération.
Nous avons très certainement d'autres possibilités, peut-être dans d'autres maisons ou alors dans le cadre de la réforme qui se conduit actuellement au niveau de la prison pour trouver un bâtiment juxtaposé qui permettrait de répondre positivement à votre demande.
J'aimerais apporter encore un élément de réponse à M. Pagani, lequel explique que, selon ses propres renseignements, les chiffres que je cite, datant de trois mois, ne sont pas justes. Ce qui est stupide. Les chiffres changent en effet tout le temps. Nous avions peut-être cinq ou dix mineurs il y a trois mois. Il y en a peut-être trente aujourd'hui et il n'y en aura peut-être plus que sept la semaine prochaine. Le nombre de détenus change tous les jours. On ne peut donc pas dire tout d'un coup qu'il y a une situation de crise. Cette situation, extrêmement évolutive, est connue depuis plusieurs années à Genève.
En conclusion, oui à la motion, oui à l'effort que vous soutenez et que nous avons déjà entrepris depuis plusieurs mois. Merci au soutien que vous apportez à la réforme de la prison que nous conduisons actuellement à Champ-Dollon, mais aussi dans les maisons de détention. En commission, nous pourrons aisément voir s'il n'y a pas une solution plus intelligente que celle de casser une deuxième fois une maison que l'on vient de réaménager. Je pense que vous êtes tous d'accord pour que nous en discutions paisiblement et sereinement, mais avec conviction, en commission.
M. Rémy Pagani (AdG). Merci pour les informations qui nous sont données. Simplement, notre volonté était bien évidemment de discuter très rapidement de ce problème en commission judiciaire. Toujours est-il qu'il n'y a pas, pour nous, des hauts et des bas. Il y a une moyenne depuis trois ans, qui est à peu près de 100 à 120 jeunes qui passent à Champ-Dollon. C'est inadmissible. Je parle de chiffres sur l'année. Au niveau des informations à ma disposition, en ce qui concerne l'ancienne Clairière, les travaux de démolition intérieure de ce bâtiment vont commencer. Je propose de les laisser se poursuivre. Que l'on décide que ce soit pour les mesures de contrainte ou que ce soit pour y remettre des jeunes, l'ancienne Clairière n'est plus adaptée, ni pour les uns , ni pour les autres. En septembre, nous aurons tout loisir de discuter ensemble de l'avenir de ce lieu et de voir, comme vous le proposez, si d'autres lieux pourraient être mis à la disposition des jeunes. Nous pourrons bien évidemment, vu l'avancement des travaux de l'ancienne Clairière, décider aussi de son affectation, car les travaux de reconstruction interne ne devraient, à ma connaissance, pas commencer avant septembre ou octobre. Si vous êtes d'accord, on en restera là.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1359)
sur la détention de mineurs dans des lieux adaptés
La commission a examiné avec attention la pétition intitulée « Demande de faire justice » de M. M'hamed Yassine lors de ses séances des 15 et 22 mai 2000, sous la présidence de Mme Louiza Mottaz. Nous avons écouté le pétitionnaire accompagné de M. Dario Lopreno, directeur du service des réfugiés de l'Entraide Protestante (EPER), puis la juriste de l'Office cantonal de la population (OCP), Mme Annie Cupillard Ladame. Le texte de la pétition est reproduit ci-après :
Pétition(1302)
Demande de faire justice
Mesdames etMessieurs les députés,
Je me permets de vous écrire après quatre ans de silence pour vous dévoiler une injustice à mon égard.
Je suis résident depuis 11 ans en Suisse, je me suis marié en 1994, j'ai une licence en droit, et depuis 1997, ma femme faisait la navette entre la Suisse et son pays d'origine (Portugal).
L'Autorité cantonale m'a refusé l'autorisation de séjour estimant qu'il y a suffisamment d'indices que c'est un mariage de complaisance.
J'étais officier à l'Armée Nationale Algérienne, et j'étais cadre supérieur d'une entreprise.
L'Autorité cantonale me demande de quitter la Suisse, alors que ma vie est en danger depuis mon départ en 1989.
Revenant au fait; l'Autorité cantonale m'a demandé pourquoi le bail de l'appartement est uniquement sur mon nom, la régie avait répondu qu'elle était étonnée de cette interpellation.
On me demande encore pourquoi mon épouse effectue des déplacements fréquents au Portugal ; le médecin traitant a répondu à cette question : que mon épouse, suite à sa maladie, nécessite des retours au pays pour sa santé.
Je me demande pourquoi l'Autorité cantonale s'acharne contre moi, alors que depuis 11 ans, j'ai une bonne moralité, et j'ai un casier judiciaire vierge, et je demande à toutes ses instances de faire justice.
Dans l'attente d'une réponse de votre part, je vous prie d'agréer, Messieurs, l'expression de mes sentiments respectueux.
Audition du pétitionnaire, M M'hamed Yassine, accompagné par M. Dario Lopreno, directeur du service des réfugiés de l'Entraide Protestante (EPER)
M. Yassine est arrivé à Genève en 1989. Son départ de son pays, l'Algérie, a été motivé par la crainte d'éventuelles représailles à son encontre. En effet, il était officier de gendarmerie lorsqu'il a refusé de servir, mobilisé pour aller réprimer (munitions et armes à l'appui), une manifestation en octobre 1988 qui s'est en fait terminée dans la violence. Résidant à Genève depuis onze ans, M. Yassine y a poursuivi des études universitaires durant quelques années et s'est marié avec une personne d'origine portugaise, détentrice d'un permis C. Il a par ailleurs toujours subvenu à ses besoins par ses propres moyens, c'est-à-dire un emploi.
Déserteur de l'Armée Nationale Algérienne, le pétitionnaire se trouve aujourd'hui dans une situation très délicate. La relation avec son épouse s'étant dégradée, celle-ci a tout d'abord effectué de fréquents déplacements vers son pays d'origine, pour finir par s'y établir en 1997. Leur mariage étant dissout dans les faits sinon dans les formes, elle a donc perdu son permis d'établissement, son conjoint de même. Le renvoi de M. Yassine au Portugal ne résoudrait en rien sa situation, étant donné qu'une procédure de divorce serait probablement engagée et qu'il devrait donc aussi quitter ce pays où il n'a en fait jamais résidé.
Arrivé au terme d'une longue procédure de recours, son mandant ayant été débouté par l'Office fédéral des étrangers, M. Yassine est donc contraint de quitter le territoire suisse. A noter pourtant qu'il n'a jamais effectué de demande d'asile, mais pensait pouvoir rester vivre en Suisse sans avoir à justifier les motifs de sa fuite. Or, si l'on se réfère aux rapports d'Amnesty International sur la situation algérienne, en tant que déserteur, le pétitionnaire risque entre dix et vingt ans de prison. D'autre part, tous les rapports signalent que parmi les disparus figurent de nombreux officiers de l'armée.
Audition de Mme Annie Cupillard Ladame, juriste de l'Office cantonal de la population (OCP)
Faisant un bref rappel du parcours du pétitionnaire, Mme Cupillard Ladame précise ce qui suit : M. Yassine a bénéficié d'une autorisation de séjour pour études entre 1991 et 1994, mais n'a pas terminé son cursus universitaire. Il s'est marié en décembre 1994 et a obtenu une autorisation de séjour afin de pouvoir vivre auprès de son épouse. En date du 29 mai 1997, l'OCP a conclu que Mme Yassine ne vivait plus en Suisse et qu'elle était retournée dans son pays. En conséquence, il a été prononcé la caducité de son autorisation d'établissement ; le renouvellement de l'autorisation de séjour a donc été refusé à M. Yassine. Ces deux décisions ont été confirmées par la Commission cantonale de recours en matière de police des étrangers le 15 décembre 1998. Cette double décision a fait l'objet d'un recours de droit administratif auprès du Tribunal fédéral (TF). Ce dernier a confirmé la décision de caducité d'une part et déclaré irrecevable le recours de M. Yassine, ce dernier n'ayant aucun droit au séjour lui donnant la possibilité de recourir auprès de cette instance. Aussi, en date du 29 mai 1997, toutes les voies de recours avaient été épuisées dans cette affaire, raison pour laquelle l'OCP a signifié à M. Yassine qu'il devait quitter la Suisse, assorti d'un délai de départ. Le premier juillet 1999, enchaîne la juriste, M. Yassine, par l'intermédiaire de son conseil, a fait état pour la première fois à l'OFE de son impossibilité de retourner en Algérie. Mme Cupillard Ladame précise encore que l'OFE a répondu au pétitionnaire le 9 juillet 1999 que sa demande allait être examinée avec l'OCP relativement à la poursuite de son séjour dans notre canton. Or, et sans attendre la réaction de ce dernier, la juriste révèle que l'OFE a prononcé, en date du 9 août de la même année, une mesure d'extension, immédiatement suivie d'une décision d'interdiction d'entrer en Suisse, en date du 10 août. Ces éléments permettent d'avancer que d'OFE a bien examiné la possibilité de renvoi, explicite Mme Cupillard Ladame, ajoutant que cette décision a finalement été confirmée le 29 septembre 1999. On peut en déduire, qu'après examen des circonstances, l'OFE a constaté que rien ne s'opposait au renvoi de M. Yassine dans son pays, souligne-t-elle. On faisait remarquer, au surplus, qu'il pouvait, s'il le souhaitait, aller au Portugal, étant donné qu'il était légitimement marié à une Portugaise. Dans ce contexte, Mme Cupillard Ladame souligne que M. Yassine n'était en fait pas obligé de retourner en Algérie.
La juriste poursuit en précisant que le DFJP a été saisi d'un recours le 26 octobre 1999, suite à la décision de l'OFE et qu'il a refusé de restituer l'effet suspensif au recours contre la décision de renvoi. La juriste indique enfin que le recours du pétitionnaire a été définitivement rejeté le 14 mars 2000. Le conseil de M. Yassine a alors demandé de surseoir au renvoi en date du 24 mars dernier et ils ont été convoqués par l'OCP le 5 mai 2000.
Mme Cupillard Ladame fait savoir que la Ligue des droits de l'homme est intervenue dans cette affaire. Le 12 mai, un représentant de la Ligue s'est présenté à l'OCP accompagné de M. Yassine pour relater la situation difficile dans laquelle se trouvait le pétitionnaire et les risques qu'il encourait s'il était renvoyé dans son pays.
Pour la juriste qui répond à la question d'un des commissaires, le statut d'officier de M. Yassine n'est pas prouvé, sinon par une lettre manuscrite de la main d'un commandant, et qu'il devait fournir un livret militaire. L'élément déterminant, selon la juriste, étant d'avoir obtenu d'une part un passeport pour sortir d'Algérie, et d'autre part un extrait de casier judiciaire, vierge en l'occurrence, en 1995. Par ailleurs, il semble évident que le fait d'avoir attendu que tombent les décisions du Tribunal fédéral et de la Commission cantonale de recours pour signaler sa désertion a conduit les autorités à douter de la véracité des faits allégués.
Discussion et vote
Très vite au fil du débat, l'ensemble des députés se rend compte de la difficulté de traiter un dossier pour lequel des éléments factuels manquent et donc qu'un travail en amont serait indispensable. Cette commission n'ayant ni pour tâche ni pour mandat de conduire elle-même ce type d'investigation, il lui reste en fait la possibilité de donner un signe fort ou non au Conseil d'Etat. La majorité de la commission part du principe que le pétitionnaire, s'il est bel et bien déserteur, encourt des risques majeurs, alors que des doutes se font entendre par quelques députés de la minorité, fondés en particulier sur le manque d'éléments tangibles et sur d'éventuelles contradictions, en particulier sur le fait que le pétitionnaire ait pu quitter l'Algérie avec son passeport, alors qu'il dit avoir déserté.
La question de fond est bien de savoir si M. Yassine sera inquiété ou même poursuivi lors de son retour en Algérie, ce que les rapports d'Amnesty International et de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) tendent à confirmer. Le Conseil d'Etat doit, avant de se prononcer sur l'exécution du renvoi du pétitionnaire, faire une demande à l'Office fédéral des réfugiés (ODR), le cas échéant au Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) quant à la situation actuelle et aux risques encourus ou non par sa situation de déserteur.
Si l'ensemble des députés a l'impression de ne pas avoir une vision d'ensemble de tous les éléments, il en ressort que le flou administratif n'est pas en reste et que toutes les démarches appropriées n'ont probablement pas été effectuées avec la rigueur qui se doit.
Le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat, motivé par la crainte du risque potentiel encouru par M. Yassine, est approuvé par 6 OUI (1 AdG, 3 S, 2 Ve) et 4 NON (2 R, 2 L) avec 2 abstentions (2 DC). La majorité de la commission vous demande, Mesdames et Messieurs les député-e-s, de suivre son préavis.
Débat
Mme Anita Cuénod (AdG), rapporteuse. Très brièvement sur cet objet. Résidant en Suisse depuis onze ans, le pétitionnaire, M. M'Hamed Yassine, ancien officier de l'armée algérienne, est arrivé à Genève en 1989. Il y a entrepris des études, s'est marié, puis séparé. Son épouse ayant quitté la Suisse depuis deux ans, il ne bénéficie donc plus de son permis B. Cet homme, Mesdames et Messieurs, a peur. Il a peur d'être expulsé en Algérie et d'être inquiété, car il se considère comme déserteur. La majorité de la commission a estimé que la procédure d'expulsion effectuée par l'office fédéral des étrangers n'a peut-être pas tenu compte des circonstances particulières vécues par M. Yassine. Elle demande donc, en renvoyant cette pétition au Conseil d'Etat, que celui-ci examine avec attention le cas de cet homme.
M. Jean-François Courvoisier (S). A travers cette pétition, il ne s'agit pas simplement de remplacer des stops par un giratoire ou de rajouter deux heures d'anglais à la place du français. Il s'agit de la vie d'un homme. Il a certainement menti à la commission des pétitions en prétendant que sa femme partait au Portugal pour des raisons de santé, alors qu'elle voulait simplement se débarrasser de lui. Mais qui ne mentirait pas pour sauver sa vie ? On sait très bien que sa femme demandera le divorce s'il est renvoyé au Portugal. Il sera alors expulsé vers l'Algérie. J'aimerais donc que le Conseil d'Etat prenne toutes les garanties, afin qu'il puisse retourner en Algérie sans prendre de risque pour son existence.
M. Gérard Ramseyer. Nous allons évidemment tout faire pour que cette affaire soit éclaircie. Je m'y suis d'ailleurs déjà engagé, c'était sauf erreur il y a deux mois, au milieu de la nuit et sur l'insistance de M. le député Grobet. Il s'en souvient sans doute. Nous avons téléphoné à la police pour que rien d'irréparable ne soit commis le lendemain même. Vous voyez que nous avons tenu parole, puisque l'on reparle maintenant de M. M'Hamed Yassine !
M. Christian Grobet. Je n'en doutais pas !
M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat. Ce monsieur est sous obligation de départ. Nous avons refusé de renouveler son autorisation de séjour au motif qu'il ne remplissait plus les conditions de vie commune avec son épouse, rentrée au Portugal. Cette dernière ne pouvait quant à elle plus se prévaloir d'un titre de séjour en Suisse. La commission cantonale de recours en matière de police des étrangers et le Tribunal fédéral ont confirmé cette décision qui est devenue exécutoire. Pour s'opposer à son départ après les trois échecs de ses trois recours, M. Yassine argue tardivement du fait qu'il serait déserteur de l'armée algérienne. M. Grobet m'avait indiqué qu'il était, comme moi, lieutenant-colonel. (L'orateur est interpellé.) M. Grobet a précisé qu'il était, comme moi, officier ! Merci, Monsieur Grobet ! Or, il se trouve que M. Yassine n'a fourni aucun document crédible à l'appui de son allégation. On doit constater qu'il a obtenu sans aucun problème un passeport pour quitter l'Algérie, ce qui tend à rendre assez peu crédible la thèse de la désertion. S'il avait été déserteur, il n'aurait pas pu quitter sans problème l'Algérie.
Nous avons donc pris la décision suivante, qui montre une nouvelle fois l'attention que nous portons au cas que cet honorable parlement nous soumet. Nous avons accordé un délai au 30 juin à l'EPER, qui soutient l'intéressé, pour effectuer une démarche probatoire auprès d'Amnesty International. Il faut encore relever que M. Yassine, s'il doit quitter la Suisse, n'est pas obligé de retourner en Algérie, où il se prétend en danger. Il peut parfaitement retourner au Portugal, puisqu'il a épousé une Portugaise. Ce sont du moins les renseignements que me donne l'office cantonal de la population. Ceci étant, vous pouvez naturellement transmettre cette pétition comme vous le souhaitez et comme vous en avez conclu en commission. Mais j'insiste sur le fait que le cas ne paraît en tous les cas pas aussi clair que l'on voudrait bien nous le présenter.
Mme Anita Cuénod (AdG), rapporteuse. Il n'est pas clair, parce que la commission des pétitions n'a pas pu se transformer en commission de grâce et mener une enquête. La situation de M. Yassine n'est pas claire pour plusieurs raisons. La première est qu'il est venu en Suisse, qu'il y a étudié, qu'il s'y est marié et qu'il n'y a revendiqué ni l'asile, ni quoi que ce soit d'autre. Il n'a donc pas eu besoin d'expliquer sa fuite. Deuxième chose, M. Yassine a toujours été indépendant. A partir du moment où, se séparant de sa femme, il s'est vu retirer son permis de séjour, lui et son épouse ont fait recours au Tribunal fédéral. Je dois vous reprendre à ce sujet, Monsieur Ramseyer. Comme elle avait quitté le territoire, le Tribunal fédéral a estimé que son épouse n'avait plus droit à son permis C. M. Yassine n'a quant à lui même pas eu le droit de déposer un recours au Tribunal fédéral. Il a tout simplement été débouté, n'ayant pas d'autorisation de séjour valable. C'est la réalité.
La dernière chose que je voulais dire, ou l'avant-dernière, c'est que s'il est renvoyé au Portugal, les quelques éléments très clairs dont nous disposons montrent qu'il sera obligé de divorcer, étant séparé de son épouse. Sa situation sera alors probablement la même qu'ici et il devra aussi partir.
Enfin, comme M. Yassine n'a pas déposé de demande d'asile, son cas n'a pas été examiné avec la même attention. C'est pour cela que nous demandons au Conseil d'Etat quelque chose de très précis. Avant de vous prononcer sur l'exécution du renvoi, nous vous demandons de prendre contact avec l'office fédéral des réfugiés, l'ODR, et/ou le Haut Commissariat aux réfugiés afin de connaître la situation actuelle et les risques particuliers courus par M. Yassine comme déserteur.
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.
Annexe PL amendé
Troisième débat
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R), rapporteuse de majorité. Je reprends les paroles de mon estimé collègue Charles Beer qui, je cite, s'exprime ainsi dans la « Tribune » du 22 juin : « L'avenir de nos enfants mérite bien une réflexion et une approche globale tournant le dos à la précipitation et à l'entêtement. »
Que fait alors la majorité parlementaire en imposant au forcing une 7e hétérogène, sans avoir, premièrement, attendu le rapport final et surtout les conclusions concernant la 7e hétérogène ? Sans avoir, deuxièmement, respecté les prises de position des enseignants et des élèves, qui ont répondu à l'enquête du SRED, le service de la recherche en éducation - c'est un peu bafouer une forme de démocratie que de ne pas mesurer les impacts financiers et les effets de la mise en place de cette réforme ; est-ce raisonnable ? Et sans tenir compte, troisièmement, de l'inquiétude des parents qui inscrivent leurs enfants au cycle d'orientation et de certains enseignants qui ont de la peine à se repérer dans cette jungle d'informations et de désinformations. Cette précipitation ne constitue-t-elle pas plutôt un barrage à une autre mesure prise par le DIP, la grille-horaire, qui n'a pas encore eu le temps de faire ses preuves ? Nos enfants méritent-ils vraiment que l'on fasse passer en force une réforme sans base solide, cette dernière déterminant un acte fondamental de leur enseignement et déterminant leur futur ?
Nous répondons non, malgré notre ouverture à une pédagogie toujours réévaluée et adaptée aux besoins de l'évolution de l'enseignement. Alors, Mesdames et Messieurs de la majorité, ne soyez pas entêtés, mais laissez un peu de temps à cette réforme pour qu'elle puisse s'asseoir sur des fondations solides et reconnues par tous.
M. Jean-François Courvoisier (S), rapporteur de minorité. Le forcing est venu parce que la droite a profité d'une majorité occasionnelle en commission pour refuser l'entrée en matière. On aurait très bien pu discuter de ce projet tranquillement en commission. D'autre part, Mme la présidente de la commission explique le traitement de ce projet par une opposition à la grille-horaire. Je rappelle à ce sujet que la présidente précise elle-même, en page 8 du procès-verbal n° 95, que « la grille-horaire est indépendante de la 7e hétérogène. » C'est vous qui nous l'avez dit, Madame la présidente, et cela figure dans le procès-verbal de la commission. Ce n'est donc pas pour nous opposer à la grille-horaire. C'est simplement parce que nous trouvons que le choix demandé aux élèves est beaucoup trop prématuré. Nous estimons qu'une 7e hétérogène leur permettra d'effectuer un choix plus tardif et permettra à l'école de donner une instruction générale à nos enfants, qui le méritent tous, quel que soit leur avenir professionnel.
Mme Janine Hagmann (L). Au lendemain du vote des deux premiers débats à des heures pour le moins inhabituelles, il est vrai que certains cycles d'orientation ont montré leur contentement. Un de mes amis, qui travaille à Bois-Caran - vous savez tous que Bois-Caran est l'un des trois cycles en rénovation depuis vingt et un ans - m'a téléphoné en me disant qu'il était très heureux que le Grand Conseil ait voté cette 7e hétérogène. Il était content du résultat. A la fin de sa phrase, il m'a interpellée en me disant : « Mais pourquoi avez-vous voté cela avant de prendre connaissance du rapport du SRED ? A quoi cela sert-il que l'on réponde, nous les professeurs, les directeurs, les parents, les élèves, à un questionnaire si vous n'attendez même pas les résultats de son dépouillement ? Vous prenez des décisions comme cela, à la légère ? Auriez-vous, vous les députés, la science infuse pour savoir mieux que nous, les professionnels, quelle est la meilleure école pour les élèves de ce canton ? N'est-ce pas une attitude quelque peu arrogante, qui montre du mépris par rapport aux enseignants ? »
Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, à quoi l'on en arrive lorsqu'on veut imposer à tout prix son point de vue parce que l'on se croit infaillible !
Je vous ai déjà mis en garde lors du précédent Grand Conseil. Vous prenez des décisions graves pour l'avenir de notre école sans en mesurer les conséquences. Depuis quand modifie-t-on une structure scolaire avant un sérieux exposé des motifs pédagogiques qu'une telle réforme exige ? Je rappelle que la loi sur l'instruction publique définit l'acquisition des savoirs, alors que la plupart d'entre vous ne mettent en exergue que l'égalité des chances, qui est aussi définie dans la LIP.
Il y a effectivement vingt et un ans que trois cycles fonctionnent avec un système différent. Comment se fait-il que ce mode d'enseignement n'ait jamais été généralisé en vingt et un ans, sous trois conseillers d'Etat différents ? Aujourd'hui, en deux coups de cuillers à pot, vous décrétez l'hétérogénéité dans l'urgence, en imaginant que vous allez diminuer ainsi les disparités sociales et scolaires. Vous rêvez, Mesdames et Messieurs ! La visite que la commission a effectuée aux Coudriers a montré des classes à petits effectifs, bien encadrées, mais dans lesquelles la palette habituelle de la disparité subsistait. Je vais vous dire exactement ce que j'ai vu dans l'une des classes de 7e hétérogène visitée par les députés : 16 élèves, ambiance sympathique, cours de math, bon prof. Les élèves, dixit le prof, ont de gros écarts d'acquisition. L'un d'entre eux avait vingt exercices d'avance sur ses copains. Qu'est-ce que le professeur lui a dit à ce moment-là ? « S'il te plaît, débrouille-toi, fais de l'allemand ou du français, mais ne creuse pas plus l'écart avec tes copains ! » C'est tout de même symptomatique !
Il faut être prudent. L'âge de la 7e est un âge difficile. Peut-on mettre en place une réformette, votée à la sauvette, pour une année ? Mesdames et Messieurs, nous sommes en train de faire du bricolage. Pourquoi ? Parce que certains, comme toujours, veulent forcer une décision de la cheffe du département, qui, entourée de spécialistes et en concertation avec les enseignants, essaye de faire évoluer l'école dans un sens positif. Regardez comment cela s'est passé avec l'école primaire ! La rénovation s'est construite par étapes. Depuis huit ans je crois, des enseignants engagés, volontaires, convaincus, motivés ont accepté de se lancer dans la rénovation. Des bâtiments au complet ont oeuvré pour qu'une expérience soit mise en place avant d'être généralisée. Et une évaluation a été faite avant que ne soit lancée la généralisation. Et vous, que préconisez-vous après la 7e hétérogène ? Pouvez-vous me le dire ? Retour aux sections ? Options ? Vous n'en savez rien ! Vous allez voter la tête dans le sac !
Je ne peux m'empêcher de citer le directeur du service de l'enseignement à la direction générale du cycle d'orientation, M. Cottier, qui explique que « prétendre à l'hétérogénéité immédiate serait favoriser les élèves des collèges à haut niveau socio-économique, où la fréquence des élèves en difficulté scolaire est moins importante, et dans le même temps porter atteinte aux collèges dont la population scolaire en difficulté est plus importante. » Par conséquent, prenons le temps de réfléchir aux structures du cycle, indépendamment de la grille-horaire ! Dans les choix que nous ferons, prenons nos responsabilités de parents et de citoyens, et, nous surtout, de députés.
A qui profite cette déstabilisation orchestrée ? Je trouve inadmissible que l'on prenne les élèves en otage d'une campagne à but évidemment politique. J'interviendrai vraisemblablement dans la suite du débat pour montrer que l'on peut trouver des solutions beaucoup plus intelligentes qu'un vote pour une 7e hétérogène dont on ne connaît pas les conséquences.
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R), rapporteuse de majorité. Je voudrais juste dire à M. Courvoisier que je ne renie pas du tout les propos de mon rapport. La grille-horaire est tout à fait indépendante. Je voulais simplement trouver des arguments pour expliquer la position de la majorité par rapport au forcing du vote de la 7e hétérogène. Pour moi, c'est tout à fait indépendant, mais peut-être que cela peut expliquer votre forcing à propos du vote.
Mme Nelly Guichard (PDC). J'ai souligné en commission, j'ai souligné dans cette enceinte le peu de sérieux qu'il y a à traiter de l'hétérogénéité sans connaître sur une large échelle l'avis des enseignants, ni d'ailleurs ceux des parents. En commission, la seule solution raisonnable eût été de respecter le timing qui nous aurait permis l'étude du projet de loi à la fin de l'année, afin de disposer de quelques pistes de travail à la lumière de cette étude. Vous avez voulu faire le forcing, nous avons refusé l'entrée en matière. A qui la faute ? A ceux qui font le forcing ? à ceux qui n'entrent pas en matière ? La réponse vous appartient, puisque c'est vous qui voulez aujourd'hui traiter de ceci en débat immédiat et qui avez demandé avec insistance à entamer le troisième débat sur cette matière. Discuter d'un changement aussi fondamental en plénière, c'est insensé, impardonnable, irresponsable et bien peu respectueux de l'avis des autres et en particulier des parents, dont vous vous réclamez par ailleurs constamment.
Ce n'est pas le nivellement par le bas qui m'effraie le plus. On parle toujours dans vos rangs de ceux que des copains bienveillants pourraient tirer vers le haut. Ils ne doivent pas être légion. Cette solidarité existe d'ailleurs aussi dans les classes traditionnelles. Mais on laisse dans l'ombre la foule silencieuse de ceux qui se laissent gentiment bercer par la vague, qui glisse imperceptiblement vers le bas pour finir par se retrouver en rade. Votre système n'est pas plus égalitaire qu'un autre, parce qu'il laisse surfer sur la vague tous ceux qui utilisent leur ruse et leur intelligence pour en faire le moins possible. Vous ne voulez bien évidemment pas voir ce problème. Mais c'est la réalité. Et c'est une réalité qui désespère beaucoup de parents. Faute de pouvoir y remédier eux-mêmes, ils disposaient jusqu'à présent d'un relais dans le cadre scolaire, un peu rigide certes, mais qui permettait d'avoir des repères clairs, lisibles et compréhensibles pour chacun. Il y a des vérités qui ne sont évidemment pas bonnes à dire. Aujourd'hui, je choisis de ne pas mettre d'oeillères ou de lunettes qui embellissent le paysage, mais je choisis de voir la réalité, faite de diversités en raison des capacités des uns et des autres dans des domaines qui ne se mesurent pas toujours.
Il y a l'égalité des chances dans l'idéal et il y a la réalité. Nous ne pouvons pas ignorer la réalité. Je vous renvoie à l'article cité tout à l'heure par Mme Hagmann : « Prétendre à l'hétérogénéité immédiate serait favoriser les élèves des collèges à haut niveau socio-économique, où la fréquence des élèves en difficulté scolaire est moins importante et dans le même temps porter atteinte aux collèges dans lesquels la population scolaire en difficulté est plus importante. » Est-ce cela que vous voulez ? Si oui, vous pouvez voter votre projet de loi !
M. Charles Beer (S). Nous avons à reprendre un troisième débat dans un contexte à peu près digne de celui des deux premiers débats. A la dénonciation d'un coup de force, la partie adverse répond par la dénonciation d'un autre coup de force.
Revenons sur la question, importante, de la grille-horaire. Il est effectivement difficile d'établir un lien direct, automatique, systématique entre l'un et l'autre. Preuve en est le fait que le projet de loi a été déposé en 1997, à un moment où il n'était pas question d'appliquer cette nouvelle grille-horaire. C'est donc dire que la réforme que nous proposons a déjà quelques années et qu'elle a quand même pu être mûrement réfléchie, en tout cas par celles et ceux qui l'ont proposée, c'est-à-dire le parti socialiste, avec le soutien des partis de l'Alternative.
Au moment où ce projet de loi a été déposé, nous croyons savoir que le département avait effectivement chargé le SRED de procéder à l'enquête sur le système hétérogène dans les trois cycles d'orientation en réforme. Le seul problème, c'est que la date de retour de ce rapport a été fixée d'emblée, en 1997, à la fin de l'année 2000. En procédant de la sorte, le département a clairement déterminé les choses. Ou l'on fixe un délai dans lequel on souhaite traiter le projet de loi considéré comme prioritaire, ou l'on attend les résultats de l'enquête, ce qui repousse considérablement l'issue des travaux. Voilà le premier élément.
Deuxième élément : force est de constater que la nouvelle grille-horaire comporte les inconvénients de l'hétérogène et les inconvénients de l'homogène. Ce sont les deux systèmes mixés pour le pire. Pourquoi pour le pire ? Tout simplement parce que l'on est malgré tout en train de fabriquer une forme de bazar pour l'ensemble des élèves du cycle d'orientation, à l'exception d'une réserve pour les élèves de latine qui profiteront de conditions particulières. J'en veux pour preuve le fait qu'aujourd'hui, alors que les inscriptions au cycle d'orientation sont ouvertes, seuls les élèves qui entrent en latine savent qu'ils pourront, s'ils arrivent au bout de leurs trois ans, entrer au collège, puisque les conditions d'accès au collège - vous le dites vous-même dans votre dernière communication, Madame Brunschwig Graf - seront définies au début de l'année 2001. Ce sont vos propres termes et je me permets de vous renvoyer à la dernière publication que vous nous avez fait parvenir il y a de cela deux jours. Dans ce dépliant, je vous invite à vous référer au chapitre « Conditions d'admission » figurant au bas de la troisième page : « Le document décrivant les conditions de passage du 9e au 10e degré, valables pour la rentrée 2003, sera disponible au début de l'année 2001. » Si je me trompe, j'aimerais que vous puissiez apporter un démenti et donner des explications, car nombre de parents et d'enfants seront sans doute intéressés de savoir quelles sont les conditions à réunir dans le mixage d'options pour pouvoir accéder au 10e degré synonyme du collège.
Troisième élément, puisqu'on parle de coup de force. Lorsqu'il s'est agi de faire appliquer une réforme pédagogique aussi importante - puisque la suppression des sections, Madame Brunschwig Graf, est un élément éminemment important, même si l'on préserve la plus prestigieuse d'entre elles - il n'a pas été question d'attendre le rapport du SRED, il n'a pas été question de demander quelque évaluation que ce soit, quelque recherche que ce soit. Pire encore, sans demander le moindre document de recherche, on fabrique une réforme qui est dénoncée par pétition par plus de 1 000 maîtres du canton chargés de l'appliquer. Sans analyse pédagogique et scientifique, avec le rejet de celles et ceux qui doivent l'appliquer, avec la dénonciation des parents d'élèves, vous voulez faire passer une réforme. Parlons donc de coup de force, Madame de Tassigny, vous avez tout à fait raison ! Mais il y a un contexte de déstabilisation. Nous le déplorons. Nous ne l'avons pas choisi et nous prétendons que le département est responsable de cette situation, en ayant finalement fait adopter cette réforme, élaborée en chambre close et au pas de charge.
Pour ce qui est du projet que nous proposons, avons-nous uniquement à nous opposer à la grille-horaire ? La réponse est non ! Il doit bel et bien y avoir une réforme. Cette réforme est celle que nous appelons de nos voeux depuis plus de trois ans. Elle est importante. Elle prévoit pour la 7e année, c'est-à-dire pour les élèves sortant du primaire, une période de transition et d'adaptation qui évite une sélection à l'âge de 12 ou 13 ans. Cet objectif demeure politique, quelles que soient les analyses scientifiques au niveau des modalités d'application. Cet objectif est le nôtre. Le temps que nous nous donnons maintenant est celui d'étudier dans quelle mesure il convient d'étendre ce système à la 8e et à la 9e année puisque nous le souhaitons sur le plan politique et pédagogique. Il conviendra d'en déterminer les conditions d'application.
Je profite de cette intervention pour dire, en ce qui concerne les amendements proposés, en tout cas ceux qui nous sont parvenus de l'Alliance de gauche, que nous n'en sommes pas preneurs pour une raison que j'aimerais très rapidement évoquer, même si nous reprendrons ultérieurement le débat relatif aux amendements. Si nous nous opposons à la grille-horaire, nous pensons aussi que la responsabilité politique relève à un certain moment du département. Le parlement peut intervenir sur des objectifs politiques et de politique pédagogique. Nous n'entendons pas, à l'occasion d'un coup de force, transformer le projet de loi de la 7e hétérogène en un autre projet coup de force, visant à déterminer des éléments qui n'ont jamais été traités jusqu'à présent dans la loi sur l'instruction publique. Nous continuons à faire confiance aux acteurs, principalement aux enseignants et aux associations d'enseignants, pour établir les conditions d'une application qui soit la meilleure possible. Nous aurons aussi à prendre en compte les conclusions du rapport du SRED, qui seront publiées d'ici la fin de l'année 2000 et qui nous permettront le cas échéant de nous prononcer sur des questions majeures, notamment sur la question des effectifs.
M. Jean-François Courvoisier (S), rapporteur de minorité. Mme Hagmann a reçu, le soir du refus d'entrée en matière de la commission, un téléphone d'un enseignant déplorant notre décision. Elle a par ailleurs constaté qu'un élève, retardé dans ses exercices, devait attendre que ses camarades le rattrapent. Ce sont des cas particuliers. J'ai pour ma part d'autres éléments en ma possession, puisque deux membres de ma famille enseignent au cycle d'orientation et que j'ai suivi mes enfants de l'école primaire jusqu'au collège.
Le journal de la FAMCO, intitulé « Pas d'accord », se montre très sévère : « Rappelons tout d'abord que des changements réels et importants sont en cours grâce à l'engagement des maîtres en ce qui concerne par exemple les nouveaux objectifs d'apprentissage et d'étude. Précisons ensuite que si les autorités scolaires et Mme Brunschwig Graf ont été dénoncées, c'est d'abord pour avoir interdit et censuré les projets de réforme partielle qui sont apparus dans les collèges et qui touchaient aux structures, parce qu'ils prévoyaient des classes de 7e hétérogènes. A ce propos, la présidente du DIP ne craint pas de relayer des propos dignes du café du commerce, lorsqu'elle affirme sans nuance que l'hétérogénéité représenterait un nivellement par le bas. Les experts du SRED qu'elle a mandatés se montrent beaucoup plus prudents. Rien ne permet donc de l'attester. En revanche, les effets négatifs de démobilisation et de stigmatisation dans les classes G ou P existent bel et bien. Et surtout, la question reste posée de savoir si l'âge de 12 ans n'est pas trop précoce pour établir une sélection aussi lourde de conséquences. Mais il n'est pas possible d'y réfléchir, puisque Mme Brunschwig Graf entend nous imposer sa sentence idéologique et définitive. » C'est ce que disent les enseignants de la FAMCO.
Je rappelle enfin que la 7e hétérogène constitue un réel progrès, parce qu'elle se base sur une évaluation effectuée par plusieurs maîtres, tandis qu'en primaire un seul enseignant, qui peut aimer ou ne pas aimer un élève, le classe, seul, définitivement pour la suite.
Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Je ne veux pas revenir sur le fond, parce que mes préopinants et en particulier M. Charles Beer ont expliqué l'essentiel de ce que je voulais dire. Je voudrais notamment insister sur le mauvais débat que nous avons à ce sujet et sur la dialectique négative qui, de forcing en forcing, nous conduit aujourd'hui à défendre des positions sans avoir réellement les moyens de les argumenter plus avant.
Ce forcing m'a frappée au sein de la commission. Mesdames et Messieurs les commissaires qui avez refusé l'entrée en matière, vous saviez que nous allions, le lendemain matin, effectuer notre première visite d'un cycle à classes hétérogènes et que cette visite était destinée à nous déterminer sur la valeur de cette proposition qui se trouve sur nos bureaux depuis trois ans. Voter négativement sur l'entrée en matière, alors que l'on s'apprête à se rendre sur place pour se faire une opinion - vous avez raison, Madame Hagmann, nous avons pu nous faire des opinions très partielles en assistant à une ou deux leçons - n'est pas un travail sérieux et cette méthode m'a profondément choquée.
C'est dire que l'entrée en matière était pour moi une manière de nous donner les moyens d'étudier ce projet de loi. Nous ne l'avons pas fait. Je ne pense pas que le passage à des classes hétérogènes soit, Madame Hagmann, une opération coup de force, alors que se déroulent depuis deux décennies des expériences pilotes dans ce domaine. Nous avons les uns et les autres une opinion politique sur cette question, marquée par notre conception d'une école plus sélective ou d'une école plus solidaire. C'est essentiellement cette position politique de départ qui détermine aujourd'hui nos prises de positions. Mais il appartient évidemment au DIP, à l'ensemble des protagonistes du cycle d'orientation et aussi un peu à nous, de décider à un moment donné d'engager une réforme. Ce qui me détermine dans cette affaire, c'est que nous avons engagé cette réforme au primaire, en amont, que nous l'avons engagée en aval, au niveau du gymnase, que toute une série de dispositifs se mettent actuellement en place à l'école de culture générale, au niveau de l'apprentissage - avec la maturité professionnelle - dans les HES et dans les écoles professionnelles. Le cycle d'orientation se doit d'améliorer les chances de tous les élèves. Il y a peut-être - j'en suis presque persuadée, en tout cas sur le plan de ses effets sociaux - une possibilité d'améliorer ces chances par le biais d'une sélection retardée d'une année.
J'ai indiqué lors de nos précédents débats que je soutenais la proposition plus globale des Verts, qui consiste à engager une réforme complète à l'intérieur du cycle d'orientation. En attendant et parce que la nouvelle grille-horaire constitue un pas dans le démantèlement du vieux système, je continue, et l'Alliance de gauche avec moi, à défendre ce projet, quels que soient les griefs que vous pouvez avoir contre les amendements que défendra tout à l'heure mon collègue Pagani. Je soutiendrai ce projet de loi avec ou sans ces amendements.
M. Bernard Lescaze (R). Nous revenons donc sur ce projet de loi qui nous a retenus au milieu de la nuit voici quelque temps. J'entends à nouveau dénoncer le coup de force et toute la propagande qui s'est développée autour. On a vu un quotidien de la place interviewer des personnes qui n'avaient même pas assisté au débat, alors que l'on n'a jamais demandé l'avis du rapporteur ad interim ! Il y a là des conceptions totalitaires. (Brouhaha.) M. Charles Beer a peut-être ses entrées à la « Tribune », mais c'est bien parce que le troisième débat a été demandé aujourd'hui que nous avons décidé de ne pas demander de précisions aux journalistes concernés, par le biais d'un droit qui n'aurait pas été un droit de réponse, puisque les informations contenues dans le compte rendu de ce débat n'avaient à l'évidence pas été rédigées par des personnes ayant assisté à ce débat. Ce n'est, à mon avis, pas admissible, mais cela montre bien que tous les moyens sont bons, au niveau de la déontologie, y compris pour certains députés, pour faire passer ce projet de loi.
M. Charles Beer a été le premier, l'autre soir, vers minuit, à baisser le masque et à reconnaître, au-delà du problème de l'hétérogénéité dont on débat depuis vingt-deux ans - hétérogénéité acceptée dans trois cycles, différemment d'ailleurs suivant les cycles, puisque les classes hétérogènes des Coudriers ne sont pas tout à fait les mêmes que celles de Budé ou de Bois-Caran, mais c'est sans doute un détail pour vous - que le véritable problème était celui de la grille-horaire. Pas la grille-horaire de l'année prochaine, mais la grille-horaire de l'an 2000, la grille-horaire de cette année. Je m'étonne à ce propos qu'un syndicaliste, défenseur de certaines professions, ne sache concrètement pas ce qu'est une rentrée scolaire. On peut par contre fort bien imaginer qu'un certain nombre de députés ne le sachent pas.
Aujourd'hui, 23 juin, la rentrée de l'an 2000 est solidement mise sur les rails. Il a par exemple déjà été procédé à l'engagement des maîtres d'anglais pour la 7e année, soit 20 postes. Si vous ne voulez pas de cette grille-horaire, voulez-vous mettre ces vingt enseignants sur le carreau, alors qu'ils s'apprêtent à préparer durant l'été leurs cours pour la rentrée ? Je vous remercie pour eux, mais c'est inadmissible sur le plan humain ! En français, en allemand, en mathématique ou au niveau de l'introduction des deux heures de différenciation, les choses sont prêtes. A l'heure actuelle, les postes sont accordés, les accords sur l'emploi ont été signés par la présidente du département et les associations de maîtres et ils sont respectés. Il a été procédé à l'engagement de plus de cent nouveaux maîtres. Enfin, vous le savez sans doute, les conditions d'élaboration des horaires de rentrée s'avèrent toujours particulièrement délicates et les classes sont déjà formées à partir de la fin de ce mois. Elles ne sont pas formées le 20 août.
En réalité, pour des motifs purement idéologiques, vous désécurisez non seulement les enseignants, parce qu'il y a parfois des personnes aussi conservatrices dans l'enseignement que dans d'autres milieux, mais vous désécurisez aussi les parents et les élèves. La présidente du département nous a heureusement apporté hier une bonne nouvelle, à savoir que les inscriptions en 7e s'étaient parfaitement déroulées et qu'il n'y avait pas eu d'immenses bouleversements, même avec la présentation de cette nouvelle grille-horaire aux parents. Certains craignaient que le latin ne s'effondre ou ne prenne au contraire une place prépondérante ; on a cependant constaté, toutes choses restant égales, qu'il n'y avait pas plus d'élèves que l'année dernière, ni moins d'ailleurs, à vouloir faire du latin. (L'orateur est interpellé.) Cela a été dit très clairement hier.
Dans ces conditions... (Brouhaha.) Si ces dames voulaient bien se taire à côté de moi ! Je comprends très bien, Madame Dallèves, que vous puissiez penser avoir une majorité automatique, que tout ira très bien et qu'il ne vaut même pas la peine d'écouter les arguments des autres. Il s'agit simplement d'arrogance intellectuelle ! ...dans ces conditions, nous tenons simplement à souligner l'importance du débat sur l'hétérogénéité. Ce débat mérite d'être traité normalement. Peu importe ce qui s'est passé au sein de la commission de l'enseignement, avec coup de force et contre-coup de force. La présentation aujourd'hui de nouveaux amendements m'amène à l'évidence à demander le renvoi de ce projet en commission - si tout était aussi bien que vous l'avez prétendu, il n'y aurait pas besoin de proposer un amendement à l'article 53, alinéa 2, ni une nouvelle disposition transitoire - et m'amènera également, si le renvoi en commission devait par malheur être refusé, à reformuler la proposition d'amendement, sage et raisonnable, que j'avais faite.
Ce qui compte, au-delà du succès plus ou moins facile que vous pourriez obtenir aujourd'hui et comme l'a dit ou l'a écrit le député Charles Beer - je pense qu'il l'entendait dans un autre sens - en conclusion d'un article du même quotidien dont on parlait tout à l'heure, que Mme de Tassigny a rappelé au début de son introduction, c'est qu'il y a effectivement des intérêts, ceux des enfants, qui dépassent de loin la petite victoire politique que vous pourriez avoir.
Je pense qu'une partie du groupe socialiste est en réalité en train d'enterrer, vingt ans après, ce que l'on a appelé l'école de Chavanne. L'histoire ne vous en saura probablement pas gré. Je reviendrai, parce qu'il faut bien avoir encore des arguments à opposer à M. Beer, sur ce que j'entends par «enterrer l'école de Chavanne». Vous en serez un tout petit peu surpris.
En conséquence, Monsieur le président, je demande formellement le renvoi du projet de loi en commission au vu des amendements qui nous sont présentés.
Mme Myriam Sormanni (S). Il est des élèves qui se bloquent face à des notes et à des examens, ce d'autant s'ils n'ont pas de notes jusqu'en 6e primaire. Pour un enseignant d'une classe de 7e hétérogène, par exemple au cycle du Vuillonnex, avoir en face de soi des élèves qui n'ont plus que deux périodes de notes par année au lieu de quatre permet d'avoir des élèves plus détendus. Leur niveau n'est pas moins bon et les choses se passent tout aussi bien. C'est ce que l'on m'a expliqué. Je reconnais que je ne participe pas aux travaux de la commission de l'enseignement et que je ne suis pas allée visiter de classes. Ma fille fréquente cependant ce collège. Elle n'est pas en 7e hétérogène, mais ce que j'ai entendu m'a quand même rassurée.
L'expérience des trois collèges concernés depuis plus de vingt ans constitue une preuve en soi que l'on dispose déjà, sans attendre l'achèvement de toutes les études menées par le SRED, de bonnes possibilités d'aller de l'avant. Il faut pouvoir donner aux jeunes en difficulté une chance de se ressaisir grâce à un bon suivi scolaire, sans un classement quasi définitif effectué à 12 ou 13 ans. Notre devoir, en tant que parlementaires, est de leur donner cette chance.
Pour moi, je parle en mon nom propre, l'école n'a jamais gommé les inégalités sociales. Chaque enfant naît dans une famille différente et ne dispose pas des mêmes possibilités à la base. L'école essaye cependant de contribuer à réduire cet écart.
M. Christian Brunier (S). J'ai essayé d'écouter au mieux les différents intervenants des partis de droite. J'ai d'ailleurs écouté avec beaucoup d'attention M. Bernard Lescaze... qui ne m'écoute pas ! Preuve d'arrogance certainement ! Monsieur Lescaze ? J'espère vraiment pour M. Lescaze que les représentants de la « Pravda » socialiste présents à la tribune, manipulés par Charles Beer, lui consacreront quelques lignes dans les médias de demain pour qu'il passe de bonnes vacances !
En dehors de cela, si je vous ai bien écoutés, Mesdames et Messieurs les députés de droite, la gauche agit avec précipitation et arrogance et n'attend bien entendu pas les résultats du rapport du SRED. Bref, cette gauche ne respecte vraiment rien. Je vous rappelle tout de même que nous avons déposé ce projet de loi il y a trois ans. Trois ans, c'est un temps qui me paraît assez raisonnable pour mener une étude. Mais lorsqu'on donne comme consigne au SRED de mener une étude les deux pieds sur le frein et le frein à main tiré, il est clair que la concordance de planning ne peut à ce moment-là pas jouer entre les travaux parlementaires qui ont une certaine efficacité et le travail réalisé par cet organisme.
Deuxième chose, je cite la formule de Mme de Tassigny. Je l'ai même notée, parce qu'il s'agit d'une formule tout de même assez exceptionnelle. Mme de Tassigny nous a dit à propos de la nouvelle grille-horaire : « Cette réforme est reconnue par tous. » J'aimerais savoir, Madame, qui est ce « tous ». Si ce sont 49 députés de droite, une conseillère d'Etat et quelques dirigeants du DIP, vous avez certainement raison. Il n'en va par contre pas de même si l'on se tourne vers la population. Je ne sais pas si vous avez lu les journaux ou si vous avez dialogué un peu avec les gens de la rue, mais une grande majorité d'enseignants, une grande majorité de parents et une grande majorité d'enfants - parce que les enfants en âge d'aller au cycle ont atteint l'âge de la réflexion - s'inquiètent fortement aujourd'hui. Une large majorité de la population ne se reconnaît pas du tout dans cette réforme. On nous a dit, sur les bancs du PDC je crois, que l'on ne connaissait pas encore l'avis des profs. Il est vrai que le sondage du SRED, qui arrive deux ans après le dépôt du projet de loi, n'est pas encore connu. Néanmoins, je peux lire, à propos de l'hétérogénéité, dans le bulletin de la Fédération des associations des maîtres du cycle d'orientation : « Nous réaffirmons notre soutien, en termes de principe, à la classe hétérogène comme instrument d'intégration des élèves. »
L'instrument d'intégration des élèves, Monsieur Lescaze, s'inscrit en ligne directe dans le cadre de l'école Chavanne. Nous ne sommes pas, aujourd'hui, en train d'enterrer l'école Chavanne. Nous sommes tout simplement en train de la faire évoluer. Je suis persuadé, si André Chavanne était encore parmi nous, qu'il serait à nos côtés pour faire évoluer l'école dans ce sens.
On nous a dit que « la gauche agissait dans le flou et dans le bricolage ». Je cite, j'ai pris plein de notes ! Vous voyez que j'étais très attentif ! Mon fils a la malchance de commencer le cycle d'orientation cette année. En tant que bon père, je me suis rendu aux inscriptions. Je n'ai pas été à la commission des transports, mais à la séance d'inscription. J'y ai perçu une inquiétude très forte, je le répète, chez les profs, chez les parents et chez les élèves. Et en plus, une incompréhension totale, car nombre de profs ne savent pas vraiment en quoi va consister la réforme. Quant aux enfants qui ont choisi de ne pas faire du latin, ils entrent aujourd'hui au cycle sans savoir vraiment ce qu'ils vont y faire.
J'aimerais encore juste parler de l'amendement de nos partenaires de l'Alliance de gauche, qui souhaitent préciser dans la loi que les classes hétérogènes ne doivent pas dépasser vingt élèves. Je crois que l'Alliance de gauche a raison sur un point. Si nous instaurons les classes hétérogènes, nous devrons donner beaucoup plus de moyens au cycle. Il faudra vraisemblablement restreindre le nombre d'élèves par classe pour réussir. Des classes hétérogènes avec la moyenne actuelle d'enfants par classe conduiraient peut-être à un échec. Il faudra donc donner plus de moyens à ces classes. Toutefois, vouloir limiter aujourd'hui les classes à vingt élèves n'aurait pas de sens pour plusieurs raisons. Premièrement, je pense qu'il faut moduler par quartier. Certains quartiers peuvent se permettre d'avoir 21 élèves, alors que la situation serait catastrophique dans d'autres quartiers à partir de 18 élèves. De plus, j'en ai discuté avec mes camarades de l'Alliance de gauche, personne n'a fait de calcul pour savoir combien de profs il faudrait engager afin d'avoir une moyenne de vingt élèves par classe. De ce fait, nous ne pouvons pas faire de fausses promesses et inscrire dans la loi des choses que l'on ne pourra pas se payer à travers le budget. Nous effectuerons les calculs et nous déciderons de la limite qu'il faudra fixer dans la loi. Nous reviendrons donc en temps utile avec une modification législative. Nous prendrons des dispositions au niveau du budget. Mais aujourd'hui, nous ne sommes pas prêts à voter cet amendement.
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). C'est merveilleux ! Presque tout le monde m'écoute ! (Brouhaha.) Je ne voudrais pas donner de leçon à M. Lescaze, qui est un politicien chevronné, mais je souhaite quand même lui dire que si je ne l'ai pas écouté tout à l'heure, c'est parce que certaines interventions ont l'air d'être préparées à l'avance. Elles répondent à des questions qui n'ont pas été posées. M. Lescaze est parti dans une grande envolée pour parler du moratoire que l'Alternative aurait demandé sur la grille-horaire. Mais malchance pour lui, nous n'avons pas demandé de moratoire ! Cet amendement n'a jamais été déposé ! Quant à fustiger les journalistes qui n'interrogeraient pas les bonnes personnes ou qui interrogeraient les personnes qui ne sont pas au courant, j'aimerais quand même rappeler à M. Lescaze qu'il n'est pas membre de la commission de l'enseignement et qu'il n'en a pas suivi les débats. Peut-être n'est-il donc pas tout à fait la bonne personne à interviewer !
Pour en revenir au sujet, lorsqu'un conseiller d'Etat ou une conseillère d'Etat refuse de demander le troisième débat, c'est généralement dans un certain but, et non dans un mouvement de mauvaise humeur, ni pour nous infliger le pénible devoir de reprendre les débats à zéro, ce qui est en train de se produire ce soir. Le but recherché est en principe de donner un temps au dialogue et de permettre l'émergence de solutions propres à réunir un compromis. Nous nous attendions ainsi à des approches de la part de Mme Brunschwig Graf sur de possibles amendements, par exemple sur les modalités d'application du PL 7697. Or, rien n'est venu. C'est dire que rien, absolument rien, n'a changé, ni évolué depuis le début du mois. Nous n'avons donc aucune raison de modifier notre manière de voter ce soir.
Une voix. Tu ne l'aurais de toute façon pas changée !
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi. Nous continuerons donc d'accepter l'hétérogénéité en 7e année. Soyons tout à fait franc ! Nous avons d'ailleurs constaté que ce n'était un secret pour personne. Il est vrai que ce projet de 7e hétérogène a été voté dans l'urgence, malheureusement avec une certaine précipitation, alors même que le projet de loi des Verts a été renvoyé en commission. Cette urgence était la réponse au problème soulevé par la nouvelle grille-horaire promulguée par le DIP... (Exclamations.) ...envers et contre tous les acteurs du cycle, professeurs, parents, enseignants. Même si la grille n'est pas si démoniaque qu'elle a été parfois décrite, c'est la méthode qui n'a pas joué. C'est vous, Madame la conseillère d'Etat, qui êtes responsable du vote en urgence de la 7e hétérogène, parce que vous avez refusé de dialoguer au sujet de cette grille-horaire, ce que nous vous avions déjà proposé au début de l'année.
Sur le fond, les arguments pour la 7e hétérogène ont déjà été donnés et répétés. En résumé et à mon sens, toute méthode qui classifie les enfants selon leur tempérament et leurs aptitudes ne fait que mettre en relief leurs différences et, de ce fait, engendre les antagonismes et encourage les divisions dans la société. Elle ne contribue donc pas à développer des êtres humains intégrés. Or, la plus haute fonction de l'éducation est à mon sens précisément de créer des individus intégrés, capables de considérer la vie dans son ensemble.
Voilà sur le projet de 7e hétérogène. Toutefois, s'agissant des amendements qui ont été proposés, quant à accepter aujourd'hui de mettre en place un comité de suivi, nous pensons que cela n'est pas adéquat. En effet, le politique ne doit pas se mêler de tout. Il peut tracer de grandes lignes politiques, exercer une certaine surveillance par des structures déjà existantes, comme l'est la commission de l'enseignement, mais non se lancer sans cesse dans de nouvelles structures. Certains députés ont vraiment les yeux plus gros que le ventre, car ils proposent toujours de nouvelles réunions, de nouveaux comités, alors que nous peinons déjà à assumer ceux que nous avons.
Par contre, en ce qui concerne la limitation du nombre d'élèves par classe, nous sommes absolument d'accord sur le fond. Personnellement, je trouve même que le nombre de vingt ne va pas assez loin. Mais cela devra encore être discuté au sein de mon parti. Il y a nécessité évidente d'avoir un nombre limité d'élèves par classe pour que l'éducateur puisse accorder son attention à chacun d'eux. Lorsque le groupe est trop grand, il n'y parvient pas et ce sont alors les récompenses et les punitions qui deviennent un moyen commode d'imposer la discipline, ce qui n'est absolument pas positif. Mais s'il s'agit d'aligner des chiffres sur un coin de table, de bricoler des amendements dans l'urgence, nous ne voulons plus de ce système. Nous voulons y réfléchir tranquillement, en même temps que nous étudierons le projet de loi des Verts, et y penser aussi en prévision du budget. C'est pourquoi nous refuserons ces amendements.
M. Rémy Pagani (AdG). Tout d'abord, en ce qui concerne le coup de force. Nous estimons, contrairement à ce que mes préopinants ont déclaré, qu'il n'y a pas eu de coup de force de notre part. Au contraire. C'est au moment où la commission a refusé l'entrée en matière que le réel coup de force a eu lieu. Je rappelle juste les faits afin que l'on soit au clair sur ce qui s'est passé par la suite. Le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui était inscrit à l'ordre du jour de la session de mai. C'est l'absence de Mme Brunschwig Graf qui a eu pour conséquence de reporter, à sa demande, la discussion à une date ultérieure. Nous n'avons donc pas opéré de coup de force en ce qui concerne la discussion de ce projet. Nous voulions évidemment le traiter avant les vacances scolaires pour qu'il ait une valeur, mais il n'y a pas eu de coup de force dans cette problématique.
En ce qui concerne le fond de la question, j'ai travaillé pendant dix ans dans un cycle traditionnel et une année et demie dans un cycle dont la 7e année était hétérogène. Dans chaque système, j'ai toujours eu la même préoccupation. Cette préoccupation était basée sur le fait que l'adolescence constitue en tant que telle un aléa perpétuel, en tout cas pour les enfants qui vont mal. Je m'occupais alors des enfants qui allaient mal, notamment au niveau de leur motivation, de leur avenir et de leurs capacités scolaires. Les deux systèmes dans lesquels j'ai travaillé permettaient à ces enfants, qui allaient relativement mal ou qui vivaient des situations socio-culturelles difficiles, qui traversaient des étapes difficiles de leur vie, de pouvoir se développer, par le biais notamment d'un concept fondamental introduit par M. Chavanne. C'était la tolérance des branches. Un élève pouvait être bon en math, mais très mauvais en français ou en allemand. Il était tout de même autorisé à continuer son cursus scolaire. Cela me paraissait et cela me paraît encore aujourd'hui quelque chose d'essentiel pour les enfants, à ce moment-là de leur vie, d'avoir la chance de pouvoir se construire un avenir, même avec les difficultés passagères qu'ils traversent, parce que cette période de l'adolescence est difficile. Or, c'est bien pour cette raison que nous nous scandalisons de l'introduction de cette grille-horaire.
Je reprends la note de base, pas seulement pour les très bons élèves, car ce n'est pas forcément là que se situe le problème, mais pour les élèves en situation bancale. Cette note précise - Mme Brunschwig Graf ne l'a visiblement pas lue - qu'une note minimum de 3 est exigée en français et en mathématique pour être promu. C'est là que se situe véritablement l'escroquerie intellectuelle de cette grille-horaire. Elle ne permettra plus à certains élèves, qui ne sont pas une majorité, je vous l'accorde, mais qui constituent tout de même une bonne proportion du cycle d'orientation, d'avoir un cursus scolaire qui leur permette d'accéder par la suite à un avenir à peu près équitable. On ne dispose pas des conditions de sortie, mais il est évident qu'un problème se posera au niveau de l'école de culture générale si cette grille-horaire est maintenue, puisqu'il faudra une note de 3 en mathématique et une note de 3 en français pour être promu du cycle d'orientation à l'école de culture générale. Le préapprentissage a quant à lui grossi au cours de ces dernières années, parce que les patrons n'engagent plus les apprentis sortant du cycle d'orientation. Et il va continuer à grossir avec cette grille-horaire.
Nous nous opposons donc fondamentalement à cette grille-horaire, parce qu'elle casse toute la structure de base du cycle d'orientation, de l'hétérogénéité complète ou de l'hétérogénéité partielle qui permettaient aux élèves en difficulté de pouvoir surnager dans le système scolaire, quel que soit d'ailleurs ce système scolaire.
Un deuxième point doit être discuté aujourd'hui, étant rappelé que nous avons pris un tour d'avance, puisque la majorité de circonstance de la commission n'a pas voulu entrer en matière sur ce projet de loi. Il s'agit donc d'aborder les conditions d'intégration nécessaires à cette hétérogénéité, conditions qu'il faut fixer dès aujourd'hui. Imposer en effet 24 élèves par classe dans un système hétérogène ne serait pas judicieux. Pour nous, l'essentiel se situe à ce niveau. Il s'agit d'abaisser le nombre d'élèves entre 18 et 20 par classe. L'amendement que nous vous proposons aujourd'hui vise des classes de 20 élèves au maximum, ceci afin d'offrir de réelles conditions de travail aux professeurs qui seront affectés aux classes hétérogènes. Il s'agit également de donner une chance à chaque élève, y compris à ceux qui retardent soi-disant les meilleurs, comme je l'ai entendu sur les bancs d'en face, alors que les meilleurs pourraient aider les plus faibles et qu'ils s'en trouveraient d'autant mieux. Il est un peu facile de prétendre que les meilleurs n'ont qu'à aller de l'avant, les plus faibles restant en rade. De ce point de vue là, nous estimons que l'amendement proposant un effectif de 20 élèves par classe donne des garanties suffisantes pour permettre à la majorité des professeurs d'enseigner dans de bonnes conditions et pour permettre une réelle démocratisation des études.
En ce qui concerne le coût, les professeurs et les directeurs traitant de la question de l'hétérogénéité nous ont expliqué que ce système ne coûterait globalement pas plus cher que le système actuel. Nous n'avons donc pas proposé d'amendement à ce sujet. Nous estimons cependant qu'il y a là matière à discussion. C'est bien pour cela que nous proposons un deuxième amendement visant à mettre sur pied une commission de pilotage. Il ne faut bien évidemment pas se leurrer. Mme Brunschwig Graf sera contrainte d'accepter aujourd'hui cette loi. Mais constitutionnellement, elle aura la possibilité de retarder son application de six mois. Rien ne se fera donc dans les six mois à venir. Pour contraindre Mme Brunschwig Graf et éviter un autre coup de force, nous avons intérêt à mettre sur pied cette commission de pilotage, afin d'arriver au mois de septembre, voire au mois de juin de l'année prochaine, non pas dans la gabegie actuelle, mais dans une situation qui soit claire et nette. Mme Brunschwig Graf a la possibilité de geler complètement l'affaire durant les six prochains mois. J'imagine qu'elle va le faire. Cet amendement-là est donc présenté pour faire en sorte que six mois ne soient pas perdus lors de la mise en place de l'hétérogénéité.
En ce qui concerne le moratoire, nous estimons que cette grille-horaire est inadmissible. Elle doit être arrêtée immédiatement. Malheureusement, comme l'a dit M. Lescaze, des professeurs ont été engagés et des parents ont déjà connu des soucis pour se retrouver dans cette grille-horaire en voulant inscrire leurs enfants. Nous nous voyons donc mal redemander aux parents de réinscrire leurs enfants au mois de septembre selon l'ancienne structure, en latine, en scientifique, en moderne ou en générale. Nous estimons pourtant, sur le fond, qu'un moratoire est nécessaire si l'on veut casser - je fais là de l'idéologie - cette idéologie qui veut que les enfants qui n'ont pas obtenu 3 en math et en français, c'est-à-dire les enfants moins forts que les autres, qui ont des carences, ne puissent pas continuer leur cursus scolaire.
Mme Vérène Nicollier (L). A l'heure où l'arrogance est intellectuelle, à l'heure où la politique - de l'éducation devrais-je peut-être préciser - est vilipendée et contestée, il y a probablement quelque chose de rafraîchissant et d'encourageant dans l'effort collectif de réflexion. Je parle de la rentrée 2000. Mais comme l'a dit la rapporteuse de majorité en début de séance, ne confondez pas à souhait, si ce n'est à dessein, la grille-horaire et l'hétérogénéité ! Comme l'a encore dit la rapporteuse, ne bafouons pas la démocratie ! Nous ne voulons pas le forcing idéologique de M. Courvoisier, ni le projet dit politique de M. Beer.
Vous n'êtes pas sans savoir que le nombre d'élèves récemment inscrits correspond au nombre attendu, que le choix du latin est identique à celui des années précédentes, comme l'a indiqué hier Mme la présidente. Nous désirons que tous nos élèves soient éduqués. Nous voulons que chacun ait une chance de grimper l'échelle scolaire, selon ses compétences, selon ses aptitudes et l'enseignement qui lui est donné, dans un système qui a fait ses preuves et qui les fera encore si on lui en laisse le temps.
J'estime, pour ma part en tout cas, que le renvoi en commission serait judicieux.
M. Charles Beer (S). J'aimerais revenir sur un ou deux points, même si j'ai eu l'occasion d'en traiter tout à l'heure. Le premier élément, c'est la question de l'information aux parents et aux élèves du cycle d'orientation. J'ai posé tout à l'heure la question du renvoi de quelques mois, de six mois, pour connaître les conditions d'admission dans le 10e degré. J'aimerais insister sur ce point, Madame la présidente. Si vous avez la réponse, encore une fois, nous l'attendons. En tous les cas, elle ne figure pas dans ce document. J'ajoute au passage que ce document me fait penser à une boutade de Coluche qui disait, en parodiant - je ne me rappelle plus de son nom - un ministre français de l'intérieur des années Giscard : « Dorénavant, pour apprendre le français, les étrangers, pour venir en France, devront savoir le français. » J'ai un peu l'impression qu'il faut avoir achevé ses études et terminé l'université pour tenter vaguement de comprendre ce type de document. Je mets au défi n'importe quel député qui prendrait une heure pour lire cette grille-horaire de la comprendre. S'il s'agit d'un somnifère, il devrait être prescrit sur ordonnance uniquement !
Deuxième élément, je me suis dit que si l'information concernant les conditions d'admission au 10e degré ne figurait pas dans la grille-horaire remise aux parents, elle devait figurer dans l'information interne au cycle d'orientation adressée aux enseignantes et aux enseignants chargés d'appliquer la fameuse réforme. En l'occurrence, il s'agit d'un document qui est daté du 25 mai, qui n'est pas très ancien et qui n'a pas encore atteint la limite Migros-data. Il peut donc être cité dans cette salle. Son point 8 mentionne, sous conditions d'admission au 10e degré : « Les directions générales du cycle d'orientation, de l'enseignement secondaire postobligatoire élaborent pour le 15 décembre 2000 le document « Conditions de passage du 9e au 10e degré. » Cela signifie que ni les parents, ni les enfants, ni les enseignants ne connaissent aujourd'hui ces conditions d'accès. Vous les connaissez : encore une fois, profitez de cette occasion pour nous les donner ! Ce sera une information intéressante pour tout le monde.
Troisième élément. Vous faites référence dans ce même document à des classes dites relais, qui sont, si nous avons bien compris, destinées aux élèves qui ont été sortis du circuit, n'étant plus tout à fait bien intégrés et posant de gros problèmes. L'idée consiste à les sortir momentanément et à chercher, via un programme particulier, à les réintégrer après une remise à niveau. Je déplore, Madame la présidente, que ce type d'information ne figure pas dans la documentation donnée aux parents et aux enfants, puisqu'il s'agit finalement d'une information digne d'attention. Je souhaite d'ailleurs vous poser une question à cet égard. Quels moyens avez-vous prévus pour ces classes dites de relais ? Avez-vous des moyens budgétaires ? Est-ce que des professeurs particuliers sont destinés à cette tâche ? Puisque ces intentions sont affichées, je crois que ces questions, à défaut d'être réglées au moment où vous instaurez une réforme, mériteraient au moins, l'espace de ce débat parlementaire, quelques réponses. Voilà pour cette question de grille-horaire.
J'aimerais juste encore relever que vous avez eu l'occasion, à la suite de l'interpellation urgente de Mme Hagmann, certainement spontanée, de préciser que la rentrée s'était parfaitement bien passée, que les équilibres étaient parfaits, etc. Vous avez pu constater allègrement, si vous me passez cette expression, que tout allait bien dans le meilleur des mondes. Nous sommes malgré tout très loin des informations que nous entendons, qui proviennent d'un certain nombre de cycles d'orientation, où il est non seulement distribué ce somnifère aux parents et aux élèves, mais où ce document est également accompagné de tracts énumérant un certain nombre de dangers et d'autres informations. Nous ne croyons donc pas que tout se passe fort bien et, comme vous l'avez dit, parfaitement allègrement.
Sur la question des amendements, il serait dommage que Mme Brunschwig Graf soit indirectement l'auteur des amendements que nous allons voter aujourd'hui. Pourquoi ? S'il est question d'amendements, c'est parce que Mme Brunschwig Graf a tout simplement refusé le troisième débat lors de notre dernière séance. Il n'avait jamais été question jusqu'alors de déposer des amendements. Pour le minimum de rigueur à laquelle nous devons prétendre, il nous faut quand même dire qu'il n'est pas possible d'adopter en quelques heures un certain nombre d'amendements, pour notamment fixer dans la loi la question de l'effectif maximum de 20 élèves. La modeste visite que nous avons faite dans le cadre de la commission de l'enseignement au cycle de Bois-Caran nous a montré que l'effectif de la classe hétérogène y était de 18 et pas de 20. Je ne fais pas partie des gens qui jettent les dés pour savoir ce que devront être les effectifs. A part cela, je trouve que ce pourrait être un dangereux précédent, pour une 7e année, de mentionner l'effectif, alors que l'on ne le mentionne ni pour la 8e, ni pour la 9e, ni pour le primaire, ni pour le collège, ni pour l'école de culture générale, ni pour le préapprentissage, j'en passe et des meilleures. Il y a là un précédent dangereux, en dehors de l'aspect hasardeux qu'il y a à choisir un effectif de 20 élèves.
La commission de suivi doit de fait exister. Cette commission devrait presque réunir partenaires sociaux et parents d'élèves à l'intérieur du département. On ne peut pas mélanger les genres. Il serait consternant d'arriver à une solution où les partis politiques siégeant au sein de la commission de l'enseignement, qui ont régulièrement l'occasion d'intervenir à tous les niveaux et de poser des questions, aient un rôle à jouer à l'intérieur du département, avec les parents d'élèves et les enseignants, même si nous partageons leur point de vue. Je pense que chacun doit assumer son rôle. Les mélanges, même «ratatouillesques», si vous me passez l'expression, s'ils nous servent aujourd'hui, peuvent s'avérer extrêmement dangereux demain. Nous risquons de créer un certain nombre de précédents. Je voulais quand même attirer votre attention sur ces risques-là.
Dernier élément à propos de l'anglais. Vous savez bien, Monsieur Lescaze, qu'il y a la question de la grille-horaire et la question de l'introduction de l'anglais. Les choses peuvent peut-être être séparées, mais elles mériteraient aussi d'être étudiées dans le sens de mon intervention de tout à l'heure. Seul M. Lescaze a pu le comprendre ainsi. Il n'a jamais été question de prétendre qu'il faudra renoncer à l'étude de l'anglais et qu'il faudra mettre un terme aux contrats qui ont été signés.
Enfin, en terme d'information, puisque l'on dit qu'il y a eu un certain nombre de désinformations, que des articles extrêmement négatifs ont donné un avantage à la déstabilisation, permettez-moi de vous signaler que Mme la présidente du département m'a signalé, la veille de la publication de l'article mentionné, que celui-ci allait paraître. Du reste, nous n'avons pas été surpris du tout, probablement parce que l'équilibre de l'information le veut ainsi, de trouver dans la même édition une interview de Mme Brunschwig Graf et une lettre de M. Cottier rappelant les saints principes de la sainte grille-horaire !
M. Michel Halpérin (L). En écoutant M. Pagani tout à l'heure, j'ai bien compris pourquoi les enfants dont il s'occupait autrefois ne se sentaient pas bien ! J'ai eu la même impression en l'écoutant. D'autre part, en écoutant M. Beer se livrer à cet extraordinaire numéro qu'il a qualifié lui-même de «ratatouillesque», je me suis bien rendu compte du galimatias dans lequel on nous entraîne à l'occasion de ce débat !
Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs, que vous avez imposé un troisième débat, contre les règles habituelles de fonctionnement de notre parlement, pour débattre aujourd'hui, si j'ai bien compris, d'un projet qui ne porte que sur l'hétérogénéité. Vous avez remarqué que vous étiez légèrement en porte-à-faux par rapport à un certain nombre de principes. Vous avez donc éprouvé le besoin de justifier votre attitude. Je rends ici hommage à la temporaire probité intellectuelle montrée tant par M. Pagani que par Mme Dallèves pour nous expliquer que la vraie raison du projet traité aujourd'hui est de combattre un autre projet sur lequel on a échoué autrefois. Cela nous montre simplement l'usage que vous faites de notre activité parlementaire. Malgré l'importance des prestations promises aujourd'hui par M. Brunier ou par M. Beer, M. Bernet s'est lui-même lassé. Il vous a quittés avant de vous avoir entièrement entendus. C'est dire que c'était pénible !
Je pourrais en rester là si j'étais d'humeur joueuse. Mais je trouve pathétique, Mesdames et Messieurs les députés, le débat que nous avons depuis deux semaines sur ce projet de loi. Je voudrais signaler à votre attention que cette manière de procéder est sans précédent, que je sache, dans l'histoire parlementaire des quinze dernières années. Je n'ai pas encore vu, dans ce parlement, un groupe proposer un tel abus de sa majorité en faisant inscrire à l'ordre du jour, en l'absence du rapporteur, en l'absence du chef du département, un vendredi soir de Pentecôte à 23 h 30, un projet de cette importance. Je n'avais pas encore vu un groupe ou un ensemble de groupes faire un tel abus de leur majorité, procéder ensuite à une inscription, contre les règles parlementaires coutumières en ce sein, du troisième débat. Je n'avais pas encore vu non plus des gens, portés soit par une haine personnelle, soit par une vindicte politique telle qu'elle les conduise à une extraordinaire entreprise de déstabilisation d'un ministre, utiliser des arguments faux, approximatifs ou incomplets, en brandissant des prospectus et en en faisant la lecture comme s'il s'agissait de la Bible, de l'Evangile ou tout simplement du texte de loi que nous sommes supposés creuser aujourd'hui. J'ai été attentif à l'espèce de danse des voiles vertueuse à laquelle s'est livrée tout à l'heure Mme Deuber-Ziegler pour nous expliquer que si vous attaquiez, c'est finalement parce que vous n'aviez pas été satisfaits de l'attitude des autres et que vous aviez eu le sentiment que la majorité, que vous avez qualifiée de circonstance, au sein de la commission vous avait infligé un camouflet qui justifiait ensuite toutes les représailles.
Je vous rends attentifs, Mesdames et Messieurs les députés, au fait que vous usez exactement de ce genre de procédés en commission lorsque vous êtes majoritaires circonstanciels et au parlement lorsque vous êtes majoritaires circonstanciels ou permanents. Cela ne vous dérange d'habitude pas, ni de refuser d'entrer en matière sur les projets de lois, ni de ne pas tenir les promesses que vous faites ici quant à la tenue de nos ordres du jour. Vous avez pris goût, petit à petit, à cet abus de pouvoir que vous pratiquez constamment. L'appétit vient en mangeant, l'appétit de puissance aussi ! Ce qui est triste, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que votre goût pour l'exercice et l'abus du pouvoir - sur lequel nous prenons des notes, figurez-vous, parce que jamais, lorsque la majorité était à droite, nous ne vous avons réservé ce genre de traitement... (L'orateur est interpellé.) Jamais ! Jamais ! Nous n'avons jamais utilisé ces méthodes, mais nous apprenons avec vous et nous prenons note que vous les jugez raisonnables et acceptables. Nous saurons donc que vous vous inclinerez lorsque vous serez minoritaires. Nous n'avions pas observé, lorsque nous vous réservions des traitements autrement plus indulgents il y a quelques années seulement, que vous vous en accommodiez.
Je vous signale, Mesdames et Messieurs, que ma consternation dans cette affaire est à la mesure du sujet que vous avez choisi pour évacuer votre haine et votre frustration. Vous avez pris vos propres enfants en otage ! C'est une entreprise d'une perversité sans précédent. Je me demande comment vous pouvez rentrer chez vous et discuter de ces sujets avec vos conjoints et vos enfants, alors que vous leur faites subir un traitement dont vous ne connaissez pas le début des conséquences. Elles seront bonnes ou elles seront mauvaises. Contrairement à vous, je ne prétends pas savoir. Et pourtant, j'ai quelques enfants qui ont fait un parcours scolaire comme chacun de vous. Mais personnellement, je ne me hasarderai pas à faire semblant de connaître ce qu'aucun d'entre vous ne maîtrise visiblement. Cela vous est égal de mettre en danger vos propres enfants. Dans ce sens-là, vous êtes lamentables ! Vous êtes exactement ces hommes et ces femmes que décrivait Bernanos il y a quelques années : « Vous avez la tripe sensible et le coeur dur. » !
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R), rapporteuse de majorité. J'ai plusieurs réponses à apporter. Tout d'abord, chaque député pourra vérifier en son âme et conscience l'hypothèse que j'ai énoncée au début, à savoir que la grille-horaire n'est pas très éloignée, en tout cas pas étrangère au présent débat. Pour répondre ensuite à M. Brunier, pas si attentif que cela - je lui tiens mes petits mémos à disposition - j'ai simplement précisé à propos de la grille-horaire qu'elle n'a pas encore eu le temps de faire ses preuves. Nous nous rejoignons par ailleurs, Monsieur, lorsque vous constatez que l'on ne tient pas compte de l'inquiétude des parents, de certains enseignants, qui ont de la peine à se repérer dans cette jungle d'informations et de désinformations. Jusque-là, nous sommes tout à fait d'accord. Pour répondre à M. Beer, je veux bien croire que ce projet a été pensé depuis trois ans par votre parti. Cela n'explique toutefois pas que vous ne puissiez pas attendre encore six mois pour vous baser sur des recherches pédagogiques solides.
Pour répondre aussi à Mme Dallèves, je la félicite pour sa probité intellectuelle et pour avoir appuyé mes propos sur l'ambiguïté de notre débat. Je constate malgré tout que la plupart d'entre nous, députés, de chaque côté du parlement, se transforment en spécialistes de la réforme du cycle d'orientation sans en avoir les compétences pédagogiques, sous prétexte qu'ils sont des élus.
La proposition de l'hétérogénéité mérite un véritable débat de société. De plus, je ne savais pas que je présidais une commission vivant de putsch en putsch. Je la considérais plus sérieusement et j'attendais de vous une véritable prise de conscience des enjeux pour l'avenir de nos enfants. Je pense in fine qu'il serait judicieux de renvoyer en commission ce projet de 7e hétérogène, avec le projet de loi des Verts, afin qu'ils soient traités avec le sérieux que cette réforme mérite et que l'on traite en commission de l'enseignement l'ensemble du projet de réforme du cycle d'orientation.
Mme Cécile Guendouz (AdG). Juste deux considérations d'ordre général, peut-être avant de conclure. Je ne sais cependant pas si je suis la dernière !
Quoi qu'il en paraisse, pour nous aussi, notre seule motivation, c'est le bien des enfants (L'oratrice est interpellée.) Quoi qu'il en paraisse pour certains ! A propos de la soi-disant précipitation dont parlait Mme Hagmann, il y a vingt ans que bon nombre de parents, en concertation avec le plus grand nombre d'enseignants, ont eu tout loisir de voir les avantages et l'utilité du tronc commun. Mes enfants ont suivi Budé. Je peux donc en parler en connaissance de cause. Nous voulons tout simplement l'égalité et les mêmes avantages pour tous les enfants.
M. Bernard Lescaze (R). Tout d'abord, je rappelle respectueusement que j'ai demandé un renvoi en commission. Je suis un peu surpris que personne n'argumente sur cette demande de renvoi. Pour ma part, je maintiens ma demande.
Ensuite, j'aimerais quand même dire une ou deux choses sur le fond. On a pu constater, notamment grâce aux députés de l'Alliance de gauche, qu'il y a quand même un problème de grille-horaire. Je regrette que la représentante du parti des Verts, occupée sans doute ailleurs, n'ait pas exactement compris ce que j'expliquais à ce sujet. Cela dit, ce n'est pas très important. De même qu'il n'est sans doute pas très important non plus, au point où nous en sommes dans ce débat, de relever simplement que certaines personnes ont reproché l'autre soir à la présidente du département de n'être pas là - parce que le mandat de député suppose d'être toujours présents - et que les mêmes personnes se sont étalées dans la presse, alors qu'elles n'ont assisté ni au débat de la dernière séance - elles ont beau signer des projets de lois - ni à ce débat. Je n'y comprends rien. Je vois que certains signent beaucoup de choses, mais les signent en réalité pour se faire valoir à l'extérieur et n'ont pas le vrai souci de nos enfants.
Vous ne m'avez pas entendu l'autre soir, ni cet après-midi, critiquer l'hétérogénéité. Vous ne m'avez pas entendu dire : « C'est quelque chose de mauvais ! » Je vous ai même parlé l'autre soir d'une expérience personnelle. Malgré tout, et bien que nous n'ayons pas reçu ce fameux rapport, il faut quand même admettre que le système de l'hétérogénéité - je le dis clairement à M. Pagani, qui a avancé une contrevérité - coûte plus cher que le système actuel de sections. Il ne coûte certes pas beaucoup plus cher, environ 10 à 15% de plus, mais ce n'est déjà pas si mal au vu du budget total du cycle d'orientation. Il s'agit de savoir si, pour ces 10 à 15% de plus, le gain pédagogique sera acceptable et les résultats à la hauteur. C'est en effet cela qui nous intéresse, c'est-à-dire avoir des élèves bien formés qui puissent ensuite s'épanouir dans leur vie professionnelle. Du moins j'imagine que c'est votre souci. C'est en tout cas le mien. On peut dire que les résultats sont en réalité un tout petit peu moins bons qu'avec des classes à sections, sans que l'on puisse vraiment le mesurer. C'est pour cela qu'il aurait été intéressant d'avoir ce rapport du SRED. Si je résume, vous voulez en réalité faire quelque chose d'un tout petit peu moins bon avec un peu plus d'argent. Permettez-nous de vous dire qu'il n'y a pas urgence à aller dans ce sens, à moins qu'il y ait des présupposés idéologiques forts et précis ! Voilà pourquoi j'ai argumenté en faveur du renvoi en commission.
A part cela, je constate que les trois partis de l'Alternative sont en réalité beaucoup plus divisés qu'il n'y paraît. Vous avez déposé un second projet qui demande l'hétérogénéité dans les trois degrés, projet signé par l'Alliance de gauche et les Verts, mais pas par les socialistes. Nous avons aujourd'hui des amendements présentés par l'Alliance de gauche, mais que, si j'ai bien compris, parce qu'il y a parfois eu un peu de bruit dans cette salle, les socialistes et les Verts ne soutiennent pas. Je vois donc qu'il y a beaucoup de variations, même dans ce front prétendument uni. C'est pour cela que je pense qu'il serait raisonnable, puisque vous nous avez vous-mêmes dit que ce projet ne pourrait pas entrer en pratique immédiatement, ni même l'année prochaine probablement, de renvoyer ces projets en commission et de les étudier un peu sérieusement. Je ne sais pas ce qui s'est exactement passé au sein de la commission de l'enseignement. Je suis un peu étonné d'entendre parler de putsch, de coup de force, etc. Mais si vous avez réellement le souci des élèves, vous pouvez attendre encore quelques mois. Je vous rappelle quand même que les collèges à classes hétérogènes existent depuis vingt-deux ou vingt-trois ans.
J'aimerais faire une remarque à ceux qui font parler les morts, à ceux qui font parler André Chavanne. Pour ma part, je ne le ferai pas parler. Je me contenterai de vous rapporter ce qu'il a dit. M. Brunier, ou un autre, car je ne veux pas lui faire porter le chapeau, a expliqué qu'il penserait comme ceci s'il était parmi nous aujourd'hui. Nous n'en savons en réalité rien. En revanche, ce qui est certain, c'est qu'André Chavanne, lorsqu'il était chef du département de l'instruction publique, n'a jamais voulu que l'expérience des classes hétérogènes s'étende à l'ensemble des cycles d'orientation. Au contraire, il a toujours voulu, maintenu et souhaité qu'elle soit confinée à trois cycles d'orientation sur dix-sept. C'est la vérité historique. C'était comme cela jusqu'en 1985. Il s'est ensuite trouvé que M. Dominique Föllmi, avec comme serviteurs de l'Etat autour de lui la plupart des hauts fonctionnaires encore nommés par André Chavanne, a maintenu la même position. Je vous ai rappelé l'autre soir, mais personne n'a sans doute été voir de plus près, les textes de Marc Nicole et de Robert Hari. Marc Nicole citait Robert Hari et faisait part de sa propre expérience, extrêmement réservée, à l'égard des classes hétérogènes. Tout le monde pense que c'est humainement une bonne idée. Je la partage aussi. Je pense plus ou moins qu'il faut le faire. Mais il nous manque les méthodes, les expériences et les bilans dont vous vous targuez, notamment le parti socialiste qui nous demandait hier des bilans et des études en matière de clause du besoin médical. En matière d'enseignement, on a l'impression, à vous entendre, que toutes les expériences pédagogiques ont été faites, que le bilan a été tiré et qu'il n'y a plus qu'à aller dans une seule direction et au pas de charge, que dis-je, au pas de chasseur alpin, à toute allure et presque en courant !
Non, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas comme cela qu'il faut procéder. Je vous adjure d'y réfléchir à deux fois. Pour ma part, je n'aurai pas ce dilemme de savoir si l'enseignement genevois, qui est encore aujourd'hui l'un des meilleurs au monde, va le rester ou s'il va diminuer de qualité grâce à vos initiatives maladroites. Je n'ai malheureusement pas d'enfant. Je ne peux donc pas mesurer, je le regrette, dans le fruit de ma chair ce qu'il adviendra. Mais je ne suis pas convaincu que vous ayez raison. Quelques mois de plus, avec le rapport qui, semble-t-il, est prêt, permettront de conclure valablement sur ce qui s'est fait avec un certain succès durant vingt-deux ans, mais qui n'est quand même pas aussi évident et aussi avantageux que certains veulent le dire.
Il est en conclusion clair que si le renvoi était par malheur refusé, le groupe radical refuserait également les amendements. Je défendrai alors à nouveau l'amendement que j'ai déposé la dernière fois, à savoir l'introduction progressive de l'hétérogénéité en 7e. Dans mon esprit, cela ne signifie pas une introduction durant un nouveau quart de siècle. Mais dans les collèges aussi, les enseignants doivent être préparés à accepter l'hétérogénéité. Parce qu'ils ne le sont pas tous. Il faut que vous en soyez conscients. Beaucoup d'enseignants sont hostiles à l'hétérogénéité. Il ne m'appartient pas de les juger. Je pense qu'ils ont autant de bonnes raisons de la refuser - je n'ai pas dit de la rejeter - que d'autres de l'accepter. Vous devez aussi tenir compte de cette volonté de certains enseignants, due peut-être à leur expérience.
Je maintiens par ailleurs que l'inquiétude des parents, que vous avez très bien analysée, est quand même due en partie à l'insécurité qui se développe avec ce genre de projet. Cette inquiétude est importante. Je vous rappelle que les parents souhaitent certes que leurs enfants soient bien formés, mais ils s'inquiètent aussi bien davantage de problèmes très concrets, comme la violence ou la drogue à l'école. Or, on n'a pas beaucoup entendu parler de ces problèmes-là au Grand Conseil ! (Applaudissements.)
Le président. Je donne la parole à Mme Guichard. Les intervenants se prononcent actuellement sur le renvoi en commission.
Mme Nelly Guichard (PDC). Je soutiens bien sûr la demande de renvoi en commission. Je pense en effet qu'il serait utile, comme vient de l'expliquer M. Bernard Lescaze, de pouvoir discuter des deux propositions, contenues l'une dans le projet de loi signé par les Verts et par l'Alliance de gauche et préconisant une hétérogénéité à tous les degrés du cycle, l'autre dans le projet de loi dont nous discutons cet après-midi.
Mme Dallèves avait l'air de regretter tout à l'heure que Mme Brunschwig Graf n'ait pas proposé d'amendements entre les deux premiers débats et la séance de cet après-midi. Je trouve cette remarque assez irréaliste et pour le moins surprenante. En effet, je ne vois pas très bien comment cela pourrait être possible dans un délai aussi court. Vous savez en outre que c'est vous qui avez demandé l'inscription du projet de loi 7697 à l'ordre du jour.
Il a beaucoup été question de l'insécurité autour des cycles et des inscriptions, insécurité et manque d'informations pour les parents et pour les enfants. C'est vrai, mais certains documents ont été publiés depuis ce printemps, pour ne citer que le papier de la FAMCO, publié le 1er avril 2000 dans le « Courrier » et qui pose une série de petites questions insidieuses sous prétexte que ce sont des questions de parents, questions que la FAMCO a très bien orientées en non-réponses. C'est déjà une première mise en condition. On commence gentiment au printemps, on continue ensuite comme cela de semaine en semaine. Au moment de l'inscription au cycle, la Coordination enseignement déploie sa dernière arme et distribue un document qui s'appelle Cap'Co en expliquant qu'il ne faut pas laisser introduire cette nouvelle grille-horaire élitiste. Les parents sont évidemment déstabilisés et désécurisés. Lorsqu'ils ne savent plus où ils en sont, à force d'informations divergentes dans les journaux et par papiers interposés, les enfants sont tout aussi déstabilisés et désécurisés qu'eux. A qui la faute ?
M. Charles Beer (S). Je voudrais juste dire que nous nous opposons bien évidemment au renvoi en commission du projet de loi socialiste sur la 7e hétérogène. Je profite de l'occasion pour revenir sur la résolution quelque peu informelle mentionnée tout à l'heure par M. Halpérin. Puisqu'il est revenu dans la salle, je peux le lui dire directement. Sa résolution dénonçant les putschistes preneurs d'otages pervers pourrait être renvoyée à la commission des droits politiques !
M. Christian Grobet (AdG). Celles et ceux qui demandent le renvoi en commission, en invoquant le désir d'y discuter de cette loi, tiennent un discours pour le moins surprenant, puisque ce sont ces mêmes députés qui ont refusé de discuter de ce projet de loi en commission, profitant d'une majorité de circonstance pour refuser d'entrer en matière. C'est vous, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente, qui avez provoqué la discussion en séance plénière plutôt qu'en commission. Vous êtes donc pour le moins malvenus de vous plaindre maintenant de cette discussion en séance plénière et de demander soudain que l'on renvoie le tout en commission, alors que vous n'avez pas voulu discuter en commission. Vous me permettrez de dire que tout ceci est un peu fort de tabac !
Maintenant, M. Lescaze revient sur ce prétendu coup de force, coup de force qui a en fait été opéré, comme M. Pagani l'a fort justement rappelé tout à l'heure, par vos amis politiques, Monsieur Lescaze. Pas par vous-même, mais par vos amis - on ne vous accuse pas personnellement - et bien sûr par Mme de Tassigny qui lève déjà la main. C'est effectivement vous, en tant que présidente de la commission, qui avez forcé le vote. Vous avez ainsi obtenu ce que vous avez voulu, à savoir cette discussion en séance plénière. Mais nous n'accepterons pas cette accusation, Monsieur Lescaze, et encore moins celle de M. Halpérin, qui évoque une prétendue haine de notre part en utilisant des propos que je m'abstiendrai de qualifier. Lorsqu'on les relira dans le Mémorial, on verra quel était l'état d'âme de ce député libéral ! Je m'abstiendrai donc de qualifier les propos dont il nous a abreuvés tout à l'heure. J'aimerais par contre lui répondre sur le fond.
Nous n'avons, jusqu'à présent, pas copié les méthodes que la droite à utilisées lors de la législature précédente, parsemée de discussions immédiates et d'exclusions. Je rappelle simplement qu'il a fallu attendre cette législature pour qu'un représentant du parti du Travail accède, enfin, à la présidence du Grand Conseil et pour que l'Alliance de gauche puisse accéder à certains organismes dont nous étions exclus. Et contrairement à ce que vous avez fait lors des législatures précédentes en imposant toujours un Bureau à majorité de droite, nous, l'Alliance de gauche, avons proposé qu'un représentant de chaque parti y siège, même si cet équilibre, qui nous paraît juste, se fait aujourd'hui à notre détriment, puisqu'il n'y a pas de majorité au sein du Bureau. La composition actuelle du Bureau permet en fait à la droite de continuer à bloquer l'inscription de troisièmes débats à l'ordre du jour du Grand Conseil... (Brouhaha.) Je comprends que ce rappel vous gêne... Mais nous ne vous laisserons pas faire avec votre tactique consistant à refuser l'inscription de troisièmes débats à l'ordre du jour du Grand Conseil... (Huées.) C'est cela qui est antidémocratique ! Vous persistez, Mesdames et Messieurs de la droite, dans vos procédés... (L'orateur est interpellé.) Vos injures me laissent complètement indifférent, Monsieur Annen ! Nous savons que vous êtes un habitué de ce genre de discours. Vous êtes incapable de faire autre chose que de proférer des injures... (Brouhaha.) J'attends un peu d'ordre, Monsieur le président !
Le véritable coup de force a été opéré par Mme Brunschwig Graf... (Brouhaha.) ...en imposant une nouvelle grille-horaire, en supprimant des sections du cycle d'orientation, en créant une nouvelle situation, dont les parents ignoraient tout jusqu'à la veille de l'inscription de leurs enfants, et, comme l'a dit M. Beer, en remettant aux parents un document qui leur était totalement incompréhensible. C'est cela le véritable coup de force ! Comme il a été fait à la dernière minute, il est aujourd'hui bien difficile pour nous d'y répliquer.
Ceci étant dit, je reviens aux amendements que nous avons déposés et dont nous pensons qu'il n'est pas nécessaire de les renvoyer en commission. M. Charles Beer a expliqué tout à l'heure combien certaines choses s'avéraient consternantes. Ce que je trouve pour ma part consternant, chers collègues, ce sont les beaux discours, les proclamations de foi et le refus de les concrétiser. On nous dit ici, sur certains bancs, que l'on est favorable à un comité de suivi, que cela va de soi, mais en même temps qu'il ne faut surtout pas l'inscrire dans la loi ! On ne sait toutefois pas vraiment pourquoi. On nous dit aussi qu'il faut réduire le nombre d'élèves dans les classes hétérogènes et que cela va de soi. Mais lorsqu'il s'agit de fixer un plafond dans la loi, ne serait-ce que pour une année, on ne veut pas le faire ! J'avoue que c'est consternant, Charles Beer, et que cela m'est incompréhensible. Il y a un seul point sur lequel je donnerai raison à M. Lescaze. Au niveau des principes, nous sommes unis au sein de la nouvelle majorité. Mais lorsqu'il s'agit de les appliquer, je le regrette, nous ne sommes plus unis.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous stoppons nos travaux et nous les reprendrons à 17 h 5. Nous poursuivrons ce débat à l'issue des interpellations urgentes.
La séance est levée à 16 h 45.