Séance du
jeudi 16 décembre 1999 à
17h
54e
législature -
3e
année -
3e
session -
63e
séance
PL 8162
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Transfert du patrimoine administratif au patrimoine financier
Le Conseil d'Etat est autorisé à transférer les 12 500 actions nominatives Crossair du patrimoine administratif au patrimoine financier.
Art. 2 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
EXPOSÉ DES MOTIFS
L'Etat de Genève, en tant que canton aéroportuaire, a régulièrement participé aux augmentations de capital de la société Crossair, en faisant usage de son droit de préemption. Actuellement, l'Etat de Genève dispose de 21 500 actions nominatives Crossair en portefeuille, dont 12 500 inscrites au patrimoine administratif. Cela représente au total 1,6 % des droits de vote.
Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993 (ci-après LGF), la notion de patrimoine administratif a été précisée, ce dernier étant défini à l'article 62, alinéa 2 de la LGF, de la manière suivante : « Le patrimoine administratif comprend les biens affectés à l'accomplissement des tâches publiques. Ce sont notamment les investissements, les prêts, les subventions aux investissements, ainsi que les participations permanentes ou dotations ».
Or, dans l'esprit d'une gestion publique moderne et dans le contexte actuel, il faut bien se rendre à l'évidence que la possession d'actions d'une compagnie aérienne ne relève plus prioritairement de « l'accomplissement des tâches publiques ».
Le fait, par ailleurs, que le développement de la compagnie Crossair se fasse depuis l'aéroport de Bâle-Mulhouse et qu'elle soit détenue à près de 70 % par le Groupe Swissair sont autant d'éléments supplémentaires qui confortent ce raisonnement.
A noter également que, lors de l'assemblée générale des actionnaires du 17 juin dernier, ces derniers ont décidé de réduire de 17 à 9 le nombre des administrateurs, et ceci dans un souci de simplification et d'allégement. Le canton de Genève, qui était représenté jusque-là, a renoncé à son siège.
Maintenir, dès lors, aujourd'hui encore ces actions au patrimoine administratif ferait non seulement se perpétuer un anachronisme, mais s'inscrirait à contre-courant des efforts, entrepris depuis quelques années déjà, d'épuration et de mise en conformité du bilan de l'Etat avec les dispositions légales, notamment l'article 62, alinéa 2 de la LGF. L'inscription de la totalité des actions au patrimoine financier permettra donc une plus grande souplesse pour le futur en matière de gestion.
Au vu des éléments qui précèdent, nous vous recommandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'autoriser le Conseil d'Etat à transférer les 12 500 actions nominatives Crossair du patrimoine administratif au patrimoine financier.
Préconsultation
M. Rémy Pagani (AdG). Je profite de ce projet de loi pour souligner un certain nombre de problèmes.
J'ai pris acte du fait que l'Etat investissait dans Crossair. Comme vous le savez, c'est maintenant un poisson pilote de l'entreprise Swissair, mais c'est surtout un poisson qui pilote une déréglementation très importante dans le monde de l'aviation !
J'avais dans l'idée que l'Etat défendait des conditions de travail acceptables, pour ses propres employés comme pour les employés des entreprises dont il est actionnaire. Or, comme une récente émission de télévision l'a démontré, la politique salariale de Crossair est tout sauf sociale : elle paie mal ses pilotes, elle paie mal le personnel à terre, elle paie mal ses hôtesses de l'air... Ce projet de loi pourrait en l'occurrence être l'occasion de se pencher sur la question de nos placements en général. Au niveau mondial, passablement de caisses de pensions placent dorénavant leurs fonds dans des entreprises qui respectent une charte, un certain nombre de critères écologiques et sociaux. Il s'agirait pour nous aussi de respecter un minimum de déontologie en ce qui concerne nos placements et l'achats d'actions.
Je suis a priori favorable à ce projet de loi et à ce transfert d'actions, mais si l'Etat n'arrive pas à imposer à Crossair le respect d'un minimum de règles sociales et la signature d'une convention collective négociée avec les syndicats, je lui demanderai de se défaire de ces actions.
M. Robert Cramer. Juste un mot, Mesdames et Messieurs, pour répondre à M. Pagani. C'est effectivement pour lui permettre de pouvoir plus facilement réaliser ses actions Crossair que l'Etat vous demande l'autorisation de les transférer du patrimoine administratif au patrimoine financier. De la sorte, nous pourrons envisager, dans le courant de l'année prochaine et pour autant évidemment que le marché permette de le faire dans des conditions favorables, de réaliser ces actions, celles-ci n'ayant en réalité pas grand-chose à voir avec l'accomplissement d'une tâche publique, pour reprendre la définition du patrimoine administratif.
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.