Séance du
vendredi 19 novembre 1999 à
17h
54e
législature -
3e
année -
1re
session -
56e
séance
M 1285-A
En date du 4 mai 1999, le Grand Conseil a été saisi de la proposition de motion 1285 concernant le saccage du parc de Palexpo. Acceptée lors de la séance du 20 mai 1999, cette motion invite le Conseil d'Etat :
« à donner des explications sur l'abattage de chênes centenaires dans le parc de Palexpo et sur l'éventrement de celui-ci par des tracs en faisant, le cas échéant, interrompre les travaux et en indiquant comment les arbres abattus seront remplacés. »
Peut-on vraiment parler de saccage pour l'enlèvement d'arbres dangereux dans un parc ?
Il faut, en effet, souligner que les arbres de la campagne Sarrasin ne sont pas en bon état, ayant souffert de l'implantation d'un volumineux bâtiment qui a perturbé leur équilibre hydrique et d'un chantier de construction qui a fortement compacté le sol de certains secteurs. Ils présentent régulièrement des branches mortes et même lorsqu'ils sont verts, leur système racinaire est atteint de forte pourriture.
Il s'agit donc d'assurer la sécurité des utilisateurs du parc et, lorsque cela est nécessaire, d'abattre certains sujets, qui sont remplacés par des plantations compensatoires. C'est ce que fait régulièrement la Fondation de Palexpo sous la surveillance du Service des forêts, de la protection de la nature et du paysage. C'est ainsi que, dans le courant de l'hiver 1998-1999, une campagne d'assainissement a fait l'objet d'une autorisation en abattage et élagage d'arbres, délivrée le 22 janvier 1999. Peu de temps après, le 30 du même mois, un gros chêne, non compris dans cette autorisation, tomba sans motif apparent, heureusement sans atteindre le public fréquentant le parc. Une expertise fut demandée pour examiner plus en détail l'état sanitaire et le danger potentiel représenté par la lignée de gros chênes restant encore debout. Ses conclusions firent apparaître qu'il était inévitable d'abattre 8 arbres, les 12 autres nécessitant des soins importants (taille, haubanage et nutrition). Ces abattages et élagages firent l'objet d'une autorisation en bonne et due forme, publiée dans la Feuille d'avis officielle le 16 avril 1999.
Aucune observation ne fut formulée avant l'engagement des travaux sur le site. Vu l'ampleur de l'intervention, le maître d'ouvrage, en l'occurrence la Fondation de Palexpo, informa de manière circonstanciée la population du Grand-Saconnex et les personnes fréquentant le parc.
Malheureusement, cette information coïncida avec le moment où, d'une part, les abattages faisant l'objet de l'autorisation du 22 janvier 1999 débutaient et où, d'autre part, des travaux de remodelage en terrasses de l'extension des surfaces d'exposition en plein air sur le bas de la parcelle étaient entrepris. La confusion qui en résulta, largement relayée par la presse, est certainement à l'origine de la présente motion.
Les compensations exigées pour les deux autorisations délivrées font partie des dossiers administratifs. On relèvera qu'ils auraient pu être consultés auprès du Service des forêts, de la protection de la nature et du paysage. Les plantations seront effectuées dès l'automne 1999 : l'arborisation du parc sera complétée et 12 nouveaux chênes garniront la lignée qui sera reconstituée au fur et à mesure que les anciens sujets devront être éliminés.
A titre de conclusion, il convient de souligner que l'examen du dossier est illustratif de la pratique de l'administration en matière de conservation d'arbres. L'abattage n'intervient que si l'on ne peut faire autrement : c'est ainsi que la solution retenue a permis de sauvegarder 12 arbres sur 20. Et lorsque l'abattage est inévitable, une compensation est exigée, à la charge du propriétaire.
En espérant avoir ainsi répondu à l'invite de la motion, le Conseil d'Etat vous prie de prendre acte du présent rapport.
Débat
M. Rémy Pagani (AdG). Je me suis laissé aller à des propos un peu bizarroïdes tout à l'heure, et je m'en excuse...
Je profiterai de votre attention pour signaler au conseiller d'Etat qui n'est malheureusement pas présent - M. Moutinot - que le rapport du Conseil d'Etat ne répond pas du tout à certains problèmes signalés dans notre motion. Par exemple, la loi qui a été votée par ce parlement le 22 avril 87 précisait, s'agissant de la campagne Sarrasin et notamment du parc d'agrément que l'Etat de Genève construisait pour la population et pour les visiteurs de Palexpo, dans un libellé bien précis, que toute transformation de ce parc devait être soumise à notre Grand Conseil. Mais cela n'a pas été fait.
Je demande donc formellement au président du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, s'il va enfin nous présenter un projet de loi permettant de contrer l'abus de droit qui est pratiqué dans la campagne Sarrasin ces derniers temps. La question est importante, puisqu'un certain nombre d'arbres ont été coupés, des chênes centenaires, qui, paraît-il, étaient en fort mauvais état, mais aussi des arbres qui dérangeaient à certains endroits, parce qu'on voulait y installer des tentes, niveler le terrain et le mettre en terrasses. Nous avons d'ailleurs constaté que ces terrains sont toujours en terrasses et qu'ils n'ont pas été remis en état. Je demande donc également au président du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement ou à son substitut... (Exclamations.) ...à son suppléant, pardon. Je suis vraiment très fatigué !
M. Claude Blanc. Un ersatz !
M. Rémy Pagani. Deux jours de séances, c'est un peu long ! Je demande donc à M. Cramer ce qu'il compte faire pour remettre ce terrain en l'état. Ou qu'il me dise si ces terrasses vont rester telles quelles et faire l'objet, à chaque extension de Palexpo, d'accaparement des exposants, ce qui signifie une quasi interdiction pour les habitants du quartier de se promener. Je rappelle que pas mal d'habitants nous ont signalé ne pas pouvoir se rendre dans le parc au moment de Palexpo, car ils étaient agressés par des chiens policiers et des gardes Protectas qui les empêchaient d'accéder à leur espace vert. Pourtant ce parc, comme cela a été voté en 87, devrait toujours rester un parc public.
En conclusion, je m'élève avec vigueur contre cette atteinte inqualifiable à des droits tout de même essentiels comme la préservation des espaces verts. J'ai bien l'intention, par d'autres moyens, de faire respecter les droits de la population qui vit dans des quartiers denses et qui a besoin de ces espaces verts pour se promener...
M. Claude Blanc. Pour faire pisser les chiens !
M. Rémy Pagani. Je continue, bien que cela ne fasse pas plaisir aux députés des bancs d'en face ! ...et se reposer. C'est nécessaire pour les personnes âgées qui ont eu une vie de dur labeur et qui aimeraient bien pouvoir disposer d'emplacements d'agrément de qualité.
M. Roger Beer (R). Je suis étonné d'entendre les propos de M. Pagani qui joue les spécialistes sur ce sujet !
Une voix. C'est un spécialiste ! Il sait tout mieux que tout le monde !
M. Roger Beer. Une fois de plus, vous partez d'un problème qui n'en est pas un, d'une non-information, pour faire un procès, et de surcroît à quelqu'un qui est absent ! En l'occurrence, il s'agit d'abattage d'arbres. C'est vrai qu'Orgexpo aurait dû faire une information, mais toutes les autorisations nécessaires ont été délivrées. Monsieur Pagani, vous profitez de la haine que vous éprouvez contre Palexpo pour remettre en cause des abattages d'arbres qui étaient autorisés.
Une voix. Pagani, t'es nul !
M. Roger Beer. Ce qui est extraordinaire, c'est que les arbres en question étaient en si mauvais état qu'un de ceux qui devaient rester est tombé de lui-même !
Une voix. Il était en aussi mauvais état que toi !
M. Roger Beer. Je voulais vous remercier de votre réponse, Monsieur le conseiller d'Etat : elle est brève, mais bonne ! Pour moi, cette question n'aurait même pas dû être posée.
Monsieur Pagani, les huit chênes qui ont été coupés pour des raisons de sécurité évidentes ont été remplacés par douze chênes ! D'ailleurs, le douzième, qui était offert par les Floralies, a été planté ce matin. Cela me permet de faire un petit peu de pub au passage : allez voir les Floralies, cela vaut le coup !
Une voix. Au lieu de gueuler ! Bravo, Roger !
M. Roger Beer. Je crois que vous oubliez que Genève applique la loi la plus sévère du monde s'agissant de l'abattage des arbres. Cette loi est si sévère qu'il est même parfois difficile de couper des arbres dangereux qui se trouvent dans un parc public où les gens vont promener leur chien - il peut s'agir de vos copains ou de vos électeurs ! (L'orateur est interpellé par M. Christian Grobet.) Parfaitement, Monsieur Grobet, il est parfois difficile d'obtenir les autorisations ! Et vous le savez très bien ! Alors, l'attaque sur l'abattage de ces arbres est vraiment totalement à côté de la plaque ! S'il y a un canton où les arbres sont protégés, où il est difficile de les abattre et où on est obligé de les remplacer, c'est bien Genève !
A ce titre, Monsieur Pagani, je n'ai absolument pas compris l'objet de votre motion !
Mme Anne Briol (Ve). J'aimerais quant à moi faire une remarque d'ordre général sur la réponse du Conseil d'Etat. Celui-ci nous informe que les arbres ont été abattus en raison de leur état qui menaçait les promeneurs : c'est une explication que nous pouvons accepter.
Il précise également, je cite : «...les arbres de la campagne Sarrasin ne sont pas en bon état ayant souffert de l'implantation d'un volumineux bâtiment qui a perturbé leur équilibre hydrique et d'un chantier de construction qui a fortement compacté le sol de certains secteurs.» Nous ne pouvons pas nous contenter de prendre acte de cette explication. C'est en effet un problème récurent que l'on retrouve dans de nombreux chantiers. Les arbres sont maintenus, mais le terrain et les racines sont tellement malmenés durant les travaux que, quelques mois ou quelques années plus tard, ces arbres périclitent puis sont condamnées, car, nous explique-t-on, ils sont malades et menacent les promeneurs...
Il est donc nécessaire que des contrôles beaucoup plus stricts soient effectués, lorsque des autorisations de construire sont délivrées et aussi durant les travaux, afin de ne pas être mis devant le fait accompli comme c'est le cas ici.
Une voix. C'est totalement nul !
M. Alain Etienne (S). Le rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1285 montre bien toute la difficulté de la gestion du patrimoine arboricole. A partir de quand un arbre devient-il dangereux et comment faut-il annoncer à la population qu'il faut se résoudre à l'abattre ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Dès lors que le propriétaire ou l'autorité compétente sont conscients du danger, je reconnais qu'il est difficile de ne pas prendre les mesures qu'il convient. Il s'agit bien évidemment d'assurer en premier lieu la sécurité du public. La réponse à la motion semble nous indiquer que la procédure a été suivie dans les règles avec une expertise, une demande d'autorisation et des compensations. Il nous est donc effectivement difficile de contester la réalité des faits.
Cependant, nous pouvons nous demander si les travaux nécessaires à l'extension des surfaces d'exposition en plein air sur le bas de la parcelle n'ont pas eu raison prématurément des arbres du parc de Palexpo. Il s'agit d'un fâcheux concours de circonstances, vous en conviendrez. Nous pouvons également regretter que la campagne d'information, qui fut initiée pour rassurer la population, n'ait pas été plus efficace et n'ait pas permis d'éviter cette intervention parlementaire. L'allusion qui est faite à la presse montre bien qu'avec quelques explications supplémentaires, notamment sur les compensations, la surprise aurait été moins grande. Bien évidemment, nous savons que les dossiers administratifs peuvent être consultés auprès du service des forêts, de la protection de la nature et du paysage, mais les arbres centenaires du parc de Palexpo méritaient certainement plus de précautions et plus d'anticipation.
Cependant, les socialistes prendront acte de ce rapport, tout en insistant sur la politique de renouvellement du patrimoine arboricole que l'Etat doit poursuivre et, surtout, faire connaître.
M. René Koechlin (L). Je me réjouis d'entendre M. Pagani la prochaine fois que les forains et le cirque Knie s'installeront sur la plaine de Plainpalais ! Je me réjouis de l'entendre prendre la défense des pauvres habitants du quartier qui ne pourront plus utiliser et s'ébattre librement avec leurs enfants et leurs chiens sur cet espace vert qu'il conviendrait de préserver à tout instant ! S'il est cohérent - mais j'en doute - M. Pagani devra intervenir dès l'installation des forains - s'ils ne sont pas déjà installés !
M. Christian Grobet (AdG). Cette motion pose deux problèmes, et je comprends que certains milieux, qui ne sont pas très intéressés par la protection de l'environnement, essayent de banaliser et de travestir les faits.
Votre intervention, Monsieur Koechlin, est caractéristique... (L'orateur est interpellé.) Je ne vous ai pas interrompu, Monsieur ! Vous savez aussi bien que moi que la plaine de Plainpalais, dont on peut disserter sur son état, est un espace destiné au centre-ville pour un certain nombre de manifestations qui ont lieu régulièrement. Par contre, le parc Sarrasin est un parc qui a été mis en zone de verdure en vertu d'une loi que M. Pagani a rappelée et que je connais fort bien puisque je siégeais sur les bancs du Conseil d'Etat à l'époque, lorsque cette zone de verdure a été créée.
Il y a d'ailleurs eu un très long débat dans cette enceinte. Alors, quand j'ai entendu M. Blanc, qui ne cessait pas d'interrompre M. Pagani tout à l'heure, j'ai préféré me souvenir des propos de M. Roch qui est un excellent... (L'orateur est interpellé par M. Dupraz.) Ecoutez, Monsieur Dupraz, je vous en prie, après 20 h 30, restez à la buvette ! M. Roch est à l'origine des amendements qui ont été votés par le Grand Conseil, pour créer une zone de verdure à cet endroit afin d'en faire un parc, et d'une condition très précise qui a été prévue dans la loi de 88 : J'aimerais bien, Monsieur Cramer qui devrez répondre à la place de M. Moutinot, que vous vous donniez la peine d'écouter !
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Mais, je vous écoute !
M. Christian Grobet. Non, vous êtes en train de discuter ! (Exclamations.) Monsieur Cramer, je connais votre intérêt pour la protection de l'environnement, alors, je vous prie d'être attentif sur cette question !
Le président. Monsieur Grobet, s'il vous plaît, adressez-vous à l'assemblée et au président; pas à M. Cramer !
M. Christian Grobet. Je me suis adressé au remplaçant de M. Moutinot ! Je pensais, Monsieur Cramer, qu'étant donné les options que vous avez défendues lors des élections vous auriez une autre attitude que celle de ce soir ! (Exclamations.) J'ai le droit de m'adresser au Conseil d'Etat et, en l'absence de M. Moutinot, de faire abstraction des ricaneurs comme M. Lamprecht et d'autres... Je pensais simplement naïvement que M. Cramer serait intéressé par mes propos !
M. Olivier Vaucher. Quelle insolence !
M. Christian Grobet. C'est vous qui êtes insolent, Monsieur Vaucher, vous et ceux qui ricanent !
Une voix. T'as bu Grobet ?
M. Christian Grobet. Non, contrairement à certains dans cette salle... Je ne m'appelle ni Ducommun ni Dupraz ! (Remarques et rires. Le président agite la cloche.) Je ne m'appelle pas Dupraz, moi ! (L'orateur est interpellé.) Sortez de cette salle, Monsieur Dupraz, et allez cuver votre vin à la buvette !
Monsieur le président, je vous saurais gré de rappeler une fois pour toutes à M. Dupraz les convenances élémentaires à observer dans cette enceinte. S'il n'est pas capable de les respecter après 20 h 30, qu'il sorte de cette salle !
Le président. Monsieur Grobet, les invectives sont croisées ! J'aimerais qu'on se calme. Poursuivez et terminez votre intervention !
M. Christian Grobet. Je demande simplement à ne pas être interrompu !
Lorsque le Grand Conseil a voté la loi créant une zone de verdure pour le parc Sarrasin - à l'époque un certain nombre de députés pensaient qu'Orgexpo aurait tendance à occuper le parc pour des constructions provisoires - une clause très précise a été introduite dans la loi en précisant que toute construction - construction sous-entend «aménagement soumis à autorisation de construire» - devait être soumise à l'autorisation du Grand Conseil. Je constate que les travaux qui ont été effectués dans le parc ont bien fait l'objet d'une autorisation de construire, mais ils devaient toutefois être soumis à l'autorisation du Grand Conseil, ce qui n'a pas été le cas, en l'occurrence. Or, si cette clause a été prévue dans la zone de verdure où se trouve le parc, c'était précisément pour que le Grand Conseil puisse veiller à ce que la loi sur la zone de verdure soit respectée. Ça c'est le premier point.
Nous voulons effectivement savoir si les promesses qui ont été faites, il y a quelques mois, de remettre le terrain dans son état initial seront respectées et que ce parc qui a été défiguré par la création de terrasses artificielles et de talus sera rendu à son état initial, tel qu'il était lorsqu'il a été créé à la fin du siècle dernier.
Je connais bien les arbres de ce parc, puisque je suis un voisin immédiat de ce parc... (Exclamations.) ...et je m'y rends souvent, même si je ne suis pas un spécialiste comme M. Beer. Personnellement, je n'ai pas constaté que les arbres existants avaient des problèmes... Il y en avait peut-être, mais on a tout de même abattu des chênes centenaires d'une grande qualité, qui étaient isolés. C'est précisément quand les arbres sont plantés en respectant certaines règles de distance que l'on obtient des spécimens de très grande qualité. Mais, comme par hasard, ce sont les arbres qui se trouvaient au centre du parc qui ont été abattus... Et, comme par hasard, le plan de replantation n'a pas prévu de les replanter au même endroit... (M. Cramer lève les mains.) Vous levez les mains, Monsieur Cramer, mais vous êtes le premier responsable !
En effet, lorsque vous délivrez des autorisations d'abattage d'arbres, vous devez vérifier que les replantations prévues par la loi soient effectuées convenablement !
Monsieur Beer, vous prétendez que nous avons la loi la plus sévère du monde : vous parlez vraiment de choses que vous ne connaissez pas. (Exclamations.) Vous êtes spécialiste des abattages d'arbres en ville, mais pourtant les plaintes de la population sont fréquentes sur la politique que vous menez en la matière. Vous savez parfaitement qu'entre la lettre de la loi et son application, il y a un fossé particulièrement important. Fort souvent, les abattages d'arbres qui sont faits dans notre canton ne sont pas conditionnés à des replantations sur le site, mais à des versements d'indemnités ! Je ne ferai pas l'injure à M. Cramer de citer un certain nombre d'exemples ! Mais, néanmoins, j'ose espérer, grâce au nouveau règlement que vous avez édicté tout récemment, que la politique de vos prédécesseurs changera. Il faudra dorénavant que l'abattage des arbres soit suivi de replantations à l'endroit où les arbres ont été abattus !
Dans le cas présent, il est clair que l'abattage des arbres a été effectué dans le but de créer un terrain à disposition d'Orgexpo pour des expositions provisoires, et c'est pour cette raison que les arbres n'ont pas été replantés où ils avaient été abattus. Je trouve extrêmement grave que le Conseil d'Etat ou les départements compétents se soient prêtés à défigurer le parc Sarrasin !
M. Roger Beer (R). Aïe, aïe, aïe ! (Rires.) Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur l'arboriculteur Grobet... (Rires.) Je suis sidéré !
Vous prenez un exemple qui vous énerve visiblement, parce que vous habitez à côté et que vous avez l'impression d'avoir été floué, mais je vous dirai que je persiste à penser que la loi genevoise est la plus sévère. Pour demander l'autorisation d'abattre un arbre il faut au moins six semaines, voire trois mois quand c'est un peu compliqué. L'autorisation est ensuite publiée et n'importe qui a le droit de s'y opposer. Et vous savez très bien que certains milieux sont organisés : certains partis politiques, des groupements de protection de la nature, le WWF... Ils ont quasiment des bureaux dans les services concernés pour voir passer les autorisations qui sont délivrées, ce qui leur permet de s'y opposer. Ensuite, il y a discussion. Aucune autorisation n'est délivrée sans que l'arborisation future ait été étudiée.
Dans le cadre de Palexpo, Orgexpo a mandaté un paysagiste qui a étudié le dossier, qui a prévu des plantations dans le cadre de l'élément paysagiste. Mais si, malgré tout, vous avez l'impression que les arbres ont été replantés de façon à laisser la place à la construction d'une neuvième halle, c'est votre problème, Monsieur Grobet ! C'est votre problème ! En tout cas, ce n'est pas du tout l'impression que j'ai eue. Je pense que le Conseil d'Etat qui a daigné vous écouter - j'ai regardé, c'est vrai - vous répondra.
D'autre part, vous avez attaqué la politique menée en la matière par la Ville. Il ne me semble pas que le lieu soit adéquat, mais je veux bien vous répondre... Si vous avez l'impression que la Ville passe son temps à abattre des arbres, je vous signale pour votre information qu'on plante deux fois plus d'arbres qu'on n'en abat. C'est comme ça en tout cas depuis quinze ans, depuis que je suis là. Il est vrai que vous autorisiez - lorsque vous étiez encore celui qui autorisait... - la construction d'immeubles, et tout le monde sait que, la plupart du temps, cela impliquait d'abord de démolir des villas et de couper des arbres. Dans de tels cas, il n'était souvent pas possible de replanter au même endroit. Alors, généralement, avant qu'une autorisation ne soit délivrée le plan prévoyait des plantations alentour. A Genève cela marche très bien, même si cela m'énerve quelquefois, parce que certaines plantations sont des plantations alibis.
En ce qui concerne le service des espaces verts de la Ville, je peux vous dire que nous ne construisons pas d'immeubles, que nous ne coupons pas d'arbres pour ce faire et que lorsque nous sommes amenés à couper des arbres pour des questions de sécurité généralement nous les remplaçons ! Mon rôle consiste à penser à l'arborisation dans un siècle. Comme nous bénéficions aujourd'hui des beaux arbres qui ont été plantés au siècle dernier, je dois faire en sorte que nos arrières petits-enfants - les vôtres aussi - puissent aussi dans un siècle regarder des arbres d'un certain âge et d'une certaine dimension. Alors je dois dire que votre attaque tombe une fois de plus complètement à côté de la plaque, autant que l'invective de M. Pagani !
Je pense que M. Cramer dira quelques mots sur la loi et sur son application.
Mme Christine Sayegh (S). Ce débat me conforte dans le choix du site de la halle 6, puisqu'il n'y aura pas de problème botanique et donc pas d'abattage d'arbres ! (Applaudissements et exclamations.)
M. Robert Cramer. Je suis frappé, depuis que je siège à la place qui est maintenant la mienne dans ce parlement, de voir l'intérêt que suscitent les arbres. Ce n'est pas la première fois que je suis amené à répondre à une motion concernant les arbres et je m'efforce d'ailleurs, généralement, de répondre aux motions que vous votez dans les délais impartis. En tout cas, les arbres suscitent à chaque fois de longs débats. La première fois, je m'étais dit que c'était peut-être imputable à l'heure, la seconde fois à d'autres événements, mais c'est systématique.
Ce qui m'a frappé également dans ce débat, c'est que l'on se trompe complètement d'objet. La motion, qui a été déposée par Mme Bolay, M. Pagani et M. Vanek, ne comportait qu'une seule et unique invite, qui est reproduite au deuxième alinéa de la réponse. Ne posant qu'une seule question, l'invite aurait pu faire l'objet d'une question écrite ou d'une interpellation urgente, mais c'est la motion qui a été choisie : pourquoi pas ? Elle demandait pourquoi il avait fallu abattre quelques arbres dans le parc de Palexpo dans la campagne Sarrasin, et nous avons répondu à cette question.
Par ailleurs - un mois plus tard je crois - la question s'est posée de savoir si les terrassements qui ont été faits dans le parc Sarrasin étaient justifiés ou non. Contrairement à d'autres, moi je n'ai pas le génie universel et je ne sais pas tout sur tout... Il se fait, en outre, que dans ce parlement je suis non pas le substitut mais le suppléant de Mme Calmy-Rey et que je suis les dossiers qu'elle traite en son absence, le suppléant de mon collègue Laurent Moutinot étant Gérard Ramseyer. Alors, je veux bien essayer de faire suivre vos diverses interrogations, mais je ne crois pas que ce soit utile dans la mesure où ces questions ont été posées et que des réponses partielles ont été déjà fournies; les compléments à ces réponses seront données en son temps.
Ce qui m'a semblé intéressant dans la réponse à cette motion, au-delà de la réponse factuelle sur ces quelques arbres, c'est de saisir l'occasion pour rappeler quelle est la politique de ce canton en matière d'abattage d'arbres. Cette politique passe non seulement par une grande transparence, puisqu'il y a publication des autorisations, mais elle passe également par une application extrêmement rigoureuse d'un principe de préservation des arbres. Nous essayons toujours de sauver les arbres, et c'est exactement ce que nous avons fait dans la campagne Sarrasin.
En effet, ce n'est que lorsque nous n'avons pas pu faire autrement que nous avons décidé d'abattre huit arbres, et nous essayons de préserver les douze autres arbres atteints au maximum, mais nous serons peut-être amenés à les abattre si les mesures prises pour les sauvegarder ne se révèlent pas suffisantes. Le principe premier, c'est toujours d'essayer de sauvegarder les arbres quand on le peut, et cela, sans regarder à la dépense. Nous pratiquons même parfois de «l'acharnement thérapeutique». En effet, un arbre est tombé tout seul alors que nous avions l'espoir de le sauver. Nous nous efforçons de sauvegarder douze arbres sur les vingt. Les huit autres ont dû être abattus, mais, comme vous le savez bien, dans un tel cas des arbres sont replantés.
Je trouvais utile de rappeler la politique menée en la matière, principalement à l'intention de ceux dont je sais qu'ils attachent une importance considérable à la sauvegarde de notre patrimoine arboré, comme M. Etienne.
Mme Briol a justement relevé que si les arbres étaient atteints, c'est à cause du manque de précautions nécessaires lors de constructions. Ce point est précisément traité au point 84 de l'ordre du jour, auquel nous n'arriverons pas ce soir. (Brouhaha.) C'est un rapport du Conseil d'Etat à la motion 1267 dans laquelle nous expliquons la politique désormais menée en matière de préservation des arbres. En quoi cette législation et cette réglementation, dont on a rappelé qu'elle était la plus exigeante du monde, ont été rendues plus exigeantes encore, de façon, justement, à mieux préserver les conditions de vie des végétaux.
Je m'arrête là, parce que M. Beer a dit un certain nombre de choses précises, savantes et scientifiques, qui me dispensent d'en dire plus, si ce n'est pour vous inviter toutes et tous, Mesdames et Messieurs les députés, à aller visiter les Floralies ! (Exclamations et applaudissements.)
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.