Séance du
vendredi 26 février 1999 à
17h
54e
législature -
2e
année -
4e
session -
7e
séance
PL 7991
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1 Principe
1 L'usine des Cheneviers constitue un établissement de droit public appelé « usine des Cheneviers » (ci-après « l'usine »).
2 L'établissement est géré et exploité dans les limites de l'article 160B de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai l847, de la loi d'application de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 2 octobre 1997 et de la législation applicable en matière de gestion des déchets.
3 L'établissement est autonome et jouit de la personnalité juridique.
Article 2 But
1 L'établissement a pour but le traitement des déchets définis à l'alinéa 2 ainsi que la valorisation dudit traitement, des installations et du savoir-faire de l'établissement. Ces activités sont exercées dans le respect d'une gestion intégrée de l'environnement et conformément au plan cantonal de gestion des déchets.
2 Les déchets consistent en ordures ménagères, en déchets industriels assimilables aux ordures ménagères et en déchets spéciaux.
3 Les déchets sont acheminés à l'usine par voie fluviale, à bord de barges depuis le quai de la Jonction, par la route ou par le chemin de fer.
4 Les transports sont organisés de la manière la plus respectueuse de l'environnement.
Article 3 Siège
Le siège de l'établissement est à l'usine, sur le territoire de la commune d'Aire-la-Ville.
Article 4 Inventaire des bâtiments, installations et équipements de l'établissement
Les terrains, bâtiments, installations et équipements de l'établissement font l'objet d'un inventaire détaillé tenu à jour par la direction.
Article 5 Propriété et droit de superficie
1 Les terrains compris dans le périmètre de l'usine, demeurent, avec leurs accessoires au sens de l'article 644 du code civil suisse, la propriété de l'Etat de Genève et donnent lieu à un droit de superficie dont les conditions sont fixées par le Conseil d'Etat.
2 Les bâtiments et installations seront transférés à l'établissement, selon les modalités à fixer dans une loi spécifique.
Article 6 Dotation
L'établissement est doté, par l'Etat de Genève, d'un capital de 50 millions de francs, dont la rémunération fixée par le Conseil d'Etat ne peut être inférieure au coût moyen de la dette de l'Etat.
Article 7 Conseil d'Etat et Grand Conseil
1 L'établissement est placé sous la haute surveillance et le contrôle du Conseil d'Etat.
2 Le Conseil d'Etat délègue la surveillance et le contrôle de l'établissement au département chargé de l'environnement (ci-après département délégué).
3 Les budgets, les comptes et le tarif des taxes d'élimination des déchets sont soumis à l'approbation du Conseil d'Etat.
4 Le Conseil d'Etat présente chaque année au Grand Conseil un rapport sur la gestion et les comptes de l'établissement.
Article 8 Organes
Les organes de l'établissement sont :
Article 9 Conseil d'administration
1 L'établissement est géré par un conseil d'administration, composé de 15 personnes, soit :
2 Les administrateurs désignés sous lettres a à f doivent être choisis en fonction de leurs compétences ou de leur expérience dans le domaine de la gestion.
3 Les modalités de l'élection des administrateurs désignés par le personnel sont indiquées dans un règlement.
Article 10 Durée du mandat
1 Sous réserve de l'alinéa 2, les administrateurs sont nommés ou élus pour une période de 4 ans, débutant le 1er mars de l'année qui suit le renouvellement du Grand Conseil et du Conseil d'Etat. Ils sont rééligibles deux fois.
2 Le mandat d'administrateur d'un magistrat représentant le Conseil d'Etat, la Ville de Genève, les communes genevoises ou les Conseils d'Etat des cantons utilisateurs prend fin de plein droit à l'expiration de sa charge publique.
3 Le membre du conseil d'administration qui n'assiste pas à la moitié des séances de ce conseil au cours d'un exercice est réputé démissionnaire de plein droit, sauf motif valable accepté par le Conseil d'Etat et pour les représentants des communes genevoises, par le comité de l'association.
4 En cas de décès, de démission ou de perte d'une condition de nomination ou de révocation, il est pourvu au remplacement de l'administrateur pour la fin de son mandat, sauf si la vacance survient moins de 3 mois avant la fin de celui-ci ou si la condition de représentation n'est plus remplie.
Article 11 Incompatibilité
Les membres du conseil d'administration, quel que soit leur mode de nomination, peuvent être utilisateurs de l'usine, mais ne doivent être, ni directement, ni indirectement, fournisseurs ou chargés de travaux ou de mandats pour celle-ci.
Article 12 Responsabilité
Les membres du conseil d'administration sont personnellement responsables envers l'établissement des dommages qu'ils causent en manquant, consciemment ou par négligence, aux devoirs de leur fonction.
Article 13 Révocation
1 Quel que soit le mode de nomination, le Conseil d'Etat, après consultation du comité de l'association pour les représentants des communes genevoises, peut en tout temps révoquer un membre du conseil d'administration pour justes motifs.
2 Est notamment considéré comme tel le fait que, pendant la durée de ses fonctions, le membre du conseil d'administration s'est rendu coupable d'un acte grave, a manqué à ses devoirs ou est devenu incapable de bien gérer.
Article 14 Président / Vice-président
1 Le président et le vice-président du conseil d'administration sont nommés par le Conseil d'Etat au sein du conseil d'administration. Le vice-président est choisi parmi les représentants des communes genevoises et de la Ville de Genève.
2 Ils sont désignés pour une durée de 4 ans et sont rééligibles au maximum 2 fois.
3 La rémunération du président, du vice-président, des autres membres du conseil d'administration et du conseil de direction est fixée par le conseil d'administration.
4 Le conseil d'administration nomme son secrétaire qu'il choisit en dehors de ses membres.
Article 15 Attributions
1 Le conseil d'administration est le pouvoir supérieur de l'établissement.
2 Sous réserve des compétences du Grand Conseil et du Conseil d'Etat, le conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour la gestion de l'établissement et a, notamment, les attributions suivantes :
Article 16 Séances
1 Le conseil d'administration se réunit aussi souvent que l'exige l'intérêt de l'établissement.
2 Il est convoqué par le président ou, à défaut, par le vice-président.
3 Il est aussi convoqué si 3 administrateurs au moins ou le Conseil d'Etat le demandent.
4 La présence de la majorité absolue des administrateurs est nécessaire pour la validité des délibérations. A défaut, une nouvelle séance est convoquée. Le conseil d'administration peut alors délibérer valablement, quel que soit le nombre des administrateurs présents.
5 Les décisions sont prises à la majorité des membres présents, le président ne prenant pas part au vote. En cas d'égalité, le président départage.
6 Les délibérations du conseil d'administration sont constatées par des procès-verbaux, avec mention des membres présents.
Article 17 Conseil de direction
1 Le conseil de direction se compose de 5 membres. Le président et le vice-président du conseil d'administration en font partie de droit. Les 3 autres membres sont choisis en son sein par le conseil d'administration. Un membre au moins est choisi parmi les représentants des utilisateurs privés. Ils sont rééligibles.
2 Le conseil de direction est présidé, en principe, par le président du conseil d'administration.
3 Les membres du conseil d'administration choisis parmi le personnel de l'établissement ne peuvent faire partie du conseil de direction.
4 Le secrétariat du conseil de direction est assuré par le secrétariat du conseil d'administration.
Art. 18 Séances
1 Le conseil de direction se réunit aussi souvent qu'il est nécessaire pour la bonne marche de l'établissement et l'exécution des affaires dont il est chargé.
2 Il est convoqué par le président ou, à défaut, par le vice-président.
3 Il est aussi convoqué si 3 membres au moins le demandent.
4 Il ne peut valablement délibérer que si 3 membres au moins sont présents.
5 Les décisions sont prises à la majorité des membres présents. En cas d'égalité, la voix du président est prépondérante.
6 Les délibérations du conseil de direction sont constatées par des procès-verbaux, avec mention des membres présents.
Article 19 Attributions
Le conseil de direction a les attributions suivantes :
Article 20 Organe de contrôle
1 Sous réserve d'approbation par le Conseil d'Etat, le conseil d'administration nomme, après un appel d'offre approprié, un organe de contrôle, choisi parmi les professionnels de la révision. Le mandat de révision est d'une année, renouvelable.
2 Le rapport de révision est transmis au conseil d'administration et porté à la connaissance de l'inspection cantonale des finances.
Article 21 Direction
1 Le directeur de l'établissement assume la direction de celui-ci selon un cahier des charges adopté par le conseil d'administration. Il exécute les décisions du conseil d'administration et du conseil de direction et assiste à leurs séances avec voix consultative. Il reçoit ses instructions du président du conseil d'administration.
2 La nomination ou la révocation du directeur est soumise à l'approbation du Conseil d'Etat.
Article 22 Statut du personnel
Le statut du personnel est réglé par la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 4 décembre 1997, ainsi que par les autres lois et règlements qui lui sont applicables.
Article 23 Caisse de pension
Le personnel transféré à l'établissement est affilié à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA). Le personnel engagé ultérieurement par l'établissement y est également affilié.
Article 24 Accord de prestations
1 L'Etat de Genève, après consultation des divers utilisateurs, fixe pour une durée pluriannuelle, les conditions que doit remplir l'établissement en matière de traitement et de valorisation des déchets mentionnés à l'article 2. Il définit notamment les conditions du droit de superficie mentionné à l'article 5.
2 Il définit les critères d'approvisionnement de l'usine dans le canton et hors canton.
3 Il détermine les objectifs en matière de gestion et de comptabilité environnementales.
4 Il confère à l'établissement une autonomie de gestion accrue et doit veiller à ce que les prestations soient de qualité et au meilleur prix.
5 L'accord de prestations comprend l'autorisation d'exploiter.
Article 25 Locations
L'établissement peut mettre en location, à des tiers, des locaux ou emplacements dont il n'a pas l'usage. Il doit préalablement obtenir l'accord du département délégué.
Article 26 Entretien
L'établissement assure l'entretien et l'adaptation des biens et équipements qui lui sont concédés par le contrat de droit de superficie prévu à l'article 5.
Article 27 Investissements
1 L'établissement décide des investissements dont il assure lui-même le financement, par ses ressources ou par l'emprunt.
2 L'approbation du Conseil d'Etat est requise lorsqu'un investissement excède la capacité financière de l'établissement. Dans ce cas, les communes sont consultées.
Article 28 Emprunts
1 L'établissement peut contracter lui-même et à son propre nom des emprunts destinés au financement des investissements relevant de sa compétence.
2 Le Conseil d'Etat fixe les compétences de l'établissement en matière d'emprunts.
Article 29
1 L'établissement est soumis à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
2 L'établissement tient une comptabilité adaptée à sa nature et à son étendue. Il adopte comme cadre de référence les normes comptables internationales, ci-après IAS (International Accounting Standards).
Article 30 Rapport de gestion et comptes annuels
1 Conformément à l'article 15, alinéa 2, lettre e, le conseil d'administration établit pour chaque exercice le rapport annuel, lequel comprend les comptes annuels et le rapport de gestion, il y joint le rapport de l'organe de contrôle.
2 Les comptes annuels se composent du compte de résultat, du bilan et de son annexe.
3 L'exercice social est annuel. Il se termine le 31 décembre.
Article 31 Ressources
Les ressources de l'établissement sont :
Article 32 Responsabilité quant aux résultats
L'établissement est responsable de ses résultats. Il conserve la totalité des excédents de produits, dont la moitié sera affectée à une réserve de renouvellement et le solde mis en réserve d'exploitation.
Article 33 Compétences du Conseil d'Etat
1 Les budgets, approuvés par le conseil d'administration, sont transmis au Conseil d'Etat, avant le 15 septembre de chaque année.
2 Les comptes et le rapport de gestion le sont avant le 30 avril suivant l'exercice clôturé.
3 Ces documents sont accompagnés de rapports explicatifs. Le Conseil d'Etat se prononce sur ces documents dans les deux mois.
Article 34 Exonération fiscale
L'établissement est exonéré des impôts cantonaux et communaux.
Article 35 Liquidation des biens
1 La dissolution, le mode de liquidation de l'établissement et la désignation des liquidateurs ne peuvent être décidés que par le Grand Conseil.
2 Le produit net de la liquidation revient à l'Etat de Genève.
Article 36 Transfert des droits et obligations
A l'exception de sa qualité de propriétaire immobilier dans le périmètre de l'usine, l'ensemble des droits et obligations de l'Etat de Genève relatif à l'usine, tels que notamment contrats, tarifs et taxes à percevoir ou à payer, sont transférés de plein droit à l'établissement au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi.
Article 37 Transfert du personnel et droits acquis
1 Le personnel travaillant à l'usine des Cheneviers au sein du département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie, au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, est transféré de plein droit à l'établissement, avec les droits économiques et les conditions de travail acquis au moment du transfert.
2 Si un membre du personnel s'oppose expressément à son transfert, l'office du personnel de l'Etat s'engage à le replacer aux mêmes conditions financières, au sein de l'administration cantonale ou dans d'autres établissements publics du canton.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Préambule
En 1995, le Département de l'intérieur, de l'environnement, de l'agriculture et de l'énergie a mandaté Atag, Ernst et Young SA pour procéder à un audit détaillé de l'usine des Cheneviers.
Se fondant sur les conclusions de l'audit, il a été décidé de procéder à une restructuration approfondie de l'usine des Cheneviers destinée à lui permettre de remplir sa mission dans un contexte géographique élargi et à des conditions environnementales, techniques et économiques compétitives.
L'usine comprend quatre lignes de traitement des déchets pour une capacité totale de 400 000 tonnes par an environ.
Trois fours sont affectés aux ordures ménagères et déchets industriels assimilés et un aux déchets spéciaux. Les principales installations additionnelles se composent de fosses de stockage des déchets ordinaires, d'une station de traitement des résidus liquides et de deux turbo-groupes pour la production d'électricité.
Le centre de traitement des déchets spéciaux fonctionne comme centre de stockage, de tri et de conditionnement desdits déchets et alimente notamment la ligne du four rotatif F4 en déchets spéciaux incinérables. L'exploitation des turboalternateurs de l'usine d'incinération des ordures ménagères a produit une recette de 5,6 Mio F en 1996, résultant de la vente d'énergie électrique aux Services industriels de Genève, soit environ 85 Mio de kWh.
L'usine des Cheneviers, le centre de traitement des déchets spéciaux et les installations annexes sont des installations cantonales gérées par l'Etat de Genève. L'élimination des résidus ménagers étant à la charge des communes, celles-ci sont représentées dans le cadre de la commission consultative de gestion de l'usine.
Les principaux usagers du site des Cheneviers, pour les résidus ordinaires, sont les communes genevoises (53 %), les industries et chantiers genevois (27 %), les clients et communes d'origine vaudoise (12 %), les clients et communes d'origine française (6 %) et divers (2 %).
En matière de déchets spéciaux, les principaux usagers sont les entreprises du secteur industriel et des services du canton de Genève (80 %) et de seize autres cantons (20 %).
La politique environnementale conduite en la matière, arrêtée dans le plan cantonal de gestion des déchets adopté par le Conseil d'Etat le 14 octobre 1998, consiste à limiter le plus possible le recours à l'incinération dans le traitement des résidus.
Pour atteindre l'objectif de diminution des déchets incinérés, deux axes d'action se présentent :
la réduction quantitative de la production de déchets par la modification de processus de production de biens et de promotion commerciale, par exemple pour ce qui concerne les emballages ;
l'intensification du tri, de la récupération et du recyclage.
Le premier axe nécessite beaucoup de temps, en raison des changements d'habitudes qu'il implique chez les consommateurs et des difficultés techniques qu'il faut surmonter tout au long de la chaîne qui s'étend de la fabrication à la consommation et dont le coût peut être important. Cet axe mérite cependant d'être exploité, même si des résultats significatifs ne peuvent se produire qu'à long terme.
L'intensification du tri, de la récupération et du recyclage est, par contre, susceptible de produire des résultats plus rapides, tout en développant certaines formes d'emploi local. Les changements d'habitudes que cela implique pour les consommateurs restent certes longs à opérer. Cette évolution peut, toutefois, être favorisée par des campagnes d'information et de sensibilisation, assorties de la mise en place d'installations de collectes sélectives incitatives.
Pour l'usine des Cheneviers, l'accroissement du tri, de la récupération et du recyclage ne constitue pas un obstacle au développement de son activité. Au contraire, il s'agit d'un avantage dans la mesure où des matières à faible potentiel calorifique ou impropres à la destruction par combustion sont retirées des résidus ménagers ou industriels ordinaires, tels que les résidus organiques, la ferraille, le verre, etc.
Au-delà de cet avantage et étant donné que l'installation est techniquement moderne et performante, en passe d'être dotée d'ici fin 1999 des meilleurs instruments d'épuration des fumées (dénox, L 7671), l'accroissement de la quantité de déchets à incinérer doit être recherché par l'élargissement de la zone d'approvisionnement de l'usine en déchets, tout particulièrement dans le bassin lémanique.
L'avantage environnemental d'une telle politique d'exploitation réside dans la disparition d'installations anciennes et dans la limitation globale des émissions nocives dans l'air pour le bassin lémanique. Une telle politique doit être conduite, en concertation avec nos voisins de Suisse romande et de France limitrophe, en mettant en réseau les installations modernes existantes.
La revalorisation des installations de l'usine par accroissement de la qualité des résidus incinérés n'est pas incompatible avec une politique visant à réduire la masse de déchets à incinérer. Il s'agit, au contraire, de deux volets complémentaires d'une politique qui vise l'amélioration de la qualité de l'environnement.
Il faut cependant noter que, si les objectifs essentiels de la politique de gestion des déchets résident dans la diminution de la production de déchets et dans la récupération optimale des matières, l'incinération reste le mode de traitement ultime, indispensable lorsque toutes les possibilités offertes par les autres filières ont été épuisées.
L'évolution des technologies et des méthodes d'élimination des déchets suppose d'importantes facultés d'adaptation de la part de tous les opérateurs et dans le domaine des installations. Il est, en effet, primordial pour un complexe comme celui des Cheneviers de pouvoir être adapté rapidement à des exigences environnementales et technologiques en constante mutation. Un régime d'établissement de droit public autonome permet précisément de réagir rapidement face aux changements, tout en assujettissant très clairement l'entreprise aux exigences du pouvoir politique. Cela permet également une meilleure mobilité dans la valorisation des produits de l'entreprise, tout particulièrement de l'énergie.
L'usine des Cheneviers est un instrument de production industrielle, lequel doit disposer d'une autonomie de gestion lui permettant de maîtriser l'évolution des marchés avec rapidité et souplesse. Elle doit être capable de moduler son organisation, son fonctionnement et ses instruments de gestion, en fonction des impératifs de politique générale et économique.
Un statut lui conférant une personnalité juridique distincte de celle de l'Etat tout en restant assujetti à la surveillance de ce dernier assure cette autonomie de gestion tout en permettant la mise en oeuvre de la politique en matière de déchets.
Si cette usine doit conserver un statut de droit public, il n'en est pas moins indispensable que les principaux usagers des secteurs public et privé participent à sa gestion en siégeant au conseil d'administration. Cette participation des usagers garantit, en effet, la prise en compte de leurs intérêts et un contrôle de gestion efficace.
Le statut du personnel
Un projet d'organisation de cette envergure a nécessairement un impact sur le personnel qui doit y être associé pour y trouver une dimension dans laquelle il se reconnaît.
La situation et l'évolution du personnel ne sauraient être abordées que dans des perspectives économiques et fonctionnelles mais aussi au travers des critères énumérés ci-après qui en renforcent la portée, à savoir :
la santé ;
la vie familiale et sociale ;
le stress et de la pénibilité du travail ;
la diminution, voire la disparition des heures supplémentaires ;
le développement du personnel au sein de l'entreprise ;
l'évolution des métiers ;
l'évolution des technologies ;
la définition de l'exercice des responsabilités.
Ces paramètres sont applicables dans une approche collective, s'agissant de définir le modèle d'organisation pour le fonctionnement de l'usine, soit le traitement des flux de matière première, de travail et de produits. Ils sont également à prendre en considération dans l'approche individuelle, lors de l'affectation des personnes dans les différentes fonctions et leur évolution au sein de celles-ci.
Le développement du personnel représente l'un des trois pôles d'un projet inspiré de la notion de développement durable. L'équilibre doit être recherché, dans la réalisation du projet, entre les fonctions environnementales, sociales et économiques, lesquelles constitueront le fondement de l'établissement à créer.
Une majorité du personnel de l'usine s'est exprimée en faveur de l'assujettissement au statut de la fonction publique. Considérant d'une part, les difficultés qui pourraient surgir dans le domaine de la prévoyance professionnelle dans le cas de l'adoption d'un nouveau statut et, d'autre part, la probabilité de nouvelles évolutions du statut actuel de la fonction publique, à moyen terme, il y a lieu d'admettre la demande du personnel et de maintenir son assujettissement au statut de la fonction publique cantonale.
La collaboration régionale
Les travaux de la coordination romande des usines d'incinération sont arrivés à la conclusion que les deux usines à réaliser dans les cantons de Vaud et de Fribourg seront nécessaires à la gestion des déchets romands en tenant compte notamment de l'échéance de l'an 2000, visant la fermeture des décharges à tous les déchets combustibles (déchets urbains et déchets de chantier) dont le potentiel pour la Suisse est estimé à environ un million de tonnes par an. D'ici à la réalisation de l'une ou des deux usines romandes, les déchets devront être acheminés aux Cheneviers.
Dans l'esprit de la coordination intercantonale romande, une filière d'alimentation en déchets urbains et industriels a également été mise sur pied avec la décharge de Teuftal et un transporteur de Moudon.
La région de Penthaz (108 communes) livre à l'usine des Cheneviers 50 % de ses déchets depuis le 1er juillet 1997, soit environ 15 000 t/an. Une augmentation des tonnages est prévue d'ici l'an 2000 par suite de la fermeture de la décharge de Châtel-Saint-Denis.
Parallèlement, des marchés de déchets industriels ont été signés (pneus, farine de viande, résidus de broyage des automobiles, résidus industriels banaux, médicaments périmés) pour un total d'environ 40 000 tonnes. Ces déchets à haut pouvoir calorifique représentent l'équivalent de 80 000 tonnes d'ordures ménagères et une augmentation substantielle du chiffre d'affaires de l'usine.
Au stade actuel, ce sont près de 320 000 tonnes de déchets par an qui sont livrés aux Cheneviers et l'usine est thermiquement saturée. Le résultat commercial se traduit par une augmentation des recettes d'électricité, de l'ordre de 30 %, et des recettes de prise en charge des déchets, de l'ordre de 18 %.
Au niveau du traitement des déchets spéciaux, une nouvelle politique de gestion est en cours. Il s'agit d'appliquer progressivement le principe du pollueur-payeur, d'améliorer la prise en charge des déchets et, enfin, d'assurer une coordination avec les autres centres de traitement en cas d'arrêts d'exploitation. Cette politique a déjà eu pour effet, en 1997, une diminution de 50 % du déficit de traitement des déchets spéciaux.
Côté français, l'usine de Bellegarde est en service depuis le début 1998 et les 16 000 tonnes de déchets du SIVU Gessien ne sont plus livrées aux Cheneviers. Cette perte a été compensée par environ 15 000 tonnes de déchets industriels à haut pouvoir calorifique.
Des contacts ont été établis de nouveau avec le Syndicat mixte intercommunal de gestion des déchets du Faucigny genevois (Sidefage) pour instaurer une coopération, en particulier dans les domaines de :
l'exploitation,
la gestion des incidents et arrêts de maintenance,
l'incinération des boues de stations d'épuration,
la mise en décharge de mâchefers et des cendres volantes,
la rationalisation des transports.
Commentaire article par article
Article 1
Le principe d'un établissement autonome, jouissant de la personnalité juridique y est défini. L'usine exploite ses installations, traite avec ses usagers, répond de ses obligations et fait valoir ses droits elle-même en son nom.
La dénomination « Usine des Cheneviers » a été retenue pour sa simplicité et sa notoriété dans le public, apte à faciliter son action dans le domaine commercial et celui de l'information. Cette appellation permet notamment de ne pas donner une image trop restrictive de l'activité de l'entreprise.
La forme de l'établissement public autonome permet à l'usine de bénéficier d'une autonomie de gestion, de la possibilité de placer l'établissement sur le marché des capitaux ou encore de recourir à des capitaux privés ou publics pour financer les nouveaux investissements. Ainsi, l'Etat sera déchargé des frais financiers et d'amortissement, assumés de façon autonome par l'établissement de droit public proposé.
L'établissement pourra également gérer de manière plus flexible la problématique des déchets à Genève et dans la région et mieux prendre en considération les besoins réels des usagers de l'usine des Cheneviers.
Il est enfin rappelé que, dans sa mission de traitement des résidus, l'établissement doit également tenir compte des objectifs de la protection de l'environnement.
Article 2
Cette disposition s'inspire de l'objectif général du projet de restructuration de l'usine énoncé plus haut.
L'entreprise a pour vocation de produire des biens, principalement de l'énergie en procédant au traitement et à l'élimination des ordures ménagères, déchets industriels assimilés et des déchets spéciaux.
Elle n'est pas chargée du traitement de toutes les catégories de déchets, laissant à d'autres organisations le soin de gérer les filières de récupération, de compostage, notamment. Elle participe cependant à ces filières comme point de collecte de ces résidus.
En matière d'approvisionnement en déchets par chemin de fer à l'usine qui n'est pas raccordée au réseau CFF, les premiers contacts établis avec la Régie montrent que la création d'une ligne CFF pour les Cheneviers n'est financièrement pas soutenable. Toutefois, le rail, à proximité du quai de déchargement de la Jonction, fera le relais entre la gare de la Praille et les barges des Cheneviers, par le biais du système ACTS (rail-route). L'option ACTS est d'ores et déjà prévue pour l'acheminement des cendres volantes à la décharge d'Oulens (via l'usine de la SATOM à Monthey).
Actuellement, le transport a lieu par route et par voie fluviale ; le chemin de fer est indiqué comme possibilité à mettre en place à l'avenir, soit directement à proximité de l'usine, soit en mode combiné avec la route ou le fleuve.
Article 3
Le Conseil d'Etat propose que le siège de l'établissement soit à Aire-la-Ville, commune de situation des installations principales.
Article 4
La tenue d'un inventaire des bâtiments, installations et équipements est une condition de bonne gestion de l'entreprise. En raison des modifications fréquentes qui interviennent forcément dans un inventaire détaillé, seul le principe doit figurer dans la loi.
Article 5
Il est essentiel que l'entreprise soit propriétaire de ses installations et en assume pleinement les charges, en particulier de maintenance et d'exploitation.
Si les installations continuaient à appartenir à l'Etat, la gestion financière de l'entreprise manquerait de transparence et de rigueur, particulièrement s'agissant d'investissements affectés à des biens appartenant à un tiers. Une telle situation serait également de nature à pénaliser l'entreprise, s'agissant de procéder à des évolutions technologiques nécessaires, ce dans la mesure où la décision incomberait à chaque fois au propriétaire et non à l'exploitant.
Les terrains sur lesquels l'usine est implantée représentent environ 8,8 hectares, ils appartiennent à l'Etat, exception faite de petites surfaces propriété des Services industriels de Genève. Les terrains appartenant à l'Etat donneront lieu à un droit de superficie dont les conditions seront fixées par le Conseil d'Etat.
Seuls les bâtiments, ouvrages et installations étant transférés à l'entreprise, celle-ci sera mise au bénéfice d'un droit de superficie dont les conditions, financières notamment, seront définies par le Conseil d'Etat dans le cadre d'un accord de prestations
Article 6
L'établissement est de droit public, il est soumis au contrôle du Conseil d'Etat. Cette relation fonctionnelle est certes indispensable mais insuffisante pour assurer un lien très fort et constant entre l'établissement et l'Etat.
L'Etat doit rester le propriétaire de l'entreprise au travers d'un capital rémunéré, mais non amortissable, qu'il investit et qui constitue une garantie pour les créanciers et des fonds propres pour l'établissement.
Se référant au modèle qui avait prévalu lors de l'acquisition de leur statut d'autonomie par les Services industriels de Genève (SIG), le montant du capital de dotation devrait être établi à raison de 20 % de la valeur de transfert, soit environ 50 Mio F, ce qui porterait le montant de la dette à rembourser à l'Etat à 198 Mio F dans le cas d'un transfert à la valeur comptable nette (valeur 31.12.1997).
A titre accessoire, la position de l'Etat comme investisseur unique dans l'entreprise constitue pour le personnel une forme de garantie supplémentaire.
Ce capital de dotation est rémunéré à un taux correspondant au moins au coût moyen de la dette de l'Etat pour l'année considérée.
Article 7
La surveillance de l'établissement incombe au Conseil d'Etat lequel conserve ainsi une maîtrise importante de la gestion et de l'exploitation de l'entreprise.
Il peut en particulier imposer l'exécution des mesures qu'il juge nécessaires au titre de l'exécution de sa politique environnementale. Il se prononce également sur les investissements décidés hors budget (cf. art. 27 du présent projet de loi).
Le Grand Conseil est informé chaque année au moins de la gestion de l'entreprise.
Article 8
L'organisation et le fonctionnement de la gestion proposés pour l'établissement sont classiques ; ils comprennent un conseil d'administration, un conseil de direction et un organe de contrôle.
Article 9
La composition du conseil d'administration présente l'avantage d'assurer une représentativité aussi grande que possible avec un nombre restreint de personnes afin de garantir une certaine efficacité.
Ce conseil réunit ainsi non seulement des membres représentés dans l'actuelle commission consultative de gestion de l'usine, mais également des représentants de l'Etat, du personnel et des représentants des milieux de protection de l'environnement et d'entreprises privées.
Cette composition permet de réaliser une ouverture à l'économie et la région genevoise et surtout de faire participer les usagers à la gestion de l'entreprise, notion de partenariat qui préside à la réalisation du projet de restructuration de l'usine et qu'il est important de garantir dans le cadre de l'exploitation de la nouvelle structure.
De plus, les membres du conseil d'administration ne sont pas désignés en fonction de critères politiques, mais en fonction de leurs qualités de gestionnaires, ce qui, à l'évidence, garantira un développement et une gestion dynamiques de l'établissement.
Article 10
Il a paru opportun de limiter la durée des mandats pour les personnes n'étant pas magistrat, les administrateurs ne pourront siéger que 12 ans au maximum. Après avoir été désignés en début de période (pour 4 ans) ou en cours de période (pour moins de 4 ans), ils ne pourront être reconduits que pour deux périodes supplémentaires.
En revanche, les magistrats qui représentent le Conseil d'Etat, la Ville de Genève, les communes genevoises ou encore les Conseils d'Etat des cantons utilisateurs ne pourront plus siéger en qualité d'administrateur à l'expiration de leur charge publique.
Pour le surplus, il s'agit de dispositions légales classiques relatives aux absences ou vacances de membres du conseil d'administration.
Article 11
L'autonomie, notamment financière, accordée à l'usine des Cheneviers lui permettra de recourir à des investissements du secteur privé et de réaliser des équipements ou des installations à des prix offerts sur le marché. Il est donc essentiel de rappeler que ces engagements sont incompatibles avec la possibilité de participer à la gestion de l'établissement au moyen d'un siège au conseil d'administration.
Article 12
Il s'agit également d'une disposition légale classique en matière de responsabilité des administrateurs, inspirée de la loi sur l'Aéroport international de Genève.
Article 13
Il a paru opportun que le Conseil d'Etat, en tant qu'organe de surveillance (cf. art. 7 du présent projet de loi), puisse révoquer un administrateur qui violerait gravement ses devoirs ou ne présenterait plus des garanties d'une activité irréprochable ou même d'une bonne réputation. Il en est d'ailleurs de même pour le directeur de l'établissement (cf. art. 21 du présent projet de loi).
Article 14
Le président et le vice-président du conseil d'administration sont désignés par le Conseil d'Etat, dès lors que le canton accorde son soutien à l'établissement.
Afin, toutefois, d'assurer la représentation des communes genevoises principales utilisatrices de l'usine, le vice-président est choisi parmi les administrateurs représentant les communes.
Les fonctions de secrétaire du conseil d'administration étant incompatibles avec l'exercice d'un mandat efficace et attentif d'administrateur, le secrétaire est choisi en dehors du conseil d'administration.
Article 15
Cette disposition a été reprise pratiquement intégralement de la loi régissant le statut de l'Aéroport international de Genève.
Article 16
Là aussi, il s'agit d'une disposition légale classique sur la tenue des séances du conseil d'administration. Il est à relever toutefois l'exigence d'un quorum de présence fixé à la majorité des administrateurs pour que ce conseil puisse valablement délibérer.
Article 17
Le conseil de direction est composé de cinq membres. Il comprend obligatoirement le président et le vice-président du conseil d'administration; les trois autres membres sont désignés par le conseil d'administration.
Afin de donner au conseil de direction le plus d'efficacité possible dans la gestion courante, il sera présidé, en principe, par le président du conseil d'administration et son secrétariat est assuré par le secrétaire du conseil d'administration.
Article 18
Le conseil de direction se réunit beaucoup plus régulièrement que le conseil d'administration, aussi souvent que l'exécution des affaires l'exigent. Il est convoqué sur le même modèle que le conseil d'administration, avec le même mode de fonctionnement (cf. art. 16 du présent projet de loi).
Article 19
Le conseil de direction, en tant qu'organe exécutif, dispose des attributions qui lui sont conférées directement par le conseil d'administration. Il lui appartiendra également en tant qu'organe de gestion, de veiller à la bonne marche de l'établissement et de nommer et révoquer le personnel, sous réserve bien sûr des pouvoirs du conseil d'administration et du règlement sur le statut du personnel.
Article 20
Les établissements de droit public sont également tenus d'avoir un organe de contrôle externe, indépendant, à distinguer toutefois de l'inspection cantonale des finances, rattachée au Conseil d'Etat.
L'organe de contrôle ne peut pas être choisi que parmi les professionnels de la révision. Il établit un rapport annuel à l'attention du conseil d'administration, qui en prend connaissance avant d'approuver le bilan et le compte de profits et pertes.
Article 21
Le directeur de l'établissement est un élément-clé pour assurer la gestion efficace de l'usine. C'est pourquoi, il appartient au Conseil d'Etat, en tant qu'organe de surveillance, d'approuver la nomination du directeur.
Si ce dernier devait ne plus présenter les qualités professionnelles nécessaires ou les garanties d'une activité irréprochable ou d'une bonne réputation, il appartiendra également au Conseil d'Etat d'approuver la révocation du directeur.
Article 22
Pour les motifs relatés plus haut, cette disposition consacre le principe du maintien de la fonction publique pour le personnel de l'usine.
Article 23
L'affiliation de l'ensemble du personnel de l'usine à la Caisse de prévoyance du personnel enseignant, de l'instruction publique et des fonctionnaires de l'administration du canton de Genève (CIA) s'impose quel que puisse être le statut du personnel de l'entreprise.
Il serait de mauvaise gestion dans le cas particulier d'instaurer un régime de prévoyance professionnelle distinct pour une partie seulement du personnel, à savoir celui engagé postérieurement à l'acquisition de son statut d'autonomie par l'entreprise.
Article 24
Comme le prévoit le projet de loi sur la gestion des déchets actuellement à l'examen du Grand Conseil (PL 7919), toute installation d'élimination des déchets est soumise à une autorisation d'exploiter. Celle-ci doit définir les conditions de l'entreprise à l'égard de l'Etat.
Elle précise la nature, la quantité et la qualité des prestations exigées et complète, ainsi, les dispositions légales auxquelles l'établissement est soumis. L'autorité de surveillance dispose ainsi d'un instrument de mesure et de contrôle de la comptabilité de l'exploitation de l'usine avec les normes environnementales.
Cette autorisation d'exploiter est incluse dans un accord de prestations, lequel définit notamment les conditions auxquelles est soumis le droit de superficie concédé à l'établissement pour l'utilisation des terrains appartenant à l'Etat.
Articles 25 et 26
Ces dispositions préservent la responsabilité de l'établissement pour l'entretien et l'adaptation des équipements, ainsi que la possibilité de mettre en location des installations disponibles avec l'autorisation du département délégué à la surveillance.
Ce contrôle est nécessaire pour veiller à ce que des équipements indispensables à l'exploitation ne soient pas détournés de leur utilité initiale et fassent ainsi défaut.
La location d'installations à des tiers doit relever de l'exception, les investissements consentis dans l'usine n'étant pas destinés a priori à être valorisés par une mise à disposition de tiers.
Articles 27 et 28
Le statut autonome de l'usine des Cheneviers n'oblige pas l'établissement à être soumis aux mêmes contraintes et critères que ceux appliqués à tous les services de l'Etat. Dès lors, il est expressément fait mention de la possibilité pour l'établissement de recourir à des investissements privés, sans pour autant donner droit à participer à la gestion de l'établissement en bénéficiant d'un siège au conseil d'administration (cf. art. 11 du présent projet de loi).
L'établissement décide ainsi des investissements dont il assure lui-même le financement, par ses ressources ou par l'emprunt. L'établissement peut aussi programmer de manière plus précise ses futurs travaux ou autres engagements.
Lorsque les investissements excèdent la capacité financière de l'établissement, l'approbation du Conseil d'Etat sera requise. Lorsque des fonds publics cantonaux seront nécessaires, l'approbation du Grand Conseil sera également requise.
Article 29
Il énonce d'abord que l'établissement est soumis à la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993. Pour assurer la transparence des états financiers, il est souhaitable que l'établissement soit doté d'un système de comptabilité financière et analytique conforme aux normes IAS (International Accounting Standards). Cette disposition reprend les termes de l'article 24, alinéa 1 de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève.
Article 30
L'organisation financière de l'établissement a également fait l'objet d'un audit, lequel propose de mettre en place des éléments de pilotage économique et financier de l'usine dans la logique de la nouvelle gestion publique. Il s'agit en particulier d'assurer la visibilité individuellement sur les processus du traitement aboutissant à des résultats ou des produits différents, en supprimant notamment les péréquations qui peuvent exister entre des chaînes de traitement et de produits (par exemple le subventionnement des déchets spéciaux par majoration du tarif des ordures ménagères).
Le conseil d'administration doit donc établir chaque année le rapport annuel qui comprend plusieurs parties :
Le rapport de gestion avec les commentaires sur l'activité de l'usine lors de l'année écoulée.
Les comptes annuels : le bilan, qui compare la fortune (actifs) et les dettes (passifs), le compte d'exploitation et le compte de résultat contenant les recettes et les charges avec le résultat réel de l'exercice, la présentation du besoin en capitaux (net) pour les investissements nouveaux et de remplacement, ainsi que la provenance des fonds, enfin l'annexe. Les termes de l'article 25 de la loi sur l'organisation des Services Industriels de Genève ont été intégralement repris dans le présent projet.
Le rapport de l'organe de révision qui est simplement joint avec le rapport annuel.
Logiquement, cet exercice correspond à une année civile.
Article 31
Les taxes dues pour le traitement des déchets constituent l'essentiel des recettes attendues. Il est prévu d'acquérir d'autres recettes par la vente de l'énergie, des matériaux recyclés, la location d'installations momentanément disponibles et la valorisation du savoir faire de l'entreprise.
Article 32
L'excédent de recettes, après paiement des charges d'exploitation, intérêts, amortissements de dépréciation, dotation à provision et réserve dont réserve pour renouvellement, sera affecté pour moitié à une réserve pour le renouvellement des installations. Cette réserve doit être constituée dans le but de satisfaire les exigences de normes fédérales actuellement en projet qui pourraient régir cette matière dans un proche avenir.
Le solde de l'excédent de recettes sera affecté à une réserve d'exploitation pour d'éventuelles pertes futures.
Ainsi, l'établissement pourra fonctionner de manière autonome et les intérêts de la collectivité publique ne seront pas lésés.
Article 33
L'établissement est certes autonome, mais il est placé sous la surveillance et le contrôle du Conseil d'Etat, conformément à l'art. 7 du présent projet de loi. Par conséquent, les budgets et les comptes sont soumis à l'approbation du Conseil d'Etat. La procédure d'établissement des budgets et du rapport de gestion est définie dans la présente disposition légale.
Article 34
L'activité de l'usine étant d'utilité publique, il se justifie de l'exempter des impôts cantonaux et communaux. L'établissement reste cependant assujetti à la TVA et autres impôts fédéraux.
Article 35
Le statut de l'usine des Cheneviers étant instauré par le présent projet de loi, seul le Grand Conseil est compétent pour abroger cette loi ou prendre toutes décisions relatives à la dissolution et la liquidation de l'établissement.
Vu les investissements et la mise à disposition des biens immobiliers effectués par l'Etat à l'établissement en vue de son activité, il est naturel que le produit net de la liquidation de l'usine revienne à l'Etat.
Article 36
Cette disposition permet de procéder au transfert de l'universalité des droits et obligations à l'établissement lors de l'entrée en vigueur de la loi sans avoir à en dresser la liste exhaustive. Cela permet en particulier de résoudre des problèmes ultérieurs, résultant de l'oubli éventuel d'éléments de détail.
Article 37
Cette disposition a été intégralement reprise de la loi sur le statut de l'Aéroport international de Genève, quant à son alinéa 1.
En ce qui concerne l'alinéa 2, il faut, en cas d'opposition d'un membre du personnel à son transfert, que l'office du personnel de l'Etat s'engage, quel que soit le motif, à le replacer aux mêmes conditions financières, au sein de l'administration cantonale ou dans d'autres établissements publics du canton.
Au vu de ce qui précède, notre Conseil vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, d'approuver le présent projet de loi.
Préconsultation
M. Rémy Pagani (AdG). On nous soumet aujourd'hui un projet de loi éminemment paradoxal. D'un côté, on nous demande de trier nos déchets, d'organiser nos cuisines avec plusieurs poubelles, pour faire baisser la quantité de déchets, qui est aujourd'hui d'environ 350 kg par ménage, et d'un autre on s'apprête à autonomiser une usine pour la rendre soi-disant rentable, ce qui signifie augmenter sa production puisque cette usine tourne en sous-capacité. Elle est en effet prévue pour traiter 400 000 tonnes de déchets alors qu'on lui en livre péniblement 250 000, voire 300 000 tonnes.
On se trouve donc dans le paradoxe le plus incroyable : un discours écologique et, au bout de la chaîne, un discours productiviste de rentabilité à tout prix. Cette exigence de rentabilité nécessitera de récolter davantage de déchets industriels pour augmenter la production de l'usine des Cheneviers, rendant ainsi les émissions polluantes dans le canton plus importantes qu'elles ne le sont déjà. C'est ainsi que se présente la problématique qui nous est soumise dans ce projet de loi.
En ce qui concerne les détails de cette affaire, il est assez surprenant de voir que la décharge, qui fait partie de l'ensemble du processus de traitement des déchets et qui appartenait à l'usine et lui coûtait relativement cher, est aujourd'hui distincte de cette usine pour soi-disant renforcer la rentabilité de l'usine. Or, cette usine fondamentalement ne peut pas être rentable : dans l'optique d'une production intégrée des déchets ménagers et industriels, elle peut tout juste couvrir ses frais.
Ce nouveau projet de loi suscite un autre problème, à savoir l'entrée de capitaux privés dans cette nouvelle structure qui nous est présentée. On nous dit que, malgré l'entrée de ces capitaux privés, on n'a pas à craindre des processus d'accaparement de l'entreprise tels qu'on les voit au niveau planétaire ; on nous dit que les représentants de ces capitaux privés ne siégeront pas d'office au conseil d'administration. Or, on prévoit déjà trois représentants de ces capitaux dans la mouture actuelle. On peut donc se demander ce qu'il en sera ultérieurement.
Troisième problème posé par ce projet de loi : l'augmentation de la circulation des déchets. Pour augmenter la productivité de cette usine, nous allons quémander tous azimuts des déchets ménagers et industriels, non seulement en Suisse mais en Haute-Savoie, voire plus loin. L'usine n'étant pas reliée au chemin de fer, cela augmentera la pollution due à la circulation des camions qui devront sillonner notre région pour remplir les bassins d'accumulation des Cheneviers.
Pour terminer, je trouve, une fois de plus, paradoxal de vouloir effacer une dette dans le bilan général des comptes de l'Etat en en inscrivant une nouvelle dans les comptes des Cheneviers, voire en l'augmentant, fictivement peut-être, mais en l'augmentant au niveau des intérêts à payer, puisque cette usine, si elle devenait autonome, devrait être dotée d'un capital de 50 millions.
En commission, nous soulèverons évidemment cette question de la participation, parce qu'il y a là un véritable problème s'agissant du contrôle de la collectivité sur le prix des déchets. Ce projet de loi va nous retirer le pouvoir de contrôle que nous avions sur cette usine et notamment sur le prix des déchets ménagers à la tonne.
Nous avons suivi le débat sur le prix de l'eau et nous avons pu régler politiquement cette affaire avec les Services industriels de Genève. Si ce projet de loi est adopté, notre Grand Conseil n'aura plus rien à dire, puisqu'il n'aura ni à adopter les comptes ni à orienter la politique de l'entreprise. Seul le Conseil d'Etat pourra intervenir.
Présidence de M. Jean Spielmann, président
M. John Dupraz (R). Le groupe radical salue cette proposition avec intérêt. Il estime que cette proposition est un signe de modernité adapté à notre époque, qui permettra une meilleure transparence des comptes et du coût réel de la destruction des déchets et des ordures ménagères.
Il est en effet important que les habitants contribuables de ce canton sachent réellement ce que coûte la destruction des déchets produits par notre société. Les comptes de l'Etat comportent actuellement des zones d'ombre et on ne peut pas clairement évaluer tout ce qui est imputé au coût et à la gestion de cette usine, car d'autres éléments entrent en considération.
C'est pourquoi non seulement nous soutiendrons le renvoi de ce projet de loi en commission mais nous le défendrons, car il permettra vraiment de mettre le doigt sur ce que coûtent les déchets et d'appliquer enfin le principe du pollueur-payeur. C'est un principe que nous avons introduit dans la loi fédérale relative au traitement des eaux usées. Il serait judicieux de faire de même au niveau cantonal pour le traitement des déchets.
Il s'agit d'un bon projet que nous nous réjouissons de soutenir et de défendre en commission.
M. Michel Balestra (L). J'ai cru comprendre que mon collègue, le député Pagani, n'aime pas du tout les capitaux privés et les camions... Or, Mesdames et Messieurs, des capitaux privés pour combler les déficits publics il en faut beaucoup, et j'espère que vous en aurez assez pour finir la législature !
Ce projet de loi est un bon projet. Ce n'est pas une révolution - c'est peut-être pour cela qu'il est contesté par M. Pagani - c'est une réformette, mais l'usine des Cheneviers, qui a pour but le traitement et la valorisation des déchets, est un entreprise idéale pour tenter de dynamiser son action en lui accordant une personnalité juridique et une certaine autonomie de gestion.
Dynamiser son action n'est pas uniquement un processus quantitatif. Il s'agit aussi et surtout d'un processus qualitatif, puisque - je le répète - la valorisation des déchets fait partie de la mission de l'usine des Cheneviers.
Les questions fondamentales dont la commission devra immanquablement parler ne concernent pas la forme juridique ou organisationelle, que nous pratiquons déjà. Il ne s'agit pas non plus du nombre des membres du conseil d'administration qui semble parfait, ni de leur qualité puisque le personnel et les utilisateurs y sont représentés. Ces questions concernent bel et bien les conditions financières, qui doivent permettre un fonctionnement optimal sans constituer un oreiller de paresse ou un trop large cadeau de l'Etat à la direction de cette entreprise.
Le débat le plus critique devra immanquablement se situer à ce niveau. D'ailleurs le débat a déjà commencé dans la presse où l'on voit le conseiller d'Etat Cramer et M. Pagani en découdre.
C'est pourquoi je propose formellement le renvoi de ce projet à la commission des finances, qui me semble la meilleure solution. Certains diront que cette commission est saturée et qu'elles n'a pas le temps de s'en saisir. Je leur proposerai donc subsidiairement, et en deuxième vote, de le renvoyer à la commission de l'audit de l'Etat, devenue commission du contrôle de gestion, puisqu'il s'agit d'un réel effort de modernisation du fonctionnement de l'Etat et que ce serait le premier projet concret dont elle pourrait se saisir.
Ce projet n'est en tout cas pas un projet pour la commission de l'environnement, même si certains prendraient plaisir à mettre face à face le gladiateur sans peur et sans reproche Pagani et l'empereur visionnaire Cramer ! Les libéraux pensent que la logique devrait l'emporter sur le plaisir de la bagarre politique, spectaculaire mais stérile, et qui ne sert pas l'intérêt général.
Mme Alexandra Gobet (S). Pour les socialistes, ce projet de loi est un cahier de brouillon : c'est la base de la discussion nécessaire qui devra avoir lieu en commission. Les socialistes ne sont pas a priori opposés à l'autonomisation de structures comme celle des Cheneviers, mais ils partagent, pour une large part, les préoccupations exprimées par M. Pagani. Cela dit, il n'est rien qui ne puisse, dans le travail parlementaire, trouver une solution.
Je rappelle qu'une autonomisation ne passe pas sans création de statuts et que ceux-ci définissent en particulier la mesure, l'importance du contrôle politique. Compte tenu du fait qu'en commission de l'audit les partis avaient unanimement admis qu'une augmentation de la marge de manoeuvre passait également par des structures de contrôle démocratique renforcées, nous pensons qu'il doit être possible de trouver autour de ces questions des réponses satisfaisantes.
C'est également en commission que nous pourrons mesurer l'impact réel de la mise en oeuvre d'un tel projet sur les transferts d'ordures et la nécessité d'impliquer des capitaux privés.
C'est la raison pour laquelle les socialistes, avec certaines réserves que je viens d'exprimer, vous proposent de renvoyer ce projet, soit à la commission de l'environnement parce que nos collègues connaissent bien la problématique qui justifie l'existence des Cheneviers, soit à la commission de l'audit de l'Etat parce que nous avons eu largement l'occasion d'y évoquer les implications de nouvelles structures et de nouvelles autonomies.
M. Claude Blanc (PDC). Tout le monde parle de la réforme de l'Etat. Tout le monde dit qu'elle est en route. Lorsqu'on lance une initiative pour la demander, on nous dit même qu'on enfonce une porte ouverte et, à la première occasion concrète de réformer l'Etat, on entend les représentants de la majorité parlementaire nous dire qu'ils n'en veulent pas !
C'est précisément pourquoi il fallait lancer une initiative populaire, pour que le peuple puisse dire ce qu'il en pense.
Evidemment, quand on parle d'amélioration de la productivité, M. Pagani voit rouge parce que ce qui l'intéresse, c'est dépenser l'argent, et il se moque bien d'où il vient !
A mon avis, ce projet de loi est bien fait, c'est le premier pas vers une réforme de certaines structures de l'Etat qui n'ont pas à être dirigées directement depuis l'Hôtel de ville. Le Conseil d'Etat est sur la bonne voie, je l'en félicite, mais j'éprouve les pires craintes, car si je m'y attendais de la part de M. Pagani, je vois que les socialistes hésitent : ils n'osent pas attaquer de front parce que c'est M. Cramer qui présente le projet, mais en fait ils sont contre pour les mêmes raisons que M. Pagani. Je vous l'ai déjà dit plusieurs fois et je vous le répète, Mesdames et Messieurs les socialistes : vous n'êtes que des Tartuffes !
M. Georges Krebs (Ve). Les Verts ne sont pas opposés au principe d'une gestion autonome, bien au contraire.
Cela dit, il convient de rappeler que la centrale des Cheneviers est située dans un environnement fragile, au centre d'une cuvette et dans un emplacement guère favorable. Genève est sensible au brouillard et l'impact environnemental de l'usine est très important.
Nous nous soucions par ailleurs du problème du transport des déchets par des camions - les vôtres, peut-être, Monsieur Balestra - nous préférons quant à nous le transport fluvial. Nous craignons également que l'usine des Cheneviers, qui devra augmenter sa production, fasse concurrence au tri sélectif des déchets et au compostage. Nous aurions souhaité voir dans ce projet une volonté affirmée de réduire à terme la production de l'usine, voire de la faire disparaître après son amortissement.
Concernant le contrôle financier, tout a été bien prévu ; par contre il n'y a presque rien, sinon des références à une ordonnance fédérale, en ce qui concerne le contrôle technique des émissions. Il serait préférable qu'une autorité indépendante effectue ce contrôle, de la même manière qu'une fiduciaire contrôle les états financiers. Il ne faudrait pas non plus que la gestion autonome pousse, comme c'est le cas pour l'aéroport, au développement de l'outil de production pour essayer de le rentabiliser au maximum, au détriment de l'environnement.
En résumé, les Verts sont favorables au renvoi de ce projet de loi à la commission de l'audit.
M. Robert Cramer. Quand bien même M. Blanc a la gentillesse de m'attribuer la paternité de ce projet, je tiens à lui dire que ce projet, comme tous les projets qui vous sont soumis, est bien sûr un projet du Conseil d'Etat.
Mesdames et Messieurs, je tiens à vous remercier de l'attention avec laquelle vous avez lu ce projet de loi et, sans entrer dans tous les détails parce que nous aurons l'occasion de le faire en commission, je ferai une ou deux mises au point.
La première concerne la protection de l'environnement. Nous avons voulu ne pas mettre la charrue avant les boeufs en ce qui concerne le traitement des déchets, et nous avons donc commencé par définir un concept cantonal de gestion des déchets. C'est dans ce document que l'on trouve les règles du jeu que nous nous imposons dans le canton de Genève pour traiter les divers déchets, qu'il s'agisse des déchets à incinérer, à mettre en décharge, à trier ou à recycler.
Ce concept cantonal de gestion des déchets repose sur un certain nombre de principes de base qui sont ceux de la législation fédérale mais que nous voulons appliquer rigoureusement à Genève.
Le premier de ces principes est d'éviter de produire de déchets, c'est-à-dire d'en produire le moins possible. Cela signifie tout d'abord prendre des mesures de prévention pour que les produits que nous utilisons ne se transforment pas en déchets.
Le second principe veut que, dès lors qu'il y a des déchets, on essaie de les trier, de les valoriser, d'en faire des matières premières qui puissent ensuite retourner dans un cycle d'utilisation. C'est ainsi que nous avons développé tout un concept de récolte des déchets verts. C'est ainsi que le Grand Conseil a accepté, il y a quelques mois, un projet de loi portant sur un budget de 8,5 millions, si ma mémoire est bonne, pour mettre en place une installation de méthanisation au Nant-de-Châtillon qui permet de doubler la capacité de cette installation. C'est ainsi que nous appuyons les efforts des communes, aussi bien d'Arve-Lac que de la rive droite, qui créent des installations de compostage qui seront opérationnelles d'ici le début de l'année prochaine. A ce titre, je vous informe que les travaux ont d'ores et déjà débuté au Nant-de-Châtillon.
Enfin, il y a des déchets dont, malheureusement, nous ne pouvons rien faire d'autre que les brûler, et c'est la raison pour laquelle nous avons des incinérateurs dans ce pays, notamment celui des Cheneviers.
Je disais donc que la méthode a consisté à définir d'abord un plan de gestion des déchets, qui a été accepté par le Conseil d'Etat le 14 octobre 1998. Ce plan a été approuvé par l'autorité fédérale. Il s'applique aujourd'hui dans notre canton et représente la base de notre politique de gestion des déchets.
Ensuite, et je tiens à insister sur ce point qui répond à l'essentiel des interrogations de M. Krebs... qui n'a pas l'air de m'écouter... Je disais, Monsieur Krebs, que le Conseil d'Etat a proposé au Grand Conseil une loi cantonale sur la gestion des déchets - que la commission de l'environnement a bien voulu accepter à l'issue d'un vote unanime pas plus tard qu'hier et qui sera très prochainement soumise au Grand Conseil, sans doute au mois de mars - laquelle prévoit dans le détail les mesures de contrôle extrêmement strictes que l'Etat s'est réservées sur les diverses installations de traitement des déchets et évidemment sur l'usine des Cheneviers.
Ces mesures de contrôle s'appliquent non seulement au moment où les demandes d'autorisation de construire et d'autorisation d'exploiter sont déposées, mais elles s'appliquent tout au long du fonctionnement de l'installation. Ces mesures portent bien sûr sur les émissions et le respect des normes relatives à l'environnement, qui peuvent aller bien au-delà des minimums exigés par la législation fédérale.
C'est dire que ce projet de loi n'est pas - comme d'aucuns l'ont relevé à juste titre - un projet de loi qui relève stricto sensu du domaine de la protection de l'environnement. C'est avant tout un projet de loi qui relève du chapitre de la réforme de l'Etat. Il ne s'agit pas de savoir si l'on a envie que l'usine des Cheneviers soit plus rentable. C'est un non-sens, Monsieur Pagani : la rentabilité n'est pas visée puisqu'il n'y a pas de bénéfices recherchés et qu'il n'y a personne qui pourrait potentiellement en profiter. Il s'agit simplement de savoir comment faire pour gérer au mieux cette installation dans l'intérêt de la collectivité et de l'environnement.
Par ce projet de loi, nous voulons responsabiliser les usagers de l'installation quant à sa gestion. A cet égard, je vous demande d'accorder une attention toute particulière à deux dispositions clés de ce projet. Il s'agit de l'article 9 et de l'article 24.
L'article 9 prévoit que le conseil d'administration de cet établissement est constitué d'usagers et, pour l'essentiel, de représentants de collectivités publiques, puisque sur quinze membres quatre sont désignés par le Conseil d'Etat, trois sont désignés par les communes et un est désigné par les Conseils d'Etat des cantons utilisateurs. Enfin, Monsieur Gilly, vous avez pu constater qu'un membre est désigné par les milieux de protection de l'environnement, trois sont désignés par le personnel et trois autres par les utilisateurs privés.
Je terminerai par l'article 24 qui répond à toutes les préoccupations relatives à l'environnement qui se sont posées, pour autant que l'on veuille bien le lire en rapport avec la loi sur la gestion des déchets que j'évoquais et que vous aurez l'occasion d'approuver lors de votre prochaine session, je l'espère.
Cet article 24 prévoit très clairement que l'Etat exercera un contrôle sur cette installation. A cet égard, je tiens à affirmer que l'Etat pourra ainsi contrôler beaucoup mieux qu'actuellement le fonctionnement de l'usine des Cheneviers. Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, l'Etat est juge et partie : c'est le département de l'intérieur, de l'agriculture, de l'environnement et de l'énergie qui doit faire fonctionner cette usine et c'est le même département qui, à travers ses services tels que celui d'écotoxicologie, est l'autorité de contrôle.
En l'occurrence, en ma qualité de responsable du département, je dois donc contrôler si je fais bien fonctionner l'installation. Il y a là des risques de dérapage qui me paraissent évidents, quand bien même je m'efforce d'exercer ce contrôle avec rigueur. Je ne vous cacherai pas que je serais beaucoup plus à l'aise d'avoir à contrôler une installation dont je ne suis pas également le responsable de la gestion.
Aujourd'hui, les préoccupations de nature économique interfèrent avec les préoccupations de protection de l'environnement. Je souhaite que cette interférence cesse le plus rapidement possible et qu'elle cesse par une plus grande distance de cette usine avec l'Etat - plus grande distance toute relative puisqu'elle restera un établissement de droit public. S'agissant d'une installation de nature industrielle, il est également indispensable qu'elle puisse avoir la marge d'action nécessaire pour être gérée au mieux. Je répète que nous cherchons non pas une rentabilité accrue, mais avant tout un meilleur contrôle environnemental et une meilleure gestion de l'installation.
C'est dans cet esprit que je vous remercie de renvoyer ce projet en commission. Il me paraît effectivement indiqué de le renvoyer à la commission de l'audit de l'Etat, qui s'est occupée de la réforme de l'Etat et qui maîtrise bien la problématique des projets visant à modifier le mode de fonctionnement de nos départements.
Le président. Il a été fait plusieurs propositions de renvoi en commission : la commission des finances, la commission de l'environnement, la commission de l'audit de l'Etat.
Je mets aux voix ces propositions... (Commentaires.)
Nous sommes en préconsultation, Mesdames et Messieurs les députés, le temps de parole est de cinq minutes par groupe, mais nous pouvons continuer... Personnellement, j'ai le temps, mais vous ne vous plaindrez pas si nous finissons tard !
M. Michel Balestra (L). J'ai cru comprendre qu'une majorité pouvait se dégager autour de la commission de l'audit de l'Etat. Je retire donc la proposition de renvoi à la commission des finances.
M. Rémy Pagani (AdG). Je trouve que la question du renvoi en commission est tout à fait symbolique de cette problématique. Comme nous l'avons dit tout à l'heure, nous prétendons que le problème soulevé par cette usine est un problème d'environnement et nous proposons donc le renvoi à la commission de l'environnement. En effet, il est facile de parler du pollueur-payeur et, quand il s'agit de se pencher concrètement sur les problèmes de pollution de cette usine, de renvoyer immédiatement la question à une autre commission pour en faire un problème financier !
M. Claude Blanc (PDC). Notre Grand Conseil souffre déjà d'une pléthore de commissions qui ne savent plus quand siéger. J'ai appris que la commission de l'audit siégeait en principe le lundi à midi. Deux autres commissions siègent déjà le même jour à la même heure. Pour finir, on siégera tous les jours à midi et le soir, à moins qu'on nous propose un autre jour pour la commission de l'audit...
Personnellement, je suggère que l'on renvoie ce projet à une commission permanente du Grand Conseil, de manière à ne pas multiplier les séances, car les députés ne pourront bientôt plus faire face.
M. Chaïm Nissim (Ve). Mon collègue Pagani a raison quand il dit que le renvoi à telle ou telle commission est symbolique et que ce n'est pas tout à fait neutre. Mais il y a aussi des arguments techniques : par exemple, la commission des finances a cette année un double problème : elle doit étudier les comptes et le budget avant le mois de juin. Elle est par conséquent très occupée et vous-même, Monsieur Lescaze, vous nous avez lu hier une immense liste de rendez-vous... (Commentaires.) La commission des finances est effectivement débordée et M. Balestra a donc eu raison de retirer cette proposition de renvoi.
Restent deux commissions : environnement et audit de l'Etat. Mon groupe et moi-même sommes en faveur de la commission de l'audit de l'Etat, et ce sont les mêmes personnes qui pourront y siéger : dans notre groupe, par exemple, ce sera Anne Briol et moi-même parce que nous sommes intéressés à la fois par les problèmes d'environnement et par la réforme de l'Etat. En définitive, comme la commission de l'audit a cessé de siéger, chaque groupe est libre de désigner de nouveaux commissaires, c'est donc la commission idéale pour traiter cette question.
Le président. Je vous fais observer que chaque parti a pu s'exprimer et que nous nous trouvons dans la même situation que tout à l'heure, avec plusieurs propositions de renvoi en commission.
Mme Alexandra Gobet (S). Sans revenir sur ce que j'ai dit tout à l'heure, je tiens simplement à donner quelques informations sur la commission de l'audit de l'Etat. Jusqu'à présent, cette commission a travaillé sur des projets généraux. Il a toujours été clairement établi qu'elle aurait ensuite à traiter les projets concrets qui mettraient en oeuvre les principes que nous avons examinés. A l'heure actuelle, si cette commission a cessé de siéger, elle existe toujours et attend le rapport de M. Hiler concernant la nouvelle commission de gestion qui doit être créée.
Elle existe donc toujours. Si elle n'a plus d'objet à son ordre du jour, elle n'a toutefois pas été dissoute et est toujours composée des mêmes commissaires. Par conséquent, elle est tout aussi disponible que n'importe quelle autre commission existante pour traiter cet objet, tout comme la commission de l'environnement. Si la commission des finances a trois pages d'objets en suspens, je pense qu'il est effectivement raisonnable que ce soit l'une ou l'autre de ces deux commissions, environnement ou audit, moins chargées, qui se voie attribuer cette tâche.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, c'est la dernière fois que j'accepte que l'on prolonge la préconsultation. Je vous propose de nous en tenir à une règle. D'ailleurs, le règlement est précis sur ce point : il y a un tour de préconsultation de cinq minutes par groupe, vous faites vos propositions de renvoi en commission et après nous votons. Il est inutile de refaire un tour de parole pour reproposer la même chose. Nous sommes exactement dans la même situation que tout à l'heure.
Il me semble que la commission qui réunit le plus de suffrages est celle de l'audit de l'Etat. Je mets aux voix la proposition de lui renvoyer ce projet de loi.
Cette proposition est mise aux voix.
Le président. Il y a doute sur le résultat. Nous allons voter sur le renvoi à la commission de l'environnement.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission de l'environnement et de l'agriculture est adoptée.