Séance du jeudi 25 février 1999 à 17h
54e législature - 2e année - 4e session - 6e séance

54e législature

No 6/I

Jeudi 25 février 1999,

nuit

La séance est ouverte à 20 h 30.

Assistent à la séance : Mmes et MM. Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat, Guy-Olivier Segond, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.

1. Exhortation.

Le président donne lecture de l'exhortation.

2. Personnes excusées.

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : MM. Gérard Ramseyer, Carlo Lamprecht, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Roger Beer, Bénédict Fontanet, Jean-Pierre Gardiol, Claude Haegi, Michel Halpérin, David Hiler, Yvonne Humbert, René Koechlin et Pierre Meyll, députés.

E 968-1
3. Prestation de serment de Mme Mireille George, élue juge suppléante à la Cour de justice. ( ) E968-1
 Mémorial 1999 : Election, 601.

Mme Mireille George est assermentée. (Applaudissements.)

4. Annonces et dépôts:

a) de projets de lois;

Néant.

b) de propositions de motions;

Le président. La proposition de motion suivante est parvenue à la présidence :

M 1262
de Mmes et MM. Christian Brunier (S), Jacqueline Cogne (S), Erica Deuber-Pauli (AG), Antonio Hodgers (Ve) et Alberto Velasco (S) pour un auditoire universitaire «Alexei Jaccard». ( )   M1262

Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.

c) de propositions de résolutions;

Néant.

d) de demandes d'interpellations;

Néant.

e) de questions écrites.

Néant.

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de reprendre notre ordre du jour, permettez-moi de saluer à la tribune du public des représentants de l'Association suisse des internationaux de Genève.

Je vous salue chaleureusement et vous souhaite la bienvenue. Je me permets de vous dire combien nous tenons aux relations entre la population de Genève et les représentants des internationaux de Genève. Cette délégation est conduite par Mme Berenstein-Wavre, notre ancienne collègue du Grand Conseil, et par le co-président de ce comité. 

M 928-A
5. Suite du rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion de Mmes et MM. Maria Roth-Bernasconi, Michèle Wavre-Ducret, Nelly Guichard, Fabienne Bugnon, René Longet, Dominique Belli, Pierre Marti et Andreas Saurer concernant «Egalité de droits hommes-femmes ; plan d'action». ( -) M928
 Mémorial 1994 : Développée, 2439. Adoptée, 2444.
 Mémorial 1996 : Divers, 4586.
 Mémorial 1999 : Rapport, 621.

Suite du débat

Mme Marie-Thérèse Engelberts (PDC). En préambule, j'aurais souhaité faire une remarque au sujet du qualificatif dont les bancs d'en face ont été affublés par Mme Véronique Pürro : il ne faut pas trop se fier aux apparences, l'histoire de la vie des gens est toujours assez particulière.

Pour revenir au rapport du Conseil d'Etat, seule la première invite a été abordée de manière extrêmement complète, magistralement d'ailleurs, sur la base de textes qui sont cependant extrêmement connus. Je les en remercie, et je ne vais pas m'attarder sur ce point

En ce qui concerne les invites N° 2 et 3 : le parti démocrate-chrétien demande au Conseil d'Etat un complément au présent rapport, comprenant un descriptif des actions concrètes engagées à court, moyen et long terme dans les domaines aujourd'hui considérés par les femmes comme prioritaires et sur lesquels le Bureau de l'égalité détient de nombreux recherches et rapports. Nous souhaitons - en tant que femmes - qu'il nous soit possible, tant sur le plan politique, professionnel, que personnel, de contribuer de manière beaucoup plus concertée à la politique mise en place par le Conseil d'Etat concernant l'égalité des droits hommes-femmes.

Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). J'aimerais répliquer à Mme Polla que le partage des tâches domestiques et éducatives est, au contraire, un axe capital pour l'égalité de l'homme et de la femme. Sans cette répartition et les modalités d'accompagnement sur la garde des enfants, la femme ne pourra s'engager ni dans une vie professionnelle ni dans la vie politique. (Applaudissements.)

J'aimerais aussi rappeler qu'à Genève 70% des femmes ont une activité professionnelle et se mobilisent au quotidien pour pouvoir concrétiser leur autonomie. J'aimerais également dire à Véronique Pürro que la définition des femmes bourgeoises n'est pas aussi simple entre gauche et droite et que cette dichotomie ne sert pas toujours la cause des femmes.

Le groupe radical - bien que peu représentatif en matière d'engagement féminin en politique - se félicite de ce rapport. Néanmoins, il souhaiterait des mesures plus concrètes et visibles selon un calendrier annoncé.

M. Michel Balestra (L). (Applaudissements. Exclamations. Le président agite la cloche.) Vous savez tous que la première conseillère d'Etat de la République et canton de Genève était libérale. Elle a été depuis rejointe par une collègue, et, croyez-moi, du fond du coeur, j'en suis très heureux. Vous savez aussi que la première présidente du gouvernement genevois est libérale. Ces deux faits suffiraient à dispenser les libéraux d'être soupçonnés de misogynie politique primaire, comme certains de nos collègues semblaient l'insinuer avant le dîner et comme les exclamations que je viens d'entendre semblent le confirmer.

Pourtant, Mesdames et Messieurs, j'ai envie de vous dire que si l'ensemble des soucis que vous exprimez est légitime, chaque mesure normative que vous sortirez de vos épouvantables machines à légiférer affaiblira la cause des femmes. Cela ne nous dispense néanmoins pas de chercher des solutions novatrices.

Madame la députée Pürro, sous l'instigation de Mme Barbara Polla, nous avons proposé une motion demandant la déduction des frais de garde des enfants lorsqu'une épouse prend un travail. Voilà une mesure active pour que les deux chefs de famille puissent se réaliser professionnellement sans que les enfants aient à en souffrir.

Mesdames et Messieurs les députés, j'aime les femmes comme vous. (Rires, applaudissements.) Je respecte les femmes et je les admire peut-être plus que vous, mais je refuse de les considérer comme des Hommes, avec un grand H, plus fragiles que les autres. Mesdames et Messieurs les députés : pas de quotas, pas de mesures de protection inadaptées et statiques, mais des mesures dynamiques pour la réalisation familiale et professionnelle de tous ceux et de toutes celles qui le désirent, mais surtout pas de jugements de valeur culpabilisants pour tous ceux et toutes celles qui trouvent le bonheur dans des modes de vie plus traditionnels.

Si ce rapport n'est plus d'actualité au moment où il arrive sur nos tables, si tous les éléments qu'il contient figurent déjà dans d'autres documents, c'est que c'est le propre d'un rapport d'identifier des éléments avérés. Sinon ce n'est pas un rapport, mais une analyse prospective. Dans ce cas, il ne s'agit plus pour le Conseil d'Etat de répondre à une motion, mais bien d'acheter une boule de cristal, ce qu'il n'est pas en mesure de faire !

C'est pourquoi je vous invite - contrairement à votre proposition - à prendre acte de ce rapport qui est bon, tout en regrettant la politisation excessive d'un concept qui semble une évidence pour tous : la nécessité de l'égalité hommes-femmes.

M. Albert Rodrik (S). Pour nous, ce rapport clôture quatre années de prise en charge politique par M. le conseiller d'Etat Gérard Ramseyer de cette question. Nous ne voulons pas en dire plus, mais nous espérons que d'ici la fin de la législature en cours, des actions politiques - tangibles et concrètes - nous permettront de continuer une lutte qui n'est pas terminée et que nous sommes prêts à poursuivre; se gargariser du chemin parcouru n'est pas suffisant pour mener à terme ce qui reste à faire. Nous demandons instamment au Conseil d'Etat de considérer ce rapport comme un solde de pertes et profits peu reluisant du précédent gouvernement et de s'engager à produire quelque chose d'un peu plus tangible et digeste pour les élections de 2001. Faute de quoi, nous nous demanderons à quoi aura servi certain passage...

Mme Micheline Calmy-Rey. Je vous remets aujourd'hui un rapport qui décrit la situation genevoise en matière d'égalité des droits entre hommes et femmes. Il ne s'agit pas d'un plan d'action : c'est volontaire. Nous proposons une orientation nouvelle qui doit - mieux que jusqu'ici - parvenir à l'égalité entre femmes et hommes. C'est une priorité, nous en sommes conscients, et nous souhaitons agir différemment dès à présent.

A l'aube du XXIe siècle, les femmes, à travail égal, ne gagnent toujours pas le même salaire que les hommes dans un grand nombre de secteurs. Elles sont peu nombreuses à occuper des postes à responsabilité, tant dans le secteur privé que dans le secteur public. La situation relative au choix du domaine professionnel, que l'on soit fille ou garçon, n'a pratiquement pas évolué depuis 1982. En 1997 et 1998, seul un tiers des apprentissages est entrepris par des filles qui se dirigent essentiellement vers les domaines traditionnellement féminins, tels que le social, les soins et l'esthétique.

L'éventail des métiers féminins est au nombre de vingt-huit. Il est considérablement plus restreint que celui des métiers masculins qui s'élève environ à une centaine d'orientations. Celles-ci n'ont quasiment pas changé au cours des vingt dernières années. Les conséquences de ces carences et dysfonctionnements sont importantes. Les filles représentent 56% des jeunes sans formation. Bien qu'elles soient plus nombreuses, les filles peinent à atteindre les dispositifs de réinsertion professionnelle actuellement en place à Genève. Les lieux d'accueil ouverts aux jeunes offrent des prestations ciblées davantage sur un public de garçons que sur un public de filles et, dans ce domaine, les discriminations s'additionnent.

En ce qui concerne la pauvreté à Genève, les femmes font partie des groupes à risques. On estime que 60% de la population la plus pauvre est constituée de femmes. Les mères cheffes de famille en particulier sont très touchées. Majoritaires, les femmes le sont encore comme victimes de la violence, qu'elle soit physique, sexuelle ou psychologique. Dès le plus jeune âge, elles sont six fois plus exposées que les garçons à des abus sexuels. Une étude menée par le Fonds national de la recherche établit qu'une femme sur cinq est victime de violences physiques ou sexuelles dans le cadre d'une relation de couple et deux sur cinq de violences psychologiques. La violence envers les femmes touche tous les milieux sociaux et ne se limite pas aux couches défavorisées, contrairement à ce que l'on pourrait croire.

Mesdames et Messieurs, en dépit de ces réalités chiffrées, les réponses institutionnelles laissent à désirer. Le temps n'est pas à l'optimisme de façade, ni à la méthode Coué. Nous devons faire avancer la cause des femmes dans la réalité de la vie de tous les jours. Le devenir du Bureau de l'égalité qui - soulignons-le - vient de changer d'appellation et s'intitule désormais : «Service de la promotion de l'égalité entre femmes et hommes» s'inscrit dans ce contexte. Recherche scientifique, formation, campagnes de sensibilisation, expertises juridiques, propositions aux autorités et à d'autres milieux intéressés, collaboration étroite avec les associations féminines : les interventions du Bureau de l'égalité sont multiples. Elles se sont principalement concentrées sur l'égalité des chances dans la formation, l'orientation professionnelle, l'égalité au travail et la violence exercée sur les femmes. Il nous faut consolider, voire élargir ces axes d'intervention à l'aide d'une stratégie différente. Pour mieux atteindre les objectifs fixés par la loi, nous proposons une nouvelle orientation, c'est-à-dire une approche intégrée de l'égalité qui implique et qui engage chacun des départements.

Je souhaite que chaque département développe une politique de l'égalité et prenne des mesures adéquates à cet effet, en collaboration avec le service de promotion de l'égalité. Chaque département, voire chaque office ou chaque service, nommerait un ou une déléguée alliant compétences, motivation et capacité d'agir pour assumer cette fonction. C'est la raison pour laquelle, le Conseil d'Etat ne formule pas de propositions toutes faites, puisqu'elles devraient être élaborées en concertation avec les personnes de référence de chaque département. Dans cette nouvelle configuration, le service de promotion de l'égalité ne se situe plus dans un no man's land. Il travaille en coopération avec les départements ou services concernés. La concrétisation du principe de l'égalité nécessite un engagement bien ciblé et très soutenu dans un grand nombre de lieux : l'administration, les partenaires sociaux ainsi que les diverses associations. Selon les besoins, le service serait l'instigateur ou le coordinateur de ces actions. Il fonctionnerait comme centre de compétences proposant des services dans de nombreux domaines.

Cette politique, Mesdames et Messieurs, s'inscrit dans l'évolution européenne actuelle et majoritaire qui veut que la question de l'égalité ne soit plus dévolue ou circonscrite à un service particulier, en l'occurrence ce qui était le Bureau de l'égalité. L'égalité ne repose plus exclusivement sur les quelques personnes - trois postes et demi - du service de l'égalité. Elle est l'affaire de tous. Promouvoir une approche intégrée signifie prendre en compte de manière systématique les inégalités persistantes dans tous les secteurs d'activité et dans l'ensemble des lois, y compris au niveau de leur évaluation, de leur planification et de leur application.

La question de l'égalité entre hommes et femmes, inscrite dans la constitution, devient ainsi véritablement une tâche de l'Etat. Il faut saluer cette nouvelle dynamique qui répond à un double souci d'efficacité, d'éthique et de justice.

Mesdames et Messieurs, j'espère que vous serez convaincus par cette explication. Le plan d'action suivra, une fois que le service de promotion de l'égalité aura pris contact avec les différents départements et lorsque ces derniers auront mis en place la structure nécessaire pour effectuer le suivi des actions proposées.

Mme Véronique Pürro (S). Lorsque tout à l'heure le groupe socialiste proposait ce que vient d'énoncer Mme Calmy-Rey, je ne pensais pas avoir une réponse aussi rapide et je l'en remercie.

Ce qui compte ce sont les faits qui nous permettront d'évaluer votre politique en la matière. Nous nous réjouissons d'ores et déjà du succès de ces plans d'action.

Je regrette cependant que vous n'ayez pas, Madame la conseillère d'Etat, tenu compte de tous ces éléments dans les conclusions du rapport. Cela nous aurait probablement évité, en partie, la discussion de tout à l'heure. Quoi qu'il en soit, je vous remercie.

Le président. Nous sommes en présence de deux propositions : prendre acte de ce rapport ou le renvoyer au Conseil d'Etat.

Je soumets à vos suffrages le renvoi de ce rapport au Conseil d'Etat.

Le résultat est douteux.

Il est procédé au vote par assis et levé.

L'adjoint du sautier compte les suffrages.

Cette proposition est rejetée par 36 non contre 35 oui.

Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.

PL 7829-II-B
6. Rapport de la commission judiciaire chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat sur la juridiction des prud'hommes (E 3 10). ( -) PL7829-II
 Mémorial 1998 :  Projet, 1240. Renvoi en commission, 1283.
 Mémorial 1999 : Rapport final, 331. Renvoi en commission, 416.
Rapport de M. Rémy Pagani (AG), commission judiciaire

Le président du Grand Conseil, dans un souci d'efficacité, a fait renvoyer le projet de loi susmentionné. Pour faire suite, la Commission judiciaire a travaillé avec diligence et elle est heureuse de vous présenter ce nouveau rapport. Ce d'autant plus qu'en une seule séance la commission a mené à bien ses travaux sous la présidence efficace de Mme Fabienne Bugnon. Divers amendements formulés en plénière et une lettre adressée au Grand Conseil par les présidents et vice-présidents de la juridiction des prud'hommes ont fait l'objet d'un débat approfondi.

M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, sous la responsabilité duquel le Conseil d'Etat a placé le projet de loi sur la juridiction des prud'hommes, était présent pour l'occasion, ainsi que M. Gabriel Aubert, professeur à la Faculté de droit, MM. Pierre-Yves Demeule, président de la Chambre d'appel des prud'hommes, M. Bernard Duport, secrétaire adjoint/DJPT, M. Christian Goumaz, directeur des affaires juridiques/DEEE et M. Hubert Montavon, greffier de juridiction. Qu'ils en soient ici remerciés. Des remerciements appuyés vont enfin à la procès-verbaliste de la commission, Mme Pauline Schaeffer ; la diligence dont elle a fait preuve ayant permis à l'ensemble des députés de notre Grand Conseil d'avoir, aussi rapidement, entre les mains le présent rapport.

Mise en garde

Le lecteur du présent rapport voudra bien se reporter au rapport précédent, soit le projet de loi 7829-A-II. Le présent rapport ne constitue qu'un complément au document précédent et n'a pour but que de traiter des amendements élaborés après la clôture des travaux de la commission. Les membres de la Commission judiciaire étant conscients que les élections de cette juridiction ont été reportées pour la fin de l'année, ce qui constitue un délai constitutionnel impératif, il leur appartenait d'achever au plus vite leurs travaux.

Enfin, le projet de loi qui figure dans ce cahier, fruit des débats de cette unique séance, complète le précédent.

Propositions d'amendements

a) amendements concernant la création d'un 6e groupe consacrant l'égalité en femmes et hommes

1ère partie  Dispositions générales

Titre II   Répartition des professions

  Article 3, alinéa 1 : ajout

Le commissaire auteur de cet amendement propose une division en six groupes au lieu de cinq. Dans ce contexte, est prévue l'adjonction suivante :

f) Groupe 6 : toutes les questions ayant trait à l'égalité entre femmes et hommes.

Pour être cohérent avec sa démarche, l'auteur souhaite également les apports suivants :

1re partie Dispositions générales

Titre IV  Degrés d'instance

Article 9, alinéa 3 : ajout

« Dans le groupe 6, soit pour les questions ayant trait à l'égalité entre femmes et hommes, le Tribunal est composé d'un minimum de deux femmes. »

1re partie Dispositions générales

Titre IV  Degrés d'instance

Article 10, alinéa 4 : ajout

« Dans le groupe 6, soit pour les questions ayant trait à l'égalité entre femmes et hommes, la Cour d'appel est composée d'un minimum de deux femmes. »

Après un long débat, les commissaires présents, à l'invite de la présidente et en accord avec l'auteur, renoncent à voter, même le principe contenu dans ces amendement pour les raisons suivantes :

En son article 141, la Constitution genevoise consacre l'organisation de cette juridiction en groupes professionnels. Toute modification ou adjonction d'un groupe constitué sur la base de l'égalité des sexes ou de tout autre critère que celui de la profession doit faire l'objet d'une modification de ce texte supérieur.

Imaginons une personne se disant victime de discriminations et, de surcroît, contestant son horaire de travail, il y aurait des conflits relevant de deux normes de droit différentes entre deux groupes puisqu'il y aurait, en quelque sorte, deux litiges. Du point de vue juridique, il y a risque de scission des contentieux avec tous les problèmes de contestation que cela pourrait engendrer au fil de la procédure.

En l'état, est-il opportun que les prud'hommes traitent de telles affaires ou ne serait-il pas plus judicieux que la Commission de conciliation qui a été instaurée par la nouvelle loi sur l'égalité débouche sur une juridiction ad hoc ? Une majorité de commissaires semble pencher pour cette solution.

b) amendements concernant la composition du bureau de conciliation

2e partie  Procédure

Titre I  Dispositions générales

Article 12 : nouvelle teneur

« Art. 12  Comparution des parties

Les parties comparaissent en personne et sont entendues contradictoirement.

Elles peuvent être assistées par un proche. Devant le Tribunal et la Cour d'appel, elles peuvent en outre être assistées par un avocat ou par un autre mandataire professionnellement qualifié. »

2e partie  Procédure

Titre II  Conciliation

Article 18 : nouvelle teneur

Art. 18   Conciliation

Chaque bureau de conciliation est composé d'un prud'homme employeur et d'un prud'homme salarié.

Ceux-ci président l'audience à tour de rôle, en commençant par le plus âgé.

2e partie  Procédure

Titre II   Conciliation

Articles 20, 21, 22, alinéas 1 et 2 ; 23, 24, 28 et

3e partie Fonctionnement de la juridiction

Titre I  Audiences

Remplacer le terme de « conciliateur » par celui de bureau.

Pour l'ensemble des commissaires, la question de la conciliation peut être résumée comme suit : soit on donne une chance à la conciliation en la fondant sur une bonne connaissance du droit, soit on la supprime. Si l'on penche pour le critère d'utilité, il convient dès lors que les juges conciliateurs soient le plus qualifiés possible. Bien sûr, si l'on supprime la conciliation, on gagne du temps… Or, pour les commissaires cette dernière solution est regrettable, dans la mesure où la philosophie de la conciliation revêt une importance capitale dans notre société.

Plus technique, le professeur Aubert est formel : la conciliation devant les prud'hommes ne fonctionne pas en l'état. Pour lui le diagnostic s'avère parfaitement clair. C'est d'ailleurs partant de ce constat que la commission s'est attelée à la révision de ce mécanisme. Or, revenir à l'état antérieur serait grave, conclut le professeur, tout en ajoutant que le système qui est proposé fonctionne très bien dans le canton du Valais.

Suite à une discussion nourrie autour des termes précédemment énoncés, l'ensemble de ces amendements sera rejeté par la commission par 7 contre 1 et 5 absentions.

c) amendements concernant la nomination du juge conciliateur

2e partie  Procédure

Titre I   Dispositions générales

Article 18, alinéa 2 : nouvelle teneur

2 Une personne titulaire d'une licence en droit ou au bénéfice d'une formation spécifique dont les modalités sont fixées par règlement, désignée par le collège des présidents et vice-présidents de groupes, procède par délégation à la tentative de conciliation.

Les commissaires rappellent l'ensemble des arguments déjà énoncés dans le précédent rapport en ce qui concerne les modalités de fonctionnement de cette instance et sont d'avis que cet amendement garantira beaucoup mieux une certaine forme de démocratie dans la désignation des conciliateurs et face à une cooptation trop évidente

L'amendement tel qu'énoncé ci-dessus est accepté par 7 oui, contre 3 non, avec 3 abstentions.

Article 18, alinéa 3 : nouvelle teneur

3 Les conciliateurs sont désignés sur la base d'une liste de candidats dressée par le Département de justice et police sur proposition des milieux professionnels concernés. Ils sont assermentés par le Conseil d'Etat.

Après une discussion technique qui tourne autour de la séparation des pouvoirs, l'amendement est modifié comme suit :

«3 Les conciliateurs sont désignés sur la base d'une liste de candidats dressée par le greffe de la juridiction des prud'hommes sur proposition des milieux professionnels concernés. Ils sont assermentés par le Conseil d'Etat. »

L'ensemble des commissaires relève que cet amendement correspond à une amélioration substantielle quant à la désignation des juges conciliateurs. En effet, les partenaires sociaux établissant une liste, on peut déjà imaginer qu'elle sera élaborée avec soin. Ensuite, cette liste étant gérée par le greffe sur le plan administratif notamment en contrôlant la moralité et les qualifications des personnes candidates, ce système permettra un choix judicieux et rigoureux de candidats. Enfin l'assemblée des présidents et vice-présidents pourra trancher. Ainsi, selon certains commissaires, on donne les meilleures chances pour que cette juridiction puisse enfin fonctionner correctement dans l'intérêt du justiciable.

L'amendement tel que modifié ci-dessus est accepté à l'unanimité.

2e partie  Procédure

Titre II   Conciliation

Article 23, alinéas 3 et 4 : nouvelle teneur

Pour des raisons de sécurité du droit et de garantie de la force jugée d'un procès-verbal de conciliation, les commissaires décident à l'unanimité de modifier cet article comme suit :

«3 Le procès-verbal de transaction est ensuite contresigné par le président du groupe compétent ou son remplaçant. »

«4 Les procès-verbaux de conciliation sont rapportés au greffe du Tribunal et sont minutés comme des jugements. Ils ont la même valeur que les jugements définitifs rendus par le Tribunal. Chaque partie en reçoit gratuitement copie dans les 10 jours. »

L'amendement tel que rédigé ci-dessus est accepté à l'unanimité.

d) amendements concernant le nombre de juges à la Cour d'appel

Art. 10 Cour d'appel

1 La Cour d'appel est composée d'un président, juge, ancien juge ou juge suppléant à la Cour de justice, de 2 prud'hommes employeurs et de 2 prud'hommes salariés ces derniers ayant siégé pendant au moins 3 ans au Tribunal.

Le débat se concentre sur le nombre de juges à la Cour d'appel. L'article 10 du projet prévoit la réduction de cinq juges à trois. Le commissaire auteur de cet amendement, en revanche, souhaite le maintien de leur nombre à cinq. A cet égard, le professeur Aubert, parlant au nom de sa propre expérience, relève un problème de disponibilité, ce qui a eu pour effet que l'on manquait de magistrats. Il signale, au passage, que le Tribunal des baux et loyers fonctionne d'ailleurs parfaitement bien avec ce système prévoyant deux juges assesseurs.

Un autre commissaire ne partage pas cette analyse et, dans ce contexte, en sa qualité de représentant de l'UAPG, tient à souligner la cohérence des propos de l'amendement proposé. Il regrette, en effet, la réduction de cinq à trois juges en Cour d'appel. De plus, ce commissaire fait état de ce qu'il a entendu dire : les juges laïcs préféreraient, apparemment, être quatre. Adopter un système à trois juges (un salarié, un employeur et un juge professionnel) semble susciter passablement d'inquiétudes. En résumé, les intervenants seraient satisfaits de l'organisation actuelle.

L'amendement pour maintenir à cinq le nombre de juges en Cour d'appel est accepté par 5 oui, contre 2 non avec 3 absentions.

e) amendements concernant la mise à charge des frais d'interprète pour une partie dont la demande est jugée téméraire.

Le commissaire auteur de cet amendement souhaite émettre un avis dans le cadre de l'article 69. Il explique que, dans certains cas, le recours à un interprète peut s'avérer très coûteux. Il est d'avis qu'il faut amender l'alinéa comme suit :

« 3 L'interprète est indemnisé par l'Etat. »

en supprimant le reste de la phrase de cet alinéa.

L'amendement tel que rédigé ci-dessus est accepté à 5 oui, contre 4 non, avec une abstention.

En définitive, la Présidente soumet le projet dans son ensemble au vote. L'ensemble de ce projet de loi tel qu'amendé est accepté par 5 oui, avec 5 abstentions.

Mesdames et Messieurs les députés ici s'achèvent, pour l'instant, les travaux de la Commission judiciaire concernant cette juridiction du travail.

Nous espérons que vous leur réserverez bon accueil. La majorité de la commission vous recommande d'accepter ce projet de loi.

TABLE DES MATIÈRES

PREMIÈRE PARTIE : DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Titre I : Compétence et élections

Titre II : Répartition des professions

Titre III : Organisation interne

Titre IV : Degrés d'instance

DEUXIÈME PARTIE :  PROCÉDURE

Titre I : Dispositions générales

Titre II : Conciliation

Titre III : Tribunal

Titre IV : Cour d'appel

TROISIÈME PARTIE :  FONCTIONNEMENT DE LA JURIDICTION

Titre I : Audiences

Titre II : Greffe

Titre III : Frais

QUATRIÈME PARTIE :  DISPOSITIONS FINALES

Premier débat

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Nous avons affaire à un nouvel épisode de cette saga sur la réforme du Tribunal des prud'hommes.

Afin de rafraîchir la mémoire de ceux qui l'auraient oublié, je rappelle que nous avons reporté quasiment d'une année le vote sur l'élection des juges prud'hommes. Nous sommes à la limite de la légalité, puisque cette juridiction se renouvelle tous les six ans. De plus, nous avons travaillé en commission pour mettre sur pied non pas une réformette, mais une véritable réforme de ce tribunal, notamment par la présence des avocats ou des professionnels qualifiés tout au long du parcours de cette juridiction, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Aujourd'hui encore, tant en conciliation que pour toutes les affaires inférieures à 20 000 F, le justiciable doit faire l'effort de connaître la loi pour se défendre lui-même. La conciliation va subir un changement fondamental : nous avons essayé de donner tous les moyens à un juge conciliateur professionnel qualifié, afin qu'il ait réellement la possibilité de concilier ces affaires. En outre, la formation nous semble importante. Une formation quasiment obligatoire, puisqu'elle sera sanctionnée, en tout cas pour les présidents de groupe, par un brevet adéquat.

Nous avons présenté ce projet de loi ici même le mois dernier. Un certain nombre d'amendements ont été formulés et ont donné lieu au présent rapport 7829-B-II. Nous nous sommes mis d'accord et nous avons pris en considération les problèmes constitutionnels que pose l'introduction d'un groupe sur l'égalité qui est, à mon sens, évidemment nécessaire. La constitution actuelle ne permet pas l'introduction de ce groupe sur l'égalité, puisqu'elle casserait la nécessaire constitutionnalité des groupes professionnels. Nous avons donc abandonné ce projet d'amendement. Nous en avons pourtant retenu d'autres en ce qui concerne la perfection du régime de conciliation.

A ce sujet, il m'a été demandé de préciser ce qui suit : nous considérons qu'il appartient aux organisations faîtières professionnelles de présenter une liste de candidats. En terme d'organisations faîtières, nous reconnaissons : l'UAPG et la CGAS pour ce qui est des juges conciliateurs. Enfin, nous sommes passés du régime de trois juges en appel à un régime de cinq, ce qui revient à la situation actuelle qui correspondait à la demande de l'ensemble des partis de ce cénacle.

Mme Alexandra Gobet (S). Le groupe socialiste regrette que la loi sur la juridiction des prud'hommes revienne de commission, ce soir, sans que le Grand Conseil ne remplisse de façon effective le mandat constitutionnel essentiel de l'égalité entre hommes et femmes. Il ne manquait pourtant pas de fins juristes autour de la table de commission pour pondre brillamment de telles dispositions, lorsque mon collègue Beer est revenu sur le sujet le 4 février dernier. Comment se peut-il que pas un seul de ces brillants esprits n'ait accepté de mettre sa science à disposition de cette cause pour redresser, si besoin, les amendements d'un député socialiste laïc, mais convaincu, ou, plus positivement, pour proposer une formule juridiquement valable ?

Il est navrant de ne trouver dans le procès-verbal qu'une critique juridique étroite et stérile. Une composition spéciale au lieu d'un groupe, comme la composition sociale au Tribunal des baux et loyers, ou quelque autre et inventive formule, ne pouvait-elle revenir de la commission avec le concours des spécialistes qui, ce soir-là, siégeaient avec les députés ? Voter maintenant une loi incomplète sur ce point revient à reporter de six années la prise en compte de cette problématique essentielle; pour les socialistes, pour les syndicats, c'est trop !

C'est la raison pour laquelle, le groupe socialiste propose formellement le retour en commission pour une séance supplémentaire consacrée à la solution effective de ce point en dépassant le voeu de la critique juridique stérile au profit de la création législative qui constitue notre mandat. (Applaudissements.)

M. Bernard Annen (L). Lors de notre dernière séance, un certain nombre d'amendements - et non des moindres - ont été présentés. Notre Grand Conseil, très sagement, a renvoyé ce projet en commission pour étudier, sauf erreur, une bonne quinzaine d'amendements de manière approfondie. Or, quelle n'a pas été notre surprise de voir que la commission judiciaire a renvoyé ce projet à notre Conseil après une seule séance de deux heures. Un certain nombre de principes importants devaient être débattus. A la lecture de ce dernier rapport, très bien fait, de M. Pagani, nous avons eu la désagréable impression que, finalement, un consensus de l'ensemble de la commission est intervenu pour ne rien accepter du tout.

On a quelque peu l'impression que cette commission comptait énormément de juristes... et que c'était un peu son défaut ! A l'époque, lorsque nous avions déjà étudié des modifications de cette loi des prud'hommes, nous avions formé une commission ad hoc. La commission judiciaire est, en effet, beaucoup trop axée sur les problèmes essentiellement juridiques, alors que la juridiction particulière des prud'hommes est une juridiction de laïcs. C'est la raison pour laquelle, à l'époque, il y avait de grands syndicalistes, en l'occurrence Mme Christiane Brunner, qui faisait partie de cette commission; un syndicaliste bien connu et petit syndicaliste patronal : votre serviteur. Au moins avons-nous pu aborder cette problématique de manière pragmatique, de sorte que l'ensemble des acteurs pouvaient se retrouver.

Or, je suis navré de constater qu'aujourd'hui on a tout simplement mis le rouleau compresseur. Pour obtenir un résultat, il fallait trouver un consensus; la seule possibilité dans ces circonstances, était que les arguments ou les amendements des uns et des autres viennent s'annuler mutuellement, et je crois que c'est ce à quoi nous sommes arrivés. Autrement dit, avec un peu de cosmétique sur un certain nombre d'amendements, la commission, à une quasi-unanimité - je m'empresse de le dire : les libéraux y compris - a accepté ce projet, à tort ou à raison, peu importe.

Aujourd'hui ce projet nous est présenté alors qu'un projet de loi constitutionnelle est aussi renvoyé à la même commission. M. Pagani nous annonce, ce soir, encore un projet de loi; il serait plus raisonnable d'étudier l'ensemble de ces projets et, peut-être, d'écouter plus attentivement les partenaires sociaux qui doivent régler au quotidien, pour leurs adhérents, les problèmes qui nous préoccupent ce soir.

Ceux qui, parmi vous, ont eu la curiosité de suivre l'émission «Capital» qui traitait, en France, des tribunaux de prud'hommes, devraient être suffisamment éclairés par la manière dont ils étaient évoqués pour dire que la réforme que l'on nous propose ce soir n'est pas suffisante. Elle doit s'articuler au niveau de l'intérêt des parties et non pas à celui d'un certain nombre de juristes émérites comme le professeur Aubert, qui, de mon point de vue, sont beaucoup trop éloignés des réalités du quotidien.

C'est dire que le groupe libéral soutiendra la proposition socialiste de renvoyer ce projet de loi en commission - pas pour les mêmes raisons que les vôtres, Madame, bien entendu - de manière à tenir compte des intérêts des deux parties, ce qui serait beaucoup plus sérieux que de faire uniquement de la théorie.

Nous recevons ce soir une lettre des juges prud'hommes qui nous proposent encore des amendements - peut-être quelque peu cosmétiques - que la commission a bien voulu accepter. Lorsqu'on s'occupe de problèmes aussi importants - comme M. Pagani l'a dit très justement - qui engagent notre parlement, en tout cas pour les six premières années, je crois que cela mérite un peu plus de considération.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Je parlerai du renvoi en commission. Je trouve que les attaques de M. Annen sont particulièrement déplacées. D'une part, il n'y a pas que des juristes dans cette commission, Monsieur Annen, puisqu'elle est présidée par la non-juriste que je suis. Les projets des prud'hommes ont été étudiés avec beaucoup d'attention et nous y avons consacré énormément de temps. (L'oratrice est interpellée par M. Annen.) Monsieur Annen, l'étude de cette juridiction des prud'hommes a fait l'objet de longues séances sous la présidence de M. Unger.

Lors de la dernière séance, vous avez souhaité - M. Balestra s'en est expliqué en commission - renvoyer ce projet dont les nombreux amendements ne pouvaient pas être traités dans le cadre d'une séance plénière. Nous avons accepté cette démarche qui nous paraissait juste, car il n'est pas possible, à cent députés, d'effectuer un travail aussi compliqué, en plénière. La commission judiciaire a estimé que ce projet était urgent, et elle l'a immédiatement agendé à ses travaux - précisons-le - après quatre heures de commission sur les dérives sectaires, ce qui vous montre que les députés étaient prêts à travailler pour que ce projet puisse être traité encore ce soir.

Nous nous sommes entourés, dans cette commission, de spécialistes et notamment du professeur Gabriel Aubert. M. Beer est effectivement venu en commission. Le seul reproche que l'on peut lui adresser c'est de ne pas avoir assisté à l'ensemble des travaux, de ne pas avoir entendu toutes les discussions. Il est effectivement venu nous présenter ses amendements dont nous avons parlé de la même manière que les amendements que vous présentez - qui ont été fort bien défendus par M. Balestra - mais qui n'ont pas fait l'unanimité.

En commission, le Conseil d'Etat en charge du dossier nous a démontré d'une manière suffisamment convaincante que l'amendement socialiste n'était tout simplement pas compatible avec la constitution. Sur la base de ces arguments qui ont convaincu une majorité de la commission, nous avons fait le choix très clair de faire passer la réforme de la juridiction des prud'hommes, qui - comme l'a dit M. Pagani - n'est de loin pas une réformette. Nous avons estimé qu'elle était urgente, qu'il était temps de la faire passer et qu'elle soit votée par ce Grand Conseil pour que les élections puissent avoir lieu en fin d'année, car elles ont déjà été repoussées. Dans un second temps, nous nous donnions les moyens d'introduire un certain nombre de principes qui sont aussi chers aux Verts qu'aux socialistes : les principes de l'égalité et les principes de l'éligibilité des juges prud'hommes étrangers.

Nous avons déposé pour ce faire, M. Beer, M. Pagani et moi-même, un projet que nous allons traiter encore ce soir, qui va être renvoyé à la commission judiciaire et qui sera examiné dans des délais très brefs. Si le Conseil d'Etat veut bien nous suivre, il le mettra rapidement en votation populaire et nous pourrons aller de l'avant.

Mais, pour ce soir, je vous prie instamment d'accepter de voter ce projet, tel qu'il ressort des travaux de la commission, sans y ajouter quoi que ce soit.

M. Christian Grobet (AdG). Pour corroborer les propos de Mme Bugnon, les juristes - éminents ou non, pour reprendre le qualificatif de Mme Gobet - ne représentent qu'une petite minorité de la commission judiciaire.

Deuxièmement : Monsieur Annen vous le savez fort bien, chaque parti est libre de désigner d'autres personnes que les représentants ordinaires, lorsqu'il s'agit de traiter un sujet particulier. L'Alliance de gauche a ainsi souhaité qu'un syndicaliste - actuellement à la table des rapporteurs - siège dans la commission pour traiter du problème du Tribunal des prud'hommes. Il est évident que chaque parti pouvait faire de même.

Troisième observation : je suis de ceux - et je crois que Mme Bugnon, présidente de la commission et son prédécesseur, M. Unger, m'en rendront acte - qui considèrent que le travail législatif est délicat et demande réflexion. J'ai, par conséquent, de la peine à suivre les travaux de la commission judiciaire dont le rythme soutenu est imposé en raison du nombre de projets à traiter et par le fait, également, que certains citoyens considèrent que les objets qui les touchent plus particulièrement sont les plus urgents. Je comprends qu'il ait fallu traiter rapidement ce projet, bien que j'aurais souhaité pouvoir disposer de plus de temps. Madame Gobet, au lieu de nous faire la leçon, vous auriez pu participer à nos débats. Vous auriez peut-être trouvé la solution que nous recherchions pour satisfaire votre souci qui est également le nôtre.

En réalité, nous nous sommes rendu compte que le premier amendement proposé par M. Beer était irréalisable, puisqu'il demandait de créer un groupe supplémentaire. Sans entrer dans le détail, il n'était pas possible de créer un groupe professionnel pour les litiges relatifs à l'égalité entre l'homme et la femme. M. Beer l'a parfaitement compris, et une section spéciale a été suggérée dans laquelle - pour des questions d'égalité - une majorité de juges siégerait. Mais la création de cette section spéciale posait d'autres problèmes. La plupart des litiges concernant la violation de l'égalité entre l'homme et la femme sont liés à des demandes ordinaires qui doivent être traitées par l'un des groupes professionnels. Peut-être par manque d'imagination, Madame Gobet, nous n'avons pas trouvé de solution adéquate.

A l'issue de la séance, nous étions conscients qu'il restait un problème à régler pour lequel nous pensions demander l'aide du professeur Aubert. Je suis persuadé qu'une solution peut être trouvée et que la loi qui vous est soumise ce soir peut être rapidement amendée. La question effectivement se pose de savoir si nous allons la voter ou non, d'autant plus qu'il nous a été dit que son adoption était urgente.

Je tiens quand même à vous rappeler, Mesdames et Messieurs, que l'élection des juges prud'hommes devait normalement avoir lieu au mois d'avril. La reporter au plus tard au 31 décembre, c'est déjà faire une certaine entorse au règlement. C'est pourquoi, il faudrait que cette élection ait lieu rapidement. Je conçois, Monsieur Annen, que certains milieux - pas seulement les libéraux uniquement, puisque le projet, tel quel, a été voté à la quasi-unanimité de la commission - regrettaient de n'avoir pas résolu le problème soulevé par M. Beer. Il est vrai qu'une ou deux personnes dans vos bancs, dont probablement vous - je ne parle pas de M. Balestra qui a parfaitement joué le jeu - ont des arrière-pensées, et vous vous frotteriez les mains si, finalement, ces élections pouvaient ne pas être organisées dans le délai fixé.

A mon avis, la sagesse commanderait de ne pas voter le renvoi en commission de ce projet de loi; c'est pour cela que je rappelais ces faits. Nous pensons qu'il faut voter cette loi ce soir, parce que, je vous le rappelle, son entrée en vigueur implique encore un délai de deux mois et demi. Il y a la publication, le délai référendaire, la promulgation et le délai de recours éventuel auprès du Tribunal fédéral. Si on veut pouvoir organiser les élections de prud'hommes cet automne, il est impératif de voter rapidement cette loi.

Par ailleurs, il est parfaitement possible de l'amender, lors d'une prochaine séance par un nouveau projet de loi. La solution la plus judicieuse - j'en appelle aux socialistes pour qu'ils comprennent la situation - c'est qu'on examine une solution qui soit conforme sur le plan législatif et qu'on dépose un projet de loi pour amender le projet qui nous est soumis ce soir.

M. Charles Beer (S). La loi actuelle sur les prud'hommes souffre de trois tares essentielles dans son fonctionnement.

La première : le manque de juges formés dans certains groupes professionnels comportant peu de travailleurs suisses; il est donc difficile d'y trouver des juges suisses pour rendre la justice.

Deuxième tare : les questions techniques. Une mauvaise conciliation, un manque de qualité pour agir, probablement pour les organisations syndicales et patronales, voire la présence de mandataires.

Troisième tare essentielle : vu sa composition laïque, cette juridiction n'est pas techniquement en mesure d'apprécier toute la difficulté du débat sur l'égalité entre femmes et hommes particulièrement pour tout ce qui concerne les études statistiques, les lois existantes qui exigent - au-delà des conventions collectives du travail, la loi sur le travail et le code des obligations - des connaissances particulièrement fouillées et une capacité d'interprétation extrêmement aiguë.

Voici très brièvement comment les choses se sont passées : un groupe d'experts nommés par le Conseil d'Etat a rendu une copie, il y a deux ans, en février 1997, afin de ne pas rater l'échéance de l'élection qui a lieu tous les six ans. Il est dommage de constater, aujourd'hui, que le projet de loi, tel qu'il ressort de la commission, ne tienne compte finalement que des aspects techniques, comme si la plus grande urgence pour la commission avait été de régler d'abord ces questions techniques. Celles-ci sont importantes, je le concède, mais il ne faut pas omettre pour autant l'aspect du bon fonctionnement de la justice, notamment en ce qui concerne les groupes recensant très peu de travailleurs suisses et, également, les questions ayant trait à l'égalité.

Les travaux issus de la commission laissent à penser que toutes les pistes ont été explorées, que le travail d'étude a été conduit jusqu'au bout, puisque nous nous apprêtons - selon la majorité de la commission - à ne pas écouter les partenaires sociaux. A mon avis, cela n'a pas été le cas. Voici un élément de comparaison : que serait aujourd'hui un vote sur l'organisation du Tribunal des baux et loyers si, d'ores et déjà, la Chambre genevoise immobilière, le Rassemblement pour une politique sociale du logement et l'Asloca venaient nous dire que la justice, telle que l'on doit l'organiser et telle qu'elle ressort de la commission, ne les satisfaisait pas ? Un certain nombre de députés seraient certainement d'avis qu'il n'est pas concevable de travailler dans ces conditions. Pour les syndicats et pour les socialistes, il n'est pas concevable de passer à une réformette de la juridiction des prud'hommes en laissant de côté deux éléments essentiels.

Venons-en à la question du travail, sérieux ou non, de la commission. Nous avons déposé, avec ma collègue Mme Gobet, trois amendements qui reposent sur une logique essentielle : comment traduire le souci du traitement des causes ayant trait à l'égalité entre femmes et hommes sans, le cas échéant, être en contradiction avec la constitution. Mme Gobet, qui est juriste, a travaillé avec moi dans un laps de temps très court sur ces amendements. Ceux-ci montrent qu'il est possible d'imaginer des pistes, non pas en créant un groupe spécifique - la constitution l'interdit - mais simplement en renforçant respectivement le Tribunal et la Cour d'appel de compétences spécifiques et particulières.

Il s'agirait, encore une fois, de conserver les groupes professionnels tels que proposés. Cela permettrait d'avoir les compétences techniques juridiques, statistiques et économiques indispensables pour rendre une justice de qualité, particulièrement dans un domaine essentiel pour tout le monde : l'égalité entre femmes et hommes. On a eu l'occasion de dire tout à l'heure - lors du rapport du Conseil d'Etat qui a traîné - qu'il y avait finalement fort peu de pistes et fort peu de propositions pour remédier à une situation qui repose sur un constat de dix pages sur les problèmes d'inégalité entre femmes et hommes sur le marché du travail.

En conclusion, vu que ces pistes n'ont pas été entièrement examinées, en ce qui concerne le souci de traiter sur le fond l'égalité entre femmes et hommes, et prenant en considération l'indispensable bon fonctionnement de la justice, particulièrement l'organisation des groupes professionnels dans lesquels il n'y a pas de travailleurs suisses, nous devons avoir l'honnêteté de dire qu'il est indispensable de renvoyer ce projet en commission, afin d'étudier tout ce qu'il est techniquement possible de faire pour aboutir à un projet conforme à la constitution, et, surtout, en priorité : trouver une solution pour l'adapter à notre préoccupation essentielle : la mise en place d'une véritable et nouvelle juridiction du travail donnant satisfaction à l'ensemble des justiciables.

M. Bernard Lescaze (R). Le groupe radical a entendu avec intérêt les arguments présentés, de part et d'autre, sur l'issue qui devrait être donnée, ce soir, à ce projet de loi. Il est clair que les questions soulevées par M. Beer et par Mme Gobet sont importantes. Je ne suis pas absolument certain qu'il soit immédiatement possible d'améliorer le bon fonctionnement de la justice que nous avons tous en tête, étant donné les nombreux problèmes juridiques qui se posent quant à l'adoption de ces amendements. C'est pourquoi un projet de loi constitutionnelle - dont on ne parle pas pour l'instant - a été déposé pour tenter de donner une réponse juridiquement parfaite à des problèmes qui sont politiquement discutés.

Si, personnellement, je suis très favorable à l'élection de juges prud'hommes étrangers - vous le savez bien, Mesdames et Messieurs les députés - tout le monde dans cette enceinte ne pense pas comme moi. Ce problème ne pourra pas être résolu immédiatement en renvoyant ce projet de loi en commission. Je crois que les arguments de M. le député Grobet et de Mme la députée Bugnon doivent être pris en considération.

La commission judiciaire a bien travaillé en étudiant ce projet à réitérées reprises. Peut-être ne s'agit-il que d'une réformette dans l'esprit de ceux qui proposent des amendements; toujours est-il qu'on parle depuis des années de la réforme du Tribunal des prud'hommes à Genève. Aujourd'hui, nous en sommes déjà à une première étape. Personne, dans ce Grand Conseil, ne pense que la loi, même si nous la votons ce soir, ne va pas être modifiée dans les dix ou vingt ans à venir et qu'il faudra la reprendre immédiatement. Mais aujourd'hui, il faut accepter que des lois soient sans cesse reprises. Ce n'est pas toujours satisfaisant pour le juriste, mais la réalité l'exige. Le bon fonctionnement des prud'hommes concerne d'abord 240 millions de travailleuses et travailleurs à Genève; c'est cela que nous devons principalement prendre en considération. Il y a ce soir une série d'amendements dont nous pouvons facilement débattre, parce que je reconnais qu'ils sont de nature plutôt technique, comme de déterminer s'il faut trois ou cinq juges à la Cour d'appel. D'autres sont de nature profondément politique, même s'il est vrai qu'ils faciliteraient le bon fonctionnement théorique de la justice.

Dans ces conditions, je pense qu'il faut être raisonnable et refuser, ce soir, le renvoi en commission. Acceptons le vote du projet tel qu'il nous est présenté, avec le rapport de M. le député Pagani, comme une première étape. Nous aurons le loisir, immédiatement après - sans attendre le projet de loi constitutionnelle, si vous êtes sûrs de vos arguments, Monsieur le député Beer et Madame la députée Gobet - de revenir avec un autre projet de loi qui sera inscrit à la commission judiciaire. Je crois que c'est comme cela que les intérêts des travailleuses et des travailleurs - que nous voulons tous défendre pour un bon fonctionnement du Tribunal des prud'hommes - seront le mieux respectés.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. En l'occurrence, tout a été dit. Il me semble un peu facile de mettre en avant l'éligibilité des personnes d'origine étrangère et l'égalité entre hommes et femmes, alors qu'il y a essentiellement, dans ce tribunal, un problème de bon fonctionnement. Je me suis engagé dans cette affaire en proposant ce projet de loi de modification constitutionnelle, parce que nous devons aller par étape dans cette réforme fondamentale du Tribunal des prud'hommes. Je rappelle qu'aujourd'hui ce qui pèche, ce n'est pas seulement le fait que 41% des travailleurs, qui sont des personnes d'origine étrangère, n'accèdent pas à cette juridiction, alors qu'ils auraient le droit d'y participer; ce ne sont pas seulement les femmes qui subissent tous les problèmes liés à l'inégalité et qui n'ont pas le droit d'y accéder, en tant que groupe. Mais c'est aussi l'ensemble des travailleurs qui n'arrivent pas, dans cette crise économique que nous traversons, à se faire payer des heures supplémentaires abusivement imposées, à se faire payer des indemnités contre des licenciements abusifs et à se faire payer des salaires qui ne leur ont pas été versés.

La question qui se pose aujourd'hui est de savoir si nous allons trancher et mettre en place une véritable structure qui permette réellement d'appliquer cette réforme ou si nous allons laisser traîner les choses et rendre service à certains patrons, une minorité qui abuse de cette lenteur et qui en a abusé pendant des années. Je m'engage à faire le second pas ensuite : proposer une nouvelle loi pour modifier les deux autres problèmes que j'ai précédemment soulevés.

M. Pierre-François Unger (PDC). Vous n'aurez aucun doute sur ce point : je suis un laïc total en matière juridique.

Pour avoir présidé la commission qui a travaillé avec beaucoup d'ardeur depuis le début du mois de septembre sur ce projet de loi, j'ai eu l'occasion d'observer qu'en réalité tous ceux qui travaillaient dans la commission judiciaire savaient pertinemment où il fallait aller : vers une juridiction qui travaille plus vite, de manière plus sérieuse et plus conforme au droit. Nous avons eu l'occasion, à réitérées reprises, de nous rendre compte à quel point le droit du travail s'est complexifié et à quel point le Tribunal des prud'hommes - qui a certainement pendant très longtemps fonctionné dans sa forme actuelle - ne fonctionnait plus.

Malheureusement, de ce constat simple - il fallait aller plus vite, plus juste et plus conformément au droit - nous nous sommes rendu compte que nous n'y arriverions pas pour la simple et bonne raison que les partenaires sociaux, la juridiction des prud'hommes et, finalement, un grand nombre des gens que nous interrogions, nous montraient à quel point le poids de l'Histoire s'exerçait sur cette juridiction et à quel point la plus ténue des réformes mettait en péril l'ensemble de l'oeuvre.

Sur cette base-là, nous avons évidemment abouti à un compromis dont il ne faut pas se cacher qu'il n'est pas ambitieux, qu'il est même - et je suis d'accord avec vous, Monsieur Beer, à cet égard - relativement médiocre. A partir de ce constat, que proposez-vous ? Vous proposez un retour en commission. Ce retour en commission devant s'assortir tout de même de l'examen d'un projet de loi constitutionnelle qui, lui-même, doit être soumis à un vote populaire. Nous ne croyons pas - quand bien même le projet de loi issu des travaux de la commission nous paraît d'assez maigre qualité - qu'il soit raisonnable de jouer au poker avec une juridiction qui représente un aussi grand intérêt pour les travailleurs et les travailleuses de ce canton. C'est la raison pour laquelle, malgré les imperfections de ce projet, nous refuserons de le renvoyer en commission.

En outre - j'anticipe un peu sur le débat qui suivra sur le projet de loi constitutionnelle - vous voulez soumettre cette loi à l'examen de ce projet constitutionnel qui demande trois réformes d'importance. La première - avec laquelle le groupe démocrate-chrétien est parfaitement d'accord - est l'intégration d'un certain nombre de juges étrangers à la juridiction des prud'hommes. C'est donc avec enthousiasme que nous accepterons cette modification. Mais, malheureusement, comme si le «paquet ficelé» ne nous avait pas servi de leçon, on y ajoute deux autres éléments, si bien que les gens d'avis opposé vont s'additionner. Ajouter les problèmes de l'égalité, sur lesquels nous avons eu l'occasion, à réitérées reprises, de discuter en commission, c'est courir le risque extrêmement considérable que votre proposition de modification constitutionnelle ne passe pas devant le peuple. Nous pensions qu'il fallait parler des problèmes de discrimination en général, et pas uniquement de discrimination de sexe homme-femme. Je veux parler de discrimination en termes de religion, de confession, de couleur, etc. sur le lieu de travail.

Enfin, vous proposez une troisième modification dont nous avons parlé en commission : que la juridiction des prud'hommes soit élue par le Grand Conseil, ce qui simplifierait peut-être un certain nombre de choses, mais ce qui politiserait indiscutablement une juridiction qui se doit d'être tenue à l'écart du débat politicien.

Au fond, ces trois raisons, Monsieur Beer, me poussent à penser que même si ce projet est - je le répète - relativement médiocre, nous savons tous où nous devons aller, mais nous savons tous que nous ne pouvons pas y aller maintenant. Nous devons donc voter ce projet, parce que le vide juridique que laisserait un échec total de la révision constitutionnelle est inacceptable pour la sécurité du droit et pour les travailleurs de ce canton.

M. Bernard Annen (L). Je n'ai pas bien compris les propos tenus par M. Grobet prétendant que si nous faisions traîner les choses, c'est que nous avions des arrière-pensées. Comment cela pourrait-il être possible dans le cas présent, alors que les tribunaux de prud'hommes et les juges continuent de fonctionner ? Qui oserait aujourd'hui, quel qu'il soit, quelles que soient ses idées politiques, demander de bloquer l'engrenage des tribunaux de prud'hommes ? Ce n'est franchement pas un argument valable !

Par ailleurs, force est de constater la dextérité des intervenants qui - comme par hasard - faisaient tous partie de la commission judiciaire. Cela me paraît tout à fait normal qu'ils ne veuillent pas se déjuger face à notre parlement, et c'est la raison pour laquelle nous en arrivons à cette situation. Il faut comparer ce qui peut l'être et essayer de définir les objectifs que vous voulez atteindre. Vous soulignez la lenteur du fonctionnement des prud'hommes qui serait due, selon vous, aux années qui pèsent sur cette juridiction. Je n'ai entendu personne aujourd'hui, cher collègue Unger, relever que cela fait dix ans que nous sommes en crise et que, par conséquent, il y a plus de licenciements abusifs, plus de conflits entre les partenaires et à l'intérieur des entreprises.

Je vous remercie, Monsieur Pagani, d'avoir mentionné qu'il s'agit d'une minorité des patrons. Nous sommes d'accord sur ce point, mais laissez au moins la possibilité aux autres de régler leurs problèmes entre eux. Le plus choquant dans cette affaire, c'est le peu de cas qui est fait des partenaires sociaux. Je partage l'avis de M. Beer - même si son argumentation ne me séduit pas toujours - pour dire que si nous traitions d'une autre juridiction, telle que la SCI ou d'autres, il y aurait eu un tollé général dans ce parlement et surtout de votre part, Monsieur Pagani. Vous auriez dit que nous ne voulions entendre ni l'Asloca, ni le Rassemblement ou d'autres personnes qui vous sont proches. C'est ce qui me déçoit le plus dans cette affaire. Vous négligez non seulement les partenaires sociaux mais également les juges qui aujourd'hui encore nous adressent une lettre pour nous dire que nous n'allons pas dans la bonne direction.

Monsieur Unger, ce ne sont pas des principes généraux, tels que ceux que vous avez évoqués tout à l'heure, qui pourraient justifier de renoncer au renvoi de ce projet de loi en commission, mais bien les cas concrets de la vie de tous les jours traités dans cette juridiction des prud'hommes que vous balayez d'un revers de main. On peut mesurer l'estime qu'un certain nombre de partis portent aux partenaires sociaux !

M. Laurent Moutinot. La réforme de la juridiction des prud'hommes est une question capitale, et le projet de loi qui ressort des travaux de votre commission judiciaire consacre un pas important à cette réforme. Il s'agit bien entendu d'un premier pas qui doit être suivi de deux autres pas : celui de l'éligibilité des juges prud'hommes étrangers et celui d'une amélioration du traitement des questions d'égalité. Je puis vous dire, au nom du Conseil d'Etat, que nous sommes favorables à ces deux réformes.

Cela dit, aujourd'hui, je vous demande de voter le texte tel qu'il ressort des travaux de votre commission judiciaire et de ne pas renvoyer ce projet une nouvelle fois en commission pour la raison suivante : nous sommes dans la situation où le texte qui ressort des travaux de votre commission est accepté comme tel par tout le monde et aucun élément n'est contesté. Un seul reproche lui est fait : ne pas aller assez loin. Or, nous savons que pour ce faire il faudra encore du temps et du travail. Les délais nécessaires pour faire ce travail risquent de nous conduire dans une impasse institutionnelle en ce qui concerne la juridiction des prud'hommes. En effet, nous n'arriverons pas à mener la totalité de ces réformes dans des délais suffisamment rapides pour que la nouvelle composition des juges prud'hommes puisse entrer en fonctions.

Il a été évoqué dans le débat par M. le député Beer et M. le député Annen - probablement en partie à mon intention - que l'on ne pourrait pas imaginer une réforme du Tribunal des baux et loyers qui n'aurait pas l'agrément de l'Asloca et des partenaires de l'immobilier. Cela me donne l'occasion de vous dire que la juridiction des baux et loyers s'est faite par réformes successives et que les voeux des uns ou des autres n'ont jamais été réalisés en une fois. Il a fallu la modifier durant de longues années. Il est parfois nécessaire de prendre le temps; nous pouvons appliquer le même principe en ce qui concerne la juridiction des prud'hommes. Votez donc ce soir ce projet de loi qui est un premier pas important de cette réforme. Nous pourrons revenir rapidement sur les autres points, notamment par des projets déjà déposés par M. Pagani et par de nouveaux projets qui devront accompagner les deux nouveaux volets de la réforme.

Le président. Je vous invite à vous prononcer sur la proposition de renvoi en commission de ce projet de loi.

L'appel nominal est demandé part Mme Alexandra Gobet, nous allons y procéder. (Appuyé.)

Celles et ceux qui acceptent le renvoi en commission répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.

Mise aux voix, la proposition de renvoyer ce projet à la commission judiciaire est rejetée par 46 non, 37 oui et 5 abstentions.

Ont voté non (46) :

Esther Alder (Ve)

Luc Barthassat (DC)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Dolorès Loly Bolay (AG)

Anne Briol (Ve)

Fabienne Bugnon (Ve)

Bernard Clerc (AG)

Anita Cuénod (AG)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Jeannine de Haller (AG)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Daniel Ducommun (R)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

René Ecuyer (AG)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Pierre Froidevaux (R)

Luc Gilly (AG)

Philippe Glatz (DC)

Gilles Godinat (AG)

Christian Grobet (AG)

Nelly Guichard (DC)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

Bernard Lescaze (R)

Jean-Louis Mory (R)

Louiza Mottaz (Ve)

Chaïm Nissim (Ve)

Jean-Marc Odier (R)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Martine Ruchat (AG)

Louis Serex (R)

Walter Spinucci (R)

Pierre-François Unger (DC)

Pierre Vanek (AG)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Salika Wenger (AG)

Ont voté oui (37) :

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Charles Beer (S)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Christian Brunier (S)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Pierre-Alain Champod (S)

Jacqueline Cogne (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Gilles Desplanches (L)

Hervé Dessimoz (R)

Pierre Ducrest (L)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Alexandra Gobet (S)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Janine Hagmann (L)

Dominique Hausser (S)

Armand Lombard (L)

René Longet (S)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Barbara Polla (L)

Véronique Pürro (S)

Albert Rodrik (S)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Myriam Sormanni (S)

Micheline Spoerri (L)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Alberto Velasco (S)

Se sont abstenus (6) :

Juliette Buffat (L)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Régis de Battista (S)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Christine Sayegh (S)

Etaient excusés à la séance (9) :

Roger Beer (R)

Bénédict Fontanet (DC)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Claude Haegi (L)

Michel Halpérin (L)

David Hiler (Ve)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Meyll (AG)

Etait absent au moment du vote (1) :

Christian de Saussure (L)

Présidence :

Jean Spielmann, président

Le président. Nous votons maintenant la prise en considération de ce projet de loi.

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles1 à 4.

Art. 5

Mme Alexandra Gobet (S). Dans l'hypothèse d'un refus de la proposition de renvoi en commission, les socialistes ont déposé un amendement à l'article 5. Notre groupe vous propose de reprendre la formule de la composition sociale en matière de baux et loyers pour que les causes qui impliquent des questions relevant de la loi sur l'égalité entre femmes et hommes puissent faire l'objet d'une adjonction dans la composition du groupe de deux juges, spécialistes de ces questions, qui siégeraient aux côtés des compositions ordinaires, avec les groupes ordinaires, tel que proposé par les travaux de commission. Le cas échéant, je reviendrai sur les deux autres amendements pour développer le fonctionnement du système. Nous vous proposons l'amendement suivant :

«Désignation des membres de l'office cantonal de conciliation et des juges spécialistes des questions de l'égalité entre femmes et hommes

...

2...et de 8 juges spécialistes des questions de l'égalité entre femmes et hommes. »

Le président. Je soumets cet amendement au vote de l'assemblée.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté.

Mis aux voix, l'article 5 est adopté.

Art. 6

Mme Alexandra Gobet (S). Je présente un amendement sous la forme d'un alinéa 5, nouveau, qui se lit comme suit :

«Juges spécialisés

5 Les juges spécialistes des questions de l'égalité entre hommes et femmes justifient à leur désignation ou d'une formation dans ce domaine ou d'une expérience professionnelle équivalente.»

l'alinéa 5 devient l'alinéa 6 et le 6 devient le 7.

Le président. Madame Gobet, nous avons procédé à un petit toilettage de votre amendement. Vous nous direz si vous êtes d'accord.

«Juges spécialisés

5 Les juges spécialistes des questions de l'égalité entre hommes et femmes justifient lors de leur désignation soit d'une formation dans ce domaine soit d'une expérience professionnelle équivalente.»

Mme Alexandra Gobet. Tout à fait !

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Nous sommes d'accord avec le contenu de cet amendement. Toutefois, sans vouloir revenir sur le débat qui s'est tenu précédemment, nous trouvons que cet amendement n'a pas lieu d'être dans ce domaine. Nous nous associerons aux personnes qui ont proposé cet amendement, dès demain, pour proposer un nouveau projet de loi dans le cadre et dans la lignée de la modification constitutionnelle. C'est pour cette raison que, personnellement, je m'abstiendrai.

M. Charles Beer (S). Il y a des choses en politique qui frôlent l'autisme... Certaines réflexions - si j'ose encore employer le terme de «réflexions» - me sidèrent.

Je précise ce qui suit : il est question ici du souci de l'égalité entre hommes et femmes et de la difficulté d'appliquer la justice. En commission, il nous a été dit qu'il était impossible de faire un groupe spécifique, car cela était contraire à la constitution. Nous l'avons bien compris, et nous avons rédigé un amendement de manière que ce souci soit pris en compte, mais de manière différente pour respecter la constitution. Vous parlez d'avancer par étape... Mesdames et Messieurs de l'Alliance de gauche, je m'adresse à vous. Et vous osez suggérer l'abstention sur une question aussi fondamentale que l'égalité entre femmes et hommes, alors qu'il n'y a ici aucun problème constitutionnel ! Je tiens d'ores et déjà à dire que je demanderai l'appel nominal sur cette question !

Mme Alexandra Gobet (S). Au moment de voter cet amendement, il faut que les choses soient claires. Si l'Alliance de gauche est d'accord de commencer à travailler demain à la mise en oeuvre de l'égalité entre hommes et femmes, c'est dans six ans, au minimum, que celle-ci sera mise en application au Tribunal des prud'hommes. Maintenant que le renvoi en commission a été refusé, si nous ne votons pas ce soir une disposition comprenant des mesures en matière d'égalité, vous savez comme moi que la désignation des juges se fera sans qu'il y ait de remèdes à l'inégalité entre hommes et femmes. Par conséquent, le travail que l'on fera demain, dans un mois ou dans un an, n'aura pas d'impact avant six ans au plus... C'est une hypocrisie qu'il fallait relever, et nous soutenons la demande d'appel nominal de notre collègue !

M. Olivier Vaucher (L). Une fois n'est pas coutume, je rejoindrai l'avis du rapporteur : en tant que juge prud'homme, je ne vois vraiment pas ce que vient faire cet amendement dans la loi des prud'hommes ! Qu'il y ait des hommes ou des femmes, nous n'allons pas changer notre jugement en matière d'égalité entre les hommes et les femmes aux prud'hommes. Je rejoins donc l'avis de M. Pagani : je ne vois vraiment pas l'utilité de cet amendement dans cette loi.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Après les leçons qui viennent de nous être données sur notre velléité de faire semblant de soutenir l'égalité entre hommes et femmes, je signale au parti socialiste que, si ce volet était retiré du prochain projet de loi, le peuple devrait se prononcer seulement sur l'éligibilité des personnes d'origine étrangère. Je donne alors peu de chances à ce projet de loi d'aboutir en votation populaire. Il m'apparaît beaucoup plus sage de présenter au souverain le volet sur l'éligibilité des personnes étrangères et le volet sur l'égalité entre hommes et femmes dans cette juridiction, plutôt que de partir fanfaronner devant le peuple sur une seule question.

M. Charles Beer (S). Tout à l'heure, la stratégie consistait à dire qu'il n'était pas opportun de retenir la solution d'une révision complète de la législation et qu'il valait mieux, au contraire, progresser par étape. Et, tout à coup, renversement de stratégie: il ne faut pas mettre en évidence les salariés étrangers qui postuleraient à cette juridiction... Ma démonstration s'arrête ici !

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Beer, ce n'est pas une question d'autisme. Vous savez très bien que si cet amendement est voté, le projet de loi peut être immédiatement renvoyé en commission. Cet amendement est totalement inapplicable, et il faudra adapter la loi en fonction de ce que vous proposez.

J'aimerais rappeler que les juges prud'hommes sont élus par le peuple dans des groupes spécifiques. On propose du reste de réduire le nombre de groupes de onze à cinq. Il n'y a pas, à ma connaissance, de juges spécialisés tels que vous les désignez ici et vous dites : «Les juges spécialistes des questions de l'égalité entre femmes et hommes justifient à leur désignation...». Mais qu'est-ce que cela veut dire ? Ces juges ne sont pas désignés, ils sont élus; ils n'ont donc aucune justification à donner ! J'ai le regret de vous dire que cet amendement, tel qu'il est rédigé, ne peut pas être voté. Je n'arrive pas à comprendre, Monsieur Beer, que vous ne saisissiez pas cette évidence : il n'est décemment pas possible d'adopter des amendements aussi mal rédigés sans les discuter en commission. Ou alors, dites tout de suite que vous nous proposez délibérément un texte mal rédigé pour que le tout soit renvoyé en commission; ce sera beaucoup plus simple et nous comprendrions la stratégie que vous poursuivez. Mais ce n'est pas sérieux comme travail législatif. Nous, nous prenons un engagement : nous vous avons invités formellement à nous rencontrer pour préparer un texte cohérent qui puisse s'insérer dans la nouvelle loi et qui réponde à nos préoccupations qui sont les mêmes que les vôtres. Mais nous ne sommes pas d'accord de cautionner le mauvais bricolage d'une loi et d'adopter des textes qui sont inapplicables, pour ne pas dire incompréhensibles dans leur libellé.

M. Michel Balestra (L). Bien qu'il soit dit ici que cette commission n'a pas traité dans le détail les amendements proposés, bien qu'ayant été battu sur toute la ligne, je dois ici m'inscrire en faux. Il est ressorti de la discussion, comme l'a finalement reconnu M. Beer, que la création d'un groupe égalité n'était pas conforme au droit supérieur. En matière de ségrégation ou d'égalité, les juges de tous les groupes devaient avoir, dans leur formation, une sensibilisation à ces nouvelles approches du droit du travail. Cela fait partie de la formation prévue par le projet de loi.

En revanche, il ne faut pas intégrer cet amendement tel que proposé aujourd'hui, pour la bonne et simple raison que nous ne trouverons pas, pour les prochaines élections, les juges qui auront déjà cette formation. Contrairement à ce que nous a dit Mme la députée Gobet, ces juges approfondiront leurs connaissances au cours de la législature et recevront une formation adéquate que le Conseil d'Etat définira selon la loi que nous avons votée sur les prud'hommes.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, si vous voulez que cette loi sur la juridiction des prud'hommes soit applicable et, bien que je comprenne votre sensibilité sur la question de l'égalité qui est un vrai problème, vous devez refuser ces amendements.

Le président. L'appel nominal a été demandé par M. Charles Beer. Nous allons y procéder. (Appuyé.)

Celles et ceux qui acceptent cette proposition d'amendement répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non. Je vous le relis :

«Juges spécialisés

5 les juges spécialistes des questions de l'égalité entre hommes et femmes justifient lors de leur désignation soit d'une formation dans ce domaine soit d'une expérience professionnelle équivalente.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non, 20 oui et 16 abstentions.

Ont voté non (52) :

Esther Alder (Ve)

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Anne Briol (Ve)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Juliette Buffat (L)

Fabienne Bugnon (Ve)

Bernard Clerc (AG)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Christian de Saussure (L)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Hervé Dessimoz (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Philippe Glatz (DC)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

Bernard Lescaze (R)

Armand Lombard (L)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Louis Mory (R)

Louiza Mottaz (Ve)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Chaïm Nissim (Ve)

Jean-Marc Odier (R)

Barbara Polla (L)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Louis Serex (R)

Walter Spinucci (R)

Micheline Spoerri (L)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Ont voté oui (20) :

Charles Beer (S)

Dolorès Loly Bolay (AG)

Christian Brunier (S)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Magdalena Filipowski (AG)

Alexandra Gobet (S)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Dominique Hausser (S)

René Longet (S)

Véronique Pürro (S)

Albert Rodrik (S)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Myriam Sormanni (S)

Alberto Velasco (S)

Se sont abstenus (16) :

Anita Cuénod (AG)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

Erica Deuber-Pauli (AG)

René Ecuyer (AG)

Christian Ferrazino (AG)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Christian Grobet (AG)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Martine Ruchat (AG)

Christine Sayegh (S)

Pierre Vanek (AG)

Salika Wenger (AG)

Etaient excusés à la séance (9) :

Roger Beer (R)

Bénédict Fontanet (DC)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Claude Haegi (L)

Michel Halpérin (L)

David Hiler (Ve)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Meyll (AG)

Etaient absents au moment du vote (2) :

Pierre-Alain Champod (S)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Présidence :

Jean Spielmann, président

Mis aux voix, l'article 6 est adopté.

Mis aux voix, l'article 7 est adopté, de même que les articles 8 à 10.

Art. 11

Mme Alexandra Gobet (S). D'entrée de cause, pour le cas où quelqu'un souhaiterait «vomir» sur cet amendement, je signale qu'il est inspiré de l'article 8 de la loi sur la conciliation en matière de baux et loyers. L'amendement que nous proposons, M. Charles Beer et moi-même, consiste en un article 11, nouveau, qui se lit comme suit :

«1 S'il s'avère que la cause comporte des questions ayant trait à l'application de la loi sur l'égalité entre femmes et hommes, le Tribunal et la Cour d'appel siègent avec le concours de deux juges supplémentaires spécialistes des questions d'égalité entre femmes et hommes.

2 Dans ce cas 3 femmes au moins font partie de la composition du Tribunal ou de la Cour d'appel.»

M. Michel Balestra (L). Les amendements précédents ayant été refusés, cette juridiction des prud'hommes ne comporte pas de juges spécialistes en matière d'égalité. Les juges doivent être formés pour l'ensemble des causes à juger y compris celles de l'égalité. Toute la structure de ce projet de loi est divisée par profession et l'égalité n'en est pas une. Dans chaque profession, chaque juge doit être spécialisé y compris dans le domaine de l'égalité. Ce projet serait totalement inapplicable avec cet amendement.

M. Charles Beer (S). La logique de cet amendement, c'est justement de prendre en compte la constitution telle qu'elle existe. Il ne s'agit pas ici de redécouper des groupes, d'en rajouter qui ne seraient pas conformes à la constitution. Il s'agit de travailler sur les groupes tels qu'ils existent et tels qu'ils ressortent des travaux de la commission. Je rappelle également aux commissaires qui ont travaillé sur ce projet de loi que, lorsque justice doit être rendue en matière d'égalité, ils ont su trouver une pertinence à la loi sur l'égalité pour en dégager la procédure de conciliation.

Pour le Tribunal et pour la chambre d'appel, il s'agit ici simplement de renforcer les compétences des groupes tels qu'ils existent par des personnes ayant reçu une formation spécifique en la matière. Voilà le sens de cet amendement qui n'est absolument pas contraire à la constitution. Je reconnais volontiers avec le député Grobet qu'il aurait pu être mieux rédigé, mieux travaillé, mieux ficelé par de fins juristes empreints tout à coup d'une velléité incontrôlable de conciliation, y compris avec les milieux syndicaux. Nous aurions pu faire ce travail, nous pouvons encore le faire, mais vous nous dites, ce soir, que si l'on peut prendre le risque de l'échec, il faut en tout cas sauvegarder la réforme première telle que nous la proposons.

Nous maintenons cet amendement, et, à l'instar de la procédure de vote, nous demanderons bien évidemment l'appel nominal.

M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Beer, ce n'est pas avec de l'ironie mal placée que vous réussirez à nous convaincre. Il ne s'agit pas de pinailler ou de faire les difficiles sur des questions rédactionnelles. Nous souhaitons simplement - et j'ose espérer que c'est également votre cas - qu'un texte voté par ce Grand Conseil puisse être appliqué. Or, vous nous proposez de nouveau, je suis navré de vous le dire, un texte inapplicable ! L'idée est néanmoins intéressante, mais elle fait appel à une solution qui ne sera pas facile à trouver. Vous demandez que le tribunal - il s'agit de la première instance - siège avec le concours de deux juges supplémentaires. S'agit-il de deux juges prud'hommes ou issus d'une autre juridiction ? Qui les désignera ? Qui dira s'ils sont spécialistes des questions d'égalité entre femmes et hommes ? Faudra-t-il montrer un diplôme à cet égard ?

Vous savez, Monsieur Beer, que les juges prud'hommes ne peuvent siéger que dans le groupe pour lequel ils sont élus. Comment voulez-vous tout d'un coup dire que ces juges peuvent siéger dans n'importe quel groupe ? Il faut modifier la loi. Il faut pouvoir dire que des juges qui normalement, d'après la constitution, ne peuvent siéger que dans un groupe, pourraient, à titre exceptionnel, siéger dans les quatre autres groupes. C'est peut-être techniquement possible, mais il faut rédiger votre amendement différemment. Ce n'est pas sérieux, à 22 h 15, alors que nous avons d'autres travaux importants, de nous atteler à ce travail rédactionnel. J'avoue que je n'y arrive pas.

M. Olivier Vaucher (L). Monsieur Beer, vous nous dites qu'il faut qu'il y ait des juges qui traitent de l'égalité. En tant que juge prud'homme, je n'ai jamais eu à traiter de l'égalité entre hommes et femmes.

Le président. L'appel nominal a été demandé par M. Charles Beer. Nous allons y procéder. (Appuyé.)

Celles et ceux qui acceptent cet amendement répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non. Cet amendement, proposé par Mme Gobet et M. Beer, est un article 11, nouveau et il se lit comme suit :

«1 S'il s'avère que la cause comporte des questions ayant trait à l'application de la loi sur l'égalité entre femmes et hommes, le Tribunal et la Cour d'appel siègent avec le concours de deux juges supplémentaires spécialistes des questions d'égalité entre femmes et hommes.

2 Dans ce cas 3 femmes au moins font partie de la composition du Tribunal ou de la Cour d'appel.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non, 18 oui et 18 abstentions.

Ont voté non (51) :

Esther Alder (Ve)

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Anne Briol (Ve)

Nicolas Brunschwig (L)

Thomas Büchi (R)

Fabienne Bugnon (Ve)

Bernard Clerc (AG)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Christian de Saussure (L)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Hervé Dessimoz (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Philippe Glatz (DC)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

Bernard Lescaze (R)

Armand Lombard (L)

Pierre Marti (DC)

Alain-Dominique Mauris (L)

Jean-Louis Mory (R)

Louiza Mottaz (Ve)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Chaïm Nissim (Ve)

Jean-Marc Odier (R)

Barbara Polla (L)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Louis Serex (R)

Walter Spinucci (R)

Micheline Spoerri (L)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Ont voté oui (18) :

Charles Beer (S)

Christian Brunier (S)

Pierre-Alain Champod (S)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Alexandra Gobet (S)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Dominique Hausser (S)

René Longet (S)

Véronique Pürro (S)

Albert Rodrik (S)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Myriam Sormanni (S)

Alberto Velasco (S)

Se sont abstenus (18) :

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Anita Cuénod (AG)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

Erica Deuber-Pauli (AG)

René Ecuyer (AG)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Luc Gilly (AG)

Gilles Godinat (AG)

Christian Grobet (AG)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Martine Ruchat (AG)

Christine Sayegh (S)

Pierre Vanek (AG)

Salika Wenger (AG)

Etaient excusés à la séance (9) :

Roger Beer (R)

Bénédict Fontanet (DC)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Claude Haegi (L)

Michel Halpérin (L)

David Hiler (Ve)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Meyll (AG)

Etaient absents au moment du vote (3) :

Dolorès Loly Bolay (AG)

Juliette Buffat (L)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Présidence :

Jean Spielmann, président

Mme Alexandra Gobet (S). J'observe qu'il était 22 h 15 pour l'égalité des droits en commission judiciaire, qu'il est 22 h 15 au Grand Conseil pour l'égalité des droits, que tout à l'heure il était trop tôt ou trop tard pour le rapport du Conseil d'Etat. En fait, pour l'égalité des droits entre femmes et hommes, ce n'est jamais la bonne heure ! (Applaudissements.)

Mis aux voix, l'article 11 est adopté.

Art. 12

M. Bernard Annen (L). N'ayez crainte, je ne veux pas relancer le débat sur la présence ou non des avocats en conciliation. Force est de constater que le lobby des avocats a porté et qu'ils ont réussi à imposer la présence d'un avocat en conciliation, mais là n'est pas le but de mon intervention. Celle-ci porte sur la définition exacte, Monsieur le rapporteur, de ce que vous appelez : «l'assistance par un proche.»

En effet, vous avez essayé de retarder les procédures, et je me demande comment un juge va pouvoir estimer si la personne qui accompagne, soit un patron soit un employé, est un proche ou ne l'est pas ? Je crois que la sécurité du droit exige d'avoir des définitions bien claires. Les juristes avertis ont sur ce point, à mon avis, quelque peu péché par imprécision.

Je vous ferai la suggestion toute simple de supprimer : «... par un avocat ou par un autre mandataire professionnellement qualifié». Cela vous permettra de résoudre tous les problèmes. Ainsi la question ne se posera pas de savoir qui est proche et qui accompagne qui. Car, finalement, si je peux venir avec mon directeur ou avec mon président du conseil d'administration, qui va déterminer s'il s'agit d'un proche ou non ? C'est, de mon point de vue, relativement mauvais. Pour ma part, j'aimerais avoir des précisions, Monsieur Pagani, sur ce que vous entendez par un ou une proche.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. La question est un peu impromptue, mais j'essayerai d'y répondre en fonction de mes souvenirs, car nous avons eu beaucoup de problèmes à régler en commission; vous en avez eu un exemple tout à l'heure.

En ce qui concerne les avocats, il ne fait aucun doute que la définition est claire. Pour ce qui est des mandataires professionnellement qualifiés, il s'agit d'avoir une expérience professionnelle d'au moins trois ans dans cette juridiction; cela s'adresse aux secrétaires syndicaux ou à toute personne bénéficiant d'une expérience en droit du travail. S'agissant des proches, nous sommes partis de l'idée que les liens familiaux tels que définis dans la loi, n'étaient pas suffisants. D'autant plus que l'on ne se bouscule pas au portillon pour les travailleurs qui représentent la majorité des causes et qui devraient avoir la possibilité d'être accompagnés par des proches.

En l'occurrence, la commission a voulu élargir un peu le cercle des personnes susceptibles, le cas échéant, d'assister le travailleur-demandeur. Je crois même qu'il existe une jurisprudence sur la notion des proches. Je ne suis pas spécialiste en droit, et je passe la parole à qui veut bien la prendre sur cette question.

Le président. Jusqu'à preuve du contraire, c'est le président qui donne la parole à ceux qui la demandent !

M. Laurent Moutinot. Pour répondre à M. le député Annen, la notion de mandataire professionnellement qualifié existe dans toute une série d'autres lois, notamment administratives. Il s'agit en particulier de la commission de recours LCI. On peut imaginer qu'il faille, dans un règlement, préciser exactement - notamment sur la base des premières explications que vous a données M. Pagani - ce qu'est un mandataire professionnellement qualifié. Cette dénomination, mentionnée dans d'autres lois, n'a jamais posé de problèmes. En ce qui concerne les proches, ce n'est pas non plus un aérolithe dans l'ordre juridique genevois. Je n'ai pas eu le temps de retrouver cette disposition, mais je puis vous répondre que la notion d'assistance par un proche existe, notamment en matière de procédure de divorce où les proches ont la possibilité d'assister l'une ou l'autre des parties aux audiences à huis clos.

Je pense, par conséquent, que le texte tel qu'il ressort des travaux de votre commission, au besoin précisé par voie réglementaire, est largement préférable au flou que vous semblez imaginez. Si on laisse cette fois-ci venir n'importe qui, on court le risque d'avoir des mandataires totalement farfelus, ce qui serait parfaitement dommageable pour la bonne administration de la justice.

M. Bernard Annen (L). Force est de constater que personne ne peut vraiment répondre à ma question. En ce qui concerne les mandataires professionnellement qualifiés, je n'ai pas expressément posé cette question. Ce qui m'intéresse, c'est la définition du proche. Cette notion est tellement vague et tellement vaste que, finalement, elle ne correspond pas à grand-chose. Elle n'aura qu'une seule conséquence : celle de ralentir la procédure. Les parties vont dire : qui est cette personne ? Est-elle proche ou non ? Je ne suis pas d'accord de discuter avec quelqu'un qui n'est pas à même d'assister la personne qu'il accompagne. Cela suscitera des conflits qui risquent d'entraîner des reports d'audience. C'est à mon avis une erreur, mais, finalement, erreur pour erreur, poursuivons dans cette voie; nous y sommes habitués avec les juristes très expérimentés !

Mis aux voix, l'article 12 est adopté, de même que les articles 13 à 83.

Mis aux voix, l'article 84 (souligné) est adopté.

M. Bernard Lescaze (R). Je ne vais pas déposer un amendement, mais, si jamais il en avait été question lors des travaux en commission, j'aimerais obtenir des précisions de la part du rapporteur au sujet de l'article 52, alinéa 3.

Souvent maintenant dans certaines décisions judiciaires, il est précisé que, si le tribunal statue séance tenante, la rédaction du jugement peut intervenir ultérieurement. Dans tout le projet de loi, toute la suite : recours, etc., dépend de la réception du jugement. Etant donné qu'aucun délai n'est fixé au tribunal pour la rédaction de ce premier jugement, j'aimerais que le rapporteur me donne la certitude que celle-ci intervient dans un délai relativement rapide, car il est beaucoup question de retard dans la juridiction des prud'hommes. Evidemment, c'est une excellente manière de faire traîner les choses. Or, vous savez que les gens ont généralement besoin assez vite des indemnités qu'ils reçoivent. Je m'inquiète un peu de voir que ce projet ne prévoit aucun délai concernant la remise du jugement aux parties. J'aimerais savoir ce qu'il en est. Peut-être que le système à l'heure actuelle fonctionne très bien et qu'il n'est pas la cause des retards, mais il me semble qu'il y a là une petite lacune.

Le président. Il y a des délais à l'article 55.

M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur. Effectivement, comme l'a souligné M. Lescaze, le jugement est établi quasiment séance tenante ou à la séance suivante. Les jugements sont notifiés aux parties ultérieurement, mais il n'y a pas de longs délais : un, voire deux mois. Le cas échéant, on pourrait très bien fixer un délai pour que soit imposée une date butoir.

M. Christian Grobet (AdG). J'aimerais rappeler à M. Lescaze que lorsque certains points de cette loi ne sont pas tout à fait clairs, la loi de procédure civile s'applique à titre supplétif.

En ce qui concerne la notification du jugement, tout est extrêmement clair à Genève; le délai de recours part dès la date de la notification. En outre, par rapport au prononcé du jugement, il est vrai que le Tribunal administratif a un délai de six mois sur la totalité de la procédure pour rendre ses jugements. Il est un peu délicat de fixer une échéance, car un délai trop court pourrait mettre le tribunal dans l'embarras. Il ne faut pas oublier qu'en juillet et août il y a des absents. Je suggère donc, Monsieur Lescaze, que l'on prenne note de votre observation qui pourra être examinée dans le cadre des futurs projets de révision de la loi que nous votons ce soir.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(7829)

sur la juridiction des prud'hommes (juridiction du travail) (E 3 10)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvevu les articles 139 à 143 de la Constitution genevoisedécrète ce qui suit :

Art. 1 Compétence à raison de la matière

1 Sont jugées par la juridiction des prud'hommes :

2 Ne sont pas du ressort de la juridiction des prud'hommes :

Art. 2 Election

L'élection des juges prud'hommes est réglée par la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982.

Art. 3 Division en 5 groupes

1 Les prud'hommes forment 5 groupes correspondant aux domaines d'activité (de l'employeur) suivants :

2 Si l'employeur déploie son activité dans plusieurs domaines, c'est l'activité exercée par le salarié qui détermine l'attribution au groupe.

Art. 4 Prestation de serment

Avant d'entrer en fonctions, les juges prud'hommes prêtent, devant le Conseil d'Etat, le même serment que les autres juges.

Art. 5 Désignation des membres de l'office cantonal de conciliation

1 Immédiatement après la prestation de serment, les juges prud'hommes employeurs et salariés se réunissent en 2 assemblées distinctes.

2 Chacune des assemblées désigne en son sein à la majorité relative :2 titulaires et 4 suppléants qui siègent à l'office cantonal de conciliation.

Art. 6 Réunion constitutive

1 Après la prestation de serment et au plus tard dans la semaine qui suit, chaque groupe tient, sur convocation du chef du département de justice et police et des transports, une réunion constitutive.

2 Un président et un vice-président sont élus au scrutin secret pour une année dans chaque groupe. Si le président est employeur, le vice-président doit être salarié et réciproquement. Est élu celui qui obtient un nombre de suffrages égal aux deux tiers du total des bulletins valables. Si cette majorité n'est pas atteinte lors des 2 premiers tours de scrutin, le 3e tour a lieu à la majorité absolue et le tour suivant à la majorité relative.

3 En cas de surcharge, et si d'autres personnes que le président et le vice-président du groupe sont appelées à présider régulièrement le tribunal, elles sont élues selon le même mode de scrutin.

4 Le président et le vice-président du groupe, de même que les présidents suppléants, doivent être titulaires d'une licence en droit ou au bénéfice d'une formation spécifique attestée par un brevet dont les modalités sont fixées par règlement.

5 Chaque groupe désigne des juges pour siéger au tribunal de prud'hommes et à la Cour d'appel.

6 Les prud'hommes qui n'ont pas une des fonctions déterminées aux articles 5 et 6 siègent en lieu et place de ceux qui en sont empêchés.

Art. 7 Nouvelle élection du président et du vice-président de groupe et des présidents suppléants

1 A l'expiration de son mandat annuel, le président convoque les prud'hommes de son groupe en séance plénière, leur présente un rapport sur l'exercice écoulé et les invite à élire le nouveau président et le nouveau vice-président, ainsi que les présidents suppléants, selon le mode prévu à l'article 6.

2 Lorsque le président sortant est employeur, son successeur doit être salarié et vice versa.

Art. 8 Incompatibilités

1 Ne peuvent siéger ensemble dans le même degré de juridiction d'un groupe de prud'hommes :

2 En cas d'incompatibilité survenue depuis la constitution du groupe, il est procédé à une nouvelle répartition des fonctions, en conformité de l'article 6.

Art. 9 Tribunal

1 Le Tribunal de prud'hommes (ci-après tribunal) est composé du président ou du vice-président du groupe, ou d'un président suppléant désigné par le groupe, de 2 prud'hommes employeurs et de 2 prud'hommes salariés.

2 Les audiences sont présidées alternativement par un président employeur et par un président salarié.

Art. 10 Cour d'appel

1 La Cour d'appel est composée d'un président, juge, ancien juge ou juge suppléant à la Cour de justice, de 2 prud'hommes employeurs et de 2 prud'hommes salariés, ces derniers ayant siégé pendant au moins 3 ans au tribunal.

2 Les présidents sont désignés par la Cour de justice.

3 En cas d'absence d'un prud'homme membre de la Cour, le greffier convoque un prud'homme remplaçant.

4 Aucun juge ne peut siéger s'il a déjà connu de l'affaire en conciliation ou en première instance.

Art. 11  Dispositions applicables

Les dispositions générales de la loi d'organisation judiciaire et de la loi de procédure civile sont applicables à titre supplétif, dans la mesure compatible avec les exigences de simplicité et de rapidité propres à la procédure applicable devant la juridiction des prud'hommes.

Art. 12  Comparution des parties

1 Les parties comparaissent en personne.

2 Elles peuvent être assistées par un proche, par un avocat ou par un autre mandataire professionnellement qualifié.

3 Les parties sont entendues contradictoirement.

Art. 13 Représentation

1 Exceptionnellement, le président du tribunal peut autoriser une partie à se faire représenter par un proche, par un avocat ou par un autre mandataire professionnellement qualifié.

2 Une société peut être représentée par un membre de son personnel.

3 Le représentant de la société doit être muni des pouvoirs nécessaires pour transiger.

Art. 14 Caisse de chômage

1 La caisse de chômage intervenant dans la procédure en raison de sa subrogation dans les droits de son assuré partie à la procédure comparaît à l'audience.

2 En cas d'absence de sa part, il n'est toutefois pas prononcé défaut contre elle. Dans ce cas, il est statué sur la base des prétentions formulées par écrit par la caisse, et en fonction des pièces produites.

Art. 15 Demande

1 La demande est introduite par écrit, en règle générale au moyen d'une formule délivrée gratuitement par le greffe, dont l'usage n'est toutefois pas obligatoire.

2 Elle est accompagnée de copies de toutes les pièces utiles.

Art. 16 Egalité entre hommes et femmes

La procédure de conciliation instaurée par la loi d'application de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes est seule applicable lorsque cette loi est invoquée d'entrée de cause.

Art. 17 Citation

1 Dans les cinq jours qui suivent le dépôt de la demande, le greffe convoque les parties à bref délai, par lettre recommandée, pour tentative de conciliation.

2 Lorsque l'une des parties a un domicile éloigné du canton, la cause peut être convoquée directement devant le tribunal du groupe compétent, lequel tente la conciliation en début d'audience.

Art. 18  Conciliation

1 La conciliation a lieu sous l'autorité du président et du vice-président du groupe compétent.

2 Une personne titulaire d'une licence en droit ou au bénéfice d'une formation spécifique dont les modalités sont fixées par règlement, désignée par le collège des président et vice-président de groupes, procède par délégation à la tentative de conciliation.

3 Les conciliateurs sont désignés sur la base d'une liste de candidats dressée par le greffier de la juridiction des prud'hommes sur proposition des milieux professionnels concernés. Ils sont assermentés par le Conseil d'Etat.

Art. 19  Huis clos

Les audiences de conciliation ont lieu à huis clos.

Art. 20  Pièces et comptes

1 Les parties doivent produire toutes les pièces et présenter tous les comptes nécessaires afin que le litige puisse être examiné en connaissance de cause.

2 Le conciliateur peut décider de la reconvocation de l'affaire et ordonner l'apport des pièces et comptes manquants. Il peut infliger une amende de 500 F au maximum à la partie qui ne donne pas suite à son ordonnance.

Art. 21 Défaut du demandeur

1 Si le demandeur ne se présente pas sans avoir justifié au préalable au greffe d'un empêchement valable, le conciliateur lui inflige une amende de 500 F au maximum et raye la cause du rôle. Le greffe en avise le demandeur par lettre recommandée.

2 Dans les 10 jours qui suivent cet avis, le demandeur peut faire opposition à cette décision par simple déclaration écrite, déposée au greffe ou adressée à celui-ci par lettre recommandée. L'amende est levée si le demandeur fournit une excuse valable.

3 Le demandeur peut réintroduire sa demande en même temps qu'il forme opposition.

Art. 22 Défaut du défendeur

1 Si le défendeur ne se présente pas sans avoir justifié au préalable au greffe d'un empêchement valable, le conciliateur lui inflige une amende de 500 F au maximum et la cause est renvoyée au tribunal.

2 Le conciliateur peut toutefois reconvoquer les parties en conciliation si les circonstances le justifient.

3 L'article 21, alinéa 2 s'applique par analogie en cas d'opposition du défendeur.

Art. 23 Cause conciliée

1 En cas de conciliation, le conciliateur dresse séance tenante procès-verbal de la transaction intervenue.

2 Il donne lecture de ce procès-verbal qui est ensuite signé par les parties et par lui-même. Si l'une des parties ne peut signer, il en est fait mention.

3 Le procès-verbal de transaction est ensuite contresigné par le président du groupe compétent ou son remplaçant.

4 Les procès-verbaux de conciliation sont rapportés au greffe du tribunal et sont minutés comme des jugements. Ils ont la même valeur que les jugements définitifs rendus par le tribunal. Chaque parti en reçoit gratuitement copie dans les dix jours.

Art. 24 Jugement

1 En cas d'échec de la tentative de conciliation, le président du groupe compétent ou son remplaçant, sur proposition du conciliateur, statue sans audience :

2 Le jugement, sommairement motivé, est notifié rapidement aux parties par pli recommandé.

3 Les jugements rendus en premier ressort peuvent être portés devant la Cour d'appel, dans les conditions des articles 59 et suivants.

4 Dans tous les cas prévus à l'alinéa 1, le président du groupe compétent ou son remplaçant peut également décider de convoquer la cause devant le tribunal, siégeant dans sa composition ordinaire.

Art. 25 Renvoi au tribunal

Les causes qui n'ont pas été résolues par conciliation ou par décision sont transmises d'office au tribunal.

Art. 26 Pluralité de demandes de même nature

Lorsque des demandes de même nature, portant notamment sur l'application d'un plan social en cas de licenciement collectif, dirigées contre le même employeur, ressortissent à la compétence de plusieurs groupes, le greffe peut, avec l'accord des présidents des groupes concernés, attribuer toutes ces causes à l'un d'entre eux.

Art. 27 Renvoi devant la Cour d'appel

1 Si le montant litigieux excède 20 000 F, les parties peuvent, par déclaration écrite protocolée au procès-verbal et signée par elles, ou par convention signée et déposée au greffe dans les 10 jours suivant l'audience de conciliation, décider d'un commun accord de porter le litige directement devant la Cour d'appel. La cause lui est alors transmise d'office.

2 Les dispositions concernant la procédure devant la Cour d'appel sont applicables. La demande est soumise à émolument. Il est procédé à un échange de mémoires, chaque partie disposant d'un délai de 30 jours.

Art. 28 Déclarations en conciliation

Lorsque la cause est renvoyée devant le tribunal ou la Cour d'appel, aucune des parties ne peut se prévaloir dans la suite du procès de ce qui a été déclaré à l'audience de conciliation, soit par les parties, soit par le conciliateur.

Art. 29  Maxime d'office

Le tribunal établit d'office les faits, sans être limité par les offres de preuve des parties.

Art. 30 Réponse à la demande

Le défendeur dispose d'un délai de 30 jours dès l'audience de conciliation pour répondre par écrit à la demande, avec autant de copies qu'il y a de parties.

Art. 31  Citation

1 Dans les 10 jours qui suivent, le greffe cite les parties, par lettre recommandée, à comparaître à bref délai devant le tribunal.

2 Les parties qui veulent faire entendre des témoins en déposent la liste au greffe 15 jours au moins avant l'audience.

3 Des pièces supplémentaires doivent être déposées dans le même délai.

4 Les parties sont informées des délais mentionnés aux articles 30 et 31, alinéa 2 par la remise d'un formulaire lors de l'audience de conciliation. En cas d'absence du défendeur, ce document lui est adressé par lettre recommandée.

5 Les témoins mentionnés sur les listes des parties sont cités par le greffe, sauf s'ils sont domiciliés hors de Suisse. Dans ce cas, il appartient à la partie qui requiert leur audition de les amener devant le tribunal.

6 Les parties peuvent, le cas échéant, requérir des commissions rogatoires pour le juge du lieu, conformément aux dispositions du concordat sur l'entraide judiciaire en matière civile des 26 avril et 8/9 novembre 1974, et des conventions internationales en la matière. Le tribunal statue sur la requête.

Art. 32  Audition des parties

1 Les parties exposent leurs arguments hors la présence des témoins et, en règle générale, avant l'audition de ceux-ci.

2 Un procès-verbal résumant leurs déclarations est dressé par le greffier sous la dictée du président ; il en est donné lecture aux parties qui peuvent exiger la modification et la rectification des passages qui n'expriment pas fidèlement leurs dires.

3 Les parties signent ensuite le procès-verbal ; si l'une d'elles ne peut signer, il en est fait mention.

Art. 33  Absence justifiée et ajournement de l'audience

En cas d'empêchement reconnu valable par le président du tribunal, l'audience est, sur demande, ajournée et reconvoquée.

Art. 34  Défaut du demandeur

1 Si le demandeur régulièrement cité ne comparaît pas à l'audience, sans que son absence soit justifiée, défaut est prononcé contre lui et le défendeur présent est libéré d'office des fins de la demande.

2 Cette décision fait l'objet d'un jugement notifié aux parties par lettre recommandée.

Art. 35 Défaut du défendeur

1 Si le défendeur régulièrement cité ne comparaît pas à l'audience, sans que son absence soit justifiée, défaut est prononcé contre lui et le demandeur présent obtient ses conclusions, sauf si le tribunal n'est pas compétent ou si les conclusions ne sont pas fondées sur les faits articulés ou les pièces produites.

2 Cette décision fait l'objet d'un jugement notifié aux parties par lettre recommandée.

Art. 36  Absence subséquente

La partie qui a comparu à une audience ne peut plus faire défaut. La décision est réputée contradictoire.

Art. 37  Opposition à défaut

1 Tout jugement rendu par défaut peut être frappé d'opposition dans les 15 jours dès sa notification.

2 Si le défaillant est absent ou domicilié hors du canton, le tribunal peut fixer, dans le jugement par défaut, un délai plus long pour l'opposition.

3 Malgré l'expiration des délais ci-dessus, l'opposition peut être admise si le défaillant justifie qu'à raison d'absence du canton, de maladie grave ou d'autre empêchement reconnu valable, il n'a pu connaître l'instance ni le jugement, ou former opposition dans le délai fixé. L'exécution du jugement n'est suspendue que si le tribunal l'ordonne. L'opposition cesse d'être recevable un an après l'entrée en force du jugement.

4 L'opposition est formée par une écriture motivée déposée au greffe en autant de copies qu'il y a de parties. Si tel n'est pas le cas, les copies manquantes sont dressées aux frais de l'opposant. L'écriture contient la justification du défaut, les arguments et conclusions au fond ainsi que l'indication des moyens de droit. Elle est accompagnée de toutes les pièces utiles.

5 A réception de l'opposition, le greffe en communique copie à la partie adverse.

6 L'opposition est portée en principe devant les mêmes juges.

7 En principe, le tribunal met à la charge de l'opposant qui ne justifie pas d'un motif d'absence valable tout ou partie des frais d'audience causés par son défaut, même s'il obtient gain de cause sur le fond.

Art. 38 Second défaut

1 Si la partie opposante est défaillante à l'audience sur opposition, le tribunal prononce un second défaut contre lequel il ne peut plus être formé opposition.

2 Le jugement est notifié aux parties par lettre recommandée.

Art. 39 Suspension

1 L'instance est suspendue par la requête commune de toutes les parties, par le défaut de comparution de toutes les parties, par le décès de l'une d'elles ou son interdiction, ainsi que dans les cas de décès, démission, radiation, suspension ou destitution de l'avocat constitué dans la cause. Le greffe en avise les parties par lettre recommandée.

2 L'instance est reprise à la demande de la partie la plus diligente.

3 Si, dès le prononcé de la suspension ou le cas échéant dès la fin de la cause de suspension, l'instance n'est pas reprise dans l'année, elle est périmée de plein droit. La péremption d'instance n'éteint pas l'action.

Art. 40  Témoins, indemnité

Les témoins peuvent demander une indemnité dont le montant est fixé par le président.

Art. 41 Sanction

1 Le témoin cité par le greffe qui, sans justifier son absence, ne comparaît pas à l'audience, peut être condamné à une amende n'excédant pas 500 F.

2 Il peut faire opposition dans les 10 jours après la notification à lui faite de l'avis de condamnation. S'il fournit une excuse valable, le tribunal annule ou réduit l'amende.

Art. 42  Prestation de serment

Le témoin est d'abord invité par le président à déclarer :

Art. 43  Incompatibilités

1 Ne peuvent être entendus comme témoins :

2 Ils peuvent toutefois être entendus à titre de renseignement, sans prestation de serment.

Art. 44  Audition des témoins

1 Les témoins sont entendus séparément et les parties ne peuvent les interrompre.

2 Si les parties ont des réserves à formuler à l'égard d'un témoin, elles sont tenues d'en faire état avant sa déposition.

3 Le greffier dresse, sous la dictée du président, un procès-verbal résumant la déposition du témoin et lui en donne lecture. Le témoin en confirme l'exactitude.

Art. 45  Nomination d'experts

1 Lorsque les juges ordonnent une expertise, ils nomment l'expert, le font convoquer par le greffe et désignent les objets sur lesquels un avis doit être donné.

2 Si la nature et l'importance du litige le justifient et si les parties y consentent, il peut être désigné 3 experts.

3 Les causes de récusation sont les mêmes que pour les juges.

Art. 46  Rapport d'expertise

1 Si l'objet de l'expertise est de nature telle que l'expert puisse immédiatement donner son avis, il est entendu à l'audience de la manière prescrite pour les témoins. Sinon, il fait ultérieurement un rapport, verbal ou écrit, selon ce qu'ordonne le tribunal ; le rapport est confirmé sous la foi du serment.

2 Le tribunal veille à ce que le rapport soit dressé dans le plus bref délai. En cas de retard non motivé, le tribunal peut remplacer l'expert et le condamner à une amende n'excédant pas 500 F.

3 S'il a été nommé 3 experts, les dispositions qui précèdent sont également applicables.

Art. 47  Avance des frais d'expertise

1 Sauf décision contraire du tribunal, les frais d'expertise sont avancés par la partie qui l'a sollicitée.

2 Dans son jugement, le tribunal en fait l'estimation provisoire et impartit un délai à la partie qui doit en opérer le versement au greffe.

3 Si le versement n'est pas opéré dans le délai fixé, la procédure d'expertise est déclarée close.

4 Si une expertise est ordonnée d'office, les frais en sont avancés par l'Etat. Il en est de même si la partie qui doit effectuer l'avance des frais conformément à l'alinéa 1 établit que sa situation financière ne lui permet pas de faire face à cette obligation.

Art. 48  Amplification de la demande

Le demandeur peut amplifier ses conclusions en cours d'instance. Dans ce cas, le tribunal doit donner au défendeur la possibilité de se prononcer.

Art. 49  Procès-verbal

Le greffier tient le procès-verbal de l'audience sous la dictée du président.

Art. 50  Exception de litispendance ou d'incompétence

1 Le tribunal, saisi d'une exception de litispendance ou d'incompétence, même si ladite exception porte sur la compétence du groupe auquel le litige est attribué, doit au préalable statuer sur cette exception. S'il la rejette, le tribunal en fait mention au procès-verbal et aborde le fond immédiatement. Les motifs à l'appui du rejet sont exposés dans le jugement sur le fond.

2 Le tribunal examine d'office les questions de litispendance ou d'incompétence à raison de la matière.

3 L'exception d'incompétence à raison du lieu ou du groupe doit être soulevée au début de la première audience du tribunal sous peine de forclusion.

4 Si le tribunal constate que la cause est du ressort d'un autre groupe, il la transmet au groupe qu'il estime compétent. Si ce dernier groupe décline sa compétence, il porte sans délai le litige devant la Cour d'appel de son groupe.

Art. 51  Délibération

Les juges délibèrent en secret.

Art. 52  Jugement

1 Sauf circonstances particulières, le tribunal délibère et statue séance tenante.

2 Il n'est procédé à la lecture publique du jugement que sur demande expresse d'une partie lors de l'audience.

3 La rédaction du jugement peut intervenir ultérieurement.

Art. 53 Contenu du jugement

Tout jugement doit contenir :

Art. 54  Jugement en dernier ressort

Le tribunal juge en dernier ressort toutes les demandes dont le montant n'excède pas 1000 F, tant selon les dernières conclusions du demandeur principal que selon celles du demandeur reconventionnel.

Art. 55 Notification, force de chose jugée

1 Le jugement est notifié aux parties par lettre recommandée.

2 Il devient exécutoire le lendemain de sa notification.

3 Lorsqu'il est susceptible d'opposition ou d'appel, le jugement ne devient exécutoire, en l'absence d'un tel acte, qu'à l'expiration des délais prévus par la présente loi.

Art. 56  Cas d'appel

1 Les jugements rendus par le tribunal dans les causes dont la demande principale ou reconventionnelle est supérieure à 1000 F, ainsi que ceux rendus en application de l'art. 24, alinéa 1, lettre a, peuvent être déférés à la Cour d'appel.

2 Est également susceptible d'appel le jugement rendu dans une cause de valeur indéterminée ou relative à une action en constatation de droit, ainsi que le jugement qui admet une exception d'incompétence ou de litispendance.

3 Le rejet d'une exception d'incompétence ou de litispendance n'est susceptible d'appel qu'au moment où le jugement sur le fond est rendu.

4 La partie défaillante n'est pas recevable à appeler du jugement qui l'a condamnée par défaut.

Art. 57  Compétence du président

1 Le président de la Cour d'appel statue seul et sans audience sur les appels portant sur une question de litispendance, de compétence, d'autorité de la chose jugée, de récusation ou toute autre question de nature procédurale.

2 Il peut toutefois décider de faire convoquer la cause à une audience de la Cour d'appel siégeant dans sa composition habituelle.

Art. 58  Instance unique

Dans le cas prévu à l'article 27, la Cour d'appel statue en instance unique. Les dispositions des articles 60, 61, 63 à 67 relatives à la procédure, sont applicables par analogie.

Art. 59  Forme et délai de l'appel

1 L'appel doit être déposé dans les 30 jours qui suivent la notification de la décision du tribunal.

2 Il est formé par une écriture motivée déposée au greffe, ou adressée à celui-ci par lettre recommandée. L'écriture indique notamment les points de fait et de droit contestés du jugement et les conclusions en appel.

3 Elle est accompagnée de toutes les pièces utiles. Elle doit mentionner expressément si une réouverture des enquêtes est demandée et, dans ce cas, indiquer la liste des témoins à entendre ou réentendre ainsi que tout autre moyen de preuve.

Art. 60 Emolument de mise au rôle

1 Lorsque le montant encore litigieux excède 20 000 F, l'appelant est astreint à un émolument de mise au rôle, conformément au tarif fixé par le Conseil d'Etat.

2 Toutefois, sur demande motivée, le président peut dispenser, sous réserve du gain du procès, l'appelant d'effectuer cette avance si sa situation financière le justifie.

Art. 61 Réponse de l'intimé

1 Copie de l'écriture d'appel est communiquée à l'intimé. Un délai de 30 jours dès réception de celle-ci lui est imparti pour déposer un mémoire de réponse.

2 L'article 59, alinéas 2 et 3, s'applique par analogie.

3 Copie de la réponse est communiquée à l'appelant par pli simple.

4 Un second échange d'écritures n'est ordonné qu'exceptionnellement.

Art. 62  Appel incident

1 Un appel incident ne peut être formé, sous peine d'irrecevabilité, que dans le délai fixé pour le mémoire de réponse.

2 L'appelant principal peut répondre. L'article 61 s'applique par analogie.

3 Si l'appel principal est retiré, l'appel incident n'en subsiste pas moins.

4 Si l'appel principal est déclaré irrecevable, l'appel incident devient caduc.

Art. 63 Mémoires

Chaque écriture doit être produite en autant d'exemplaires qu'il y a de parties. Si tel n'est pas le cas, les copies manquantes sont dressées aux frais de la partie qui l'a déposée.

Art. 64 Citation et comparution

1 Dès la signification de la dernière écriture, ou à l'expiration du délai pour produire celle-ci, le greffe cite les parties, par lettre recommandée, à comparaître à bref délai devant la Cour d'appel.

2 Des enquêtes ne sont ouvertes que dans la mesure où les parties l'ont sollicité dans leurs écritures, la Cour d'appel pouvant toutefois y procéder d'office.

Art. 65 Non comparution d'une partie

1 En cas de non-comparution sans excuse valable de l'une des parties à l'audience de la Cour d'appel, la cause est gardée à juger.

2 L'arrêt est réputé contradictoire à l'égard de la partie qui n'a pas comparu.

Art. 66 Dispositions applicables

Sauf disposition contraire du présent chapitre, les articles régissant la procédure devant le tribunal sont applicables devant la Cour d'appel.

Art. 67  Notification de l'arrêt

1 L'arrêt est rendu par la Cour d'appel conformément à l'article 52. Il est notifié sans délai par lettre recommandée.

2 Il est exécutoire dès le lendemain de sa notification.

3 Toutefois, lorsqu'il est susceptible de recours en réforme au Tribunal fédéral, il ne devient exécutoire, en l'absence d'un tel acte, qu'à l'expiration des délais prévus par la loi.

Art. 68 Publicité, horaire et police des audiences

1 Les audiences de la juridiction sont publiques, sous réserve de l'article 19.

2 En règle générale, elles ont lieu en fin de journée.

3 Le président a la police de l'audience.

Art. 69 Interprète

1 Si l'une des parties, un témoin ou un expert ne peut s'exprimer en français, le conciliateur ou le président du tribunal ou de la Cour d'appel désigne un interprète. Ce dernier prête serment de traduire fidèlement les déclarations, questions et réponses.

2 Il n'est toutefois pas appelé d'interprète si le conciliateur, le président ou l'un des juges peut interroger la partie intéressée, le témoin ou l'expert dans la langue qui convient.

3 L'interprète est indemnisé par l'Etat.

Art. 70 Récusation

1 Tout juge est récusable :

2 Tout juge qui a connaissance d'une cause de récusation en sa personne est tenu de la déclarer au tribunal ou à la Cour d'appel qui décide s'il doit s'abstenir.

3 Au surplus, les articles 85, 88, 90 à 92, 96, 97 et 100 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, sont également applicables.

4 Le président indique aux parties au début de l'audience les noms des juges appelés à siéger.

5 La demande de récusation est jugée immédiatement à huis clos, en l'absence du juge dont la récusation est demandée.

6 Les demandes de récusation dirigées simultanément contre tous les juges du tribunal ou une majorité d'entre eux sont jugées par le collège des présidents de groupe, présidé par le plus âgé. Si l'un d'eux fait l'objet de la demande de récusation, il est remplacé par le vice-président de son groupe.

7 Les demandes de récusation dirigées simultanément contre tous les juges de la Cour d'appel ou une majorité d'entre eux sont jugées par un collège composé de 5 juges présidant la Cour d'appel et présidé par le représentant de la juridiction des prud'hommes au sein de la commission de gestion du pouvoir judiciaire ou son remplaçant.

Art. 71  Indemnités

Un règlement du Conseil d'Etat fixe le montant des indemnités que reçoivent :

Art. 72  Pénalités

1 Le président siégeant peut infliger au juge régulièrement convoqué qui manque une audience sans motif légitime une amende n'excédant pas 300 F.

2 L'intéressé est admis à présenter son excuse au président qui a siégé ; ce dernier statue à huis clos et en dernier ressort.

Art. 73  Greffe

Un greffe central fonctionne pour la juridiction des prud'hommes.

Art. 74  Personnel du greffe

1 Le greffier et le personnel du greffe sont engagés en conformité de l'article 75Ade la loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941.

2 Les dispositions de la loi précitée concernant les greffiers (art. 112 à 122), sont applicables au greffier de la juridiction des prud'hommes.

Art. 75 Tâches du greffe

1 Le greffier ou l'un des commis assermentés reçoit les demandes, envoie les citations et les sommations ; il convoque les prud'hommes et les membres de la Cour d'appel pour les diverses audiences.

2 Il dresse les procès-verbaux prévus aux articles 32, 44 et 49. A la demande du président, il assiste à la délibération, mais sans prendre part à la décision.

3 Il a soin des registres, des procès-verbaux des audiences et des délibérations qui peuvent être prises en assemblée générale, ainsi que des archives.

4 Il tient à jour une collection des conventions collectives de travail que l'organisme officiel compétent doit lui communiquer. Il rassemble toute la documentation utile sur les contrats-types et les usages professionnels. Il dresse un rôle de la jurisprudence.

5 Il rédige les jugements, dans la mesure où il en est chargé par le tribunal.

6 Il minute les jugements et les arrêts, les expédie et les fait signifier.

Art. 76 Frais

1 La procédure est gratuite pour les parties, sauf disposition contraire de la loi. Toutefois, le juge peut mettre les dépens et les frais de justice à la charge de la partie qui plaide de manière téméraire. Lorsque la violation est grave, le juge peut en outre infliger une amende de 2 000 F au maximum.

2 Toute la procédure devant la juridiction des prud'hommes est rédigée sur papier libre.

3 Les parties sont dispensées de faire enregistrer les pièces produites devant la juridiction des prud'hommes.

Art. 77  Assistance juridique

1 Chaque partie peut, si elle remplit les conditions requises, demander le bénéfice de l'assistance juridique (art. 143A de la loi sur l'organisation judiciaire).

2 Le greffe tient à disposition la formule ad hoc.

Art. 78  Répartition des frais

1 Les indemnités aux témoins, les frais des expertises demandées par les parties et l'émolument prévu à l'article 60 sont mis à la charge de la partie qui succombe, à moins que le tribunal ou la Cour d'appel n'en décide autrement.

2 Si l'expertise a été ordonnée d'office, les frais peuvent en être laissés à la charge de l'Etat lorsqu'il ne paraît pas équitable de les faire supporter aux parties.

Art. 79 Gratuité prévue par le droit fédéral

Les dispositions figurant aux articles 47 et 78 sont applicables sans préjudice de l'article 343, alinéa 3, du code des obligations quant à la gratuité prévue par cette dernière disposition.

Art. 80  Délivrance de copies

La copie de toute pièce de procédure demandée par les parties peut être soumise à la perception d'un émolument selon un tarif fixé par le Conseil d'Etat.

Art. 81  Encaissement

Les sommes perçues par le greffe sont versées à la caisse de l'Etat.

Art. 82 Clause abrogatoire

La loi sur la juridiction des prud'hommes, du 21 juin 1990 est abrogée.

Art. 83 Disposition transitoire

1 Les prud'hommes élus lors des élections générales des 27 et 28 avril 1993 ainsi que lors d'élections complémentaires postérieures exercent leur charge jusqu'à l'entrée en fonction des nouveaux juges élus en vertu de l'art. 120, al. 1, de la loi sur l'exercice des droits politiques.

2 Les causes pendantes devant les anciens groupes professionnels sont alors chacune attribuées au nouveau groupe compétent.

3 Les conditions de l'article 6, alinéa 4 ne sont pas applicables aux présidents et vice-présidents de groupe, ainsi qu'aux présidents suppléants, élus pour la première législature suivant l'entrée en vigueur de la présente loi.

Art. 84 Modifications à d'autre lois

(A 5 05)

1 La loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, est modifiée comme suit :

Art. 126, al. 1 et 2 (nouvelle teneur, l'alinéa 2 actuel devenant l'alinéa 3)

1 Les groupes professionnels sont composés chacun de 30 à 60 prud'hommes employeurs et d'un nombre égal de prud'hommes salariés.

2  Le nombre de juges à élire dans chaque groupe professionnel est fixé par le Conseil d'Etat, après consultation des organisations professionnelles, au moins 3 mois avant les élections.

Art. 128 (nouvelle teneur, sans modification de la note)

Le Conseil d'Etat convoque les électeurs des groupes 1 à 5 dont l'élection n'est pas tacite et désigne les locaux de vote.

Art. 132, al. 2, lettre b (nouvelle teneur)

Art. 147 (nouvelle teneur, sans modification de la note)

Lorsque, dans un groupe professionnel, le nombre de juges s'avère insuffisant, en raison soit de nombreux sièges vacants, soit d'une augmentation importante du nombre de litiges, le président ou le vice-président du groupe concerné en informe le Conseil d'Etat, lequel décide cas échéant, après consultation des organisations professionnelles, de procéder à un scrutin complémentaire.

Art. 192 Abrogé

(E 2 05)

2 La loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, est modifiée comme suit :

Art. 35B, al. 1 (nouvelle teneur)

1 La Chambre d'appel en matière de baux et loyers connaît des jugements rendus par le Tribunal des baux et loyers dans les contestations fondées sur l'article 56A.

Art. 60D, al. 2, lettre d (nouvelle teneur)

Art. 75B, al. 1 (nouvelle teneur)

1 La commission de gestion est composée du procureur général, qui la préside, des présidents de la Cour de justice, du Tribunal administratif, de la Cour de cassation, du Tribunal de première instance, du Collège des juges d'instruction, du Tribunal tutélaire et de la Justice de paix et du Tribunal de la jeunesse et de l'un des présidents de la Cour d'appel des prud'hommes, désigné par la Cour de justice, ainsi que de deux fonctionnaires à plein temps du pouvoir judiciaire.

(E 3 05)

3 La loi de procédure civile, du 10 avril 1987, est modifiée comme suit :

Art. 291, al. 2 Abrogé

M 1260
7. Proposition de motion de MM. Rémy Pagani, Christian Ferrazino, Pierre Vanek, Alberto Velasco, Luc Gilly, Dominique Hausser et Christian Brunier sur la réaffectation de l'immeuble 5, rue Guillaume-Tell, à du logement. ( )M1260

Vu la motion pour une réaffectation des logements vides et des locaux inoccupés adoptée par le Grand Conseil dans sa séance des 3 et 4 décembre 1998 ;

Attendu que la Banque Populaire Suisse a bénéficié en 1985 de la transformation en bureaux de logements situés dans un ancien immeuble, localisé entre le quai des Bergues et la rue des Etuves, portant sur une quarantaine de pièces ;

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvepar ces motifs

invite le Conseil d'Etat

à exiger que l'immeuble, 5, rue Guillaume-Tell, soit réaffecté à du logement pour les motifs exposés ci-dessus et à surseoir dans l'immédiat à toute évacuation de celui-ci ;

à demander au DAEL de refuser toute autorisation de transformer des locaux qui pourraient répondre aux conditions de l'article 15 alinéa 6 LDTR soumis à l'approbation du Grand Conseil et de veiller à ce que des logements situés au centre ville ne soient pas convertis en bureaux, vu la pénurie de logements dans ce secteur à la suite de la transformation (souvent illégale) de très nombreux appartements en bureaux durant les années soixante et septante au centre ville qui a été ainsi vidé de ses habitants.

EXPOSÉ DES MOTIFS

L'autorisation de transformer l'immeuble était conditionnée à la remise sur le marché, dans le quartier de Saint-Gervais, de logements ayant un nombre équivalent de pièces à celles transformées en bureaux et dont les loyers devaient répondre aux besoins prépondérants de la population, comme cela ressort de la réponse du Conseil d'Etat à une question écrite déposée par le député Pierre Alain Champod le 27 octobre 1993 et dont la réponse a été publiée dans le mémorial du Grand Conseil du 27 janvier 1994 (pages 22 et ss).

Il ressort de cette réponse du Conseil d'Etat que la BPS n'avait pas trouvé de terrain constructible dans le quartier à fin 1993.

Il semble que l'opération compensatoire ne se soit toujours pas réalisée à ce jour.

Entre-temps, la BPS a été intégrée au Crédit Suisse, qui a repris à cette occasion tous ses avoirs (dont ses biens immobiliers) et les obligations juridiques de la BPS.

Il appartient donc au Crédit Suisse, qui occupe les logements transformés en bureaux de l'immeuble du quai des Bergues - rue des Etuves dont elle est propriétaire, de respecter les conditions de l'autorisation de transformer applicable à ces locaux.

Il s'avère, par ailleurs, que le Crédit Suisse est devenu propriétaire de l'immeuble, 5, rue Guillaume-Tell, qui est un ancien immeuble d'habitation transformé en bureaux dans les années soixante et qui est inoccupé depuis plusieurs années, certainement à la suite d'une acquisition spéculative ayant provoqué sa reprise par la banque précitée pour cause de surendettement.

Cet immeuble conviendrait donc parfaitement à sa reconversion en logements, ce qui répondrait aux conditions de l'autorisation de transformer l'immeuble du quai des Bergues et de la rue des Etuves ainsi qu'aux objectifs de la motion 1238 et à la modification de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation qui va être soumise à l'approbation du Grand Conseil à l'occasion de sa séance des 25 et 26 février prochains.

L'article 15, alinéa 6 nouveau, LDTR proposé par la Commission du logement dispose qu'en cas de pénurie dans une catégorie d'appartements, le département peut ordonner l'affectation en logements des locaux à usage commercial, administratif, artisanal ou industriel, vides depuis plus de 24 mois, qui ont été précédemment affectés au moins une fois au logement, pour autant qu'il n'en résulte pas de frais disproportionnés pour le bailleur.

Compte tenu de ce qui précède, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à faire bon accueil à cette motion.

Débat

M. Christian Ferrazino (AdG). Au nom des signataires de cette motion, j'aimerais adresser nos excuses au groupe des Verts, tout particulièrement à M. Hiler qui a joué un rôle très actif dans le cadre des problèmes soulevés par cette motion. Dans la précipitation avec laquelle nous avons dû rédiger et déposer cette motion, nous n'avons pas eu le temps de leur soumettre notre proposition.

Cela dit, Mesdames et Messieurs, si le dépôt de cette motion s'est fait dans l'urgence, le problème dont il est question est un problème lancinant, que nous connaissons à Genève depuis le début des années 1990 : le nombre élevé de surfaces commerciales vacantes. Quand nous parlons de surfaces commerciales vacantes, il s'agit de celles qui sont offertes en location ou à la vente, et non des locaux vides qui sont soustraits du marché.

En réalité, le nombre de surfaces commerciales existantes qui n'ont pas d'occupants est largement supérieur à 300 000 m2 de surface de plancher dont une grande moitié est représentée par des bureaux. Parmi ces locaux commerciaux vacants, bon nombre d'immeubles étaient précédemment destinés au logement. Mesdames et Messieurs les députés, l'immeuble qui nous occupe ce soir, celui de la rue Guillaume-Tell, qui a été occupé il y a maintenant quelques semaines, fait précisément partie de ces locaux commerciaux, initialement destinés au logement.

Permettez-moi de refaire un bref historique. Cet exemple est assez symbolique de la situation que nous connaissons, et dont nous avons hérité, d'une certaine période, pas si lointaine, où un propriétaire, la Banque populaire suisse, avait obtenu l'autorisation de transformer, aux fins d'activités commerciales, un immeuble destiné au logement. Nous sommes en 1985 et l'immeuble se trouve précisément entre le quai des Bergues et la rue des Etuves, c'est-à-dire à proximité immédiate de la rue Guillaume-Tell. L'autorisation de changement d'affectation délivrée à cet établissement bancaire comportait une condition : la Banque populaire suisse s'engageait à réaffecter en logements une surface d'égale dimension que celle des locaux commerciaux. Inutile de vous préciser que la banque n'a pas pu trouver dans le quartier concerné des terrains se prêtant à la construction de nouveaux logements. Par conséquent, cette condition n'a, à ce jour, jamais été satisfaite.

Nous avons eu vent du fait que la banque avait proposé de verser une certaine somme d'argent en compensation de cette condition, qui ne pouvait matériellement pas se concrétiser ainsi que le stipulait l'autorisation. A mon avis, si cette somme d'argent a été versée, ou si elle devait l'être, ce ne pourrait, tout au plus, que compenser la période de 1985 à 1999 pendant laquelle cette banque se devait de s'exécuter, ce qu'elle n'a pas fait. Ce n'est en tout cas pas une réponse suffisante à la condition qui avait été posée à l'origine.

Sachant que cet établissement bancaire, la BPS, a été repris par le Crédit suisse, que ce Crédit suisse, bien évidemment, bénéfice aujourd'hui de la dérogation obtenue par la BPS à l'époque de la part du département; que le Crédit suisse est précisément propriétaire de l'immeuble 5, rue Guillaume-Tell, il est, par conséquent, tout à fait équitable et logique de demander à cet établissement bancaire d'exécuter cette compensation, ce qui n'a pas été fait à ce jour.

En ce sens, le cas qui nous est soumis est un cas d'école exemplaire qui illustre à merveille la question des locaux commerciaux vacants, précisément des locaux commerciaux qui précédemment étaient affectés au logement.

C'est pour cette raison, Mesdames et Messieurs les députés, que nous demandons instamment au Conseil d'Etat dans le cas de l'occupation de l'immeuble 5, rue Guillaume-Tell, d'intervenir auprès du procureur général pour surseoir à toute évacuation. Cela pour deux raisons.

La première : nous n'ignorons pas le principe de la séparation des pouvoirs et le fait que le procureur général est habilité à intervenir sans en référer au Conseil d'Etat, mais nous n'ignorons pas, non plus, l'usage qui a prévalu jusqu'à aujourd'hui dans cette République et qui devrait continuer à prévaloir : lorsqu'on doit faire appel à la force publique pour évacuer des immeubles, une concertation avec le Conseil d'Etat doit avoir lieu, surtout si l'évacuation peut poser un problème au niveau de l'ordre public. Nous demandons donc, c'est une des invites de cette motion, que le Conseil d'Etat intervienne auprès du procureur général pour surseoir à toute évacuation de ce bâtiment.

Deuxième raison : il ne serait pas, Mesdames et Messieurs les députés, acceptable qu'une évacuation ait pour conséquence de recréer la situation scandaleuse que nous connaissions avant et qui n'a que trop duré : un mitage de cette ville et une accumulation de locaux vides, sans parler des logements vides qui est un autre scandale de cette République. Je parle de ces locaux commerciaux qui sont pléthore aujourd'hui tout particulièrement au centre-ville. Ce serait créer un autre scandale que de laisser cette situation de mitage perdurer.

Par conséquent, et c'est l'autre volet de cette invite, nous demandons également au département de surseoir aux demandes d'autorisation de rénover ces locaux commerciaux dans l'attente de la modification d'une loi qui, je le sais, vous est chère, puisque même les amis de M. Balestra manifestaient devant la rue tout à l'heure. Puisqu'ils attendent avec impatience ces modifications législatives, nous essayerons d'oeuvrer rapidement pour leur donner satisfaction. Quand nous aurons pu modifier la LDTR, il sera alors juridiquement possible de faire en sorte que ces locaux commerciaux soient réaffectés au logement.

Par conséquent, cette motion permettra de répondre provisoirement à la situation que nous connaissons en permettant, dans un deuxième temps, de régler ce problème, à satisfaction de droit, en modifiant la loi.

M. John Dupraz (R). Cette motion est très intéressante sur un point. Elle demande la possibilité de transformer des locaux commerciaux en logements. Vu la situation du marché concernant les bureaux et les surfaces commerciales, le groupe radical pourrait y souscrire. Il faut s'adapter au marché... Pourquoi pas ? Puisqu'une banque, à l'époque, a pris des engagements, il faut bien qu'elle les respecte...

Voyez-vous, Monsieur Ferrazino, vous êtes rusé comme le renard qui est enfermé dans le poulailler et qui «bouffe» les poules... (Rires) ...mais nous ne nous laisserons pas prendre à votre manoeuvre ! En fait, votre motion n'est jamais que l'intervention ou le prolongement politique d'une action de squatters extrémistes que j'ai eu l'occasion d'entendre à la télévision, qui s'exprimaient cagoulés et casqués, comme les terroristes de Corse ou du PKK, disant que ce qu'ils voulaient c'était des logements bon marché... Tout le monde veut des logements bon marché ! Non seulement ils les veulent bon marché, mais ils ne veulent pas payer et, en plus, ils veulent pouvoir organiser une vie associative à leur gré, au détriment de toutes les lois en usage. (Protestations.) Ils veulent ouvrir des bistrots sans avoir... (Le président agite la cloche.) ...le diplôme de cafetier, sans se plier aux normes de sécurité, ni à celles de la police.

Je m'étonne qu'un avocat aussi distingué que M. Ferrrazino qui, je crois, a prêté serment, puisse soutenir des actions contre le droit et l'Etat de droit ! Vraiment, pour quelles idées et pour qui naviguez-vous ? Pour les hors-la-loi ? Monsieur Ferrazino, vous avez vraiment le comportement d'un voleur de poules... (Rires.) Non seulement vous en avez le comportement, mais vous en avez la tête, et vous m'inquiétez beaucoup ! (Rires.)

Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons souscrire à cette motion. Si nous y souscrivions, demain, trois ou quatre farfelus enfarinés, encagoulés occuperaient des locaux commerciaux vides en disant qu'ils veulent organiser une vie associative et que ces locaux étant vides, le procureur n'aura pas le droit de les mettre dehors.

Je me demande ce qu'attend le procureur pour expulser ces hors-la-loi de ces locaux ! Ils n'y ont rien à y faire ! Je m'étonne qu'il mette autant de temps pour les évacuer de ces bâtiments ! Il semblerait que le procureur attende un signe politique du Grand Conseil. Eh bien nous, le groupe radical, nous le donnons. Nous voulons un Etat de droit. Je crois savoir que le procureur n'est pas un homme de droite, il serait plutôt socialiste à ma connaissance. Nous voulons que le droit soit respecté et nous entendons que les avocats qui ont prêté serment défendent les gens qui agissent dans la légalité et pas les malfrats. (Applaudissements.)

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Il aura fallu attendre jusqu'à la fin février 1999 pour entendre M. Dupraz s'insurger contre une ouverture de bistrot ! (Rires.)

M. John Dupraz. Illégale ! Illégale !

Mme Fabienne Bugnon. Tout cela me porte à croire que ces bistrots ne servent pas d'alcool, sinon, je serais très étonnée de sa réaction.

Revenons à cette motion qui soulève plusieurs problèmes, hormis celui de l'occupation. Le premier est le nombre effarant de locaux commerciaux vides à Genève. Cela a été souvent dénoncé dans ce Grand Conseil : 300 000 m2, c'est inadmissible ! Deuxième problème : deux tiers de ces surfaces ne pourraient actuellement être réutilisées comme bureaux sans des interventions très lourdes; cela a été prouvé. Ensuite, la pratique d'empaillage des promoteurs concernant ce type de locaux qui consiste à tout démolir et à garder uniquement la façade n'est tout simplement pas acceptable. Autre problème soulevé par cette motion : le coût modeste d'une rénovation de l'immeuble Guillaume-Tell pour mettre sur le marché vingt logements à bas prix, Monsieur Dupraz, et non pour y habiter sans payer; il suffirait de 280 F par m3.

Cette motion soulève un problème que nous avons très souvent évoqué dans cette enceinte : la revitalisation du centre-ville par l'habitat. Elle souligne également la difficulté des fondations de droit public à trouver des terrains ou des immeubles pour appliquer le plan d'action logement devant permettre cette fameuse réalisation de trois mille logements HBM dont il est question depuis que je suis dans ce Grand Conseil.

Enfin, elle soulève deux autres problèmes : la pratique du procureur et la pratique de la police. La pratique du procureur en matière d'évacuation : on ne peut pas admettre, Mesdames et Messieurs les députés, qu'un acte de vente ou une location puisse suffire pour évacuer les squatters. Il faut un réel projet sur l'immeuble, et ce n'est pas le cas de la plupart des immeubles squattés.

La réaffectation des locaux commerciaux vides est un sujet de politique sociale de logement et d'urbanisme que le procureur devrait considérer comme tel. Enfin la pratique de la police : dans le climat de violence que connaît Genève depuis quelques mois, la police devrait éviter de se livrer à des provocations qui pourraient conduire à des affrontement inopportuns et sans objet, tant que la situation des locaux commerciaux vides reste dans le flou politique actuel. Les Verts, pour toutes ces raisons, vous demandent de soutenir cette motion.

M. Christian Ferrazino (AdG). Je vais répondre aux propos sympathiques de notre ami Dupraz, car il est vrai que, s'il n'était pas là, on s'ennuierait beaucoup dans ce parlement !

Monsieur Dupraz, vous n'avez pas l'air d'apprécier beaucoup les gens qui portent des perruques, mais je crois, à vous voir - peut-être ma vue n'est-elle pas très bonne - que vous n'êtes pas très loin de ce stade ! Selon vous, un avocat doit défendre des gens qui agissent dans la légalité. Vous voulez sans doute restreindre la clientèle des avocats. En effet, Monsieur Dupraz, - je ne sais pas si vous-même avez été consulter un avocat un jour - les avocats défendent assez souvent des gens qui n'agissent pas dans la légalité.

Vous avez l'air de découvrir qu'un certain nombre de jeunes, dans cette République, souhaitent vivre autrement que vous, et que beaucoup de gens désirent effectivement créer une vie associative. Cela a l'air de vous étonner, car ce n'est pas du tout votre modèle de vie, mais vous pourriez au moins vous dire que le modèle qui est le vôtre n'est pas forcément exclusif, qu'il en existe d'autres qui peuvent également trouver une place dans cette République, comme c'est le cas dans d'autres villes. Il existe des modèles de vie associative, notamment à Zurich, qui ont été non seulement aidés financièrement mais largement intronisés par les pouvoirs publics de cette ville.

A Genève, nous sommes très en retard en la matière. Au lieu de faire ce constat et de se limiter à dire que, finalement, les habitations que nous construisons ne répondent pas à la possibilité d'une vie associative, nous pourrions nous demander si, parmi ces nombreux locaux commerciaux qui sont vacants, on ne pourrait pas créer des lofts. C'est d'ailleurs une des idées qui est développée dans un journal qui me semble plus proche de vous que de moi, Monsieur Dupraz. Aujourd'hui, on fait des lofts également pour développer une vie associative. Ces lofts peuvent être réalisés de manière peu onéreuse, dans des locaux commerciaux, précisément dans des grands espaces qui ont été construits et qui n'étaient pas destinés à l'habitation. Il existe toutes sortes de formules. Ce sera d'ailleurs notre travail dans un deuxième temps d'examiner quelles seront les possibilités de réaffectation de locaux commerciaux en logements.

Mais tel n'est pas le débat, Monsieur Dupraz. La discussion qui nous anime aujourd'hui porte uniquement sur l'immeuble occupé, 5, Guillaume-Tell. M. Dupraz nous dit que le procureur général attend un signe de ce parlement. Si tel est le cas, donnons-lui ce signe clair et net, qu'il semble d'ailleurs partager; il a mené une politique que l'on pourrait qualifier de «tout à fait raisonnable» en matière d'occupation d'immeubles d'habitation, c'est-à-dire que tant qu'un projet constructif n'est pas prêt à démarrer - sous-entendu : le propriétaire n'est pas au bénéfice d'une autorisation définitive de construire - on n'évacue pas les squatters.

Vous voulez répondre à un trouble de l'ordre public en créant un autre trouble de l'ordre public, Monsieur Dupraz, qui ne se justifie pas, si ce n'est par une application totalement «benête» de la loi. Il faut alors faire une pesée des intérêts, ce que le procureur a fait en matière de logements. Nous lui demandons de le faire également en matière d'occupation de locaux commerciaux. Nous savons que si cet immeuble devait être évacué, il resterait - comme il l'a été pendant de nombreuses années - totalement vide. C'est une pure provocation, Monsieur Dupraz, quand nous savons que cet immeuble est situé au centre-ville, où le besoin de logements se fait sentir précisément à ces endroits-là, ce d'autant plus - la motion le rappelle avec une grande précision et personne ne l'a contredit jusqu'à maintenant - que le propriétaire de cet immeuble, le Crédit suisse, lequel a racheté l'établissement bancaire BPS, a un engagement qui n'a pas été respecté jusqu'à aujourd'hui : une compensation à offrir. Nous savons qu'il ne peut pas l'honorer matériellement, puisqu'il n'y a pas de terrains constructibles dans le quartier. Cela justifie donc d'autant plus d'imposer au Crédit suisse d'effectuer cette compensation. Cette motion ne demande rien d'autre que cela, Monsieur Dupraz.

Par conséquent, nous demandons à la majorité de ce Grand Conseil de bien vouloir donner ce signe clair et net à l'intention de Conseil d'Etat pour faire en sorte, précisément, que l'ordre public soit préservé dans cette République.

M. Christian Brunier (S). Il y a quelque temps, dans le cadre du débat sur la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, l'éleveur de poules - M. Dupraz - nous disait que les paysans devaient se diversifier, notamment en créant des restaurants campagnards, en créant du logement à la ferme. Eh bien, aujourd'hui, les squatters créent aussi des bistrots et veulent des logements. Je dirais : paysans et squatters : même combat, en définitive !

Aujourd'hui, nous sommes face à un problème de logement, mais nous sommes face aussi à un problème éminemment culturel. Soyons clairs : dans ce parlement, il y a des gens qui n'aiment pas les couleurs de la diversité et qui souhaiteraient que la jeunesse soit bien moulée dans le normatif; une jeunesse insipide... Le squat est le miroir grandissant des problèmes du logement. Depuis quelques années, le squat a mis en évidence de manière éclatante la crise du logement. Aujourd'hui, il révèle une situation tout à fait scandaleuse, le fait d'avoir 300 000 m2 de surface commerciale libre dont la plupart depuis plusieurs années. Cela est d'autant plus choquant que les prix de ces espaces commerciaux restent encore très élevés. Je viens d'aider un groupe de jeunes, qui essaient de monter un commerce, à trouver une surface commerciale bon marché. Je vous assure que c'est très difficile actuellement à Genève de trouver une telle surface.

Tout à l'heure, M. Béné nous a dit, lors des interpellations urgentes - dans un délire oratoire dont il a le secret - que l'occupation de ces locaux serait fort néfaste pour notre économie. M. Béné est d'ailleurs parti - je pense que le débat l'intéresse peu ! Comment l'occupation de quelques centaines de m2 pourrait déstabiliser notre économie, alors que les espaces commerciaux libres sont équivalents - je le rappelle - à plus de cinquante terrains de football ?

Mesdames et Messieurs, il est important de réimplanter du logement au centre-ville pour redonner vie à notre cité. En se baladant le soir ou le week-end, on peut constater que certains quartiers ressemblent quasiment à des cités fantômes. Dans ce contexte, la reconversion en logements de ces surfaces vides est plus qu'une urgence. C'est pourquoi le groupe socialiste vous appelle à soutenir cette motion.

M. Rémy Pagani (AdG). Je ne reviendrai pas sur le détail de cette légitime occupation. Je vous rappellerai seulement un certain nombre de faits qui ne doivent pas nous laisser indifférents. La Ville de Genève, depuis les années 60, a commencé à vider le centre-ville de ses habitants dont vingt-cinq mille ont été chassés vers la zone périphérique. Grâce à la mobilisation des habitants et des squatters - le squat existe à Genève depuis 1971 - ce phénomène a pu être résorbé. Les personnes que nous avions perdues sont revenues habiter au centre-ville. Nous sommes la seule ville suisse à avoir le même nombre d'habitants que dans les années 60. A Zurich, 100 000 personnes ont déserté le centre-ville.

C'est grave, Mesdames et Messieurs. C'est d'autant plus grave que la catastrophe prévue est là, sous nos yeux : nous avons la capacité de cinquante stades de football vides en locaux commerciaux ! Nous assistons aujourd'hui à un mitage de la ville, et les autorités devront apprendre à gérer ce phénomène, comme d'ailleurs les villes européennes. Nous assistons - je pèse mes mots - à une décomposition du tissu urbain qui va de pair avec la décomposition sociale. Je trouve particulièrement déplacées certaines critiques à l'égard des occupants qui se cagoulent parce qu'ils sont menacés.

En effet, contrairement à la pratique appliquée dans les années 1971 à 1990, durant lesquelles les autorités toléraient l'occupation, depuis ces dernières années, les occupants sont criminalisés. Ils sont menacés, non pas de poursuites judiciaires, qui pourraient éventuellement se concrétiser par une petite amende, mais de jours de prison ferme. C'est pour cela que les occupants se cagoulent. Je le critique, je le conteste, mais toujours est-il que c'est dû à cette tendance à la criminalisation. C'est la responsabilité du procureur général, qui applique la loi de manière stricte, et celle de notre chef de la police. Je trouve donc particulièrement déplacé ce genre de remarques à propos des cagoules...

Un certain nombre de policiers - j'ose espérer que ce n'est pas le cas du chef de la police - voudraient pousser les occupants à la criminalité, ce qui n'est pas le cas. Encore ce soir, on l'a vu au squat de Guillaume-Tell, la police a provoqué les squatters en cassant la porte d'entrée et en menaçant de gazer l'ensemble de la maison. Je trouve cela particulièrement déplacé, sachant que le problème est aujourd'hui politique et qu'il doit trouver une solution politique, c'est-à-dire en votant cette motion.

J'invite donc l'ensemble de ce parlement à mettre un terme à cette situation, car ce n'est pas seulement les occupants des squats que l'on doit défendre, c'est l'ensemble de notre communauté. Combien de temps encore les petits artisans et commerçants devront-ils payer des sommes astronomiques, allant jusqu'à 5 000 à 6 000 F par mois, pour pouvoir exercer un métier, pour pouvoir oser exister dans cette économie super globalisée que vous avez créée ?

Mme Myriam Sormanni (S). Pourquoi la ville ne serait-elle pas rendue à ses habitants ? Il y a pléthore de surfaces commerciales et un manque de vie dans la ville. Une autre façon de vivre développant la convivialité, la solidarité sociale : est-ce inacceptable ? Est-ce condamnable ? Certes, squatter la propriété d'autrui est illégal, mais ces personnes veulent se faire entendre et veulent exprimer leurs besoins qui ne sont pas entendus. Ils n'ont pas trouvé d'autres moyens pour qu'on tienne compte de leurs revendications. La vie en communauté est une autre manière de vivre. Elle est plus large que celle que j'ai connue en 1975. Nous, députés, sommes censés être représentatifs de la population. Ne devons-nous donc pas défendre ces gens que nous représentons ? A ce propos, Monsieur le président, j'ai déposé un amendement.

Le président. Madame Sormanni, vous nous préciserez si l'amendement porte sur les considérants ou sur l'invite.

Mme Myriam Sormanni. Sur l'invite, Monsieur le président !

M. Jacques Béné (L). Je ne sais pas si mon délire oratoire vaut celui que je viens d'entendre pendant cette dernière demi-heure... Je suis un peu effaré par ce qui a été dit et je crois que la capacité intellectuelle des intervenants n'était visiblement pas à la hauteur pour comprendre les problèmes économiques qui secouent notre canton !

J'aimerais, en préambule, rappeler une chose : tout propriétaire qui arrive à justifier la rentabilisation d'une transformation de local commercial en logements est prêt à le faire. J'aimerais que cela soit dit clairement : les propriétaires ne font pas obstruction pour transformer des locaux commerciaux en logements. Tout est question de rentabilité et c'est uniquement là-dessus que repose la base de la discussion.

Vous avez parlé, Monsieur Brunier, du problème du logement en général dans notre canton. J'aimerais juste rappeler une chose : au 1er juin 1998, il y avait 1% de logements vacants dans les quatre-pièces, 1,75% dans les trois-pièces et 3,5% pour les deux-pièces qui sont, pour la plupart, à des prix abordables. C'est bien là que le bât blesse : les squatters ne veulent rien payer ! Il est bien plus facile d'occuper des logements ou des locaux commerciaux sans rien payer, plutôt que de devoir s'acquitter régulièrement de son loyer auprès d'une régie et d'assurer ainsi une rentabilité aux propriétaires. La plupart d'entre eux sont propriétaires de plusieurs bâtiments; ils pourraient donc éventuellement réinvestir cet argent dans la transformation d'autres locaux commerciaux en logements.

Vous avez dénoncé le fait que 300 000 m2 de surfaces commerciales sont disponibles à Genève. J'aimerais vous rappeler - même si le bon Dieu Pagani semble vouloir résoudre tous les problèmes sociaux de l'Europe entière - que la crise est mondiale. Il y a des locaux commerciaux vacants partout. Mais pourquoi, à Genève, avons-nous cent vingt squats, alors que dans tout le reste de la Suisse on n'en compte qu'une dizaine ? Pourquoi, à Genève, devrions-nous accepter que tous les locaux commerciaux soient squattés alors que ce n'est pas le cas dans les autres cantons. Ils subissent pourtant exactement la même crise du logement et ils ont la même surface commerciale vacante. C'est la même chose dans les autres pays qui nous entourent.

Madame Bugnon, vous voulez absolument construire des HBM. D'accord, mais qui va les occuper ? Je vous signale que certaines régies ont déjà des difficultés à louer certains appartements, notamment les trois-pièces, car ce sont en général des appartements qui peuvent être loués par deux personnes et, la plupart du temps, les deux salaires dépassent les barèmes d'entrée. On se retrouve ainsi avec des appartements vacants. Preuve en est que l'office du logement social, qui bénéficie normalement de 20% des appartements dans des immeubles subventionnés, demande très souvent aux régies de se charger elles-mêmes de la location, car il n'y a personne à mettre dedans. C'est une situation effarante, et c'est exactement la même chose pour les HBM que nous n'arrivons plus à remplir ! C'est un souci politique pour vous, car il y a effectivement eu un projet de loi de ce Grand Conseil pour en construire davantage, mais qui allons-nous mettre dedans ? Vous êtes-vous au moins poser la question une seule fois ? Je ne pense pas !

Monsieur Ferrazino, j'estime que le procédé qui a été employé pour occuper ces locaux à la rue Guillaume-Tell est purement scandaleux. Vous voulez simplement justifier la nouvelle LDTR. Je peux vous garantir que cette LDTR, vous ne l'avez pas fait encore aboutir et qu'elle n'est, de loin, pas encore en vigueur. Vous verrez qu'elle ne sera peut-être pas si facile à appliquer cette nouvelle LDTR; elle est un pur scandale. Vous vous érigez en autorité publique - ça aussi c'est scandaleux - pour faire la loi en utilisant... (Protestations.)

Une voix. On n'est pas là pour ça !

M. Jacques Béné. Non, vous n'êtes pas là pour ça ! (Le président agite la cloche.) L'administration et le gouvernement sont là pour ça ! Vous n'êtes pas la police. Monsieur Pagani, vous vous offusquez parce que la police prend la liberté d'entrer dans un squat sans autorisation... Mais où va-t-on ? (Protestations.)

Le président. S'il vous plaît, laissez s'exprimer l'orateur !

M. Jacques Béné. L'immeuble de la rue Guillaume-Tell est actuellement sur le marché de la vente. Si l'un parmi vous souhaite l'acheter, il est le bienvenu. Certainement que la banque acceptera. Cet immeuble est, par ailleurs, proposé également à la location. Alors ne venez pas dire que l'on ne fait rien avec ces locaux commerciaux; c'est le marché qui n'en veut pas. Monsieur Brunier, vous venez de nous dire qu'un de vos amis n'arrive pas à trouver des bureaux à des prix décents. Alors allez trouver les bonnes régies, parce qu'il existe des locaux commerciaux à des prix décents, mais ce n'est pas en les occupant de cette manière qu'on va résoudre ce problème. Il n'y a actuellement pas de marché pour ces 300 000 m2 de locaux commerciaux, car la demande n'existe pas.

J'aborde l'injustice et l'inégalité de traitement. Les squatters aujourd'hui représentent une petite partie de la population, mais le fait que ces groupuscules soient hypermédiatisés donne l'impression que nous sommes face à une nouvelle doctrine, à une manière de penser ou de vivre de toute la population. En réalité, il s'agit de groupuscules relayés politiquement.

Mesdames et Messieurs, heureusement il y a encore dans ce canton une immense majorité de la population qui accepte de payer pour se loger. C'est là que réside le problème, car c'est justement ce que ne veulent pas vos squatters, qui ne paient pas les charges des Services industriels ni les autorisations pour exploiter des cafés-restaurants...

Une voix. C'est faux ! (Le président agite la cloche.)

M. Jacques Béné. Non, ce n'est pas faux. Plus de 500 000 F sont dans la nature aujourd'hui avec cinquante-six plaintes pénales que la brigade des squatters doit se charger d'instrumenter ! 500 000 F de consommation d'énergie ne sont pas payés, aujourd'hui. Les faits sont ce qu'ils sont.

Et puis les primes d'assurance augmentent quand un local est squatté. Qui paie ces primes ? Personne ! Les squatters ne veulent pas les payer. Il y a des problèmes de sécurité, d'autorisations, d'électricité, notamment quand ces squatters vont se brancher sur les immeubles voisins et que leur consommation est soit à la charge des propriétaires voisins soit à la charge des Services industriels.

En résumé, le problème du squat va beaucoup plus loin que l'affaire de l'immeuble Guillaume-Tell; il est purement politique. On en arrive aujourd'hui au point que certaines personnes de ce canton - parce que le squat est en train de s'institutionnaliser, c'est bien ce que nous voulons éviter - se permettent d'aller squatter les logements des personnes âgées qui entrent à l'hôpital. Renseignez-vous, Monsieur Ferrazino, je n'invente pas, cela s'est produit ! Je vous laisse imaginer ce qui pourrait se passer : nous ne pourrons bientôt plus partir en vacances sans retrouver, au bout de quinze jours... (Protestations, le président agite la cloche.) ... notre appartement squatté !

Venons-en au problème de la démission des parents. Aujourd'hui, dans les squats, contrairement à ce qui se passait dans les années 70, voire dans les années 80, on constate que les squats sont de plus en plus occupés par des jeunes : 13, 14, 15, 16 ans. Pourquoi ? Parce que les parents leur en donnent l'autorisation. Mesdames et Messieurs, la brigade des squats doit s'assurer que les personnes qui occupent les squats sont majeures. Si tel n'est pas le cas, ces mineurs doivent obtenir l'autorisation de leurs parents pour squatter. A partir du moment où la loi ne les empêche pas de squatter, les parents laissent faire, car ils ont des problèmes : divorce, chômage, etc.

Je comprends pourquoi vous vouliez absolument des psychologues en quantité incroyable au sein de l'enseignement : c'est pour traiter ces cas-là, Mesdames et Messieurs ! Vous êtes en train de former des délinquants avec ce genre de procédés, car la brigade des squats n'a pas les moyens de gérer les problèmes sociaux de ces jeunes. Vous feriez mieux de traiter ce genre de difficultés plutôt que de vous pencher sur l'occupation des locaux commerciaux par les squatters.

En conclusion, vous continuez à démolir toute initiative privée dans ce canton, mais je suis certain que la population, un jour, démolira vos idées. Croyez-moi, ce moment est plus proche que vous ne le pensez !

M. Michel Balestra (L). Il va être difficile d'intervenir après les propos de mon collègue, parce que faire mieux est mission impossible. Mais il faut reconnaître ses limites... Je vais quand même essayer de ne pas faire trop tache en vous racontant le feuilleton de l'hiver.

Acte 1. Un groupe de squatters désoeuvrés se demandent ce qu'ils pourraient faire pour se réchauffer. Le chef des squatters dit : «Ah, si pour une fois on squattait des immeubles commerciaux ! Oh, la bonne idée !».

Acte 2. Les partis politiques de gauche désoeuvrés se disent : «Quel type de projet de loi pourrions-nous déposer pour avoir l'air intelligents maintenant que l'on a presque tout dit ? Et si on déposait des projets de loi visant à exproprier l'affectation commerciale des immeubles vides ! Ah la bonne idée !».

Acte 3. Les partis de gauche étonnés du sens politique des squatters non instrumentalisés les appuient chaudement dans leur démarche spontanée et adéquate.

Acte 4 . Déclaration solennelle à la télévision du procureur général qui s'engage à faire respecter le droit dans toutes les circonstances, quelles que soient ses appartenances politiques. Le parti socialiste est un parti politique, je suis le procureur de la République, je ferai respecter le droit.

Acte 5. M. Ferrazino, désoeuvré... (Rires.) ... décide de déposer une motion demandant au procureur de cesser ses interventions contre les squatters non instrumentalisés spontanés pour les projets de lois visant à exproprier l'affectation commerciale des immeubles.

Eh bien, Mesdames et Messieurs, comme le disait mon collègue regretté, Coluche, vous avez un numéro de cirque ! Il y en a un qui pèle les oignons et l'autre qui pleure. (Rires.) Faites une pesée des intérêts et réfléchissez aux conséquences de vos actes ! Si vous continuez ce cirque, plus personne n'investira à Genève. Vous êtes pour l'ordre public, le respect strict des règles. Le droit de la propriété est un droit fondamental, et vous le mettez dans la balance avec la mauvaise humeur d'une cinquantaine de trublions en appelant cette crise d'adolescence, mal maîtrisée : «un trouble potentiel à l'ordre public...» Laissez-moi rire !

Tous les députés qui respectent l'Etat de droit pour lequel nous nous battons doivent affirmer leur volonté de faire respecter le droit, qui plus est, le droit supérieur qui garantit le droit à la propriété. Car le totalitarisme se nourrit des intérêts et des libertés individuels bafoués par un intérêt collectif vague. (L'orateur est interpellé.) Oui, camarade, je comprends ! Mais la dictature du prolétariat ne peut se satisfaire de ton égoïsme de classe et de ton manque de solidarité. (Bravos, applaudissements.)

Alors, Mesdames et Messieurs, que l'Alliance de gauche plante les graines du totalitarisme dans la République et canton de Genève, cela ne m'étonne pas, mais j'espère que tous les démocrates s'opposeront à cette manoeuvre ! Monsieur Dupraz, bien qu'il soit 23 h 15, vous avez été d'un sérieux et d'une efficacité redoutable, mais vous vous trompez : il ne s'agit pas du renard dans le poulailler, mais bien d'une invasion de termites dans les structures porteuses de notre Etat de droit ! (Applaudissements.)

Comme le procureur l'a affirmé, il fera respecter le droit. Nous l'en remercions, nous l'avons élu pour ça. Soyons une majorité à l'appuyer dans sa difficile mission en s'opposant à la motion de M. Ferrazzino ! (Bravos, applaudissements.)

M. John Dupraz (R). Il est difficile de reprendre la parole après notre collègue Balestra. Mas certaines choses ont été dites que je ne puis accepter, comme affirmer que les paysans et les squatters mènent le même combat, parce que les milieux agricoles auraient réclamé le droit ou la possibilité de transformer des bâtiments agricoles, qui ne sont plus affectés à l'agriculture, en logements. Monsieur Brunier nous le faisons en respectant le droit et en nous pliant à toutes les procédures légales. Alors que ce groupuscule de trublions instruits par Ferrazino et sa clique de gauchistes... (Rires.) ...mène une action politique sciemment organisée. C'est ce que je vous reproche; en tant qu'avocat vous devriez respecter le droit. Vous agissez là dans une totale illégalité...

Une voix. Les agriculteurs, à Berne !

M. John Dupraz. Mon cher, nous sommes d'humbles victimes du totalitarisme de la police bernoise... (Rires.) Nous ne saurions accepter que des élus du peuple encouragent de telles actions. Enfin, Mesdames et Messieurs, si nous suivons votre motion, qui, demain, empêchera un autre groupuscule de squatters d'occuper un autre local commercial ? Monsieur Ferrazino, je suis pour la diversité. J'ai des enfants qui ne pensent pas tout à fait comme moi, qui me trouvent ringard et c'est très bien. (Chahut.)

J'aimerais vous citer un exemple qui n'est pas si vieux : c'est celui de M. Segond, alors qu'il était conseiller administratif à la Ville de Genève. A l'époque, un peu partout dans les grandes villes de Suisse et notamment en Suisse allemande, des manifestations avec des bris de glaces se déroulaient un peu partout et c'était le temps de la musique rock, hard-rock, etc. M. Segond avait reçu ces groupes de musique et les avait aidés à trouver des locaux, cela s'est fait dans la légalité. Mais vous, vous ne voulez pas la légalité. Vous voulez le chaos, l'anarchie. Nous, nous sommes pour l'Etat de droit. J'ai fait l'université d'Athenaz, je n'ai pas fait le droit comme vous : vous avez fait quatre ans de droit pour être toute votre vie courbe... (Rires.) C'est ça qui est grave, et nous ne saurions l'accepter ! Oui à la diversité, oui au respect du droit et oui au respect de la propriété qui est inscrit dans la constitution. (Applaudissements, bravos.)

M. Claude Blanc (PDC). Nous avons déjà entendu beaucoup de choses et je m'efforcerai d'être plus bref que certains de mes préopinants.

Quel est le but réel de cette motion ? M. Ferrazino, qui - comme le disait Dupraz - a fait cinq ans de droit et le reste de travers, a tenté, dans sa dialectique d'avocat, de nous expliquer les raisons profondes d'une telle motion. M. Pagani, lui, est beaucoup plus clair. Il ne s'embarrasse pas de considérations juridico-politiques comme M. Ferrazino. M. Pagani a très clairement dit que le but de cette motion était d'exercer une pression sur le procureur général.

Mesdames et Messieurs les députés, si vous espérez exercer une pression sur le procureur général, c'est que vous avez pour lui bien peu de considération. On peut penser ce qu'on veut du procureur général. La manière tout à fait stricte avec laquelle il remplit sa mission, dans toutes les directions, ne fait plaisir à personne, souvent dans les milieux de ceux qui sont situés, ce soir, à ma gauche et les milieux de ceux qui sont en face de moi. On a souvent l'impression que le procureur général manque de jugement, de bon sens et qu'il veut appliquer la loi dans toute sa rigueur. Je crois que c'est son rôle. Il a réussi à se faire des ennemis à gauche et à droite, parce qu'il applique la loi; il faut s'y faire, ma foi ! Il fait son devoir et la tentative que vous exercez aujourd'hui contre lui en essayant de l'influencer prouve que, dans le fond, vous le méprisez, parce que vous croyez qu'il va être sensible à vos arguments et que, pour faire plaisir à la majorité d'aujourd'hui, il va déroger à l'idée qu'il se fait du droit.

Eh bien, Mesdames et Messieurs, je regrette que vous ayez autant de mépris pour le procureur général. Il n'a pas toujours pris des positions qui me convenaient, mais je suis convaincu qu'il remplit honnêtement sa mission et que, par conséquent, il n'a pas besoin que l'on exerce des pressions sur lui pour respecter le droit. Votre majorité va voter «ça», mais je fais confiance au procureur général pour passer outre s'il estime que tel est son devoir.

M. Dominique Hausser (S). On a beaucoup parlé de ménagerie sur les bancs d'en face, et je ne résiste pas à répondre à l'éleveur des poules qui se laissent parfois bouffer, quand ce n'est pas l'éleveur lui-même qui les bouffe, aux canards qui cancanent au milieu de ce poulailler de poules mortes et au paon qui essaie, au milieu de l'arène, de faire rire un certain nombre de spectateurs extrêmement fatigués ! (Protestations.)

J'aimerais très brièvement revenir sur un ou deux points et ensuite poser une question au Conseil d'Etat. Quand M. Béné - qui prétend avoir une large compétence dans le logement social - dit que les HBM sont vides, il devrait savoir qu'il y a deux mille demandes en liste d'attente pour les HBM. Si les logements de deux et trois pièces sont facilement repourvus, pour les quatre, cinq et six pièces, il y a un déficit que nous devons combler; c'est un élément extrêmement important.

Le deuxième point porte sur l'évaluation du nombre de squats dans le canton de Genève, dans d'autres cantons suisses ou dans d'autres villes européennes. Nous ne possédons pas de chiffres précis qui nous permettent de faire des comparaisons faciles, ce d'autant plus qu'il y a squats et squats. Il y en a de visibles, parce que médiatisés, qui défendent des idées politiques, sociales et culturelles. Par contre, bon nombre de squats sont occupés par des gens qui n'ont effectivement pas d'autres moyens pour se loger que d'investir des logements ou des espaces qui sont vides.

Enfin, à quoi sert le parlement, le législateur si ce n'est à faire des lois ? Monsieur Blanc, il est évident pour nous que le procureur doit faire appliquer la loi telle qu'elle existe. Mais la loi évolue au cours du temps; elle s'adapte à la société, et c'est le rôle du législateur de la faire évoluer. Vous savez comme moi, Monsieur Blanc, que l'esprit de la loi est parfois changé par les juristes eux-mêmes. Certains jugements rendus font jurisprudence et un texte de loi peut tout à coup prendre une orientation totalement opposée à ce que l'esprit du législateur avait voulu au départ.

Je pense que la première invite de cette motion est importante. En effet ce soir encore, vers 19 h, quatre policiers ont tenté une fois de plus de forcer et de casser la porte d'entrée de l'immeuble 5, Guillaume-Tell. Je demande au Conseil d'Etat s'il s'agissait pour la police de montrer que les habitants auraient mieux fait de ne pas quitter cet immeuble pour aller manifester ou si c'était simplement un acte symbolique pour montrer que leurs forces sont insuffisantes. C'est ce qui a été exprimé par la police et rapporté ce matin dans l'ensemble de la presse écrite et audiovisuelle.

Effectivement, on ne peut pas provoquer des escarmouches qui sont - comme le disait M. Ferrazino tout à l'heure - une manière idéale d'aggraver les tensions de l'ordre public au lieu de les calmer. C'est la véritable responsabilité - non plus de l'autorité judiciaire - mais de l'autorité exécutive de s'assurer que les mesures prises calment les tensions et maintiennent une sécurité publique dans notre cité.

M. Christian Grobet (AdG). Nous ne saurions admettre les propos trop fréquemment méprisants de M. Blanc à notre égard. Je tiens à dire que la motion que nous avons déposée ce soir est une motion collective de l'Alliance de gauche soutenue par d'autres formations politiques dans cette enceinte. Nous n'éprouvons aucun mépris, Monsieur Blanc, à l'égard de M. le procureur général, et vous le savez fort bien. Personnellement - je suis persuadé que c'est également le cas de mes collègues - j'ai le plus grand respect à l'égard d'un magistrat qui - vous l'avez souligné - a fait preuve de courage dans nombre d'affaires - qui est d'habitude effectivement critiqué d'une manière tout à fait discutable par des gens de votre bord politique.

J'aimerais aussi rappeler que M. le procureur général a été élu dans une des rares élections ouvertes du pouvoir judiciaire contre un candidat de votre parti. Peut-être est-ce la raison pour laquelle vous avez quelques grincements de dents lorsque vous vous exprimez à l'égard de M. Bertossa ! Nous ne les avons pas. Il ne s'agit pas du tout, Monsieur Blanc, d'exercer des pressions sur M. le procureur comme vous le prétendez. Le procureur n'agit pas comme un juge appelé à trancher. Notez que, dans notre régime démocratique, les juges trouvent parfaitement normal que les diverses parties s'expriment même avec vivacité et une totale franchise pour faire valoir leur point de vue, car un juge ne peut pas statuer sans, précisément, entendre l'avis des différentes personnes concernées. Et cela à plus forte raison quand le procureur général agit dans le cadre du pouvoir discrétionnaire qui est le sien, non pas en tant que juge mais en tant que magistrat bénéficiant d'un pouvoir d'opportunité pour décider si, effectivement, il doit faire intervenir ou non la force publique - car c'est cela dont il s'agit - pour exécuter une décision ou un jugement.

Or, Monsieur Blanc, vous siégez de longue date dans cette enceinte et vous ne pouvez pas ignorer que M. le procureur général, ou ses substituts, reçoit chaque semaine, durant une demi-journée, des représentants de locataires qui lui demandent de ne pas exécuter un jugement d'évacuation et essaient de le sensibiliser sur la situation personnelle de personnes qui devraient effectivement quitter leur logement en vertu d'un jugement qui est parfois totalement inique, en raison des conditions particulièrement draconiennes de notre législation suisse à l'égard des locataires. Je pense à la règle scélérate qui veut qu'un locataire qui n'a pas été en mesure de se mettre totalement à jour avec son loyer dans les trente jours n'a aucun moyen de défense contre une demande d'évacuation de son bailleur, même si, le trente-et-unième jour, il a payé le dernier franc de sa dette. Nous essayons d'assouplir quelque peu cette règle scélérate au Parlement fédéral. Nous sommes fiers qu'à Genève le procureur général écoute les représentants des locataires qui viennent plaider devant lui la cause de ceux qu'on essaie de mettre à la rue, parce qu'ils ont payé leur loyer un peu en retard.

Eh bien, oui, Monsieur Blanc, dans une certaine mesure, on peut admettre que l'avocat de l'Asloca qui défend de tels cas puisse faire pression sur le procureur général, en certaines circonstances. Je l'ai fait fréquemment et je m'en honore, comme je m'honore du fait que M. Bertossa et ses prédécesseurs aient refusé d'exécuter des jugements d'évacuation. Il est parfaitement logique et légitime que le parlement de cette modeste République puisse exprimer un avis et en donner les raisons à M. le procureur général, s'agissant du contexte particulier d'un immeuble d'habitation qui a été transformé en locaux, qui est resté vide, qui a fait l'objet d'une spéculation foncière évidente - puisqu'il a été racheté à l'encan par la banque qui a participé à la spéculation - et qui pourrait servir à réaliser une compensation en logements que l'on attend depuis plus de dix ans de la part d'une autre banque. Il est bien entendu que M. le procureur général en tiendra compte ou non, comme il le fait chaque fois que des citoyens s'adressent à lui pour lui demander de faire preuve d'humanité dans l'exécution d'une décision. (Applaudissements.)

Le président. Mesdames et Messieurs, il reste cinq orateurs inscrits. Le Bureau vous propose de clore la liste des orateurs, puis de passer au vote de l'amendement et de la motion.

M. Luc Gilly (AdG). Tout ou presque a été dit ce soir, mais je ne peux accepter en aucune façon le délire de M. Béné - le délire «bénien» - et le théâtre de M. Balestra. Vous avez fait preuve, ce soir, d'un mépris comme je l'ai rarement ressenti dans ce parlement. On dirait que ce problème est en train de surgir du néant alors que cela fait des mois, des années que l'on en discute. Des gens ont enfin décidé de vivre autrement en utilisant des locaux commerciaux. Je rappelle que ce bâtiment, 5, rue Guillaume-Tell, est vide depuis sept ans et que, pendant cette période, il a été chauffé et éclairé, simplement pour le maintenir dans un pseudo-état d'habitation. Je m'étonne que vous ne compreniez pas qui squatte qui !

Dans cette République, ce sont les 300 000 m2 de vide etde gris qui squattent. Ce ne sont pas les gens qui veulent apporter de la couleur, de la vie et de l'imagination dans des endroits - ne vous en déplaise, Mesdames et Messieurs - qui sont tout à fait habitables. Quoi qu'il arrive, dans le cas d'une éventuelle reprise économique, vous savez très bien que jamais, au grand jamais, dans les trente prochaines années, ces 300 000 m2 ne seront réaffectés à du tertiaire ou des bureaux; alors, il y aura d'autres occupations. Le problème nous occupe surtout pour le Saint Guillaume-Tell, mais sachez que le FLIC, c'est-à-dire le Front de libération des immeubles commerciaux, va continuer son travail, va continuer à vous demander d'être tolérants et de dialoguer autrement qu'en faisant des pitreries dans ce parlement.

Notre mission, c'est d'écouter la population qui nous a élus. La motion d'aujourd'hui essaie de répondre en partie à ce problème. Je me réjouis d'en discuter en commission et de ne plus entendre des paroles de mépris. Votons tout de suite cette motion. Je suis en tout cas très déçu que la droite ne puisse, à aucun moment, imaginer de céder ces 300 000 m2 qu'elle laisse vides. Votez le gris, nous voterons la couleur !

Le président. Vous nous proposez quelle commission, Monsieur Gilly ?

M. Luc Gilly. Je me laisse emporter, pardonnez-moi ! Mais M. Béné nous a déjà prodigieusement cassé les pieds sur l'aide au logement lundi dernier... Et il recommence aujourd'hui à dire des choses inadmissibles. Je ne demande pas le renvoi en commission, je demande le vote de la couleur et pas le vote du gris.

M. Pierre Ducrest (L). Puisqu'on a beaucoup parlé de la loi, de son respect, de son non-respect; puisqu'on parlé du procureur général, de la séparation des pouvoirs; puisque cette motion est adressée au Conseil d'Etat - et non au procureur général - et puisque tous les députés ici ont prêté serment aux lois de la République, nous voulons savoir ceux qui sont pour la loi ou contre la loi. Nous demandons donc le vote à l'appel nominal, sur le vote final, Monsieur le président.

Mme Myriam Sormanni (S). Un débat sur les squats et les lieux alternatifs aura lieu lundi 1er mars à 19 h 30 au parlement des jeunes de la Ville de Genève en présence de M. Ramseyer. C'est donc une ouverture au dialogue. Je voudrais ajouter - pour répondre à M. Béné - qu'avec la crise économique le chômage et la paupérisation constante de la population, les besoins en loyers HBM seront toujours plus d'actualité. Après sept ans d'inoccupation des locaux, un peu plus de rentrées financières ou un peu moins n'est sûrement pas une priorité pour le propriétaire du Guillaume-Tell.

M. Claude Blanc (PDC). Je voudrais revenir sur l'intervention de M. Grobet qui, avec son habileté et sa ruse coutumières, a essayé de retourner mes propos à son avantage concernant notre attitude à l'égard du procureur général élu, il est vrai, contre un candidat de mon parti. Mais, dès l'instant où M. Bertossa a été élu, nous l'avons considéré - tout comme vous - comme le procureur général de cette République, et nous le respectons en tant que tel. Certaines de ses prises de position nous paraissent quelquefois excessives, mais c'est l'idée qu'il se fait de sa mission, et nous le respectons, même si, parfois, cela nous embête un peu. Et nous n'aurions jamais l'idée d'essayer d'exercer des pressions sur lui.

Vous dites que M. le procureur général reçoit des gens qui viennent lui demander d'examiner avec mansuétude leur dossier; c'est tout à fait légitime et tout à fait à son honneur. Que des avocats le fassent aussi; c'est leur métier. Mais que le parlement - le pouvoir politique - essaie d'influencer le pouvoir judiciaire, c'était au bon temps de vos amis, quand ils régnaient sur certains pays et que le pouvoir politique dictait au pouvoir judiciaire ce qu'il devait faire. Demain, vous allez nous faire voter une résolution concernant le dénommé Öcalan. C'est vrai que dans certains pays, la justice est au service du pouvoir. C'est bien ce qui vous embête, car dans notre pays la justice n'est pas au service du pouvoir, mais vous voudriez quand même, puisque vous avez la majorité, exercer des pressions sur la justice. Ça, nous ne le voulons pas ! Voilà ce que je voulais vous dire.

M. Laurent Moutinot. Le débat a porté sur nombre de choses qui vont de la vie associative aux problèmes immobiliers, en passant par la séparation des pouvoirs et l'aviculture. Je vais essayer de trier quelque peu.

Le 5, rue Guillaume-Tell, est effectivement, à l'origine, un immeuble d'habitation. Il ressort des archives du département qu'en 1945 il était largement dévolu à des activités commerciales. En 1991, une requête a été déposée pour une transformation lourde de ce bâtiment. Cette requête a été prolongée, puis, ensuite, le requérant n'en a plus demandé la prolongation, et il n'existe, par conséquent, à ce jour, aucune autorisation en force d'effectuer des travaux dans cet immeuble.

Je suis obligé d'apporter une correction à l'exposé des motifs de la motion : il est exact que, lors d'une autorisation délivrée pour la transformation de bâtiments en faveur de la Banque populaire suisse, une condition imposait à cette banque de recréer du logement dans le quartier de Saint-Gervais. En 1993, le chef du département avait alors invité la Banque populaire suisse à participer, en lieu et place d'une construction impossible, à une opération au 5, rue des Etuves et non pas au 5, rue Guillaume-Tell, opération qui ne s'est en définitive pas réalisée.

En revanche, en 1994, reprenant l'idée d'une intervention de la banque dans une opération de rénovation plutôt que la contrainte d'édifier des logements, M. Joye a considéré comme réalisée la condition posée à l'égard de la BPS par l'intervention de la banque sur les immeubles 1, rue des Etuves et 3, place Grenus portant sur quatre-vingts pièces de logement. A la suite de toute une série de recours et de péripéties, le chantier s'est ouvert en avril 1998. En ce qui concerne la banque elle-même, la condition qui avait été posée doit être considérée comme réalisée. Cela n'enlève rien au fait que l'immeuble 5, rue Guillaume-Tell est, à l'origine, un immeuble de logement et qu'il a été vide trop longtemps.

Dans les différentes invites que vous adressez au Conseil d'Etat, un certain nombre concernent directement le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, certaines concernent d'autres autorités. Il s'agit, dans ce débat démocratique, que les uns et les autres fassent entendre leur point de vue. Je ne peux pas, quant à moi, imaginer d'exiger du procureur général quoi que ce soit. Je pourrais en revanche - et je l'ai déjà fait - m'entretenir avec lui sur ce dossier en essayant de trouver une solution raisonnable.

Je crois qu'il faut distinguer sur le fond la question des 300 000 m2 de surface vide, qui pose un problème de nature politique, sociale, financière, économique, architecturale, juridique et d'aménagement, de la situation des squatters, ne serait-ce que pour une raison de chiffres toute simple : il y a un peu plus d'un millier de squatters et 300 000 m2 de surface vide. Les deux problèmes ne se situent manifestement pas au même niveau. L'un et l'autre doivent mériter notre attention. L'un nous est signalé par l'autre peut-être, mais on ne peut pas les traiter de la même manière, ni surtout ensemble, puisque précisément la question des squatters, délicate, compliquée - en raison de la différence des squats - n'a pas de rapport fondamental avec la question des locaux vides.

Le département organise chaque année une ou deux journées forum sur le logement. J'avais prévu d'en organiser une, en octobre 1999, sur ces questions de locaux vides. Compte tenu de l'actualité, cette rencontre a été avancée au 26 mars. Vous avez reçu une invitation à ce forum où il ne sera, encore une fois, pas question des squats ou de la séparation des pouvoirs, mais bien d'examiner comment nous pouvons intervenir sur ces surfaces vides. Je remercie celles et ceux d'entre vous qui m'ont permis d'organiser cette journée en acceptant d'y participer.

A partir de ce débat, nous devons arriver à trouver une solution pour ces surfaces. Elles posent beaucoup plus de problèmes que l'on peut imaginer : faut-il affecter, définitivement ou provisoirement, ces surfaces vides à une nouvelle destination ? Si c'est définitif, il peut y avoir contradiction avec le régime des zones. Si c'est provisoire, personne ne va vouloir investir. En matière architecturale, va-t-on faire des lofts, admirables et fort chers, dans des usines désaffectées ? Ou va-t-on les réserver à du logement social hors de prix ? Nous voulons nous attaquer à ce genre de questions et les traiter durant cette rencontre. La journée sera probablement trop courte, et elle devra être suivie d'un certain nombre de mesures.

Mesdames et Messieurs les députés, tous les orateurs ont exprimé d'une manière simple - je crois avec franchise et sincérité - leur vision de ces nombreux et différents problèmes. Je vous ai donné mon point de vue. En ce qui concerne cette motion, un certain nombre d'éléments sont manifestement envisageables, notamment lorsqu'il m'est demandé de respecter la loi, d'autres sont un petit peu plus délicats et, par conséquent, vous me permettrez de m'abstenir de me prononcer dans le détail sur la totalité des invites.

Le président. Je mets aux voix l'amendement de Mme Sormanni qui consiste à ajouter à la motion une troisième invite ainsi formulée :

«- à faciliter les négociations entre le propriétaire et les squatters.»

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Le président. Nous passons au vote sur la motion pour lequel l'appel nominal a été demandé par M. Ducrest. (Appuyé.)

Celles et ceux qui acceptent cette motion répondront oui, et celles et ceux qui la rejettent répondront non.

Cette motion ainsi amendée est adoptée par 45 oui contre 36 non.

Ont voté oui (45) :

Esther Alder (Ve)

Charles Beer (S)

Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)

Dolorès Loly Bolay (AG)

Anne Briol (Ve)

Christian Brunier (S)

Fabienne Bugnon (Ve)

Nicole Castioni-Jaquet (S)

Pierre-Alain Champod (S)

Bernard Clerc (AG)

Jacqueline Cogne (S)

Jean-François Courvoisier (S)

Pierre-Alain Cristin (S)

Anita Cuénod (AG)

Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)

Régis de Battista (S)

Jeannine de Haller (AG)

René Ecuyer (AG)

Alain Etienne (S)

Laurence Fehlmann Rielle (S)

Christian Ferrazino (AG)

Magdalena Filipowski (AG)

Luc Gilly (AG)

Alexandra Gobet (S)

Gilles Godinat (AG)

Mireille Gossauer-Zurcher (S)

Marianne Grobet-Wellner (S)

Christian Grobet (AG)

Dominique Hausser (S)

Antonio Hodgers (Ve)

Georges Krebs (Ve)

René Longet (S)

Louiza Mottaz (Ve)

Danielle Oppliger (AG)

Rémy Pagani (AG)

Véronique Pürro (S)

Jean-Pierre Restellini (Ve)

Elisabeth Reusse-Decrey (S)

Albert Rodrik (S)

Martine Ruchat (AG)

Christine Sayegh (S)

Françoise Schenk-Gottret (S)

Myriam Sormanni (S)

Pierre Vanek (AG)

Alberto Velasco (S)

Ont voté non (36) :

Bernard Annen (L)

Michel Balestra (L)

Florian Barro (L)

Luc Barthassat (DC)

Jacques Béné (L)

Janine Berberat (L)

Madeleine Bernasconi (R)

Claude Blanc (DC)

Nicolas Brunschwig (L)

Marie-Françoise de Tassigny (R)

Gilles Desplanches (L)

Hervé Dessimoz (R)

Jean-Claude Dessuet (L)

Hubert Dethurens (DC)

Daniel Ducommun (R)

Pierre Ducrest (L)

John Dupraz (R)

Henri Duvillard (DC)

Marie-Thérèse Engelberts (DC)

Pierre Froidevaux (R)

Philippe Glatz (DC)

Nelly Guichard (DC)

Janine Hagmann (L)

Bernard Lescaze (R)

Armand Lombard (L)

Pierre Marti (DC)

Jean-Louis Mory (R)

Geneviève Mottet-Durand (L)

Jean-Marc Odier (R)

Barbara Polla (L)

Stéphanie Ruegsegger (DC)

Louis Serex (R)

Walter Spinucci (R)

Micheline Spoerri (L)

Pierre-François Unger (DC)

Olivier Vaucher (L)

Personne ne s'est abstenu

Etaient excusés à la séance (9) :

Roger Beer (R)

Bénédict Fontanet (DC)

Jean-Pierre Gardiol (L)

Claude Haegi (L)

Michel Halpérin (L)

David Hiler (Ve)

Yvonne Humbert (L)

René Koechlin (L)

Pierre Meyll (AG)

Etaient absents au moment du vote (9) :

Thomas Büchi (R)

Juliette Buffat (L)

Christian de Saussure (L)

Erica Deuber-Pauli (AG)

Alain-Dominique Mauris (L)

Chaïm Nissim (Ve)

Jean-Claude Vaudroz (DC)

Pierre-Pascal Visseur (R)

Salika Wenger (AG)

Présidence :

Jean Spielmann, président

Elle est ainsi conçue :

Motion

(1260)

sur la réaffectation de l'immeuble, 5, rue Guillaume-Tell, à du logement

Vu la motion pour une réaffectation des logements vides et des locaux inoccupés adoptée par le Grand Conseil dans sa séance des 3 et 4 décembre 1998 ;

Attendu que la Banque Populaire Suisse a bénéficié en 1985 de la transformation en bureaux de logements situés dans un ancien immeuble, localisé entre le quai des Bergues et la rue des Etuves, portant sur une quarantaine de pièces ;

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvepar ces motifs

invite le Conseil d'Etat

à exiger que l'immeuble, 5, rue Guillaume-Tell, soit réaffecté à du logement pour les motifs exposés ci-dessus et à surseoir dans l'immédiat à toute évacuation de celui-ci ;

à demander au DAEL de refuser toute autorisation de transformer des locaux qui pourraient répondre aux conditions de l'article 15 alinéa 6 LDTR soumis à l'approbation du Grand Conseil et de veiller à ce que des logements situés au centre ville ne soient pas convertis en bureaux, vu la pénurie de logements dans ce secteur à la suite de la transformation (souvent illégale) de très nombreux appartements en bureaux durant les années soixante et septante au centre ville qui a été ainsi vidé de ses habitants.

à faciliter les négociations entre le propriétaire et les squatters.

 

La séance est levée à 23 h 50.