Séance du
jeudi 17 décembre 1998 à
17h
54e
législature -
2e
année -
2e
session -
56e
séance
M 1239
EXPOSÉ DES MOTIFS
La Banque cantonale a misé sur la gestion de fortune pour favoriser le développement de ses activités bancaires. Dans son rapport annuel, elle met en avant les résultats très favorables qu'elle a obtenus, selon elle, "; grâce aux conditions exceptionnelles qui ont régné durant l'année 1996 sur la plupart des marchés de valeurs ". La BCG a racheté l'intégralité du capital-actions de la Banque Anker et a pris une participation de 40 % dans la Compagnie Bancaire Genève SA, afin de renforcer sa position dans la gestion privée.
D'autre part, dans les opérations hors bilan consolidées de la BCG, figurent les instruments financiers dérivés pour un montant de près de 2 milliards de francs au 31 décembre 1997 (3 milliards au 31 décembre 1998).
On sait que les instruments dérivés présentent des risques importants et la gestion de fortune fait partie de ce qu'on appelle les "; gros risques " dans l'activité bancaire. Les pertes importantes subies ces derniers jours par l'UBS dans le cadre de placements à risques, comme l'effondrement de certains marchés et les graves perturbations de la bourse, démontrent que des opérations à risques peuvent mettre en péril l'équilibre financier d'une banque.
Un administrateur de la BCG ayant déclaré que celle-ci n'avait pas les spécialistes aptes à s'occuper des produits dérivés, dont la gestion serait confiée à des tiers, nous sommes amenés à demander au Conseil d'Etat quelles sont les structures de gestion des gros risques de la banque et de contrôle des opérations y relatives qui ont été mises en place pour maîtriser le mieux possible de tels risques et répondre aux exigences de l'ordonnance fédérale concernant l'appréciation des risques de marché, ainsi qu'aux directives en la matière de la Commission fédérale des banques.
Débat
M. Christian Grobet (AdG). Nous avons déposé cette motion suite aux inquiétudes - comme nous avons déjà eu l'occasion de le dire - que nous éprouvions au sujet de la diversification des activités de la Banque cantonale. Depuis qu'elle existe, elle a acquis un certain nombre de banques successivement, la dernière en date étant la Banque Cantrade, dans le canton du Tessin, car elle veut développer ses activités en matière de gestion de fortune, domaine qu'elle estime plus rentable que les activités traditionnelles de la banque. Certes, la gestion de fortune peut être intéressante pour une banque et lui offrir des occasions de gains importants dans le cadre d'activités boursières. Mais ces activités peuvent aussi entraîner des pertes importantes, même pour des banques extrêmement expérimentées, comme des grandes banques suisses, je pense notamment à l'UBS qui a connu récemment des pertes catastrophiques dans le domaine de certaines activités bancaires.
Et la Banque cantonale n'a certainement pas la même expérience que des banques qui s'occupent de telles activités depuis de nombreuses années. Nous sommes donc d'autant plus étonnés par l'ampleur des acquisitions bancaires faites par la Banque cantonale, notamment des établissements relativement éloignés de Genève, comme la Banque Cantrade au Tessin. Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls - je m'empresse de le dire - à nous inquiéter de cette situation. Une de ces banques n'est contrôlée qu'à 40% par la Banque cantonale, mais si cette banque, qui a des succursales jusqu'à Curaçao, devait connaître des déboires, nul doute que c'est la Banque cantonale qui devrait intervenir.
A cela s'ajoute le fait que la Banque cantonale s'est lancée dans des opérations financières dérivées. Un administrateur de la Banque cantonale a même relevé que la banque n'avait pas, au sein de son personnel, de spécialistes capables de s'occuper de ce genre d'activités, qui étaient donc sous-traitées à l'extérieur.
Bref, devant l'ampleur prise par ces activités - du reste, dans son dernier rapport trimestriel, la Banque cantonale a tout d'un coup relevé que les activités de gestion de fortune étaient nettement moins profitables pour le troisième trimestre de cette année - nous estimons qu'il convient que le Conseil d'Etat obtienne un rapport de la Banque cantonale sur les structures de contrôle mises en place par elle, par rapport à ce que l'on appelle, dans le jargon bancaire, «les opérations à gros risques».
Après les pertes importantes subies par la Banque cantonale pour des opérations à faibles risques - qui entraient dans ses activités traditionnelles d'octroi de prêts hypothécaires où, normalement, grâce à une estimation correcte du gage immobilier, on se prémunit de pertes éventuelles, mais qui ont tout de même nécessité de provisionner plus d'un milliard de francs et de recourir à plus d'une centaine d'opérations de portage, dont on ne sait du reste pas dans quelle mesure elles sont correctement répercutées dans le bilan de la banque - nous estimons qu'il est nécessaire d'avoir une information sur les précautions qui sont prises par la Banque cantonale en ce qui concerne les opérations à gros risques dans lesquelles elle s'est engagée.
Mme Dolores Loly Bolay (AdG). Comme vient de le dire M. Grobet, la Banque cantonale diversifie ses activités - on l'a vu - dans le négoce international, la gestion de fortune et les produits dérivés.
Je vais me limiter principalement aux produits dérivés, qui sont un monde en soi. Ces nouveaux marchés ont bouleversé les divisions commerciales des banques depuis quelques années. Mais que sont les produits dérivés ? Rassurez-vous, je ne suis pas du tout une spécialiste des produits dérivés ! Par contre, je sais que ces produits ont été inventés par les Américains au début du siècle et que c'était un moyen d'éviter les risques, notamment pour protéger le prix du blé, entre autres. Or, aujourd'hui, ces produits ont été totalement détournés de leur but d'origine et sont devenus des instruments de haute spéculation avec des effets qui peuvent nuire et mettre en danger l'économie.
Les produits dérivés sont des instruments financiers dont la valeur est déduite d'une grandeur de base. Celle-ci peut être le prix d'une action ou le cours d'une certaine monnaie. Avec ces produits, on peut certes gagner énormément d'argent, mais on peut perdre des sommes encore plus colossales. Compte tenu de la complexité de ces produits il faut non seulement avoir les spécialistes - n'importe quel employé de banque ne peut pas s'occuper des produits dérivés : les «pros» des produits dérivés sont en général des mathématiciens, des statisticiens et parfois même des docteurs en physique nucléaire, c'est dire la complexité de ces produits - mais il faut surtout, et c'est là que le bât blesse, avoir une structure de contrôle, appelée le «risk management» par les spécialistes. C'est précisément ce manque de structure de contrôle qui a fait défaut à la défunte Baring. Souvenez-vous de cette banque anglaise qui a fait faillite et, plus près de nous, de l'UBS qui a perdu un milliard de nos francs, dont une grande partie est imputée aux produits dérivés, ce qui a provoqué la fusion de l'UBS et de la SBS avec les conséquences que l'on connaît, c'est-à-dire des milliers d'emplois perdus.
Cela nous amène à poser les questions suivantes :
- La Banque cantonale a-t-elle mis en place une structure de contrôle, le «risk management» ?
- Les personnes qui traitent ces produits dérivés sont-elles à la hauteur ?
- Nous aimerions connaître le coût de cette structure ou de cette sous-traitance, sachant que par exemple l'un des «pros» qui traitait les produits dérivés à l'UBS avait touché en 1996 un bonus de 15 millions de francs.
C'est la raison pour laquelle vous devez approuver cette motion, ce dont je vous remercie.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'est plus demandée... Excusez-moi, Monsieur Balestra, vous avez la parole !
M. Michel Balestra (L). Monsieur le président, j'ai l'impression que ce soir vous vouliez me censurer, mais je me battrai pour pouvoir exprimer mon opinion...
Décidément la Banque cantonale genevoise n'aura jamais la distance nécessaire avec la politique pour conduire sa stratégie de développement avec la liberté et la sérénité indispensables à un établissement commercial.
La population genevoise que vous représentez par délégation vous a dit clairement, par deux fois, qu'elle avait confiance dans les organes de direction ; qu'elle avait confiance dans les organes de gestion ; qu'elle avait confiance dans les organes de surveillance de la banque et qu'elle ne voulait pas la politiser.
Vous n'avez pourtant jamais - c'est encore le cas ce soir - économisé les annonces apocalyptiques et les milliards prétendument dilapidés pour gagner la majorité à votre cause ou à vos fantasmes... Contre notre avis, vous avez créé une commission ad hoc. Vous êtes allés vous ridiculiser jusqu'à Berne... Et vous lancez aujourd'hui une motion supplémentaire dont l'invite est aussi creuse que le contenu de vos attaques !
Mesdames et Messieurs les députés, nous vous avons déjà expliqué que, pour éviter des drames comparables à ceux qui ont eu lieu dans d'autres cantons, nous avons voulu faire de la Banque cantonale une banque commerciale efficace, mise sous le contrôle de la Commission fédérale des banques, à laquelle vous vous référez dans l'exposé des motifs de votre motion. Mise sous le contrôle de la Commission fédérale des banques, disais-je, comme l'ensemble de ses concurrents bancaires au niveau national. Et nous avons décidé de couper le cordon ombilical entre cette entreprise et la politique. Dès lors, pourquoi lui reprocher d'élargir le cadre de ses compétences ?
Mesdames et Messieurs, la Suisse est une place financière enviée dans le monde entier. La gestion de fortune représente un secteur d'excellence. Les autorités professionnelles qui la réglementent ont prouvé leurs compétences. Toutes les commissions, tous les organes politiques, tous les «machins-bidules» que vous pourrez inventer - je dois reconnaître que si vous n'avez pas plus d'une dizaine d'idées fortes, vous disposez d'une imagination sans borne pour animer de multiples débats et pendant des heures, toujours sur les mêmes idées - au sujet du contrôle de la Banque cantonale, n'amélioreront pas d'un iota la qualité de ce dernier. Au contraire, ils créeront le trouble sur son image, ce qui est regrettable.
Mesdames et Messieurs, nous avons besoin de cette banque, nous l'avons voulue, nous lui avons confié une mission, nous lui faisons confiance, nous sommes fiers de constater qu'elle est capable de se diversifier, nous sommes certains qu'elle va continuer sa progression commerciale sur le marché genevois. Pourtant et malgré tout, par principe et bien que votre motion soit insignifiante sur le fond, qu'elle n'ait aucune importance ni aucune utilité, nous appuierons son renvoi à la commission d'enquête Banque cantonale.
Mme Micheline Calmy-Rey. Le Conseil d'Etat est tout à fait d'accord avec les propositions qui ont été faites de renvoyer cette motion en commission.
M. Christian Grobet (AdG). Nous pensons, puisque M. Balestra désire raccourcir les débats, que cette motion peut effectivement et directement être renvoyée au Conseil d'Etat. Par contre, si nous décidons de la renvoyer en commission, il ne faut en tout cas pas la renvoyer à la commission d'enquête - ce ne serait pas raisonnable - qui a été chargée d'examiner deux cas particuliers, mais peut-être à la commission de l'économie, ou à une autre.
M. Claude Blanc (PDC). Mme Calmy-Rey essaie de dégager en corner avec beaucoup de maladresse ! Mais, en fait, elle se marque un autogoal ! Elle a mal visé. En effet, pour éviter de répondre à cette motion, elle préfère qu'elle soit renvoyée en commission.
Madame, il faut prendre vos responsabilités ! Vous jouez toujours sur deux tableaux : être d'accord avec le Conseil d'Etat et, à la fois, avec l'Alliance de gauche ! Alors, une fois pour toutes, prenez vos responsabilités, acceptez cette motion et répondez-y, si vous pouvez !
M. Bernard Annen (L). Contrairement à ce qu'a dit M. Grobet, je crois que cette motion peut être renvoyée à la commission ad hoc, dans la mesure où nous allons prochainement recevoir les responsables de la Banque cantonale et où nous pourrons leur soumettre l'invite de cette motion.
A mon sens, il me semble donc tout à fait normal d'envoyer cette motion à la commission ad hoc d'enquête - enquête, pas enquête, je crois qu'il ne faut pas jouer sur les mots. Il me semble au contraire qu'il est tout à fait possible de leur poser cette question. Maintenant, si vous voulez enliser les débats, enlisez-les... Moi, j'attire simplement votre attention sur le fait que chaque fois qu'on parlera de la Banque cantonale dans les termes dans lesquels on en parle, cela lui fera du tort, à elle mais aussi à Genève, et chacun prendra ses responsabilités.
Mme Erica Deuber-Pauli (AdG). En temps que membre de la commission ad hoc, je souligne en effet que cette commission a beaucoup de peine à définir un objectif et des moyens d'action - vous comprendrez aisément pourquoi, puisque tout contrôle de la banque est soumis au secret - que nous nous sommes engagés très clairement à n'examiner que les deux cas pour lesquels cette commission a été mise en place, en l'occurrence l'affaire Stäubli et l'affaire Gaon, et que nous nous autoriserons à aborder les problèmes des sociétés de portage.
Si vous voulez renvoyer n'importe quoi dans cette commission, vous aggraverez encore... (Remarques et rires.) Cette motion demande quelque chose de tout à fait précis qui n'a rien à faire avec les trois directions que la commission ad hoc s'est imposées, par mandat de cette assemblée.
Je vous demande donc soit de la renvoyer directement au Conseil d'Etat, soit de la faire examiner par la commission de l'économie.
M. Albert Rodrik (S). Je crois qu'un certain nombre de préopinants l'ont dit : si on veut que la commission d'enquête devienne soit un bateau qui coule soit un cirque, on peut lui renvoyer une motion tous les jours.
Ce n'est pas un jugement de valeur sur la motion elle-même, mais, au bout d'un moment, il faut savoir ce qu'on veut...
Pour finir, Monsieur Annen, vous allez accréditer l'idée que tout ce que fait la Banque cantonale mérite d'aller à la commission d'enquête, ce que nous ne voudrions en tout cas pas.
Deuxième chose, Monsieur Blanc : si quelqu'un dans cette République a commencé à prendre des responsabilités, c'est Mme Calmy-Rey. Alors, vous auriez mieux fait de vous taire ! (Applaudissements.)
Une voix. Rodrik, au pouvoir !
M. Albert Rodrik. Je n'ai pas fini !
Troisième chose : si cette motion doit être renvoyée quelque part, c'est au Conseil d'Etat.
Et, en fin de compte, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je me demande pourquoi il faudrait nous préoccuper seulement de la Banque cantonale. Un militant de gauche vous dit : préoccupons-nous de savoir ce que toutes les banques de ce canton font dans les domaines à risques, car elles mettent aussi l'épargne en danger !
Une voix. Ne vous énervez pas !
Mme Micheline Calmy-Rey. Je suis vraiment désolée que mes propos aient pu susciter un pareil débat et être interprétés de cette façon. Mon intention était seulement de vous faire plaisir.
Le Conseil d'Etat était prêt à accepter le renvoi de cette motion en commission, comme vous le désiriez, mais, bien évidemment, il est prêt à accepter votre motion si vous désirez la lui renvoyer directement.
M. Michel Halpérin (L). D'abord, je ne voudrais pas manquer de saluer l'exploit de M. Rodrik, qui est vraiment exquis lorsqu'il vole au secours de notre responsable des finances et de la banque... (L'orateur est interpellé.) Mais je ne parle pas de la banque en ce moment, je parle de la proposition de motion de M. Grobet ! M. Grobet vous propose une motion qu'il a développée tout à l'heure et il vous demande, ensuite, de ne pas la renvoyer à la seule commission où il serait naturel de la renvoyer.
Alors, j'y vois une de ces manifestations si symptomatiques de son désir d'essaimer partout, avec cette espèce de cancer de la Banque cantonale qu'il répand ! Monsieur Grobet, c'est une manifestation très intéressante, parce qu'elle démontre que votre intention n'est pas vraiment de savoir quels sont les problèmes de la banque, si elle en a, mais uniquement de savoir comment vous pouvez lui faire du tort !
Cela étant dit, j'entends qu'une proposition d'amendement de M. Rodrik voudrait modifier le texte, spécifiant qu'il faut un rapport sur les structures de contrôle mises en place par la BCG et par les autres établissements genevois... Alors, moi, je vous propose de créer une commission ad hoc pour l'examen de l'ensemble des problèmes de gros risques de l'ensemble de la place financière genevoise. Ainsi nous aurons deux commissions ad hoc parallèles, ce qui permettra à chacune de fonctionner selon ses règles propres, dans le respect du désir exprimé par Mme Deuber qui n'a apparemment pas très envie que la commission fasse son travail !
M. Claude Blanc (PDC). Je n'aime pas beaucoup la manière dont M. Rodrik se permet de donner des leçons aux autres, en leur signifiant ce qu'ils peuvent dire ou non... (Exclamations et rires.) Moi, Monsieur le président, je vous rappelle, puisqu'on parle de la commission d'enquête sur la Banque cantonale qui est chargée d'examiner les cas Gaon et Stäubli, que la Banque cantonale a hérité du cas Gaon de la Caisse d'épargne, dans laquelle M. Rodrik était membre du conseil d'administration. Or, on le voit apparaître dans la commission d'enquête... Alors, puisqu'il veut donner des leçons aux autres, eh bien, je vais lui demander comment il conçoit l'éthique dans ce cas de figure !
M. Christian Grobet (AdG). Je ne répondrai pas à M. Blanc qui est, lui, un donneur de leçons invétéré, mais j'aimerais quand même que M. Halpérin fasse preuve d'un peu de retenue. En effet, Monsieur, l'autre jour, vous représentiez la Banque cantonale - est-ce faux ? - dans une affaire de procédure judiciaire au Palais de justice...
Des voix. Et alors !
M. Christian Grobet. Eh bien, je trouve un peu gênant qu'un avocat se permette de parler de son client en séance plénière, c'est tout ! Cela étant dit... (L'orateur est interpellé.) C'est vrai qu'ils ont l'habitude, sur les bancs d'en face, de s'exprimer sur des affaires dans lesquelles ils sont partie prenante !
Nous n'acceptons pas d'être accusés, chaque fois que nous demandons des explications, de vouloir couler telle ou telle entreprise. Nous avons fait preuve, nous l'avons déjà dit, de retenue en ce qui concerne ce qu'il y a, hélas, lieu d'appeler les importants déboires de la Banque cantonale. Et je ne crois pas, Monsieur Balestra, que nous nous sommes ridiculisés d'une quelconque manière en nous rendant à Berne, parce qu'il a été, au contraire, intéressant d'apprendre - mais vous n'y étiez pas - que la Commission fédérale des banques admet expressément que le canton peut instituer des organes de contrôle internes ou externes pour une banque cantonale. (L'orateur est interpellé.) Parfaitement, Monsieur, c'était tout à fait clair. J'ai du reste posé la question plusieurs fois, et nous aurons l'occasion d'en débattre à nouveau, soyez-en certain !
Il est légitime de demander des explications, lorsque nous sommes en présence d'une corporation de droit public ou lorsque des fonds publics importants sont engagés dans une entreprise. S'agissant de la SWA, sujet sur lequel nous aurons l'occasion de revenir, nous avions également formulé des réserves. Du reste, nos représentants au Conseil municipal de la Ville ont refusé le vote d'un crédit au profit de cette compagnie aérienne, parce que, dès le début, nous étions convaincus du peu de sérieux de cette opération. A vrai dire, il est aujourd'hui démontré que nous aurions dû, sur tous les bancs de ce Grand Conseil, être plus attentifs et plus curieux sur ce qui se passait dans cette entreprise qui a causé d'importantes pertes, non seulement à des collectivités publiques mais également à l'économie locale.
Le but n'est pas d'accuser qui que ce soit ici. Nous avons posé des questions de portée générale, car, que vous le vouliez ou non, les opérations à gros risques ont occasionné pour certaines banques - Mme Loly Bolay l'a très bien rappelé tout à l'heure - des pertes importantes, voire des faillites. Il me semble que nous sommes tout de même en droit de demander- cela me semble élémentaire - quelles sont les mesures de précaution prises par la Banque cantonale dans ce domaine. A un moment donné, il vaut mieux poser des questions à titre préventif que de jouer aux pompiers comme dans le cas de la SWA, par exemple.
M. Claude Blanc (PDC). Comme à son habitude M. Grobet fantasme, ou plutôt il ment !
J'étais à Berne avec plusieurs de nos collègues, où il nous a été dit, textuellement, que la Commission fédérale des banques avait seule le contrôle de la Banque cantonale et que si nous voulions le lui reprendre nous devrions voter une loi, mais que cette loi deviendrait bientôt inopérante parce que les Chambres fédérales, elles, sont en train d'en voter une qui attribuera définitivement et exclusivement le contrôle des banques cantonales à la Commission fédérale des banques.
Alors, que M. Grobet prenne ses désirs pour des réalités, c'est une chose, mais qu'il essaye d'endormir le Grand Conseil, c'en est une autre ! Arrêtez ! Nous verrons bien comment la commission d'enquête pourra terminer ses travaux et ce qu'elle obtiendra. Mais je serais tout de même curieux de savoir - c'est pour cela que je suis d'accord de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat - ce que pourra dire concrètement Mme Calmy-Rey à ce sujet, elle qui fait toujours semblant de vous écouter... C'est une expérience intéressante et je l'attends au virage !
M. Michel Halpérin (L). C'est curieux comme il est parfois difficile de se faire comprendre...
M. Balestra a longuement dit tout à l'heure pourquoi il estimait que cette proposition de motion relevait d'une guérilla contre la BCG. Mais il a également expliqué la raison pour laquelle nous acceptions qu'elle soit examinée. Et ensuite M. Grobet revient nous expliquer très longuement pourquoi il estime que cette motion pose les bonnes questions.
Puisque nous étions d'accord que cette proposition de motion soit examinée, je ne vois pas pourquoi vous éprouvez le besoin de troubler et de brouiller le débat en disant que vous voulez qu'elle soit examinée, mais pas à la commission qui précisément examine les problèmes concernant la BCG. Vous faites une démarche en zigzag, ce qui vous ressemble et ne m'étonne guère...
C'est un peu comme lorsque vous essayez de jeter le trouble sur la portée de mes interventions, alors que je n'ai pas dit un mot de la banque, ni des critiques qui lui sont adressées. Mais vous, Monsieur Grobet, qui êtes un gardien si attentif de nos bonnes moeurs éthiques dans cette enceinte, à propos de l'article 24, je vous ferai remarquer qu'à ma connaissance vous êtes membre de la commission ad hoc qui examine notamment le dossier Gaon dont vous êtes probablement le meilleur connaisseur de la République - je crois que vous l'avez un peu traité quand vous étiez chef du département... - que votre secret de fonction a été malmené, semble-t-il, à une ou deux autres occasions que le Palais de justice a déjà eu à connaître, et que, par conséquent, vous devriez, à un moment ou à un autre, vous interroger sur votre propre aptitude à siéger dans cette commission !
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Alberto Velasco (S). Je trouve tout de même un peu gênant que des membres de cette commission d'enquête, tenus en principe à la confidentialité, se permettent de donner des informations en séance plénière. En effet, on vient d'apprendre que ses membres se sont rendus à Berne ; qu'elle va bientôt recevoir la Banque cantonale... (Remarques et rires.) En tout cas ce n'est pas nous qui avons divulgué ces informations ici !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, beaucoup d'entre vous m'ont demandé de ne pas finir trop tard demain soir. Il est ridicule de perdre tant de temps... Essayez d'être plus efficaces, ce sera une bonne chose pour tout le monde ! Monsieur Velasco, poursuivez !
M. Alberto Velasco. Un peu plus de retenue de la part de certains députés, siégeant dans une commission qui devrait rester confidentielle, serait souhaitable.
M. Albert Rodrik (S). Je voudrais simplement confirmer que je n'avais pas de proposition d'amendement à faire. J'ai simplement eu un trait d'humour, mais probablement le sujet ne s'y prête-t-il pas... C'est tout.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en présence de deux propositions, mais la proposition de renvoi en commission primant, je soumets à vos suffrages le renvoi de cette motion à la commission ad hoc, si j'ai bien compris.
Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion à la commission d'enquête «Banque cantonale de Genève» est rejetée.
Mise aux voix, cette motion est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1239)
sur les opérations à gros risques de la Banque cantonale
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
invite le Conseil d'Etat
à lui présenter un rapport sur les structures de contrôle mises en place par la BCG par rapport aux opérations à gros risques de la banque.