Séance du
vendredi 12 juin 1998 à
17h
54e
législature -
1re
année -
9e
session -
28e
séance
M 1214
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- la persistance de la récession dans les métiers du bâtiment ;
- le rythme insuffisant d'entretien et de rénovation du domaine bâti privé ;
- la perte de substance des bâtiments et l'existence d'installations obsolètes ;
- les efforts entrepris en faveur des économies d'énergie et du développement des énergies renouvelables ;
- le quasi échec enregistré à Genève par le programme fédéral Energie 2000 pour l'encouragement aux investissements privés dans le domaine de l'énergie ;
- la nécessité d'offrir des possibilités de formation et de perfectionnement professionnels à forte valeur ajoutée ;
invite le Conseil d'Etat
- à rechercher sans délai, avec tous les partenaires concernés, les raisons pour lesquelles le bonus fédéral à l'encouragement aux investissements privés n'a quasiment pas été utilisé dans notre canton ;
- à entreprendre une étude pour déterminer l'impact des législations et réglementations sur l'effet des mesures de relance fédérales et cantonales à Genève, étude qui, le cas échéant, pourrait être confiée à la Commission d'évaluation des politiques publiques ;
- à soumettre le résultat de ces recherches à tous les partenaires intéressés, de façon à développer une véritable stratégie d'incitation pour économiser l'énergie et développer les énergies renouvelables dans le domaine bâti ;
- à adapter, le cas échéant, la législation, la réglementation et les pratiques des autorités qui pourraient faire obstacle aux mesures d'incitation fédérales et cantonales en la matière.
EXPOSÉ DES MOTIFS
En dépit de toutes les mesures qui ont été prises en Suisse et à Genève, les métiers du bâtiment se trouvent encore dans une situation difficile. La branche s'est restructurée et assainie. Toutefois, la demande reste trop faible pour permettre aux entreprises et aux artisans performants de se maintenir sur un marché dominé par une concurrence débridée. Malgré la récession, les entreprises de la construction ont augmenté leur effort en faveur de la relève et du perfectionnement professionnel (hausse de plus de 30 % des places d'apprentissage depuis 5 ans). Si les effectifs continuent de diminuer (ils ont passé de 20 000 à 9 500 en 8 ans), plusieurs professions n'auront bientôt plus les capacités suffisantes pour maintenir les connaissances et le savoir-faire nécessaires à l'entretien du domaine bâti.
Ce sont précisément les buts que poursuivait le programme de relance voté par les Chambres fédérales en avril 1997 en allouant un crédit de 64 millions pour encourager les investissements privés, pour économiser l'énergie et favoriser l'utilisation d'énergies renouvelables dans le domaine. Ces mesures, réclamées à grands cris par les cantons romands connaissant les taux de chômage les plus élevés, visaient à favoriser les économies d'énergie et surtout à contribuer à la création d'emplois qualifiés dans la construction.
Or, il faut déchanter. Selon une information transmise par l'Office cantonal de l'énergie (OCEN), Genève n'a utilisé que 1,5 millions de francs, soit environ 2,3 % du montant total mis à disposition par la Confédération. Il est intéressant de constater que ce sont les cantons connaissant le taux de chômage le plus élevé qui ont en général le plus mal utilisé ce bonus fédéral. Avec le Jura, Genève obtient la palme dans ce classement paradoxal.
Il est regrettable qu'une mesure de relance intelligente prise par la Confédération se traduise par un pareil échec à Genève, dans la mesure où les entreprises spécialisées qui auraient pu bénéficier directement de ce programme se trouvent dans une situation très difficile.
Les professionnels du bâtiment ressentent une certaine amertume. Il est indispensable dès lors nécessaire d'examiner pour quelles raisons les propriétaires ont renoncé à utiliser le bonus fédéral pour améliorer le bilan énergétique de leurs immeubles.
Il ne sert en effet à rien de solliciter des mesures de relance au niveau fédéral et cantonal dans le but de sauver des emplois et des places d'apprentissage si, en fin de compte, les ressources publiques sont peu ou mal utilisées dans notre canton.
Il devient urgent que le Conseil d'Etat mandate un organe autonome - par exemple la Commission d'évaluation des politiques publiques - pour vérifier l'impact des législations et la réglementation - notamment la LDTR - sur l'effet des mesures de relance fédérales et cantonales à Genève. Ensuite, les conclusions d'une telle étude devraient être soumises à toutes les parties intéressées afin de tirer un bilan de cet échec. Cette démarche devrait déboucher sur une véritable stratégie d'incitation qui nécessitera de modifier non seulement les attitudes de chacun, mais également certaines normes législatives et réglementaires trop contraignantes. Cet exercice paraît indispensable avant que le Grand Conseil ne soit saisi de propositions diverses visant précisément à favoriser les économies d'énergie et le développement des énergies renouvelables (par exemple le projet de loi 7759 et la proposition de motion 820).
Au bénéfice de ces explications, nous demandons au Grand Conseil de bien vouloir voter cette proposition de motion à l'intention du Conseil d'Etat.
Débat
M. Jacques Béné (L). Cette motion a été déposée dans le cadre du bonus fédéral voté en avril 1997 par les Chambres fédérales.
Ce bonus portait sur un montant de 64 millions. Il a été voté pour encourager les investissements privés en matière d'économies d'énergie, de promotion des énergies renouvelables et, accessoirement, dans le but de créer des emplois qualifiés.
De ces 64 millions, Genève n'en a malheureusement utilisé que l,5 million, soit les 2,3%. M. le conseiller national John Dupraz n'est pas là pour confirmer mes dires, mais l'information a paru dans la presse. Paradoxalement, les énergies non renouvelables seront taxées. De ce fait, il y aura peut-être plus de demandes de crédit sur ces 64 millions, ce que nous espérons.
Une analyse des motifs de cette non-utilisation du bonus fédéral se justifie. En effet, il serait préjudiciable de voter des crédits destinés à la relance ou à la protection de l'environnement s'ils sont mal utilisés. L'analyse de cet échec nous serait utile dans le cadre de notre politique cantonale.
Nous vous proposons de renvoyer cette motion à la commission des travaux et de donner éventuellement mandat à la commission d'évaluation des politiques publiques d'étudier l'impact des différentes lois qui régissent les processus de rénovation dans le canton. Je ne parle pas seulement de la LDTR mais aussi du code des obligations ou de toute autre législation applicable en la matière.
Les conclusions tirées de cette étude seraient soumises aux différents partenaires, ce qui nous permettrait de développer une stratégie d'incitation mieux ciblée et de passer de l'absence de rénovation et de prise en considération de la protection de l'environnement à une culture de préservation du patrimoine et de l'environnement.
Il est évident que cette évolution devrait être accompagnée de mesures tendant à diminuer ces législations.
Nous vous proposons donc de bien vouloir renvoyer cette motion à la commission des travaux.
Le président. C'est plutôt à la commission de l'énergie, Monsieur le député.
M. Jacques Béné. Non, Monsieur le président. La LDTR est, certes, du ressort de la commission du logement, mais nous trouvons plus judicieux de renvoyer la motion à la commission des travaux.
Le président. Le choix de la commission sera mis aux voix, puisque nous avons une autre proposition.
M. Pierre Vanek (AdG). Tout arrive dans cette enceinte ! Il est surprenant et merveilleux d'entendre un député libéral réclamer l'utilisation de millions de fonds publics pour promouvoir les économies d'énergie et le développement des énergies renouvelables ! On pourrait penser que le Saint-Esprit a touché...
M. Pierre-François Unger. Ce n'est pas le Saint-Esprit, c'est moi !
M. Pierre Vanek. Quoi qu'il en soit nos collègues libéraux ont apparemment connu leur chemin de Damas, parce que habituellement ils considèrent que ces millions de fonds publics ne doivent pas être utilisés pour de tels objectifs. Nous avons bataillé ferme sur les questions des économies d'énergie et des énergies renouvelables au cours de la dernière législature. Aussi je salue le dépôt de cette motion et l'intervention de M. Béné.
Il est parfaitement légitime de s'interroger sur l'absence d'exploitation de ces crédits votés par la Confédération, dans le cadre de ses objectifs de relance, surtout pour des projets qui nous tiennent particulièrement à coeur. Dans ce sens... (L'orateur est interrompu par M. John Dupraz.)
Le président. Monsieur Dupraz, n'interrompez pas l'orateur !
M. Pierre Vanek. Peut-être est-elle due, Monsieur Dupraz, à la maladresse de certains et pas seulement à la faute de Pierre Vanek ! Les organes officiels genevois, chargés de mettre en oeuvre des programmes d'économies d'énergie et de développement des énergies renouvelables, ont-ils été malhabiles ? Je n'en sais rien. Peut-être est-elle due à un manque de concertation avec les responsables fédéraux du programme «Energie 2000» ? Nous pouvons légitimement nous poser ces questions.
Je souscris donc pleinement à la première invite de la motion demandant au Conseil d'Etat de rechercher sans délai, avec tous les partenaires concernés, les raisons pour lesquelles ce bonus fédéral n'a quasiment pas été utilisé dans notre canton. Le seul problème est que la réponse - ou du moins une réponse - est déjà incluse dans l'intervention et la motion de M. Béné : il s'agirait d'un excès de réglementation, dont la LDTR. On invite ainsi le Conseil d'Etat à rechercher sans délai, avec tous les partenaires concernés, les raisons de cet échec et, en même temps, on lui fournit la réponse désormais traditionnelle des libéraux, à savoir une déréglementation maximum comme panacée pour que tout aille pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Par conséquent, je souscris à la première invite de la motion et à l'amendement consistant à supprimer les autres. Sauf erreur, cet amendement a été distribué hier.
Enfin, il est intéressant de mettre en relation cette motion 1214 avec la motion 1214 + 1, c'est-à-dire la motion 1215 déposée le même jour, par les mêmes signataires exactement, et inscrite au point 41 de notre ordre du jour. Cette motion a également la LDTR dans sa ligne de mire. Elle s'insurge contre le projet de loi 7752 qui tend à son amélioration pour certains, à son démantèlement pour d'autres.
Ce débat aura lieu en commission, mais de grâce, Mesdames et Messieurs les libéraux, ne cherchez pas à passer en fraude votre marchandise exposée dans la motion 1215 dans le débat portant sur le développement des énergies renouvelables et les économies d'énergie.
Le président. Veuillez vous exprimer sur le renvoi en commission, Monsieur le député.
M. Pierre Vanek. Je serais d'avis que nous amendions cette motion ici même, en supprimant les trois dernières invites, et que nous la renvoyions ensuite au Conseil d'Etat. Néanmoins, cas échéant, je serais prêt à discuter de cette motion en commission.
Le président. Madame Reusse-Decrey, je vous donne la parole. Merci de vous concentrer sur la proposition de renvoi en commission, en vertu de notre règlement. A défaut, je serai obligé de procéder au vote sur le renvoi en commission avant de poursuivre le débat.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je préconise le renvoi au Conseil d'Etat, et non en commission, de la motion amendée selon la proposition qui a été distribuée. Si cet amendement est accepté, je me réserve de présenter un sous-amendement. Je propose de voter tout de suite le renvoi en commission que mon parti et moi-même refuserons puisque nous voulons un renvoi direct au Conseil d'Etat.
Le président. Est-ce une motion d'ordre, Madame la députée ?
Mme Elisabeth Reusse-Decrey. Oui, puisque nous ne pouvons pas nous exprimer !
Mise aux voix, la proposition de renvoyer cette proposition de motion en commission est rejetée.
Le président. Nous poursuivons le débat sur le fond.
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Je trouve cette motion très cocasse. Ses auteurs ont toujours combattu «Energie 2000», les mesures d'économies d'énergie et l'assainissement énergétique des bâtiments. Aujourd'hui, ils demandent pourquoi «Energie 2000» s'est soldé par un échec.
En d'autres termes, ils ont tout fait pour que cela ne marche pas et aujourd'hui ils demandent pourquoi cela n'a pas marché !
En deuxième lecture, il m'a semblé que vous compreniez enfin que l'on pouvait conjuguer la relance économique et les économies d'énergie. Cela fait des années que nous nous évertuons à vous dire qu'économiser l'énergie ne signifie pas étrangler l'économie et que la mise en place de ces mesures d'économie est susceptible de créer de nombreux emplois nouveaux. Vous avez enfin compris ce processus, et nous en sommes heureux.
Enfin, l'exposé des motifs révèle une attaque de la LDTR déguisée dans la motion. Vous n'aimez pas la LDTR, elle vous donne des boutons ! Vous avez tenté à plusieurs reprises de la démanteler. Cette fois, vous essayez d'avoir le soutien de celles et ceux qui préconisent des économies d'énergie pour attaquer indirectement la LDTR. Nous ne sommes pas dupes ! C'est pourquoi nous refuserons certaines invites de la motion.
Nous vous suivrons sur quelques points, à savoir le constat d'échec, la recherche des motifs qui l'ont provoqué, notamment celui de la non-sollicitation des aides financières fédérales.
Nous vous invitons, par conséquent, à voter la proposition d'amendement distribuée sur vos bancs consistant à supprimer les 2e, 3e et 4e invites. En cas d'acceptation, je propose une deuxième invite conçue en ces termes :
«-à développer une véritable stratégie d'incitation pour économiser l'énergie et développer les énergies renouvelables dans le domaine bâti.»
Cette deuxième invite reprend partiellement la teneur de la troisième invite de la présente motion. Je dépose donc mon amendement.
J'espère que cette motion ainsi amendée sera renvoyée au Conseil d'Etat. Nous avons une idée des raisons de cet échec, ayant fait le même constat au niveau cantonal : le fonds destiné aux économies d'énergie et à l'énergie solaire a été sollicité fort tardivement. Nous devons savoir pourquoi et le Conseil d'Etat pourra nous répondre.
M. David Hiler (Ve). Les invites de cette motion sont ou trop nombreuses ou pas assez. De deux choses l'une : ou nous recherchons les causes et définissons certaines hypothèses, ou nous requérons des réponses en les formulant dans la motion.
Vous avez choisi le dernier procédé et vous semblez croire, de bonne ou de mauvaise foi, que seule la législation pose problème.
Pour ma part, j'ai plusieurs hypothèses. La première, partagée, me semble-t-il, par quelques personnalités de vos milieux, consiste à dire que l'OCEN n'a pas fait son travail. Cette hypothèse doit être vérifiée. Il est possible que la culture d'entreprise de l'OCEN, après plusieurs années et sous certains régimes, ne soit pas encore tout à fait adaptée à cette demande de subventions et que notre ami le conseiller d'Etat Cramer ne soit pas encore parvenu à mettre de l'ordre dans la maison et à faire passer des idées nouvelles.
Deuxième hypothèse. Le discours, systématiquement anti-écologiste, anti-environnemental, des partenaires sociaux de la construction se retourne contre eux. A force de dire que tout ce qui est favorable à l'environnement est blocage, ils ont réussi à susciter le refus de tout ce qui peut être vert clair. Dans ce domaine, ils ont fortement contribué à créer le fossé culturel séparant la Suisse romande de la Suisse allemande. Il est regrettable que les entreprises le paient aujourd'hui. Elles ont été les victimes d'une grave erreur de stratégie des lobbyistes qu'elles rémunèrent.
Cela dit, nous devons revenir à une méthode de travail objective pour affronter les problèmes. Par conséquent, MM. Ferrazino, Champod et moi-même avons déposé un amendement consistant à
supprimer les 2e, 3e et 4e invites.
Seule la première est conservée. Nous voterons le renvoi de la motion au Conseil d'Etat pour ne pas perdre de temps. Nous voulons que le Conseil d'Etat réponde à la première invite, et ce dans un délai relativement bref, afin que nous n'échappions pas à la manne fédérale si de nouveaux crédits devaient être dégagés.
Nous vous prions donc d'adopter notre amendement, puis de renvoyer la motion au Conseil d'Etat.
M. Jacques Béné (L). Que l'on ne nous accuse pas de ce dont nous ne sommes pas coupables ! A vous entendre, les libéraux seraient des ennemis de l'environnement et des économies d'énergie !
Je vous rappelle, Monsieur Hiler, le dépôt du projet de loi 7253, cosigné par MM. Nissim et Barro. Alors ne dites pas que nous ne nous soucions pas des économies d'énergie ! Au contraire, nous leur sommes favorables. Reste à savoir comment mettre en place les politiques permettant ces économies et favorisant l'utilisation des énergies renouvelables.
Vous parlez d'une attaque déguisée contre la LDTR. Si nous voulions la déguiser, pourquoi en aurions-nous parlé dans l'exposé des motifs ? M. Vanek affirme que c'est le but principal de notre motion. Si tel était le cas, j'aurais demandé le renvoi direct de la motion à la commission du logement pour qu'elle soit traitée conjointement avec le projet de modification de la LDTR.
Les motionnaires ont tout de même le droit, dans l'exposé des motifs, de proposer des pistes pour trouver des solutions et un consensus. Mais de ce consensus, vous n'en voulez pas, puisque vous demandez la suppression de la troisième invite qui tend à privilégier un dialogue entre les divers partenaires concernés. Dès lors, c'est plutôt à nous de vous accuser de n'aller que dans le sens qui vous arrange.
Monsieur Hiler, vous prétendez que nos invites sont ou trop nombreuses ou pas assez. J'attends donc de vous que vous en ajoutiez, mais de grâce laissons celles qui sont proposées, laissons le Conseil d'Etat faire son travail qui est de nous fournir une véritable étude d'impact, de mandater éventuellement la commission d'évaluation des politiques publiques pour examiner les pistes que chacun pourra donner - d'où ma proposition de renvoi en commission.
En fait, vous voulez une étude sans la participation de quiconque pour tenter d'atteindre l'objectif fixé : la protection de l'environnement.
M. Chaïm Nissim (Ve). M. Béné demande une véritable étude d'impact tout en se trompant de motion.
C'est la motion 1215 qui demande une étude sur l'impact - catastrophique selon lui - de la LDTR.
Néanmoins, Monsieur Béné, la motion 1214 pose une question fort judicieuse : pourquoi ce programme d'investissement a-t-il échoué ?
Nous sommes prêts à la poser, nous aussi. Personnellement, je ne prétends pas émettre une hypothèse avant de connaître la réponse du Conseil d'Etat, laquelle nous échappera peut-être si les trois dernières invites, de caractère idéologique, ne sont pas supprimées.
Permettez-moi d'évoquer un point qui ne l'a pas encore été. Depuis dix ans, des problèmes relationnels existent entre les gens de l'OCEN et ceux de «Energie 2000». Preuve en est la correspondance dont je dispose et qui n'est que récriminations et réclamations. J'ai des lettres de M. Bariller et de M. Jean-Pierre Gardiol dans lesquelles ils se plaignent de la mauvaise ambiance régnant entre les deux parties. Cette mauvaise ambiance a probablement nui à la culture d'entreprise, à l'émulation et aux encouragements mutuels. C'est, sans doute, une raison parmi d'autres de l'échec du programme d'investissement que nous devrons étudier. Je tenais à relever ce point, les relations harmonieuses étant très importantes en l'occurrence.
M. Pierre Vanek (AdG). J'ai demandé la parole quand M. Béné a prétendu que nous refusions le consensus.
Monsieur Béné, vos deuxième et troisième invites, portant sur les législations et réglementations, constituent des réponses toutes faites à votre première invite.
Le seul consensus possible est de rechercher, avec tous les partenaires concernés, les raisons pour lesquelles le bonus fédéral n'a pas servi comme il aurait dû. La question reste ouverte. Nous verrons ce que le Conseil d'Etat en fera. Chacun tirera ses conclusions des réponses du Conseil d'Etat que nous espérons rapides. Cas échéant, nous examinerons les remèdes à apporter. Ils seront proposés par les uns et les autres.
Je propose que l'on passe maintenant au vote des amendements.
M. John Dupraz (R). Bien qu'intéressante, cette motion cherche midi à quatorze heures ! La raison essentielle du peu de succès de ce programme est avant tout un problème de culture qui touche tous les cantons romands.
Même si le chef du département est un Vert mais, néanmoins, un bon type... (Rires.) ...la culture du canton ne changera pas du jour au lendemain.
Que l'on s'interroge sur les raisons de cet échec, je veux bien ! Que certains n'acceptent pas, pour des raisons de politique politicienne, les questions des motionnaires sur les lois, je peux le comprendre, bien que l'extrême complexité de la loi genevoise sur la construction ait joué un rôle.
Quoi qu'il en soit, je tiens à faire remarquer au jeune et distingué député Béné que nous nous sommes toujours ramassé des casquettes devant le peuple en matière de législation sur le logement.
Personnellement, je veux bien que l'on mette en cause ces lois dont beaucoup émanent d'initiatives populaires ou d'arrêts du Tribunal fédéral nous enjoignant d'y répondre, mais ce sont des combats d'arrière-garde qui ne servent pas à grand-chose. Cela dit, il aurait été tout de même intéressant que la nouvelle majorité parlementaire fasse preuve de compréhension et d'esprit d'ouverture, à l'instar des membres, dont celui qui vous parle, de la précédente. Malheureusement, l'esprit d'ouverture que vous préconisez n'est qu'à votre avantage et pas à celui des autres.
Cette motion semble intéressante, disais-je. Renvoyons-la au Conseil d'Etat ! Nous aurions aimé qu'elle le soit telle quelle, mais n'ayant pas la majorité dans ce parlement, nous ne nous berçons pas d'illusions.
M. Chaïm Nissim (Ve). Une ancienne tradition suisse alémanique veut que l'on se retrouve ensemble, autour d'une table, pour mettre au point des arrangements.
C'est ce qui manque à Genève. Chacun campe sur ses positions. Les constructeurs ne veulent pas parler à l'OCEN, l'OCEN ne veut pas parler à «Energie 2000» et «Energie 2000» peine à s'entretenir avec les constructeurs.
C'est sans doute là que réside l'essentiel du problème.
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Tout d'abord, je remercie M. Dupraz de sa déclaration publique d'amitié !
Cela dit, je ne suis pas sûr que M. Nissim situe bien le débat quand il tient pour essentielles des antipathies ou des sympathies qui expliqueraient la politique suivie sur le plan fédéral ou cantonal.
Nous avons constaté que les mesures fédérales n'ont pas fonctionné dans le canton du Jura, dans le canton de Fribourg, dans le canton de Vaud...
M. John Dupraz. Et le Valais !
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Certes, Monsieur Dupraz, mais les mesures fédérales ont eu du succès dans le Haut-Valais seulement, pas dans la partie romande !
A quoi attribuer cet échec ? Je ne suis pas sûr que la LDTR soit en cause, puisqu'elle n'est appliquée qu'à Genève, et affirmer que c'est affaire de culture est trop vite dit ! Pourquoi ne pas parler de la diligence de certains fonctionnaires fédéraux ? Plusieurs mois avant qu'ils ne l'aient fait en français, ces fonctionnaires fédéraux ont diffusé l'information en allemand.
Pour ma part, je n'émettrai pas d'hypothèse de travail. Comme beaucoup ici, je pense qu'il serait sage de se borner à la première invite de la motion qui nous permettra de rechercher les causes de la non-utilisation, à Genève, de cette possibilité d'investissement. Vous devez savoir qu'une étude à cet égard est en cours sur le plan fédéral. Cette motion me permettra de vous répondre et de vous remettre cette étude dès qu'elle sera achevée. Le dépôt de cette motion me permettra aussi, comme vous semblez le souhaiter, d'organiser la concertation demandée par la première invite, en rassemblant les partenaires concernés. Aussi bien ceux chargés de l'information que ceux qui auraient pu utiliser cette opportunité pourront alors donner leurs raisons du non-emploi de cette subvention fédérale proposée à tous les cantons.
Le président. Je mets aux voix la proposition d'amendement de MM. David Hiler, Christian Ferrazino et Pierre-Alain Champod. Cette proposition consiste à
supprimer les invites 2, 3, 4, soit de :
«- à entreprendre... » à « ...en la matière.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. Je mets aux voix la proposition d'amendement de Mme Elisabeth Reusse-Decrey, consistant en une deuxième et nouvelle invite dont la teneur est la suivante :
«-à développer une véritable stratégie d'incitation pour économiser l'énergie et développer les énergies renouvelables dans le domaine bâti.»
M. Jacques Béné (L). Je ne vois pas la différence entre l'amendement de Mme Reusse-Decrey et la troisième invite de la motion. A moins qu'elle veuille supprimer mon invite pour faire passer la sienne... Politiquement, c'est correct !
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Monsieur Béné, votre troisième invite débute ainsi : «- à soumettre le résultat de ces recherches...», lesquelles font référence à votre deuxième invite. Celle-ci ayant été supprimée, j'ai composé le texte de mon amendement en conséquence.
Le président. Mme la députée Reusse-Decrey a retenu la fin de la troisième invite initiale et en a supprimé le début.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mise aux voix, cette motion ainsi amendée est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1214)
pour une étude des raisons de l'absence de succès du programme Energie 2000 pour l'encouragement aux investissements privés dans le domaine de l'énergie
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- la persistance de la récession dans les métiers du bâtiment ;
- le rythme insuffisant d'entretien et de rénovation du domaine bâti privé ;
- la perte de substance des bâtiments et l'existence d'installations obsolètes ;
- les efforts entrepris en faveur des économies d'énergie et du développement des énergies renouvelables ;
- le quasi échec enregistré à Genève par le programme fédéral Energie 2000 pour l'encouragement aux investissements privés dans le domaine de l'énergie ;
- la nécessité d'offrir des possibilités de formation et de perfectionnement professionnels à forte valeur ajoutée ;
invite le Conseil d'Etat
- à rechercher sans délai, avec tous les partenaires concernés, les raisons pour lesquelles le bonus fédéral à l'encouragement aux investissements privés n'a quasiment pas été utilisé dans notre canton ;
- à développer une véritable stratégie d'incitation pour économiser l'énergie et développer les énergies renouvelables dans le domaine bâti.
M. Jacques Béné (L). J'espère que le traitement de cette motion ne se résumera pas à un rapport de dix pages déposé sur nos bureaux mais qu'il nous permettra de revenir devant ce Grand Conseil avec un projet concret.