Séance du
jeudi 28 mai 1998 à
17h
54e
législature -
1re
année -
9e
session -
24e
séance
No 24/III
Jeudi 28 mai 1998,
soir
Présidence :
M. René Koechlin,président
La séance est ouverte à 17 h 25.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Micheline Calmy-Rey, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : M. Guy-Olivier Segond, conseiller d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Bernard Annen, Janine Berberat, Anne Briol, Liliane Charrière Debelle, Erica Deuber-Pauli, Bénédict Fontanet, Jean-Pierre Gardiol, Luc Gilly, Claude Haegi, Michel Halpérin, Chaïm Nissim, Elisabeth Reusse-Decrey, Micheline Spoerri, Pierre-François Unger, Alain Vaissade et Pierre-Pascal Visseur, députés.
3. Discussion et approbation de l'ordre du jour.
M. Pierre-Alain Champod(S). Nous siégeons depuis 8 h ce matin. Arrive le moment où la qualité du travail se ressent de la longueur des séances. De la consultation faite auprès des différents groupes, il ressort que la majorité des députés souhaitent que cette séance soit prolongée pour ne pas siéger à la séance de nuit.
Nous proposons de travailler jusqu'à 20 h et de cesser nos travaux à ce moment-là.
Je vous suggère, Monsieur le président, de mettre cette proposition aux voix.
Le président. Les objets 61 bis, 70 bis et 83 de notre ordre du jour doivent être traités ce soir. Je vous suggère de faire le point à 19 h 30 et de décider, cas échéant, du traitement de ces trois objets.
M. Bernard Lescaze(R). Alors que le point 70 bis ne semblait pas poser trop de problèmes a priori, les amendements de l'Alliance de gauche font qu'il nécessitera un débat d'au moins trente minutes.
Monsieur le président, vous devriez, je crois, proposer l'ordre du jour sans ce point. Nous verrons bien où nous en serons à 19 h 30.
Le président. Monsieur Lescaze, nous déciderons à 19 h 30 du ou des objets à traiter ou pas dans la demi-heure qui suivra. Comme il n'y a pas d'objection, il en sera fait ainsi.
4. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Le président. Les propositions de motions suivantes sont parvenues à la présidence :
Elles figureront à l'ordre du jour de notre prochaine session.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
Art. 1 Forme juridique (nouvelle teneur)
Art. 2 Siège et rayon d'activité (nouvelle teneur)
Art. 3, al. 1 et 3 (nouvelle teneur)
Art. 8 Emissions d'actions (nouvelle teneur)
Art. 11, lettre a, c , f et g (nouvelle teneur)
Art. 12, al. 1 (nouvelle teneur)
Art. 17A Commission de médiation (nouveau)
EXPOSÉ DES MOTIFS
Depuis la fin de la dernière guerre, les partis de gauche de notre canton ont oeuvré pour la création d'une véritable banque cantonale déployant toutes les activités bancaires et se substituant à la Caisse d'épargne et à la Caisse hypothécaire. Plusieurs projets de lois furent déposés, dont le dernier en date est celui de feu Alex Burtin (député socialiste), mais en vain. Les partis de l'Entente y étaient farouchement opposés.
Ce n'est qu'il y a dix ans environ, que les partis se sont finalement ralliés à cet objectif, ce qui a permis la création de la Banque cantonale de Genève avec l'adoption de la loi du 24 juin 1993 sur la Banque cantonale de Genève, née de la fusion de la Caisse d'épargne et de la Banque hypothécaire du canton de Genève.
Aujourd'hui, les grandes banques fusionnent et concentrent l'essentiel de leurs activités dans certains domaines, les plus lucratifs, elles ferment leurs agences de quartier, au détriment d'un service de proximité, réduisent leurs efforts dans le domaine du crédit hypothécaire, indispensable à la construction de logements, et limitent de manière drastique l'octroi de crédits aux petites et moyennes entreprises.
La politique menée par les grandes banques a démontré l'intérêt vital pour l'économie de notre canton de la présence d'une importante banque publique. Mais l'activité bancaire comporte de hauts risques, dont les milieux d'affaires ont banalisé l'existence durant la période de haute conjoncture, qui - même dans cette période - ont mené plusieurs banques de notre pays à la faillite et en ont mis d'autres en péril. Parmi celles-ci, figure une des plus grandes, la Banque Populaire Suisse, qui a dû être reprise par le Crédit Suisse. Plusieurs banques cantonales, dont celle du canton de Soleure, ont dû cesser leurs activités, d'autres, notamment celle du canton de Berne, ont été sauvées de justesse moyennant l'apport de fonds publics considérables se chiffrant en centaines de millions de francs.
C'est dire que la gestion de la Banque cantonale, comme celle de toute banque, doit être rigoureuse et respectueuse des règles de gestion usuelles des activités bancaires. Une banque cantonale, vu l'intérêt public qu'elle incarne et vu l'importante garantie financière dont elle bénéficie de la part de l'Etat, donc des contribuables, doit être particulièrement attentive au respect de ces règles et éviter de prendre des risques inconsidérés.
Force est de constater à ce sujet, même si certains n'aiment pas qu'on le rappelle, que nos anciennes Caisse d'épargne et Banque hypothécaire n'ont pas respecté ces règles et se sont engagées dans de nombreuses opérations qui coûtent aujourd'hui très cher à la BCG et qui auraient pu la mettre en péril en raison de l'importance des provisions qu'il a fallu constituer, ce qui est également une des raisons pour lesquelles la BCG pratique des taux d'intérêt plus élevés que d'autres banques qui ont su mener une politique de crédits prudente, tout en étant généreuse. Et ainsi, en cette période de crise, où notre économie aurait besoin de disposer de crédits bon marché pour favoriser la relance, la BCG ne peut hélas jouer le rôle qui devrait être le sien dans ce domaine.
Sans revenir sur un certain nombre d'affaires graves, que l'Alliance de Gauche a dénoncées pour que la BCG soit plus rigoureuse dans la gestion des crédits qu'elle octroie, on ne saurait toutefois faire abstraction des erreurs, qui souhaitons-le appartiennent au passé. Il convient, en tous les cas, d'en tirer les leçons et d'adopter des règles de conduite permettant, à l'avenir, d'éviter de commettre à nouveau ce genre de fautes. Les règles bancaires ont d'ailleurs été successivement renforcées, dans notre pays comme ailleurs, après certaines pratiques qui ont causé, au fil des décennies, des pertes énormes et même des catastrophes, en raison du rôle clé que joue le secteur bancaire dans notre système économique.
Aujourd'hui, il nous paraît nécessaire de renforcer les conditions cadres de la loi sur la Banque cantonale, d'une part, en affirmant dans la loi son rôle de banque de proximité avec une activité prioritaire dans l'octroi de crédits pour la construction de logements et en faveur des petites et moyennes entreprises et, d'autre part, en soumettant à l'approbation du Grand Conseil les décisions relatives à une modification de son statut et à une extension de son activité, notamment quant à la création éventuelle de filiales ou sa fusion avec d'autres banques (à une époque où les fusions sont de plus en plus d'actualité) ou encore la reprise d'autres banques pouvant entraîner des risques importants pour la BCG.
A ce sujet, nous estimons qu'il n'est pas normal que la BCG ait créé, sans que le Grand Conseil n'ait eu à se prononcer, une filiale à Lyon et racheté une part importante (mais semble-t-il minoritaire) d'une banque privée (l'ancienne Banque Cantrade de Lausanne) dans le but de la transformer, avec ses actionnaires privés majoritaires, en une nouvelle banque privée, la Compagnie Bancaire de Genève (CBG) qui aurait des succursales dans divers pays et qui aurait racheté une filiale ayant son siège à la rue de Candolle. Il semble qu'une autre banque privée (la Banque Anker) ait encore été achetée par la BCG, mais l'absence d'informations à ce sujet ne nous laisse pas savoir ce qu'il en est réellement
L'existence de la BCG, banque publique, résulte d'une loi adoptée, après de longues discussions, par le Grand Conseil, c'est à ce dernier de décider si le statut de la BCG doit évoluer et si elle doit éventuellement fusionner avec d'autres banques. L'autonomie de gestion accordée à la BCG et le manque de précision de la loi actuelle, auquel il faut remédier, ne devraient pas lui permettre d'utiliser certains moyens pour éluder son statut de banque publique, ni de se dispenser de soumettre à l'approbation de l'autorité qui l'a créée et dont elle dépend les modifications structurelles qu'impliquent des fusions ou des reprises d'autres banques.
Tel est le but du présent projet de loi, qui prévoit également d'adopter des directives précises en matière d'octroi de crédits de construction ou de crédits hypothécaires, la création d'un fonds pour l'octroi de petits crédits à risques au profit de petites entreprises, qui devraient être limités à Fr. 50 000.-, la création d'une structure d'appui à cette fin (à l'instar de ce qui s'est fait à Lyon) et la mise en place d'une commission de médiation, du type de l'ombudsman des assurances, qui pourrait se prononcer sur les plaintes de clients à l'égard de la banque, ce qui serait une nouveauté dans le secteur bancaire et pourrait servir d'exemple aux banques privées.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que le présent projet de loi recevra un bon accueil de votre part.
Préconsultation
Le président. Nous sommes en préconsultation. Seul un intervenant par groupe peut s'exprimer. Son temps de parole est de cinq minutes au maximum.
M. Christian Grobet (AdG). Lors de l'adoption par ce Grand Conseil, en juin 1993, de la loi qui a enfin permis de créer la Banque cantonale de Genève demandée par la gauche depuis la dernière guerre mondiale, un consensus assez large a fait que la BCG jouit d'une grande autonomie confirmée par la loi. Cette dernière, en revanche, n'accorde aucune compétence au Grand Conseil. Les compétences du Conseil d'Etat, elles, sont extrêmement limitées.
Le Conseil d'Etat se borne à constater, par arrêté, que les statuts et leurs modifications sont conformes à la loi. Il ne peut donc pas se prononcer en opportunité. Il désigne six membres et le président du conseil d'administration. A part cela, le Conseil d'Etat ne s'occupe absolument pas de la Banque cantonale.
Force est de constater que cette autonomie accordée à la Banque cantonale n'a pas toujours été utilisée à bon escient par son conseil d'administration.
Par voie de conséquence, nous avons fait certaines propositions dans ce projet de loi tendant à donner des compétences au Grand Conseil en ce qui concerne la surveillance de la Banque cantonale qui ne peut, à l'instar d'une banque privée, agir à sa guise. C'est une émanation de l'Etat et, à ce titre, une autorité doit savoir comment l'établissement se développe et respecte les règles qui lui sont applicables.
Certains considèrent que ce projet de loi va trop loin. C'est pourquoi nous avons voulu procéder, comme je l'ai dit à M. Brunier lors de notre dernière séance, à un examen des lois appliquées dans d'autres cantons aux banques cantonales.
De cet examen il ressort que notre projet de loi est extrêmement modeste par rapport aux règles en vigueur dans les autres cantons. Je citerai l'exemple de Zurich, le plus grand canton suisse. Son Grand Conseil ne se prononce pas seulement sur le capital de dotation et sur les participations, mais aussi sur l'acceptation des règlements, sur les comptes annuels et les rapports des organes de contrôle de la banque. Le Grand Conseil zurichois va jusqu'à élire les membres du conseil d'administration et le président de la banque. Outre ces compétences accordées au Grand Conseil zurichois et à sa commission spéciale, il en est dévolu d'autres au Conseil d'Etat.
Le système d'une commission du Grand Conseil, habilitée à surveiller la bonne gestion de la banque, n'est pas exclusif au canton de Zurich. On le retrouve dans la législation valaisanne...
M. Claude Blanc. On a vu les résultats !
M. Christian Grobet. Oui, on les a vus, et c'est précisément cette commission qui a permis de mettre le doigt sur l'affaire Dorsaz et ses graves irrégularités ! Je comprends que le PDC ricane, parce que vaguement gêné par ce qui s'est passé, sous l'ère PDC, à la Banque cantonale du Valais ! En effet, c'est grâce à la commission parlementaire et à certains radicaux que des affaires relativement graves ont été découvertes.
Je cite encore, à titre d'exemples, la loi sur la Banque cantonale de Bâle qui confère d'importantes compétences au Grand Conseil en ce qui concerne l'examen des comptes et la surveillance; la loi de Fribourg qui comporte une disposition particulièrement intéressante, je cite : «La banque s'abstient de toute opération à caractère purement spéculatif.» Il ne serait peut-être pas inutile de faire figurer cette règle dans notre législation. J'avoue que nous n'y avons pas pensé dans notre projet de loi. Le canton de Fribourg prévoit également la soumission au Grand Conseil, pour approbation, du bilan et des comptes annuels accompagnés des rapports du conseil d'administration et de l'organe de révision.
Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député.
M. Christian Grobet. Le canton de Berne possède le strict contrôle de sa banque cantonale à travers le Grand Conseil et le Conseil exécutif.
Monsieur Blanc, ce contrôle a sans doute évité la disparition de la Banque cantonale bernoise du réseau des banques cantonales, comme cela a été le cas de la Banque cantonale d'Appenzell.
Le président. Encore une fois, veuillez conclure, Monsieur le député.
M. Christian Grobet. Je conclus, Monsieur le président. Les problèmes que nous posons, Mesdames et Messieurs les députés, sont importants. Nous souhaitons pouvoir en discuter sereinement en commission. D'autres solutions de surveillance et de contrôle que les nôtres peuvent être envisagées. Nous pouvons imaginer donner plus de pouvoirs au Conseil d'Etat qui, à l'époque, ne voulait pas les assumer...
Le président. Concluez, vous avez dépassé votre temps de parole !
M. Christian Grobet. En vue d'un examen serein, je demande le renvoi de ce projet de loi en commission.
M. John Dupraz (R). Si, tout à l'heure, j'ai reconnu l'excellence de M. Grobet en matière d'aménagement du territoire, j'avoue le trouver moins bon, voire franchement mauvais, en ce qui concerne la Banque cantonale ! (Rires.)
A la fin de l'an passé, plusieurs projets de lois ont été déposés sur l'initiative de l'Alliance de gauche. Tous postulaient une meilleure représentation des partis politiques dans différentes commissions administratives et extra-parlementaires, dans certains conseils d'administration, y compris celui de la Banque cantonale.
Les partis de l'Entente ont émis plus que des réserves à propos de ce projet de loi. La commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil, qui s'est occupée de ce dossier, a fait un gros effort - les partis de l'Entente, eux, ont fourni un effort circonstancié... - pour trouver une solution acceptable par l'Alliance de gauche. Nous avons joué le jeu et certains, dans nos milieux, nous l'ont reproché. Personnellement, il m'a été reproché de vouloir politiser la banque.
Notre objectif premier était de maintenir l'équilibre entre les communes et l'Etat de Genève, de sauvegarder le droit de l'Etat de nommer ses représentants au sein du conseil d'administration. Nous avions trouvé une solution raisonnable. Elle permettait le bon fonctionnement de la banque sans la «politiser».
Après tous ces efforts, il est décevant que M. Grobet, qui a l'Alliance de gauche à sa botte... (M. Christian Grobet sourit.) Vous avez beau sourire, Monsieur Grobet, vous avez quand même réussi à squatter le parti du Travail, ce bon monsieur Spielmann étant en train de disparaître... Vous êtes pareil au coucou qui fait sa place dans le nid des autres oiseaux... (Rires.) ...et qui profite de la situation à leurs dépens. C'est ce que vous avez fait et que vous continuez à faire !
Votre projet de loi est une provocation, car c'est l'ingérence, pure et simple, du Grand Conseil dans la gestion de la Banque cantonale. Je regrette que vous cherchiez, par l'intermédiaire de ce projet, à régler des comptes personnels avec certaines personnes qui gèrent ou dirigent la banque. Vous êtes d'ailleurs coutumier du fait.
Il est bon de rappeler qu'un ancien député socialiste a joué un rôle prépondérant dans l'élaboration de cette loi sur la Banque cantonale qu'il a été si difficile de mettre sur pied. Je veux parler de M. David Lachat qui, je crois le savoir, était un proche de M. Grobet à l'époque.
Les instances politiques se sont distancées volontairement de la gestion de la Banque cantonale précisément à cause de ce qui s'était passé dans d'autres cantons. En créant cette société anonyme, elles ont voulu respecter les revendications et les droits légitimes des communes propriétaires de la Banque hypothécaire du canton de Genève. En donnant la possibilité aux privés de participer au capital et de faire fonctionner la BCG, ces mêmes instances politiques ont voulu trouver un juste équilibre entre l'ancienne Caisse d'épargne, l'Etat, la Banque hypothécaire et les communes.
Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député.
M. John Dupraz. Ce projet de loi est mauvais et, si nous avions la majorité, nous demanderions la discussion immédiate. Comme nous ne le pouvons pas, nous irons en commission.
Nous rejetterons ce projet de loi parce qu'il est contre l'intérêt de Genève, contre l'intérêt de la Banque cantonale et contre l'intérêt de l'économie. C'est une entreprise de sabotage contre Genève menée par M. Grobet !
M. Claude Blanc (PDC). Mai touche à sa fin et juin pointe son nez : c'est la saison du rhume des foins ! Les médecins présents ne me démentiront pas : le rhume des foins est proche parent de l'eczéma. Et M. Grobet nous fait une crise d'eczéma chaque fois que nous parlons de la Banque cantonale ! Il attrape la Banque cantonale comme d'autres attrapent le rhume des foins ! (Rires.)
Une voix. Au berceau, il avait déjà la rougeole !
M. Claude Blanc. Il est facile, à chaque session du Grand Conseil, de s'acharner sur la Banque cantonale. Vous lui avez intenté toute une série de procès. Certes, notre Banque cantonale n'est pas à l'abri de toute critique, mais vous en avez cité plusieurs autres que vous prôniez comme modèles, Monsieur Grobet. Pour autant que je sache, la nôtre ne s'est jamais trouvée aussi bas que celles de Fribourg, de Soleure et d'autres citées par vous ! Elle n'a jamais fait appel aux capitaux de l'Etat pour se renflouer. Par conséquent, elle est encore en bon état.
Malgré ses imperfections et les défauts inhérents à tout établissement humain, la Banque cantonale mérite que nous continuions à lui accorder notre confiance.
Enfin, cette banque ne nous appartient pas totalement. Nous l'appelons «Banque cantonale» mais nous ne possédons que le tiers de son capital. Si notre Grand Conseil s'arrogeait les droits que vous voulez lui voir octroyés, il pourrait, en tant que détenteur du tiers de son capital, contrôler la banque à 100%.
Ces méthodes avaient cours dans les régimes que vous admiriez en cachette en étant socialiste et que vous admirez ouvertement, aujourd'hui, pour avoir rejoint une autre formation politique, nostalgique du centralisme démocratique tel que le définissait M. Marchais. En tant que détenteur du tiers du capital, vous entendez vous arroger le droit de régenter totalement la banque. Alors merci pour les communes, merci pour la Ville de Genève, merci pour les actionnaires privés qui ont fait confiance à cet établissement de droit public ! Vous les passez complètement par-dessous la jambe ! Ils n'auront plus rien à dire.
Quelle est donc votre notion de la démocratie ?
Nous irons en commission pour ce machin, mais j'espère qu'il en ressortira en lambeaux. C'est ce qu'il mérite !
M. Michel Balestra (L). La Banque cantonale de Genève est un instrument capital de la politique économique de notre canton.
Lors de sa création, la commission ad hoc a voulu lui donner une autonomie qui lui permette de devenir une entreprise libre et efficace, au service de nos PME.
Le Conseil d'Etat d'alors s'est volontairement distancé de la surveillance directe de cette entreprise en la soumettant au contrôle de la Commission fédérale des banques.
L'objectif était d'éviter les confusions entre le politique et l'économique, lesquelles sont à la base des affaires regrettables qui ont affaibli les banques cantonales des cantons voisins.
Revenir en arrière serait une faute politique grave. Elle aurait des répercussions sur l'efficacité de la Banque cantonale, lesquelles entraîneraient des répercussions sur l'économie de notre canton. Et des répercussions sur l'économie de notre canton sont des répercussions sur l'emploi.
Cessez ces combats d'arrière-garde ! Agissez pour Genève ! Renoncez à ce projet ! Nous essaierons de vous en convaincre en commission.
M. Christian Brunier (S). La Banque cantonale est loin d'être parfaite. A plusieurs reprises, mon parti est intervenu pour qu'elle montre plus d'éthique et de proximité vis-à-vis de la population genevoise.
Les socialistes pensent que le parlement doit être attentif à ce qui se passe dans cette banque. Il doit veiller à éviter toute dérive à l'intérieur de la BCG. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faille la placer dans un carcan.
Le projet de loi de nos amis de l'Alliance de gauche pose, en partie, un problème réel et important, mais les remèdes qu'ils proposent ne sont pas satisfaisants.
D'un point de vue démocratique, nous ne comprenons pas comment le canton, qui ne représente que le tiers de l'actionnariat, pourrait revendiquer des pouvoirs si étendus. L'approbation de ce projet de loi serait une provocation de notre part, tant par rapport aux communes que par rapport à l'actionnariat privé composé, je vous le rappelle, de plusieurs caisses de retraite et pension de travailleuses et travailleurs de ce canton.
En outre, le dépôt du projet à ce moment précis fournit des armes aux milieux qui ont lancé un référendum éminemment populiste contre la loi que nous avons votée, en mars dernier, sur la composition du conseil d'administration de la BCG. Ces gens crient à sa soi-disant politisation. Cette loi a pourtant trouvé un large soutien dans cette enceinte, comme M. Dupraz vient de le rappeler. Cette loi propose non pas d'accroître le poids de la politique, mais de garantir un meilleur équilibre politique tenant compte de la pluralité de pensée du peuple genevois et du résultat des dernières élections.
Ces milieux dénient la représentation des Verts et de l'Alliance de gauche dans le conseil d'administration. Ce faisant, ils dénient les éléments de base de la démocratie.
Dans ce contexte et bien qu'opposés aux mesures préconisées par ce projet de loi, les socialistes pensent que son renvoi en commission permettra un large débat sur la Banque cantonale que nous espérons - on peut rêver - serein !
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Les Verts sont favorables au renvoi de ce projet de loi en commission. Plusieurs de ses articles nous paraissent indispensables, notamment ceux touchant à l'éthique.
En effet, lors de la création de la BCG, des députés représentant notre parti, dont M. André November, avaient été très fermes à propos de l'éthique. Comme leur point de vue n'avait pas été retenu, nous sommes assez satisfaits que l'Alliance de gauche revienne avec ce type de proposition.
D'autres articles nous semblant plus difficilement acceptables, nous aimerions en discuter en commission. C'est pourquoi nous soutiendrons le renvoi du projet.
Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, la banque garde aujourd'hui une double dimension de familiarité et de mystère. Familiarité, dans la mesure où elle cherche à rendre ses services accessibles et où, pour atteindre ce but, il s'agit de démythifier l'univers de l'argent et de donner une image banalisée des rapports entre établissements de crédit et usagers.
L'exercice se révèle dans la réalité difficile, car chacun d'entre nous entretient des rapports complexes avec l'argent: l'argent en effet est craint autant qu'il est convoité, désiré pour la domination qu'il procure et rejeté à cause précisément de la puissance qu'il donne. Dans cette dialectique, la banque se dévoile comme l'alibi de tous, l'argent est chez elle à la fois matière première et moyen de pouvoir. Le mot banque et ce qu'il représente suscite donc des sentiments d'appréhension et tout un cortège de mystères et il n'est dès lors pas étonnant que la banque et en particulier la Banque cantonale entretienne avec le pouvoir politique des rapports qui alternent entre la confiance, parce que la BCG est perçue comme étant un rouage essentiel de l'économie genevoise, et la volonté de contrôle afin de permettre à l'Etat de maîtriser en elle un instrument de sa politique.
Le projet de loi qui nous est soumis ce soir illustre bien l'expression d'une crainte diffuse devant la puissance de l'argent et un besoin concomitant de surveillance publique. Ce qui à mon sens divise les uns et les autres n'est pas tellement ce constat mais bien plutôt le degré de surveillance nécessaire.
Le présent projet de loi confie au Grand Conseil les décisions stratégiques concernant la banque. La Banque cantonale ne pourrait plus augmenter son capital, créer des filiales, s'associer à d'autres banques ou modifier ses statuts sans devoir trouver une majorité au Grand Conseil. Outre le fait que la banque dispose de structures particulières de contrôle, un organe de révision et la Commission fédérale des banques, il n'y a pas, Mesdames et Messieurs, de banques ou d'entreprises qui puissent résister à ce genre de traitement.
Il a fallu plus de soixante ans pour que la fusion entre les deux banques, Caisse d'épargne et Banque hypothécaire, se réalise. Le projet fut porté par des politiciens de tous bords, mais il s'est surtout heurté à des concurrents inquiets de voir se constituer une banque publique forte qui à coup sûr manquerait d'indépendance et ne pourrait être qu'une annexe du fisc et de l'administration.
Les auteurs du projet de loi semblent donner raison a posteriori à ces détracteurs du fait de l'économie de leur projet mais de manière plus précise avec la proposition de mettre sur pied une commission de médiation élue par le Grand Conseil et qui aurait pour mission d'instruire les plaintes des clients et serait dotée pour ce faire, je cite, «d'un pouvoir d'investigation total à l'intérieur de la banque». Cela pourrait bien être compris comme la volonté d'abandonner le secret bancaire à la Banque cantonale et inquiéter les clients.
Je ne souhaite pas, dans le cadre de ce débat, porter de jugement sur la nécessité de poser des limites accrues à l'activité de la banque dans le but d'avoir en elle un instrument au service de l'intérêt général. Reste que la méthode ne convient pas et que laisser croire aujourd'hui qu'une banque publique fonctionne selon d'autres règles que les règles usuelles au domaine de la banque touche à la crédibilité et à la confiance des usagers dans la banque.
Enfin, Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat et les partis politiques se sont tout récemment engagés à élargir la palette des sensibilités politiques présentes au conseil d'administration de la banque et à y désigner des personnes qui aient toutes les qualités requises. On peut se demander pourquoi s'être donné la peine de trois mois de bagarres et de discussions pour composer un conseil d'administration équilibré et apte à décider des options d'avenir de la banque, si ce n'est pour témoigner aussi peu de confiance à l'égard de ce même conseil qui voit ses compétences se rétrécir sérieusement.
Voyez-vous, ce qui me chagrine, c'est le fait que ce type de démarche a encouragé le lancement d'un référendum contre la loi concernant la composition du conseil d'administration et qu'elle a alimenté et alimentera l'argumentaire de la soi-disant neutralité politique de l'actuel conseil d'administration alors que la nouvelle composition prévue, parce que plus équilibrée, serait elle affreusement politisée.
Vous aurez compris, Mesdames et Messieurs les députés, que ce projet de loi ne rencontre pas l'agrément du Conseil d'Etat. (Applaudissements.)
Ce projet est renvoyé à la commission des finances.
Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. Le programme de stabilisation 1998 comporte quatre principaux volets : des mesures dans les domaines propres de la Confédération; des mesures dans le domaine social, notamment pour l'AVS, l'AI et l'assurance-chômage; des mesures relatives aux recettes fiscales; une contribution des cantons aux efforts d'économie par des transferts de charges de la Confédération à leur endroit.
Les mesures dans les domaines propres de la Confédération s'élèvent à 939 millions de francs, dont 560 millions d'économies proviennent des budgets militaires, 200 millions des CFF et 170 millions d'une version allégée du blocage des crédits de la Confédération.
Les mesures dans le domaine social induisent une économie de 180 millions pour l'assurance-chômage et de 300 millions pour l'AVS/AI.
L'effort des cantons se monte à 500 millions.
Le Conseil fédéral a en effet estimé impossible d'élaborer un programme de stabilisation sans les transferts financiers vers les cantons. Il a donc confié l'étude d'un paquet distinct d'économies à un groupe de travail, composé des représentants des cantons et de la Confédération. Il en est résulté les quatre volets d'économies suivants :
1. un volet «transports publics/trafic régional» d'un montant de 152 millions, dont les mesures visent à réduire de 75 à 68% le taux de contribution de la Confédération à l'indemnisation des frais non couverts;
2. un volet «transports publics/routes» d'un montant de 83 millions, incluant la suppression des subventions fédérales aux mesures de séparation du trafic et à la rénovation des passages à niveaux, ainsi que la réduction, à 10%, du taux de la subvention aux routes principales;
3. un volet «éducation», qui touche fortement Genève, d'un montant total de 41 millions, comprenant, d'une part, des mesures en matière de formation professionnelle et, d'autre part, des mesures relatives aux bourses d'études, ces dernières réduisant d'au moins 15% les subventions fédérales accordées aux cantons pour leurs dépenses en faveur des bourses d'études;
4. un volet «exécution des peines et mesures» d'un montant de 24 millions, impliquant une réduction des contributions aux frais de fonctionnement et aux coûts de construction des établissements servant à l'exécution des peines et mesures.
Pour compléter les économies à réaliser, les participants à la table ronde ont estimé devoir mettre en discussion trois variantes supplémentaires encore à l'étude et devant faire l'objet de décisions.
Il s'agit tout d'abord d'une mesure dans le domaine de la prévoyance sociale concernant les assurances-maladie, notamment le financement des subsides fédéraux visant à réduire les primes des personnes à revenu modeste. Cette première variante consiste à accroître la participation des cantons de 50 à 65% à la subvention fédérale et, simultanément, à modifier la clé de répartition des subventions fédérales entre les cantons. Cette première variante engendrera, pour les cantons, un transfert de charges de l'ordre de 150 millions de francs en 1999.
La deuxième variante concerne la participation des cantons aux frais des offices régionaux de placement de l'assurance-chômage et un renforcement simultané de la marge de manoeuvre cantonale dans ce domaine. A ce jour, aucun détail n'est vraiment connu. Le montant des efforts à consentir par l'ensemble des cantons s'élèvera à 150 millions de francs en 1999.
La troisième variante consiste à augmenter les contributions cantonales aux oeuvres sociales de la Confédération AVS/AI. Comme pour la deuxième variante, aucun détail n'est connu. Le montant des efforts à consentir par l'ensemble des cantons s'élèvera aussi à 150 millions en 1999.
J'en viens aux effets sur les finances du canton de Genève. Globalement, celui-ci devrait supporter un transfert de charges de 17 à 21 millions de francs, mais bénéficier d'allégements de charges d'environ 5 millions. Le transfert net de charges se situerait donc dans une fourchette de 12 à 16 millions de francs.
A ce transfert, il convient d'ajouter les effets induits par les mesures touchant l'assurance-chômage, notamment le relèvement de la limite des revenus soumis aux cotisations de 1%. En effet, en tant qu'employeur, l'Etat de Genève devrait faire face à une augmentation de ses charges sociales que nous pouvons estimer à environ 13 millions de francs.
L'effet total sur les comptes de l'Etat devrait être négatif dans une proportion proche de 10 millions de francs, compte tenu de la mise à disposition du canton de nouvelles ressources financières résultant, en particulier, de la distribution des bénéfices de la Banque nationale suisse et de la part à la redevance sur les poids lourds.
Cette interpellation est close.
Mme Micheline Calmy-Rey, conseillère d'Etat. M. Clerc demande si le refus d'ouvrir un compte à un titulaire de permis N découle d'une politique générale de la Banque cantonale de Genève.
La réponse est non, et le Conseil d'Etat n'approuverait pas une telle politique.
L'octroi de cette prestation, c'est-à-dire l'ouverture d'un compte est soumise, à la Banque cantonale, à des conditions découlant d'obligations de prudence. De ce fait, il est possible d'ouvrir un compte «City» en tant que titulaire d'un permis N aux conditions cumulatives suivantes : remise par la personne d'une attestation de salaire ou d'une recommandation de son employeur en Suisse ou de sa caisse de compensation et délivrance d'une copie du permis N.
En outre, l'ouverture de ce compte est soumise à des restrictions d'utilisation, telle que la renonciation à toute procuration en faveur de tiers et à tout moyen de paiement, tel que chèque, carte de crédit, carte EC ou autres.
L'offre de ces prestations est inspirée, selon la Banque cantonale, des suggestions et réflexions apportées par l'échange intervenu avec le SIT, lors de l'étude d'un récent cas d'espèce.
Je me suis également intéressée aux conditions faites par les autres banques aux titulaires du permis N. Voici leurs réponses :
Les personnes peuvent ouvrir un compte d'épargne au Crédit Suisse, en se présentant au guichet munies de leur permis.
La SBS ouvre des comptes en faveur des porteurs de permis N, moyennant le dépôt minimum de 25 000 francs suisses; sinon elle conseille d'ouvrir des comptes à la poste.
L'UBS ouvre ces comptes sur la base d'une attestation de salaire valide de l'employeur.
M. Bernard Clerc (AdG). Madame la présidente du département, je vous remercie de vos explications.
La Banque cantonale refuse donc d'ouvrir un compte à un détenteur du permis N s'il se trouve au chômage, puisqu'une attestation de l'employeur est nécessaire à cet effet.
Je trouve cela inadmissible, d'autant plus que l'utilisation d'un tel compte est assortie des restrictions que vous avez évoquées. La personne ne peut donc pas avoir un découvert.
Encore une fois, je trouve intolérable que cette interdiction soit faite à des personnes titulaires du permis N. On les accepte quand elles sont salariées, on les refuse quand elles sont au chômage. C'est une inégalité de traitement inadmissible.
Cette interpellation est close.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit d'investissement
Art. 2 Subvention fédérale
Art. 3 Budget d'investissement
Art. 4 Financement et couverture des charges financières
Art. 5 Amortissement
Art. 6 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève
Art. 7 Utilité publique
EXPOSÉ DES MOTIFS
A. Cadre gÉnÉral de la renaturation de la Seymaz et de ses affluents
1. Préambule
La Seymaz, seul cours d'eau de quelque importance situé entièrement sur territoire genevois, souffre depuis plusieurs années, voire décennies, de problèmes de qualité des eaux. Une récente étude effectuée par ECOTOX montre que la qualité globale des eaux de la Seymaz est mauvaise.
De plus, la Seymaz pose des problèmes d'insuffisance hydraulique qui se manifestent par des débordements, inondations et érosions périodiques, toujours plus marqués et fréquents, tant dans la partie rurale amont que dans celle, urbanisée, aval de la rivière.
Finalement le délabrement du canal de la Seymaz, en amont du pont Bochet est tel que son entretien ne peut plus être assuré de façon satisfaisante. La situation actuelle n'est donc plus acceptable à maints égards. Des travaux sont donc indispensables et doivent être exécutés de manière urgente.
Plutôt que de réhabiliter le canal en lui laissant son aspect paysager monotone ainsi que tous les inconvénients mentionnés, il est prévu de redonner à la Seymaz un aspect naturel. La revitalisation du cours d'eau permettra d'améliorer sensiblement ses fonctions hydroécologiques et de recréer, aux abords de son lit, des milieux diversifiés. Cette optique correspond à une volonté unanime qui a été matérialisée le 25 avril 1997 par votre Conseil en modifiant la loi sur les eaux allouant au minimum 10 millions de francs par année en vue de la réalisation de ce type de projets. Cette démarche est conforme au droit fédéral en la matière et notamment à l'art. 4, al. 2 de la loi fédérale sur l'aménagement des cours d'eau.
Ces travaux s'inscrivent comme troisième étape d'une démarche de réhabilitation de la Seymaz débutée en 1981.
Les mesures nécessaires à la résolution des problèmes évoqués ci-dessus vont impliquer la renaturation de la Seymaz et de ses affluents, le développement et la valorisation de zones écologiques et naturelles, la réalisation d'améliorations foncières liées aux travaux de renaturation et la gestion du risque d'inondation.
Le présent projet de loi s'inscrit dans ce cadre général qui sera détaillé dans l'exposé des motifs qui suit.
Ses objectifs sont :
1. la renaturation de la Seymaz dans la zone de Rouëlbeau, sur des terrains déjà propriété de l'Etat ;
2. l'acquisition de terrains permettant de dégager l'emprise nécessaire à la renaturation de la Seymaz et de ses affluents et à la réalisation d'une zone humide dans les anciens marais de Sionnet. Le dégagement de l'emprise pourrait se faire par un remaniement parcellaire volontaire comparable à ce qui s'est fait lors de la construction de l'autoroute de contournement ;
3. la réalisation des études globales nécessaires à la renaturation de l'ensemble du tronçon canalisé de la Seymaz et de ses affluents.
Dans l'exposé des motifs qui suit, le cadre général de renaturation de l'ensemble de la Seymaz et de ses affluents est présenté de manière à ce que le contexte global dans lequel s'inscrit la présente demande de crédit soit connu.
Il convient de préciser que les travaux proposés par ce projet de loi, même s'ils s'inscrivent dans le projet global vont apporter une amélioration sensible de la valeur environnementale de la Haute Seymaz. Par le remaniement parcellaire proposé, ils amèneront également un avantage pour l'agriculture de la région.
2. Le bassin versant de la Seymaz
2.1. Topographie
Situé entre la colline de Cologny à l'Ouest, le village de Gy au Nord, les Voirons à l'Est et Villette au Sud, le bassin versant de la Seymaz est divisé en deux zones principales (cf. plan no 1001) :
- la zone rurale, en amont du pont Bochet, sur territoire des communes de Choulex, Vandoeuvres, Puplinge, Presinge, Jussy, Meinier et Gy ;
- la zone urbaine, en aval du pont Bochet, sur territoire des communes de Chêne-Bourg, Chêne-Bougeries, Thônex et Vandoeuvres.
La Seymaz comprend trois affluents principaux : le Chambet, le Chamboton et le Manson (qui devient le Nant du Paradis dans sa partie inférieure).
Ses caractéristiques physiques sont les suivantes :
Surface totale du bassin versant: 38.43 km²
bassin "; rural " (à l'amont du pont Bochet) : 30.20 km² (79 %)
bassin "; urbain " (à l'aval du pont Bochet) : 8.23 km² (21 %)
Longueur du cours d'eau : 14.85 km, dont 9.12 km en zone rurale et 5.73 km en zone urbaine.
Dénivellation :
Point culminant du bassin versant : 511 m s.m.
(Les Grands Bois, commune de Jussy)
Altitude à la source : 472.5 m sur mer
(Les Prés de Villette, commune de Gy)
Altitude au confluent dans l'Arve : 388.5 m sur mer
Pente moyenne du cours d'eau : 5.7 %.
2.2. Géologie, morphologie
La plaine de la Seymaz est une ancienne vallée d'érosion, profondément entaillée dans la molasse, actuellement remplie d'argiles molles de fonte glaciaire en profondeur et, en surface, de dépôts de marais limoneux, crayeux et localement tourbeux.
Les terrains des anciens marais (de Meinier et Sionnet) sont constitués de dépôts palustres et fluides. De plus, une nappe phréatique baigne ces terrains; son niveau s'établit non loin de la surface du sol.
La texture superficielle apparente des sols est relativement homogène et perméable ; la disposition du bassin favorise un écoulement lent des eaux de surface ce qui explique les temps de concentration très longs observés. Cela est dû, d'une part, au relief vallonné et hétérogène du bassin et, d'autre part, au terrain plat bordant la Seymaz et aux bois de Jussy qui fonctionnent en rétention. L'urbanisation, le drainage systématique et la modification des méthodes de cultures tendent à réduire les effets retardataires naturels favorables à un étalement des crues.
2.3. Occupation des sols
Sur l'ensemble du bassin, la répartition des surfaces est actuellement la suivante :
- habitations, routes, places et autres surfaces
- imperméables : 9 %
- forêts : 14 %
- vignes : 4 %
- jardins : 5 %
- champs, prés : 68 %
L'examen des états actuel et futur prévisionnel fait apparaître que, si l'évolution reste très limitée sur la partie rurale du bassin, elle n'est pas négligeable en ce qui concerne la partie urbaine où le taux d'occupation des sols va s'accroître dans un certain nombre de sous-bassins actuellement faiblement urbanisés.
C'est ainsi que l'imperméabilité moyenne sur le bassin urbain, actuellement de 14 %, pourrait passer à 25 % environ, selon les prévisions d'aménagement. Cette urbanisation augmenterait le débit de crue d'environ 60 % à Villette lors de pluies orageuses.
2.4. Historique des marais et de leur drainage (Selon H. Burdet, 1975)
La vaste dépression qui s'étend entre Choulex, le Carré, Meinier, Corsinge et Sionnet, voyait, selon les saisons, s'accumuler des eaux stagnantes. De grandes haies, des creux et des canaux où l'eau se maintenait toute l'année entrecoupaient le paysage de prairies humides et de marais. Les prés humides de la Touvière séparaient la masse générale des marécages en deux groupes distincts : les marais de Rouëlbeau et celui de Sionnet. Plus au nord, une troisième dépression avec accumulation d'eau portait le nom de marais de La Pallanterie.
Au début du siècle et dans le but d'accroître la surface cultivable du canton, divers remaniements parcellaires et projets d'assainissement et de drainage des marais ont été élaborés, notamment celui consistant à canaliser la Seymaz dès l'amont du pont Ladame, selon une pente très faible de 0,7 %. Les premiers travaux de drainage furent exécutés dans les années 1909-1914 mais les plus grands travaux d'assèchement des marais et la canalisation de la Seymaz furent entrepris entre 1915 et 1924.
Suite à ces grands travaux, la plaine changea d'aspect; la géométrie de nouveaux champs quadrilla le paysage débarrassé de ses haies et de ses arbres.
Quelques dizaines d'années après l'assèchement des drainages, on vit apparaître ici et là des dépressions inondées lors de fortes pluies. La terre noire accumulée par des siècles de lente décomposition végétale résistait mal à la répétition des labours et, sous l'effet de l'assèchement, se tassait considérablement. Le drainage a eu pour résultat d'abaisser le niveau du terrain de l'ordre d'un mètre. Ces tassements ont fait apparaître des cuvettes, qui se remplissent d'eau périodiquement au gré des saisons et des pluies.
Le tassement généralisé de la zone des marais a également affecté le lit même de la Seymaz qui est ainsi de moins en moins en mesure d'évacuer les eaux de ruissellement qui lui parviennent. Actuellement, il n'est pas rare de voir la plaine de Sionnet reprendre l'aspect d'un lac.
2.5. Etat actuel du lit de la Seymaz
a) Zone rurale :
Le canal de la Seymaz, en amont du pont Bochet, est caractérisé par des talus herbeux, à la limite de la stabilité, le fond étant constitué par une cunette en béton fortement dégradée et localement déformée par des tassements de terrain, conséquences de la lente dessiccation de la tourbe après assainissement.
La pente du canal étant très faible (0.7 %), les vitesses d'écoulement le sont également : 0.2 à 0.3 m/s par temps sec pour les débits d'étiage et de l'ordre de 1.3 à 1.4 m/s lors des crues. Ces faibles vitesses d'écoulement favorisent l'envasement, ce qui provoque une prolifération de plantes aquatiques engendrant une obturation du lit mineur en période d'étiage.
Le rôle paysager du canal est inexistant, aussi bien par sa rigidité que par sa nudité; elle ne correspond plus à l'image que l'on se fait d'un cours. Il en est de même de ses affluents.
Au niveau biologique, la Seymaz ne permet pas l'installation d'une faune et d'une flore variée dans son lit et sur ses berges.
b) Zone urbaine :
Dans la partie urbaine, en aval du pont Bochet, deux tronçons ont été aménagés dans les années 80 en vue d'augmenter leur capacité d'écoulement. Il s'agit du tronçon au droit du quartier du Pont-de-Sous-Ville à Chêne-Bougeries ainsi qu'entre les ponts Bochet et Ladame. Ces travaux, prenant déjà en compte les exigences modernes de la protection de l'environnement, ont constitué les deux premières étapes allant dans le sens d'une réhabilitation de la Seymaz. Les travaux envisagés maintenant sur la partie haute de la Seymaz permettront une véritable renaturation de cette partie du cours d'eau.
En dehors de ces tronçons aménagés, la Seymaz urbaine est peu modifiée et a gardé un aspect très naturel. Bordée d'arbres souvent serrés, elle coule dans des méandres sur environ 5 km. Certaines érosions locales sont néanmoins susceptibles d'entrer en conflit avec le maintien des chemins et des propriétés riveraines ; à terme, une érosion généralisée, favorisée par une surfréquentation des cheminements pourrait provoquer la disparition des cordons boisés.
3. Hydrologie et capacités d'écoulement
3.1 Pluviométrie
La mesure et l'enregistrement des précipitations sont effectués par le pluviomètre de Jussy et par les pluviographes placés à Meinier, Lullier, Chevrier et Chêne-Bourg.
La moyenne annuelle des précipitations mesurées à la station de Jussy est de 880 mm/an.
Les pluies journalières maximales annuelles sont les suivantes pour différentes fréquences de retour :
Temps de retour
2 ans
10 ans
30 ans
50 ans
100 ans
Pluie de 24 h.
55 mm
76 mm
92 mm
100 mm
110 mm.
Les pluies qui provoquent actuellement une crue importante dans le bassin de la Seymaz présentent généralement deux particularités :
a) une durée supérieure à 12 heures, voire 18 heures ;
b) une hauteur totale précipitée supérieure à 35 mm.
Il convient par ailleurs de distinguer deux types de précipitations :
1) celles de type frontal, de longue durée et de hauteur d'eau totale précipitée importante, se produisant n'importe quand dans l'année et qui sont critiques pour la zone rurale et pour le bassin versant tout entier ;
2) celles de type orageux se produisant généralement en été et qui sont de courte durée ; ces pluies accusent de grandes intensités et sont critiques pour la zone urbaine.
3.2 Régime des débits
Quatre stations limnigraphiques permettent de connaître le régime des débits de la Seymaz. Il se caractérise comme suit (courbe des débits classés) à Villette (exutoire du bassin versant) :
- plus faible que 60 l/s : 25 % du temps
- entre 60 et 180 l/s : 25 % du temps
- entre 180 et 400 l/s : 25 % du temps
- entre 400 et 1000 l/s : 17 % du temps
- au-delà de 1000 l/s : 8 % du temps
Le régime peut donc être qualifié de très faible puisqu'il est largement inférieur à 1000 l/s pendant 335 jours par année.
Les observations limnigraphiques démontrent une perturbation du régime naturel qui devrait encore s'aggraver. Cela est dû, d'une part, à l'augmentation des surfaces imperméables du bassin versant (chaussées et bâtiments), à la diminution de la capacité de rétention résultant de la modification de l'occupation des sols et du drainage systématique des terrains agricoles et, d'autre part, à l'évolution des méthodes de cultures (serres en plastique, par exemple) modifiant l'effet des précipitations exceptionnelles (augmentation des débits maximums de pointe) et provoquant des périodes d'étiages plus prononcées et prolongées.
Dans l'état actuel, les débits de pointe maximums sont dus aux pluies de longue durée, de type frontal, couvrant le bassin entier. C'est alors essentiellement la zone rurale qui contribue à ces débits maximums, la zone urbaine ayant une étendue moindre.
Les débits générés par ces pluies de longue durée sur l'ensemble du bassin versant sont :
Débit maximum en m3/s
(pour les pluies de longue durée)
zone rurale : au pont Bochet
au km 6.2
zone urbaine : à Villette
km 0.5
Q 30
25
31
Q 100
33
40
Capacité
30
16
Q 30etQ 100sont les débits qui se présentent en moyenne une fois tous les 30 ans, respectivement tous les 100 ans.
Lors d'un accroissement de l'urbanisation, les débits de pointe provoqués par les pluies de longue durée restent pratiquement inchangés. Les changements sont par contre importants dans le cas des pluies orageuses qui génèrent des crues surtout en zone urbaine, en raison du taux d'urbanisation plus importante.
Pour les pluies de courte durée et dans la zone urbaine, les prévisions d'urbanisation et d'occupation des sols à l'horizon 2000 provoqueront une majoration importante des débits de crue d'environ 60 % à Villette.
Débit maximum en m3/s
(pour les pluies orageuses)
zone rurale : au pont Bochet
au km 6.2
zone urbaine : à Villette
km 0.5
état 1983
état futur
état 1983
état futur
Q 30
4
4
10
17
Q 100
8
8
18
27
Capacité
30
16
3.3 Capacités d'écoulement de la Seymaz
Les capacités d'écoulement, avant débordement, sont actuellement les suivantes :
Tronçons
Capacité d'écou-
lement (m3/s)
Etat du cours d'eau
- en amont du pont de Chevrier
20
canalisé
- du pont de Chevrier au pont Bochet (km 7.5 au km 6.2)
30
canalisé
- du pont Bochet au pont Ladame (km 6.2 au km 5.8)
65
aménagé
- du pont Ladame au pont SNCF (km 5.8 au km 2.9)
18
naturel
- du pont SNCF à la route Blanche (km 2.9 au km 1.6)
27
naturel(partiellement canalisé)
- de la route Blanche au confluent à l'Arve (km 1.6 au km 0)
16
naturel
3.4. Inondations
L'apparence du bassin versant de la Seymaz a sensiblement changé en moins d'un siècle, surtout dans sa partie aval, passant d'un bassin presque totalement rural à un bassin partiellement urbanisé. Simultanément, l'agriculture a évolué vers des pratiques modernes utilisant des machines lourdes et un mode de culture intensif.
Cette évolution a eu pour conséquence des inondations périodiques aussi bien de la zone urbaine que de la zone rurale.
La dernière grande crue date du 28 janvier 1979 ; la pluie tombée sur le bassin versant fut de 70 mm en 24 heures à Jussy et le débit de pointe au pont Bochet d'environ 20 m3/s. Selon les relevés effectués, les inondations principales se sont situées (cf. plan no 1002) :
- aux anciens marais de Sionnet, aux lieux-dits "; Pré de la Donnaz " et "; les Creuses " (km 9.5) ;
- à la jonction de la Seymaz avec le Nant du Paradis, au lieu-dit "; les Tattes " (km 8.6) ;
- entre les ponts Ladame (km 5.6) et SNCF (km 2.9) ;
- dès le km 2.3 jusqu'à l'Arve, avec notamment la zone de la route Blanche au lieu-dit "; Sous Moulin ".
En plus des débordements directs de la Seymaz et de ses affluents, de nombreuses flaques se sont formées, soit par une remontée de la nappe phréatique, soit en raison de la saturation des sols empêchant ainsi l'infiltration des eaux pluviales.
Un troisième type d'inondation est dû à l'apport d'eau extérieur et notamment aux débordements du Foron, rivière longeant la limite est du bassin versant, dont une partie des eaux sort du lit dans les zones de Puplinge et de Cornière.
Il apparaît donc que la partie aval du bassin de la Seymaz est soumise à un danger d'inondation qui entraîne un risque pour les personnes et les biens. De plus, sur ce tronçon la végétation riveraine, qui a été maintenue dans son état naturel, présente une vulnérabilité élevée aux érosions dues aux crues. Aucune amélioration substantielle de cet état n'est à attendre de la réalisation des travaux de renaturation de la partie amont de la Seymaz.
4. Cadre général de la renaturation du bassin de la Seymaz
4.1 Réhabilitation de la Seymaz et de ses affluents
4.1.1 Décanalisation de la Seymaz
Depuis de nombreuses années la fonction paysagère des cours d'eau est prise en compte autant que ses fonctions écologiques ou hydrauliques. Au vu du délabrement actuel du lit de la Seymaz en amont du pont Bochet et de la nécessité d'y remédier, il est proposé, plutôt que de simplement le réparer, d'aménager le lit et les berges de manière écologique et naturelle en recréant un aspect paysager conforme aux attentes modernes. Les fonctions d'un cours d'eau étant intimement liées, cela favorisera également la création de milieux diversifiés et participera à l'amélioration de la qualité de l'eau. Le futur lit de la Seymaz verra son gabarit augmenté et comportera une capacité intrinsèque d'écoulement qui favorisera de manière générale les conditions sur le tronçon amont.
4.1.2 Aspect paysager
Depuis de nombreuses années, l'homme utilise la rivière pour de nombreux objectifs. Il l'a transformée, selon ses besoins du moment, recréant un nouveau type de cours d'eau. Le plus souvent, ces aménagements ont été faits avec peu de moyens techniques. Le canal d'écoulement que constitue la Seymaz aujourd'hui dans son cours amont connaît un profil uniforme, monotone et rarement bordé de végétation. La végétation riveraine habituelle et adaptée à ce milieu est souvent bannie. Modifier son tracé permettra de recréer un couloir écologique nécessaire et utile à la nature et redonnera une image moins figée et rigide à la plaine. En effet, les cours d'eau naturels irréguliers, tantôt rapides, tantôt lents, avec une végétation riveraine variable et des rives changeantes constituent un écosystème très diversifié, abritant une grande variété d'animaux et de plantes.
Le cours d'eau et le paysage qu'ils forment sont inséparables. En utilisant l'eau, l'homme a donc contribué en même temps à modeler les paysages, puis à les transformer. Le retour à un état naturel de la Seymaz sera un atout pour le paysage de cette plaine. Ce nouvel aménagement constituera un milieu naturel très ramifié, empreint d'un grand dynamisme structurant le paysage. En outre, il est primordial d'analyser le paysage existant, de comprendre pourquoi il est ainsi, et d'établir les lignes directrices de ce qu'il devra devenir une fois le cours d'eau reconstitué, à savoir, les liaisons de ce cordon écologique avec toutes les unités naturelles de valeur de la région. L'étude paysagère devra englober toutes les valeurs du bassin versant et l'image que l'on souhaite redonner à cette plaine.
4.1.3 Aspects piscicoles et benthiques
Les caractéristiques actuelles de la haute Seymaz, homogène à l'extrême avec son tracé rectiligne, son lit bétonné et une arborisation faible ou inexistante sur certains tronçons, exclut pratiquement toute vie piscicole et banalise la composition des communautés benthiques. En effet, comme dans tout écosystème, c'est la complexité aussi bien structurelle que biologique qui génère une diversité spécifique importante.
Le rapport de la Commission cantonale de la protection des eaux (1982) fait état de la présence de 15 espèces de poissons recensées sur la Seymaz. Cela dénote bien qu'un potentiel existe mais qu'il est malheureusement limité dans le secteur amont du cours d'eau, en raison d'une simplification extrême de l'habitat et, vraisemblablement aussi, de la mauvaise qualité de l'eau.
Le projet de réaménagement, tant physique que végétal, de la Seymaz et de ses affluents permettra d'améliorer sensiblement la situation.
En ce qui concerne l'arrivée de produits eutrophisants ou toxiques, en plus de contrôles plus rigoureux des rejets, les mesures suivantes sont prévues :
- aménagement naturel de toute la zone de Rouëlbeau avec en périphérie, l'exploitation extensive de prairies, d'où limitation des intrants (voir § 6.1 ci-après) ;
- augmentation des surfaces de prairies extensives, notamment dans la zone des marais de Sionnet (limitation des engrais et produits phytosanitaires).
D'autre part, l'agrandissement des surfaces des berges et la végétalisation prévue permettront une plus grande absorption des composés minéraux.
4.2 Développement et valorisation de zones écologiques et naturelles
Des voix s'élèvent pour demander le rétablissement d'un milieu naturel revalorisé dans la zone des anciens marais de Sionnet, les uns souhaitant le retour aux grands marais d'avant 1900, les autres, le retour à une agriculture extensive respectueuse de l'environnement et permettant une diversification du milieu.
Il ne semble pas souhaitable de recréer spécifiquement de très grands marais. Du point de vue écologique, il est préférable au contraire de viser à la plus grande diversification possible. Du point de vue hydrologique également, la rétention que formerait un marais à Sionnet n'aurait, on l'a vu, qu'une influence relativement limitée sur les débits.
Par ailleurs, le coût du démantèlement des infrastructures actuelles et de l'évacuation des remblais existants seraient prohibitifs. Finalement l'impact sur la zone agricole serait inacceptable.
Si le coeur des marais de Sionnet est peu approprié pour le maintien d'une agriculture intensive, le site s'avère au contraire favorable à un aménagement de type naturel. Les aménagements proposés n'auront donc pas pour but de faire renaître les anciens marais dans toute leur étendue, mais de créer une certaine diversité dans un milieu intéressant du point de vue naturel.
Les surfaces au coeur des anciens marais resteront en zone agricole, mais elles seront exploitées et gérées de façon extensive en acceptant les conditions piézométriques existantes. Ainsi, les marais pourront alterner avec des prairies humides.
4.3 Réalisation d'améliorations foncières
La réalisation des importants travaux nécessaires à la renaturation de la Seymaz et de ses affluents ainsi que, suivant la variante retenue, la diminution du risque lié aux inondations aura une influence non négligeable sur la zone agricole. L'approche retenue pour la gestion de cet impact est inspirée des expériences faites dans le cadre de la réalisation de l'autoroute.
Un périmètre dans lequel des améliorations foncières pourront être réalisées est en cours de définition. Certaines améliorations, tel le rétablissement des réseaux d'évacuation des eaux et de desserte agricole, découlent directement des travaux de renaturation. Ces améliorations seront prises en charge par l'Etat. Il en va de même des travaux géométriques devant notamment permettre de dégager les emprises nécessaires à la réalisation du projet de renaturation. Les propriétaires intégrés dans le périmètre pourront en outre, s'ils le désirent, saisir l'occasion pour réaliser, à leur frais, d'autre mesures.
4.4 Gestion du risque d'inondations
Les problèmes d'inondations ont des causes diverses et appellent des réponses différentes selon la zone concernée :
4.4.1 Zone de la haute Seymaz
Comme déjà précisé, les problèmes d'inondations de la haute Seymaz sont essentiellement liés à l'assèchement des anciens marais qui a provoqué un tassement généralisé de l'ordre d'un mètre. Or, comme l'abaissement du niveau d'eau, ainsi que l'installation de nouveaux drainages ne sont pas possibles, ni techniquement ni économiquement, la seule mesure pour empêcher les inondations périodiques consisterait en un remblayage combiné avec un drainage des terrains inondés ou, du moins, une partie d'entre eux. Cette solution a cependant des limites car sur les sols tourbeux, le poids des nouveaux remblais engendrera inévitablement de nouveaux tassements, vouant à l'échec, à moyen terme, l'opération. Les remblayages devront donc être envisagés sur les zones périphériques où l'épaisseur des tourbes est moins importante.
4.4.2 Zones inondées par les débordements du Foron
Les zones inondées par les débordements du Foron se situent essentiellement entre Champ-Dollon et Puplinge. Un chenal artificiel reliant le Foron à la Seymaz, à travers champs entre Puplinge et Pont Bochet, aurait permis d'y concentrer ces venues d'eau. Cette solution a été abandonnée par le Conseil d'Etat. Le risque d'inondation dû au Foron sera donc abordé de façon dissociée de celui de la Seymaz.
L'opportunité d'intégrer une étude dans le cadre des négociations en cours avec les collectivités françaises en vue d'un contrat de rivière sera évaluée.
4.4.3 Zone urbaine
Vu l'insuffisante capacité d'écoulement du lit de la Seymaz, trois types de mesures sont envisageables. L'une consiste à augmenter cette capacité, l'autre à réduire les débits de crue et la troisième, à accepter le danger de débordement.
a) La première de ces mesures nécessiterait d'importants travaux d'élargissement des sections, d'endiguement des berges sur plus de 3'500 m ainsi que le rehaussement, respectivement, la reconstruction de plusieurs ponts. Cette mesure, techniquement réalisable, aurait des coûts très importants et impliquerait la disparition du dernier tronçon naturel de la Seymaz. Cette solution a donc été abandonnée.
b) Le deuxième type de mesures, consistant à réduire les débits de crues, comprend quatre démarches possibles :
1. création d'un bassin de rétention en amont, au droit des anciens marais de Sionnet. Ce bassin, d'un volume de 100'000 m3 environ, aurait cependant une influence limitée sur les débits, avec une réduction des débits de pointe, à Pont Bochet, de l'ordre de 10 % seulement. Cette diminution plutôt faible s'explique par l'emplacement de la rétention très en amont dans le bassin versant. Cette solution n'est donc pas réalisable.
2. Pour réduire le débit de la crue centennale à Pont Bochet à 15 m3/s, soit une réduction de l'ordre de 55 %, il faudrait un volume de rétention d'au moins 500'000 à proximité du pont, ce qui n'est pas concevable.
3. La solution consistant en la construction d'une galerie de décharge reliant la Seymaz au lac Léman a été abandonnée par décision du Conseil d'Etat en raison de son coût.
4. Le contrôle des ruissellements en aval du Pont Bochet dont les mesures sont relativement efficaces, mais qui ne déploieront leurs effets que très progressivement n'ont aucune influence sur les débits provoqués par des pluies de longue durée. Cette solution peut être mise en oeuvre mais ne résout pas le problème des pluies de longue durée.
c) La troisième solution consiste à accepter le risque de débordement en mettant en place un système de prévision, d'alarme, et de préparation.
Une telle solution implique une surveillance quasi continue des conditions météorologiques, de l'état d'humidité des sols et de la variation des débits ainsi que la mise en place d'un système d'information et d'alarme. C'est cette solution qui a été retenue par le Conseil d'Etat et actuellement, des contacts avec la sécurité civile ont été pris pour définir la méthode exacte à mettre en place.
4.5 Cadre général de la renaturation de la Seymaz et de ses affluents
En résumé, la renaturation de la Seymaz comporte les éléments suivants :
a) Le réaménagement et la revitalisation du cours de la Seymaz actuellement canalisé en amont du pont Bochet, en rivière naturelle et intégrée au site (4750 m).
b) Le réaménagement du Chambet dès la route de Compois (700 m).
c) La remise à ciel ouvert et l'aménagement du Chamboton (950 m).
d) La revitalisation du Nant du Paradis (450 m).
Ces quatre premiers éléments, qui concernent la renaturation de la Seymaz et de ses affluents, sont développés en détail au chapitre 5.
e) La mise en place de surfaces de compensation écologique le long du cours d'eau et dans la plaine de la Haute-Seymaz (cf. chapitre 6).
f) La réalisation d'améliorations foncières par remblayages, drainage et par création de nouveaux chemins (cf. chapitre 7).
g) Le contrôle du ruissellement dans la partie urbaine du bassin versant (cf. § 4.4).
h) La recherche de la solution optimale pour résoudre le problème des crues / inondations.
La mise en place des mesures nécessaires pour la gestion des inondations fera l'objet, ultérieurement, d'un autre plan d'action, suite aux choix politiques effectués sur la base de l'étude mentionnée ci-dessus (point h).
5. Renaturation de la Seymaz et de ses affluents
5.1 Principes
Le concept d'aménagement du nouveau lit de la Seymaz et de ses affluents est basé principalement sur une approche hydroécologique, tout en tenant compte des nombreuses contraintes existant le long du cours d'eau, tels que routes et chemins, lignes et câbles électriques et téléphoniques, gazoduc, canalisations diverses, zones agricoles, de villas et de loisirs, espaces naturels, etc.
Cette approche est la suivante (cf. plans nos 1011 et 1012).
- mise en plan d'un tracé varié, en méandres, pour le lit mineur, bien que l'axe de la Seymaz soit conservé dans son ensemble (courbes, contre-courbes et tronçons droits) ;
- adoption de gabarits différenciés, avec éloignement et pentes des berges variables ;
- création d'un profil en long comportant une alternance de zones plus ou moins profondes.
Les protections des berges contre l'érosion se feront essentiellement à l'aide de techniques issues du génie biologique : utilisation de végétaux herbacés dans le lit mineur et de végétaux ligneux dans les parties supérieures. Les talus en déblais ne seront pas recouverts de terre végétale, les terrains étant suffisamment riches du point de vue nutritif pour permettre le développement des aménagements extensifs proposés, tout en s'intégrant dans le paysage.
Les débits d'étiages étant très faibles, une attention toute particulière est portée sur les dimensions et l'aménagement du lit mineur qui pourra, selon les cas, comporter une couche de protection en matériaux graveleux.
Pour diminuer quelque peu l'influence des procédés de culture intensive utilisés sur les champs avoisinants, il s'avère indispensable de mettre en place des zones tampons bordant le futur lit de la Seymaz.
Le projet global prévoit la mise en place de surfaces de compensation écologique compatibles avec une agriculture extensive. En effet, les zones tampons, les prairies extensives et les prés à litière restent en Surface Agricole Utile (SAU). Cela implique que les agriculteurs se tenant aux conditions d'exploitation de ces surfaces définies par l'Ordonnance fédérale sur les contributions écologiques (OCEco) ou la nouvelle loi cantonale y relative, peuvent toucher les compensations prévues à cet effet, même s'ils en sont locataires. Cependant, la maîtrise foncière de ces terrains devrait échoir à l'Etat.
Une partie des surfaces à vocation naturelle se situe au centre des anciens marais de Sionnet et est conçue de manière à créer un ensemble de biotopes très intéressant situé de part et d'autre de la Seymaz.
Pour que ce milieu ne soit pas isolé, un réseau de haies le reliant aux autres zones naturelles de la région est prévu. Ce réseau s'inscrit par ailleurs parfaitement dans le plan cantonal des réseaux biologiques.
5.2 Renaturation de la Seymaz et du Chambet
En appliquant les principes d'aménagement énoncés ci-avant, le profil actuel du canal sera complètement modifié. La cunette en béton disparaît au profit d'un lit mineur serpentant à son aise au fond du nouveau gabarit. La pente des berges est variable et moins forte et permet l'installation d'une végétation étagée, adaptée aux conditions hydriques et hydrauliques (cf. plans no 1014).
La nouvelle emprise comprenant le lit d'étiage, les berges et une zone tampon est fixée à 30 m sur la majorité du tronçon (l'emprise actuelle est de 13 m). Cela nécessite soit la démolition, soit le déplacement d'infrastructures telles que routes, chemins, lignes électriques, conduites, etc. Certains ponts au gabarit insuffisant sont éliminés ou élargis; d'autres sont conservés en l'état pour opérer la rétention voulue. Pour faciliter l'entretien mécanisé des talus et du fond du lit, des banquettes plates ou à faible pente, d'environ 3 m de large, sont prévues.
Afin d'illustrer la diversité des aménagements prévus le long des cours d'eau de la Seymaz et du Chambet, six tronçons type ont été établis (cf. plans nos 1013 et 1014).
Le tracé de la Haute-Seymaz (km 9.7 au km 9.3) est totalement modifié sur une longueur de 400 m, afin de recréer une rivière la plus naturelle possible, ce qui permet également de supprimer l'angle droit actuel peu favorable hydrauliquement existant au confluent du Chambet, dans la zone de Sionnet. Le tronçon du canal ainsi supprimé sera remblayé et la surface gagnée utilisée pour l'agriculture. Une haie basse sera plantée sur l'ancienne rive droite pour marquer une limite entre zones agricoles intensive et extensive.
Le réaménagement du Chambet permet de réaliser une liaison entre sa partie située en amont de la route de Compois, actuellement déjà d'un aspect naturel, et la zone réaménagée du futur lit de la Seymaz.
Les différents types d'aménagement donnent la possibilité de replanter une série d'arbres adaptés aux cours d'eau, ce qui redonnera un aspect moins désertique à la Haute-Seymaz.
5.3 Remise à ciel ouvert du Chamboton
Le Chamboton est actuellement divisé en plusieurs tronçons. La partie supérieure est à l'état naturel; il coule ensuite dans un tuyau enterré au milieu de parcelles agricoles, pour ressortir dans un système de bassins de décantation en béton et longer la parcelle dite "; Les Creuses " dans un tuyau; il se jette dans la Seymaz au km 9.18.
Il est apparu judicieux de faire revivre ce petit cours d'eau, pour en augmenter la richesse biologique et améliorer l'esthétique paysagère de la zone. Pour ce faire, les deux tronçons enterrés seront remis à ciel ouvert. L'emprise nécessaire pour le nouveau tracé est de l'ordre de 10 m dans la partie amont du chemin du Petit Sionnet et de 20 m en aval; cette emprise comprend également une zone tampon indispensable. Là aussi il est prévu la plantation d'un cordon boisé et d'espèces buissonnantes au sommet des berges, permettant une liaison entre les divers biotopes de la région.
Il est envisagé en outre de dévier une partie des eaux du Chamboton vers les zones humides des Creuses afin de permettre le maintien et la régénération de la roselière; l'autre partie des eaux se déversera dans la zone d'inondation / rétention à créer au Pré-de-l'Oie dans le cadre des compensations Reuters.
5.4 Revitalisation du Nant du Paradis
Le tronçon à réaménager se situe uniquement sur la commune de Choulex, la partie amont se trouvant sur la commune de Presinge ayant déjà fait l'objet d'une mise en valeur naturelle par le syndicat d'améliorations foncières de Presinge.
La nouvelle emprise prévue est de 20 m, dont 5 m de zone tampon, avec plantation d'un cordon boisé.
6. Développement et valorisation de zones écologiques
6.1 Zone humide de Rouëlbeau
Cette zone, située à l'extrémité Nord-Ouest du périmètre, comprend le château en ruines et les marais asséchés de Rouëlbeau. Le site est actuellement traversé par un tuyau enterré transportant les eaux claires de La Pallanterie et les eaux de drainage des parcelles voisines.
Le but principal de l'aménagement prévu est la reconstitution d'une zone humide, avec effet de rétention, sur la parcelle, propriété de l'Etat, située entre les ruines du château et la route de Meinier.
Pour ce faire, il est nécessaire de remettre à ciel ouvert le tuyau et de créer un réseau de mares au fond de la dépression naturelle se trouvant au haut de la parcelle. Les différentes zones à mettre en place pour recréer un milieu humide digne d'intérêt, tout en maintenant une pratique agricole judicieuse, sont définies à partir du degré d'humidité, qui diminue du centre de la parcelle vers l'extérieur.
Ainsi se succèdent le bas-marais, le pré à litière, la prairie extensive humide et la prairie extensive mésophile constituant la zone tampon.
Pour conserver un tel milieu, il est impératif de l'entretenir. Il sera donc souhaitable de confier la gestion de ces surfaces extensives à un agriculteur motivé. Il est à relever qu'elles seront toujours considérées comme surfaces agricoles utiles (SAU) et qu'elles pourront bénéficier de contributions fédérales ou cantonales.
Afin d'utiliser au mieux la dépression naturelle existante comme zone de rétention, il sera procédé à un approfondissement du terrain sur une largeur de 70 m environ. Le volume de rétention sera malheureusement limité par l'exutoire du collecteur, qu'il conviendra de ne pas mettre en charge. Il est envisagé de dévier dans la zone de rétention les collecteurs d'eau claire situés sous la route de Meinier. Un dispositif de régulation automatique des débits, placé à l'entrée du voûtage sous la route, limitera la hauteur d'eau dans la cuvette.
Il est proposé également, pour recréer un milieu naturel intéressant dans la forêt des ruines du château, d'en limiter l'accès au public et d'y effectuer un important déboisement pour redonner la lumière nécessaire au développement des végétaux des strates inférieures.
6.2 Les marais de Sionnet
Deux parcelles des marais de Sionnet bénéficient déjà d'une exploitation extensive, celle appartenant à l'Hoirie Corthay en rive droite et celle dite "; Les Creuses ", de PRONATURA, en rive gauche.
Le projet prévoit d'étendre ce type d'exploitation à d'autres parcelles de la zone des marais, sans pour autant les soustraire à l'agriculture Ce genre de surfaces extensives, qui supportent des inondations périodiques sont particulièrement intéressantes en bordure de cours d'eau puisqu'elles ne font l'objet d'aucune fumure ni traitements phytosanitaires. Elles représentent de ce fait d'importantes surfaces tampon et contribuent donc à l'amélioration de la qualité de l'eau du cours d'eau.
Ce même type d'herbage sera développé le long du cours de la Seymaz, sous forme de zones tampons dans le lit majeur du cours d'eau.
6.3 Création d'une zone tampon le long de la Seymaz et de ses affluents
La bande tampon exploitable moyennant compensation écologique sera d'une largeur de 3 m et d'une longueur cumulée de 8 km occupant ainsi une surface de 24'000 m². L'opportunité de l'acquisition de ces terres sera à étudier.
7. Améliorations foncières
7.1 Situation actuelle
Les terrains limitrophes de la Haute-Seymaz et du Chambet connaissent à l'heure actuelle des difficultés d'exploitation et des pertes de rendement essentiellement liées à l'hydromorphie des sols. Les études et sondages géologiques effectués montrent clairement qu'il est vain de vouloir à tout prix exploiter les terrains du coeur du marais de Sionnet.
Il n'en est pas de même des terrains situés autour de ce marais, pour lesquels la résolution des problèmes hydriques est possible.
7.2 Améliorations proposées
Les améliorations proposées consistent, d'une part, à rétablir les réseaux de desserte et d'évacuation des eaux et, d'autre part, dans les zones périphériques des anciens marais, à la création de drainages.
Les surélévations se feront en respectant la pente naturelle du terrain.
Certaines parties seront simplement rehaussées par adjonction de terre végétale. Sur d'autres, la terre végétale sera dégrappée avant la mise en place d'une couche de remblais. La terre végétale sera ensuite remise en place pour rendre le terrain à l'exploitation. Les matériaux de remblai utilisés proviendront du réaménagement du cours d'eau, de ses affluents et de la zone de Rouëlbeau. 160'000 m³ de remblais sur les 185'000 m³ excavés (y. c. foisonnement) pourront ainsi être utilisés.
Les drainages existants, réalisés durant les années 1920-1930, étant [à considérer] comme hors service en raison des tassements et du colmatage des drains, un nouveau système de drainage est prévu sur l'ensemble des zones d'améliorations foncières. L'espacement entre les drains sera de 15 à 20 m, ils seront posés à une profondeur de 1 m, avec chemise drainante.
Une réfection partielle du réseau des chemins inclus dans le secteur est également envisagée.
D'une manière générale, le réseau des voies de circulation existant devra être adapté à la nouvelle situation créée par les divers aménagements hydrauliques et agro-naturels prévus dans la plaine de la Haute-Seymaz. Ceci limitera l'accès public dans le centre de la zone de Sionnet.
Les projets généraux d'amélioration foncière établis dans le cadre du syndicat de remaniement parcellaire préciseront les ouvrages à réaliser.
8. Entretien régulier
8.1 Remarques préliminaires
L'entretien des ouvrages sera très différent selon l'infrastructure de génie civil ou les ouvrages faisant intervenir la végétation.
Les premiers ne nécessitent pratiquement aucun entretien, si ce n'est des inspections périodiques.
Par contre, les travaux de végétalisation ont ceci de particulier qu'à leur finition, le résultat ne représente pas un ouvrage terminé. En effet, un processus de maturation commence alors, avant que l'aménagement ne fonctionne pleinement, comme une formation végétale naturelle. Et même lorsque ce stade est atteint, la pérennité de l'aménagement est obligatoirement soumise à la condition d'un entretien adapté et régulier. Les coûts d'entretien, pris en compte dans l'évaluation de la dépense nouvelle et de la charge financière du projet sont estimés au chapitre 12.
Selon le souhait exprimé par la Chambre genevoise d'agriculture, les exploitants pourront être chargés de l'entretien des tronçons revitalisés, ceci au moyens de contrats passés avec l'Etat.
Les frais d'entretien particuliers seront financés par le Fonds cantonal de renaturation.
8.2 Seymaz et affluents réaménagés
Compte tenu de la diversité des végétaux prévus, des entretiens spécifiques et réguliers sont à prévoir, chacun a fait l'objet d'une étude particulière :
- fauche des surfaces ensemencées formant les prairies extensives des futures berges ;
- maintien des cordons boisés dans les limites définies par le projet, pour garantir le gabarit d'écoulement ;
- fauche hivernale des plantes semi-aquatiques en pied de berges.
Un fractionnement des travaux d'entretien dans le temps et dans l'espace doit être prévu, afin de préserver la diversité du milieu.
L'entretien du lit mineur proprement dit, qui nécessite actuellement un important curage annuel de sédiments sera sensiblement réduit du fait des dispositions prises pour diminuer les apports minéraux. Un calendrier et des directives d'interventions ont d'ores et déjà été établis.
8.3 Personnel et moyens techniques
L'entretien actuel de la Seymaz, cours d'eau cantonal, est assuré par une équipe du service du lac et des cours d'eau, qui dispose des engins nécessaires et a acquis une parfaite connaissance du site.
Il en sera de même pour le futur en ce qui concerne le lit mineur du cours d'eau, avec une adaptation nécessaire à la nouvelle situation. Un complément d'engins adéquats devra être acquis pour assurer le nouveau type d'entretien prévu, de même qu'un renforcement du personnel attribué à cette tâche. Pour ce qui est du lit majeur et des zones tampon, les agriculteurs seront mis à contribution moyennant compensations.
9. Impact sur l'environnement
L'impact du projet sur l'environnement existant dans les différents domaines concernés a été examiné.
Les impacts pendant les travaux, sur l'air, le bruit, les sols et les eaux restent à étudier de manière plus approfondie. A cet effet, il est prévu d'effectuer une étude d'impact au sens de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE) dans laquelle l'impact paysager sera étudié et largement abordé.
10. Mode de réalisations
10.1 Phasage
La renaturation de la Seymaz doit être considérée comme un ensemble cohérent dont tous les éléments sont compatibles.
Cependant, au vu des coûts de réalisation des travaux et du temps qu'ils nécessiteront chaque projet fera l'objet de demandes de crédits distinctes de manière à engendrer une dépense annuelle compatible avec le montant réservé pour les travaux de renaturation. Un échelonnement des travaux permet un meilleur contrôle parlementaire sur les dépenses et une évaluation des travaux réalisés.
Par ailleurs, chaque projet présenté aura son unité de sens et son utilité propre. Il n'impliquera pas d'engagement pour l'avenir.
Le phasage pourrait s'articuler de la manière suivante :
Phase 1. Mesures préparatoires et réalisation de la zone humide de Rouëlbeau.
Phase 2. Achat des terrains nécessaires et échanges. Création de la zone des "; Marais de Sionnet ". Poursuite des études hydrologiques en vue de la proposition d'une solution limitant le risque lié aux inondations.
Phase 3. Renaturation de la Seymaz et de ses affluents de l'aval vers l'amont. Améliorations foncières et réalisation des voies de circulation seront faites en parallèle avec le réaménagement des cours d'eau. En parallèle également, prise de décisions et résolution du problème hydrologique.
10.2 Réalisation des différents ouvrages
La durée totale nécessitée par la revalorisation dépendra de la volonté politique et des moyens financiers disponibles. Elle peut raisonnablement être évaluée entre 8 et 10 ans.
11. Estimation des coûts de réalisation
11.1 Bases de l'estimation
Les coûts sont calculés par application de prix unitaires valables en l'état.
Il a été admis, en ce qui concerne les terrassements des cours d'eau, qu'une majorité des matériaux excavés sera réutilisée pour les améliorations foncières. La mise en décharge du solde est prise en compte dans le coût de la renaturation. Les terres végétales seront réutilisées à 100 %, soit un volume de l'ordre de 37'000 m3. Au total, 197'000 m3 de matériaux d'excavation, y compris les terres végétales, seront réutilisés à proximité des travaux de renaturation.
Pour l'augmentation du gabarit des cours d'eau, la surface de terrain nécessaire, entièrement située en zone agricole, est d'environ 91'000 m2. Les zones tampon créées le long de la Seymaz représentent environ 24'000 m2, alors que celles faisant l'objet de compensation écologique à Sionnet et Rouëlbeau s'étendent sur 30 hectares environ.
Une provision en vue de l'acquisition de terrains est comprise dans la présente demande de crédit.
L'étude préliminaire déjà effectuée concerne le projet définitif. Elle a coûté 140 000 F (y. c. TVA) et a été imputée provisoirement sous le compte "; frais d'études du département des travaux publics et de l'énergie ", rubrique 51.01.01.508.01.
Pour les divers et imprévus devisés à 10 %, il est tenu compte de l'incertitude sur la qualité des terrains rencontrés lors de la réalisation (récupération sur place ou évacuation en décharge), des problèmes d'acquisition et de gestion des terrains et des divers impondérables liés à ce type de travaux.
11.2 Estimation des coûts
Le coût total de la renaturation de la Seymaz est estimé à 51 000 000 F.
Il comprend la TVA, le renchérissement, toutes les études nécessaires ainsi que l'acquisition des terrains et des machines pour l'entretien.
12. Estimation des coûts d'entretien
12.1 Bases de l'estimation
Les coûts sont calculés par application des prix unitaires valables aux conditions économiques actuelles. Les données unitaires de base sont tirées de la publication éditée par le service romand de vulgarisation agricole : "; Milieux naturels et agriculture - guide pour le calcul des indemnités " 1993.
12.2 Coûts annuels de l'entretien des cours d'eau
Pour l'ensemble du projet de renaturation, les frais d'entretien se monteront à 150 000 F environ.
En plus du personnel actuel, un poste supplémentaire devra être ajouté à l'effectif du service du lac et des cours d'eau affecté à cette tâche : 70 000 F.
12.3 Autres surfaces
La plupart des prairies humides et prairies extensives situées hors de la section réaménagée de la Seymaz et de ses affluents, devraient être incluses, dans la mesure du possible, dans les SAU ("; surfaces agricoles utiles "), louées à des exploitants agricoles.
B. PremiÈre Étape des travaux
1. Préambule
La réalisation de la renaturation de la Seymaz comporte une première phase préparatoire concernant avant tout les 2 aspects suivants :
- la recherche d'une solution au problème de la maîtrise des terrains ;
- la réalisation d'une étude d'impact sur l'environnement conforme la législation fédérale.
Cette phase préparatoire permettra également de se doter des moyens nécessaires pour développer et valoriser les zones écologiques et pour réaliser des remaniements parcellaires. Ces derniers permettront d'améliorer les conditions d'exploitation agricole actuellement compromises par les inondations dues à l'affaissement des terrains. Cette phase a donc un sens pour elle-même, indépendamment des travaux de renaturation qui pourraient être réalisés ultérieurement.
De plus la maîtrise par l'Etat des terrains dans la zone de Rouëlbeau permet de commencer rapidement son développement et sa valorisation en zone écologique.
Cette première étape fait l'objet de la demande de crédit de 9 500 000 F soumise ici.
Chacune des étapes suivantes fera l'objet d'un projet de loi d'investissement ad hoc.
2 . Description des opérations
2.1 Remaniement parcellaire
Une opération de remaniement parcellaire volontaire sera proposée aux propriétaires fonciers de la région. Elle doit être initiée rapidement afin de favoriser des négociations globales en matière foncière.
En cas de refus du remaniement parcellaire, les acquisitions foncières se réaliseront de gré à gré ou par voie d'expropriation.
2.2 Etude d'impact
Les travaux de renaturation prévus tombent sous l'ordonnance sur les études d'impact sur l'environnement (OEIE). Par conséquent, il est impératif de lancer rapidement cet ouvrage qui peut nécessiter jusqu'à deux ans d'étude.
Cette étude prendra en compte tout le bassin versant de la Seymaz.
2.3 Etude paysagère
Une étude permettant de définir une ligne directrice globale pour le traitement paysager du bassin en relation avec les travaux de renaturation doit être lancée. Elle permettra de s'assurer que les options techniques choisies soient conformes à une volonté de gestion cohérente du paysage genevois.
2.4 Développement de la zone de Rouëlbeau
Ces travaux sont décrits dans le § 6.1 de la partie A ci-dessus.
3. Estimation des coûts
Au vu de la conjoncture actuelle des prix et de l'attribution des études sur une base forfaitaire, aucun renchérissement n'est à attendre des coûts énoncés ci-dessous.
F
A
Etudes préliminaires (déjà effectuées)
F
140 000
B
Acquisitions de terrains
F
5 200 000
C
Travaux, honoraires et frais (sans TVA)Réalisation de travaux préparatoiresa) Remaniement parcellaireb) Etude d'impactc) Etude paysagèreTotalDéveloppement et valorisation de zone écologiqueProjet d'exécutionTravauxDivers et imprévus (10 %)Total travaux et honoraires (sans TVA)
2 000 000350 00015 0002 365 000150 0001 000 000351 5003'866 500
D.
TVA 6,5 % de C
251 323
E.
Attribution au Fonds cantonal de décoration. (1 % de A, C, D)
F
42 578
TOTAL GÉNÉRAL
Arrondi à
F
9 500 401
9 500 000
L'entretien de la zone de Rouëlbeau, sera confié, pour la majorité de la zone, à un agriculteur de la région. Les parties les plus sensibles, soit le cours d'eau reconstitué et ses abords immédiats, seront entretenues par une équipe de spécialistes du service du lac et des cours d'eau. Le coût annuel d'entretien sera de 20 000 F, pris en charge par le Fonds de renaturation au sens des art. 107 à 111 de la loi cantonale sur les eaux.
4. Calendrier des opérations
4.1 Réalisation des travaux préparatoires
Ces études, qui conditionnent tout le déroulement du projet général, devront être lancées dès l'attribution du crédit.
Leur durée est estimée à :
- remaniement parcellaire : s'étendra sur toute la durée des travaux soit 8 à 10 ans
- étude d'impact : 18 mois
- étude paysagère : 2 mois
- projet d'exécution pour Rouëlbeau : 1 mois
4.2 Développement et valorisation de zone écologique
Ces travaux pourront se dérouler en 6 mois et devront être exécutés de préférence en été.
4.3 Calendrier des dépenses
Total 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
9.5 0.3 2.4 1.5 1.4 1.4 1.3 1 0.2
5. Evaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière du projet
Les tableaux présentés en annexe :
- "; Evaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière ".
- "; Evaluation des charges financières moyennes "
donnent la situation de ce projet au regard de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
6. Conclusion
En conclusion, le crédit demandé permettra de réaliser une zone naturelle à Rouëlbeau et à l'Etat de se rendre propriétaire, par voie d'échange, d'une bande de terrain jouxtant la Seymaz. Celle-ci améliorera la qualité des eaux et fera bénéficier les agriculteurs concernés de terrains se prêtant mieux à l'exploitation agricole.
Les conditions cadres nécessaires à la renaturation du bassin de la Seymaz et la valorisation d'exploitations agricoles de la région pourront ainsi être réalisées.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs qui nous conduisent à soumettre à votre bienveillante attention le présent projet de loi.
Annexes
No 1
Tableau :
Evaluation des charges financières moyennes.
No 2
Tableau :
Evaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière.
No 3
Plan 1001 - Situation générale du bassin versant et des aménagements.
No 4
Figure 1 :
Schéma global d'écoulement.
TABLE DES MATIÈRES
A. Cadre général de la renaturation de la Seymaz et de ses affluents
1. Préambule
2. Le bassin versant de la Seymaz 4
2.1. Topographie 4
2.2. Géologie, morphologie 5
2.3. Occupation des sols 5
2.4. Historique des marais et de leur drainage (Selon H. Burdet, 1975) 6
2.5. Etat actuel du lit de la Seymaz 7
3. Hydrologie et capacités d'écoulement 8
3.1. Pluviométrie 8
3.2. Régime des débits 9
3.3. Capacités d'écoulement de la Seymaz 10
3.4. Inondations 11
4. Cadre général de la renaturation du bassin de la Seymaz 12
4.1. Réhabilitation de la Seymaz et de ses affluents 12
4.1.1 Décanalisation de la Seymaz 12
4.1.2 Aspect paysager 12
4.1.3Aspects piscicoles et benthiques 13
4.2. Développement et valorisation de zones écologiques et naturelles 13
4.3. Réalisation d'améliorations foncières 14
4.4. Gestion du risque d'inondations 14
4.4.1 Zone de la haute Seymaz 14
4.4.2 Zones inondées par les débordements du Foron 15
4.4.3 Zone urbaine 15
4.5. Cadre général de la renaturation de la Seymaz et de ses affluents 16
5. Renaturation de la Seymaz et de ses affluents 17
5.1. Principes 17
5.2. Renaturation de la Seymaz et du Chambet 18
5.3. Remise à ciel ouvert du Chamboton 19
5.4. Revitalisation du Nant du Paradis 19
6. Développement et valorisation de zones écologiques 20
6.1. Zone humide de Rouëlbeau 20
6.2. Les marais de Sionnet 21
6.3. Création d'une zone tampon le long de la Seymaz et de ses affluents 21
7. Améliorations foncières 21
7.1. Situation actuelle 21
7.2. Améliorations proposées 21
8. Entretien régulier 22
8.1. Remarques préliminaires 22
8.2. Seymaz et affluents réaménagés 23
8.3. Personnel et moyens techniques 23
9. Impact sur l'environnement 23
10. Mode de réalisations 24
10.1. Phasage 24
10.2. Réalisation des différents ouvrages 24
11. Estimation des coûts de réalisation 24
11.1. Bases de l'estimation 24
11.2. Estimation des coûts 25
12. Estimation des coûts d'entretien 25
12.1. Bases de l'estimation 25
12.2. Coûts annuels de l'entretien des cours d'eau 25
12.3. Autres surfaces 25
B. Première étape des travaux
1. Préambule 26
2. Description des opérations 26
2.1. Remaniement parcellaire 26
2.2. Etude d'impact 27
2.3. Etude paysagère 27
2.4. Développement de la zone de Rouëlbeau 27
3. Estimation des coûts 28
4. Calendrier des opérations 29
4.1. Réalisation des travaux préparatoires 29
4.2. Développement et valorisation de zone écologique 29
4.3. Calendrier des dépenses 29
5. Evaluation de la dépense nouvelle et de la couverture financière du projet 29
6. Conclusion 30
33
34
35
36
37
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission des travaux.
La Commission des finances a étudié ce projet de loi dans sa séance du 17 décembre 1997, sous la présidence de M. Bernard Annen.
Le Conseil administratif de la commune du Grand-Saconnex a proposé le regroupement, sous le même toit, de deux institutions du secteur de la petite enfance, soit la crèche "; Scoubidou " et "; La Ritournelle ", jardin d'enfants et garderie.
Ce regroupement se réalisera par la constitution d'une fondation de droit public d'intérêt communal dont les statuts sont annexés au présent rapport.
Relevons que ce projet a été contesté par certains parents et notamment ceux ne résidant pas dans la commune. Ceux-ci craignaient que leurs enfants ne soient plus accueillis dans le cadre de la nouvelle structure.
Ce projet a également causé une certaine inquiétude quant à l'avenir du personnel du "; Scoubidou ". Le Conseil administratif a promis d'engager en priorité le personnel actuel de la crèche.
Le Conseil municipal a approuvé la proposition du Conseil administratif le 17 mars 1997 par 19 oui et 1 abstention. Le Conseil d'Etat a approuvé cette délibération le 30 avril 1997 et le présent projet de loi a été déposé par le Conseil d'Etat le 16 juin 1997.
La Commission a constaté que la constitution de cette fondation n'avait aucune implication financière pour l'Etat. Ses statuts prévoient la représentation au sein du Conseil de fondation de toutes les fractions, représentées au Conseil municipal et des utilisateurs de l'institution sans distinction de nationalité.
Pour le surplus, les commissaires n'ont rien relevé dans les statuts qui justifie une étude et un débat plus approfondi. Est-il préférable de soutenir des associations, de créer des fondations ou de municipaliser purement et simplement les institutions de la petite enfance. C'est là un vaste et passionnant débat... qui relève à l'évidence de la compétence des communes concernées.
La commune du Grand-Saconnex a choisi la formule qui lui paraissait la plus apte à offrir des prestations de qualité dans le secteur de la petite enfance. Notre Commission n'a pas estimé devoir discuter de l'opportunité de sa décision.
C'est dans cet esprit que la Commission des finances a approuvé le présent projet de loi à l'unanimité.
Elle vous invite en conséquence, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter le projet de loi 7681.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7681)
concernant la constitution d'une "; Fondation communaledu Grand-Saconnex pour la petite enfance "
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,
vu l'article 175 de la constitution genevoise ;
vu l'article 72 de la loi sur l'administration des communes, du 13 avril 1984 ;
vu l'article 2 de la loi sur les fondations de droit public, du 15 novembre 1958 ;
vu la délibération de la commune du Grand-Saconnex du 17 mars 1997 ;
vu l'arrêté du Conseil d'Etat, du 30 avril 1997,
décrète ce qui suit :
Article 1
1 Il est créé sous le nom de "; Fondation communale du Grand-Saconnex pour la petite enfance " une fondation de droit public, au sens de la loi sur les fondations de droit public, du 15 novembre 1958.
2 Cette fondation est dotée de la personnalité juridique. Elle est placée sous la surveillance du Conseil municipal de la commune du Grand-Saconnex.
Article 2
Les statuts de la "; Fondation communale du Grand-Saconnex pour la petite enfance ", tels qu'ils ont été approuvés par délibération de la commune du Grand-Saconnex, le 17 mars 1997, joints en annexe à la présente loi, sont approuvés.
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10. Rapport de la commission de l'énergie et des Services industriels de Genève chargée d'étudier les objets suivants :
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Suite aux 7 séances concernant l'étude du projet de loi 7824, dont le rapport de majorité a été signé par M. René Longet, il restait encore à prévoir la modification de la Constitution genevoise.
Deux variantes ont été présentées par Mme Karin Salibian lors d'une séance préalable.
Les commissaires ont décidé d'en débattre lors d'une réunion extraordinaire de la commission siégeant avant une séance du Grand Conseil. L'une des variantes a été retenue faisant l'objet du projet de loi 7824. Comme contre-projet, la minorité a décidé de déposer le projet de loi 7833.
La commission a bénéficié des avis de M. Robert Cramer, Président du DIAE et de Mme Karin Salibian, juriste dudit département.
Introduction
Les deux projets de loi proposent une modification constitutionnelle concernant l'organisation des SIG (conseil d'administration). Celui de la majorité, le projet de loi 7824, souhaite n'insérer qu'une modification de principe et réserver les détails pour les inscrire dans une adaptation de la loi. Celui de la minorité, le projet de loi 7833, préfère inclure directement les modifications de détails dans la Constitution.
Comme les 2 projets de loi se réfèrent au même objet, la commission a décidé de les traiter conjointement.
Débat
Après avoir rappelé l'organisation législative régissant nos lois, la majorité de la commission ne considère pas que l'organisation du conseil d'administration des SIG relève de la norme suprême et par là ne doit pas figurer dans la Constitution. Cette dernière devant être réservée aux grands principes. Sans déjuger de la valeur représentative d'un conseil d'administration, sa structure a bien sa place dans la loi. Un conseil d'administration change, le figer dans la Constitution serait lui enlever sa capacité de s'adapter aux réalités du moment et l'obligerait pour chaque modification de son organisation de les passer par vote populaire. Rappelons que la modification de la Constitution est lourde et coûteuse.
Enfin, l'un des signataires du projet de loi 7833 s'est rallié à la majorité pour soutenir le projet de loi 7824, pour les motifs ci-avant présentés.
Vote
L'entrée en matière des projets de loi est votée séparément.
Pour le projet de loi 7824, 11 oui (3 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 2 Ve) et 3 non (3 AdG).
Pour le projet de loi 7833, 11 non (3 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 2 VE) et 3 oui (3 AdG).
Le projet de loi 7824 est accepté dans son ensemble par 11 oui (3 L, 2 R, 2 DC, 2 S, 2 Ve) et 3 non (3 AdG).
Par conséquent, la majorité de la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, d'en faire de même.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
L'Alliance de Gauche n'approuve pas le projet de loi constitutionnelle dite 2e variante. A notre avis, ce projet, qui fait référence à la loi pour tout ce qui concerne la composition du conseil d'administration, met en péril le fonctionnement ultérieur des SIG. En effet, ce projet soumet tout changement de structure de cette entreprise à la voie législative et non à une modification constitutionnelle. Rendant ainsi aléatoire, en fonction de la majorité parlementaire du moment, toute orientation à long terme. De fait, si cette modification devait être entérinée cela voudrait dire qu'il ne resterait comme enjeu constitutionnel et comme verrou sur le chemin de la privatisation, par exemple, que la composition du capital des SIG.
Pour notre groupe, la proposition de modification constitutionnelle, inscrivant dans ce texte supérieur la composition du Conseil d'administration des SIG, est la seule solution capable, d'une part, de donner les meilleures conditions à un vote populaire positif, car elle respecte le nouveau "; dosage " exprimé par l'ensemble des intervenants de la commission et des partis et d'autre part, de permettre à cette entreprise d'envisager sereinement son avenir, du moins du point de vue de ses structures.
Bref historique
A plusieurs reprises dans ce siècle, la composition du conseil d'administration des Services industriels a soulevé les passions.
En 1931 déjà les partis de gauche défendaient la présence de représentant du personnel. Une première formule fut imposée alors par la majorité de droite, à savoir : "; un ou deux administrateurs doivent être choisis parmi le personnel ". Cette formule alambiquée a permis au conseil municipal et au Conseil d'Etat de ne pas désigner de représentant des travailleurs pendant plus 15 années, leur préférant des cadres.
En 1946, revenant à la charge, Léon Nicole propose un projet de loi qui impose 2 membres élus représentants du personnel. En définitive, le Grand Conseil se détermina pour 3 représentants du personnel, à la faveur d'une proposition échouée d'augmenter le nombre à 3 unités pour y maintenir un représentant des cadres.
De même en 1973, lorsqu'il fut question d'un transfert de patrimoine dans une nouvelle structure des SIG, la représentation équitable de l'ensemble des partis au sein du conseil d'administration se posa avec acuité. Elle fut repoussée par la majorité de droite et ce n'est que 25 années plus tard, soit cette année, grâce au changement de majorité qu'on reconnaît, qu'enfin l'ensemble des partis pourront siéger au sein du conseil d'administration des SIG.
On le voit bien, rien n'est simple quand on touche à la capitalisation de cette grande régie et encore moins quand on modifie la composition du conseil d'administration. A notre sens cette difficulté est à mettre en relation avec l'importance qu'a prise l'énergie électrique tout au long de ce siècle et surtout ces dernières années, rendant encore plus fragiles nos sociétés informatisées.
Un constat
Il a fallu à la gauche, 68 longues années pour inscrire dans la Constitution deux notions : la participation équitable de l'ensemble des partis siégeant au Grand Conseil, ainsi que 4 représentants des travailleurs sur 21 membres dans le conseil d'administration. Dans ces conditions historiques, on peut légitimement s'étonner de la position du parti socialiste, fer de lance durant toutes ces années de cette bataille d'idées, mettant aujourd'hui en danger cette longue lutte politique sous prétexte de simplification constitutionnelle. Il y a là un raisonnement qui nous échappe ? Selon le point de vue adopté, on pourrait même interpréter cette affaire de la manière suivante : le parti socialiste cherche-t-il à laisser rentrer dans cette régie le capital privé ou en tout cas en facilite-t-il l'accès pour un proche avenir ? En effet, dès lors que cette contrainte constitutionnelle tomberait et, au regard des déficits de cette régie, au moment d'une recapitalisation qu'il sera nécessaire d'entreprendre, il ne restera qu'à faire tomber le verrou concernant la composition du capital pour laisser entrer de grands groupes multinationaux dans cette entreprise publique. Les conceptions économiques de Tony Blair auraient-elles passé sur les tables de chevet de nos amis socialistes genevois ? Cette hypothèse n'est pas sans fondement, car au niveau suisse n'ont-ils pas été d'accord avec l'entrée du capital privé dans le redéploiement des PTT sous l'appellation Swisscom ?
Pour notre part et dans le contexte de la campagne frénétique de libéralisation menée par les néolibéraux autour de la planète, il nous paraît très dangereux de lever un des verrous constitutionnels ; le vote obligatoire sur toute modification constitutionnelle concernant la composition du conseil d'administration. Sans parler du peu de cas fait au combat politique des éminents politiciens de gauche qui nous ont précédés.
En conséquence, nous proposons que le Grand Conseil reprenne à son compte le projet initial proposé par le Conseiller d'Etat Robert Cramer, à savoir la variante 1 du projet de loi constitutionnelle art. 159 que nous avons déposé sous la forme du projet de loi 7833 et que nous annexons au présent rapport.
ANNEXE
Date de dépôt : 3 mars 1998
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :
Art. 159, al. 1, lettre a, e et f (nouvelle teneur)
L'administration des Services industriels est confiée à un conseil d'administration dont les membres sont nommés à raison de :
a) 1 membre de chaque parti représenté au Grand Conseil, désigné par ce dernier ;
e) 3 membres par les conseillers municipaux des autres communes, choisis au sein d'exécutifs communaux ;
f) 4 membres faisant partie du personnel des SIG, élus par l'ensemble du personnel au bulletin secret selon le système proportionnel.
Art. 2
La loi constitutionnelle no 7801, du 23 janvier 1998, modifiant l'article 159 de la Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est abrogée.
Premier débat
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Il est question, aujourd'hui, de faire passer l'article relatif à la composition du conseil d'administration de la constitution, où il est inscrit depuis moult années, dans un projet de loi qui pourra, le cas échéant, être modifié en fonction des futures législatures.
Nous nous opposons à cette manière de faire, ce d'autant plus que les Services industriels vont au-devant de gros problèmes budgétaires et qu'il faudra les recapitaliser; que les collectivités, pour échapper aux appétits des grosses multinationales, doivent se protéger, autant que possible, des pratiques qui, parties des Etats-Unis, se sont répandues en Europe, en France notamment.
Notre opposition est renforcée par le fait que l'on a mis - je dis «on» car je reprends le flambeau de mes prédécesseurs - plus de soixante ans pour inscrire dans la constitution genevoise la représentation équitable, au sein du conseil d'administration, des partis siégeant au Grand Conseil, ainsi que la nomination de quatre représentants des employés sur les vingt et une personnes élues au suffrage universel.
Dès lors que nous avons envisagé, en commission, la recapitalisation et l'apport d'un capital supérieur en pourcentage de la Ville de Genève, il n'y a plus de raison de discuter de la répartition. D'ailleurs, un savant calcul de M. Pierre Vanek, président de la commission, nous a démontré qu'en tout état de cause, et y compris en cas d'augmentation du capital, les représentants de la Ville de Genève siégeraient équitablement au conseil d'administration.
Il ne reste, en définitive, que des arguments de cosmétique législative pour militer en faveur de cette proposition de la majorité qui, à nos yeux, n'a aucun sens.
M. Alberto Velasco (S). M. Pagani nous dit qu'il a fallu soixante-huit ans pour inscrire dans la constitution une participation équitable au conseil d'administration des Services industriels, dont une représentation des travailleurs.
Nous tenons à cette représentation des travailleurs parce que ce sont les socialistes qui ont proposé et défendu avec succès l'inscription de quatre représentants du personnel au sein du conseil d'administration.
D'autre part, Monsieur Pagani, cette modification ne remet aucunement en question les acquis que vous définissez comme étant ceux d'une longue lutte politique. La composition du conseil d'administration étant proportionnelle au capital, il faudrait un changement de celui-ci et la modification de la constitution pour modifier cette composition. Je puis affirmer que nous, socialistes, sommes contre l'ouverture du capital des SI aux grands groupes.
Le problème soulevé est celui qui se poserait au cas où une nouvelle majorité, au Grand Conseil, remettrait en question cette répartition sans passer devant le souverain.
Considérant l'argument développé de favoriser le dialogue social pour renforcer la présence des travailleurs au sein de ce conseil d'administration, alors même que les SI vont au-devant de mouvements importants, il serait malvenu de la part de cette hypothétique nouvelle majorité de procéder à de telles réformes. Les travailleurs défendraient leurs acquis démocratiquement si, d'aventure, ils étaient remis en question démocratiquement.
Par conséquent, nous voterons le rapport de majorité et le projet de loi 7824.
M. Roger Beer (R). Ces deux projets de lois mettent un terme à de longues discussions à la commission de l'énergie et des Services industriels.
A force d'analyses et d'explications, nous avons admis qu'au fil des élections la composition du Grand Conseil pouvait changer et qu'il ne fallait pas, au gré de majorités fluctuantes, que des discussions aboutissent à un vote populaire en vue de modifier la constitution.
C'est simplement pour cette raison qu'une majorité très claire a décidé d'accepter le projet de loi 7824 qui stipule que l'organisation des Services industriels est réglée par la loi. M. Pagani, lui, entendait aller dans les moindres détails de la constitution, parce qu'il ne faisait pas du tout confiance au vote du Grand Conseil.
C'est pourquoi je vous invite à rejeter le projet de loi 7833 et à adopter le projet de loi 7824.
M. Claude Blanc (PDC). Il y a à boire et à manger dans tout cela ! Si on laisse à la loi le soin de régler la composition du conseil d'administration des Services industriels, je vous laisse imaginer la catastrophe qui s'ensuivra aussitôt que le peuple aura voté cette modification constitutionnelle.
Par contre, si nous soumettons au peuple la modification constitutionnelle proposée par l'Alliance de gauche, il y a de fortes chances qu'il la refuse.
Voilà pourquoi j'hésite beaucoup. Je ne suis pas convaincu, compte tenu de l'ambiance actuelle qui règne dans la République, que le peuple acceptera ce que l'Alliance de gauche essaie de faire passer par sa modification constitutionnelle. De ce fait, nous reviendrons au statu quo ante, et c'est celui que je préfère. Entre la peste et le choléra, j'avoue ne pas savoir quoi choisir.
PL 7833-A
Mis aux voix, ce projet est rejeté en premier débat.
PL 7824-A
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est modifiée comme suit :
Art. 159 Organisation (nouvelle teneur)
L'organisation des Services industriels est réglée dans la loi.
Art. 2
La loi constitutionnelle 7801, du 23 janvier 1998, modifiant l'article 159 de la Constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, est abrogée.
M. John Dupraz (R). D'emblée, je rectifie le titre de mon interpellation qui est : «Politique agraire 2002 ou Initiative de Denner-VKMB : quelles conséquences pour l'agriculture genevoise - cet adjectif, particulièrement important, a été oublié par le service du Grand Conseil - et ses paysans».
Le canton de Genève compte environ cinq cents exploitations agricoles. Comme vous le savez, les Chambres fédérales ont pris dernièrement des décisions concernant la nouvelle politique agraire, plus connue sous le nom de «Programme politique agraire 2002». Cette politique engendrera un soutien moindre des marchés et des prix agricoles. Il s'ensuivra, pour les exploitations agricoles, une légère augmentation des paiements directs due à certaines contraintes plus fortes en matière de prestations environnementales.
Il est prévu un échelonnement des paiements directs dégressif à partir de trente hectares, une deuxième dégressivité à partir de soixante hectares et plus de paiements directs à partir de nonante hectares. Or les exploitations agricoles genevoises sont plutôt de grande surface et ma première question est de savoir quelle sera l'incidence de cette nouvelle politique agraire. Quelles en seront les conséquences économiques pour nos exploitations agricoles ?
Ma deuxième question porte sur l'initiative dite Denner-VKMB, soutenue par le président du parti écologiste, M. Baumann qui, en fait de paysan, n'est qu'un paysan d'opérette puisqu'il passe son temps à conduire des expertises et à faire de la politique...
Une voix. Comme toi ! (Rires.)
M. John Dupraz. Cette initiative prévoit d'inscrire dans la Constitution un plafonnement des paiements directs de 50 000 F par exploitation agricole, sans aucun soutien des prix. Ceux qui ne pratiqueraient pas la production biologique se verraient privés des paiements directs et de la protection aux frontières. Cela signifie que les produits agricoles non biologiques entreraient librement dans notre pays.
Par conséquent, je souhaite que le Conseil d'Etat m'informe des incidences de cette initiative pernicieuse sur les exploitations agricoles et leurs revenus.
Je remercie le Conseil d'Etat de répondre à mon interpellation d'ici le mois de septembre.
La réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Le 18 décembre 1997, le Grand Conseil a renvoyé sans débat ce projet de loi à la commission de l'économie. Sous la présidence de Mme Fabienne Blanc-Kühn, députée, les commissaires ont consacré 5 séances entre le 19 janvier et le 16 février à l'étude de ce texte. Ont également assisté à nos séances, MM. Carlo Lamprecht , conseiller d'Etat, président du département de l'économie, emploi et affaires extérieures (DEEE), Bernard Gabioud, secrétaire général du département et Yves Perrin, directeur de l'office cantonal de l'emploi (OCE). Les représentants du département ont donné toutes les informations demandées et ont ainsi facilité les travaux de la commission; qu'ils en soient remerciés.
1. Introduction
La révision de la loi fédérale sur le chômage (LACI) de 1995 (entrée en vigueur en 1997 et pour certains articles en 1998) a obligé notre Grand Conseil à revoir la loi cantonale sur le chômage en 1997. Cette révision a occupé la commission de l'économie de la précédente législature pendant de nombreuses séances. Parallèlement aux travaux de la commission, cette révision a également donné lieu à de nombreuses rencontres entre les partenaires sociaux. Finalement, un compromis assez large a été trouvé et, en juin 1997, le Grand Conseil (par 69 oui, 9 non et 5 abstentions) a accepté cette révision (voir Mémorial de juin 1997, pp. 4052 à 4218). Elle est entrée en vigueur le 1er juillet 1997.
Des compromis ont été trouvés sur la majorité des aspects de cette révision. Un désaccord profond a cependant subsisté à propos de l'alinéa 2 de l'article 42 dont la teneur est la suivante : "; l'autorité compétente peut refuser l'emploi temporaire au chômeur dont le revenu familial ou celui des personnes majeures faisant ménage commun avec lui dépasse le salaire maximum déterminant de l'assurance-accidents. Elle tient compte de la situation familiale et notamment du nombre des enfants à charge. " Pour la minorité de l'époque, ce texte posait deux problèmes majeurs :
• il introduisait une notion de revenu dans une loi qui a pour but principal la remise au travail des chômeurs de longue durée ;
• il introduisait une discrimination contraire au principe constitutionnel de l'égalité entre les sexes (le revenu des femmes étant généralement inférieur à celui des hommes).
Cet article, proposé à la fin des travaux sur la révision de la loi cantonale sur le chômage, n'avait pas fait l'objet d'un accord entre les partenaires sociaux. Dans une lettre du 10 mars 1997, signée par la CGAS et l'UAPG (annexe n° 1), les partenaires sociaux avaient clairement indiqué leur désaccord par rapport à l'introduction d'une référence au revenu familial pour l'octroi des emplois temporaires.
De plus, au moment du débat en plénière, de nombreuses associations avaient exprimé des critiques vis-à-vis de cet article (voir Mémorial de la séance du 6 juin 1997, pp. 4134 à 4142).
En octobre 1997, le peuple a élu une majorité de gauche. Cette nouvelle majorité a logiquement proposé de supprimer cette référence au revenu familial dans la législation genevoise sur le chômage, mais sans revenir sur les aspects de la loi qui avaient fait l'objet d'un compromis au printemps 1997.
2. Auditions
La commission de l'économie a procédé à plusieurs auditions, elles seront brièvement résumées dans ce paragraphe.
2.1 Audition de Mme Marianne Frischknecht du bureau de légalité des droits entre hommes et femmes.
Le bureau de l'égalité estime que l'article 42 alinéa 2 de la loi en matière de chômage est contraire à la Constitution, tant fédérale, article 4 alinéa 2, que cantonale, article 2. Cette disposition pourrait par ailleurs constituer une discrimination à l'embauche, interdite par l'article 3 alinéa 2 de la loi fédérale sur l'égalité.
Mme Frischknecht constate que la discrimination n'est pas directe. Le sexe n'y est en effet pas considéré comme un critère de distinction. On est plutôt face à une discrimination indirecte, définie par la jurisprudence constante de la Cour de justice des Communautés européennes comme une situation désavantageuse en application de critères non fondés sur le sexe et concernant un nombre considérablement plus élevé de femmes que d'hommes et réciproquement. Il s'agit donc de démontrer ici que dans le cas des couples à haut revenu, soit Fr. 97 200.- et plus par année, c'est plus souvent l'homme que la femme qui réalise un salaire mensuel supérieur à Fr. 8 100.-.
Mme Frischknecht développe toute l'argumentation juridique à la base du constat du bureau de l'égalité. Mme Frischknecht a remis un document écrit à la commission, il est joint au présent rapport (annexe 2).
Enfin, Mme Frischknecht signale que l'article contesté a fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral qui, à ce jour, n'a pas statué.
Le bureau de l'égalité est par conséquent favorable à ce projet de loi.
2.2 Audition de MM. Rolini et Mevaud de l'UAPG.
M. Mevaud rappelle que les bases de la modification de la loi sur le chômage reposent sur un accord tripartite, conclu dans le cadre de la commission de surveillance du marché de l'emploi, accord qui a été long à se dessiner.
Il précise que l'article 42 alinéa 2 ne faisait toutefois pas partie du "; deal " d'origine. Il est le fruit des travaux parlementaires.
M. Rolini ajoute qu'il ne voit pas l'article 42 alinéa 2 comme une discrimination, mais plutôt comme un élément préventif contre les abus.
Enfin, les représentants de l'UAPG répondent aux questions des commissaires concernant d'autres aspects de la loi, notamment le peu de succès des allocations de retour en emploi (ARE).
2.3 Audition de M. Yves Aeschlimann et Mme Gaëlle Van Hove, de Associations des juristes progressistes.
M. Aeschlimann rappelle que l'Association des juristes progressistes avait fait part, par courrier adressé au Grand Conseil le 4 juin 1997, de son opposition à l'article 42 alinéa 2 de la loi en matière de chômage.
L'Association des juristes progressistes fait une analyse semblable à celle du bureau de l'égalité. Elle estime que l'art. 42 alinéa 2 est contraire au principe constitutionnel de l'égalité entre les hommes et les femmes. Elle maintient aujourd'hui ce point de vue.
2.4 Audition de M. Georges Tissot, de la CGAS.
M. Tissot rappelle que la CGAS s'est battue pour qu'une nouvelle réglementation sur les emplois temporaires voit le jour. Elle s'est par contre opposée à la question du revenu familial, pour des raisons discriminatoires d'une part, et en raison de la fausse image que l'introduction de barèmes risquait de donner aux emplois temporaires. On ne se trouve en effet pas dans le domaine de l'assistance publique, mais dans celui de l'emploi. Les personnes au chômage ont le droit de retrouver un emploi.
La CGAS a d'ailleurs interjeté un recours de droit public à l'encontre de l'article 42 alinéa 2 immédiatement après l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions.
M. Tissot rappelle aussi que cet article ne faisait pas partie des mesures négociées entre les partenaires sociaux.
La CGAS est donc favorable au projet de loi.
2.5 Audition de MM. Claude Beraud et Tellier, représentants du Comité emploi-chômage, Guy Jousson, représentant de l'Association de défense des chômeurs, ainsi que Jean-Pierre Devisme, Valentin Popescu et Charles Blaser, tous trois sans emploi.
M. Beraud rappelle que le Comité emploi-chômage et l'Association de défense des chômeurs sont favorables à ce projet de loi. En effet les deux associations se sont toujours opposées à l'introduction d'un critère de revenu pour l'attribution d'un emploi temporaire. Ils estiment aussi que l'art 42 alinéa 2 est contraire au principe de l'égalité entre les hommes et les femmes.
M. Beraud profite de cette audition pour rendre attentifs les commissaires à d'autres aspects de la nouvelle loi sur le chômage qui posent des problèmes. Il cite notamment une disposition qui permet de refuser un emploi temporaire à un chômeur qui a déjà bénéficié d'une telle mesure dans un délai de 4 ans (art 42, al. 1 lettre c). L'OCE assimile les OT de l'ancienne loi aux emplois temporaires de la nouvelle, ce que contestent les personnes auditionnées. Elles estiment que les emplois temporaires de la nouvelle législation sont différents des anciennes OT. Les associations auditionnées ont fait plusieurs recours sur cette question.
Ensuite, MM. Devisme, Popescu et Blaser expliquent à la commission leur situation personnelle et les nombreuses difficultés rencontrées dans leur parcours de chômeur. A titre d'exemple, M. Blaser explique qu'il avait trouvé un emploi pendant 5 mois durant son précédent délai cadre. A teneur de l'ancienne loi, il n'a eu droit à une OT que pendant un mois avant de bénéficier de nouvelles prestations fédérales. Ce mois d'OT le prive aujourd'hui de son droit à un emploi temporaire.
Ces témoignages montrent la nécessité d'évaluer les mesures législatives mises en place ces dernières années et la dureté de la vie quotidienne des chômeurs.
3. Travaux de la commission
Le département a fourni à la commission de nombreuses explications et chiffres sur l'application de l'article qui fait l'objet du présent rapport et d'une manière plus générale sur la mise en oeuvre des dispositions légales votées l'an dernier.
De ces explications, nous retiendrons seulement quelques éléments chiffrés. Seulement 6 personnes ont pu bénéficier d'une ARE (allocation de retour en emploi) depuis l'entrée en vigueur de la loi le 1er juillet 1997. Durant cette même période, l'OCE a placé 11 jeunes de moins de 25 ans dans des stages et 529 personnes en emploi temporaire (ETC). Les commissaires ont souhaité qu'un bilan soit fait dans les mois qui viennent et que la manière de chercher des ARE soit revue.
Le département nous a également indiqué que depuis le 1er juillet 1997, 11 personnes avaient reçu une décision de refus d'un emploi temporaire en raison d'un revenu du groupe familial trop élevé, conformément à l'article contesté par ce projet de loi. Il convient de relever que 6 situations sur les 11 concernaient des hommes. Relevons qu'une des décisions négatives concerne un jeune homme vivant chez ses parents et le refus est motivé par le revenu de ses parents.
La minorité de la commission s'oppose à la suppression de la référence au revenu du groupe familial, car elle estime juste d'aider uniquement ceux qui en ont réellement besoin.
Pour la majorité de la commission, il est logique de supprimer cette référence pour deux raisons essentielles :
• cet article introduit une discrimination entre hommes et femmes ;
• le but principal des emplois temporaires est de permettre aux bénéficiaires d'être replacés dans le circuit du travail, l'aspect de garantir un revenu n'étant que subsidiaire.
Lier l'accès à un emploi en fonction du critère de revenu familial est tout à fait contestable et discriminatoire comme cela a été expliqué dans les auditions. Il convient aussi de relever que la comparaison faite par certains députés de droite avec le RMCAS (revenu minimum cantonal d'aide sociale pour les chômeurs en fin droit) qui est attribué avec une clause de revenu, n'est pas pertinente. En effet, le but du RMCAS est de garantir un revenu minimum, l'activité demandée dans le cadre de la contre-prestation est secondaire. Avec le RMCAS, nous sommes dans une logique inverse à celle de l'emploi temporaire.
Les incidences financières sont difficilement évaluables, nous constatons qu'en 6 mois, moins de 10 personnes sur plus de 500 ont été concernées par cette disposition légale. Le coût de cette modification, par rapport à l'ensemble des dépenses liées à la loi cantonale sur le chômage, est insignifiant. Le seul facteur déterminant est bien évidemment l'évolution du chômage dans notre canton, et plus précisément du chômage de longue durée.
Finalement, au vote le projet de loi (abrogation de l'alinéa 2 de l'art. 42) est adopté par 8 voix (3 S, 3 AdG et 2 Ve) contre 5 (3 L, 1 R et 1 DC).
4. Conclusion
Compte tenu des explications développées ci-dessus, la majorité de la commission de l'économie vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi.
Annexes :
1. Lettre de l'UAPG et de la CGAS du 10 mars 1997.
2. Texte du bureau de l'égalité des droits entre hommes et femmes du 26 janvier 1998.
RAPPORT DE LA MINORITÉ
I. Préambule
Lors de la précédente législature, la commission de l'économie avait longuement travaillé sur les mesures cantonales de chômage suite aux modifications apportées aux lois fédérales.
L'auteur de ces lignes qui était le rapporteur de majorité du projet de loi considéré mentionnait au point 7 "; conclusion et vote " de son rapport :
"; ..., nous pensons que la proposition adoptée par la majorité de la commission est une bonne solution. Elle est créative et innovatrice. Elle est incitative pour les chômeurs et les entreprises. Elle est compatible avec nos possibilités budgétaires. Elle garantit un niveau de protection sociale qui n'existe dans aucun autre canton et donc réaffirme les valeurs qui caractérisent Genève. Elle accompagne les demandeurs d'emplois dans la vie active le plus longtemps possible avec des solutions différenciées et donc les éloigne de l'exclusion.
Ceux qui s'opposent à ce projet de loi sont soit des idéalistes ne pouvant ou ne voulant prendre en considération les réalités pourtant incontournables de la situation actuelle, soit des dogmatiques agissant à des fins politiques ou politiciennes.
Bien évidemment, ce projet n'est pas parfait et il ne peut satisfaire tout le monde dans son intégralité.
Cependant, il est le résultat d'un équilibre bien difficile à trouver entre une protection sociale légitime et une incitation forte indispensable pour rechercher un emploi... "
Lors de la séance plénière, ce projet avait été adopté par une très large majorité à l'exception de quelques députés de droite qui estimaient qu'il était trop coûteux et de quelques députés de gauche qui pensaient qu'il n'était pas assez généreux.
Aujourd'hui, la nouvelle majorité veut imposer une modification essentielle par rapport à la recherche du consensus délicat atteint. Certes, la disposition remise en question, soit la suppression de la notion de limite de revenu avait toujours été contestée par certains, mais une fois de plus, elle participait au difficile équilibre atteint.
II. Pourquoi sommes-nous opposés ?
Nous pensons qu'il s'agit d'accorder des aides sociales à ceux qui en ont le plus besoin et de se distancer de la politique de l'arrosoir.
Il faut donc cibler les prestations de l'Etat, ce qui veut dire qu'il faut instaurer des critères objectifs. Nous estimons que la notion de revenu familial est précisément un des éléments à prendre en considération.
Cette disposition est aujourd'hui attaquée à la fois sur le plan juridique (un recours au Tribunal fédéral est pendant) et sur le plan politique.
En effet, la majorité de la commission estime que cette mesure serait discriminatoire pour les femmes. Une limite de revenu fixée à 97 200.- F (salaire maximum déterminant de l'assurance accidents) par an pénaliserait plus les femmes que les hommes, car les hommes ayant un revenu moyen supérieur aux femmes, cela conduirait plus de femmes que d'hommes d'être privés d'emploi temporaire.
Nous avons 3 objections fondamentales à ce raisonnement :
a) Les premières statistiques de l'Office cantonal de l'emploi montrent l'inverse. En effet, sur 12 cas, 8 hommes et 4 femmes ont été pénalisés par un revenu familial supérieur à ce montant de 97 200.- F. De manière générale, nous ne pouvons que nous opposer à ce principe qui voudrait que n'importe quelle limite de revenu prise en considération dans un cadre de groupe familial amènerait une discrimination vis-à-vis des femmes. Une bonne partie des législations sociales fédérales, cantonales et communales devraient être invalidées, y compris dans notre propre canton (RMCAS, assurance maladie, etc.). Et des exemples cocasses pourraient être trouvés démontrant des discriminations pour des hommes ou des femmes dans de multiples législations.
b) Tous les cantons examinés par la commission, soit les cantons romands et le Tessin ont une limite de revenu familial dans leur législation concernant le traitement social du chômage et les mesures de réinsertion. Par exemple, pour Neuchâtel, il s'agit de 2500.- F de revenu mensuel, augmenté de 710.- F par enfant à charge. Pour le Tessin, il s'agit de 80 % de l'indemnité LACI, soit 5184.- F. Nous constatons donc que Genève n'est de loin pas une exception sur le principe, bien au contraire. Par contre, Genève est beaucoup plus large que les autres cantons, même en conservant cette limite de revenu.
c) Le coût de ce projet de loi n'a pas été estimé. Aussi bien la majorité de la commission que l'administration n'ont pu ou voulu faire une estimation des coûts supplémentaires engendrés par ce projet de loi. Quant à nous, nous sommes convaincus qu'il s'agit sans doute de quelques millions de nouvelles dépenses par an. Ce projet de loi n'est donc pas financé et est dès lors contraire à notre législation. En effet, aussi bien la Constitution dans son article 96, alinéa 1 que la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève dans son article 46, alinéa 2 stipulent que la couverture financière d'une nouvelle loi doit être assurée.
III. Conclusion
Notre Parlement a voté la loi la plus sociale de Suisse lors de la précédente législature. L'équilibre fut difficile à trouver et nous sommes convaincus que la population qui soutient en grande partie nos efforts de solidarité serait perplexe devant des aides sociales qui seraient distribuées sans prendre en considération la notion de revenu du groupe familial, en particulier lorsque le niveau choisi est de 97'200.- F par an. Notre aide doit être ciblée sur ceux qui en ont le plus besoin. La solidarité familiale doit être incitée et activée avant la solidarité étatique aussi bien en termes financiers que psychologiques. Ce projet de loi va en sens inverse et viole notre constitution et notre loi de finance. Nous vous proposons de rejeter ce projet de loi.
Premier débat
M. Pierre-Alain Champod (S), rapporteur de majorité. Je rappelle que l'article en discussion n'est concerné ni par le compromis trouvé en commission l'an dernier ni par celui intervenu entre les partenaires sociaux.
Ayant relu le Mémorial de la séance de juin 1997 au cours de laquelle nous avions adopté ce projet de loi, j'estime intéressant de résumer ce qui s'y est passé.
Au début du débat, une partie des députés de droite, hostiles au projet, ont demandé son renvoi en commission. La majorité des libéraux, qui le soutenaient, ont déclaré rejeter ce renvoi à la condition expresse qu'aucun amendement ne soit accepté.
Dans le cours des débats, la gauche a bien évidemment proposé la suppression de l'article 42, alinéa 2, en invoquant notamment l'égalité homme/femme. Très curieusement, une partie des radicaux ont déclaré qu'ils soutiendraient cet amendement. Je dis «curieusement», car les radicaux n'ont pas été à la pointe du combat en matière d'égalité homme/femme. La proportion de femmes, dans leur groupe, en est un exemple éloquent. Nous en avons conclu qu'il y avait anguille sous roche et que tout cela ressortait d'une position tactique. En effet, le but de la manoeuvre était de faire passer l'amendement pour que le reste de la droite se rallie à la proposition de renvoi en commission, conformément à la déclaration préliminaire des libéraux.
Dans cette situation, les Verts et le parti socialiste ont déclaré qu'ils refuseraient de participer au vote, ce qu'ils ont fait. Un renvoi en commission aurait retardé l'entrée en vigueur de la loi, et nous estimions ne pas pouvoir prendre le risque de pénaliser des centaines de chômeuses et de chômeurs. C'est pourquoi nous n'avons pas participé au vote de cet alinéa 2.
Ce petit rappel historique montre bien que l'article - que ce projet de loi propose de supprimer - ne faisait pas partie du compromis trouvé en commission.
Par conséquent, et contrairement à ce qu'affirme M. Brunschwig, ce projet de loi ne remet pas en cause les négociations que nous avons menées l'an dernier. De surcroît, depuis le changement de majorité, nous n'avons pas proposé d'autre modification de la loi, même si lors des travaux de l'an dernier nous n'étions pas d'accord avec tous les articles. Nous avons négocié un compromis et nous le respecterons.
Par rapport au contenu de la modification qui vous est proposée ce soir, nous reconnaissons que la limite de revenu était haut placée. Nous ne contestons pas la limite, mais le principe d'en mettre une, et ce pour deux raisons.
1. Ce principe de fixer une limite entraîne une discrimination homme/femme. Il est plus vraisemblable que les femmes aient un conjoint gagnant un revenu supérieur à la limite que le contraire. Même si les quelques cas de refus de l'an dernier infirment cette tendance, le faible nombre de ces situations ne permet pas de tirer des conclusions.
2. Le but de la loi cantonale sur le chômage est de remettre les personnes au travail pour maintenir le savoir-faire et non de leur garantir un revenu. Si le but de la loi était de garantir un revenu minimum, nous serions évidemment d'accord avec une limite de revenu du groupe familial. C'est ce qui existe pour le RMCAS et nous ne l'avons jamais contesté.
Compte tenu de ces remarques, je vous invite à adopter ce projet de loi.
M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur de minorité. Tous les cantons étudiés en commission de l'économie, c'est-à-dire les cantons romands et le Tessin, ont des limites de revenu.
Je n'ose vous dire lesquelles, mais elles sont bien en dessous de celle que nous avons fixée dans le canton de Genève. Les niveaux de revenu sont très inférieurs aux 98 000 F du canton de Genève ou, pour être précis, aux 97 200 F.
Je conteste totalement la démonstration faite par le rapport de majorité et par l'ensemble des députés de la gauche qui tend à faire croire que cette limite est une discrimination du principe d'égalité homme/femme. Certes, Mme Frischknecht, directrice du Bureau de l'égalité, nous a confirmé en commission qu'elle la considérait comme une discrimination indirecte, dans la mesure où la notion de sexe n'apparaît pas dans le texte voté mais où par le biais du revenu nous ne respecterions pas ce principe.
Or, dans ce cas la plupart des législations de type social existant au niveau cantonal et communal seraient contraires au principe d'égalité homme/femme. Par conséquent, nous attendons avec intérêt de connaître les conclusions du Tribunal fédéral, vu que cet aspect de la loi était contesté aussi au plan juridique.
Si, par impossible, le Tribunal fédéral ratifiait ou confirmait cette théorie, il faudrait modifier de très nombreuses législations liées à des aspects de ce type, voire à des objets totalement différents. En effet, nous pourrions imaginer que, saisis d'une éventuelle frénésie politique, nous décidions que tout ce qui touche à la circulation serait discriminatoire pour les hommes, ceux-ci étant plus nombreux que les femmes à posséder un permis de conduire. Bref, nous pourrions multiplier les exemples à l'envi, et nous tomberions dans une sorte de mode politique, contraire à toute logique compréhensible et légitime.
Ce qui renforce notre opposition à ce projet de loi est le fait que nous sommes en totale contradiction avec notre constitution, laquelle nous impose de trouver des ressources lorsque nous proposons des projets de lois qui augmentent les dépenses publiques. En l'occurrence, nous sommes dans cette situation et je serais très étonné qu'une majorité de ce parlement, qui a toujours voulu respecter les lois en vigueur, ne respecte pas sa propre constitution.
Nous avons donc trois raisons de nous opposer à ce projet de loi, raisons que je résume ici :
Nous n'avons pas affaire à une discrimination homme/femme. Il s'agit d'une limite de revenu, car nous voulons cibler ceux qui ont le plus besoin d'aide. Nous pourrions nous battre pendant des heures pour déterminer s'il s'agit d'une aide pour un retour à l'emploi ou une aide sociale en tant que telle, tant la frontière est floue. Tous les cantons romands et le Tessin ont des limites de revenu bien inférieures à la nôtre. Enfin, nous sommes en totale contradiction avec la constitution et la loi des finances qui imposent à ce parlement de trouver les ressources nécessaires lorsque nous votons de nouvelles dépenses. Dans le cas présent, nous en voterions de nouvelles. M. Champod a beau dire que ce ne sera pas grand-chose, il n'empêche que l'emploi temporaire a un coût moyen mensuel de 3 500 à 4 000 F par personne, c'est-à-dire un coût moyen annuel de 50 000 F, donc quelques millions de francs pour quelques dizaines de cas. Par conséquent, nous confirmons que nous aurons des dépenses supplémentaires de quelques millions. Bref, vous en discuterez avec votre ministre des finances préférée issue de votre groupe.
Le président. Ont encore demandé la parole Mmes et MM. les députés Ducommun, Bolay, Filipowski, Blanc-Kühn et Vaudroz.
M. Daniel Ducommun (R). Ce projet de loi est délicat à traiter car il oppose des considérations d'ordre social touchant à la dignité humaine, défendues à la table des rapporteurs par M. Champod, et des considérations d'ordre économique très bien rapportées par M. Brunschwig.
Cet antagonisme est regrettable, car il nous avait semblé que la nouvelle loi en matière de chômage avait fait l'objet d'un consensus appréciable, lors de sa récente révision, aussi bien auprès des partis politiques qu'auprès des partenaires sociaux, ce que M. Champod remet en question dans son introduction. Dont acte !
Aujourd'hui, la nouvelle majorité conteste l'article 42, alinéa 2, sur le revenu familial qui fait pourtant référence dans tous les cantons romands. M. Brunschwig vient de le préciser.
C'est avec anxiété que nous revenons sur le problème fondamental du rôle de l'Etat providence et des priorités qu'il doit absolument définir dans une situation financière catastrophique. Mme Calmy-Rey et le Conseil d'Etat l'ont bien compris, puisqu'une table ronde, à l'image fédérale, sera prochainement organisée. Il serait donc dommage qu'à contre-courant nous modifiions ce soir la loi sur le chômage, entraînant ainsi de nouvelles dépenses pour l'Etat sans nous assurer de leur couverture, cela en violation de nos dispositions constitutionnelles.
Dans cette période de graves difficultés de la caisse publique, il ne nous semblait pas manquer de dignité en demandant à la cellule familiale de prendre certaines responsabilités, notamment lorsque son revenu global approche les 100 000 F.
Les décisions qui seront prises par les participants à la table ronde concerneront inévitablement ce type de dépenses. Il aurait donc été raisonnable d'attendre.
Puisque tel n'est pas le cas, la majorité du groupe radical s'associera au rapport de minorité.
Mme Dolores Loly Bolay (AdG). L'emploi temporaire est un droit. Il permet aux personnes en fin de chômage d'être réinsérées dans le monde du travail. Or l'article 42, alinéa 2, fixe la possibilité d'octroyer ce droit sous la condition d'un revenu familial limité à un montant plafond de 8 100 F. En clair, cela signifie que l'emploi temporaire n'est plus un droit individuel de chaque travailleur, de chaque travailleuse, mais un droit défini selon le revenu familial. Cette condition de revenu familial plafond introduit une discrimination que nous ne pouvons accepter, parce qu'elle est contraire au principe même de l'article 4 de la Constitution fédérale.
Monsieur Brunschwig, vous avez rappelé notre constitution. A mon tour, je vous rappelle l'article 2A de la constitution genevoise sur l'égalité qui dit : «L'homme et la femme sont égaux en droit. Il appartient aux autorités législatives et exécutives de prendre les mesures pour assurer la réalisation de ce principe et aux autorités judiciaires de veiller à son respect.» Cet article constitutionnel a été voté en 1987 par le peuple genevois.
L'article 42, alinéa 2, est également contraire à la loi sur l'égalité entrée en vigueur en 1996. Comme les statistiques l'attestent, ce sont les femmes qui feront les frais de cette mesure injustifiée, même si les cas rapportés à la commission de l'économie touchent plus d'hommes que de femmes. Il faut noter, à ce sujet, que le taux de chômage des femmes mariées est de 7,6%, supérieur à celui des hommes, lequel est de 6,4%.
Il apparaît, d'autre part, que les femmes qui exercent une activité lucrative occupent plus souvent - 49,6% - que les hommes - 6,6% - un emploi à temps partiel. De plus, les femmes gagnent, en moyenne, 20,5% de moins que les hommes. Par ailleurs, l'égalité des droits, garantie par la Constitution, se traduit dans les assurances sociales et particulièrement dans l'AVS.
Il faut aussi relever que l'emploi temporaire offre non seulement un revenu mais aussi et surtout une intégration sociale. L'impossibilité d'accéder à une occupation temporaire diminue les chances de retrouver un nouvel emploi et, de cela, tout le monde est conscient. Par expérience, nous savons qu'être en activité facilite la recherche d'un nouvel emploi. D'autre part, n'oublions pas cette donnée très importante qui nous a été rapportée en commission d'économie : à Genève, un mariage sur trois finit par un divorce, et nous savons à quel point les conséquences du chômage déstabilisent les couples !
Les personnes au chômage ont le droit de retrouver un emploi et d'émarger à l'assurance-chômage.
Pour toutes ces raisons et pour empêcher que des principes si contestables et si antidémocratiques puissent être introduits dans notre République, je vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de soutenir ce projet de loi.
Le président. Sont encore inscrits Mmes et MM. les députés Filipowski, Blanc-Kühn, Vaudroz, Mauris et Brunschwig.
Mme Magdalena Filipowski (AdG). A la page 13 de son rapport de minorité, le rapporteur nous informe qu'il s'oppose à ce projet de modification, considérant que les aides sociales doivent être attribuées à ceux qui en ont le plus besoin.
Or nous faisons partie de ceux qui croient qu'actuellement, dans notre société, ce sont les chômeurs, surtout ceux en fin de droit, qui appartiennent à la catégorie qui en a le plus besoin. Et de quoi ont-ils surtout besoin ? Ils ont besoin d'avoir un emploi. Vous avez pu vous en convaincre juste avant Noël, quand des chômeurs ont manifesté à la tribune du public et brandi des pancartes affichant «Des emplois !».
Ce projet est fait pour les personnes qui ont le plus besoin d'aide, notamment d'un emploi. Rappelons qu'il s'agit de personnes qui ont travaillé, qui ont cotisé à l'assurance-chômage pendant dix, vingt ou trente ans. Il s'agit de personnes qui, bien qu'au chômage, paient leurs impôts cantonaux.
Le rapporteur de minorité se rattache au concept que les législations sociales font souvent le lien avec le revenu familial. C'est vrai, mais faisons la distinction entre les assurances sociales et l'assistance sociale. Les premières sont à la base même des progrès sociaux réalisés dans ce siècle qui touche à sa fin. A défaut, nous en serions encore au XIXe siècle.
A l'argument développé sur l'inégalité par rapport aux femmes, je réponds par un autre touchant à l'injustice apparue lors des travaux de la commission. Il s'agit d'une injustice entre les générations. En effet, le revenu familial n'est pas obligatoirement le fait d'un couple marié. Le revenu familial peut également concerner un jeune homme de 26 ans au chômage, donc percevant un revenu moindre, revenu habiter chez ses parents. Etant donné que ses parents ont un revenu dépassant 97 200 F par an, ce jeune homme n'aura pas droit à un emploi. Il n'aura pas droit aux prestations de l'assurance dans les deux ans à venir. Ce cas aurait pu être celui d'une jeune fille. J'ajoute que la limite du revenu familial ne s'applique pas uniquement aux époux, mais également aux personnes qui cohabitent sans être mariées.
Contrairement à ce qu'affirme le rapporteur de minorité, refuser cette modification détruira toute solidarité familiale, dans la mesure où la personne au chômage est aidée par sa famille, ne serait-ce que par rapport à sa situation de solitude.
Le rapport de minorité démontre un mépris profond des chômeurs. Cela n'est pas surprenant : mépriser, licencier et vouloir empêcher l'Etat de remplir ses devoirs envers les personnes lésées découlent de la même logique. Ce mépris est contagieux. Dernièrement, ce Grand Conseil, par un vote de centre droit et de centre gauche, a refusé un amendement de l'Alliance de gauche qui demandait que la priorité soit donnée aux personnes en fin de droit. Nous constatons ce mépris avec la violation constante de la nouvelle loi cantonale sur le chômage, étant donné que les allocations de retour en emploi sont toujours inopérantes. Bien qu'il y ait un changement de majorité dans ce Grand Conseil, nous ne constatons guère d'empressement à modifier profondément la vision de l'exclusion.
Mme Fabienne Blanc-Kühn (S). Cette disposition relative au revenu familial faisait partie du paquet de mesures voté, en juin 1997, dans un climat assez tendu.
Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez bonne mémoire ! Vous vous souvenez que cette mesure avait été contestée par notre groupe : pour lui, c'était une couleuvre difficile à avaler.
De notre point de vue, il y a abus et abus.
Nous siégeons tous les deux dans la même commission depuis bientôt cinq ans. Et vu votre mémoire, vous vous souviendrez certainement comment la question du revenu familial a été abordée en commission.
A l'époque, M. Jean-Philippe Maitre, président du département de l'économie publique, nous avait demandé de prendre position sur une situation qu'il qualifiait d'abusive : un revenu familial annuel de 200 000 F. Très rapidement, le groupe libéral avait saisi la balle au bond en proposant un revenu annuel de 100 000 F. Vous saviez très bien que, si le revenu familial était diminué de moitié, les demandes, elles, allaient augmenter très fortement. Vous pouviez justifier ainsi votre crainte de voir exploser les coûts et votre volonté de les limiter.
Je me permets, Monsieur le député, d'apporter les critiques suivantes à vos trois objections.
Vous contestez que l'alinéa 2 de l'article 42 pénalise les femmes. Certes, nous avons tous été surpris d'apprendre que les refus d'octroi d'emplois temporaires frappaient particulièrement les hommes. Je me souviens de certains ricanements quand ce fait est parvenu à notre connaissance... Mais la réalité est simple et la suite du débat la révélera, Monsieur Brunschwig : il est notoire que les hommes contestent plus facilement que les femmes.
J'en viens à la question de principe du revenu familial, repris dans le traitement social du chômage. Vous faites référence à tous les autres cantons romands. Je réponds qu'il s'agit simplement d'un clonage législatif, tout à fait cohérent au vu des majorités parlementaires desdits cantons. Elles sont toutes de droite, Monsieur le rapporteur de minorité ! Et c'est bien parce qu'une majorité de gauche a été élue dans notre canton que l'ancrage du principe de revenu familial dans le traitement social du chômage est contesté.
Quant au financement des dépenses occasionnées par cette modification législative, soyons honnêtes ! Vous savez fort bien qu'elles concerneront un nombre infime de personnes : onze cas seulement ont été révélés ! Elles n'ont aucune signification par rapport à l'ensemble des coûts dus au chômage. Le seul critère valable sur la question du financement est celui du taux de chômage. C'est de lui que nous devons tenir compte.
Cela étant, il est inutile de rallumer les feux sur la question du traitement du chômage. Nous devons voter rapidement ce projet de loi pour passer au point suivant de l'ordre du jour.
M. Jean-Claude Vaudroz (PDC). Je souhaite faire quelques remarques sur les interventions de mes préopinants.
Madame Blanc-Kühn, il est vrai que très peu de personnes sont concernées par cette modification, mais nous débattons d'un principe et un principe de revenu dépassant 100 000 F est difficilement acceptable, ce d'autant plus que le Conseil d'Etat a tout loisir de prendre la décision d'octroyer un emploi temporaire à des personnes dont le revenu dépasse la limite des 97 200 F. Une règle du jeu, clairement définie, donne ce pouvoir au Conseil d'Etat.
Madame Filipowski, vous dites soutenir ceux qui en ont le plus besoin. Dès lors, je m'étonne des onze cas rapportés à la commission de l'économie, dont certains représentaient des revenus familiaux extrêmement importants. On a articulé un salaire mensuel dépassant 24 000 F. Il est vrai que la personne concernée a retiré sa demande.
Reconnaissez, Mesdames Blanc-Kühn et Filipowski, qu'il y a eu, en l'occurrence, violation du principe d'aider ceux qui ont le plus besoin de soutien.
Je m'étonne également que M. Champod ait remis en question le débat que nous avions tenu en commission de l'économie et qui a débouché sur un consensus.
Question égalité homme/femme, neuf cas sur les onze présentés en commission de l'économie concernaient des revendications masculines. Nous n'avons donc pas constaté une inégalité flagrante dans cette loi qui permet d'obtenir un emploi temporaire.
Ce qui me dérange le plus dans ce projet et me surprend beaucoup de la part de la gauche, c'est cette solidarité vis-à-vis de détenteurs de revenus aussi importants que ceux rapportés en commission. Ce d'autant plus qu'un millier d'emplois temporaires sont concernés et qu'il est très difficile d'en trouver. Cela nous a été clairement expliqué en commission. Il paraissait donc judicieux et justifié de fixer une limite au revenu familial, de permettre néanmoins au Conseil d'Etat de juger d'une exception, et surtout de généraliser les emplois temporaires pour ceux touchant un revenu inférieur à 97 200 F.
Le parti démocrate-chrétien a toujours été solidaire des plus démunis, mais il est des limites qui ne sauraient être dépassées. Au-delà, une solidarité familiale peut être demandée.
Par conséquent, je vous propose de suivre les conclusions du rapport de minorité.
M. Alain-Dominique Mauris (L). Je tiens à rappeler un principe connu que certains magistrats, maires de communes, énoncent quand un homme et une femme se présentent devant eux pour se marier.
Ce principe, contenu dans un article du code civil, est : «Chacun pourvoit à l'entretien du ménage.»
Il s'agit, pour le couple, d'intégrer la responsabilité de solidarité. Dès lors, est-il décent d'imaginer le transfert de cette responsabilité à la société dans le cas d'un ménage aisé ? Non !
Dans la période difficile que nous traversons, ceux qui sont encore des privilégiés doivent assumer leurs devoirs et charges de famille, et nous, nous devons renoncer à un arrosage total qui ne différencie pas les besoins.
Ces besoins doivent être ciblés avec cohérence. Le rapport de la majorité ne tient pas devant la réalité des chiffres. Huit hommes pour quatre femmes ont bénéficié d'emplois temporaires.
La soupape de sécurité existe puisque le Conseil d'Etat possède une marge d'appréciation sur les dossiers qui lui sont soumis en matière d'emplois temporaires. Il peut ainsi éviter des discriminations dans des cas particuliers. Le dossier et la loi sont bien ficelés. C'est pourquoi je vous demande de soutenir le rapport de minorité.
M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur de minorité. Lorsqu'on a des déficits de l'ordre de 500 à 600 millions, on doit faire des choix et cibler les prestations sociales. Et ces choix, vous devrez les faire malgré vous, parce que obligés !
Contrairement à ce que vous dites, Madame Filipowski, le rapporteur de minorité que je suis aujourd'hui fut un rapporteur de majorité qui s'est énormément impliqué dans le projet de la loi cantonale sur le chômage. J'ai dû le défendre par rapport à mon groupe politique. Si une large majorité l'a voté à l'époque, c'est parce que nous l'avions convaincue de son équilibre et de sa cohérence qui voulaient que l'octroi de prestations sociales soit consenti à ceux qui en avaient le plus besoin.
C'est cette logique que vous mettez à mal en revenant sur cette disposition. Je sais que pour vous la vie n'est faite que de mépris et d'injustice. Je ne suis pas le seul à le penser dans cette enceinte. Je vous laisse donc à vos utopies d'un autre siècle ou d'un autre continent.
J'en viens au projet soumis ce soir. La disposition figurant dans le texte actuel est extrêmement souple, comme rappelé par certains députés. Je me permets de la lire : «L'autorité compétente peut refuser l'emploi temporaire au chômeur dont le revenu familial ou celui des personnes majeures faisant ménage commun avec lui dépasse le salaire maximum déterminant de l'assurance-accidents. Elle tient compte de la situation familiale et notamment du nombre des enfants à charge.» On ne peut rédiger une disposition plus «soft» ! Elle ménage un large pouvoir d'appréciation à l'autorité et à l'administration, en fonction de circonstances particulières pouvant exister dans certains cas.
Nous sommes convaincus que les familles doivent faire preuve de solidarité avant d'en appeler aux solidarités étatiques.
Bien qu'ayant suivi votre logique, Madame Blanc-Kühn, j'ai dû rater une marche ! Vous avez fait l'historique de cette disposition en disant qu'à partir du cas choquant de 200 000 F, qui aurait pu être formulé, la limite a été fixée à 100 000 F et par ce biais-là - vous me citez - vous avez multiplié les cas.
Qu'entendez-vous par là ? Est-ce une question de principe ou une question de salaire ? J'ai cru que c'était une question de principe mais, vu votre déclaration, je penche pour une question de salaire.
Si c'est une question de principe, surtout en matière d'égalité homme/femme, le recours auprès du Tribunal fédéral suscitera une réponse que nous devrons tous accepter.
Dès lors, le débat politique que nous menons me semble faussé. Contrairement à ce que vous espérez, nous ne devons pas voter rapidement ce projet de loi pour passer au point suivant, car nous estimons ne pas pouvoir outrepasser des dispositions constitutionnelles et législatives extrêmement claires.
A vos yeux, les coûts occasionnés par ce projet sont négligeables. Effectivement, ils représentent un pourcentage relativement modeste de l'effort global fourni par le canton pour les chômeurs. Néanmoins, il s'agit de quelques millions. Nous avons eu onze cas dans les cinq ou six mois d'application de la loi. Dans une année civile complète, nous en aurons quelques dizaines qui représenteront quelques millions. D'ailleurs, l'administration et les auteurs du projet de loi ne nous ont pas communiqué les chiffres que nous leur demandions. Ne le voulaient-ils pas ou ne le pouvaient-ils pas ?
Pour nous, quelques millions sont largement suffisants pour envisager de forger des armes que nous n'avions pas l'habitude d'utiliser. Ces armes sont des recours pour violation de la constitution.
Je vous rappelle le texte de la constitution : «Lorsqu'un député dépose un projet de loi comportant une dépense nouvelle, ce projet doit prévoir la couverture financière de cette dépense par une recette correspondante. L'emprunt ne peut être considéré comme recette au sens du présent article.» Nous sommes dans cette situation et nous ferons appel au Tribunal fédéral si jamais ce projet de loi était voté.
M. Charles Beer (S). Je reviens sur le consensus évoqué dans ce débat, notamment par le rapporteur de minorité, M. Brunschwig, et la soi-disant implication des partenaires sociaux.
Je voudrais citer un extrait de la lettre annexée en page 8 du rapport. Elle a été écrite conjointement par la Communauté genevoise d'action syndicale et l'Union des associations patronales genevoises. Elle ne constitue pas une référence dogmatique puisqu'elle intègre la Fédération des syndicats patronaux dont vous êtes, Monsieur le député, un membre éminent par votre entreprise.
Voici cet extrait : «Par ailleurs, elle - la loi - entend faire référence au revenu familial pour l'octroi des occupations temporaires, ce avec quoi nous ne pouvons nous déclarer d'accord.»
Les choses sont claires ! Il n'y a jamais eu d'accord entre les partenaires sociaux pour inclure une telle disposition dans la législation. Au contraire, les partenaires sociaux ont demandé consensuellement aux députés du Grand Conseil de ne pas intégrer une telle disposition dans la loi. Cette première précision méritait d'être faite !
Pour créer la confusion, on ne cesse d'osciller entre ce qu'est l'aide sociale, le cas échéant les assurances sociales, et un second concept qui est l'emploi. Monsieur Brunschwig, vous avez évoqué les législations cantonales romandes et tessinoise. Aussi aimerais-je plus de précisions de votre part. J'aimerais connaître celles qui consacrent un droit à l'emploi en occupation temporaire pour les personnes en fin de droit au plan fédéral. Soyez précis dans vos citations, sinon on risque de comparer des législations relatives à l'aide sociale avec des législations ayant trait à l'emploi.
L'emploi est affaire de dignité. Une personne mariée à un conjoint gagnant passablement n'aurait-elle pas droit à la dignité de l'emploi ? Les milieux économiques ne cessent de répéter qu'il faut du travail, qu'il faut travailler et que le travail c'est la dignité. Mais ici, nous entendons dire que la dignité serait liée au revenu familial. Le principe d'égalité homme/femme mis à part, nous avons affaire à quelque chose d'ahurissant !
La Communauté genevoise d'action syndicale a déposé un certain nombre de recours auprès du Tribunal fédéral visant à faire invalider cette loi par rapport au principe d'égalité et aux questions juridiques majeures qu'elle soulève. Notre problème est l'absolu d'une telle limite de revenu. Cela dit, je ne résiste pas à l'envie de démontrer que votre choix de 100 000 F est très intéressant. En effet, un couple gagnant 100 000 F, avec un enfant à charge, a droit à un appartement HLM. L'accès à un logement subventionné lui est donc reconnu mais, selon votre conception, l'un des conjoints n'aurait pas droit à l'emploi !
Je suis particulièrement choqué par le fait que vous banalisiez le nombre de cas connus et que vous ironisiez sur le sexe masculin des demandeurs qui ont essuyé un refus. C'est grave, puisque vous ne tenez compte que des gens qui ont présenté une demande. Personnellement, je connais plusieurs personnes qui n'ont pas fait cette demande parce qu'elles estimaient que la loi les privait de la possibilité d'occuper un emploi temporaire. Ne mettez pas en avant les refus pour minimiser le nombre de personnes concernées, puisque beaucoup font le choix de ne pas déposer une demande précisément à cause de la limite fixée par le législateur.
Abolir une telle disposition est absolument nécessaire. Elle est non seulement contraire au droit - le Tribunal fédéral tranchera - mais également politiquement inique.
Enfin, M. Brunschwig a tenté de corriger le tir par rapport aux coûts. Au cours de sa première intervention, il a dit que, même s'il ne s'agissait que d'une dizaine de cas, ils reviendraient à quelques millions, à raison de 50 000 F par cas. Si nous prenons dix personnes - il y en a beaucoup plus ! - à 50 000 F, cela ne fera jamais que 500 000 F. En guise de consensus, je lui offre une calculette de la part de la FTMH et de ma collègue, Mme Blanc-Kühn. (M. Charles Beer offre une calculette à M. Nicolas Brunschwig.)
Mme Magdalena Filipowski (AdG). Dans un canton où siège l'Organisation internationale du travail, il faut définir dignement le travail.
Par conséquent, le droit à l'emploi pour les chômeuses et chômeurs en fin de droit ne peut pas dépendre du revenu du ménage.
Alors soyons dignes de notre canton !
Je souhaite rappeler qu'avant cette modification la loi cantonale sur le chômage donnait droit aux occupations temporaires. Durant quinze ans d'application, jamais personne ne s'est abaissé à vouloir faire dépendre ce droit du revenu du ménage.
Il est important de rappeler que nous disposons de la couverture financière des dépenses. En effet, seule la moitié des trente millions inscrits au budget d'investissement a été dépensée. Cette couverture existe donc bel et bien.
M. Pierre-Alain Champod (S), rapporteur de majorité. Je renonce à prendre la parole, M. Beer ayant déclaré ce que j'entendais exprimer.
M. Nicolas Brunschwig (L), rapporteur de minorité. Monsieur Beer, malgré tout le respect que j'ai pour l'UAPG, la FSP et autres, je ne les considère pas comme mes maîtres à penser. Mes opinions sont différentes.
Le texte dont nous disposions en commission démontrait que le chômeur en fin de droit fédéral fournit une contre-prestation au Tessin et dans la quasi-totalité des cantons romands. Nous pouvons discuter à l'infini de la nature de cette contre-prestation. C'est pour cela que j'ai dit que nous nous trouvions à la limite entre une prestation sociale et une prestation offrant un emploi à un chômeur.
Monsieur Beer, je vous remercie de votre calculatrice. Je regrette qu'elle ne soit pas «made in Geneva», mais cela viendra peut-être... La loi ayant été adoptée à fin juillet, les onze cas cités ne recoupent qu'une période de cinq mois. J'ai annualisé ces cas, à multiplier sans doute pour une année civile entière, et j'ai tenu compte des personnes qui ne se sont pas présentées en raison de la limite. Le jour où celle-ci tombera, ces personnes demanderont un emploi temporaire. D'où le pourcentage infime des cas avérés par rapport à ceux qui se présenteront. C'est l'argument que vous avez développé, les uns et les autres, notamment M. Beer qui dit connaître beaucoup de personnes qui se sont abstenues, leur conjoint, leur ami ou amie, ou tout ce que vous voulez, ayant un revenu supérieur à 97 200 F.
A titre anecdotique, je reviens sur la lettre figurant à la page 8, en annexe du rapport de majorité. Il me semble que l'article 24 devrait s'appliquer à l'un des députés qui s'est prononcé aujourd'hui dans cette enceinte.
M. Carlo Lamprecht, conseiller d'Etat. Il n'est pas inutile de situer le contexte dans lequel s'inscrit cette proposition de supprimer la limite supérieure de revenu, fixée à 97 200 F pour un couple marié ou des personnes vivant ensemble.
Les finances de ce canton sont en mauvaise posture et nous nous en rendrons parfaitement compte lors de l'élaboration du budget 1999.
Il est notoire que les efforts de notre canton en faveur des chômeurs sont bien plus importants que ceux consentis dans d'autres cantons romands. Cela est bien et nous ne pouvons que nous en réjouir.
La charge de l'emploi temporaire pour les chômeurs en fin de droit est entièrement financée par le budget de l'Etat qui ne bénéficie d'aucune subvention fédérale en la matière. Si, aujourd'hui, nous laissions tomber cette limite de 97 200 F, les demandes seraient plus fréquentes et nous devrions assumer des charges financières encore plus lourdes.
D'aucuns ont argué de l'égalité entre les hommes et les femmes. Nous devons, certes, respecter ce principe, mais en voulant remédier à l'inégalité dénoncée, nous créerions des distorsions sociales et économiques. Me référant aux cas cités, je prends l'exemple d'une personne gagnant 10 000 ou 15 000 F par mois, voire plus. Cette personne pourrait faire en sorte que son conjoint touche 3 300 à 4 500 F par mois après avoir bénéficié des indemnités de chômage pendant cinq cent vingt jours.
Ce serait faire injure non seulement aux chômeurs et chômeuses, mais aussi aux modestes salariés, aux vendeuses de magasin, aux couples dans la gêne, bref à tous ceux qui touchent des revenus nettement inférieurs à 97 200 F. En voulant corriger une inégalité de principe, on susciterait une énorme inégalité économique.
Un exercice très difficile nous attend avec l'élaboration du budget 1999. A ce moment-là, vous évaluerez les difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
En vertu de la loi actuelle, le Conseil d'Etat détient un certain pouvoir d'appréciation des situations. Il lui est possible de corriger des excès.
Compte tenu de notre situation financière et de la possibilité, pour le Conseil d'Etat, de corriger le tir, je vous demande de rejeter l'abrogation de cet article et de maintenir le texte en l'état.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, ce projet est adopté en deuxième débat.
Troisième débat
Mme Magdalena Filipowski (AdG). Je demande l'appel nominal. (Appuyé.)
Le président. L'appel nominal a été demandé, nous allons y procéder.
Celles et ceux qui acceptent le projet répondront oui, et celles et ceux qui le rejettent répondront non.
Ce projet est adopté en troisième débat par 38 oui contre 31 non et 4 abstentions.
Ont voté oui (38) :
Esther Alder (Ve)
Charles Beer (S)
Fabienne Blanc-Kühn (S)
Marie-Paule Blanchard-Queloz (AG)
Dolorès Loly Bolay (AG)
Christian Brunier (S)
Fabienne Bugnon (Ve)
Pierre-Alain Champod (S)
Bernard Clerc (AG)
Jacqueline Cogne (S)
Jean-François Courvoisier (S)
Pierre-Alain Cristin (S)
Anita Cuénod (AG)
Régis de Battista (S)
Jeannine de Haller (AG)
René Ecuyer (AG)
Alain Etienne (S)
Laurence Fehlmann Rielle (S)
Christian Ferrazino (AG)
Magdalena Filipowski (AG)
Gilles Godinat (AG)
Mireille Gossauer-Zurcher (S)
Marianne Grobet-Wellner (S)
Christian Grobet (AG)
Dominique Hausser (S)
David Hiler (Ve)
René Longet (S)
Pierre Meyll (AG)
Louiza Mottaz (Ve)
Danielle Oppliger (AG)
Rémy Pagani (AG)
Véronique Pürro (S)
Jean-Pierre Restellini (Ve)
Albert Rodrik (S)
Martine Ruchat (AG)
Françoise Schenk-Gottret (S)
Pierre Vanek (AG)
Alberto Velasco (S)
Ont voté non (31) :
Michel Balestra (L)
Florian Barro (L)
Luc Barthassat (DC)
Roger Beer (R)
Jacques Béné (L)
Claude Blanc (DC)
Nicolas Brunschwig (L)
Thomas Büchi (R)
Juliette Buffat (L)
Christian de Saussure (L)
Gilles Desplanches (L)
Jean-Claude Dessuet (L)
Hubert Dethurens (DC)
Daniel Ducommun (R)
Pierre Ducrest (L)
John Dupraz (R)
Henri Duvillard (DC)
Pierre Froidevaux (R)
Nelly Guichard (DC)
Janine Hagmann (L)
Yvonne Humbert (L)
Bernard Lescaze (R)
Armand Lombard (L)
Alain-Dominique Mauris (L)
Jean-Louis Mory (R)
Geneviève Mottet-Durand (L)
Jean-Marc Odier (R)
Barbara Polla (L)
Louis Serex (R)
Olivier Vaucher (L)
Jean-Claude Vaudroz (DC)
Se sont abstenus (4) :
Madeleine Bernasconi (R)
Marie-Françoise de Tassigny (R)
Marie-Thérèse Engelberts (DC)
Pierre Marti (DC)
Etaient excusés à la séance (16) :
Bernard Annen (L)
Janine Berberat (L)
Anne Briol (Ve)
Liliane Charrière Debelle (S)
Erica Deuber-Pauli (AG)
Bénédict Fontanet (DC)
Jean-Pierre Gardiol (L)
Luc Gilly (AG)
Claude Haegi (L)
Michel Halpérin (L)
Chaïm Nissim (Ve)
Elisabeth Reusse-Decrey (S)
Micheline Spoerri (L)
Pierre-François Unger (DC)
Alain Vaissade (Ve)
Pierre-Pascal Visseur (R)
Etaient absents au moment du vote (10) :
Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve)
Hervé Dessimoz (R)
Alexandra Gobet (S)
Antonio Hodgers (Ve)
Olivier Lorenzini (DC)
Stéphanie Ruegsegger (DC)
Christine Sayegh (S)
Jean Spielmann (AG)
Walter Spinucci (R)
Salika Wenger (AG)
Présidence :
M. René Koechlin, président.
La loi est ainsi conçue :
Loi
(7761)
modifiant la loi en matière de chômage (J 2 20)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article unique
Art. 42, al. 2 (abrogé)
Renvoyé par le Grand Conseil lors de sa séance plénière du 18 septembre 1997, le projet de loi 7698 a été traité par la Commission judiciaire, sous la présidence de M. Pierre-François Unger , lors de ses séances des 8, 15 et 29 janvier, 5 février, 5 mars, 12 mars et 2 avril 1998, avec le concours de M. Bernard Duport, secrétaire adjoint du DJPT.
Préambule
"; L'homme et la femme sont égaux en droit. La loi pourvoit à l'égalité en particulier dans les domaines de la famille, de l'instruction et du travail. Les hommes et les femmes ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. "
Telle est la teneur de l'article 4 alinéa 2 inscrit dans la Constitution fédérale le 14 juin 1981 et consacrant le principe de l'égalité entre femmes et hommes. Le 6 décembre 1987, quelque 6 ans plus tard, le peuple genevois élevait également au rang constitutionnel ce principe d'égalité en introduisant dans la Constitution genevoise l'article 2A dont la teneur en 2 alinéas est la suivante : l'homme et la femme sont égaux en droits (al. 1), il appartient aux autorités législatives et exécutives de prendre les mesures pour assurer la réalisation de ce principe et aux autorités judiciaires de veiller à son respect (al. 2).
Il est intéressant de relever qu'à Genève, le sujet de l'égalité entre femmes et hommes est discuté depuis 1882, sujet qui est devenu un des thèmes de la vie politique genevoise. Répondant à une motion du Grand Conseil déposée en 1981, le Conseil d' Etat dressa un inventaire des inégalités juridiques entre hommes et femmes dans un rapport qui fut présenté lors de la séance plénière du 15 mars 1984 et qui compile les inégalités dans la famille, les assurances sociales, les relations de travail et la formation ainsi que dans la fiscalité. (M 143-A, Mémorial 1984, pp. 940 et suivantes).
La loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes (ci-après: loi fédérale), proposée par le Conseil fédéral en février 1993 et entrée en vigueur le 1er juillet 1996 a pour but de promouvoir dans les faits l'égalité entre femmes et hommes (art. 1) dans les rapports de travail régis tant par le droit privé que par le droit public (art. 2) en interdisant la discrimination en raison du sexe directement ou indirectement (par exemple: état civil, situation familiale ou s'agissant de femmes, leur grossesse) (art. 3), ainsi que la discrimination par un comportement importun de caractère sexuel qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, soit le harcèlement sexuel (art. 4). Pour ce faire la loi fédérale énumère les droits des travailleurs, la qualité pour agir, les dispositions spéciales relatives aux rapports de travail et les voies de droit, déléguant aux cantons la compétence de désigner les offices de conciliation pour les litiges de droit privé au sens du Code des obligations, rien n'étant précisé pour ceux de droit public cantonal et communal.
Le projet de loi, objet du présent rapport, a pour but de régler la phase de conciliation comme le demande la loi fédérale. L'autonomie cantonale étant large en matière de procédure, les auteures du projet de loi 7698 proposent une procédure de conciliation commune tant pour les litiges résultant des rapports de travail régis par le droit public que ceux fondés sur le droit privé.
Il y a lieu de souligner que le canton de Genève bénéficie des services d'un Bureau de l'égalité depuis novembre 1987 déjà, ce qui a permis de faire quelques pas dans ce domaine afin que le concept d'égalité soit objectivement bien compris tant par les hommes que par les femmes, que ce soit sur le plan des droits autant que sur celui des obligations.
Travaux de la commission
Auditions préliminaires :
Avant de voter l'entrée en matière, la commission a procédé aux auditions qu'elle estimait utiles afin de se forger une opinion sur la pertinence de créer une commission de conciliation spécifique pour traiter des questions soulevées par la loi fédérale.
Audition de l'Union des Associations Patronales Genevoises, représentée par Mme Béatrice Roethtli-Mariotti et MM. Claudio Rollini et Olivier Levy :
L'UAPG estime que les instances actuellement en place peuvent assumer à satisfaction l'application de la loi fédérale sur l‘égalité tout en précisant que la composition de la commission de conciliation devrait faire l'objet d'une directive afin d'assurer une représentation paritaire des juges conciliateurs soit un homme et une femme. L'UAPG relève que ce type de litiges est souvent mêlé à des questions plus spécifiques du droit du travail et que les juges prud'hommes sont compétents pour en connaître.
Audition de Mme Marianne Frischknecht, en qualité de représentante du Bureau de l'égalité :
Mme Frischknecht rappelle la nécessité d'appliquer la loi fédérale et qu'à la question de savoir s'il y avait lieu de créer des offices de conciliation ad hoc ou d'utiliser les offices existants, les experts consultés ont répondu que l'utilisation d'offices ad hoc correspondait le mieux à la volonté du législateur fédéral, évitait un engorgement des juridictions existantes et maintenait les rapports de travail car dans la procédure habituelle les litiges ont généralement lieu aux dépens des rapports de travail. Le but de la conciliation est de trouver une solution sans perdre son travail. Ainsi les personnes victimes de discrimination saisiront plus facilement un office de conciliation ad hoc qu'une juridiction. Elle ajoute que seuls Genève, le Jura, Argovie et le Valais utilisent les structures déjà en place.
Mme Frischknecht déclare, en outre, que le nombre des discriminations indirectes a sensiblement augmenté à Genève. Une étude de l'Observatoire de l'emploi démontre l'existence de discrimination en fonction de critères (marié/célibataire, avec/sans enfant, etc.) lesquels sont évalués en malus ou en bonus.
Audition de Monsieur le juge Pierre-Yves Demeule , premier Président de la Chambre d'appel :
M. le juge Demeule confirme la teneur de son courrier à la commission du 23 décembre 1997, laquelle récapitule différents problèmes qui ne semblent pas être pris en considération par les auteures du projet de loi, à savoir: les litiges exclusivement fondés sur la loi fédérale sont rares, dans la plupart des cas d'autres questions relatives au droit du travail seront soulevées en même temps voire en cours de procédure, les voies de droit sont mal définies, le mode de désignation des juges conciliateurs doit être compatible avec la loi sur l'exercice des droits politiques, enfin la solution d'une seule chambre de conciliation pour tous les cas de discrimination tant en droit privé qu'en droit public est plus difficile à trouver que ce soit pour décider à quelle commission il y a lieu d'attribuer les litiges qui ne se fondent pas exclusivement de la loi fédérale, voire préciser la voie pour la suite de la procédure en cas de non-conciliation.
M. le juge Demeule estime que la mise en place d'un groupe ad hoc est susceptible de non-conformité avec la Constitution cantonale et répète que pour lui la solution la plus simple est d'intégrer ce groupe parmi ceux qui sont constitués puisqu'à Genève le système de la conciliation existe déjà.
Audition de Mmes Sylvie Cristina-Reichlin, Julie Andre ainsi que MM. Georges Tissot et René-Simon Meyer, représentants de la CGAS :
Le projet de loi convient à la CGAS, qui est favorable à la création d'un office de conciliation distinct pour les litiges en matière de discrimination en raison du sexe, car il s'agit de situations différentes de celles relatives aux autres litiges dans les rapports de travail. Quant à la conformité du projet avec la Constitution genevoise, la question devrait être résolue avec la nouvelle loi sur la juridiction des prud'hommes laquelle prévoit les questions d'application de la loi fédérale. Telle qu'il est conçu ce projet de loi favorise la conciliation et permet une continuité dans la manière d'appréhender des situations ardues.
Discussion et vote d'entrée en matière.
Il ressort du premier tour de table que sans mettre en cause le principe de l'égalité, la création d'une commission de conciliation spécifique pour traiter des problèmes de discriminations et harcèlements sexuels dans le cadre des relations de travail tant publiques que privées n'a pas été acceptée d'emblée. Certains commissaires estiment qu'il faut distinguer le traitement des cas de droit privé de celui des cas de droit public, afin d'être conforme au droit fédéral, d'autres ont des doutes quant à l'efficacité du moyen proposé par le projet de loi.
Après avoir envisagé différentes possibilités de litiges, les commissaires passèrent au vote d'entrée en matière laquelle fut acceptée par 9 oui (3 AdG, 3 S, 1 Ve, 2 R) 3 non (3 L) et 1 abstention (1 DC).
Au cours des travaux la pertinence de ce projet de loi s'affirma progressivement et la réticence des commissaires non encore convaincus s'affaiblit et finit par disparaître après la première lecture quand il apparut que les critiques que l'on pouvait faire à ce projet étaient sur la forme et non sur le fond. C'est ainsi que la commission s'attela à amender le texte en fonction de la procédure cantonale en matière administrative et jurisprud'hommale, de la comparaison avec les solutions adoptées par les autres cantons et les remarques des personnes auditionnées.
Le texte du projet 7698, tel qu'il résulte des travaux de la commission judiciaire, a été voté à l'unanimité des dix commissaires présents (2 R, 2 Ve, 2 AdG, 2 S, 1 DC, 1 L). Vous constaterez, Mesdames et Messieurs les députés qu'il est fortement remanié. Les explications relatives à ces modifications figurent dans le commentaire par articles.
Commentaire article par article
Préambule :
La modification consiste à supprimer "; LEg " dans la parenthèse.
Article 1 (définition):
S'agissant de la définition du but, il a été décidé de reprendre le titre complet de la loi fédérale.
A l'étude des solutions adoptées par d'autres cantons, il est intéressant de relever que 11 cantons sur 22 ont choisi de traiter ensemble les litiges fondés sur le droit privé fédéral, public cantonal et communal.
Article 2 (mission et compétence):
alinéa 1 : inchangé
alinéa 2 :
En conformité avec les termes employés dans la loi fédérale, la dénomination "; autorité de conciliation " a été remplacée par "; office de conciliation ".
Le projet de loi initial ne précisait pas si la saisine de cet office de conciliation était facultative ou obligatoire et fixait la compétence de cette dernière pour les litiges de droit privé à l'alinéa 1er et pour ceux de droit public à l'alinéa 2.
Il ressort de l'exposé des motifs que les auteures du projet de loi ont voulu une commission de conciliation unique et il y a donc lieu de le faire figurer dans la loi. Par ailleurs, il fallait résoudre la délicate question de la délimitation de la compétence de cet office en relation des litiges qui ne sont pas uniquement fondés sur des motifs de discriminations en raison du sexe mais comprennent aussi d'autres problèmes résultant de la relation contractuelle de travail. Après une intense discussion et le précieux concours de M. Bernard Duport, la formule, qui vous est proposée, a paru adéquate pour répondre à tous les points soulevés pendant l'étude de ce texte sans s'écarter du but qu'il poursuit.
Ainsi les demandes fondées d'entrée de cause, exclusivement ou en partie sur la loi fédérale, seront obligatoirement et uniquement de la compétence de l'office de conciliation créé avec le présent projet de loi. Seuls les cas où la discrimination sexuelle était découverte au cours d'une conciliation ordinaire devant la juridiction des prud'hommes échapperait à cet office ; ceci devrait en conséquence inciter les personnes victimes de telles discriminations à les invoquer d'entrée de cause et sans crainte puisque les chances de préserver leur emploi sont plus grandes dans le cadre de la procédure prévue dans le projet de loi 7698.
L'essentiel étant contenu dans un seul alinéa, l'alinéa 3 du projet initial a été supprimé.
Alinéa 3 :
Il s'agit d'une harmonisation avec la pratique actuelle, qui donne la compétence à l'office d'élaborer son propre règlement, compétence qui n'était pas expressément mentionnée dans le texte proposé. Il y avait lieu de prévoir par souci de transparence la publication de ce règlement dans la Feuille d'avis officielle.
Alinéa 4 :
Il est apparu opportun de désigner le greffe de la juridiction des prud'hommes également comme greffe de l'office pour enregistrer les demandes par simplification de procédure pour les justiciables et par souci de limiter les coûts de fonctionnement.
Article 3 (composition)
alinéas 1 et 2
La composition prévue initialement n'a pas été retenue par la commission pour plusieurs raisons. La première critique a porté sur le vocabulaire employé, lequel ne correspondait pas toujours à une définition légale précise (par exemple : groupement des travailleurs, composition divisée en section. groupements intéressés).En tout cas il y avait divergence entre commissaires sur la signification de certains termes. Ensuite, la majorité de la commission était d'avis que la composition de l'office doit favoriser la conciliation et c'est pourquoi, vu les litiges qui lui seront soumis, il doit être paritaire, mixte et avoir un nombre pair de membres pour respecter cette parité. L'étude comparative avec le système appliqué dans les autres cantons n'a pas été d'une grande aide pour déterminer la composition idéale. La majorité des cantons respectent la double parité (femmes/hommes et employeurs/travailleurs) sans pour autant que l'on puisse déduire une relation stratégique avec le nombre de membres. De surcroît, la comparaison intercantonale a des limites, car le contentieux résultant des rapports de travail n'est pas réglé de manière identique dans tous les cantons. Aussi, la commission a été finalement convaincue du bien-fondé de limiter le nombre de membres à 2, sachant que l'office ne prend pas de décision autre que la constatation de conciliation ou non-conciliation (un nombre impair n'est donc pas nécessaire) et que, devant un nombre restreint de juges conciliateurs, la personne victime de discrimination sexuelle aura plus de facilité à s'exprimer, vu la nature des motifs invoqués.
alinéa 3 :
Le procédé de nomination des membres de cet office par le Conseil d'Etat est repris tel que proposé. A noter que 10 cantons sur les 21 qui ont prévu un office de conciliation en la matière ont choisi le même mode de nomination. Toutefois les termes "; groupements intéressés " ont été remplacés par "; groupements représentatifs des employeurs et des salariés " .
Aussi la composition retenue tient compte de tous ces critères et a été acceptée par 10 voix (1 AdG, 3 S, 1 Ve, 2 R, 2 DC, 1 L), 1 voix contre (Ve) et une abstention (AdG)
Article 4 (introduction de la demande)
alinéa 1 :
La teneur du texte est maintenue à savoir de rappeler qui a compétence pour agir, soit : les personnes victimes ou risquant d'être victimes de discrimination ainsi que les organisations, au sens de la loi fédérale, à savoir celles qui, en vertu de leurs statuts, ont pour tâche de promouvoir l'égalité et allèguent que l'issue d'un éventuel procès pourrait affecter un nombre considérable de rapports de travail.
alinéa 2 :
Sans changer l'esprit de la norme proposée, la commission a revu la rédaction en reprenant la formulation telle que prévue pour la juridiction des prud'hommes.
Alinéa 3 :
Même remarque que pour l'alinéa précédent.
Alinéa 4 :
La commission a préféré interrompre le délai de recours plutôt que le suspendre pour les litiges fondés sur des rapports de droit public, ce qui est favorable au justiciable qui voit le délai de recours repartir à zéro en cas de non-conciliation.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG, 1 DC)
Article 5 (comparution des parties)
alinéa 1 : sans changement
alinéa 2 :
Cet alinéa a suscité plusieurs remarques. La première relative à la possibilité pour les parties de se faire représenter, la seconde à la question de savoir si un membre d'une organisation au sens de l'article 7 de la loi fédérale peut assister une des parties alors que ces organisations peuvent elles-mêmes avoir la qualité pour agir. La loi fédérale ne prévoit la représentation qu'au stade de la procédure civile (art. 12) et non au stade de la conciliation (art.11).
La commission a supprimé la faculté de représentation pour les parties au motif qu'une conciliation se fait directement entre les personnes concernées. Elle a également écarté la possibilité aux organisations d'assister une partie puisqu'elles ont aussi la qualité pour agir.
Par ailleurs le débat a porté sur la question des personnes ayant le droit d'assister les parties et conclut au fait que la notion de mandataire professionnellement qualifié devait rester distincte de celle de la personne de confiance et celle d'avocat.
Alinéa 3 : inchangé
Alinéa 4 : il correspond à l'alinéa 5 du projet initial dont l'alinéa 4 a été transféré à l'article 6 relatif à la procédure puisqu'il s'agit des possibilités offertes à la commission de se renseigner dans le cadre de la conciliation.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG, 1 DC)
Article 6 ( procédure)
La note du projet initial "; conciliation " a été remplacée par "; procédure "
alinéa 1 : inchangé
alinéa 2 :
Le texte du projet de loi proposé initialement est repris à l'alinéa 3 et le présent alinéa résulte du déplacement de l'article 5 al. 4 (texte initial)
Vu la problématique des litiges que doit concilier si faire se peut cet office, il y a lieu de lui fournir un appui en matière d'information mais jusqu'où aller en phase de conciliation dans une procédure gratuite ? Cette information peut-elle générer des frais et à concurrence de quel montant ? Les commissaires ont fini par retenir une formule générale qui permettra de décider de cas en cas quelle est l'information la plus utile à solliciter. Ils ont ainsi renoncé à préciser expressément dans la loi la possibilité de solliciter des avis d'experts voire convoquer des tierces personnes comme proposé par les auteures.
Alinéa 3 :
La formulation retenue par les commissaires est plus générale et supprime la notion de président conformément à la modification de la composition de l'office (art.3 projet de loi)
Alinéa 4 :
Le procès-verbal doit avoir une force exécutoire et pouvoir s'imposer aux parties qui l'ont signé en cas de litige ultérieur ; c'est pourquoi une comparaison avec d'autres dispositions légales a été utile pour prendre la même formule et préciser que la qualification de "; jugement " vaut tant en procédure de droit privé qu'en procédure de droit public.
Alinéa 5 : inchangé
Alinéa 6 :
Bien que le principe soit conservé, une modification s'imposait pour tenir compte de l'interruption du délai et non plus la suspension.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG ) moins une abstention (DC)
Article 7 (déclaration en conciliation)
Inchangé. Les déclarations en conciliation n'ont pas de portée juridique en cas de non-conciliation et les parties ne peuvent s'en prévaloir pour la suite de la procédure, ceci dans le but de favoriser la discussion. Cette disposition ne concerne que les déclarations des parties. Les pièces produites, voire les informations utiles , au sens de l'article 6 al. 2 de la présente loi, ne sont pas visées par cette disposition et peuvent être produites ultérieurement.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG, 1 DC)
Article 8 (gratuité)
La question de la gratuité sans aucune limite s'est posée par rapport à la propension à multiplier les procédures au motif qu'elles ne coûtent rien aux parties. La loi fédérale prévoit que la procédure de conciliation dans les litiges de droit privé est gratuite alors que pour les litiges de droit public fédéral, elle est gratuite, sauf en cas de témérité. Bien que les cas de témérité paraissent plus théoriques que réels en phase de conciliation, un consensus a été trouvé pour admettre la gratuité sauf en cas de témérité.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG, 1 L, 1 DC)
Article 9 (huis-clos)
Le contenu initial de cette disposition a été transféré à l'article 6 al. 6 et remplacé par la définition du genre de l'audience (huis-clos ou public) qui n'avait pas été précisé. Bien que l'on puisse déduire par analogie avec la juridiction des prud'hommes que l'audience se déroule à huis-clos, il semble plus prudent de le mentionner.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG, 1 DC, 1 L)
Article 10 (modification à d'autres lois)
Il y a lieu d'indiquer dans la loi sur la juridiction des prud'hommes la procédure spécifique pour les litiges résultant de discriminations au sens de la loi fédérale. En ce qui concerne les rapports de travail fondés sur le droit public, après vérification, il n'y a pas de modification à faire.
Vote : unanimité (2 R, 2 Ve, 2 S, 2 AdG, 1 DC, 1 L)
Article 11 (entrée en vigueur)
La date du 14 juin rappelle celle, 17 ans plus tôt, de l'inscription du principe de l'égalité dans la Constitution fédérale. Ce petit clin d'oeil à l'histoire a été voté à l'unanimité.
Conclusions
Au fil des séances, l'égalité a fait un chemin intéressant pour finir par convaincre l'ensemble des commissaires qu'il fallait une procédure spécifique et un office autonome pour tenter de concilier les litiges relevant des problèmes de discrimination sexuelle. La commission a voulu que ce projet de loi s'intègre de manière harmonieuse dans notre système procédural tout en respectant les conditions de forme et de fonds de la délégation de compétence contenue dans la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes ainsi que l'essentiel du projet de loi déposé. C'est avec cet esprit qu'elle a procédé aux modifications proposées. Elle vous invite, par un vote unanime de ses commissaires, Mesdames et Messieurs les députés, à voter ce projet de loi qui vous est présenté dans le texte tel qu'amendé au cours de ses travaux.
ANNEXE I
Secrétariat du Grand Conseil
Proposition de Mmes Fabienne Blanc-Kühn, Claire Torracinta-Pache, Micheline Calmy-Rey, Gabrielle Maulini-Dreyfus, Anita Cuénod, Marie-Françoise de Tassigny et Nelly Guichard
Dépôt: 1er septembre 1997
Disquette
PL 7698
PROJET DE LOI
d'application de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes
(A 2 50)
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 4 de la constitution fédérale, du 29 mai 1874;
vu l'article 2 de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847;
vu la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes, du 24 mars 1995 (LEg, ci-après la loi fédérale),
Décrète ce qui suit:
CHAPITRE I
Organisation
Article 1
Au sens des articles 11 et 13 de la loi fédérale, il est institué une commission de conciliation en matière d'égalité entre femmes et hommes dans les rapports de travail. Elle est
chargée de concilier, dans la mesure du possible, les différends relatifs à des discriminations directes ou indirectes à raison du sexe, dans les rapports de travail régis par le code des obligations et le droit public cantonal et communal.
Art. 2
1 La commission a pour mission:
a) de conseiller les parties ;
b) de tenter de les amener à un accord.
2 Elle fonctionne comme autorité de conciliation dans les litiges qui sont de la compétence des prud'hommes. La loi sur la juridiction des prud'hommes s'applique dans la mesure où elle ne déroge pas à la loi fédérale.
3 Elle tente, dans les rapports de droit public, de concilier les parties. La commission est alors soumise à la procédure administrative dans la mesure où elle ne déroge pas à la loi fédérale.
4 L'organisation interne de la commission est définie par le règlement.
Art. 3
1 La commission se compose de 13 membres, soit:
a) un président ou une présidente;
b) deux assesseurs et leurs suppléants représentant le groupement des employeurs et le groupement des travailleurs du secteur privé;
c) deux assesseurs et leurs suppléants représentant l'administration cantonale et le groupement des travailleurs du secteur public;
d) deux assesseurs et leurs suppléants choisis dans les groupements représentatifs de l'administration communale.
2 Chaque groupement est représenté par 2 personnes, un assesseur et un suppléant, dont au moins une femme.
3 La composition se divise en sections composées du président ou de la présidente et de deux assesseurs, ou de leurs suppléants, désignés en fonction de la nature du litige. Le président ou la présidente constitue les sections et répartit les affaires entre elles.
4 Le président ou la présidente ainsi que les assesseurs et les suppléants sont nommés par le Conseil d'Etat, sur proposition des groupements intéressés, pour une durée de quatre ans, dès le 1er mars de l'année qui suit celle du renouvellement du Grand Conseil et du Conseil d'Etat.
CHAPITRE II
Organisation
Art. 4
1 Toute personne qui subit, ou risque de subir, une discrimination au sens des articles 3 et 4 de la loi fédérale, peut saisir la commission. Les organisations au sens de l'article 7 de la loi fédérale peuvent aussi saisir la commission.
2 Une formule de demande, dont l'usage n'est toutefois pas obligatoire, est délivrée gratuitement par le secrétariat de la commission.
3 La demande est introduite au jour de son dépôt ou de son envoi au secrétariat de la commission. Elle constitue l'introduction de la demande et lie l'instance.
4 Dans les rapports de droit public, l'introduction de la demande suspend le délai de recours pendant toute la durée de la procédure de conciliation.
Art. 5
1 La commission convoque les parties à bref délai.
2 Les parties comparaissent en personne. Toutefois, elles peuvent se faire représenter ou assister par un avocat, un mandataire professionnellement qualifié ou par une personne de confiance, notamment membre d'une organisation au sens de l'article 7 de la loi fédérale.
3 Si la commission estime qu'une telle mesure est de nature à favoriser une conciliation, elle peut reconvoquer les parties.
4 La commission peut solliciter toute information ou avis d'expert et convoquer des tierces personnes si nécessaire.
5 Lorsque l'une ou les parties ne comparaissent pas, la commission peut les reconvoquer. En cas de nouveau défaut d'une ou des parties, la commission déclare la cause non conciliée.
Art. 6
1 La commission s'efforce d'amener les parties à un accord.
2 Si un accord intervient, le président ou la présidente en dresse le procès-verbal qui est signé par les membres de la commission et par les parties.
3 Les procès-verbaux de la commission sont exécutoires.
4 En cas d'échec de la tentative de conciliation, l'affaire est transmise d'office auTribunal des prud'hommes pour les litiges dans des rapports de droit privé.
5 Dans les rapports de droit public, les parties doivent agir devant le Tribunal administratif dans le délai à nouveau en cours.
Art. 7
En cas de non conciliation, aucune des parties ne peut se prévaloir dans la suite du procès de ce qui a été déclaré à l'audience de conciliation, soit par les parties, soit par les membres de la commission.
Art. 8
La procédure devant la commission est gratuite.
Art. 9
La personne qui s'estime victime de discrimination au sens de la loi fédérale peut recourir ou déposer action:
a) devant la juridiction des prud'hommes pour les litiges de droit privé;
b) devant le Tribunal administratif pour les litiges relevant de droit public.
Art. 10
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 1998.
Art. 11
1 La loi sur la juridiction des prud'hommes, du 21 juin 1990, est modifiée comme suit:
Art. 3 A (nouveau)
Les litiges en matière d'égalité entre femmes et hommes au plan de la loi fédérale sur l'égalité sont attribués à un groupe ad hoc.
*
* *
2 La loi sur le Tribunal administratif et le Tribunal des conflits, du 29 mai 1970, est modifiée comme suit:
Art. 8, al. 1, chiffre 0 (nouveau)
0 décisions de la commission de conciliation en matière d'égalité entre femmes et hommes concernant les rapports de travail (A 2 50, art. 6, al. 5, et art. 9, lettre b);
ANNEXE II
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ANNEXE III
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Premier débat
Mme Fabienne Blanc-Kühn (S), rapporteuse ad interim. Ce projet de loi a été voté à l'unanimité. Je résiste donc à ma tentation de rappeler les points de discorde ayant émaillé notre débat et je vous offre un petit cadeau qui, pour une fois, ne sera pas empoisonné.
Je souhaite rappeler à votre bon souvenir trois articles de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, élaborée en 1793 par Olympe de Gouges en réaction à la Déclaration des droits de l'homme. Ces articles sont brefs, mais ils méritent d'être cités.
A l'article 4, Olympe de Gouges écrivait : «La liberté et la justice consistent à rendre tout ce qui appartient à autrui. Ainsi l'exercice des droits naturels de la femme n'a de bornes que la tyrannie perpétuelle que l'homme lui oppose. Ces bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la raison.»
Olympe de Gouges écrivait encore, dans son article 6 : «La loi doit être l'expression de la volonté générale. Toutes les citoyennes et tous les citoyens doivent concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous. Toutes les citoyennes et tous les citoyens étant égaux à ses yeux, ils doivent être également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leur vertu et de leur talent.»... (Brouhaha.) Je ne me décourage pas, j'ai l'habitude du brouhaha !
Je continue avec l'article 13 qui sera le dernier : «Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses de l'administration - c'est important, Messieurs, cet article parle de sous ! - les contributions de la femme et de l'homme sont égales. Elle a part à toutes les corvées, à toutes les tâches pénibles. Elle doit donc avoir, de même, part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l'industrie.»
Ces articles ont été rédigés en 1793. Olympe de Gouges a été guillotinée quelques mois plus tard.
Vous prendrez beaucoup moins de risques en votant ce projet de loi.
M. Jean-Pierre Restellini (Ve). Notre groupe se félicite de ce projet de loi qui tend à instaurer une commission en matière d'égalité entre femmes et hommes dans les rapports de travail.
Sur le fond, il s'agit d'une grande cause. Ce soir, il a été maintes fois question de l'égalité entre les sexes, preuve qu'elle n'est pas encore tout à fait atteinte.
Sur la forme, c'est un projet technique. Il traite de situations de droit privé et de droit public, de problèmes posés par la composition de cette commission, de la parité entre hommes et femmes, employeurs et travailleurs.
A ma grande surprise, tout le monde s'y est mis, même ceux - comme le relève le rapport - qui n'étaient guère enthousiastes au début des travaux. Il faut se féliciter de ce consensus. Cette belle émulation a abouti à ce projet de loi présidant à la création d'une commission de conciliation ad hoc.
Je suis persuadé que votre vote enthousiaste assurera le succès de ses travaux.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Mis aux voix, les articles 1 à 9 sont adoptés, de même que l'article 10 (souligné).
Article 11
Mme Fabienne Blanc-Kühn (S), rapporteuse ad interim. Mme Sayegh m'a chargée de déposer un amendement, issu des travaux de la commission, modifiant ainsi l'article 11 :
«La présente loi prend effet le 14 juin 1998.»
au lieu de «entre en vigueur».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 11 ainsi amendé est adopté.
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7698)
d'application de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes(A 2 50)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
vu l'art. 4 de la Constitution fédérale
vu l'art. 2 de la Constitution genevoise
vu la loi sur l'égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (ci-après la loi fédérale)
décrète ce qui suit :
Art. 1 Définition
Art. 2 Mission et compétence
Art. 3 Composition
Art. 4 Introduction de la demande
Art. 5 Comparution des parties
Art. 6 Procédure
Art. 7 Déclaration en conciliation
Art. 8 Gratuité
Art. 9 Huis-clos
Art. 10 Modification à une autre loi (E 3 10)
Art. 11A Egalité entre hommes et femmes (nouveau)
Art. 11 Entrée en vigueur
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- le principe de l'égalité de traitement, garanti par l'article 4 de la Constitution fédérale ;
- la décision de la Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage du 4 octobre 1994 ;
- l'adoption de la nouvelle loi cantonale sur le chômage le 6 juin 1997, garantissant l'accès des prestations cantonales aux détenteurs de permis F ;
invite le Conseil d'Etat
- à modifier la législation genevoise afin de permettre aux détenteurs de permis F de bénéficier dans tous les domaines des mêmes prestations sociales que les autres contribuables du canton ;
- à adresser, dans l'attente de ces modifications législatives, des directives administratives aux différents départements, afin que les détenteurs de permis F puissent bénéficier des mêmes prestations sociales que les autres contribuables du canton.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Ces dernières années, de nombreux permis de séjour ont vu le jour, dont notamment les permis F (admission provisoire) destinés aux personnes qui ne peuvent pas être rapatriées et qui ne remplissent pas les conditions pour obtenir l'asile politique, les réfugiés de la violence par exemple. Ces permis devraient être normalement de courte durée, mais les cas de personnes au bénéfice d'un permis F depuis plusieurs années sont de plus en plus fréquents. Or, le problème qui se pose est que les droits aux prestations sociales de ces personnes, qui vivent, travaillent et paient des impôts dans le canton de Genève, ne sont pas clairement définis ou souvent oubliés par la législation sociale.
Lors de la dernière révision de la loi sur l'assurance-chômage en juin 1997, le Grand Conseil avait admis que les personnes au bénéfice d'un permis F, qui obtiennent des autorisations de travail à l'année à l'instar des étrangers titulaires de permis B, devaient également pouvoir bénéficier des prestations cantonales en matière de chômage si elles remplissent les autres conditions Cette décision ne faisait que suivre une jurisprudence de la Commission de recours de l'assurance-chômage qui, en raison du principe de l'égalité de traitement, avait accordé les prestations genevoises aux titulaires de permis F dès octobre 1994.
Si le problème des prestations en matière de chômage a été définitivement réglé, cette motion demande au Conseil d'Etat de clarifier la situation dans les autres secteurs de l'aide sociale, en modifiant la législation cantonale et/ou en envoyant des directives administratives aux départements concernés. Pour ne prendre que trois exemples, tant dans les domaines du logement, de l'assistance que de l'aide à la santé, les droits de ces contribuables ne sont pas clairement définis.
Cette demande, qui ne concerne que quelques personnes, est légitime dans la mesure où les détenteurs de permis F demeurent à Genève et y paient leurs impôts. De plus, cette population est souvent dans une situation matérielle particulièrement précaire. Ces personnes devraient donc pouvoir bénéficier des prestations sociales, au même titre que n'importe quel autre contribuable de ce canton. C'est en tout cas la conclusion à laquelle était parvenue la Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage en octobre 1994.
Compte tenu des éléments développés ci-dessus, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à accueillir favorablement cette motion.
Débat
M. Pierre-Alain Champod (S). Il est important de rappeler qui sont les bénéficiaires du permis F.
Ce permis, dont l'autre appellation est «admission provisoire», est généralement accordé aux personnes qui, ayant demandé l'asile, ne l'ont pas obtenu pour des raisons formelles. Ce sont, essentiellement, les réfugiés de la violence.
Ce sont aussi ces Erythréens qui n'ont pas été acceptés, la loi fédérale sur l'asile stipulant un délai limite de trois semaines entre le moment où la personne persécutée quitte son pays et celui où elle arrive en Suisse. Leur voyage avait duré bien plus longtemps. Ils n'ont donc pas obtenu l'asile mais n'ont pu être renvoyés en raison des risques qu'ils couraient en cas de retour dans leur pays.
Ces admissions n'ont de provisoire que le nom. De plus en plus de personnes concernées sont chez nous depuis cinq ans, voire dix ans.
La législation genevoise mentionne parfois les permis nécessaires à l'obtention de certaines prestations. C'était le cas de la loi cantonale sur le chômage qui stipulait l'obligation, pour les étrangers, de détenir un permis B ou un permis C, cela sans intention discriminatoire du législateur, la loi ayant été édictée avant l'introduction du permis F.
Une personne, détentrice d'un permis F, a gagné son recours auprès de la commission cantonale de recours en matière de chômage contre l'interdiction qui lui avait été faite d'accéder à un emploi temporaire. La commission a jugé qu'il y avait une discrimination entre le permis F et le permis B, alors que leurs statuts respectifs sont extrêmement proches.
Lors de la révision de la loi sur le chômage, en juin 1997, notre Grand Conseil a tenu compte de cette décision de la commission de recours. Il a modifié la loi en conséquence en introduisant, parmi les bénéficiaires de nationalité étrangère, les personnes détentrices d'un permis F.
Ainsi, pour les permis B et F, une décision judiciaire assure une égalité de traitement, égalité votée par notre Grand Conseil en matière de chômage.
Nous avons déposé cette motion, parce que nous estimons logique de supprimer ces discriminations dans les autres lois. Elle évoque la législation dans un sens général, puisque peu de lois genevoises mentionnent les permis. En revanche, celui-ci apparaît dans de nombreux règlements, voire dans de nombreuses directives.
Il va sans dire que, si nous préconisons des prestations pour les détenteurs du permis F, c'est à la condition qu'ils remplissent les critères y relatifs, par exemple avoir séjourné cinq ans à Genève pour accéder à un logement social.
A Genève, 2500 personnes sont en possession d'un permis F. Les situations étant très diverses, les prestations ne seront pas généralisées et les coûts resteront modestes.
C'est une question d'équité : du moment où des gens sont établis chez nous et paient leurs impôts, il n'y a pas de raison de leur refuser des prestations.
Je vous invite donc à rejeter les amendements qui vont être proposés et à renvoyer la motion telle quelle au Conseil d'Etat.
M. Pierre Marti (PDC). Cette motion nous est soumise alors que certaines personnes sont lourdement précarisées. N'ayant pas obtenu l'asile politique, elles séjournent temporairement dans notre pays, sans connaître la date de leur départ.
La plupart d'entre elles ont trouvé du travail. Elles sont autonomes, acquittent leurs charges sociales et leurs impôts. Elles doivent donc avoir accès aux prestations sociales.
Si j'ai déposé un amendement invitant le Conseil d'Etat à chiffrer le coût financier y relatif, c'est pour connaître le montant réel de la charge annuelle. Je suis certain que les services concernés pourront nous renseigner avec précision. En étant informés de ce coût réel, nous gagnerons du temps lors de nos travaux à la commission des affaires sociales.
En effet, nombre de motions, nombre de projets de lois, ne sont jamais évalués dans cette commission. Il vaut donc mieux être au fait des chiffres pour discuter en toute connaissance de cause. D'où mes propositions d'amendements.
Contrairement aux règlements qui sont de son ressort, le Conseil d'Etat ne peut pas modifier la législation genevoise. Je vous propose donc d'amender ainsi la première invite :
«- à proposer la modification de la législation genevoise...»
Je propose aussi d'ajouter une troisième invite conçue en ces termes :
«- à chiffrer son coût financier annuel.»
Je suis certain que nous serons unanimes à soutenir cette motion, vu la modicité de la dépense qu'elle engendrera.
Le président. Il est 19 h 30, heure à laquelle nous avons décidé de faire le point. Je vous suggère de terminer le présent débat, de traiter le point 70 bis - le projet de loi 7196-A sur l'université- et de clore la séance avec le point 83 relatif à la naturalisation. S'il n'y a pas d'objection, nous procéderons ainsi.
M. Claude Blanc (PDC). Nous avons tenu une séance exprès pour parvenir au bout de notre ordre du jour. Je propose donc d'interrompre nos travaux maintenant et de les reprendre à 21 h. (Protestations.)
Le président. Ce n'est pas ce qui a été proposé.
M. Christian Grobet (AdG). Nous avions dit être prêts à continuer jusqu'à 20 h. Nous avons déposé des amendements au projet de loi sur l'université, lesquels vont certainement entraîner des discussions. Il est 19 h 30 passé et nous sommes tous un peu fatigués. Par conséquent, je suggère de reporter à quinzaine le projet de loi 7196 sur l'université. Nous ne sommes pas à quinze jours près, le dépôt du projet remontant à la dernière législature. Cela permettra à la commission de siéger entre-temps et d'examiner les amendements; le débat en plénière s'en trouvera abrégé. Je suis sûr que M. Lescaze sera d'accord.
Le renvoi à quinzaine du projet de loi sur l'université nous permettrait de liquider les points figurant encore à l'ordre du jour.
Le président. Je mets donc aux voix la proposition de traiter ce soir encore tous les points restant à l'ordre du jour, à l'exception du point 70 bis.
Mise aux voix, cette proposition est rejetée.
Le président. Je mets aux voix la proposition de M. Christian Grobet, à savoir de continuer l'examen des points à l'ordre du jour, à l'exception du point 70 bis, et d'arrêter nos travaux à 20 h. Etant entendu qu'à 20 h nous examinerons à huis clos le point 83.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
Le président. Il en sera fait ainsi. Nous reprenons le débat sur la motion 1212.
M. Olivier Vaucher (L). Cette motion, que l'on peut comprendre sur le fond, me paraît néanmoins erronée.
Les personnes détentrices d'un permis F bénéficient de subventions et de prises en charge par les offices sociaux qui leur permettent de vivre normalement.
L'exposé des motifs, que j'ai lu attentivement, comporte des contradictions. Tout d'abord on y écrit que «ces permis devraient être normalement de courte durée, mais que les cas de personnes au bénéfice d'un permis F depuis plusieurs années sont de plus en plus fréquents». Puis on termine en disant : «Cette demande, qui ne concerne que quelques personnes, etc.» Aussi soutiendrons-nous l'amendement de M. Marti qui invite le Conseil d'Etat à chiffrer le coût financier annuel découlant de la motion.
D'autre part, l'exposé des motifs affirme que ces personnes sont des contribuables. Permettez-moi d'en douter ! En effet, leur condition modeste - et c'est normal ! - ne leur permet pas de payer des impôts. Ne mélangeons pas les problèmes et ne les mettons pas tous dans le même panier !
Nous demandons le renvoi de cette motion à la commission des affaires sociales afin d'en étudier et le coût et le financement. Comme rappelé tout à l'heure pour un projet de loi, assurer le financement d'une telle dépense relève du droit constitutionnel.
Notre groupe soutiendra l'amendement de M. Marti invitant le Conseil d'Etat à chiffrer ce coût financier annuel. Par conséquent, il demandera le renvoi de la motion à la commission des affaires sociales en vue d'une étude plus approfondie.
Le président. Je mets aux voix cette proposition de renvoi à la commission des affaires sociales.
Mise aux voix, cette proposition est rejetée.
M. Pierre-Alain Champod (S). Je me rallie à la proposition d'amendement de M. Marti concernant la première invite. Si nous avions invité le Conseil d'Etat «à modifier la législation...», c'est parce que la majorité des modifications concernent des règlements et non des lois. Les règlements sont de la compétence du Conseil d'Etat et non de la nôtre. Comme des lois sont aussi concernées, je me rallie volontiers à la proposition de M. Marti.
J'en viens au deuxième amendement de M. Marti. Je veux bien que le coût soit évalué, mais est-ce possible ? Il ne sera pas simple de déterminer, par rapport à une population, les gens susceptibles de bénéficier de prestations, si la barrière constituée par le permis F était levée. Si le Conseil d'Etat peut nous garantir que c'est faisable aisément, j'accepterai aussi ce deuxième amendement. En revanche, je le rejetterais si les études nécessaires à cette évaluation s'avéraient plus coûteuses que la dépense engendrée par les modifications proposées.
Le président. Je mets aux voix les deux amendements déposés par M. Marti.
Le premier, portant sur la première invite, est le suivant :
«- à proposer la modification de la législation genevoise afin de permettre, etc.»
Le deuxième consiste en une troisième invite :
«- à chiffrer son coût financier annuel.»
Mis aux voix, ces amendements sont adoptés.
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Si j'avais pris la parole avant le vote des amendements, j'aurais dit que vous ne pouviez pas, étant donné l'état des finances publiques, voter une motion sans vous inquiéter des coûts qu'elle engendrera.
Excusez-moi de vous le dire : ce raisonnement devrait être automatique pour tout objet mis aux voix dans ce parlement. A quoi sert une table ronde sur l'équilibre des finances publiques si vous renvoyez, sans autre, des objets au Conseil d'Etat pour qu'il les traduise en dépenses supplémentaires ?
En l'occurrence, les amendements sont judicieux.
Le Le président. Nous avons devancé vos voeux, Madame la conseillère d'Etat, et nous espérons que vous êtes satisfaite.
Mise aux voix, la motion ainsi amendée est adoptée.
Elle est ainsi conçue :
Motion(1212)
concernant l'accès aux prestations sociales pour les détenteurs d'un permis F
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- le principe de l'égalité de traitement, garanti par l'article 4 de la Constitution fédérale ;
- la décision de la Commission cantonale de recours en matière d'assurance-chômage du 4 octobre 1994 ;
- l'adoption de la nouvelle loi cantonale sur le chômage le 6 juin 1997, garantissant l'accès des prestations cantonales aux détenteurs de permis F ;
invite le Conseil d'Etat
- à proposer la modification de la législation genevoise afin de permettre aux détenteurs de permis F de bénéficier dans tous les domaines des mêmes prestations sociales que les autres contribuables du canton ;
- à adresser, dans l'attente de ces modifications législatives, des directives administratives aux différents départements, afin que les détenteurs de permis F puissent bénéficier des mêmes prestations sociales que les autres contribuables du canton;
- à chiffrer son coût financier annuel.
En date du 13 janvier 1998, la commission des travaux, présidée par M. Jean-Pierre Gardiol, a traité ce projet de loi. Etaient présents lors de cette séance MM. L. Moutinot, président du DAEL, F. Reinhard, directeur des bâtiments, J.-B. Haegler, chef de la division des chaussées et de la maintenance et R. de Sénarclens, adjoint technico-administratif.
Ce nouveau crédit de bouclement s'inscrit dans la longue liste d'objets de ce genre et provient du dernier lot distribué par le département (DTPE). Le 22 avril 1977, le projet de loi 4663 ouvrait un crédit de 29 200 000 F, dont 21 569 343 F ont été dépensés, pour la construction des accès et du garage couvert du Palais des expositions, ainsi que le crédit d'étude d'une installation de captage d'énergie solaire et la création d'une zone de verdure.
Ce crédit se décomposait en trois parties, inscrit dans trois articles distincts, avec un premier crédit, pour le génie civil, de 15 220 000 F pour la construction des accès et l'acquisition de terrains, géré par la direction du génie civil du département des travaux. Puis un deuxième crédit de 13 580 000 F pour la construction du garage couvert, puis un troisième crédit de 400 000 F pour couvrir les frais d'étude d'une installation de captage solaire.
Ce n'est qu'aujourd'hui que le bouclement de ces crédits peut être présenté, car les dernières factures de notaire relatives aux échanges de terrains, ainsi que celles relatives à l'aménagement de la desserte TPG/PTT de Palexpo et la liaison avec la route de Ferney, n'ont été réglées définitivement qu'en 1994.
La construction des accès, devisée à 15 220 000 F a finalement coûté 19 828 269 F, soit avec un dépassement de 4 608 269 F dû pour 2 750 000 F à l'indexation et aux hausses légales ainsi qu'à 1 858 269 F de travaux supplémentaires non prévus dans le devis. La part des routes nationales, d'un montant de 14 343 981 F a été déduite et le coût final s'est établi à 5 484 288 F.
Ce dépassement s'explique de la manière suivante :
Indexation 875 150 F
Hausses 1 874 850 F
Travaux supplémentaires
et modifications du projet 1 858 269 F
Total 4 608 269 F
Les travaux ont été exécutés durant la période de 1978 à 1981, voire 1983 (adaptations). Il y a lieu de tenir compte des hausses conjoncturelles et des variations économiques entre la date de référence du devis estimatif (1975), la date des adjudications des travaux (l'année 1979 est celle de toutes les adjudications des travaux les plus importants) et celle de 1983, date de fin des travaux.
Le montant de 1 858 269 F se justifie par des modifications de projet et travaux supplémentaires, soit :
Pont RUB 530 000 F
Bretelle provisoire Lausanne/Ferney 200 000 F
Bretelle provisoire Ferney/Aéroport 70 000 F
Bretelle provisoire Grand-Saconnex/Ferney
(OA 681, passage inf. Rte de Ferney) 120 000 F
Aménagement parcelle Tissot 320 000 F
Total 1 240 000 F
En conclusion, le coût de revient des travaux des accès au Palais des expositions, une fois la participation financière de la Confédération déduite, est de 5 484 287,65 F
Le garage proprement dit (article 2 de la loi), devisé à 13 580 000 F, a lui coûté 15 801 528 F, soit un supplément de 2 221 528 F. Ce dépassement se décompose comme suit :
Indexation 734 035 F
Hausses légales payées 1 264 290 F
Travaux supplémentaires 223 203 F
Total 2 221 528 F
Au vu de ces explications et compte tenu du contexte de ce projet, dont le devis estimatif a été fait de manière beaucoup trop sommaire, et que de plus la problématique du financement de la Confédération est restée floue, avant que les plans définitifs aient été établis, et bien en deçà des prévisions qui tablaient sur une participation à hauteur de 75 %, la commission n'a pas jugé utile de refuser ce crédit de bouclement, mais l'a timidement accepté par 2 voix pour (AdG), 1 contre (Ve) et 10 abstentions (2DC, 2R, 3L, 1AdG, 2S). Nous ne pouvons que vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi de bouclement arrêté à 21 569 343 F, en dessous du crédit accordé de 29 200 000 F.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7641)
de bouclement du crédit de 29 200 000 F pour la construction des accès et du garage couvert du Palais des expositions, ainsi que du crédit d'étude d'une installation de captage d'énergie solaire et la création d'une zone de verdure
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Art. 1 Bouclement
Art. 2 Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique
En date du 6 janvier 1998, la commission des travaux, présidée par M. Dominique Hausser, a traité ce projet de loi. Etaient présents lors de cette séance MM. F. Reinhard, directeur des bâtiments, A. Harmann, ingénieur cantonal, J.-B. Haegler, chef de la division des chaussées et de la maintenance et P.-A. Vonlanthen, chef du service des ponts.
Ce nouveau crédit de bouclement s'inscrit dans la longue liste d'objets de ce genre et provient du dernier lot distribué par le département (DAEL). Le 16 mai 1986, le projet de loi 5827 ouvrait un crédit de 1 770 000 F pour la réalisation de cet itinéraire pour piétons et le 13 novembre de la même année, un complément de 1 450 000 F était voté. Le montant total voté s'élevait donc à 3 220 000 F alors que 4 942 562 F allaient finalement être dépensés, d'où un dépassement brut de 1 722 562 F.
En définitive, la situation financière se présente comme suit :
Dépassement brut 1 722 562 F
Subvention fédérale 830 000 F
Refacturation des prestations effectuées pour des tiers 648 849 F
Dépassement net 243 713 F
Compte tenu de la durée de ce chantier, réalisé en deux étapes décalées dans le temps, les hausses conjoncturelles entre la date de référence du devis général et les dates de remise des soumissions (indexation) se montent à 148 934 F, alors que les hausses payées s'élèvent à 12 267 F. Ce dépassement de 243 713 F est essentiellement dû à ces dernières ainsi qu'au cumul partiel des prestations supplémentaires et d'économies.
Ce dépassement se décompose comme suit :
Indexation 148 934 F
Hausses payées 12 267 F
Dépassement expliqué 82 512 F
Total 243 713 F
Il faut toutefois préciser qu'une partie du cheminement piéton est aujourd'hui disparu suite à la construction de l'Arena. Ce bouclement est purement formel et comptable, raison pour laquelle il a été accepté par les deux représentants de l'AdG, alors que les autres membres présents de la commission se sont abstenus. A la lumière de ces explications, nous vous suggérons, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7772)
ouvrant un crédit complémentaire pour le bouclement du comptede construction pour la réalisation d'un itinéraire pour piétons entre l'aéroport de Genève-Cointrin et Palexpo
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Art. 1 Crédit complémentaire
Art. 2 Subvention fédérale, refacturation à des tiers
Art. 3 Financement complémentaire par l'emprunt
Art. 4 Loi générale sur le financement des travaux d'utilité publique
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- que de nombreuses lois genevoises confèrent, dans diverses circonstances, la compétence à l'autorité de fixer le prix d'acquisition d'un logement ou le loyer admissible de celui-ci ;
- que les prix et les loyers en question sont généralement fixés par pièce habitable ;
- que la notion de pièce habitable est sujette à interprétation et à contestation, la surface d'une pièce pouvant se situer entre 9 et 40 m2, voire plus ;
- que Genève est le seul canton suisse à fixer les prix et les loyers à la pièce ;
- que, de surcroît, Genève est le seul canton suisse à compter la cuisine comme une pièce ;
- que cette situation rend difficile, voire impossible, la comparaison entre les statistiques genevoises et les statistiques des autres cantons suisses sur les loyers et les prix pratiqués pour les logements ;
- que, pour la première fois, la loi sur l'aide à la propriété individuelle adoptée par le Grand Conseil en 1997 se réfère expressément à un prix au m2 ;
- que l'ensemble des services étatiques chargés de fixer, à un titre ou à un autre, des loyers ou des prix de logements, ont été réunis au sein d'un même département ;
- enfin que la Commission du logement du Grand Conseil, dans le cadre de l'examen du projet de loi 7752, étudie actuellement la problématique de la fixation des loyers ;
invite le Conseil d'Etat
- à adopter la référence du mètre carré pour fixer les prix et les loyers de logements lorsqu'il est appelé à le faire ;
- à adopter la même référence pour déterminer le montant des aides au logement ;
- à effectuer les modifications réglementaires éventuellement nécessaires pour répondre à la présente motion ;
- à déterminer, après concertation avec les milieux intéressés, les prix et les loyers applicables.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Plusieurs lois genevoises confèrent la compétence à l'Etat de contrôler et de fixer les prix et les loyers autorisés de locaux d'habitation. Nous pensons en particulier à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations d'habitation (loi en faveur des locataires et de l'emploi) (LDTR) et à la loi générale sur le logement (LGL).
Bien que ces lois ne l'exigent à notre connaissance pas, les autorités chargées de les appliquer ont pour pratique constante de fixer des loyers et des prix par pièce. A titre d'exemple, les loyers autorisés en application de la LDTR après l'exécution de travaux de rénovation se situent entre Fr. 2400.- et Fr. 3225.- par pièce par an.
L'expérience a montré les limites de cette pratique. Il est en effet apparu qu'il n'était pas logique d'utiliser les mêmes normes de loyer admissible dans le cas d'un appartement contenant des pièces de 12 m2 en moyenne et dans le cas d'un appartement dont les pièces sont deux fois plus grandes. Dans ce cas de figure, le locataire du premier appartement est en effet deux fois moins bien traité que le locataire du second appartement.
Se référer à la pièce habitable pose en outre d'autres problèmes, en particulier dans le domaine particulièrement important des statistiques. Comme les autres cantons suisses se réfèrent quant à eux à des prix et à des loyers au m2, il est difficile, voire impossible, de comparer nos statistiques cantonales aux leurs, ce d'autant plus que Genève présente l'autre particularité de considérer que la cuisine est une pièce habitable.
Il nous apparaît que le moment est particulièrement bien choisi pour s'attaquer au problème.
En effet, à l'occasion de la répartition des départements entre les Conseillers d'Etat élus en novembre 1997, l'Office cantonal du logement a été transféré dans le Département de l'équipement, de l'aménagement et du logement (DAEL). Il en découle que l'ensemble des lois qui exigent que les loyers ou les prix de locaux d'habitation soient fixés par une autorité sont désormais appliquées par le même département. Cette nouvelle donne est de nature à faciliter un changement de pratique et une certaine uniformisation en la matière.
La Commission du logement étudie actuellement le projet de loi 7752 modifiant la LDTR. Ce projet de loi, parmi de nombreuses propositions de modification, soulève la question du calcul du loyer admissible après travaux, sans pour autant s'attaquer au problème évoqué par la présente motion.
Il convient de saisir cette occasion pour traiter le problème dans son ensemble.
Pour les raisons développées ci-dessus, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver un bon accueil à la présente motion.
Débat
M. Jacques Béné (L). Je propose de renvoyer cette motion à la commission du logement pour qu'elle puisse être traitée dans le cadre de la révision actuelle de la LDTR.
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission du logement.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèveconsidérant :
- l'importance d'un aménagement du territoire cohérent et répondant à des objectifs sociaux, environnementaux, économiques et culturels ;
- la difficulté croissante à mettre en oeuvre des politiques en matière d'aménagement du territoire compte tenu des découpages institutionnels, qui ne correspondent plus aux découpages fonctionnels ;
- la pertinence et l'importance de la notion de développement durable comme approche de l'aménagement du territoire ;
- l'étude Genève Sud Durable, consistant en une application des principes du développement durable à l'aménagement du territoire et portant sur le territoire de six communes genevoises situées entre l'Arve, l'Aire et la frontière franco-suisse ;
invite le Conseil d'Etat
à développer un projet d'aménagement du territoire visant à mettre en application les principes d'action de l'étude Genève Sud Durable :
• une approche intercommunale des questions d'aménagement du territoire ;
• la nécessité d'un rééquilibrage de l'urbanisation entre les quartiers pour retrouver une mixité sociale et fonctionnelle à l'intention des personnes dont la vie quotidienne se déroule dans le quartier ;
• l'articulation des localisations des futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures de transports publics pour susciter un report modal et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes, conformément à la motion 1196 ;
• le lancement d'un concours en vue de la création d'un concept d'aménagement pour l'ensemble du périmètre Bachet de Pesay-La Praille. L'objectif est de créer un pôle d'agglomération cohérent dont l'accessibilité est axée sur les transports publics ;
• la création d'une entité bocagère et la réalisation d'un réseau agro-écologique de l'Aire à l'Arve.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Une des fonctions de l'Etat est d'être l'acteur d'un aménagement du territoire cohérent en fonction d'un certain nombre d'objectifs qu'il s'est fixé et qui renvoient à l'intérêt général. Actuellement, cette cohérence n'est pas assurée à Genève, pour plusieurs raisons :
1. les objectifs sociaux, environnementaux et économiques de l'aménagement du territoire ne sont pas clairement énoncés, ou lorsqu'ils le sont, les moyens manquent pour les atteindre ;
2. l'absence d'objectifs clairs et de moyens pour les atteindre se traduit concrètement par l'absence de cohérence en matière d'aménagement, celui-ci se résumant souvent à une gestion du territoire au coup par coup ;
3. la politique sectorielle des transports urbains et régionaux est largement déconnectée de celle de l'urbanisation, ce qui débouche sur des incohérences, telles que l'implantation d'entreprises (les Services industriels dans la zone industrielle du Lignon en sont un bon exemple), d'écoles (le Cycle de Bois-Caran, le Collège de Claparède par exemple), voire d'hôpitaux (l'hôpital de gériatrie) sans accès aux réseaux de transports publics.
Ces constats sont tout particulièrement valables pour la région de Genève Sud, c'est-à-dire la portion du territoire cantonal comprise entre l'Arve, l'Aire et la frontière franco-suisse. Ce territoire se caractérise par l'abondance de grands projets d'infrastructure et d'équipement, dont certains sont réalisés, d'autres en cours d'élaboration ou en gestation. Ces projets ne sont pas pensés les uns en fonction des autres et ne sont pas intégrés à une vision cohérente et globale de l'aménagement du territoire. On citera pour mémoire :
- le prolongement de la ligne 13 et la couverture de l'avenue des Communes-Réunies aux Palettes ;
- le contournement autoroutier de Plan-les-Ouates ;
- la route inter-quartier dite - "; Voie Cottier " ;
- le P+R en ouvrage du Bachet-de-Pesay ;
- le projet de stade à la Praille et l'ouverture de la ligne de chemin de fer Cornavin-La Praille aux voyageurs ;
- la ligne TGV La Praille-Latoy ;
- le projet d'hypermarché dans la jonction autoroutière de Perly.
Nous avons affaire à une juxtaposition de projets dont certains sont contradictoires. Relevons par exemple la volonté affirmée par les pouvoirs publics de susciter un usage accru des transports publics et les projets de nouvelles infrastructures routières suburbaines telles que la Voie Cottier, ou la volonté de promouvoir la vie du centre-ville et le projet d'un centre commercial dans une jonction autoroutière, déconnecté du réseau des transports publics et contribuant à accroître la concurrence commerciale à l'égard du centre.
Les observations qui viennent d'être énoncées sont à l'origine de l'étude Genève Sud Durable, qui poursuit trois objectifs :
1. se doter d'une conception globale en matière d'aménagement du territoire qui soit basée sur les trois principes du développement durable : la responsabilité écologique, la citoyenneté participative et l'économie solidaire;
2. proposer une mise en cohérence des différents projets touchant la région de Genève Sud en fonction de la conception globale retenue ;
3. émettre des recommandation en vue de mettre en pratique les propositions formulées.
Un diagnostic approfondi du territoire de Genève Sud a montré que l'urbanisation de cette zone est fortement déséquilibrée. En particulier, on notera une absence de mixité fonctionnelle et une absence de mixité sociale. Concernant ce dernier aspect, relevons en particulier la dégradation du climat social dans certains quartiers.
Ce diagnostic a également mis en évidence que l'absence de vision globale dans l'aménagement de la région de Genève Sud s'étendant sur six communes découle de l'absence de véritable intercommunalité.
Il a enfin mis en relief l'existence d'un lieu à très forte potentialité de développement : la zone comprise entre le Bachet-de-Pesay et l'emplacement du futur stade de La Praille. Ce lieu jouit d'une très bonne accessibilité grâce à la convergence de l'autoroute de contournement, de la ceinture intermédiaire et du réseau de tramway. Assez convoité, il constitue une centralité en devenir.
Suite à ces constats, l'étude préconise un certain nombre de principes d'intervention :
- rééquilibrer l'urbanisation dans les quartiers pour retrouver une mixité sociale. Pour atteindre cet objectif, elle propose de dédensifier les secteurs fortement urbanisés, de geler la zone de développement sur ces territoires et de densifier des quartiers de villas ;
- favoriser une meilleure mixité fonctionnelle, afin que les quartiers d'habitation de la région de Genève Sud ne soit pas une banlieue dortoir. L'étude préconise le développement du commerce de proximité d'activités artisanales, la disposition de locaux pour les habitants, l'équipement des quartiers en lieux de rencontre tels que des cafés restaurants, un urbanisme de proximité favorisant les déplacements à pied ;
- articuler la localisation des futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures de transports publics pour favoriser l'utilisation d'autres moyens de transports que l'automobile et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes ;
- développer une conception globale de l'aménagement du territoire à l'échelle du territoire de Genève Sud. Cet objectif nécessite une approche intercommunale des questions d'aménagement du territoire qui pourrait faire l'objet d'une loi ;
- penser le pôle Bachet-de-Pesay - La Praille comme une vaste interface de transport et une centralité urbaine. Ce lieu, appelé gare de Genève Sud, dans l'étude deviendrait un véritable lieu d'activités commerciales et un noeud de transports publics pensé comme un tout cohérent. Pour atteindre cet objectif, l'étude Genève Sud Durable propose un concours d'aménagement de l'ensemble du périmètre, intégrant aussi bien les aspects transports que les aspects équipements.
Les motionnaires adhèrent à ces principes d'intervention et souhaitent que le projet d'aménagement du territoire "; Genève Sud Durable " serve d'exemple et puisse être appliqué à l'ensemble de la région genevoise.
Au bénéfice de ce qui précède, nous vous remercions, Mesdames et Messieurs les députés, de réserver bon accueil à notre projet de motion.
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Débat
Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Cette proposition de motion sur l'aménagement du territoire concerne six communes du sud de Genève, comprises entre l'Arve, la frontière française et l'Aire.
Actuellement, il est fort difficile d'instaurer des politiques en matière d'aménagement du territoire. En effet, les limites géographiques institutionnelles ne correspondent plus aux limites fonctionnelles, et c'est là toute la problématique des villes.
Fribourg s'est doté d'une loi sur l'agglomération. Le canton du Valais étudie la suppression des districts et le regroupement des communes. Genève devra suivre cette réflexion.
Le développement durable, avec ses trois composantes économique, sociale et environnementale, est admis, voire intégré maintenant à l'aménagement du territoire.
L'étude du groupe «Genève Sud Durable» est disponible, avec ses propositions constructives. Notre motion est le suivi logique, au niveau institutionnel, de toutes ces considérations.
Ces dernières années, nous avons assisté, en matière d'aménagement, à une politique du coup par coup. Je citerai, pour mémoire, le prolongement du tram 13 et la couverture de l'avenue des Communes-Réunies aux Palettes; le contournement autoroutier de Plan-les-Ouates; le projet de la voie dite Cottier; le P+R du Bachet-de-Pesay; le projet de stade à la Praille et le Barreau Sud.
Actuellement, trois principes du développement durable doivent être à la base de l'aménagement : la responsabilité écologique, la citoyenneté participative, l'économie solidaire.
Si nous faisons le diagnostic de Genève Sud, nous constatons une urbanisation très déséquilibrée, sans mixités fonctionnelle et sociale. Nous notons même une dégradation du climat social dans certains quartiers.
Il apparaît que la zone comprise entre le Bachet-de-Pesay et l'emplacement du futur stade de la Praille présente une forte potentialité de développement. L'accessibilité est bonne, grâce à la convergence de l'autoroute de contournement, de la ceinture intermédiaire et du réseau tramway. C'est une centralité en devenir. Comment intervenir ? (Commentaires et rires.)
Le président. Madame, ne vous laissez pas troubler par les quolibets de vos collègues.
Mme Françoise Schenk-Gottret. Je ne suis pas troublée, je suis amusée. Je disais que nous pouvions intervenir :
1. en rééquilibrant l'urbanisation des quartiers afin de retrouver une mixité sociale. Réduisons la densité des secteurs fortement urbanisés, gelons la zone de développement, et densifions les quartiers de villas;
2. en favorisant une mixité fonctionnelle dans les quartiers d'habitation avec des commerces de proximité, des activités artisanales, la mise à disposition de locaux pour les habitants, des équipements en lieux de rencontre, un urbanisme de proximité facilitant les déplacements à pied;
3. en articulant la localisation de futures zones de logement, d'emplois, de commerces et de services aux infrastructures des transports publics pour favoriser l'utilisation d'autres moyens de transports que la voiture et éviter d'avoir à construire de nouvelles routes;
4. en considérant le pôle Bachet-de-Pesay/La Praille comme un vaste interface de transports et une centralité urbaine. Nous demandons le lancement d'un concours d'aménagement qui intègre aussi bien les aspects de transports que les aspects d'équipements. Pour ce faire, il faut prévoir une gare Genève-Sud pour les voyageurs.
Dans le but d'une construction globale d'aménagement, une approche intercommunale des questions est absolument nécessaire. Cette approche devra faire l'objet d'une loi.
C'est pourquoi je vous propose, avec le groupe socialiste, de renvoyer cette motion en commission.
M. Claude Blanc (PDC). Avant de voter le renvoi en commission, je voudrais connaître la position du Conseil d'Etat concernant cette motion.
Le Le président. Monsieur le conseiller d'Etat Moutinot, voulez-vous vous exprimer ? Non, vous y renoncez.
Mise aux voix, cette proposition de motion est renvoyée à la commission d'aménagement du canton.
Cette motion du groupe écologique, déposée le 11 octobre 1996, a passé tardivement en préconsultation devant le Grand Conseil en raison d'ordres du jour très chargés. De sorte que, renvoyée en Commission du logement, ce n'est que le 25 juin 1997 que la discussion a été entamée.
L'intérêt du régime des coopératives d'habitation n'échappe à personne, comme en témoigne le désir des commissaires de procéder à un grand nombre d'auditions.
Le sujet est traité au cours de sept réunions de la commission du logement, quatre sous la présidence de M. le député Pierre Ducrest et trois sous celle de M. le député David Hiler, par ailleurs un des auteurs de la motion.
Participent aux séances, MM. les Conseillers d'Etat Claude Haegi et, après les élections, Laurent Moutinot, les responsables de la direction générale du logement, MM. Georges Albert, directeur, Louis Cornut de la division des études d'aménagement, Claude Page de l'office financier du logement et Didier Crettol de l'office du logement social.
La commission auditionne successivement
1er septembre 1997
MM. Carlo Sommaruga et Philippe Favarger, Rassemblement pour une politique sociale du logement
Mme Labarthe et M. Rossiaud, CODHA
M. .
15 septembre 1997
M. .
M. .
29 septembre 1997
M. .
M. .
Les coopératives d'habitation à Genève et en Suisse
Les responsables des différentes coopératives apportent d'utiles informations sur le fonctionnement de leur société respective, le niveau des parts sociales, la pratique en matière de travaux, la distribution ou non distribution de dividendes (la plupart les réutilisant pour des réserves-travaux). Tous considèrent l'intervention des collectivités publiques comme étant indispensable, que ce soit par la mise à disposition de terrains en droit de superficie, par l'octroi d'avantages fiscaux ou par le cautionnement de prêts éventuels. L'intervention des collectivités publiques est essentielle pour mettre en fin de compte sur le marché des logements économiques. On ne peut en effet pas demander aux coopérateurs l'apport de fonds propres importants, car au delà de Fr. 3 000.- par pièce, l'affaire est trop onéreuse.
C'est M. Gay de la SCH et qui est président de l'association suisse ASH qui apporte le plus d'informations sur le développement des coopératives. L'association suisse qu'il dirige regroupe 1000 sociétés et concerne 120 000 des 170 000 logements qui en Suisse connaissent le régime coopératif. Il existe différents types de coopératives, celles où les locataires n'ont rien à dire, dirigées par exemple par des syndicats ou des entreprises, et celles où les locataires peuvent participer par leurs interventions au sein des assemblées de coopérateurs à la gestion de leurs immeubles.
Les raisons d'une stagnation
L'entretien avec M. Robert Ducret est très intéressant et permet aux commissaires de bien comprendre le système d'intervention de l'Etat de Genève. Si à Genève, le nombre des coopératives d'habitation, au contraire de la Suisse alémanique, n'a pas connu un essor important, c'est que l'Etat est intervenu déjà à fin des années 40, pour répondre à la grave crise du logement, au moyen de subventions pouvant aller jusqu'au tiers et par des cautionnements de 20 %. Ce sera surtout la mise en oeuvre des lois HLM qui reléguera à l'arrière-plan le développement des coopératives d'habitation. Contrôle par l'Etat du prix des terrains, contrôle du prix de la construction, exonérations fiscales. Les autres cantons ne connaissent pas le régime des lois HLM et il n'y a pas d'aides au logement.
Tout en étant favorable au développement des coopératives d'habitation, M. Rober Ducret relève quelques inconvénients.
L'endettement d'un immeuble de logements ne doit pas dépasser 60 %. Or, les coopératives ont souvent 95 % et plus de dettes hypothécaires. Dans le cas de l'élévation du taux de 5 à 6 % cela représente pour une coopérative une hausse importante de charges, soit 5, 7 jusqu'à 24 % de hausse. De telles variations peuvent mettre en péril la situation des locataires.
De plus, les coopératives ne disposent que de trop peu de réserves. Dans le cas présent où le Grand Conseil, à juste titre, oblige la modification des portes d'ascenseur, l'absence de réserves rend cette réalisation très difficile.
Un autre aspect négatif apparaît au cours de la discussion avec les représentants des coopératives : l'antagonisme entre la situation de coopérateurs et celle de locataires, antagonisme qui ressort au moment des augmentations de loyer décidées soit par le conseil d'administration de la société ou par l'assemblée générale.
Les avantages l'emportent incontestablement sur les inconvénients
Les représentants du Rassemblement en ont énuméré un certain nombre fort pertinent. Le système des coopératives d'habitation échappe à la spéculation immobilière; il s'inscrit pleinement dans le cadre de la politique de mise à disposition pour la population de logements sociaux et implique par ailleurs une participation des locataires à la gestion de leurs propres immeubles.
Les gens du Rassemblement estiment que pour mener à bien un développement des coopératives d'habitation, il est nécessaire d'élaborer un plan d'action en leur faveur qui prévoirait la mise en place d'un organisme destiné à acquérir des terrains pour les remettre en droit de superficie, de faire jouer un rôle fondamental à la BCG pour l'octroi de prêts préférentiels. Il conviendrait peut-être de prévoir, en cas de nécessité, le déclassement de certaines zones agricoles.
Examen, modifications de la motion, votes
C'est le 1er décembre 1997, que la commission, à l'unanimité, vote l'entrée en matière de la motion 1092. La commission constate que la première invite, celle consistant à demander au Conseil d'Etat de lui faire un rapport sur la situation des coopératives d'habitation à Genève, a déjà été réalisée. Les commissaires pourront disposer du rapport en question.
Après discussion, la motion s'enrichit d'une nouvelle invite: "; les expériences faites par d'autres cantons suisses et en particulier Zurich " (vote acquis à l'unanimité).
L'invite 4, soit: "; la création d'un organisme destiné à acquérir des terrains ou des immeubles vides pour les mettre à disposition des coopératives d'habitation ", suscite une discussion.
Certains sont favorables à la mise en place d'une fondation de droit public qui disposerait d'un inventaire des terrains à construire dont l'Etat est en possession (il semblerait que cet inventaire n'existe pas…), et qui serait un organisme où l'on pourrait se renseigner en cas de création d'une nouvelle société.
D'autres pensent qu'il faudrait éviter de créer une structure lourde. La question est renvoyée après l'entretien avec M. Moutinot.
La proposition du Rassemblement d'ajouter en fin de l'invite 4 "; à but non lucratif " est repoussée par 10 non et 2 abstentions. La commission estime en effet qu'on ne peut pas interdire une coopérative d'avoir un rendement de 3 à 5 %. Surtout s'il est nécessaire de constituer certaines réserves, ne serait-ce que pour rembourser les prêts bancaires.
La 4e invite subit encore une modification. Par 8 (3 L, 2 R, 2 Ve, 1 S) et 4 abstentions (3 AdG, 1 DC) le mot "; vides " est supprimé de l'invite 4. Motifs : il faut imaginer le cas où une coopérative achèterait un immeuble où il y aurait plus que 2 locataires en place; de plus un immeuble squatté n'est pas un immeuble vide.
Enfin, autre modification de l'invite 4, à l'unanimité, "; pour les mettre à disposition " est remplacé par "; pour les octroyer en droit de superficie ".
L'invite 5 "; des démarches pour favoriser l'obtention de prêts hypothécaires et de crédit de construction par la Banque Cantonale de Genève " est supprimée par 6 non, 3 abstentions, 3 oui. Motifs : les coopératives peuvent faire appel à d'autres établissements bancaires, par exemple la Banque alternative.
L'invite 6 "; l'octroi prioritaire des subventions prévues par la LGL à des coopératives d'habitation ou d'autres organisations à but non lucratif " subit une modification. "; Octroi prioritaire " est remplacé par "; la répartition équitable ". Motif : "; l'octroi prioritaire " donne l'impression qu'actuellement les coopératives seraient mal desservies par la LGL, ce qui n'est pas le cas. La modification est approuvée par 9 oui (3 L, 2 R, 1 DC, 1 Ve 2 AdG), 1 non (Ve) et 2 abstentions (1 AdG, 1 S).
La commission entend M. le Conseiller d'Etat Moutinot, lequel précise que les coopératives, de par le code des obligations CO, sont forcément sans but lucratif. Etant fortement endettées initialement, elles ont intérêt à pratiquer une politique raisonnable en ce qui concerne les réserves, que ce soit pour les travaux ou pour supporter d'éventuelles baisses des prestations de l'Etat ou encore une augmentation des taux hypothécaires.
Répondant à la crainte de certains commissaires de voir un désengagement de l'Etat vis-à-vis des investisseurs privés désireux de s'investir dans le logement social, désengagement provoqué par une aide privilégiée aux sociétés coopératives, M. Moutinot précise que l'action de l'Etat ne se limitera pas uniquement aux dites coopératives.
La question de la création d'un organisme particulier, qui pourrait être une fondation, destiné à acheter des terrains pour le compte de l'Etat dans le but de les remettre en droit de superficie aux coopératives, semblait préoccuper une partie des commissaires et des personnes auditionnées.
La législation genevoise et les coopératives d'habitation
Il est utile de rappeler comment l'Etat de Genève entend favoriser l'essor des coopératives d'habitation. L'article 1 de la loi générale sur le logement et la protection des locataires stipule :
Art. 1 Rôle de l'Etat
1 L'Etat encourage la construction de logements d'utilité publique et s'efforce d'améliorer la qualité de l'habitat dans les limites et selon les critères fixés par la présente loi. Il peut entreprendre lui-même la construction de ces logements.
2 A cet effet, l'Etat
a) acquiert des terrains en usant notamment des droits de préemption et d'expropriation que lui confère la présente loi ;
b) encourage la construction de logements, en particulier à but non lucratif, par voie notamment de caution simple d'emprunts hypothécaires, d'octroi d'emprunts, avec ou sans intérêts, de subventions, d'exonérations fiscales, de mises à disposition, dans la mesure des disponibilités, de terrains à bâtir en droit de superficie, d'aide à l'équipement des terrains à bâtir. Il peut également faire usage des aides et moyens que les lois et ordonnances fédérales fournissent aux cantons dans le même dessein ;
c) construit des logements lui-même ou par l'intermédiaire de fondations de droit public ;
d) veille à la qualité des logements construits ainsi qu'à leur environnement.
3 L'Etat instaure un contrôle des loyers sur tous les logements ou locaux construits par ou avec l'aide de l'Etat de Genève ou d'autres collectivités publiques ou corporations de droit public. Les logements et les locaux situés dans des immeubles construits avec l'aide e l'Etat au sens de l'alinéa 2, lettre b, sont soumis à ce contrôle aussi longtemps qu'ils bénéficient de cette aide; ceux construits en vertu de l'article 2, lettre c, et ceux visés à l'article 2 de la loi du 21 juin 1991 au bénéfice d'un capital de dotation fourni par l'Etat.
L'aide de l'Etat en faveur des coopératives d'habitation peut prendre d'autres aspects :
Cautionnement
Art. 17 Taux
1 Pour les logements des catégories 1 et 2, le Conseil d'Etat peut, si les conditions du marché des capitaux l'exigent, se porter caution simple de prêts hypothécaires, pour autant qu'ils soient primés par des prêts de rang préférable atteignant au moins 60 % de la valeur de l'immeuble, à dire d'experts.
2 Les prêts ainsi garantis par l'Etat ne peuvent, ajoutés à ceux qui les priment, excéder au total 80 % de la valeur de l'immeuble.
3 Cette proportion peut atteindre :
a) 95 % lorsque le propriétaire est une association ou une fondation ne poursuivant pas de but lucratif, ou encore une coopérative d'habitation dont les membres représentent au moins 2/3 de l'ensemble des titulaires d'appartement et don les fonds propres n'ont pas un rendement supérieur à 5 % ;
b) 100 % lorsque l'immeuble est édifié par une corporation de droit public ou par des personnes morales dépendant d'une telle corporation.
Prêts hypothécaires
Art. 20 Prêts en 1er rang
1 Le Conseil d'Etat peut, si les conditions du marché des capitaux l'exigent, accorder des prêts hypothécaires en 1er rang aux taux d'intérêt usuel sur les immeubles admis au bénéfice de la présente loi, lorsque le propriétaire est :
a) une corporation ou un établissement de droit public, ou une personne morale dépendant d'une telle institution ;
b) une association ou une fondation ne poursuivant pas de but lucratif ;
c) une société coopérative d'habitation dont les membres représentent au moins 2/3 de l'ensemble des titulaires d'appartement et dont les fonds propres n'ont pas un rendement supérieur à 5 %.
2 Il peut aussi accorder des prêts en 1er rang lorsque les fonds prêtés sont fournis à cette fin par la Confédération.
3 La clause de ces prêts, relative aux modalités de remboursement, doit prévoir des amortissements réguliers pendant la durée d'application de la présente loi à l'immeuble considéré.
Création d'un nouvel organisme …ou utilisation de l'ensemble des structures existantes ?
En ce qui concerne l'invite 4, laquelle dit à ce stade ceci : "; la création d'un organisme destiné à acquérir des terrains ou des immeubles pour les octroyer en droit de superficie à des coopératives d'habitation ", voici ce que prévoit la LGL :
Fondation de droit public
Art. 10 Buts
Afin de faciliter l'utilisation et la mise en valeur des terrains acquis en vertu de la présente loi, le Grand Conseil peut, sur proposition du Conseil d'Etat, créer une fondation de droit public, à laquelle ces terrains peuvent être remis en droit de superficie, ayant notamment pour buts :
a) de préparer ces terrains ou ceux qu'elle aura elle-même acquis, à leur destination finale, notamment en apportant sa collaboration à l'étude des plans d'aménagement de quartiers et à la création de l'équipement et des infrastructures nécessaires ;
b) de céder ces terrains à des communes, à des coopératives d'habitation, à des associations sans but lucratif, à des fondations de droit public ou à d'autres collectivités publiques, ou à des personnes juridiques de droit privé pour la réalisation d'immeubles ou d'ensembles d'habitations, sous forme de droit de superficie, conformément aux modalités fixées à l'article 9 ;
c) de construire, le cas échéant, elle-même, les immeubles prévus sur ces terrains ;
d) de favoriser la création et le développement de coopératives d'habitation, d'associations ou de fondations construisant sans but lucratif et de coordonner leur action ;
e) de gérer elle-même ou par des tiers les immeubles qu'elle a réalisés elle-même ;
f) d'assumer toute autre tâche en matière d'acquisition, d'exploitation ou de mise en valeur d'immeubles ou de constructions d'utilité publique que le Conseil d'Etat lui confie.
Favoriser les acquisitions foncières
Promouvoir les coopératives, c'est notamment mettre à leur disposition des terrains bon marché (effet à la baisse sur les loyers ainsi que sur les fonds propres devant être fournie par les coopérateurs). D'où la nécessité de mener une politique active d'acquisition de terrains, comme le prévoit l'art. 10,7 al.3 lit.2 de la Constitution genevoise, afin de pouvoir les mettre à disposition, par l'octroi de droits de superficie, à des coopératives sans but lucratif.
A cette fin, le droit de superficie devra veiller à ce qu'il s'agisse bien de logements locatifs à bas loyers.
Afin de garantir que les objectifs ainsi fixés puissent être atteints, il serait souhaitable que les différentes structures existantes soient assemblées au sein de la fondation visée à l'art. 10 LGL, disposition restée lettre morte depuis son adoption par le Grand Conseil.
Tant M. Laurent Moutinot que M. Georges Albert estiment également qu'il faut utiliser l'ensemble des structures existantes à cet effet, ne pas créer de toute pièce une structure supplémentaire, mais de réorganiser ce qui est déjà existant.
Actuellement, les acquisitions de terrains et d'immeubles par l'Etat sont traitées au sein du DAEL, parle Service d'acquisitions foncières. Il existe déjà une fondation immobilière, dont le but est d'intérêt public, "; Cité Nouvelle ", qui a la possibilité d'acquérir des biens pour les remettre à des fondations à but non lucratif. La fondation "; Cité Nouvelle " a réalisé 5325 logements sociaux. Elle pourrait parfaitement remplir la tâche escomptée, moyennant quelques modifications de son but et de son fonctionnement.
La majorité de la commission est du même avis que M. Moutinot, à savoir ne pas créer une structure supplémentaire, et propose la suppression de l'invite 4, à savoir "; la création d'un organisme destiné à acquérir des terrains ou des immeubles pour les octroyer en droit de superficie à des coopératives d'habitation " est refusée par 9 non (2 AdG, 2 DC, 2 R, 3 L) contre 6 oui (1 AdG, 3 S, 2 Ve).
Vote final
Par 9 oui (2 AdG, 2 DC, 2 R, 3 L) et 6 abstentions (1 AdG, 3 S, 2 Ve) la motion 1092 est acceptée.
Proposition de motion(1092)
concernant un plan d'action en faveur des coopératives d'habitation
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
considérant que :
- les coopératives d'habitation à buts non lucratifs permettent de mettre durablement sur le marché des immeubles à des loyers très modérés ;
- le système des subventions prévu dans le cadre de la loi générale sur le logement (LGL) n'est plus entièrement adapté à la période actuelle de crise économique et de faible croissance démographique ;
- la difficulté à trouver des investisseurs ;
- les expériences réalisées en Suisse à l'étranger ;
- la nécessité de reformuler les objectifs à long terme de la politique du logement,
invite le Conseil d'Etat
à lui faire rapport sur :
- la situation des coopératives d'habitation à Genève ;
- les expériences faites par d'autres cantons suisses et en particulier Zurich ;
- les avantages et les inconvénients qu'elles présentent du point de vue de l'intérêt général ;
- les mesures qui pourraient être prises pour favoriser leur multiplication, notamment sur le plan fiscal,
et à élaborer un véritable plan d'action en faveur des coopératives, prévoyant notamment :
- la mise à disposition par l'Etat et les autres collectivités publiques de terrains ou immeubles, en droit de superficie à des coopératives d'habitation ;
- la répartition équitable des subventions prévues par la LGL à des coopératives d'habitation ou d'autres organismes à buts non lucratifs.
Débat
M. René Ecuyer (AdG), rapporteur. Les coopératives d'habitation ont été maintes fois évoquées par ce Grand Conseil. Tous reconnaissent leur utilité, mais peu ont réagi aux propositions de certains députés. On est quelque peu manchot en matière de réalisations concrètes ! Il suffit de voir ce qu'il est advenu de la motion du parti démocrate-chrétien de 1985, votée par le Grand Conseil en novembre 1986.
M. Moutinot nous a fait parvenir sa réponse parmi beaucoup d'autres. Cette réponse n'en est pas une, puisqu'elle nous renvoie, douze ans après, à la motion 1092 présentement traitée.
L'étude de la motion 1092 nous a permis de réfléchir à ce problème. Nous avons entendu plusieurs responsables de coopératives d'habitation. Nous avons beaucoup appris sur leur fonctionnement, sur leur origine. Chacune d'elles a ses particularités.
L'ancien conseiller d'Etat, M. Robert Ducret, nous a donné des informations très utiles. Il nous a expliqué pourquoi les coopératives d'habitation n'ont pas connu, à Genève, un développement aussi important qu'à Zurich. La raison en est que nous sommes le seul canton suisse qui ait une loi sur les HLM, grâce à laquelle de nombreux logements sociaux ont pu être mis sur le marché.
Une voix. Qui les a faits ?
M. René Ecuyer, rapporteur. Ce sont les travailleurs, avec la pelle et la pioche ! La motion a subi quelques retouches en commission. Par exemple, la sixième invite stipulant : «l'octroi prioritaire des subventions prévues par la loi générale sur le logement à des coopératives d'habitation ou d'autres organisations à buts non lucratifs» a été amputée de la notion de priorité. En effet, nous nous sommes rendus à l'évidence que trois mille logements HBM devaient être construits d'ici l'an 2000; c'est pourquoi les terrains acquis ne devraient pas revenir, en priorité, aux coopératives.
La commission s'est achoppée sur la question de savoir si nous devions créer un organisme spécifique pour les coopératives d'habitation, lequel faisait l'objet de la quatrième invite ainsi libellée : «la création d'un organisme destiné à acquérir des terrains ou des immeubles vides pour les mettre à disposition des coopératives d'habitation». La commission y a renoncé après que M. le conseiller Moutinot et ses collaborateurs eurent préconisé d'agir à partir des organismes existants, quitte à modifier leurs statuts, pour éviter de créer un nouvel organisme spécifique aux coopératives.
Il convient néanmoins de rappeler les dispositions de la loi générale sur le logement. Celle-ci stipule, en son article 1 : «L'Etat encourage la construction de logements d'utilité publique et s'efforce d'améliorer la qualité de l'habitat.» L'Etat donc peut entreprendre la construction de ces logements et, pour ce faire, il dispose de toute une panoplie d'interventions : achats de terrains, cautions d'emprunts, contrôle des loyers des logements subventionnés... (Brouhaha.) Si je vous dérange, dites-le moi !
Le président. Veuillez conclure, Monsieur le député.
M. René Ecuyer, rapporteur. Il est intéressant de rappeler l'article 10 de la LGL qui ne se limite pas aux seules coopératives. Cet article stipule : «Afin de faciliter l'utilisation et la mise en valeur des terrains acquis en vertu de la LGL, le Grand Conseil peut, sur proposition du Conseil d'Etat, créer une fondation de droit public.» Le cadre de cette fondation est déjà fixé dans la loi qui précise, entre autres, que ces terrains peuvent être mis à la disposition des communes, des coopératives d'habitation, etc.
Cet article ayant une portée plus grande, nous proposons au Conseil d'Etat de s'y référer. Nous pourrions créer un organisme qui couvre la totalité des besoins de la collectivité en matière de logement social. C'est à M. Moutinot d'y réfléchir pour nous présenter ensuite une proposition. Mais pas dans douze ans !
M. Jacques Béné (L). Je propose de reporter ce point à une séance ultérieure. Beaucoup de choses doivent être dites et nombreux sont les députés désireux d'intervenir. En ce moment, plus personne n'écoute, alors que le sujet est très important. En effet, les coopératives incluent la Codha et Rhino. La politique du logement à Genève exige un débat sérieux, Elle ne saurait donc être bâclée en fin de séance.
Comme nous ne sommes pas à quinze jours près, je réitère ma proposition de reporter ce point à une séance ultérieure.
Le président. Je mets aux voix la proposition de M. Béné.
Mise aux voix, la proposition de reporter la suite du débat sur la proposition de motion 1092 à une séance ultérieure est adoptée.
Le président. Le Conseil d'Etat nous propose de traiter encore le point 81, avant de procéder au vote sur la naturalisation.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
Lors de sa séance du 25 mars 1998, tenue sous la présidence de M. Bernard Annen, la Commission des finances a examiné le présent projet de loi visant à autoriser le Conseil d'Etat à transférer le portefeuille des actions nominatives Swissair du patrimoine administratif au patrimoine financier.
Présentation du projet
M. M. B. Cordt-Moeller, directeur général des finances au Département des finances, a présenté le projet de loi conformément à l'exposé des motifs du Conseil d'Etat. Il précise en outre que le projet veut répondre à deux objectifs. L'un est la mise en conformité du bilan de l'Etat avec la Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat du 7 octobre 1993 (LGF), l'autre est de pouvoir concrétiser la réalisation d'une plus-value de 40 millions de francs, inscrite dans le budget 1998 sous la rubrique 424. L'article 62 alinéa 2 de la LGF indique que "; Le patrimoine financier comprend les valeurs et les placements qui peuvent être aliénés. "
Travaux et vote de la commission
La commission a voulu connaître la valeur actuelle des 62 333 actions Swissair. M. Cordt-Moeller indique que, selon l'AGEFI du 25 mars 1998, la valeur est de 2100 francs par action. Les actions ayant été acquises au prix moyen de 500 francs, entre 25 000 et 35 000 actions devraient être vendues pour réaliser la plus-value de 40 millions, inscrite au budget 1998 sous la nature 424.01 "; Gains comptables sur les placements du patrimoine financier ".
Un député se demande si l'Etat n'est pas en train de vendre les "; bijoux de la famille ". La commission se demande également si c'est le bon moment de vendre ces actions ou si l'Etat n'a pas avantage à les garder en portefeuille et à emprunter les 40 millions.
Seul l'avenir pourra nous le dire. Compte tenu de la situation actuelle des finances de l'Etat, il ne paraît pas souhaitable à la majorité de la commission de spéculer sur une éventuelle progression de valeur de ces actions et de préconiser une augmentation de la dette de l'Etat.
La question relative aux AK bons a également été abordée. M. Cordt-Moeller informe la commission que Swissair a supprimé ce système. La compagnie envisage de le remplacer par un système d'intéressement et de réduction de prix des billets basé sur le nombre de billets utilisés.
En conclusion, la Commission des finances vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, par 12 oui (3 L, 3 S, 2 R, 2 Ve et 2 AdG), 1 non (AdG) et 2 abstentions (2 DC), d'adopter le projet de loi 7803 tel que présenté par le Conseil d'Etat.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(7803)
autorisant le Conseil d'Etat à transférer le portefeuille des actions nominatives Swissair du patrimoine administratif au patrimoine financier
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
décrète ce qui suit :
Art. 1 Transfert du patrimoine administratif au patrimoine financier
Le Conseil d'Etat est autorisé à transférer 62 333 actions nominatives Swissair du patrimoine administratif au patrimoine financier.
Art. 2 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève
La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.
La séance publique est levée à 20 h.
Le Grand Conseil continue de siéger à huis clos.
*
* *
La demande de réexamen est adoptée.
La séance est levée à 20 h 15.