Séance du jeudi 22 janvier 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 4e session - 2e séance

PL 7795
8. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (création d'une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales). ( )PL7795

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28825-27-222-309, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 17 janvier 1997, modifiant les limites de zones sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (création d'une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, à la Place des Nations), est approuvé.

2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.

Art. 3

Un exemplaire du plan no 28825-27-222-309 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

EXPOSÉ DES MOTIFS

 

Le projet de modification des limites de zones no 28825-27-222-309 faisant l'objet du présent projet de loi porte sur un périmètre comprenant grosso modo l'actuelle place des Nations, ainsi que les parcelles nos 2182 (pour partie), 2184 et 2994 (pour partie) situées de part et d'autre de cette place, face à l'Organisation des Nations Unies (ONU). Ce projet est accompagné d'un deuxième projet de modification des limites de zones (no 28937A-222), lequel porte sur le solde de la parcelle no 2184 et le solde de la parcelle no 2182, sur laquelle se trouvent le collège Sismondi, la villa Rigot et plusieurs courts de tennis, entre l'avenue de France, l'avenue de la Paix et le chemin Rigot.

L'ensemble de ces terrains, y compris la place des Nations, représente une superficie d'environ 84 875 m2. Le principal objectif de ces deux projets de modification des limites de zones est de revaloriser le cadre urbanistique de la place des Nations, et de contribuer au développement des organisations internationales autour des Nations Unies. Dans ce sens, il s'inscrit dans la ligne, suivie depuis environ 10 ans, tendant à renforcer le rôle de Genève comme lieu de rencontre privilégié dans le monde pour les organisations internationales, dont les principaux témoins sont la réalisation récente du Haut commissariat aux réfugiés (HCR), l'extension en cours de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), et celles, prochaines, de l'Union internationale des télécommunications (UIT) et de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

Un élément décisif de cette ligne politique a été l'organisation, en 1995, d'un concours d'aménagement international placé sous les auspices conjoints de la Ville, de l'Etat et de l'ONU, cela à l'occasion du cinquantième anniversaire de cette dernière. Le programme établi prévoyait de redonner à ce lieu une dimension architecturale et urbanistique plus en correspondance avec sa vocation symbolique de lien entre Genève et le monde. Plusieurs bâtiments devant abriter des fonctions essentielles contribuent à cette volonté:

- La Maison universelle, qui abritera pour les petites missions des pays les moins avancés. Ce projet a pour but d'ancrer ces missions à Genève, et de renforcer ainsi leur rôle.

- Le Centre de politique et de sécurité, fondation dont la mission principale est de former des fonctionnaires gouvernementaux sur le plan de la politique de sécurité. Ce centre aura des liens étroits notamment avec le Comité international de la Croix-Rouge.

- L'Institut des hautes études internationales ainsi que sa bibliothèque, actuellement logés dans des bâtiments provisoires vieux de 30 ans, bénéficieront de deux bâtiments mieux adaptés à leur fonction.

- Dans l'enceinte actuelle du Palais des Nations, un bâtiment dont il avait été prévu initialement qu'il abriterait la Maison des droits de l'homme, et dont l'affectation définitive sera modifiée, tout en s'inscrivant dans le cadre des activités de l'ONU.

Le projet lauréat permet ainsi de réaliser les objectifs suivants, qui avaient été fixés dans le cadre du concours, et qui visaient essentiellement à mieux intégrer les organisations internationales dans la vie genevoise:

- réaliser un parcours paysager, englobant la place des Nations jusqu'au lac, avec un lieu privilégié de développement urbain entre les avenues de France et de la Paix;

- faire de la place des Nations un dénominateur commun, vers lequel convergent toutes les organisations internationales;

- transformer la place des Nations en un lieu privilégié, diminuant la circulation automobile, rajoutant l'élément «eau» et prenant en compte le piéton.

Ce concept, parfaitement réalisé dans le projet lauréat, doit être accompagné de l'ouverture au public du parc de l'ONU, dans sa partie située entre les bâtiments et les voies ferrées.

La réalisation de ces projets sera par ailleurs l'occasion de concrétiser le premier maillon d'une promenade piétonne descendant du Grand Morillon jusqu'au lac. Cette promenade, qui doit également emprunter le domaine de la Pastorale, est un élément clé du projet lauréat. Elle se développera entre les bâtiments envisagés jusqu'au bas de la parcelle Rigot.

Dans le même temps, le projet permet d'assurer le maintien de la villa Rigot ainsi que sa dépendance et de la plus grande part de son parc richement arboré, lequel s'inscrit en prolongement naturel du parc de l'ONU.

Le projet prévoit enfin la reconstruction à moyen terme et en plusieurs étapes du collège Sismondi, composé de pavillons provisoires vieux maintenant de 40 ans.

En ce qui concerne les transports publics, un espace est réservé pour la création d'une boucle de rebroussement pour le tram 13 prolongé, ainsi que pour le stockage des nombreux bus desservant le quartier. Ce dispositif est complété d'un parking P + R d'environ 100 places. L'aménagement du plan de circulation et la création de parkings ont été étudiés par les services de l'Etat et de la Ville, assisté d'un bureau spécialisé chargé d'examiner l'impact du projet sur l'environnement, en vertu de l'OEIE.

Les projets de plans localisés de quartier no 28826-27-222-309 et no 28938A-222, mis simultanément à l'enquête publique, définissent plus précisément l'aménagement de ces deux périmètres.

L'ensemble des terrains sont actuellement situés en zone villas. La mise en place de ces projets implique de procéder à une modification des limites de zones.

Les objectifs visés dans le cadre de ce premier périmètre, notamment la Maison universelle, doivent être réalisés prioritairement. Par ailleurs, le projet lauréat de M. Fuksas définit une entité construite entièrement indépendante, grâce notamment à la construction d'une nouvelle rue prolongeant la rue de Montbrillant vers l'entrée de l'ONU. Ce sont les raisons qui ont motivé le découpage du périmètre initial en deux projets de modifications des limites de zones distincts.

La réalisation de ces constructions et aménagements nécessite plusieurs échanges fonciers ainsi que la levée de servitudes de restriction de bâtir.

Les négociations foncières y relatives avec les entités concernées, à savoir l'ONU, la Ville de Genève et l'université sont conclues, ou en bonne voie de règlement.

Il convient de mentionner à ce propos les deux points suivants:

- Un projet de protocole d'accord a été établi en avril 1997 d'entente entre la Ville et l'Etat de Genève dans le but de déterminer les nouvelles assiettes de terrain revenant, après échange, au domaine public de la Ville et au domaine privé de l'Etat et de l'université. Ces nouvelles assiettes sont précisées par un schéma figurant sur chacun des plans localisés de quartier.

- Alors qu'une procédure en expropriation envers l'université avait dû être envisagée, en juin 1997, un accord a finalement été conclu entre cette dernière et l'Etat de Genève: un échange foncier aura lieu entre ces deux entités, au terme duquel l'Etat de Genève deviendra propriétaire de la campagne Rigot, tandis que l'université recevra en échange la parcelle dite du «Foyer de Pinchat», située sur la commune de Carouge et d'une surface équivalente. L'université pourra alors disposer d'un terrain comportant un potentiel foncier exploitable à moyen ou long terme, qui sera affecté au bénéfice de ses activités.

L'aménagement de la campagne Rigot correspond aux objectifs de la donation effectuée à l'université de Genève par M. John D. Rockefeller junior le 15 août 1942. L'Etat de Genève respectera les charges en faveur de la Société des Nations dont cette donation est assortie.

Aussi, il a été décidé de créer, pour le périmètre objet du présent projet de loi, une zone de développement 3 destinée prioritairement à des organisations internationales, d'une surface d'environ 21 875 m2. Le périmètre voisin, mis simultanément à l'enquête publique, est destiné à accueillir une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et d'une zone de verdure.

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone qu'il est envisagé de créer en vertu du présent projet de loi.

L'enquête publique qui a eu lieu du 16 juillet au 29 août 1997 n'a provoqué que deux observations qui seront transmises, de même que le préavis du conseil municipal de la Ville de Genève, à la commission d'aménagement du canton chargée de l'examen de ce projet de loi.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons ce projet de loi à votre bienveillante attention.

Préconsultation

Le président. Le débat de préconsultation qui vient de s'achever à propos du point 61 préfigurait quelque peu celui du point 62.

M. Rémy Pagani (AdG). Je me permets d'intervenir sur le projet du parc Rigot et la modification de zones qui nous est proposée, soit sur la deuxième partie du projet.

Le président Moutinot présume de ce projet qui vient de son prédécesseur, car il y a un problème de procédure. Vous nous avez dit aussi - j'ai pris note - votre respect de la démocratie municipale et des droits des communes à s'exprimer.

En l'occurrence, la commune de Genève et les habitants ont été spoliés de leurs droits. En effet, la Ville de Genève ayant donné un préavis négatif, il n'est plus possible aux référendaires que nous sommes de lancer un référendum. La Ville de Genève avait demandé qu'il lui soit proposé une autre modification de limite de zones avant celle que nous connaissons. Je constate à regret qu'aucune démarche de ce genre n'a a été faite, contrairement à ce qui avait été promis. Il y a donc bien lieu de parler de déni des droits démocratiques en défaveur de la Ville de Genève.

La modification de zones ne correspond pas aux besoins des habitants ni à un aménagement correct de cette surface, notamment parce qu'est maintenue en l'état l'implantation du collège Sismondi, anciennement appelé Rigot. Nous préférerions que cette implantation se fasse sur les courts de tennis qui sont à la disposition de la collectivité ou qui, en tout cas, devraient l'être depuis dix ans, puisque le droit de superficie ou de location, accordé il y a environ cinquante ans, s'est éteint. Nous estimons donc que le collège Sismondi - anciennement Rigot - devrait être implanté sur les courts de tennis.

Pour ces deux raisons, nous rejetons ce projet et demandons le retrait du projet de loi 7794 jusqu'à ce que la municipalité puisse entrer en matière sur sa demande.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Dans le débat précédent, tous les orateurs se sont exprimés sur les deux projets. Vous nous avez parlé surtout de celui-ci et maintenant vous parlez de l'autre. Néanmoins, je vous réponds.

Lorsque j'ai mis à l'enquête publique le périmètre que vous critiquez, il n'était pas dans mon intention de détourner les droits démocratiques pour la bonne et simple raison qu'il a été tenu compte des remarques émises par la Ville de Genève. C'est pour ne pas retarder l'avance de ce projet que je l'ai mis à l'enquête publique, et j'assume cette décision.

Vous prétendez être privé d'un droit de référendum, mais à aucun moment, avant les débats du Municipal, vous n'avez indiqué que vous lanceriez un référendum au cas où vos thèses ne triompheraient pas. C'est votre droit le plus strict, mais si un référendum est annoncé à l'avance, on sait qu'il existe et il est aisé de prendre une autre décision. En l'occurrence, ce n'était pas prévisible.

La commission d'aménagement du Grand Conseil reste l'endroit idéal pour discuter de l'ensemble des problèmes qui ont été soulevés. Par conséquent, je ne retirerai pas ce projet.

Une voix. Et pan dans les gencives !

M. Bernard Lescaze (R). Je pense, au contraire de ce qu'a dit M. Pagani, que le projet de loi 7795 - c'est bien celui dont nous parlons, car auparavant, je n'étais intervenu que sur le projet de loi 7794 - doit être renvoyé en commission de l'aménagement, car il est particulièrement important. En effet, quoi que l'on en pense, l'aménagement actuel de la place des Nations est indigne de ce qu'il devrait être. Il faut agir. D'ailleurs, le Conseil administratif de la Ville de Genève - notamment représenté par M. Michel Rossetti - avait lancé un concours pour l'aménagement de la place des Nations.

Bien que très favorable à la défense de l'autonomie communale, je considère, tout comme une grande partie de ce Grand Conseil, qu'on ne saurait limiter les droits démocratiques à une seule partie de ce canton, aux habitants des environs ou à ceux de la commune.

Dans le cas qui nous intéresse, à l'entrée de la ville, sur la place des Nations, devant le Palais des Nations et à proximité de nombreuses organisations internationales, il est nécessaire que tout le canton se prononce.

Le député Pagani a parlé des besoins des habitants. Ils sont certes légitimes, mais les besoins économiques, sociaux de tout le canton sont également légitimes. Le maintien des organisations internationales dans notre ville est prioritaire, surtout si l'on veut continuer à mener le même genre de vie dans notre canton. En conséquence, je propose le renvoi à la commission d'aménagement du canton.

En ce qui concerne le collège Sismondi, il est sans doute possible de le riper vers les tennis. C'est probablement une bonne solution, mais elle ne doit pas s'imposer au détriment de l'exigence première; celle d'avoir un collège, un gymnase moderne pour les élèves. En effet, cela fait des années que la reconstruction du collège Sismondi est promise. Beaucoup de propositions ont vu le jour. On a pensé le déplacer à d'autres endroits, sur le Palais Wilson, sur Châteaubriand. Finalement, on décide de le reconstruire presque à la même place. Nous sommes d'accord d'étudier un emplacement légèrement différent, bien que cela fasse perdre plusieurs mois, mais il faut que nous nous engagions aussi pour la construction d'écoles modernes à Genève. Le parti radical l'a toujours voulu et continuera à le vouloir. Je suis étonné qu'un représentant de l'Alliance de gauche fasse des objections et propose de maintenir les élèves de Sismondi dans leurs baraquements. C'est inacceptable et c'est une raison supplémentaire que nous avons pour que ce projet de loi soit rapidement examiné à la commission d'aménagement du canton.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.

Le président. Nous continuons selon notre ordre du jour au point 51. A la demande des deux conseillers d'Etat concernés, nous achevons de traiter les points concernant le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement. Je constate que M. Moutinot s'en trouve soulagé. Nous reprenons donc nos travaux au point 63 de notre ordre du jour.