Séance du jeudi 22 janvier 1998 à 17h
54e législature - 1re année - 4e session - 2e séance

PL 7794
7. Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (création d'une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, d'une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et d'une zone de verdure). ( )PL7794

LE GRAND CONSEIL

Décrète ce qui suit:

Article 1

1 Le plan no 28937A-222, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 24 janvier 1997, modifié le 19 novembre 1997, modifiant les limites de zones sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (création d'une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, d'une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et d'une zone de verdure à la Campagne Rigot), est approuvé.

2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

L'Etat de Genève dispose, aux fins d'atteindre les buts poursuivis par les zones créées, d'un droit de préemption sur les terrains compris dans les zones de développement et dans la zone de verdure, figurées au plan visé à l'article 1; ce droit est annoté au registre foncier. Les articles 3 à 5 de la loi sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, sont applicables par analogie en cas d'exercice du droit de préemption.

Art. 3

L'acquisition de tout ou partie des terrains inclus dans les zones de développement et de verdure figurées au plan précité est déclarée d'utilité publique au sens de l'article 3, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933, aux fins d'atteindre les buts poursuivis par les zones créées.

Art. 4

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans la zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, à la zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et le degré de sensibilité II à la zone de verdure (pour les bâtiments comprenant des locaux à usage sensible au bruit), créées par le plan visé à l'article 1.

Art. 5

Un exemplaire du plan no 28937A-222 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

 

EXPOSÉ DES MOTIFS

Le projet de modification des limites de zones no 28937A-222 faisant l'objet du présent projet de loi porte sur un périmètre comprenant une partie de la parcelle no 2184, la parcelle no 2183 et la plus grande partie de la parcelle no 2182, laquelle correspond au terrain actuellement occupé par le collège Sismondi, par la villa Rigot, et par plusieurs terrains de tennis, entre l'avenue de France, l'avenue de la Paix et le chemin Rigot.

Ce projet est accompagné d'un deuxième projet de modification des limites de zones (no 28825-222) qui porte sur le solde de la parcelle no 2182, ainsi que sur la place des Nations et sur les parcelles nos 2184 et 2194 (pour partie) situées de part et d'autre de cette dernière.

L'ensemble de ces terrains, y compris la place des Nations, représente une superficie d'environ 84 875 m2. Le principal objectif de ces deux projets de modification des limites de zones est de revaloriser le cadre urbanistique de la place des Nations, et de contribuer au développement des organisations internationales autour des Nations Unies. Dans ce sens, il s'inscrit dans la ligne, suivie depuis environ 10 ans, tendant à renforcer le rôle de Genève comme lieu de rencontre privilégié dans le monde pour les organisations internationales, dont les principaux témoins sont la réalisation récente du Haut commissariat aux réfugiés (HCR), l'extension en cours de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), et celles, prochaines, de l'Union internationale des télécommunications (UIT) et de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).

Un élément décisif de cette ligne politique a été l'organisation, en 1995, d'un concours d'aménagement international placé sous les auspices conjoints de la Ville, de l'Etat et de l'ONU, cela à l'occasion du cinquantième anniversaire de cette dernière. Le programme établi prévoyait de redonner à ce lieu une dimension architecturale et urbanistique plus en correspondance avec sa vocation symbolique de lien entre Genève et le monde. Plusieurs bâtiments devant abriter des fonctions essentielles contribuent à cette volonté:

- La Maison universelle, qui abritera les petites missions des pays les moins avancés. Ce projet a pour but d'ancrer ces missions à Genève, et de renforcer ainsi leur rôle.

- Le Centre de politique et de sécurité, fondation dont la mission principale est de former des fonctionnaires gouvernementaux sur le plan de la politique de sécurité. Ce centre aura des liens étroits notamment avec le Comité international de la Croix-Rouge.

- L'Institut des hautes études internationales ainsi que sa bibliothèque, actuellement logés dans des bâtiments provisoires vieux de 30 ans, bénéficieront de deux bâtiments mieux adaptés à leur fonction.

- Dans l'enceinte actuelle du Palais des Nations, un bâtiment dont il avait été prévu initialement qu'il abriterait la Maison des droits de l'homme, et dont l'affectation définitive sera modifiée, tout en s'inscrivant dans le cadre des activités de l'ONU.

Le projet lauréat permet ainsi de réaliser les objectifs suivants, qui avaient été fixés dans le cadre du concours, et qui visaient essentiellement à mieux intégrer les organisations internationales dans la vie genevoise:

- réaliser un parcours paysager, englobant la place des Nations jusqu'au lac, avec un lieu privilégié de développement urbain entre les avenues de France et de la Paix;

- faire de la place des Nations un dénominateur commun, vers lequel convergent toutes les organisations internationales;

- transformer la place des Nations en un lieu privilégié, diminuant la circulation automobile, rajoutant l'élément «eau» et prenant en compte le piéton.

Ce concept, parfaitement réalisé dans le projet lauréat, doit être accompagné de l'ouverture au public du parc de l'ONU, dans sa partie située entre les bâtiments et les voies ferrées.

La réalisation de ces projets sera par ailleurs l'occasion de concrétiser le premier maillon d'une promenade piétonne descendant du Grand Morillon jusqu'au lac. Cette promenade, qui doit également emprunter le domaine de la Pastorale, est un élément clé du projet lauréat. Elle se développera entre les bâtiments envisagés jusqu'au bas de la parcelle Rigot.

Dans le même temps, le projet permet d'assurer le maintien de la villa Rigot ainsi que sa dépendance et de la plus grande part de son parc richement arboré, lequel s'inscrit en prolongement naturel du parc de l'ONU.

Le projet prévoit enfin la reconstruction à moyen terme et en plusieurs étapes du collège Sismondi, composé de pavillons provisoires vieux maintenant de 40 ans.

En ce qui concerne les transports publics, un espace est réservé pour la création d'une boucle de rebroussement pour le tram 13 prolongé, ainsi que pour le stockage des nombreux bus desservant le quartier. Ce dispositif est complété d'un parking P + R d'environ 100 places. L'aménagement du plan de circulation et la création de parkings ont été étudiés par les services de l'Etat et de la Ville, assisté d'un bureau spécialisé chargé d'examiner l'impact du projet sur l'environnement.

Les projets de plans localisés de quartier nos 28938A-222 et 28826-27-222-309, mis simultanément à l'enquête publique, définissent plus précisément l'aménagement de ces deux périmètres.

L'ensemble des terrains sont actuellement situés en zone villas. La mise en place de ces projets implique de procéder à une modification des limites de zones. Aussi, il a été décidé de créer pour le périmètre faisant l'objet du présent projet de loi:

- une zone de développement 3 destinée à de l'équipement public, le long de l'avenue de France, couvrant les surfaces qui seront occupées par le futur collège Sismondi entre la place des Nations et le Tennis club international; cette première zone aura une superficie d'environ 12 300 m2;

- une zone de verdure d'environ 42 700 m2, qui permettra d'assurer la protection de la partie nord de la parcelle no 2182, par une mise en zone de verdure, avec le maintien de la villa Rigot ainsi que sa dépendance au sein d'un parc richement arboré, s'inscrivant dans le prolongement naturel du parc de l'ONU;

- une zone de développement 3 destinée prioritairement à des organisations internationales, d'environ 8 000 m2, permettant la construction de la bibliothèque de l'Institut des hautes études internationales.

La réalisation de ces constructions et aménagements nécessite plusieurs échanges fonciers ainsi que la levée de servitudes de restriction de bâtir.

Les négociations foncières y relatives avec les entités concernées, à savoir l'ONU, la Ville de Genève et l'université, sont conclues, ou en bonne voie de règlement.

Il convient de mentionner à ce propos les deux points suivants:

- Un projet de protocole d'accord a été établi en avril 1997 d'entente entre la Ville et l'Etat de Genève dans le but de déterminer les nouvelles assiettes de terrain revenant, après échange, au domaine public de la Ville et au domaine privé de l'Etat et de l'université. Ces nouvelles assiettes sont précisées par un schéma figurant sur chacun des plans localisés de quartier.

- Alors qu'une procédure en expropriation envers l'université avait dû être envisagée, en juin 1997, un accord a finalement été conclu entre cette dernière et l'Etat de Genève: un échange foncier aura lieu entre ces deux entités, au terme duquel l'Etat de Genève deviendra propriétaire de la campagne Rigot, tandis que l'université recevra en échange la parcelle dite du «Foyer de Pinchat», située sur la commune de Carouge et d'une surface équivalente. L'université pourra alors disposer d'un terrain comportant un potentiel foncier exploitable à moyen ou long terme, qui sera affecté au bénéfice de ses activités.

L'aménagement de la campagne Rigot correspond aux objectifs de la donation effectuée à l'université de Genève par M. John D. Rockefeller junior le 15 août 1942. L'Etat de Genève respectera les charges en faveur de la Société des Nations dont cette donation est assortie.

A noter que le présent projet de plan de zone correspond dans ses principaux objectifs au projet de modification des limites de zones no 28642 mis à l'enquête publique en 1993.

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales et de la zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et le degré de sensibilité II à la zone de verdure pour les bâtiments comprenant des locaux à usage sensible au bruit.

L'enquête publique ouverte du 16 juillet au 29 août 1997 a provoqué un certain nombre d'observations qui ont conduit le département, d'entente avec la Ville de Genève, à modifier le projet pour tenir compte de celles-ci. Le préavis du conseil municipal de la Ville de Genève sera transmis à la commission d'aménagement du canton chargée de l'examen du présent projet de loi.

Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons ce projet de loi à votre bienveillante attention.

Préconsultation

M. Rémy Pagani (AdG). Nous tenons à prendre position sur le changement de zone concernant la place des Nations. Ce sujet d'actualité a fait l'objet d'un référendum qui promet d'aboutir, et que nous déposerons lundi.

Nous avons été stupéfaits de constater à quel point le symbole urbanistique proposé interdit au peuple de Genève et aux peuples du monde - à tous ceux qui, régulièrement, sont venus sur cette place des Nations - de s'y rassembler encore. Ce projet, qui sera discuté en commission, vise à privatiser une place publique ayant son histoire et qui aurait pu être aménagée de manière plus conviviale, en tenant compte de sa réalité historique et non pas de la symbolique urbanistique telle que proposée dans l'exposé des motifs; on se demande du reste selon quels critères elle a été élaborée.

Nous sommes étonnés de constater qu'aucune des ONG qui s'étaient proposées avant la construction ne se soit encore manifestée pour occuper les locaux de cet immeuble, dont je rappelle qu'il mesurera 30 mètres de haut, occupant ainsi l'entière place actuelle des Nations. On ne le dira jamais assez, il s'agit d'une fuite en avant. On continue à construire des bureaux à Genève, bien que, aujourd'hui, l'équivalent de quarante stades de football destiné à des bureaux est vide. Mais où va-t-on, si ce n'est droit dans le mur ! Où les constructeurs de Genève veulent-ils nous emmener ?

A notre avis, la place des Nations sera ruinée par cette construction. Il s'agit, au contraire, de préserver son cadre de vie exceptionnel, tant pour les habitants que pour les organisations internationales, à l'implantation desquelles nous ne nous opposons pas, bien au contraire. D'ailleurs, un terrain proche de la place des Nations a été acheté à un prix assez important pour y installer des organisations internationales.

Cependant, nous désirons que la qualité de vie soit respectée à Genève, notamment le parc Rigot qui va être complètement défiguré par une route en son côté nord. Nous demandons un aménagement de cette place respectant la convivialité et construite à l'échelle humaine.

Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Les Verts s'opposeront à ce projet, bien que favorables au réaménagement de la place des Nations qu'ils considèrent comme ne répondant pas actuellement aux critères d'une place phare dans une ville internationale.

Comme l'a dit le préopinant, ce projet a été réalisé sans aucune consultation ni information aux habitants du quartier. Ce fait est regrettable, surtout lorsque l'on désire nouer des contacts plus étroits entre les habitants du quartier et le personnel des organisations internationales.

Récemment, l'ambassadeur Gyger est venu nous parler de l'importance que revêtent à ses yeux les relations qu'entretiennent entre eux le personnel des organisations internationales et les Genevois. On peut alors se demander à quels Genevois il pense et si les habitants de ce quartier de Vermont ne sont pas, en effet, les premiers qu'il faut ménager et avec lesquels il faut créer de bons contacts avec les organisations internationales.

On sait qu'il existe déjà certains problèmes pour la population de ce quartier dus aux divers avantages, dont jouit le personnel des organisations internationales. Il s'agit donc de calmer le jeu et de favoriser les contacts, plutôt que d'imposer un projet, sans demander l'avis de personne ni afficher la moindre information dans le quartier. Pour cette raison déjà, nous trouvons que ce projet n'a pas été réalisé avec l'attention et les formes nécessaires.

Ensuite, l'aménagement comporte de gros défauts. D'ailleurs le projet a été scindé en deux à la Ville de Genève par la commission de l'aménagement et le Conseil municipal. Pourtant, le Conseil d'Etat passe outre et nous propose un projet global, ce qui nous paraît représenter une certaine insouciance vis-à-vis de la Ville de Genève. Pourquoi ce projet a-t-il été scindé ? Il l'a été parce que l'une des deux parties, en tout cas, celle qui concerne la campagne Rigot, ne respectait pas une conservation intelligente de cette villa et l'aménagement qui aurait dû être prévu sur la parcelle, notamment en supprimant des courts de tennis pouvant très bien être installés ailleurs en ville, plutôt que sur cette parcelle très demandée. D'ailleurs, tous les bâtiments prévus sont-ils absolument indispensables et le sont-ils dans la forme prévue par le projet ?

Pour toutes ces raisons, il serait préférable que le Conseil d'Etat reconsidère ce projet et, dans un délai relativement court, nous en propose un bien meilleur que celui-ci, afin que nous puissions volontiers l'accepter.

M. Dominique Hausser (S). La place des Nations est un serpent de mer qui date de fort longtemps. Les projets de lois qui nous sont proposés aujourd'hui - je parle des points 61 et 62, ce qui m'évitera une autre intervention - ont été débattus au Conseil municipal.

La majorité du Conseil municipal de la Ville de Genève a refusé le projet de loi 7794, mais j'ai découvert que ce dernier n'a pas voté le même plan d'aménagement que celui qui nous est proposé ce soir. Nous avons donc la preuve que ce dossier a été mal conduit, que les informations transmises aux uns et aux autres ne correspondent pas à une réalité évoluant probablement très rapidement.

J'ignore si nous devons accepter ou refuser le projet de loi de déclassement de cette zone en fonction de ce qu'il adviendra, mais deux éléments sont importants :

En premier lieu, nous avons à disposition tout ce qui concerne les organisations internationales et l'aménagement des nouveaux bâtiments. Par exemple, nous savons que la Maison des droits de l'homme, planifiée dans cet espace, pourrait bien se retrouver ailleurs, puisqu'elle risque d'être transférée au Palais Wilson, même si certains Etats - dont je vous fais grâce du nom - ont récemment fait opposition à ce projet à New York. En effet, cela relève plus du folklore que d'une véritable opposition.

Dans cet aménagement est comprise la nécessité de refaire le collège Sismondi en raison d'une augmentation du nombre d'élèves. Ainsi, il ne me paraît pas judicieux de rejeter le projet tel quel, mais je souhaite que le Conseil d'Etat en place prenne ce dossier en main de façon plus sérieuse qu'il ne l'a été jusqu'à maintenant et que les informations soient transmises clairement à tous les acteurs de cette affaire. Les discussions en commission doivent être constructives et non pas destructives.

M. Jean Opériol (PDC). Notre groupe soutient le renvoi de ce projet en commission avec beaucoup moins d'atermoiements et de critiques négatives que celles formulées à ce jour. Le moins que l'on puisse dire est que cette place mérite un aménagement, pour ne pas dire un assainissement, tant elle est moche et qu'elle mérite beaucoup mieux, compte tenu de sa situation.

Dans le projet de loi qui nous est proposé sont abordés le déclassement de zone et l'aménagement. A la simple lecture de l'exposé des motifs, ce projet paraît raisonnable dans la mesure où il soigne et concilie, à la fois, l'esthétique, l'utilité et le respect historique des lieux.

Madame Dallèves, je ne comprends pas votre discours, car vous ignorez - vraisemblablement pour l'avoir fort mal lu - que l'exposé des motifs parle de la sauvegarde d'une surface de 42000 m2 de zone de verdure qui seront à la disposition de tous ceux qui voudront bien se rendre à la place des Nations. Par conséquent, je ne vois pas ce que l'esthétique que vous déploriez voir disparaître vient faire dans cette affaire.

D'autre part, ce projet est opportun, car une multitude d'ambassades et de délégations ne trouvant pas de place à Genève se localisent dans les pays limitrophes, cela simplement parce que l'on n'a pas la capacité de les accueillir. Si vous désirez vous rendre en Afrique ou en Amérique du Sud, vous devez aller chercher votre visa à Paris, à Rome, à Londres ou à Bruxelles, alors que l'on pourrait très bien l'obtenir ici, compte tenu du fait que Genève est un pôle de rayonnement international qui mérite que l'on soigne davantage les ambassades désirant s'installer chez nous.

Ce projet de la place des Nations mérite notre attention. Comme toute chose, il est perfectible, mais il ouvre sur - c'est peut-être un signe que le Conseil d'Etat nous donne aujourd'hui - une ère de grande pulsation architecturale et décisionnelle qui fait cruellement défaut dans notre République, tant nous sommes frileux. Genève manque de projets, et celui-là pourrait en être un. Une fois ces projets passés en commission, j'espère que ce parlement et cette population trouveront un consensus qui sera de nature à souligner le caractère entreprenant de Genève. Cela dit - et personne n'en parle jamais sur les bancs d'en face - ce projet est probablement prometteur d'emplois, d'investissements et, pour ma part, le sort des chômeurs, examiné à la lumière de ce projet de loi, n'est pas négligeable, et ne devrait pas être occulté.

J'observe que s'il fallait, aujourd'hui, voter l'implantation du Palais des Nations, du BIT au bord du lac, par exemple, ou de l'OMS, on n'y parviendrait pas, car nous souffrons de frilosité, d'obscurantisme et de négativisme. Donnons-nous peut-être le temps d'une réflexion, afin de trouver un moyen de faire un tout petit peu mieux que de s'en tenir à vos raisonnements défaitistes.

M. Bernard Lescaze (R). Ces projets de lois sont en relation avec un développement urbanistique important de Genève. (Brouhaha.) Je sais bien que, M. Opériol ayant parlé, nous ne devrions plus rien dire... (Rires.) ...mais, malgré tout, il me permettra de continuer.

En raison même du rôle que jouent les organisations internationales dans notre ville et notre canton, ce Grand Conseil doit s'occuper de ces projets de lois et les renvoyer à la commission de l'aménagement. Certains soucis ont pu être exprimés dans d'autres enceintes, comme, par exemple, au Conseil municipal de la Ville de Genève. D'autres problèmes ont été évoqués ici, notamment par le préopinant. Nous ne devons pas faire, en plénum, au moment de l'entrée en matière, un débat de fond qui ne peut nous parvenir qu'après un travail approfondi en commission. Ce projet, comme d'ailleurs le suivant, le mérite. C'est pour cette raison que le groupe radical vous propose de le renvoyer à la commission de l'aménagement.

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Dans la mesure où un référendum est en cours sur ce projet ou, plus exactement, sur le préavis de la Ville concernant l'un des deux projets de lois, je m'impose une certaine retenue, afin d'éviter des critiques relatives à l'interférence du canton dans la vie politique d'une commune.

Cela étant, un certain nombre de choses doivent être dites. La première est que, après les deux délibérations de la Ville, l'une positive et l'autre négative, j'ai fait mettre à l'enquête publique les deux projets. Le premier parce qu'il était positif et que c'était une évidence de le réaliser. Le deuxième parce qu'il lui était lié et, comme vous l'avez constaté, il a été tenu compte des raisons pour lesquelles la Ville avait émis un préavis négatif en corrigeant ce projet sur les points litigieux. Le référendum étant lancé, on en attend le résultat.

Madame Dallèves, je vous donne acte qu'il n'y a pas eu de large consultation dans la population. L'enquête publique lancée permettra d'analyser ses réactions, sans oublier qu'il appartient à votre commission d'aménagement d'entendre les intéressés. Au-delà du processus référendaire qui ne peut, malheureusement, se terminer que par oui ou par non, il serait préférable que, au sein de la commission de l'aménagement, puisse se dégager un consensus sur l'aménagement de l'ensemble de ce périmètre.

Pour la ville de Genève, ce périmètre qui comporte un espace de verdure essentiel - et qui manque à cette région - est extrêmement important. C'est un des points fondamentaux. L'autre point important concerne la Genève internationale et les engagements pris par la Confédération et le canton en vue d'obtenir la venue, dans notre ville, du siège de l'OMC. Ces engagements devront être tenus, dans ce périmètre ou ailleurs, mais ils devront être tenus.

Je ne désespère pas que l'on trouve des solutions accessibles et admissibles pour tous dans le cadre de ces deux projets. Il existe une marge de manoeuvre, et je souhaite que ce dossier ne soit pas l'occasion d'un affrontement de principe. Par conséquent, il nous faut trouver une solution répondant aux besoins de la Genève internationale, sans en faire payer le prix par une densification du quartier telle que les habitants de cette région de la ville auraient à en souffrir.

J'ai rapidement parcouru les observations qui sont déjà parvenues au département. Il est possible d'imaginer que la partie la plus combattue du projet puisse être corrigée, de manière que, dans des délais raisonnables - puisque nous sommes tenus à un calendrier assez court - nous puissions parvenir à une solution acceptable.

Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.