Séance du
jeudi 22 janvier 1998 à
17h
54e
législature -
1re
année -
4e
session -
2e
séance
No 2/I
Jeudi 22 janvier 1998,
nuit
Présidence :
M. René Koechlin,président
La séance est ouverte à 21 h 40.
Assistent à la séance : Mme et MM. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat, Martine Brunschwig Graf, Carlo Lamprecht, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
Le président donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme et M. Guy-Olivier Segond, Micheline Calmy-Rey, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Luc Barthassat, Claude Blanc, Claude Haegi, Michel Halpérin et Françoise Schenk-Gottret, députés.
3. Annonces et dépôts :
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Néant.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Le président. La demande d'interpellation suivante est parvenue à la présidence :
Cosignataires : Christian Brunier, Dominique Hausser, Mireille Gossauer-Zurcher, Christine Sayegh, Alberto Velasco.
Elle figurera à l'ordre du jour d'une prochaine séance.
e) de questions écrites.
Néant.
Election de trois titulaires (2e tour)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle qu'il s'agit du deuxième tour. Il convient d'inscrire deux noms sur les bulletins que les huissiers vont vous remettre. Il reste deux personnes à élire comme titulaires de cette commission.
Bulletins distribués : 77
Bulletins retrouvés : 77
Bulletin blanc : 0
Bulletin nul : 1
Bulletins valables : 76
Sont élus : M. Christophe Solioz, par 40 voix, et M. Daniel Devaud, par 39 voix. (Applaudissements.)
Obtiennent des voix : M. Gérard Montavon (36), M. Gilles Stickel (32) et M. Nicolas Juge (2).
Election de trois suppléants (1er tour)
Le président. Je prie Messieurs les huissiers de bien vouloir distribuer les bulletins. (Les huissiers récoltent les bulletins.)
Je prie Mesdames et Messieurs les scrutateurs de bien vouloir se réunir à la salle Nicolas-Bogueret pour procéder au dépouillement, sous la présidence de notre secrétaire, M. René Longet. (Les scrutateurs procèdent au dépouillement.)
Bulletins distribués : 88
Bulletins retrouvés : 88
Bulletin blanc : 1
Bulletin nul : 1
Bulletins valables : 86
Majorité absolue : 44
Est élu : M. Jean-Bernard Waeber, par 46 voix. (Applaudissements.)
Obtiennent des voix : M. Gérard Montavon (33), M. Gilles Stickel (29), M. Guy Zwahlen (18), M. Nicolas Juge (3), M. Dominique Warluzel (2) et Mme Renée Pfister-Liechti (1).
Election de trois suppléants (2e tour)
Le président. Nous devons donc procéder à un deuxième tour à la majorité simple. Je prie Messieurs les huissiers de bien vouloir distribuer les bulletins. (Les huissiers récoltent les bulletins.)
Je prie Mesdames et Messieurs les scrutateurs de bien vouloir se réunir à la salle Nicolas-Bogueret pour procéder au dépouillement, sous la présidence de notre secrétaire, M. René Longet. (Les scrutateurs procèdent au dépouillement.)
Bulletins distribués : 92
Bulletins retrouvés : 91
Bulletins blancs : 8
Bulletins nuls : 2
Bulletins valables : 81
Sont élus : M. Gérard Montavon, par 64 voix, et M. Gilles Stickel, par 60 voix.
Obtiennent des voix : Mme Renée Pfister-Liechti (8), M. Nicolas Juge (5), M. Guy Zwahlen (1) et M. Erwin de Lassus (1).
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes parvenus au terme des élections des commissions extraparlementaires, de sorte que nous pouvons reprendre nos travaux selon l'ordre du jour.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
considérant:
- l'horreur des massacres commis en Algérie contre la population civile,
- la persistance depuis six ans au moins d'une violence politique et sociale généralisée qui a fait au moins 60 000 morts à ce jour,
- la tradition que revendique le canton de Genève, de solidarité, d'ouverture au monde et de défense des droits fondamentaux de la personne humaine,
invite le Conseil d'Etat
- à exprimer sa solidarité avec les Algériennes et les Algériens, victimes du terrorisme et de la violence et à appeler l'opinion publique à témoigner à leur égard, la solidarité que requiert la situation présente ;
- à poursuivre son aide aux personnes victimes de la violence en Algérie, notamment dans le domaine de l'accueil et des soins aux victimes de la violence ;
- à intervenir auprès du Conseil fédéral en son nom et au nom du Grand Conseil, afin qu'il :
• sursoie à toute expulsion d'Algériennes et d'Algériens vers l'Algérie, jusqu'à ce que la situation dans ce pays soit redevenue compatible avec le droit des personnes à la vie et à l'intégrité personnelle,
• accorde plus largement et plus facilement aux Algériennes et aux Algériens non requérants d'asile, des visas et des droits de séjour temporaires en Suisse,
• élargisse les critères d'octroi du droit d'asile aux victimes de la violence non gouvernementale en Algérie,
• remette en fonction le plus rapidement possible les services consulaires suisses à Alger.
• soutienne la création d'une commission d'enquête internationale, afin de faire toute la lumière sur les crimes commis en Algérie.
EXPOSÉ DES MOTIFS
En six ans de conflits, la crise algérienne a fait, selon les estimations les plus prudentes, 60 000 morts et selon les estimations des organisations internationales de défense des droits de l'homme, 100 000 victimes, à deux heures d'avion de Genève.
Depuis des mois, la violence politique a dégénéré en d'innommables boucheries, aux portes même de la capitale: des milliers de personnes ont été massacrées, parfois à portée de voix des forces de sécurité, par des groupes armés dont l'identification est souvent douteuse, mais dont les victimes sont toujours des femmes, des hommes et des enfants issus du petit peuple algérien.
Face à ce carnage, nos Etats ont eu pour premier et souvent unique réflexe de fermer leurs portes aux Algériennes et aux Algériens.
La Suisse, en particulier, a adopté une attitude extrêmement restrictive à leur égard, notamment en réservant l'octroi du droit d'asile à des responsables islamistes, en le refusant pratiquement à tous les autres requérants, en fermant ses services consulaires à Alger, obligeant ainsi les Algériennes et les Algériens désireux de se rendre dans notre pays à en demander l'autorisation à Tunis et surtout en renvoyant des requérants d'asile déboutés en Algérie malgré la violence qui y règne et les risques qu'ils y encourent.
Nous ne pouvons rester ainsi révoltés devant ces images qui défilent devant nos yeux par le biais des médias, sans entreprendre tout ce qui est en notre pouvoir, aussi modeste soit-il.
C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, nous vous remercions de soutenir notre démarche en renvoyant directement cette proposition de résolution au Conseil d'Etat.
Débat
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Il n'est pas utile de vous relater en détail la situation dramatique dans laquelle vivent les Algériennes et les Algériens. Les médias nous informent quotidiennement, et les images d'horreur, dont nous sommes les spectateurs par le biais de la télévision, sont suffisamment parlantes. Il est difficile d'être spectateur de l'horreur; raison pour laquelle, il a semblé important à bon nombre d'entre nous - vous avez vu que cette résolution est signée par des représentants de cinq groupes politiques - de réagir à la hauteur de notre pouvoir, aussi modeste soit-il.
La résolution soumise à votre approbation est adressée au Conseil d'Etat. Dans sa première invite, il est demandé au Conseil d'Etat qu'il fasse une déclaration officielle dans laquelle il exprimerait son soutien et sa solidarité avec les Algériennes et les Algériens victimes du terrorisme et de la violence et par laquelle il appellerait l'opinion publique à témoigner à leur égard la solidarité que requiert la situation présente.
La deuxième invite est un soutien du Grand Conseil au Conseil d'Etat dans le cadre de l'aide qu'il apporte aux victimes de la violence, notamment, dans le domaine de l'accueil et des soins dispensés dans notre hôpital cantonal.
Dans la dernière invite, il est demandé au Conseil d'Etat qu'il intervienne en son nom et en celui du Grand Conseil auprès du Conseil fédéral. Cela afin que le Conseil fédéral sursoie à toute expulsion d'Algériennes et d'Algériens vers l'Algérie jusqu'à ce que la situation dans ce pays soit redevenue compatible avec le droit des personnes à la vie et à l'intégrité personnelle.
Il est également demandé aussi que le Conseil fédéral accorde plus largement et plus facilement aux Algériennes et aux Algériens non-requérants d'asile des visas et des droits de séjour temporaires en Suisse; que les critères d'octroi du droit d'asile soient élargis aux victimes de la violence non gouvernementale en Algérie et que soient remis en fonction, le plus rapidement possible, les services consulaires suisses à Alger et, enfin, qu'il soutienne la création d'une commission d'enquête internationale, afin de faire toute la lumière sur les crimes commis en Algérie.
Cette dernière requête a toute son importance lorsque l'on sait que le pouvoir algérien refuse toute enquête sur les atteintes aux droits de l'homme en Algérie. Le président de la Ligue algérienne des droits de l'homme a accusé le régime algérien au travers d'une tribune publique.
Je le cite : «Le pouvoir algérien n'a pas assumé, durant les massacres de l'été 1997, sa mission première de protection des personnes et des biens, d'assistance à population en danger. La création d'une commission d'enquête nationale et internationale est nécessaire pour situer les responsabilités et démasquer les auteurs et les commanditaires de ces crimes contre l'humanité. Il convient de donner un maximum de publicité aux atteintes graves contre les droits de l'homme, car elles se nourrissent de silence. Le pouvoir algérien veut garder en vase clos les atteintes graves aux droits de l'homme pour éviter la condamnation internationale. Il appelle enfin à la poursuite des pressions sur les autorités.»
Mesdames et Messieurs les députés, nous devons répondre à cet appel en évitant, à notre tour, de nous nourrir du silence qui permet que, au quotidien, des centaines d'innocents, dont beaucoup d'enfants, se fassent massacrer au nom d'une idéologie et du fanatisme. Cette résolution signe le refus de ce mutisme. Je vous remercie de la renvoyer directement au Conseil d'Etat.
M. Armand Lombard (L). Il est inutile de préciser que notre groupe soutiendra cette résolution. Devant la passivité de l'Europe entière, nous considérons l'horreur des crimes perpétrés en Algérie, comme étant inadmissibles.
La situation interne de l'Algérie est bloquée, stratifiée dans une action militaire contraire aux droits des gens. En l'occurrence, nous ne pouvons que regretter - mais il s'agit d'un regret pieux - l'absence d'une force internationale universelle, capable de condamner des actions de ce type, même lorsqu'elles sont internes à un pays.
Toutefois, nous proposons deux modifications à cette résolution. Nous souscrivons aux deux premières invites et considérons la troisième - qui s'adresse au Conseil fédéral - comme étant trop directive par rapport à un sujet complexe. En effet, les avis divergent sur la question, et de fortes tensions émergent dans la population quant à une politique d'accueil extrêmement ouverte.
Nous souhaitons introduire un amendement à cet alinéa 3 censé apporter plus de souplesse à la proposition, donnant ainsi la tournure suivante :
- le Grand Conseil invite le Conseil d'Etat à intervenir auprès du Conseil fédéral en son nom et au nom du Grand Conseil, afin que : «...dans la mesure du possible et poursuivant une politique humanitaire équilibrée, il sursoie...». Le but de cette invite est d'introduire une alternative qui, en apportant plus de souplesse, laisse plus de marge au Conseil fédéral, tout en tenant compte de toutes les tendances s'exprimant en Suisse.
Par contre, nous insistons sur la nécessité d'une intervention forte, même si on peut craindre qu'elle n'ait pas lieu. Cette requête se ferait sous la forme d'un alinéa 5, très proche du quatrième alinéa proposé par Mme Bugnon, mais qui nous semble plus approfondi. Il s'agirait d'inciter le Conseil fédéral à prendre l'initiative, conjointement à d'autres pays européens, d'une intervention de médiation entre les parties de ce drame, afin d'y trouver, sans atermoiements divers, une solution pacifique et constructive.
Nous soutiendrons cette résolution si ces deux conditions sont réunies.
Mme Louiza Mottaz (Ve). Mon père est Kabyle. Je vais vous parler de l'Algérie ou plutôt des femmes, des hommes et des enfants qui sont l'Algérie. Des enfants, Khalil Gibran a écrit : «...ils sont les fils et les filles de la vie qui a soif de vivre encore et encore.»
Pourtant, ils meurent et avec eux leur mère, leur père; toute leur famille.
Ils sont plus de cent mille morts, les autres sont vivants et survivent au quotidien au milieu de la cruauté la plus infâme qui soit.
Leur espérance est que cette folie cesse. Nous pouvons et devons être cette espérance en disant : «Non, non, non !» sans relâche.
Mesdames et Messieurs les députés, aucun de nous ne peut survivre sans l'autre. Les laisser mourir, c'est aussi mourir un peu nous-mêmes. Henri Dunant nous a légué l'esprit humanitaire. Genève s'apprête à accueillir en son sein la Maison des droits de l'homme. C'est un honneur pour notre ville et chacun d'entre nous. Mais nous ne serons honorables qu'en exigeant que chaque Etat du monde respecte effectivement les droits de l'homme, notamment, les articles 3 et 5 qui stipulent :
«Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.» «Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.»
L'ensemble de ces impératifs et des valeurs dont ils sont l'expression impose notre engagement auprès d'autrui.
Pour conclure, permettez-moi de citer le professeur Eric Fuchs : « Respecter autrui, c'est respecter en soi ce qui témoigne de notre désir d'être en paix, mieux en communion avec les autres. En revanche, ne pas entendre la question éthique, c'est se mutiler soi-même.»
«Respecter, c'est regarder autrui, donc prendre attention à sa situation réelle...». «Pour que ce respect devienne réel, pour que l'être humain accepte de sortir de soi pour considérer autrui quel qu'il soit comme une personne, il faut qu'il soit suscité et nourri par la conscience de partager un destin commun qui exige la solidarité.»
Je vous remercie de votre attention.
Mme Marie-Françoise de Tassigny (R). Il me paraît presque inutile de plaider pour un peuple en souffrance. En effet, malgré l'imbroglio et la complexité de la situation algérienne, nous ne pouvons pas baisser les bras ou faire silence devant le drame d'une telle situation.
Jour après jour, les nouvelles nous parviennent annonçant un nouveau carnage. Qui sont les victimes ? Ce ne sont ni les hommes au pouvoir ni les hommes d'affaires, mais les femmes et les enfants.
Au nom des droits de l'homme, je ne peux me taire. Il m'est impossible de ne pas unir ma voix à tous ceux qui ont pris conscience que nous devons leur apporter notre soutien moral. Ce sont les raisons capitales qui nous enjoignent à soutenir fermement cette résolution et à la renvoyer au Conseil d'Etat avec l'amendement libéral qui nous paraît judicieux.
M. Christian Brunier (S). Depuis le début du conflit, entre soixante mille et cent mille personnes ont été massacrées en Algérie. Nous n'avons pas le droit de fermer les yeux et ne pouvons pas ignorer cette guerre civile en prétextant qu'elle ne nous concerne pas. Les cris, les douleurs qui nous parviennent quotidiennement doivent provoquer en nous la révolte.
Cette résolution peut paraître dérisoire face au drame algérien. Pourtant, il est fort probable que ce conflit se résoudra par l'addition d'actions symboliques, de mobilisations populaires ou d'informations.
Si les bourreaux de l'Algérie - qu'ils soient dans un camp ou dans un autre - s'accordent pour accomplir leurs crimes dans la discrétion et le silence, c'est parce qu'ils savent bien que toute sensibilisation de l'opinion publique peut leur être néfaste, voire fatale. Alors, pour contrer ces bandes et ces armées criminelles, accomplissons ce qu'elles redoutent : parlons de leurs crimes, condamnons sans cesse la barbarie, organisons des manifestations contre ce cauchemar, votons des résolutions, publions des informations et soutenons les mouvements démocratiques qui se battent dans ce beau pays qu'est l'Algérie.
N'est-il pas temps de réaffirmer : «Quelle connerie la guerre !».
M. Christian Ferrazino (AdG). Je m'exprimerai sur la proposition d'amendement de notre collègue Lombard. Nous ne pensions pas que ce débat serait nécessaire, Monsieur Lombard. En effet, nous partions de l'idée que, sur un sujet aussi délicat, l'unanimité se ferait d'emblée au sein de ce parlement. Ce débat, sur d'éventuels amendements à cette résolution, n'a pas sa place ici. Pourquoi, Monsieur Lombard ?
Vous nous conseillez d'assouplir notre politique, car certains pensent qu'il est inadéquat de trop ouvrir nos frontières. Monsieur Lombard, la restriction des visas - puisque l'invite que vous désirez modifier précise à nos autorités de ne pas restreindre la délivrance de visas pour des ressortissants Algériens se présentant à notre porte - nous rappelle une bien triste période de notre histoire encore récente. La mémoire devrait, à elle seule, nous amener à adopter une politique humanitaire allant dans le sens de ce que demande cette résolution qui relève de l'élémentaire respect de la personne humaine. En conséquence, je vous invite à voter cette résolution dans le texte qui vous a été proposé et à rejeter cet amendement.
M. Armand Lombard (L). Je puis également emprunter le ton très profond et larmoyant de mon collègue Ferrazino pour lui répondre en lui disant que je ne crains pas du tout ses remarques. Si je souhaite faire passer mon discours, je ne conteste pas le sien et je comprends qu'il désire s'adresser au Conseil fédéral de manière plus dure.
Toutefois, Monsieur Ferrazino, notre groupe trouve que cette façon est exagérée. Il souhaite que la résolution soit votée avec cet amendement. Personnellement, je ne vous donne pas de leçons, Monsieur Ferrazino, vous voterez ce que voudrez. J'ai émis ma proposition et ne serai pas vexé que vous votiez contre, mais je tiens à dire ce que je veux sur le ton qui me convient.
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Je n'entrerai pas dans le débat lancé par M. Lombard, sauf pour vous dire que nous ne soutiendrons pas sa proposition.
En ce moment, l'horreur vécue par l'Algérie est de l'ordre de l'impossible et, comme on le sait : «à l'impossible nul n'est tenu !». Par conséquent, l'amendement proposant au Conseil fédéral : «d'agir dans la mesure du possible», est impossible.
La barbarie étant à son comble en Algérie, il est impensable d'attendre que le Conseil fédéral agisse «dans la mesure du possible». La situation est urgente et réclame des mesures adaptées. Ce n'est pas pour rien que les invites de cette résolution sont contraignantes.
Quant à la deuxième proposition, elle correspond à tout ce qui a été refusé à ce jour. Les échecs de la Troïka, dont nous nous souvenons, nous ont empêchés d'entrer en matière. Il faut absolument mettre sur pied une commission d'enquête internationale, plutôt que de suivre la proposition de M. Lombard. Je vous demande donc de rejeter ses deux amendements et de voter la résolution, telle qu'elle a été soumise à votre groupe il y a une dizaine de jours.
M. Armand Lombard (L). Ne revenons pas sur le premier amendement, mais sur celui concernant la troisième invite qui, à mon avis, complète le texte. Je ne dis pas que l'on réussira, mais cette action nous paraît nécessaire et dépasse les demandes de la résolution.
Le ton et les mots utilisés ne vous conviennent pas, car il s'agit de votre résolution. Toutefois, il nous paraît nécessaire d'ajouter cet amendement, précisant ainsi au gouvernement algérien que ce conflit doit être géré de l'intérieur du pays, et non par des commissions interparlementaires ou internationales. Nous désirons intervenir à ce niveau, dépassant ainsi le cadre de votre invite.
Je demande que cet amendement soit soutenu, car il complète l'invite. Tout en reconnaissant avec Mme Bugnon que l'impact de cette invite est incertain, il convient tout de même de l'inscrire en ces termes, afin que notre avis soit connu et que l'on sache jusqu'où nous sommes prêts à aller si l'on en tenait compte.
Le président. Je mets d'abord aux voix la première partie de l'amendement de M. Lombard, soit d'ajouter à la troisième invite :
«...afin que, dans la mesure du possible et poursuivant une politique humanitaire équilibrée, il...»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté.
Le président. Je mets aux voix la deuxième partie de l'amendement de M. Lombard, soit d'ajouter un alinéa supplémentaire libellé comme suit :
- «à prendre l'initiative, conjointement à d'autres pays européens, d'une intervention de médiation entre les parties à ce drame afin d'y trouver sans atermoiements divers une solution pacifique et constructive»
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 40 oui contre 38 non.
Mise aux voix, cette résolution ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat.
Elle est ainsi conçue :
RÉSOLUTIONconcernant la situation en Algérie
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève
considérant:
- l'horreur des massacres commis en Algérie contre la population civile,
- la persistance depuis six ans au moins d'une violence politique et sociale généralisée qui a fait au moins 60 000 morts à ce jour,
- la tradition que revendique le canton de Genève, de solidarité, d'ouverture au monde et de défense des droits fondamentaux de la personne humaine,
invite le Conseil d'Etat
- à exprimer sa solidarité avec les Algériennes et les Algériens, victimes du terrorisme et de la violence et à appeler l'opinion publique à témoigner à leur égard, la solidarité que requiert la situation présente ;
- à poursuivre son aide aux personnes victimes de la violence en Algérie, notamment dans le domaine de l'accueil et des soins aux victimes de la violence ;
- à intervenir auprès du Conseil fédéral en son nom et au nom du Grand Conseil, afin qu'il :
• sursoie à toute expulsion d'Algériennes et d'Algériens vers l'Algérie, jusqu'à ce que la situation dans ce pays soit redevenue compatible avec le droit des personnes à la vie et à l'intégrité personnelle,
• accorde plus largement et plus facilement aux Algériennes et aux Algériens non requérants d'asile, des visas et des droits de séjour temporaires en Suisse,
• élargisse les critères d'octroi du droit d'asile aux victimes de la violence non gouvernementale en Algérie,
• remette en fonction le plus rapidement possible les services consulaires suisses à Alger,
• soutienne la création d'une commission d'enquête internationale, afin de faire toute la lumière sur les crimes commis en Algérie,
- à prendre l'initiative, conjointement à d'autres pays européens, d'une intervention de médiation entre les parties à ce drame afin d'y trouver sans atermoiements divers une solution pacifique et constructive.
LE GRAND CONSEIL,
vu la loi sur le domaine public, du 24 juin 1961,
Décrète ce qui suit:
Article 1
Le Conseil d'Etat et la commune de Carouge sont autorisés à constituer au profit de la Fondation de droit public pour la construction et l'exploitation de parcs de stationnement (ci-après: Fondation des parkings) un droit de superficie distinct et permanent grevant, au-dessus du domaine public, un secteur de la route des Jeunes, en vue de la construction et de l'exploitation d'un parking.
Art. 2
L'assiette de ce droit de superficie grevant en sur-face 2 600 m2 de la parcelle du domaine public cantonal no DP 2829, 806 m2 de la parcelle du domaine public communal no DP 2828 et 830 m2 de la parcelle du domaine communal no DP 2830, toutes trois sur feuille cadastrale no 49 de la commune de Carouge, fait l'objet d'un plan de servitude dressé par le bureau Hochuli, Kohler & Dunant, ingénieurs géomètres officiels, et annexé à la présente loi.
Art. 3
Le conservateur du registre foncier est autorisé à procéder, aux fins de la constitution dudit droit de superficie, à l'immatriculation dans ses registres, sur la commune de Carouge, feuille cadastrale no 49, des parcelles du domaine public no 2828, 2829 et 2830.
Art. 4
1 Le droit de superficie entre en vigueur dès la date de son inscription au registre foncier, pour se terminer le trente et un décembre deux mille nonante (31 décembre 2090).
2 Il peut être renouvelé aux conditions fixées dans l'acte de droit de superficie conclu entre l'Etat de Genève, la commune de Carouge et la Fondation des parkings.
Art. 5
L'acte constitutif de ce droit de superficie à intervenir entre l'Etat de Genève, la commune de Carouge et la Fondation des parkings, est annexé à la présente loi.
EXPOSÉ DES MOTIFS
En 1991, l'office des transports et de la circulation, en collaboration avec la Fondation des parkings, a fait réaliser une étude afin de connaître les besoins en places de parc destinées au trafic pendulaire (parking P+R).
Le résultat de cette étude fait état d'un besoin dans la zone du Bachet-de-Pesay, située aux sorties de l'autoroute de contournement de Plan-les-Ouates, de quelque 1 600 places, raison pour laquelle la Fondation des parkings a établi trois projets liés aux lignes de trams actuelles et futures, à savoir:
- Parking P+R Palettes, 250 places,
situé sur la sortie de la route des Communes-Réunies, tram 13, prolongé, projet en cours de révision au niveau communal.
- Parking P+R Bachet, 500 places,
situé sur la route de Saint-Julien, au-dessus de la boucle de rebroussement de la ligne de tram 12 et de l'arrêt de la ligne 13.
- Parking P+R Etoile, 630 places,
situé à la sortie de l'autoroute de contournement, au carrefour route des Jeunes-route des Acacias, actuellement trolleybus 4 et 44 et future section de tram «Acacias».
Le 1er avril 1992, la Fondation des parkings a déposé une demande préalable de construire pour la réalisation d'un parking au carrefour de l'Etoile; en fonction des divers préavis des services concernés ainsi que des commissions d'urbanisme et d'architecture, le projet a été modifié et une autorisation préalable de construire délivrée le 7 juillet 1993. La demande définitive no 94638, déposée le 12 décembre 1996, a été autorisée le 15 juillet 1997.
Le projet faisant l'objet du présent projet de loi se situe au-dessus de la Voie centrale, n'ayant comme emprise au sol que la structure porteuse (piliers). Sa localisation permet un accès direct depuis l'autoroute de contournement de Plan-les-Ouates et également depuis la route du Grand-Lancy, offrant ainsi une deuxième possibilité de rabattement pour les automobilistes.
La desserte en transports en commun est actuellement effectuée par les lignes de trolleybus 4 et 44 avec une fréquence régulière et optimale, qui permet de se rendre au centre-ville (Bel-Air) en quelques minutes.
La capacité actuelle de ces lignes est suffisante pour la desserte du parking, ce d'autant que les arrêts sont situés à proximité immédiate.
Dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi sur le réseau des transports publics, le département des travaux publics et de l'énergie a mené deux études en vue d'établir les projets définitifs des sections de tram «Sécheron» (entre Cornavin et la place des Nations) et «Acacias» (entre le rond-point de Plainpalais et Lancy). La réalisation de cette dernière permettra de lier le futur parking d'échange au réseau des trams.
Parking
La requête définitive en autorisation de construire no DD 94638 fait état d'une capacité de 630 places réparties sur 5 étages. La totalité des places est affectée en priorité au parking d'échange, par le biais d'un abonnement P+R, comportant les transports publics genevois et le parking, pour un montant mensuel forfaitaire (90 F en 1997) ou journalier (nouveau).
La situation du parking, à faible distance du futur stade de football à la Praille, permettrait son utilisation lors de manifestations.
Afin de permettre à la Fondation des parkings de gérer l'ensemble des parkings publics de l'Etat, ainsi que ceux lui appartenant, il est prévu de localiser en attique du parking une surface d'environ 400 m2, permettant de regrouper les services de la Fondation et en particulier ses installations techniques de gestion. Cette solution éviterait à l'avenir des frais de location.
La position du parking à une «porte» de Genève et la proximité immédiate de l'immeuble de la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI) imposent un traitement de façade soigné, qui a fait l'objet d'une étude particulière.
Au niveau du sol, il est prévu de couvrir la trémie de la Voie centrale, située entre la route des Acacias et l'avenue de la Praille et ce pour des raisons constructives. La surface ainsi récupérée pourrait être aménagée, pour des équipements tels que kiosque à journaux, bistrot, location de vélos, etc., favorisant ainsi l'attractivité de l'interface.
Investissement
La participation de l'Etat de Genève au financement de cet ouvrage fera l'objet d'un projet de loi ad hoc qui tiendra compte des statuts de la Fondation des parkings et de sa situation financière, ainsi que des éléments développés dans la motion 1086 et dans le rapport de la commission des transports y relatif.
Conclusion
Le Conseil d'Etat, dans le cadre de son plan de mesures pour l'assainissement de l'air à Genève, entend favoriser le transfert modal sur les transports publics sans entraver l'accès au centre-ville.
C'est pourquoi la construction de parkings d'échange entre les véhicules individuels et des transports publics particulièrement performants, comme le tram, revêt une grande importance.
Le projet de parking d'échange faisant l'objet du présent projet de loi répond tout à fait à cet objectif.
C'est pourquoi, au vu des explications ci-dessus, nous le recommandons à votre bienveillante attention.
Préconsultation
Le président. Monsieur le député, vous avez droit à cinq minutes de temps de parole !
M. Christian Grobet (AdG). Je vous remercie de me le rappeler, Monsieur le président !
Je me réjouis que le Conseil d'Etat nous soumette aujourd'hui un projet de loi visant à résoudre les problèmes fonciers et de droit de superficie du parking d'échange des Acacias - construction qui, curieusement, a été bloquée durant quatre ans et demi après la délivrance de l'autorisation préalable, et qui aurait mérité d'être inaugurée simultanément à la mise en service de l'évitement autoroutier de Plan-les-Ouates.
Tout le monde sait dans ce Conseil que la Fondation des parkings ne dispose plus de fonds propres. Sauf erreur, et d'après les renseignements qui nous été donnés à la commission des transports par M. Borel, directeur de la fondation, les avoirs de la Fondation des parkings s'élèvent à environ 500 000 F. Les membres de la commission des transports, dont j'étais rapporteur, demandaient la réalisation d'un certain nombre de parkings d'échange. Nous avons voté, l'automne dernier, une motion à l'unanimité. Aussi, je m'étonne que le Conseil d'Etat n'ait pas présenté à ce Grand Conseil un crédit pour financer l'exécution de cet ouvrage.
Au sein de la Fondation des parkings, il paraît qu'on imagine bénéficier d'une sorte de crédit-enveloppe voté par le Grand Conseil au profit de cette Fondation pour financer ses activités et qu'elle puiserait dans cette enveloppe la somme nécessaire pour financer ses projets. Tous les parkings d'échange réalisés à ce jour dans notre canton, soit avant la dernière législature, ont chacun fait l'objet d'un crédit «grands travaux» présenté par le Conseil d'Etat; ce qui a permis à notre Grand Conseil de se prononcer sur le projet et de libérer son financement.
Ce parking d'échange, qu'une autorisation de construire rend aujourd'hui réalisable - c'est le seul - est d'autant plus urgent que l'autoroute d'évitement de Plan-les-Ouates déverse des flots de voitures sur la route des Acacias et dans le quartier de la Jonction qui est déjà l'endroit le plus sinistré de Genève en matière de nuisances dues à la circulation automobile. Je souhaite que le Conseil d'Etat, nouvellement élu, n'agisse pas comme le Conseil d'Etat lors de la précédente législature et nous présente ce crédit de construction, répondant ainsi à la volonté clairement exprimée par ce Grand Conseil de donner la priorité à la construction de parkings d'échange.
Mme Alexandra Gobet (S). Le groupe socialiste se réjouit de la présentation de ce projet de loi qui concrétise enfin la volonté marquée par le peuple - il y a de nombreuses années - de voir se réaliser un transport public performant.
Ce projet a certainement pris quelque retard, mais nous souhaitons qu'il ait été mis sur pied avec la concertation qui sied à notre canton et, étant donné que les concessions concernant les prolongements des lignes de tram ont été sollicitées il y a fort longtemps, nous attendons de pied ferme que les crédits de réalisation suivent ce projet de loi.
Ce projet est renvoyé à la commission des transports.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan no 28937A-222, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 24 janvier 1997, modifié le 19 novembre 1997, modifiant les limites de zones sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (création d'une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, d'une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et d'une zone de verdure à la Campagne Rigot), est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
L'Etat de Genève dispose, aux fins d'atteindre les buts poursuivis par les zones créées, d'un droit de préemption sur les terrains compris dans les zones de développement et dans la zone de verdure, figurées au plan visé à l'article 1; ce droit est annoté au registre foncier. Les articles 3 à 5 de la loi sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, sont applicables par analogie en cas d'exercice du droit de préemption.
Art. 3
L'acquisition de tout ou partie des terrains inclus dans les zones de développement et de verdure figurées au plan précité est déclarée d'utilité publique au sens de l'article 3, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933, aux fins d'atteindre les buts poursuivis par les zones créées.
Art. 4
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans la zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, à la zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et le degré de sensibilité II à la zone de verdure (pour les bâtiments comprenant des locaux à usage sensible au bruit), créées par le plan visé à l'article 1.
Art. 5
Un exemplaire du plan no 28937A-222 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le projet de modification des limites de zones no 28937A-222 faisant l'objet du présent projet de loi porte sur un périmètre comprenant une partie de la parcelle no 2184, la parcelle no 2183 et la plus grande partie de la parcelle no 2182, laquelle correspond au terrain actuellement occupé par le collège Sismondi, par la villa Rigot, et par plusieurs terrains de tennis, entre l'avenue de France, l'avenue de la Paix et le chemin Rigot.
Ce projet est accompagné d'un deuxième projet de modification des limites de zones (no 28825-222) qui porte sur le solde de la parcelle no 2182, ainsi que sur la place des Nations et sur les parcelles nos 2184 et 2194 (pour partie) situées de part et d'autre de cette dernière.
L'ensemble de ces terrains, y compris la place des Nations, représente une superficie d'environ 84 875 m2. Le principal objectif de ces deux projets de modification des limites de zones est de revaloriser le cadre urbanistique de la place des Nations, et de contribuer au développement des organisations internationales autour des Nations Unies. Dans ce sens, il s'inscrit dans la ligne, suivie depuis environ 10 ans, tendant à renforcer le rôle de Genève comme lieu de rencontre privilégié dans le monde pour les organisations internationales, dont les principaux témoins sont la réalisation récente du Haut commissariat aux réfugiés (HCR), l'extension en cours de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), et celles, prochaines, de l'Union internationale des télécommunications (UIT) et de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).
Un élément décisif de cette ligne politique a été l'organisation, en 1995, d'un concours d'aménagement international placé sous les auspices conjoints de la Ville, de l'Etat et de l'ONU, cela à l'occasion du cinquantième anniversaire de cette dernière. Le programme établi prévoyait de redonner à ce lieu une dimension architecturale et urbanistique plus en correspondance avec sa vocation symbolique de lien entre Genève et le monde. Plusieurs bâtiments devant abriter des fonctions essentielles contribuent à cette volonté:
- La Maison universelle, qui abritera les petites missions des pays les moins avancés. Ce projet a pour but d'ancrer ces missions à Genève, et de renforcer ainsi leur rôle.
- Le Centre de politique et de sécurité, fondation dont la mission principale est de former des fonctionnaires gouvernementaux sur le plan de la politique de sécurité. Ce centre aura des liens étroits notamment avec le Comité international de la Croix-Rouge.
- L'Institut des hautes études internationales ainsi que sa bibliothèque, actuellement logés dans des bâtiments provisoires vieux de 30 ans, bénéficieront de deux bâtiments mieux adaptés à leur fonction.
- Dans l'enceinte actuelle du Palais des Nations, un bâtiment dont il avait été prévu initialement qu'il abriterait la Maison des droits de l'homme, et dont l'affectation définitive sera modifiée, tout en s'inscrivant dans le cadre des activités de l'ONU.
Le projet lauréat permet ainsi de réaliser les objectifs suivants, qui avaient été fixés dans le cadre du concours, et qui visaient essentiellement à mieux intégrer les organisations internationales dans la vie genevoise:
- réaliser un parcours paysager, englobant la place des Nations jusqu'au lac, avec un lieu privilégié de développement urbain entre les avenues de France et de la Paix;
- faire de la place des Nations un dénominateur commun, vers lequel convergent toutes les organisations internationales;
- transformer la place des Nations en un lieu privilégié, diminuant la circulation automobile, rajoutant l'élément «eau» et prenant en compte le piéton.
Ce concept, parfaitement réalisé dans le projet lauréat, doit être accompagné de l'ouverture au public du parc de l'ONU, dans sa partie située entre les bâtiments et les voies ferrées.
La réalisation de ces projets sera par ailleurs l'occasion de concrétiser le premier maillon d'une promenade piétonne descendant du Grand Morillon jusqu'au lac. Cette promenade, qui doit également emprunter le domaine de la Pastorale, est un élément clé du projet lauréat. Elle se développera entre les bâtiments envisagés jusqu'au bas de la parcelle Rigot.
Dans le même temps, le projet permet d'assurer le maintien de la villa Rigot ainsi que sa dépendance et de la plus grande part de son parc richement arboré, lequel s'inscrit en prolongement naturel du parc de l'ONU.
Le projet prévoit enfin la reconstruction à moyen terme et en plusieurs étapes du collège Sismondi, composé de pavillons provisoires vieux maintenant de 40 ans.
En ce qui concerne les transports publics, un espace est réservé pour la création d'une boucle de rebroussement pour le tram 13 prolongé, ainsi que pour le stockage des nombreux bus desservant le quartier. Ce dispositif est complété d'un parking P + R d'environ 100 places. L'aménagement du plan de circulation et la création de parkings ont été étudiés par les services de l'Etat et de la Ville, assisté d'un bureau spécialisé chargé d'examiner l'impact du projet sur l'environnement.
Les projets de plans localisés de quartier nos 28938A-222 et 28826-27-222-309, mis simultanément à l'enquête publique, définissent plus précisément l'aménagement de ces deux périmètres.
L'ensemble des terrains sont actuellement situés en zone villas. La mise en place de ces projets implique de procéder à une modification des limites de zones. Aussi, il a été décidé de créer pour le périmètre faisant l'objet du présent projet de loi:
- une zone de développement 3 destinée à de l'équipement public, le long de l'avenue de France, couvrant les surfaces qui seront occupées par le futur collège Sismondi entre la place des Nations et le Tennis club international; cette première zone aura une superficie d'environ 12 300 m2;
- une zone de verdure d'environ 42 700 m2, qui permettra d'assurer la protection de la partie nord de la parcelle no 2182, par une mise en zone de verdure, avec le maintien de la villa Rigot ainsi que sa dépendance au sein d'un parc richement arboré, s'inscrivant dans le prolongement naturel du parc de l'ONU;
- une zone de développement 3 destinée prioritairement à des organisations internationales, d'environ 8 000 m2, permettant la construction de la bibliothèque de l'Institut des hautes études internationales.
La réalisation de ces constructions et aménagements nécessite plusieurs échanges fonciers ainsi que la levée de servitudes de restriction de bâtir.
Les négociations foncières y relatives avec les entités concernées, à savoir l'ONU, la Ville de Genève et l'université, sont conclues, ou en bonne voie de règlement.
Il convient de mentionner à ce propos les deux points suivants:
- Un projet de protocole d'accord a été établi en avril 1997 d'entente entre la Ville et l'Etat de Genève dans le but de déterminer les nouvelles assiettes de terrain revenant, après échange, au domaine public de la Ville et au domaine privé de l'Etat et de l'université. Ces nouvelles assiettes sont précisées par un schéma figurant sur chacun des plans localisés de quartier.
- Alors qu'une procédure en expropriation envers l'université avait dû être envisagée, en juin 1997, un accord a finalement été conclu entre cette dernière et l'Etat de Genève: un échange foncier aura lieu entre ces deux entités, au terme duquel l'Etat de Genève deviendra propriétaire de la campagne Rigot, tandis que l'université recevra en échange la parcelle dite du «Foyer de Pinchat», située sur la commune de Carouge et d'une surface équivalente. L'université pourra alors disposer d'un terrain comportant un potentiel foncier exploitable à moyen ou long terme, qui sera affecté au bénéfice de ses activités.
L'aménagement de la campagne Rigot correspond aux objectifs de la donation effectuée à l'université de Genève par M. John D. Rockefeller junior le 15 août 1942. L'Etat de Genève respectera les charges en faveur de la Société des Nations dont cette donation est assortie.
A noter que le présent projet de plan de zone correspond dans ses principaux objectifs au projet de modification des limites de zones no 28642 mis à l'enquête publique en 1993.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales et de la zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et le degré de sensibilité II à la zone de verdure pour les bâtiments comprenant des locaux à usage sensible au bruit.
L'enquête publique ouverte du 16 juillet au 29 août 1997 a provoqué un certain nombre d'observations qui ont conduit le département, d'entente avec la Ville de Genève, à modifier le projet pour tenir compte de celles-ci. Le préavis du conseil municipal de la Ville de Genève sera transmis à la commission d'aménagement du canton chargée de l'examen du présent projet de loi.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons ce projet de loi à votre bienveillante attention.
Préconsultation
M. Rémy Pagani (AdG). Nous tenons à prendre position sur le changement de zone concernant la place des Nations. Ce sujet d'actualité a fait l'objet d'un référendum qui promet d'aboutir, et que nous déposerons lundi.
Nous avons été stupéfaits de constater à quel point le symbole urbanistique proposé interdit au peuple de Genève et aux peuples du monde - à tous ceux qui, régulièrement, sont venus sur cette place des Nations - de s'y rassembler encore. Ce projet, qui sera discuté en commission, vise à privatiser une place publique ayant son histoire et qui aurait pu être aménagée de manière plus conviviale, en tenant compte de sa réalité historique et non pas de la symbolique urbanistique telle que proposée dans l'exposé des motifs; on se demande du reste selon quels critères elle a été élaborée.
Nous sommes étonnés de constater qu'aucune des ONG qui s'étaient proposées avant la construction ne se soit encore manifestée pour occuper les locaux de cet immeuble, dont je rappelle qu'il mesurera 30 mètres de haut, occupant ainsi l'entière place actuelle des Nations. On ne le dira jamais assez, il s'agit d'une fuite en avant. On continue à construire des bureaux à Genève, bien que, aujourd'hui, l'équivalent de quarante stades de football destiné à des bureaux est vide. Mais où va-t-on, si ce n'est droit dans le mur ! Où les constructeurs de Genève veulent-ils nous emmener ?
A notre avis, la place des Nations sera ruinée par cette construction. Il s'agit, au contraire, de préserver son cadre de vie exceptionnel, tant pour les habitants que pour les organisations internationales, à l'implantation desquelles nous ne nous opposons pas, bien au contraire. D'ailleurs, un terrain proche de la place des Nations a été acheté à un prix assez important pour y installer des organisations internationales.
Cependant, nous désirons que la qualité de vie soit respectée à Genève, notamment le parc Rigot qui va être complètement défiguré par une route en son côté nord. Nous demandons un aménagement de cette place respectant la convivialité et construite à l'échelle humaine.
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve). Les Verts s'opposeront à ce projet, bien que favorables au réaménagement de la place des Nations qu'ils considèrent comme ne répondant pas actuellement aux critères d'une place phare dans une ville internationale.
Comme l'a dit le préopinant, ce projet a été réalisé sans aucune consultation ni information aux habitants du quartier. Ce fait est regrettable, surtout lorsque l'on désire nouer des contacts plus étroits entre les habitants du quartier et le personnel des organisations internationales.
Récemment, l'ambassadeur Gyger est venu nous parler de l'importance que revêtent à ses yeux les relations qu'entretiennent entre eux le personnel des organisations internationales et les Genevois. On peut alors se demander à quels Genevois il pense et si les habitants de ce quartier de Vermont ne sont pas, en effet, les premiers qu'il faut ménager et avec lesquels il faut créer de bons contacts avec les organisations internationales.
On sait qu'il existe déjà certains problèmes pour la population de ce quartier dus aux divers avantages, dont jouit le personnel des organisations internationales. Il s'agit donc de calmer le jeu et de favoriser les contacts, plutôt que d'imposer un projet, sans demander l'avis de personne ni afficher la moindre information dans le quartier. Pour cette raison déjà, nous trouvons que ce projet n'a pas été réalisé avec l'attention et les formes nécessaires.
Ensuite, l'aménagement comporte de gros défauts. D'ailleurs le projet a été scindé en deux à la Ville de Genève par la commission de l'aménagement et le Conseil municipal. Pourtant, le Conseil d'Etat passe outre et nous propose un projet global, ce qui nous paraît représenter une certaine insouciance vis-à-vis de la Ville de Genève. Pourquoi ce projet a-t-il été scindé ? Il l'a été parce que l'une des deux parties, en tout cas, celle qui concerne la campagne Rigot, ne respectait pas une conservation intelligente de cette villa et l'aménagement qui aurait dû être prévu sur la parcelle, notamment en supprimant des courts de tennis pouvant très bien être installés ailleurs en ville, plutôt que sur cette parcelle très demandée. D'ailleurs, tous les bâtiments prévus sont-ils absolument indispensables et le sont-ils dans la forme prévue par le projet ?
Pour toutes ces raisons, il serait préférable que le Conseil d'Etat reconsidère ce projet et, dans un délai relativement court, nous en propose un bien meilleur que celui-ci, afin que nous puissions volontiers l'accepter.
M. Dominique Hausser (S). La place des Nations est un serpent de mer qui date de fort longtemps. Les projets de lois qui nous sont proposés aujourd'hui - je parle des points 61 et 62, ce qui m'évitera une autre intervention - ont été débattus au Conseil municipal.
La majorité du Conseil municipal de la Ville de Genève a refusé le projet de loi 7794, mais j'ai découvert que ce dernier n'a pas voté le même plan d'aménagement que celui qui nous est proposé ce soir. Nous avons donc la preuve que ce dossier a été mal conduit, que les informations transmises aux uns et aux autres ne correspondent pas à une réalité évoluant probablement très rapidement.
J'ignore si nous devons accepter ou refuser le projet de loi de déclassement de cette zone en fonction de ce qu'il adviendra, mais deux éléments sont importants :
En premier lieu, nous avons à disposition tout ce qui concerne les organisations internationales et l'aménagement des nouveaux bâtiments. Par exemple, nous savons que la Maison des droits de l'homme, planifiée dans cet espace, pourrait bien se retrouver ailleurs, puisqu'elle risque d'être transférée au Palais Wilson, même si certains Etats - dont je vous fais grâce du nom - ont récemment fait opposition à ce projet à New York. En effet, cela relève plus du folklore que d'une véritable opposition.
Dans cet aménagement est comprise la nécessité de refaire le collège Sismondi en raison d'une augmentation du nombre d'élèves. Ainsi, il ne me paraît pas judicieux de rejeter le projet tel quel, mais je souhaite que le Conseil d'Etat en place prenne ce dossier en main de façon plus sérieuse qu'il ne l'a été jusqu'à maintenant et que les informations soient transmises clairement à tous les acteurs de cette affaire. Les discussions en commission doivent être constructives et non pas destructives.
M. Jean Opériol (PDC). Notre groupe soutient le renvoi de ce projet en commission avec beaucoup moins d'atermoiements et de critiques négatives que celles formulées à ce jour. Le moins que l'on puisse dire est que cette place mérite un aménagement, pour ne pas dire un assainissement, tant elle est moche et qu'elle mérite beaucoup mieux, compte tenu de sa situation.
Dans le projet de loi qui nous est proposé sont abordés le déclassement de zone et l'aménagement. A la simple lecture de l'exposé des motifs, ce projet paraît raisonnable dans la mesure où il soigne et concilie, à la fois, l'esthétique, l'utilité et le respect historique des lieux.
Madame Dallèves, je ne comprends pas votre discours, car vous ignorez - vraisemblablement pour l'avoir fort mal lu - que l'exposé des motifs parle de la sauvegarde d'une surface de 42000 m2 de zone de verdure qui seront à la disposition de tous ceux qui voudront bien se rendre à la place des Nations. Par conséquent, je ne vois pas ce que l'esthétique que vous déploriez voir disparaître vient faire dans cette affaire.
D'autre part, ce projet est opportun, car une multitude d'ambassades et de délégations ne trouvant pas de place à Genève se localisent dans les pays limitrophes, cela simplement parce que l'on n'a pas la capacité de les accueillir. Si vous désirez vous rendre en Afrique ou en Amérique du Sud, vous devez aller chercher votre visa à Paris, à Rome, à Londres ou à Bruxelles, alors que l'on pourrait très bien l'obtenir ici, compte tenu du fait que Genève est un pôle de rayonnement international qui mérite que l'on soigne davantage les ambassades désirant s'installer chez nous.
Ce projet de la place des Nations mérite notre attention. Comme toute chose, il est perfectible, mais il ouvre sur - c'est peut-être un signe que le Conseil d'Etat nous donne aujourd'hui - une ère de grande pulsation architecturale et décisionnelle qui fait cruellement défaut dans notre République, tant nous sommes frileux. Genève manque de projets, et celui-là pourrait en être un. Une fois ces projets passés en commission, j'espère que ce parlement et cette population trouveront un consensus qui sera de nature à souligner le caractère entreprenant de Genève. Cela dit - et personne n'en parle jamais sur les bancs d'en face - ce projet est probablement prometteur d'emplois, d'investissements et, pour ma part, le sort des chômeurs, examiné à la lumière de ce projet de loi, n'est pas négligeable, et ne devrait pas être occulté.
J'observe que s'il fallait, aujourd'hui, voter l'implantation du Palais des Nations, du BIT au bord du lac, par exemple, ou de l'OMS, on n'y parviendrait pas, car nous souffrons de frilosité, d'obscurantisme et de négativisme. Donnons-nous peut-être le temps d'une réflexion, afin de trouver un moyen de faire un tout petit peu mieux que de s'en tenir à vos raisonnements défaitistes.
M. Bernard Lescaze (R). Ces projets de lois sont en relation avec un développement urbanistique important de Genève. (Brouhaha.) Je sais bien que, M. Opériol ayant parlé, nous ne devrions plus rien dire... (Rires.) ...mais, malgré tout, il me permettra de continuer.
En raison même du rôle que jouent les organisations internationales dans notre ville et notre canton, ce Grand Conseil doit s'occuper de ces projets de lois et les renvoyer à la commission de l'aménagement. Certains soucis ont pu être exprimés dans d'autres enceintes, comme, par exemple, au Conseil municipal de la Ville de Genève. D'autres problèmes ont été évoqués ici, notamment par le préopinant. Nous ne devons pas faire, en plénum, au moment de l'entrée en matière, un débat de fond qui ne peut nous parvenir qu'après un travail approfondi en commission. Ce projet, comme d'ailleurs le suivant, le mérite. C'est pour cette raison que le groupe radical vous propose de le renvoyer à la commission de l'aménagement.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Dans la mesure où un référendum est en cours sur ce projet ou, plus exactement, sur le préavis de la Ville concernant l'un des deux projets de lois, je m'impose une certaine retenue, afin d'éviter des critiques relatives à l'interférence du canton dans la vie politique d'une commune.
Cela étant, un certain nombre de choses doivent être dites. La première est que, après les deux délibérations de la Ville, l'une positive et l'autre négative, j'ai fait mettre à l'enquête publique les deux projets. Le premier parce qu'il était positif et que c'était une évidence de le réaliser. Le deuxième parce qu'il lui était lié et, comme vous l'avez constaté, il a été tenu compte des raisons pour lesquelles la Ville avait émis un préavis négatif en corrigeant ce projet sur les points litigieux. Le référendum étant lancé, on en attend le résultat.
Madame Dallèves, je vous donne acte qu'il n'y a pas eu de large consultation dans la population. L'enquête publique lancée permettra d'analyser ses réactions, sans oublier qu'il appartient à votre commission d'aménagement d'entendre les intéressés. Au-delà du processus référendaire qui ne peut, malheureusement, se terminer que par oui ou par non, il serait préférable que, au sein de la commission de l'aménagement, puisse se dégager un consensus sur l'aménagement de l'ensemble de ce périmètre.
Pour la ville de Genève, ce périmètre qui comporte un espace de verdure essentiel - et qui manque à cette région - est extrêmement important. C'est un des points fondamentaux. L'autre point important concerne la Genève internationale et les engagements pris par la Confédération et le canton en vue d'obtenir la venue, dans notre ville, du siège de l'OMC. Ces engagements devront être tenus, dans ce périmètre ou ailleurs, mais ils devront être tenus.
Je ne désespère pas que l'on trouve des solutions accessibles et admissibles pour tous dans le cadre de ces deux projets. Il existe une marge de manoeuvre, et je souhaite que ce dossier ne soit pas l'occasion d'un affrontement de principe. Par conséquent, il nous faut trouver une solution répondant aux besoins de la Genève internationale, sans en faire payer le prix par une densification du quartier telle que les habitants de cette région de la ville auraient à en souffrir.
J'ai rapidement parcouru les observations qui sont déjà parvenues au département. Il est possible d'imaginer que la partie la plus combattue du projet puisse être corrigée, de manière que, dans des délais raisonnables - puisque nous sommes tenus à un calendrier assez court - nous puissions parvenir à une solution acceptable.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan no 28825-27-222-309, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 17 janvier 1997, modifiant les limites de zones sur le territoire de la Ville de Genève, section Petit-Saconnex (création d'une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, à la Place des Nations), est approuvé.
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
Un exemplaire du plan no 28825-27-222-309 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le projet de modification des limites de zones no 28825-27-222-309 faisant l'objet du présent projet de loi porte sur un périmètre comprenant grosso modo l'actuelle place des Nations, ainsi que les parcelles nos 2182 (pour partie), 2184 et 2994 (pour partie) situées de part et d'autre de cette place, face à l'Organisation des Nations Unies (ONU). Ce projet est accompagné d'un deuxième projet de modification des limites de zones (no 28937A-222), lequel porte sur le solde de la parcelle no 2184 et le solde de la parcelle no 2182, sur laquelle se trouvent le collège Sismondi, la villa Rigot et plusieurs courts de tennis, entre l'avenue de France, l'avenue de la Paix et le chemin Rigot.
L'ensemble de ces terrains, y compris la place des Nations, représente une superficie d'environ 84 875 m2. Le principal objectif de ces deux projets de modification des limites de zones est de revaloriser le cadre urbanistique de la place des Nations, et de contribuer au développement des organisations internationales autour des Nations Unies. Dans ce sens, il s'inscrit dans la ligne, suivie depuis environ 10 ans, tendant à renforcer le rôle de Genève comme lieu de rencontre privilégié dans le monde pour les organisations internationales, dont les principaux témoins sont la réalisation récente du Haut commissariat aux réfugiés (HCR), l'extension en cours de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), et celles, prochaines, de l'Union internationale des télécommunications (UIT) et de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI).
Un élément décisif de cette ligne politique a été l'organisation, en 1995, d'un concours d'aménagement international placé sous les auspices conjoints de la Ville, de l'Etat et de l'ONU, cela à l'occasion du cinquantième anniversaire de cette dernière. Le programme établi prévoyait de redonner à ce lieu une dimension architecturale et urbanistique plus en correspondance avec sa vocation symbolique de lien entre Genève et le monde. Plusieurs bâtiments devant abriter des fonctions essentielles contribuent à cette volonté:
- La Maison universelle, qui abritera pour les petites missions des pays les moins avancés. Ce projet a pour but d'ancrer ces missions à Genève, et de renforcer ainsi leur rôle.
- Le Centre de politique et de sécurité, fondation dont la mission principale est de former des fonctionnaires gouvernementaux sur le plan de la politique de sécurité. Ce centre aura des liens étroits notamment avec le Comité international de la Croix-Rouge.
- L'Institut des hautes études internationales ainsi que sa bibliothèque, actuellement logés dans des bâtiments provisoires vieux de 30 ans, bénéficieront de deux bâtiments mieux adaptés à leur fonction.
- Dans l'enceinte actuelle du Palais des Nations, un bâtiment dont il avait été prévu initialement qu'il abriterait la Maison des droits de l'homme, et dont l'affectation définitive sera modifiée, tout en s'inscrivant dans le cadre des activités de l'ONU.
Le projet lauréat permet ainsi de réaliser les objectifs suivants, qui avaient été fixés dans le cadre du concours, et qui visaient essentiellement à mieux intégrer les organisations internationales dans la vie genevoise:
- réaliser un parcours paysager, englobant la place des Nations jusqu'au lac, avec un lieu privilégié de développement urbain entre les avenues de France et de la Paix;
- faire de la place des Nations un dénominateur commun, vers lequel convergent toutes les organisations internationales;
- transformer la place des Nations en un lieu privilégié, diminuant la circulation automobile, rajoutant l'élément «eau» et prenant en compte le piéton.
Ce concept, parfaitement réalisé dans le projet lauréat, doit être accompagné de l'ouverture au public du parc de l'ONU, dans sa partie située entre les bâtiments et les voies ferrées.
La réalisation de ces projets sera par ailleurs l'occasion de concrétiser le premier maillon d'une promenade piétonne descendant du Grand Morillon jusqu'au lac. Cette promenade, qui doit également emprunter le domaine de la Pastorale, est un élément clé du projet lauréat. Elle se développera entre les bâtiments envisagés jusqu'au bas de la parcelle Rigot.
Dans le même temps, le projet permet d'assurer le maintien de la villa Rigot ainsi que sa dépendance et de la plus grande part de son parc richement arboré, lequel s'inscrit en prolongement naturel du parc de l'ONU.
Le projet prévoit enfin la reconstruction à moyen terme et en plusieurs étapes du collège Sismondi, composé de pavillons provisoires vieux maintenant de 40 ans.
En ce qui concerne les transports publics, un espace est réservé pour la création d'une boucle de rebroussement pour le tram 13 prolongé, ainsi que pour le stockage des nombreux bus desservant le quartier. Ce dispositif est complété d'un parking P + R d'environ 100 places. L'aménagement du plan de circulation et la création de parkings ont été étudiés par les services de l'Etat et de la Ville, assisté d'un bureau spécialisé chargé d'examiner l'impact du projet sur l'environnement, en vertu de l'OEIE.
Les projets de plans localisés de quartier no 28826-27-222-309 et no 28938A-222, mis simultanément à l'enquête publique, définissent plus précisément l'aménagement de ces deux périmètres.
L'ensemble des terrains sont actuellement situés en zone villas. La mise en place de ces projets implique de procéder à une modification des limites de zones.
Les objectifs visés dans le cadre de ce premier périmètre, notamment la Maison universelle, doivent être réalisés prioritairement. Par ailleurs, le projet lauréat de M. Fuksas définit une entité construite entièrement indépendante, grâce notamment à la construction d'une nouvelle rue prolongeant la rue de Montbrillant vers l'entrée de l'ONU. Ce sont les raisons qui ont motivé le découpage du périmètre initial en deux projets de modifications des limites de zones distincts.
La réalisation de ces constructions et aménagements nécessite plusieurs échanges fonciers ainsi que la levée de servitudes de restriction de bâtir.
Les négociations foncières y relatives avec les entités concernées, à savoir l'ONU, la Ville de Genève et l'université sont conclues, ou en bonne voie de règlement.
Il convient de mentionner à ce propos les deux points suivants:
- Un projet de protocole d'accord a été établi en avril 1997 d'entente entre la Ville et l'Etat de Genève dans le but de déterminer les nouvelles assiettes de terrain revenant, après échange, au domaine public de la Ville et au domaine privé de l'Etat et de l'université. Ces nouvelles assiettes sont précisées par un schéma figurant sur chacun des plans localisés de quartier.
- Alors qu'une procédure en expropriation envers l'université avait dû être envisagée, en juin 1997, un accord a finalement été conclu entre cette dernière et l'Etat de Genève: un échange foncier aura lieu entre ces deux entités, au terme duquel l'Etat de Genève deviendra propriétaire de la campagne Rigot, tandis que l'université recevra en échange la parcelle dite du «Foyer de Pinchat», située sur la commune de Carouge et d'une surface équivalente. L'université pourra alors disposer d'un terrain comportant un potentiel foncier exploitable à moyen ou long terme, qui sera affecté au bénéfice de ses activités.
L'aménagement de la campagne Rigot correspond aux objectifs de la donation effectuée à l'université de Genève par M. John D. Rockefeller junior le 15 août 1942. L'Etat de Genève respectera les charges en faveur de la Société des Nations dont cette donation est assortie.
Aussi, il a été décidé de créer, pour le périmètre objet du présent projet de loi, une zone de développement 3 destinée prioritairement à des organisations internationales, d'une surface d'environ 21 875 m2. Le périmètre voisin, mis simultanément à l'enquête publique, est destiné à accueillir une zone de développement 3 affectée prioritairement à des organisations internationales, une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public et d'une zone de verdure.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone qu'il est envisagé de créer en vertu du présent projet de loi.
L'enquête publique qui a eu lieu du 16 juillet au 29 août 1997 n'a provoqué que deux observations qui seront transmises, de même que le préavis du conseil municipal de la Ville de Genève, à la commission d'aménagement du canton chargée de l'examen de ce projet de loi.
Tels sont en substance, Mesdames et Messieurs les députés, les motifs pour lesquels nous soumettons ce projet de loi à votre bienveillante attention.
Préconsultation
Le président. Le débat de préconsultation qui vient de s'achever à propos du point 61 préfigurait quelque peu celui du point 62.
M. Rémy Pagani (AdG). Je me permets d'intervenir sur le projet du parc Rigot et la modification de zones qui nous est proposée, soit sur la deuxième partie du projet.
Le président Moutinot présume de ce projet qui vient de son prédécesseur, car il y a un problème de procédure. Vous nous avez dit aussi - j'ai pris note - votre respect de la démocratie municipale et des droits des communes à s'exprimer.
En l'occurrence, la commune de Genève et les habitants ont été spoliés de leurs droits. En effet, la Ville de Genève ayant donné un préavis négatif, il n'est plus possible aux référendaires que nous sommes de lancer un référendum. La Ville de Genève avait demandé qu'il lui soit proposé une autre modification de limite de zones avant celle que nous connaissons. Je constate à regret qu'aucune démarche de ce genre n'a a été faite, contrairement à ce qui avait été promis. Il y a donc bien lieu de parler de déni des droits démocratiques en défaveur de la Ville de Genève.
La modification de zones ne correspond pas aux besoins des habitants ni à un aménagement correct de cette surface, notamment parce qu'est maintenue en l'état l'implantation du collège Sismondi, anciennement appelé Rigot. Nous préférerions que cette implantation se fasse sur les courts de tennis qui sont à la disposition de la collectivité ou qui, en tout cas, devraient l'être depuis dix ans, puisque le droit de superficie ou de location, accordé il y a environ cinquante ans, s'est éteint. Nous estimons donc que le collège Sismondi - anciennement Rigot - devrait être implanté sur les courts de tennis.
Pour ces deux raisons, nous rejetons ce projet et demandons le retrait du projet de loi 7794 jusqu'à ce que la municipalité puisse entrer en matière sur sa demande.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Dans le débat précédent, tous les orateurs se sont exprimés sur les deux projets. Vous nous avez parlé surtout de celui-ci et maintenant vous parlez de l'autre. Néanmoins, je vous réponds.
Lorsque j'ai mis à l'enquête publique le périmètre que vous critiquez, il n'était pas dans mon intention de détourner les droits démocratiques pour la bonne et simple raison qu'il a été tenu compte des remarques émises par la Ville de Genève. C'est pour ne pas retarder l'avance de ce projet que je l'ai mis à l'enquête publique, et j'assume cette décision.
Vous prétendez être privé d'un droit de référendum, mais à aucun moment, avant les débats du Municipal, vous n'avez indiqué que vous lanceriez un référendum au cas où vos thèses ne triompheraient pas. C'est votre droit le plus strict, mais si un référendum est annoncé à l'avance, on sait qu'il existe et il est aisé de prendre une autre décision. En l'occurrence, ce n'était pas prévisible.
La commission d'aménagement du Grand Conseil reste l'endroit idéal pour discuter de l'ensemble des problèmes qui ont été soulevés. Par conséquent, je ne retirerai pas ce projet.
Une voix. Et pan dans les gencives !
M. Bernard Lescaze (R). Je pense, au contraire de ce qu'a dit M. Pagani, que le projet de loi 7795 - c'est bien celui dont nous parlons, car auparavant, je n'étais intervenu que sur le projet de loi 7794 - doit être renvoyé en commission de l'aménagement, car il est particulièrement important. En effet, quoi que l'on en pense, l'aménagement actuel de la place des Nations est indigne de ce qu'il devrait être. Il faut agir. D'ailleurs, le Conseil administratif de la Ville de Genève - notamment représenté par M. Michel Rossetti - avait lancé un concours pour l'aménagement de la place des Nations.
Bien que très favorable à la défense de l'autonomie communale, je considère, tout comme une grande partie de ce Grand Conseil, qu'on ne saurait limiter les droits démocratiques à une seule partie de ce canton, aux habitants des environs ou à ceux de la commune.
Dans le cas qui nous intéresse, à l'entrée de la ville, sur la place des Nations, devant le Palais des Nations et à proximité de nombreuses organisations internationales, il est nécessaire que tout le canton se prononce.
Le député Pagani a parlé des besoins des habitants. Ils sont certes légitimes, mais les besoins économiques, sociaux de tout le canton sont également légitimes. Le maintien des organisations internationales dans notre ville est prioritaire, surtout si l'on veut continuer à mener le même genre de vie dans notre canton. En conséquence, je propose le renvoi à la commission d'aménagement du canton.
En ce qui concerne le collège Sismondi, il est sans doute possible de le riper vers les tennis. C'est probablement une bonne solution, mais elle ne doit pas s'imposer au détriment de l'exigence première; celle d'avoir un collège, un gymnase moderne pour les élèves. En effet, cela fait des années que la reconstruction du collège Sismondi est promise. Beaucoup de propositions ont vu le jour. On a pensé le déplacer à d'autres endroits, sur le Palais Wilson, sur Châteaubriand. Finalement, on décide de le reconstruire presque à la même place. Nous sommes d'accord d'étudier un emplacement légèrement différent, bien que cela fasse perdre plusieurs mois, mais il faut que nous nous engagions aussi pour la construction d'écoles modernes à Genève. Le parti radical l'a toujours voulu et continuera à le vouloir. Je suis étonné qu'un représentant de l'Alliance de gauche fasse des objections et propose de maintenir les élèves de Sismondi dans leurs baraquements. C'est inacceptable et c'est une raison supplémentaire que nous avons pour que ce projet de loi soit rapidement examiné à la commission d'aménagement du canton.
Ce projet est renvoyé à la commission d'aménagement du canton.
Le président. Nous continuons selon notre ordre du jour au point 51. A la demande des deux conseillers d'Etat concernés, nous achevons de traiter les points concernant le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement. Je constate que M. Moutinot s'en trouve soulagé. Nous reprenons donc nos travaux au point 63 de notre ordre du jour.
Lors de sa séance du 19 novembre 1997, la commission des finances a adopté à l'unanimité le projet de loi 7715 autorisant l'aliénation par l'Etat de Genève à M. Yves Golaz de la parcelle no 573(1), feuille 20 du cadastre de la commune de Genthod.
Cette parcelle d'une contenance de 217 m2 avec bâtiment est intégrée dans l'installation du garage Golaz et ne saurait intéresser que le propriétaire du garage, tant en raison de sa configuration, de sa surface limitée, de son utilisation que du voisinage dans lequel elle se trouve.
En conséquence, Mesdames et Messieurs les députés, la commission des finances vous recommande de suivre son vote unanime et de voter ce projet de loi.
Premier débat
M. Christian Grobet (AdG). Ce projet de loi porte sur une aliénation d'un terrain de l'Etat concernant un garage qui se trouve en bordure de la route de Suisse dans l'agglomération de Bellevue. Or, le seul tronçon n'ayant pas pu être doté d'une piste cyclable à Bellevue se situe devant ce garage. Sachant que M. Moutinot est un éminent cycliste, ce fait devrait l'interpeller, tout comme les associations de cyclistes.
J'ignore si le département des travaux publics a pu obtenir la cession de terrain nécessaire pour garantir la mise en site propre intégral de la piste cyclable dans la traversée de Bellevue et, plus précisément, devant ce garage. Comme, à l'époque, cette situation avait posé problème, ce projet de loi est peut-être la solution.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Il ressort de l'exposé des motifs du projet de loi que cette question a pu être réglée. Cette piste cyclable se prolongera jusqu'à la sortie du village. En réalité, la situation dont vous parlez se trouve sur la commune de Genthod, Monsieur le député, mais cela fait partie de l'agglomération belleviste, dont je suis citoyen.
Cette question étant réglée, je vous invite à voter ce projet de loi. Il s'agit d'une surface, comme vous avez pu le voir, de 217 m2 sauf erreur et qui, par conséquent, ne préjuge en rien de ce que peut être ou ne pas être la vente des terrains de l'Etat. Il s'agit, me semble-t-il, d'une bagatelle.
Ce projet est adopté en trois débats dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
autorisant l'aliénation d'un immeuble propriété de l'Etat de Genève,sis sur la commune de Genthod
LE GRAND CONSEIL,
vu l'article 80A, alinéa 1, de la constitution genevoise,
Décrète ce qui suit:
Article unique
L'aliénation par l'Etat de Genève à M. Yves Golaz de la parcelle n° 573(1), feuille 20 du cadastre de la commune de Genthod, inscrite au patrimoine financier de l'Etat, est autorisée au prix minimum de 97 650 F.
Le présent projet de modification de zones porte sur la parcelle no 723, feuille 9 du cadastre de la commune de Cologny.
Il a pour objectif de favoriser, d'une part, l'implantation d'immeubles de logements grâce à la création d'une zone de développement 4B, et, d'autre part, la réalisation à terme d'un équipement public au moyen de la création d'une zone de développement 4B destinée à des équipements publics.
Cette parcelle, d'une surface totale de 14 307 m2, est actuellement située en 5e zone (villas). Elle se trouve entre la route de Vandoeuvres, le chemin du Guignard, le chemin des Hauts-Crêts et le chemin du Tirage.
Dans une premier temps, les propriétaires de ce bien-fonds avaient formé le projet d'y construire dix-sept villas contiguës, en trois bâtiments séparés. Une autorisation définitive de construire avait été délivrée par le département des travaux publics, en date du 15 juillet 1991.
A l'occasion de cette procédure, les commissions d'architecture et d'urbanisme avaient suggéré au propriétaire de densifier leur projet et de demander, le cas échéant, une modification du régime des zones.
Les propriétaires ont donc décidé de surseoir à la réalisation du projet susmentionné et d'entrer en négociations tant avec la commune qu'avec le département des travaux publics et de l'énergie (DTPE). Dans le cadre de celles-ci, plusieurs projets de densification ont été successivement élaborés, examinés et discutés.
D'un commun accord, les différentes parties ont conclu à l'opportunité d'une mise en valeur modérée du périmètre et à la réalisation d'un projet sur la partie déclassée en zone de développement 4B, dont les caractéristiques sont évoquées dans le projet de loi présenté par le Conseil d'Etat en date du 30 octobre 1996.
Les travaux de la commission
En date du 29 janvier 1997, sous la présidence de Mme Sylvie Châtelain, la commission a procédé tout d'abord à l'audition des opposants (une personne) qui déplore devant la commission le peu d'informations qu'elle a pu avoir sur le projet et qui motive ainsi les raisons de son opposition tant au projet de loi qu'au plan localisé de quartier (PLQ).
L'opposante considère également qu'il est peu plausible de prévoir la construction d'immeubles sociaux dans une commune comme Cologny !
Elle s'étonne que la commune qui pousse ce projet ne l'ait pas contactée pour acheter sa propriété qui est voisine du périmètre à déclasser. Elle s'étonne aussi que sa propriété ne soit pas incluse dans le périmètre de déclassement.
Enfin, elle motive fondamentalement son opposition par le fait que les immeubles projetés boucheraient sérieusement son horizon s'ils étaient réalisés.
L'opposante, enfin, annonce qu'elle n'ira pas plus loin dans la procédure d'opposition mais elle émet quand même des réflexions sur le projet d'implantation des immeubles qui aurait pu être plus subtil à son avis.
La commission procède ensuite à l'audition de la commune de Cologny représentée par M. Gerber, adjoint au maire. M. Gerber fait un historique du dossier. Il rappelle que le conseil municipal a adopté un plan directeur prévoyant une densification de cette zone et que le même conseil a donné un préavis favorable à la construction d'immeubles en zone 4B.
En acceptant de densifier cette zone, la commune a négocié avec les propriétaires une cession de terrain permettant la construction d'une salle communale en ce lieu.
M. Gerber affirme également que l'opposante a été contactée tant par le promoteur que par la commune dans le but d'acquérir la maison voisine du périmètre dans laquelle habite justement l'opposante.
En plus du terrain qu'elle possède déjà en ce lieu, soit 2 500 m2, la cession prévue étant de 3 000 m2, la commune de Cologny disposera alors d'une surface de 5 500 m2 qu'elle destine à des équipements publics, la salle communale évoquée ci-avant notamment.
Enfin, M. Gerber annonce que la commune de Cologny enregistre de nombreuses demandes pour des logements et qu'elle serait heureuse de pouvoir offrir des appartements à un loyer avantageux puisque l'opération sera réalisée sous le contrôle de l'OFL après déclassement en zone 4B de développement.
En guise de conclusion, M. Gerber rappelle que le conseil municipal est favorable tant au projet de loi de déclassement qu'au PLQ.
La commission débat du projet en prenant en considération les arguments développés par l'opposante mais aussi ceux développés par la commune.
Une majorité de la commission considère que le projet doit être amélioré au niveau de l'implantation des bâtiments, du gabarit de ces bâtiments ou encore de la densité globale du périmètre.
A la demande d'un commissaire, le représentant du DTPE lit le préavis de la commission d'urbanisme qui date du 5 octobre 1995, préavis favorable sur le déclassement mais défavorable sur le PLQ. Il est encore évoqué l'indice d'utilisation. Les exposés des motifs du projet de loi et du PLQ sont contradictoires. En fait, l'indice d'utilisation sur la totalité des parcelles concernées est de 0,52 mais rapporté au seul périmètre du PLQ l'indice grimpe à 0,8.
Il est alors passé au vote d'entrée en matière qui est négatif, soit 11 avis, contraires (2 L, 2 R, 2 PDC, 2 S, 1 Ve, 2 AdG) et 3 abstentions (L).
M. Dessimoz est alors désigné rapporteur.
Peu après, le maire de la commune de Cologny et le promoteur s'adressent à la présidente de la commission pour convenir d'une procédure susceptible de débloquer ce projet le plus rapidement possible. Il est alors proposé au promoteur de revoir sa copie et au rapporteur de la commission de l'aménagement de retarder la rédaction du rapport.
Quelques mois s'écoulent et le promoteur présente un nouveau projet d'urbanisation qui se distingue du premier par le fait de la suppression d'un bâtiment, celui qui indisposait plus particulièrement l'opposante.
La commission examine à nouveau le dossier du 24 septembre 1997. Elle constate alors avec satisfaction que les problèmes de voisinage sont désormais améliorés et que l'indice d'utilisation est ramené à 0,65, la cession gratuite du terrain à la commune étant également maintenue.
Les commissaires poursuivent les échanges d'idées sur le maintien du statut actuel de la zone (villas) ou sur l'opportunité de répondre aux voeux communs du promoteur et de la commune visant au déclassement en zone de développement 4B du périmètre concerné.
Le représentant du DTPE précise encore qu'il n'a pas reçu d'opposition formelle de la part de l'opposante au nouveau projet présenté, le projet ayant été adressé à l'opposante directement par le DTPE.
Il est alors procédé au vote d'entrée en matière sur le projet de loi 7540. Ce vote est positif, soit 10 oui (5 L, 1 PDC, 1 S, 1 Ve, 2 AdG) et 1 avis contraire (R).
Le projet de loi est ensuite soumis au vote en son ensemble, il est accepté dans la même composition que ci-dessus, par 10 oui et 1 avis contraire.
La commission de l'aménagement vous propose donc, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter le projet de loi 7540 conformément au plan no 28784-516, dressé par le DTPE le 28 août 1995 et propose la modification des limites de zones sur le territoire de la commune de Cologny (création d'une zone de développement 4B et d'une zone de développement 4B destinée à des équipements publics, au lieu-dit «Mon Plaisir»), étant précisé que l'indice d'utilisation pour la zone de développement 4B est limité à 0,65.
Premier débat
Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
LOI
modifiant les limites de zones sur le territoire de la communede Cologny (création d'une zone de développement 4B et d'une zonede développement 4B destinée à des équipements publics)
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article 1
1 Le plan n° 28784-516, dressé par le département des travaux publics et de l'énergie le 28 août 1995, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Cologny (création d'une zone de développement 4B et d'une zone de développement 4B destinée à des équipements publics, au lieu-dit Mon Plaisir) est approuvé
2 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Art. 2
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité II aux biens-fonds compris dans le périmètre des zones créées par le plan visé à l'article 1.
Art. 3
L'opposition à la modification des limites de zones formées par M. et Mme Erika et Max Geiger est rejetée dans la mesure où elle est recevable, pour les motifs exposés dans le rapport de la commission chargée de l'étude de la présente loi.
Art. 4
Un exemplaire du plan n° 28784-516 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
La motion 1105, déposée le 20 novembre 1996, a été traitée les 22 mai, 28 août et 4 septembre 1997 par la commission judiciaire présidée parM. Michel Halpérin.
Les travaux se sont déroulés en présence de M. Gérard Ramseyer, conseiller d'Etat, et de M. Nicolas Bolle, secrétaire adjoint au département de justice et police et des transports.
Introduction
Il est nécessaire de rappeler dans quel contexte cette motion a été déposée.
En automne 1996, une manifestation paysanne à Berne avait été contenue par la police au moyen, entre autres, de l'arrosage des manifestants avec de l'eau mélangée à un produit irritant. Certaines personnes, qui avaient conservé toute la journée leurs vêtements mouillés, avaient subi de très graves brûlures et en garderont toute leur vie des séquelles.
Les motionnaires ont alors demandé que les produits chimiques soient supprimés des canons à eau à Genève.
La commission judiciaire, après avoir écouté les auteurs de la motion, a souhaité auditionner le commandant de la gendarmerie, puis a reçu deux représentants de l'Union du personnel du corps de police du canton de Genève qui avaient demandé à être entendus.
Auditions
Audition de M. Guy Baer, commandant de la gendarmerie
M. Baer confirme que la gendarmerie genevoise utilise aussi des gaz sous forme liquide dans ses canons à eau et dans ses lance-eau portatifs.
Les conditions de mise en oeuvre de ces moyens de contrainte sont codifiées, et on apprend qu'il existe une véritable «science des barrages». La police genevoise applique les principes d'opportunité et de proportionnalité. Elle professe qu'il faut savoir «attendre, subir puis sommer» avant d'entrer en action contre les manifestants. Car, lorsqu'un barrage cède, les policiers se trouvent alors en contact direct avec les manifestants, et ce corps à corps peut occasionner de graves lésions aux uns comme aux autres. Il est donc essentiel de parvenir à l'éviter.
Pour maintenir les manifestants à distance, la police est parfois contrainte d'utiliser les canons à eau. Rappelons qu'à Genève les balles en caoutchouc ne sont pas utilisées.
Dans le canton de Genève, les manifestations sont un moyen d'expression reconnu, et il y en a environ 120 par an. Une vingtaine d'entre elles seulement donnent lieu à des craintes de débordements violents.
Ce sont celles-là que la police essaie de cadrer en mettant en place des tonnes-pompes et des lance-eau portatifs. Avant tout usage d'un moyen de contrainte, comme la matraque, ou les gaz liquides, la police est tenuede procéder à une sommation par mégaphone. Ensuite elle tente de limiter de l'usage de la force contre les responsables de troubles.
Pour ce qui est de l'eau mêlée de produits chimiques, elle n'est jamais directement giclée sur les manifestants, mais au-dessus d'eux, en arrosage, ou vers le sol, pour les faire reculer.
Les policiers utilisateurs des canons à eau et des lance-eau sont spécialement formés et régulièrement entraînés.
La nature de la manifestation (violente ou non), la présence de femmes, d'enfants ou non, déterminent donc l'usage des moyens de tenir à distance les manifestants. L'utilisation des gaz lacrymogènes mêlés à l'eau évite donc l'usage de la matraque dans des contacts directs.
Lors du défilé militaire de novembre 1995, le mélangeur de produit chimique est tombé en panne. Il ne sortait que de l'eau de la tonne-pompe. C'est ce qui, selon le commandant Baer, a provoqué les violences qui se sont déroulées pendant une heure, car les manifestants n'ont pas pu être tenus à distance des forces de police.
Finalement, l'usage des divers moyens de contrainte est tributaire des circonstances et dépend de la bonne évaluation de la situation par les responsables de la police.
M. Baer précise que, dans certains Länder allemands, la police n'utilise que de l'eau dans ses canons à eau. Mais elle la gicle sous forte pression directement sur les manifestants, ce qui leur inflige des blessures quelquefois graves, ou qui provoque leur chute, et entraîne aussi des lésions qui peuvent être graves.
Le sentiment de M. Baer est que, si le mélange eau-gaz était interdit, il faudrait se rabattre sur le gaz lacrymogène seul, ou les balles en caoutchouc, ce qu'il voudrait éviter.
Audition de l'Union du personnel du corps de police du canton de Genève (UPCP), représentée par MM. Roger Golay, président, et Pierre-Alain Laurent, vice-président
M. Golay exprime ses craintes de voir supprimer le mélange eau-gaz dans l'arsenal des moyens à disposition de la police lors des manifestations. En effet, il considère que ce mélange, qui est assez rarement utilisé (environ à 5 reprises depuis 10 ans), est un moyen préventif extrêmement efficace. Il permet d'éviter les corps à corps, toujours dangereux, et pour les manifestants et pour les policiers.
Il indique d'ailleurs que la police genevoise ne dirige jamais les jets du canon à eau directement contre les manifestants, comme cela s'est fait à Berne, ainsi que l'attestent les images vues à la télévision.
Les policiers spécialisés dans les moyens chimiques (M. Golay en fait partie) sont dûment et régulièrement entraînés et connaissent les proportions eau/gaz à respecter. Ils possèdent d'ailleurs des instructions, dont un exemplaire se trouve en annexe.
La police, quand elle se voit forcée d'utiliser les canons à eau, en fait d'abord un usage défensif, en dirigeant le jet vers le sol. Le jet offensif, toujours au-dessus de la foule, s'effectue ensuite, si nécessaire. Il est précisé que la proportion de gaz est plus forte dans les lance-eau portatifs que dans la tonne-pompe.
M. Golay ajoute enfin que des manifestations qui promettaient d'être violentes, donc dangereuses, ont été maîtrisées grâce à l'usage des produits chimiques sans que jamais il n'y ait eu de plaintes pour lésions corporelles.
La mise en oeuvre des lance-eau se fait sur ordre d'un officier de police, après appréciation soigneuse de la situation.
M. Laurent ajoute que le mélange eau-gaz constitue un moyen de disperser la foule, mais n'est pas une arme. Il ne voit pas quelle méthode de remplacement on pourrait appliquer pour éviter les corps à corps. C'est en tout cas une excellente façon de protéger la police lors de manifestations violentes. Le jet d'eau pure n'aurait pas du tout le même effet dissuasif. Car le gaz se diffuse partout, tandis que l'on peut facilement éviter un jet d'eau en se réfugiant derrière un obstacle quelconque. De plus, pour obtenir des jets d'eau assez violents pour éloigner les manifestants, il faut une forte pression qui ne peut être obtenue que par des machines lourdes. Or, les manifestations ont souvent lieu dans des espaces restreints qui ne permettent que l'usage des lance-eau portatifs.
M. Golay précise que les personnes qui participent régulièrement à des manifestations connaissent très bien les effets des produits chimiques mélangés à l'eau et s'éloignent avant que la police ne commence à gicler. Par ailleurs, il pense qu'on ne pourrait pas diminuer les proportions de gaz dans l'eau sans diminuer aussi l'effet dissuasif des lance-eau. Du reste,3 sommations sont faites par mégaphone avant la mise en oeuvre des moyens chimiques. Chacun a donc l'opportunité de s'éloigner.
Selon M. Golay, la police, dans ses interventions, respecte la propor-tionnalité des moyens mis en oeuvre, et elle agit graduellement.
Discussions de la commission
Plusieurs membres de la commission judiciaire sont des familiers des manifestations de rue et connaissent par expérience personnelle les effets du mélange eau-gaz sur les participants. Un des députés a même subi des brûlures à la suite de la manifestation paysanne de 1996 à Berne.
Rappelons d'abord que le but de l'usage du mélange eau-gaz est de maintenir à distance des forces de l'ordre les manifestants violents et de les disperser afin d'éviter les affrontements directs.
Il a donc bien fallu considérer que deux sortes d'intérêts, par forcément opposés, d'ailleurs, étaient en présence: l'intérêt des manifestants à exercer leur droit de manifester sans récolter de blessures, et l'intérêt des policiers à assurer leur propre sécurité physique tout en protégeant les personnes et les biens menacés, comme ils en ont le devoir. Car si les policiers disposent de matraques et de lance-eau, les manifestants sont parfois armés de pierres, barres à mine ou cocktails Molotov. Dans ces conditions, il faut absolument éviter les corps à corps, qui entraîneront fatalement des lésions gravissimes, dans les deux camps du reste.
Quelques solutions ont été proposées.
D'abord, l'instauration d'un moratoire de deux ans, pendant lesquels la police n'aurait pas fait usage de produits chimiques irritants mélangés à l'eau des canons à eau.
Ensuite, la diminution de la proportion de produits chimiques dans l'eau.
Enfin, l'établissement d'une réglementation très précise quant à l'usage des gaz liquides, l'opportunité et le moment de leur mise en action et la façon de les employer. Certains députés proposaient que les produits chimiques ne soient mis en oeuvre qu'après les premiers actes de violence des manifestants.
Moratoire: si l'on considère que le but de l'utilisation de gaz lacrymogènes mélangés à de l'eau lors de certaines manifestations est de maintenir les éléments violents à distance pour éviter les corps à corps dangereux, on est obligé de constater que l'instauration d'un moratoire à l'usage des gaz empêcherait ce but d'être atteint. Les manifestants agressifs simplement arrosés d'eau pure en viendraient vite aux mains avec les policiers.
Pour les mêmes raisons, la diminution du dosage des produits chimiques n'a pas été retenue.
La proposition de proscrire l'usage des produits chimiques dilués dans l'eau pendant deux ans (moratoire) a été repoussée par 6 voix (2 DC, 3 L,1 R) contre 4 (3 AG, 1 Ve) et 2 abstentions (S).
Par contre, la commission, soucieuse de préserver l'intégrité physique des policiers et des manifestants, a souhaité que les directives du corps de police quant à l'usage des moyens lacrymogènes liquides (en annexe) soient complétées et précisées de la façon suivante:
Sous le no 1 - Principes, il faudrait ajouter à l'opportunité et la proportionnalité, la gradation.
A la page 4, 2e paragraphe «... avec des produits lacrymogènes. A la suite de l'usage de ces moyens, des informations devraient être données par mégaphone concernant les précautions à prendre en cas de contact avec les gaz liquides.»
Les commissaires estiment qu'il ne faut pas attendre les premiers actes de violence pour utiliser le mélange eau-gaz, destiné justement à prévenir les violences.
Rappelons qu'il n'y a, à la disposition de la police genevoise, pas de moyens alternatifs aux produits chimiques. Si on retire à la police son seul moyen de dissuasion à distance, on ne pourra éviter les corps à corps. Simplement, la commission veut être sûre que le mélange eau-gaz ne sera utilisé qu'en cas d'extrême nécessité.
Finalement, la majorité de la commission vous propose, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter la motion 1105 par 6 voix (3 L, 2 DC, 1 R) contre 4 (3 AG, 1 V) et 2 abstentions (S).
RAPPORT DE LA MINORITÉ
Cette proposition de motion, refusée du bout des lèvres par une majorité de circonstance de la commission judiciaire, a eu un mérite certain. Elle a permis de débattre de la proportionnalité des moyens d'intervention utilisés lors des manifestations de rue à Genève.
Alors qu'au départ, en préconsultation, on pouvait imaginer un débat léger, il fut au contraire de haute tenue et toutes les questions ont pu être posées. Est-ce cela qui a incité les groupes signataires (R, S et PDC) à rejeter finalement la motion? Ou l'absence, lors du vote, des députés les plus concernés? La question reste en suspens .
Cette motion, autant le reconnaître d'emblée, a été déposée à la suite de l'indignation ressentie lors des événements survenus à Berne à l'occasion de la manifestation des paysans, corroborée par les déclarations de l'un des manifestants, par ailleurs conseiller national et député, j'ai nommé M. John Dupraz.
S'il est vrai que l'attitude de la police genevoise ne peut être comparée à celle de la police bernoise, la violente répression lors de la manifestation contre le défilé militaire est encore dans toutes les mémoires. Et comme dit l'adage: «Mieux vaut prévenir que guérir».
Comme on l'a entendu lors des auditions - sur lesquelles je ne reviendrai pas, leur contenu étant développé dans le rapport de majorité - pendant les manifestations, la police répond à des ordres, ordres donnés par un chef, présentement le commandant de la gendarmerie Guy Baer, lui-même subordonné au chef de la police, lui-même appliquant la politique mise en oeuvre par le conseiller d'Etat, responsable du département de justice et police et des transports (DJPT).
Certains, dans ce parlement, se rappelleront du conseiller d'Etat Schmidt, surnommé «Schmidt la matraque» par les manifestants. C'est avec un certain soulagement que nous l'avons vu remplacé par le conseiller d'Etat Fontanet, puis par le conseiller d'Etat Ziegler. L'on doit reconnaître que depuis lors, à quelques exceptions près, le droit de manifester est reconnu, largement employé et que lesdites manifestations ne dégénèrent que rarement, la collaboration entre les services d'ordre des manifestants et ceux de la police étant possible.
Il a donc semblé aux motionnaires que le moment était particulièrement bien choisi pour se débarrasser d'un moyen de répression, aussi violent et dangereux que l'usage de l'eau additionnée de produits chimiques, servant à disperser les manifestants. Il n'est, en effet, pas besoin d'être un grand chimiste pour pâlir à la lecture des composants utilisés, vous pouvez d'ailleurs en prendre connaissance dans le document annexé au présent rapport. Et même si la concentration des produits est minime, les accidents ne sont pas exclus, tant dans les rangs de la police lors de leur manipulation que dans ceux des manifestants lors de leur utilisation, le seuil de tolérance pouvant être très différent d'une personne à l'autre. Notons au passage que bon nombre de ces manifestations se font en famille et qu'il n'est pas rare d'y rencontrer des enfants.
Le principal débat de la commission a donc été celui de la proportionnalité et de la gradation des moyens employés. Si l'on pouvait résumer ce débat en deux questions, nous pourrions le poser comme ceci: Faut-il employer des produits chimiques pour disperser les manifestations? la réponse est non. Faut-il garder ce moyen en réserve au cas où la manifestation tournerait mal et que les représentants de la police ou la population pourrait être mise en danger? la réponse de la majorité est oui.
Une fois ces deux réponses apportées, la discussion s'est portée sur les bons et les mauvais moyens de disperser une manifestation, certains d'entre nous pensant que des jets d'eau sont amplement suffisants sans avoir besoin de leur adjoindre un gaz dangereux pouvant causer des lésions irréversibles, d'autres pensant au contraire que l'eau n'a pas d'effet dissuasif, mais suggérant tout de même une diminution du dosage de gaz dans l'eau.
Ces deux propositions ont été rejetées par les représentants de la police, de même qu'une proposition de moratoire de deux ans sur l'usage des produits chimiques, le temps de faire le point sur leur utilité.
Finalement, ce sont sans doute les représentants de la police qui ont convaincu la majorité de la commission. D'abord en assurant qu'il ne s'agissait d'un moyen utilisé que lorsqu'il n'y avait pas d'autres alternatives, mais surtout en annonçant qu'en l'absence de recours aux gaz des moyens plus violents seraient utilisés, tels que le corps à corps ou le tir de balles en caoutchouc.
C'est d'ailleurs cette dernière intervention qui a incité les motionnaires à déposer le présent rapport de minorité. Comment, en effet, céder à cette pression, par ailleurs totalement ambiguë, puisqu'il s'agit de renoncer à un moyen peu ou pas utilisé. Cela revient à dire que les politiciens qui prendraient aujourd'hui la décision de supprimer un gaz dangereux prendraient la responsabilité de voir les manifestations dégénérer et des moyens plus dangereux être utilisés (dixit les représentants de la police lors de leur audition du 28 août 1997).
Nous pensons quant à nous et en conclusion que l'usage de produits dangereux pouvant porter atteinte à l'intégrité physique pour réprimer une manifestation n'est pas digne d'un Etat démocratique et que les moyens mis à disposition de la police pour disperser les manifestants sont suffisants, que la proportionnalité doit toujours être de mise et qu'il n'y a qu'à penser au fort déploiement des forces de police, lors des manifestations pacifiques devant le consulat de France, pour se convaincre que cette proportionnalité n'est pas toujours respectée.
Cette motion aura également permis de constater que la limitation des dosages utilisés ne fait partie d'aucun règlement écrit, mais de la seule instruction orale, ce qui n'est en aucun cas acceptable s'agissant de l'utilisation de produits pouvant mettre en danger la vie d'autrui.
C'est grâce à l'insistance des députés et surtout à la persévérance du président de la commission Michel Halpérin que nous avons pu avoir accès, lors de la dernière séance, au manuel de formation au maintien de l'ordre et que l'on a pu savoir que celui-ci contenait un chapitre sur l'usage des moyens lacrymogènes liquides.
Lequel président a annoncé que la motion ne serait rejetée qu'à la condition que les directives mentionnées soient adaptées en fonction du débat de la commission et sur la base des amendements proposés, les amendements en question figurant dans le rapport de minorité.
Bien que ce débat ait permis un peu plus de transparence et engagé la police à intervenir avec plus de retenue dans les manifestations qui nécessiteraient une dispersion, la minorité de la commission persiste à penser que la police peut renoncer à l'usage des produits chimiques dans les canons à eau et elle vous prie donc, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir adopter la présente motion en la renvoyant au Conseil d'Etat.
ANNEXE
Débat
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Ce rapport est excellent et met bien en évidence le problème posé. Les incidents bernois notamment, dont tout le monde a eu connaissance, surtout le conseiller national John Dupraz - qui en a eu une intelligence presque physique et intime... (Rires.) - ont révélé un véritable problème : celui des moyens mis à disposition de la police, dont la principale mission est tout de même la défense de l'ordre public.
Cette motion semblait véhiculer des idées généreuses, mais, en réalité, les conséquences qu'aurait l'acceptation de cette dernière seraient totalement désastreuses, comme l'ont expliqué, d'ailleurs, le commandant de la gendarmerie et divers représentants de la police qui ont été auditionnés. Mme Wavre met cela particulièrement bien en lumière. Il s'agit de savoir si de deux maux on préfère le moindre.
Il s'agit d'une petite morale extrêmement connue et facile. Aujourd'hui, alors que les événements douloureux qui ont suscité cette motion se sont estompés, il en va du bon sens, de l'évidence et, disons-le, d'une certaine pesée d'intérêt. C'est pourquoi, au nom de ce qui fut la majorité - et qui, j'espère, le restera sur ce sujet - le rapport de Mme Wavre doit être approuvé.
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de minorité. Cette motion a été déposée dans un contexte particulier, à la suite des images particulièrement violentes de la manifestation des paysans à Berne. A l'époque, notre révolte était partagée par le groupe radical, qui l'avait contresignée, et par le PDC, également signataire.
Les travaux en commission ont été très complets. De notre côté, nous avons pu réaffirmer que nous ne comparions pas l'attitude de la police genevoise à celle de la police bernoise, mais que, par contre, nous partagions l'inquiétude des manifestants victimes des gaz lacrymogènes. La violente répression, lors de la manifestation contre le défilé militaire, est encore dans les mémoires.
Les produits utilisés dans ces canons à eau sont dangereux. Même si les personnes auditionnées se sont voulues rassurantes, je me suis permis d'annexer la liste des composants. Il n'est pas besoin d'être un grand chimiste pour constater qu'une erreur de dosage, même minime, pourrait se révéler catastrophique, aussi bien, d'ailleurs, pour ceux qui utilisent ces gaz que pour ceux qui les reçoivent.
La situation prévalant actuellement à Genève en matière de répression des manifestations est, à l'exception près de celle du défilé militaire, plutôt basée sur la collaboration entre les autorités et la police d'ordre des manifestations, et nous nous en réjouissons. Cela n'a pas toujours été le cas et je fais référence, dans mon rapport, à quelques précédents historiques.
Le moment nous a donc paru particulièrement bien choisi pour se débarrasser d'un moyen de répression dangereux et fort peu utilisé. Les débats en commission, que ce soit lors des travaux ou durant les auditions, ont été ceux de la proportionnalité et de la gradation des moyens utilisés.
Pour nous, minorité de l'époque et, j'espère, majorité de ce soir, l'usage de jets d'eau paraît suffisant pour disperser une manifestation qui tournerait mal, tenant compte du fait que la quasi-totalité de celle-ci se disperse sans l'intervention de la police.
Les différentes autorités policières que nous avons entendues ont demandé le maintien de l'usage de ces produits, faute de quoi le recours à d'autres types d'interventions plus violentes devrait être envisagé. On parle ici de corps à corps ou de tirs de balles en caoutchouc.
Cette affirmation - oserais-je le dire - était presque une menace, alors que, par ailleurs, on venait de nous dire que les gaz n'étaient pratiquement jamais utilisés. Elle n'a pas convaincu la minorité de la commission.
Faire porter aux députés qui prendraient une telle décision la responsabilité d'une escalade de la violence n'est tout simplement pas acceptable. Nous estimons que l'usage de gaz pouvant provoquer des lésions irréversibles est à bannir et que l'usage de produits dangereux pouvant porter atteinte à l'intégrité physique pour réprimer une manifestation n'est pas digne d'un Etat démocratique. C'est le sens de notre rapport que nous vous demandons de soutenir, en renvoyant la motion initiale directement au Conseil d'Etat.
Enfin, en prenant cette décision ce soir nous ne créons pas un précédent, puisque dans un pays voisin et pas trop éloigné - l'Allemagne - dans les Länder du nord où une majorité rose-verte gouverne, la police a renoncé à ce moyen de répression et que les manifestations ne sont pas devenues pour autant plus violentes.
M. John Dupraz (R). Je suis à l'origine de cette motion, et, dans ces circonstances, je ne participerai pas au débat et je m'abstiendrai de voter. (Quelques députés expriment leur déception.)
Mme Elisabeth Reusse-Decrey (S). Les travaux en commission ont été menés selon deux approches :
- Premièrement, celle exprimée par la police. Cette dernière nous a expliqué - Mme Fabienne Bugnon vient de le dire - que les produits chimiques étaient l'unique moyen pour elle de disperser des manifestants lorsque cela devenait nécessaire. Si elle devait renoncer à l'usage de ces produits chimiques, la matraque, les balles en caoutchouc, le corps à corps les remplaceraient. Ces méthodes impliquent des blessés éventuels.
En commission, nous n'avons pas compris pourquoi les canons à eau ayant une certaine pression non dirigée sur les gens mais à leurs pieds n'étaient pas un moyen suffisant pour disperser des manifestants. La réponse qui nous a été donnée n'était pas très claire.
- Deuxièmement, celle des dangers bien réels. Les événements qui se sont déroulés lors de la manifestation de Berne nous ont été confirmés par des documents, dont l'un d'eux figure dans les annexes du rapport de Mme Bugnon. Il y est dit que ces substances sont dangereuses. Si le produit atteint les yeux, il faut les rincer abondamment avec de l'eau jusqu'à l'arrivée du médecin. Si des vêtements sont salis par le produit, il faut les enlever immédiatement et laver la peau avec du savon et de l'eau.
Que faire avec ces deux approches tout à fait antagonistes ? A Genève - nous dit-on - le risque est minime. Le produit est dosé grâce à des mélangeurs fort bien réglés. De toute façon, il existe les sommations d'usage. Mais on nous informe, lors de la même audition, que si la manifestation a mal tourné lors du défilé militaire, c'est en raison d'une panne du mélangeur, et les canons à eau ne contenaient donc plus de produits chimiques.
La mécanique peut donc avoir des failles ! Lorsqu'elles mettent en danger des personnes, notre devoir est de faire d'autres choix. Dès lors, ce soir, le parti socialiste dira non aux produits chimiques dans les canons à eau de la police genevoise et oui à cette motion.
Par contre, si la police est en grand souci de se voir privée d'un moyen essentiel pour gérer les manifestations, nous ne serons pas opposés, à l'avenir, à étudier d'autres propositions sur ce thème soumises par le Conseil d'Etat.
M. Rémy Pagani (AdG). Quelle ne fut pas ma surprise, lors de la lecture de ce projet de motion, en relevant qu'il n'y avait plus de majorité... J'ai participé à de nombreuses manifestations...
Une voix. Ah, voilà !
M. Rémy Pagani. A plusieurs reprises, j'ai été gazé, matraqué... (Protestations dans la salle.) En lisant cette motion, j'ai consulté mes fiches de police, afin de situer les dates auxquelles nous - qui sommes assis sur ces bancs - avions été gazés et matraqués.
Une voix. Arrête !
M. Rémy Pagani. Je vous passe la liste de ces nombreuses manifestations. Toutefois, je désire apporter le témoignage de ceux qui y ont participé et pourquoi ils l'ont fait. Je ne prendrai qu'un seul exemple : j'avais 16 ans et je me suis battu pour un centre autonome à la maison des jeunes. Depuis de nombreuses années, un centre autonome existe à l'Usine et il ne pose aucun problème. Pourtant, à l'époque, nous nous étions fait gazer et matraquer par M. Schmitt que nous appelions «Schmitt-la-matraque».
Lors de ces trente dernières années, la police a eu une attitude manichéiste envers les manifestants en les maintenant à distance. Aujourd'hui, elle a modifié son comportement, en ce sens qu'elle envoie le chef de la police discuter avec les manifestants lors des manifestations. Nous devons cette remarquable innovation à M. Baer.
Lors de la venue des étudiants dans la cour de l'Hôtel-de-Ville, nous avons montré qu'il ne fallait ni les repousser ni les maintenir à distance, mais qu'ils avaient aussi le droit, en montant à la tribune, de s'exprimer et de dialoguer avec nous.
Je ne prétends pas avoir de solutions, mais il convient de chercher des pistes pour entrer en contact avec les manifestants, afin qu'ils expriment leurs opinions qui, bien souvent, sont rapidement suivies. De ce point de vue, je trouve inadmissible l'usage de gaz lacrymogènes et l'utilisation des tonnes-pompes. Dans d'autres pays, et en Angleterre notamment, la police utilise d'autres moyens, dont le dialogue avec les manifestants, afin d'apprécier la validité de leurs revendications. Notre groupe soutiendra cette motion.
M. Olivier Vaucher (L), rapporteuse. Comme Mme la rapporteuse Bugnon l'a dit, fort justement, une erreur de dosage pourrait être dramatique. C'est pour cette raison que la police - ayant pris conscience de ce problème - a nommé des équipes spécialisées pour ce genre d'activité extrêmement rare, et qui s'entraînent sous l'ordre d'un officier supérieur. A l'intérieur du corps de police, n'importe qui ne peut pas manipuler ces produits. Ces équipes sont parfaitement bien entraînées et tout à fait aptes à cette manipulation. Mais il est vrai qu'un risque subsiste.
Madame la députée, vous avez cité l'exception - j'ai remarqué que dans vos rangs, on sait citer l'exception et non la généralité. En Allemagne - ce pays est l'un des rares en Europe à procéder ainsi - certains Länder n'utilisent plus les produits chimiques mélangés à l'eau ni les gaz lacrymogènes. Par contre, ils se sont munis de canons à eau beaucoup plus puissants et plus coûteux que les nôtres. Si un jour nous voulons pourvoir aux besoins de la police en achetant un tel matériel, il faudra revoir le budget affecté à ce département.
Mme Reusse-Decrey a dit que nous n'avions pas donné de réponse sur la manipulation et les effets exacts de ces gaz. La police a décrit les moyens utilisés et dans quelles circonstances ils l'étaient à Genève, de façon extrêmement rare. Cela pour répondre aux différentes interventions.
A ce jour, l'usage de substances lacrymogènes n'a été prohibé dans aucun canton suisse. Généralement, dans les pays européens, la règle est d'avoir recours à ces produits. Dans le rapport - que j'ai lu attentivement - il est démontré que la police genevoise sait utiliser ces procédés avec discernement. Cependant, si l'on tient à remplacer l'usage des gaz lacrymogènes, il faut revoir les moyens de répression à utiliser dans les manifestations. Le point fort de cette réorganisation est d'augmenter l'effectif actuel de la police. Le non-recours aux moyens lacrymogènes impliquerait un accroissement important des effectifs, dont nous ne disposons pas à Genève. En effet, aujourd'hui, la police ne peut pas répondre aux manifestants avec des hommes.
Les manifestations qui ont eu lieu à Genève auraient pu être beaucoup plus violentes si la police n'avait pas utilisé les gaz lacrymogènes, dans les rares cas où ils ont été utilisés. D'ailleurs, le canton de Genève est celui dans lequel se déroulent le plus de manifestations. En effet, à Genève, cent vingt-cinq manifestations ont eu lieu en 1997, contre quarante-quatre à Zurich, durant la même période.
Les députés sur les bancs d'en face ont évoqué les problèmes rencontrés par la gauche et liés à cette motion. A Zurich, lors de la manifestation extrêmement violente du 1er mai 1996, le Conseil municipal a nommé une commission, dont la présidente était une personne de l'Alliance de gauche qui a finalement conclu, dans son expertise, au maintien des gaz lacrymogènes dans le cas de manifestations de ce genre.
En conséquence, nous devons laisser à notre police le choix des moyens adéquats pour juguler la violence, ceci aussi bien dans son intérêt que dans celui de la population.
Pour terminer, il est mentionné dans le rapport que ces produits chimiques sont quasiment inopérants lors de températures extrêmement basses... En guise de boutade, je conseille aux manifestants d'organiser les manifestations par des températures inférieures à zéro !
Le président. Certains membres du Bureau me prient de vous faire part de leur regret de ne pas disposer, lors de certains débats, de canons à eau, précisément pour les abréger...
M. Bernard Lescaze (R), rapporteur de majorité. Je m'étonne de l'angélisme de ce Grand Conseil et du nombre de spécialistes en manifestations publiques et en maintien de l'ordre qui s'y trouvent.
Pour ma part, je n'ai pas les souvenirs d'ancien combattant de M. Dupraz ou de M. Pagani. D'ailleurs, ce dernier ne semble pas en avoir gardé des séquelles irréversibles... (Manifestation de doute dans la salle.) ...vu l'agilité intellectuelle, dont il fait preuve ! En tout cas, sa recette pour le maintien de l'ordre ne devrait pas nous coûter très cher, puisque, à son avis, il faudrait supprimer la police et n'en garder que le chef qui viendrait arrêter la manifestation avant qu'elle ne se déroule. Malgré tout, cela me paraît un petit peu simpliste...
Certes, il ne fait jamais bon prendre ce genre de produits chimiques dans les yeux. N'oublions pas que, à la base de ces produits se trouve le chlore qui sert à la purification de l'eau des piscines et qui a commencé sa carrière de produit chimique pour soigner les blessés à la fin de la première guerre mondiale.
Puisqu'on en est aux souvenirs historiques, et pour le Mémorial, je ne puis m'empêcher de dire qu'il existe de véritables légendes. En effet, Mme Fabienne Bugnon, qui cite : «M. Schmitt conseiller d'Etat», Schmitt-la-matraque, n'orthographie même pas correctement son nom ! (Protestations.)
Malgré son surnom, si les manifestations de 1968 et 1969 n'ont pas dégénéré à Genève - bien qu'elles fussent assez vives - à une époque où l'on avait moins le souci du maintien de l'ordre avec des mesures plus apaisantes comme celles employées ensuite - car même dans les techniques de maintien de l'ordre on fait des progrès - M. Schmitt ne méritait certainement pas le surnom dont il a été affublé.
Pour en revenir au thème du débat, je dis, au nom de Mme Michèle Wavre, qu'une pesée d'intérêts est à faire. Vous ne pouvez pas vous contenter d'être angéliques. Il s'agit d'avoir un principe de proportionnalité, de gradation, tel qu'il a été développé dans la motion.
La police a souligné que - mais chacun et chacune d'entre vous peut penser que c'est exact - le pire des dangers serait la mise en contact direct, «corps à corps» des manifestants et des forces de l'ordre. En effet, au moment du «corps à corps», il est beaucoup plus difficile de maîtriser ses pulsions que lorsque l'adversaire est à 10 ou 20 mètres. (Huées. Rires.) C'est vrai dans une chambre à coucher, également dans la rue !
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de minorité. Je remercie l'excellent remplaçant de la rapporteuse de majorité pour ses paroles.
Si j'ai estropié le nom de M. Schmitt, qui, lui, a failli m'estropier au moment de la défense du Prieuré, je m'en excuse, mais uniquement d'avoir estropié son nom. Pour le reste, je ne regrette pas d'avoir fait référence à l'histoire.
Par rapport à notre cher et impayable ami Vaucher... L'erreur est humaine, Monsieur Vaucher ! Je n'ai jamais dit que les gens qui utilisaient ces appareils n'étaient pas qualifiés. Simplement, l'erreur est humaine, comme pour chacun d'entre nous, et nous avons pu constater - chose assez grave - qu'il n'existait même pas de directives écrites. C'est suite aux demandes du président de la commission, M. Halpérin, que nous avons obtenu des directives écrites. Il n'est pas question de remettre en cause les qualifications des gens utilisant ces produits, mais il ne faut jamais oublier que l'erreur est humaine et que le risque existe.
M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Vous ne m'en voudrez pas de dire, en préambule, que, dans ce débat, il y a huit cents gendarmes dont tout le monde se fout.
Mon problème est de savoir, en fonction de la mission qui incombe à la police genevoise, si je peux admettre des mesures qui ont pour conséquence de mettre en danger les policiers genevois.
On pourrait dire aussi que ce débat est surréaliste, car il s'agit d'un non-problème. A Genève, il n'y a jamais eu un seul problème avec les gaz lacrymogènes. Notre politique est exactement la même que dans tous les cantons suisses, y compris ceux qui, comme à Genève, ont une majorité de gauche. Tout à l'heure, allusion a été faite à Zurich où même les membres de la commission qui a traité les incidents du 1er mai nous recommandent de conserver nos moyens. Chaque année, c'est rebelote ! Je peux vous annoncer que le 1er mai 1998 vous aurez une bagarre à Zurich qui coûtera quelques dizaines de milliers de francs en réparation des dommages. Chaque année, cela recommence et, néanmoins, la commission indique qu'il faut au minimum conserver nos moyens. Notre système est le même que partout en Suisse et presque partout en Europe, à part un Länder que vous avez cité, au nord de l'Allemagne.
Si nous ne giclons pas un brouillard, alors il faudra gicler de l'eau. Avez-vous déjà vu le jet sortant d'une lance de pompier ? Voulez-vous vraiment cela ? J'ai peine à le croire ! L'essentiel pour moi est de vous mettre devant votre responsabilité. Je sais que vous ne voterez jamais un accroissement des effectifs de la police, pas plus que des budgets pour remplacer les canons formant un brouillard d'eau par des canons projetant de l'eau à grande puissance. Par conséquent, vous ne voterez jamais non plus les modifications de nos véhicules. Toute cette discussion repose en fait sur le point suivant :
Lorsqu'une manifestation se déroule, il est dans l'intérêt de tous qu'une distance soit respectée entre le barrage et les manifestants.
Monsieur Pagani, vous avez fait allusion à la négociation et, venant de vous, cela me fait un plaisir très particulier. Sauf pour l'une de vos manifestations, nous n'avons jamais eu de problèmes de dialogue avec vos manifestants. J'ai dit à notre excellent collègue Vanek... - qui n'est pas là ce soir - (Protestation de M. Pierre Vanek, debout derrière les bancs de l'Alliance de gauche.) ...que, à plusieurs reprises, nous avions eu des problèmes avec ses manifestations. J'indique ici que les choses se sont bien passées en raison du fait que presque jamais il n'y a eu d'affrontements ni de contacts entre les barrages et les manifestants.
Si vous désirez supprimer cette distance et enlever à la police le seul moyen dont elle dispose pour la maintenir ou si, par hypothèse, vous voulez que l'on remplace le brouillard lacrymogène par des balles en caoutchouc - comme cela se fait dans d'autres villes de Suisse - dites-le franchement ! Mais ce n'est pas raisonnable.
Je connais les tactiques employées à Berne. Elles ont souvent des effets négatifs. Il y a des blessés. La ville de Zurich connaît le même problème, car il y a souvent des affrontements, des heurts, des blessés.
J'ai autorisé une quantité industrielle de manifestations dans notre ville de Genève, car j'estime qu'on a le droit de s'exprimer. Dans une ville internationale, on a aussi le droit de dire, dans les formes, au milieu international ce que l'on pense.
Quant au résultat de ce vote, si vous deviez priver la police d'un moyen extrêmement «soft» de maintenir l'ordre, il conviendrait de reconsidérer deux éléments :
- Premièrement, il faudra revoir le comportement de la police. Un gendarme blessé, cela ne m'amuse pas du tout. D'ailleurs, je ne suis pas certain que la révision de ce comportement soit une bonne chose pour tout le monde.
- Deuxièmement, il conviendra de revoir notre politique en matière de manifestations, car s'il y a des heurts cent vingt-cinq fois par an, ce sera un peu excessif.
A la tête de ce département, j'ai une mission d'ordre public. La police évolue et prend un virage essentiel : celui d'une police de proximité qui cherche les contacts. Vous, Monsieur Pagani, qui êtes un expert «es squats», vous savez bien que j'ai une brigade de nounous qui s'occupe des squatters, les chouchoute, les contacte, les écoute... (Rumeurs de désapprobation.) ...les avertit. C'est grâce à cette brigade qu'un seul, voire deux squats sur cent sont expulsés par la force.
A vous de choisir la politique et la police que vous voulez. Toutefois, vous devez savoir que je ne privilégierai jamais les manifestants par rapport à mes policiers, car visiter des policiers à l'hôpital est inacceptable, si c'est au nom d'un projet de loi, comme celui-ci, qui me paraît aller à l'inverse de ce que vous pourriez souhaiter. Je vous fais confiance. Je ne me fais pas d'illusions. Ne vous en faites donc aucune à mon sujet ! (Applaudissements.)
Le président. Je mets aux voix cette proposition de motion et les conclusions du rapport de majorité, à savoir le rejet de cette motion.
Le résultat est douteux.
Il est procédé au vote par assis et levé.
Le sautier compte les suffrages.
Mise aux voix, cette motion est adoptée par 46 oui contre 39 non.
Elle est ainsi conçue :
MOTION
visant à supprimer l'utilisation des produits chimiquesdans les canons à eau de la police genevoise
LE GRAND CONSEIL,
considérant:
- que la police cantonale genevoise dispose de véhicules équipés de canons à eau;
- que ces véhicules sont utilisés pour disperser les manifestations;
- que l'eau projetée sur les manifestant(e)s est mélangée à des substances chimiques pouvant entraîner des lésions corporelles graves (brûlures de la peau, des yeux, des voies respiratoires);
- que les conséquences résultant de l'usage de ces mélanges par la police bernoise en octobre 1996, ayant laissé à certaines personnes des séquelles irréversibles, sont intolérables,
invite le Conseil d'Etat
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La mémorialiste:
Françoise Chételat
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Le numéro 12 F
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