Séance du
jeudi 22 janvier 1998 à
17h
54e
législature -
1re
année -
4e
session -
1re
séance
PL 7758
LE GRAND CONSEIL
Décrète ce qui suit:
Article unique
La loi sur le réseau des transports publics, du 17 mars 1988, est modifiée comme suit:
Art. 12 (nouveau)
1 La réalisation d'un métro automatique léger est abandonnée et toute référence à ce mode de transport est éliminée dans la loi.
2 Le plan du réseau futur à l'horizon 2005 annexé à la loi est modifiée comme suit:
- la ligne de métro automatique léger Meyrin-Cornavin-Rive est remplacée par une ligne de tramway, le site de la ligne restant inchangé.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Le Grand Conseil a approuvé le 12 février 1993 un plan de réseau des transports publics à l'horizon 2005 comportant:
- une extension du réseau tramway avec la création de la ligne 13 et ses prolongements en direction de Sécheron, d'une part, et en direction des Acacias et de Lancy, d'autre part;
- la réalisation d'une ligne de métro automatique léger reliant Meyrin à Rive, en passant par la gare de Cornavin.
Aujourd'hui, il apparaît manifeste que l'Etat n'a pas les moyens financiers pour réaliser une ligne de métro automatique léger, type VAL. Il convient donc de renoncer à ce projet et de lui substituer une ligne de tramway ayant le même objectif de relier Meyrin à Rive en passant par la gare de Cornavin, ce qui est l'objet du présent projet de loi et peut se faire sans procéder à une nouvelle enquête publique, puisque le tracé de la ligne, qui en est au stade d'un plan d'intention, n'est pas modifié, seul le mode de transport étant différent de celui prévu en 1995.
Rappelons qu'en tout état de cause, le projet définitif de ligne de tramway devra être mis à l'enquête publique une fois qu'il sera élaboré.
Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que ce projet de loi fera l'objet d'un bon accueil de votre part.
Préconsultation
M. Christian Grobet (AdG). L'exposé des motifs de ce projet de loi étant relativement succinct, je voudrais donner quelques explications et, surtout, apporter quelques précisions.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que c'est en 1975 - il y a plus de vingt ans - que le plan directeur des transports insistait sur la nécessité de développer le réseau des transports publics pour faciliter les déplacements à Genève et éviter que les transports individuels ne soient bloqués par l'augmentation de la circulation automobile.
Cette conclusion, qui avait été admise par ce Grand Conseil, a donné lieu au lancement de l'initiative pour des transports publics efficaces visant au développement du transport par tramway sous la forme d'une croix ferroviaire, c'est-à-dire avec deux branches supplémentaires à la ligne de tram 12, une allant en direction de Meyrin - c'était la priorité - l'autre en direction d'Onex.
En 1985, M. de Tolédo a réussi à convaincre ce Grand Conseil de voter une motion pour étudier un mode de transport effectivement extrêmement intéressant : le métro automatique léger, c'est-à-dire un métro en site propre intégral souterrain sans conducteur, pour ce qui est de la ville, comme fonctionne le VAL à Lille. Ce système était néanmoins d'un coût extraordinairement élevé.
Les partis de l'Entente ont toujours proclamé leur foi dans ce mode de transport, ce qui a amené ce Grand Conseil, en février 1993, à voter un plan de développement des réseaux des transports publics du réseau lourd en misant à la fois sur le métro automatique léger, avec une ligne qui aurait dû aller de Meyrin jusqu'à Rive, en passant par Cornavin, et sur l'extension du réseau tramway existant, avec la ligne 13 allant du rond-point de Plainpalais à Cornavin, avec des extensions en direction de la place des Nations, d'une part, et en direction des Acacias et de Lancy, d'autre part.
A peine cette loi avait-elle été adoptée, en février 1993, que le Conseil d'Etat élu lors de la dernière législature a remis en cause le plan voté par le Grand Conseil en lançant l'étude d'un métro léger - non pas un métro automatique léger - qui est en fait une autre appellation du tramway, visant à créer une ligne entre la gare des Eaux-Vives et Annemasse, avec un prolongement de cette nouvelle ligne par la ligne de tram 12 et le pont de la Coulouvrenière jusqu'à Cornavin.
A l'époque, nous avions immédiatement mis en garde le Conseil d'Etat sur le fait qu'il avait choisi une solution qui n'avait pas été retenue par le Grand Conseil - c'était un doublon de la ligne 12, alors qu'il était beaucoup plus simple de prévoir la prolongation de la ligne de tram 12 à Moillesulaz en direction de Gaillard - et, surtout, qu'il avait choisi la solution la plus difficile - en prétendant commencer les travaux deux ans plus tard. Il n'y avait en effet pas de solution plus difficile, puisqu'elle impliquait l'accord des Français, un accord franco-suisse devant être adopté par les parlements des deux pays, et qu'elle impliquait, surtout, la désaffectation d'une ligne ferroviaire importante pour l'avenir de Genève au profit d'une solution de rechange appelée «Le Barreau-La Praille-Archamp», pour laquelle nous n'avons aucune garantie que la Confédération voudra la prendre en charge.
Le président. Monsieur le député, je vous prie de conclure. Je vous rappelle que nous sommes en débat de préconsultation et que le temps de parole est de cinq minutes.
M. Christian Grobet. Ah, je l'ignorais, Monsieur le président !
Le président. Nul n'est censé ignorer le règlement !
M. Christian Grobet. Vous avez parfaitement raison, Monsieur le président ! Mais on aurait pu gagner un peu de temps si chacun le maîtrisait en matière d'élections...
Je terminerai en disant que nous proposons à travers ce projet de loi de substituer une ligne de tramway à la ligne de métro automatique léger, qui avait été votée en février 1993 pour relier Meyrin au Centre-Ville - ce qui était la priorité depuis vingt ans. Mais il ne suffit pas de décider de substituer le tramway au métro automatique léger, il faudra effectivement modifier le plan annexé à la loi - nous ne l'avions pas fait par manque de moyens - en prévoyant que ce tramway passe par le pont du Mont-Blanc, et non pas sous le lac, bien entendu, et qu'il suive la ligne directe allant du Bouchet à Meyrin, sans reprendre le crochet par Cointrin tel qu'il avait été prévu en 1993.
Je pense, Mesdames et Messieurs les députés, que le renvoi de ce projet de loi en commission permettra de clarifier les choses et de demander au département compétent de dresser un plan modifié qui corresponde à la proposition contenue dans ce projet de loi.
M. Christian Brunier (S). Ce projet de loi me paraît tout à fait simple. Depuis plusieurs années, on nous parle d'un métro léger qui traverserait notre canton de l'Ain jusqu'à Annemasse. Or ce projet - il faut bien le constater - stagne. Le but de notre projet de loi est simplement de faire avancer les choses, de débloquer la situation.
Pour cela nous privilégions le trajet sur lequel il y a le moins d'obstacles au niveau des acteurs régionaux. Je vous rappelle que nos amis de l'Ain soutiennent l'axe Meyrin-Cornavin, alors que l'axe en direction d'Annemasse est aujourd'hui contesté par nos voisins hauts-savoyards. Nous n'allons donc pas continuer à bloquer un dossier dans son ensemble alors que nous pouvons déjà concrétiser un axe non négligeable : celui de Meyrin-Cornavin.
M. Ramseyer affirmait, à la Chambre de commerce et de l'industrie, à propos de ce projet, je cite : «Pour chaque projet, il y a un moment pour décider. Aujourd'hui l'opinion publique se pose la question si oui ou non nous sommes capables de prendre une décision.» Eh bien, Monsieur Ramseyer, la nouvelle majorité propose de décider et de démarrer en conséquence au plus vite la construction de l'axe Meyrin-Cornavin et cela - c'est un point important - en conservant une vue globale, donc une vue régionale du projet.
L'autre aspect de ce projet de loi est une clarification de terminologie. A mon avis, personne ne sait ce que signifie TCSP. Métro léger est une appellation assurément trompeuse. Moi, personnellement, je préférerais «tram rapide», mais je suis sûr que la commission arrivera à trouver un nom éloquent et simple.
Le groupe socialiste vous invite donc à renvoyer ce projet à la commission des transports.
M. Antonio Hodgers (Ve). La grande partie de ce que je voulais dire a été exprimée par mes préopinants.
Je rappellerai donc simplement quelle est notre volonté politique concernant ce métro léger, tram ou TCSP... Appelez-le comme vous voulez !
Nous sommes tous d'accord sur la priorité à donner à l'axe Meyrin-Cornavin, cela pour deux raisons principales. D'une part, comme vient de le dire mon collègue M. Brunier, nous pouvons aller de l'avant sur ce projet, sans attendre d'être entièrement d'accord avec nos voisins français. D'autre part - c'est important de le souligner - le bus reliant actuellement Meyrin au Centre-Ville est bondé aux heures de pointe. Il est donc primordial de faire face à cette demande accrue assez rapidement pour éviter que les gens ne se détournent des moyens de transport en commun.
D'ailleurs, à ce sujet et en tant que Meyrinois, je me permets d'interpeller une nouvelle fois M. Ramseyer. Devrons-nous attendre la mise en service du nouveau métro léger pour avoir un service de transport de qualité digne de ce nom à Meyrin ? J'espère que non !
Enfin, il me semble également important de privilégier la consultation de tous les partenaires intéressés, lors des débats et discussions que nous aurons autour de ce métro léger ainsi que des autres développements des transports publics à Genève, notamment sur le tronçon Genève-Annemasse - débat qui est loin d'être clos.
M. Pierre Froidevaux (R). Le temps n'est plus à la magnificence des transports publics. Pourtant, il n'en a pas toujours été ainsi.
Le 13 février 1993, au lendemain de l'adoption par notre Conseil du plan de réseau des transports publics genevois, la presse pouvait titrer : «Genève aura son métro !».
Sous le titre, on pouvait trouver des photos de différents projets plus splendides les uns que les autres comme le VAL cité par les auteurs de ce projet de loi, dans leur exposé des motifs. Mais, en deuxième page, la presse s'interrogeait déjà du règlement de la facture... d'un milliard de francs proposé par le chef du DTP d'alors !
Lorsque l'actuel responsable de ce dossier, M. Gérard Ramseyer, a repris cette affaire, le projet a dû être sensiblement modifié, afin de le rendre compatible avec nos finances déliquescentes. Le tracé initial a certes été maintenu dans ses options, mais amélioré dans sa finalité. Le métro léger était prévu rapide en périphérie et plus lent au centre, afin de mieux le desservir tout en le rendant accessible quant à son coût.
Votre projet de loi sent le retour aux bons vieux tramways. On ne peut, dès lors, que le qualifier de «passéiste», calqué qu'il est sur l'éternelle rengaine, ou refrain unique : «patrimoine vivant vaincra». Il s'agirait de faire revivre les tramways sur ce tracé comme au début du siècle... Comme au début du siècle, il s'arrêterait tous les 600 mètres, faisant baisser la vitesse commerciale de deux tiers vis-à-vis du métro léger prévu. Ainsi, pour des investissements identiques, voire supérieurs, cette nouvelle desserte serait sans attrait.
Ces investissements ne concurrenceraient même pas les bus actuels desservant Meyrin. Vous continuez de croire qu'il est possible de jeter l'argent qu'on n'a pas. M. Segond a bien su trouver 18 millions pour vous, mais je reste absolument sûr qu'il ne vous trouvera pas le demi-milliard nécessaire pour, en plus, ne rien faire. Vous ne le trouverez pas davantage chez le contribuable genevois. Ses ressources ont été rendues exsangues tant par la situation internationale que par le déséquilibre public privé, que vous voulez encore continuer d'aggraver sans même satisfaire le besoin légitime des usagers des transports publics.
Etudions tout de même ce projet de loi en commission. Il est à espérer qu'alors cette munificence deviendra «minificence», mais les investissements de l'Etat deviendront services publics et non plus charges publiques !
M. Gérard Ramseyer, président du Conseil d'Etat. Personne ne conteste la nécessité de modifier le plan annexé à la loi sur le réseau des transports publics, afin de renoncer au métro automatique léger qui était prévu pour 2005 entre Meyrin et Rive. Ce projet est trop cher... Il est même exorbitant ! Et il n'est pas rationnel d'introduire un mode de transport public incompatible et sans connexion avec le réseau à voies métriques.
Le projet est prêt. Le Conseil d'Etat l'a déjà examiné, et je souligne le climat positif avec lequel le gouvernement aborde ce dossier. Le projet de loi du Conseil d'Etat figure à l'ordre du jour de votre session de février.
En fait, il y a deux options : celle du Conseil d'Etat qui consiste à inscrire dans le plan annexé à la loi la totalité de la ligne franco-genevoise, avec l'idée de commencer par le tronçon Meyrin-Cornavin, tout en conservant l'objectif et l'intention de réaliser la totalité de la ligne dans le délai prévu.
Et puis, il y a une seconde option, en filigrane dans le projet de loi 7758 : elle consiste à remplacer la ligne de métro automatique léger par une simple branche de réseau de tram entre Meyrin et Cornavin. De l'avis du Conseil d'Etat, c'est une option frileuse, étriquée, totalement insuffisante du point de vue du transfert modal souhaitable et du point de vue de notre ambition pour les transports publics, car l'option exposée à l'instant par M. Grobet tourne le dos à la dimension de l'agglomération genevoise qui est transfrontalière.
Nous en débattrons en commission, mais vous aurez, Mesdames et Messieurs les députés, déjà noté que tant M. Brunier que M. Hodgers évoquent un projet global, ce qui n'est pas le cas du projet qui vous est soumis aujourd'hui, avant son renvoi en commission.
Ce projet est renvoyé à la commission des transports.