Séance du vendredi 24 janvier 2025 à 18h
3e législature - 2e année - 9e session - 53e séance

M 2918-A
Rapport de la commission de l'économie chargée d'étudier la proposition de motion de Christina Meissner, Claude Bocquet, Marjorie de Chastonay, Marta Julia Macchiavelli, David Martin, Maria José Quijano Garcia, Yves de Matteis pour une limitation stricte des vols de nuit
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session I des 2 et 3 mai 2024.
Rapport de majorité de M. Jacques Béné (PLR)
Rapport de minorité de M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve)

Débat

Le président. Mesdames et Messieurs, nous passons à la M 2918-A, qui est classée en catégorie II, trente minutes. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. C'est une proposition de motion qui date un petit peu. Nous avions reçu en commission M. Schneider, l'ancien directeur général, et l'ancien président du conseil d'administration de Genève Aéroport. Ce texte serait probablement refusé si le vote avait lieu aujourd'hui, mais étant donné qu'il y a un nouveau directeur général et une nouvelle présidence, je pense qu'on pourrait faire le point sur la situation actuelle de l'aéroport et des vols de nuit. L'aéroport a en effet déjà envoyé des communiqués de presse... (Brouhaha.)

Des voix. Chut !

Le président. Oui, s'il vous plaît !

M. Jacques Béné. ...il y a eu des interviews du nouveau directeur général; je vous propose donc de renvoyer cette motion à la commission de l'économie. (Commentaires.)

Une voix. Non !

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Chères et chers collègues... (Brouhaha.)

Le président. Est-ce que vous pouvez vous taire, s'il vous plaît !

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Je vous remercie, Monsieur le président. Vu que je suis plus souvent au Grand Conseil que devant ma classe, j'ai perdu l'habitude de parler dans le brouhaha ! (Commentaires.)

Le président. Attendez, Monsieur le député, attendez ! Est-ce que vous pouvez vous taire, s'il vous plaît ! Le groupe socialiste, vous pouvez vous asseoir et écouter ?

Une voix. Mais on se tait !

Le président. Je vous en prie, Monsieur le député.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Merci, Monsieur le président. L'entrée dans le débat est un petit peu abrupte, mais il faut convenir que les choses changent et les positions évoluent, le rapporteur de majorité l'a très bien dit. Vous avez toutes et tous pris connaissance de cette fameuse interview de M. Rufenacht et de sa volonté de privilégier le qualitatif au quantitatif. Cela fait suite - du moins en paroles, et on l'espère en actes - à la volonté exprimée par la population, qui a approuvé en 2019 l'initiative pour un pilotage démocratique de l'aéroport. Dans ce contexte, il est effectivement tout à fait opportun d'auditionner le nouveau directeur général et le nouveau président de l'aéroport pour faire le point et pour renforcer notre adhésion à ce texte. Nous voterons donc le renvoi en commission.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote sur le renvoi. S'il vous plaît, Monsieur le député, vous pouvez vous asseoir ? Merci. Vous aussi, Monsieur le député ! Nous allons voter ! (Remarque.) Est-ce que vous pouvez vous asseoir ? Bien.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2918 à la commission de l'économie est rejeté par 50 non contre 35 oui.

Le président. Nous poursuivons les débats; la parole est au rapporteur de minorité.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Monsieur le président, ça ira très bien ainsi également. Figurez-vous, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, que nous sommes ici à moins de 5 kilomètres de la piste d'atterrissage et de décollage de l'aéroport. C'est sans doute une situation unique qu'un parlement se situe à la fois au centre-ville et si près d'un aéroport.

Cet aéroport est un outil précieux pour notre ville: c'est un outil qui permet de la connecter au monde, qui lui permet sans doute d'être une des capitales des relations internationales, mais aussi d'être un centre d'affaires et d'avoir une économie florissante. Nous en sommes tout à fait conscients.

Mais un aéroport à proximité du centre-ville engendre également une responsabilité pour nous, notamment s'agissant de la qualité de vie des Genevoises et des Genevois, de la qualité de leur sommeil, et je pense en particulier à celles et ceux qui habitent dans l'axe d'atterrissage et de décollage. Vous avez toutes et tous vu ces cartes, qui s'étendent de Chancy jusqu'à Hermance et couvrent une bonne partie de notre canton. Dans ce contexte, la motion déposée il y a quelques années par le PDC, qui à l'époque n'était pas rebaptisé, propose simplement de poser un principe qui, pour reprendre les termes de notre collègue Zweifel, est de bon sens: pendant la nuit, les gens ont le droit de dormir. Les bornes qu'elle fixe pour cette nuit sont somme toute relativement modestes puisque celle-ci s'étendrait de 22h à 6h.

L'ancienne direction de l'aéroport nous a effectivement dit que ça aurait des effets dramatiques sur le fonctionnement de l'aéroport et sur les compagnies aériennes, tout en nous indiquant lors de la même audition que les vols décollant après 22h sont désormais très rares - en définitive, il n'y a que ce fameux avion qui rejoint trois ou quatre fois par semaine Addis Abeba ou des vols en retard - et qu'environ 5% des vols atterrissaient après 22h. L'effet mathématique et économique d'une telle mesure est donc complètement marginal sur la marche des affaires de l'aéroport, mais par contre extrêmement précieux en matière de santé publique. Ce qui fait que lorsqu'on met les choses dans la balance, il semble absolument évident qu'il faut soutenir ce texte.

Tant l'OFAC que l'aéroport ont fourni des éléments sur la nature économique des compagnies qui volent après 22h et bien souvent après 23h - et même parfois après minuit ! En définitive, lorsque vous regardez les horaires de l'aéroport de Genève, il s'agit à plus de 80% de compagnies low cost, des compagnies dont le modèle d'affaires est basé sur un nombre très important de rotations, sur des temps très courts passés dans les aéroports pour pouvoir baisser les prix et faire des offres commerciales défiant toute concurrence...

Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Monsieur.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. ...mais qui font concurrence à la fois au trafic ferroviaire et à tous les commerçantes et commerçants de notre canton - une concurrence particulièrement déloyale puisqu'on incite les gens à aller manger une pizza à Rome ou à faire du shopping à Porto ! (Remarque.) Ce modèle d'affaires, nous le contestons; ça fait longtemps que nous le disons de manière extrêmement claire. Et nous estimons qu'il n'y a pas grand-chose à perdre à proposer à ces compagnies un modèle d'affaires plus équitable, basé sur les véritables besoins en matière de voyages et non sur des effets d'opportunité.

Par ailleurs, et je finirai là-dessus, il a aussi été mentionné qu'un certain nombre de Genevois ont besoin de vols tardifs pour revenir de hubs internationaux. Je vous invite, Mesdames et Messieurs, à regarder les horaires des aéroports de Roissy, de Francfort, de Zurich, de Schiphol: aucun vol intercontinental n'arrive après 19h-19h30, pour la simple et bonne raison que par le jeu du décalage horaire, tous ces vols sont des vols de nuit et qu'ils arrivent le matin dans les grandes capitales européennes. De fait, aucune compagnie opérant des relations intercontinentales n'a de vols si tardifs à Genève. Pour toutes ces raisons, il faut évidemment soutenir cette motion. Je vous remercie.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est au rapporteur de majorité.

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Normalement, c'est le rapporteur de majorité qui prend la parole en premier, mais comme ça...

Le président. Vous avez pris la parole en premier: vous avez demandé un renvoi en commission, Monsieur !

M. Jacques Béné. Oui, et après...

Le président. Mais vous avez pris la parole en premier !

M. Jacques Béné. ...si le renvoi n'est pas accepté...

Le président. Eh bien vous auriez pu parler et après demander le renvoi ! Merci.

M. Jacques Béné. D'accord. J'aurais pu aussi, effectivement. Il faut rappeler que les heures d'ouverture de l'aéroport sont définies par le plan sectoriel de l'infrastructure aéronautique (ce qu'on a l'habitude d'appeler le PSIA), adopté en novembre 2018 par la Confédération, qui spécifie que l'exploitation doit se poursuivre dans le cadre actuel. Genève Aéroport a toutefois réduit les créneaux disponibles entre 22h et 24h, il a même renoncé à la tranche 5h-6h et contraint à l'utilisation d'avions modernes pour les vols après 22h.

D'ailleurs, le dernier communiqué de presse de l'aéroport, qui date du 16 janvier 2025, mentionne que le nombre de passagers est inférieur de 0,73% et le nombre de mouvements en recul de 3,73%. Il y est aussi indiqué que des avions plus grands sont utilisés, que le taux de remplissage est en hausse et que Genève Aéroport a une politique financière qui incite les compagnies aériennes à augmenter le taux d'occupation par avion. Et puis, en 2024, le nombre de décollages après 22h est en baisse de 36,16% par rapport à 2023 et la part d'avions de dernière génération, qui font beaucoup moins de bruit (les voisins de l'aéroport pourront vous le dire, le bruit a considérablement diminué en dix ans), est en hausse de 208,1% depuis 2017.

On sait très bien que Genève n'est pas un hub: c'est un aéroport de point à point et, pour l'attractivité de Genève, il faut effectivement que les avions puissent revenir à leur point de départ pour repartir le lendemain matin. Il y a en effet quelques atterrissages le soir, après 22h, mais la politique incitative de l'aéroport a fait ses preuves et est un succès. Nous aurions pu en reparler en commission, vous n'avez pas souhaité le faire. Eh bien, je vous propose tout simplement de refuser d'entrer en matière, pour l'attractivité de notre canton; je vous propose de refuser cette motion. Merci.

M. Vincent Canonica (LJS). Cette motion ne demande rien d'autre que de mettre à l'arrêt l'aéroport de Genève. (Protestations.) Pourquoi ? Interdire tout trafic d'aéronefs entre 22h et 6h revient à exiger le retrait d'easyJet de la plateforme aéroportuaire genevoise. Genève est un hub pour easyJet, c'est-à-dire que ses aéronefs y sont basés: ils partent tôt le matin et reviennent le soir, après avoir effectué plusieurs rotations tout au long de la journée. Si ses avions ne pouvaient plus revenir le soir, cela remettrait en cause son «business model» et par conséquent sa rentabilité. Autrement dit, cela reviendrait à forcer easyJet à quitter Genève. Or easyJet emploie plus de 1200 personnes en Suisse, principalement à Genève.

Accepter cette motion, c'est mettre au chômage plus de 500 personnes, mais c'est aussi mettre en péril l'aéroport, qui est l'un des plus grands employeurs du canton: plus de 11 000 employés gravitent sur la plateforme. Tuer easyJet, c'est supprimer 46% du trafic à Genève, ce qui veut dire supprimer plus de 5000 emplois directs également ! Je ne peux que m'opposer à la volonté de la motionnaire de préserver la santé des rive... (Rires.) Je ne peux pas m'opposer à la volonté de la motionnaire de préserver la santé des riverains de Genève Aéroport, notamment contre le bruit. Mais l'approche choisie n'est pas la bonne, car ses conséquences seraient désastreuses pour notre économie. Or, supprimer des emplois nuira sans aucun doute aussi à la santé des personnes touchées.

Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de vous poser une question: pourquoi continue-t-on de construire aux abords de l'aéroport si le bruit tue ? Pourquoi continue-t-on de délivrer des permis de construire pour de nouvelles constructions sur les terrains qui se situent sur la trajectoire des avions ? Souvenez-vous un petit peu de l'histoire ! Depuis quand existe Genève Aéroport ? Depuis 1919 ! Nous, le Grand Conseil de la République et canton de Genève, avons voté une loi implantant un champ d'aviation à 4 kilomètres environ au nord de la ville, près du village de Cointrin. Ses premières lignes commerciales ont fonctionné dès 1922. Ne s'agissait-il pas d'une loi historique, mettant en place la Genève du futur ? D'une loi visionnaire ? (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Comme le temps passe !

Permettez-moi d'ajouter que si l'on devait supposer que l'urgence sur cette motion a été demandée parce que les élections municipales approchent, je rappelle que l'aéroport indemnise les propriétaires pour l'installation du double vitrage afin de lutter contre le bruit; les communes avoisinantes pourraient lancer une campagne d'information à ce sujet et le but de la motion pourrait être atteint. Enfin, je vous rappellerai que l'aéroport est au bénéfice d'une concession fédérale qui prévoit...

Le président. Merci, Monsieur le député.

M. Vincent Canonica. ...l'ouverture d'un aéroport de 6h à 24h. Il s'agit d'un devoir !

Le président. Merci beaucoup.

M. Vincent Canonica. Je vous invite donc à refuser vigoureusement cette motion. (Applaudissements. Brouhaha.)

Le président. Je demande - et je le répète régulièrement - que les députés qui veulent parler, qui veulent discuter, qui veulent échanger, aillent dehors ! (Remarque.) Ils vont dehors ou ils demandent la parole, je suis d'accord avec vous, Monsieur le député. Parce que c'est très fatigant de suivre un débat quand tout le monde parle. Et c'est un manque de respect, je le répète: c'est un manque de respect envers les députés qui sont en train de débattre. Merci. Je cède maintenant la parole à M. Lussi. (Un instant s'écoule.)

Une voix. Patrick !

M. Patrick Lussi (UDC), député suppléant. Excusez-moi, Monsieur le président, je n'avais pas compris. Mesdames et Messieurs les députés, est-ce qu'on est conscient du monde dans lequel on vit ? Est-ce qu'on vit, à Genève, avec un aéroport qui, comme par miracle, ne produirait pas de bruit et ses avions non plus ? Un aéroport qui n'est pas un poumon économique, qui ne permet pas une activité économique ou des voyages ? Et si certains veulent aller faire leurs courses à Barcelone le week-end, pourquoi pas ! C'est quand même une chose...

Oui, bien sûr, d'énormes progrès ont été faits. Oui, des zones de bruit ont été définies. Oui, l'aéroport, en vertu d'obligations légales, dépense des centaines de milliers de francs, voire des millions en indemnisations pour favoriser l'insonorisation. Mais en fait, on aura toujours des avions qui font du bruit. Alors il est désormais question de dire: maintenant, on arrête tout à 22h. Bon ! Il y a déjà tous les vols d'urgence ! Il y a déjà tous les vols internationaux ! Il y a déjà tous les vols diplomatiques ! Il suffit qu'il y en ait deux ou trois. Ceux qui regardent ces statistiques savent qu'un avion s'est posé à Cointrin hier soir à 23h; ça faisait du bruit, oui, c'est vrai. Mais je crois qu'on doit être conscient de ce qu'on veut.

Mesdames et Messieurs les députés, au lieu... Je comprends l'esprit, mais ce que je ne comprends pas, c'est la finalité recherchée. Parce que si vraiment vous voulez une issue, on devrait avoir un projet de loi qui dirait: à partir de l'acceptation de ce texte, eh bien on transforme l'aéroport de Genève Cointrin en aéroport cantonal du style de la Blécherette, où seuls les vols VFR sont autorisés - la journée - et comme ça, on n'aura plus aucun problème. Ayons le courage d'aller au bout de nos idées ! A force de prendre sans arrêt de petites mesures qui restreignent et... Rappelons quand même, mon préopinant l'a dit tout à l'heure, que c'est une concession fédérale et qu'un aéroport a l'obligation de faciliter le trafic international et de s'adapter. Ce n'est ni au directeur, ni à la conseillère d'Etat, ni à nous de décider.

Et ce qu'il y a de plus terrible, alors qu'après le covid il y a eu une baisse drastique des vols, c'est qu'on s'aperçoit maintenant - malgré les incitations vertes, malgré les incitations à ne pas prendre l'avion - qu'il y a plus de passagers qu'avant. Plus de passagers, mais moins de mouvements d'avions ! Donc les choses sont faites, raison pour laquelle l'Union démocratique du centre pense que, si sur le fond on peut discuter, sur la forme il faut refuser cette motion. Merci.

M. Jean-Marc Guinchard (LC). Le rapporteur de minorité l'a rappelé à juste titre, nous avons la chance, à Genève, d'avoir un aéroport international qui se situe à vingt-cinq minutes du centre-ville en transports publics, ce qui est, comparaison internationale faite, extrêmement rare. Mais évidemment, c'est un aéroport urbain - le rapporteur de minorité a rappelé qu'il se trouve à 5 kilomètres de la salle de ce Grand Conseil -, avec tous les inconvénients qui en découlent.

Le bruit sous toutes ses formes - sous toutes ses formes - est un facteur négatif incontestable, et d'ailleurs incontesté, pour la santé, en particulier s'agissant de problèmes de sommeil. Et chacun d'entre nous le sait, c'est entre 22h et 6h que vous pouvez avoir la meilleure qualité de sommeil. Il faut aussi savoir que la commission a auditionné dans le passé - dans un passé pas si lointain puisque ça date de la précédente législature - des membres des exécutifs des communes riveraines, tous partis confondus. Et eux, tous partis confondus, nous ont affirmé être constamment mis sous pression par leurs communiers, qui exigeaient que des mesures soient prises afin d'assurer cette tranquillité entre 22h et 6h.

La motion n'est pas drastique. Elle introduit un juste équilibre en prenant en compte la fonction essentielle de l'aéroport, cela a été rappelé mais je tiens à le répéter, tant pour l'économie - il favorise les exportations de nos industries - que pour la Genève internationale, dont les organisations gouvernementales et non gouvernementales utilisent plus de six mille vols par année. C'est donc une motion qui est raisonnable et équilibrée. Nous n'avons pas l'intention de mettre des bâtons dans les roues au nouveau directeur de l'aéroport, nous souhaitons simplement l'accompagner dans la modification possible de ces plages horaires.

Je rappelle aussi que le PLR est devenu sensible au bruit puisque en 2024, il a fait toute une campagne pour abaisser la valeur locative sous le couloir de bruit de l'aéroport. Je vous recommande dès lors, avec mon groupe, d'accepter cette motion. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Pierre Eckert (Ve). Je voudrais tout d'abord dénoncer quelques propos excessifs: penser qu'easyJet va quitter la plateforme simplement pour les quelques pour cent de trafic qu'on enlèverait après 22h me paraît tout à fait excessif !

Si je m'exprime ici au nom des Verts, c'est que nous avons une ambition en matière d'aéronautique: nous en reconnaissons les effets très délétères et ce que nous souhaiterions surtout, c'est que l'aviation paie ses externalités négatives, très négatives ! Notre ambition est également que l'aéroport apporte sa contribution au plan climat cantonal, sachant que le trafic aérien contribue pour plus d'un quart au bilan carbone du canton.

Nous attendons aussi fermement de l'aéroport qu'il respecte les demandes, votées à une large majorité de la population, de l'initiative pour le contrôle démocratique de l'aéroport. Celle-ci demande explicitement de conserver un équilibre - un équilibre, je le rappelle - entre le développement économique de l'aéroport et la préservation de la santé des riverains. Et c'est justement l'objet de cette motion: les atterrissages et les décollages entre 22h et 6h ont clairement un impact très négatif sur la santé de la population qui se trouve dans l'axe de décollage et d'atterrissage. Zurich peut agir en conséquence, je ne vois pas pourquoi Genève ne le peut pas.

Mesdames et Messieurs, vous qui nous regardez à la maison et qui allez peut-être très prochainement vous prononcer dans le cadre des élections municipales... (Protestations.) ...prenez un calepin ou un tableau Excel et notez bien quels sont les groupes qui se sont préoccupés de la qualité de vie de la population, qui vont la respecter. Le rapporteur de minorité l'a mentionné, on l'a dit: toute la population entre Chancy et Hermance est touchée par le bruit. Le groupe des Vertes et des Verts vous invite fortement, en conséquence, à voter cette motion ! (Applaudissements.)

Mme Christina Meissner (LC). Très rapidement: nous n'avons pas l'intention de tuer l'aéroport ! Des mouvements d'aéronefs, nous en avons toutes les deux minutes pendant la journée ! On parle de la nuit et uniquement de la nuit. Nous souhaitons accompagner la nouvelle direction de l'aéroport, dont la volonté aussi est de réduire ces vols nocturnes. Quel serait le message que nous enverrions à l'aéroport, qui souhaite aller dans le même sens aujourd'hui, si nous n'appuyions pas cette motion ?! (Applaudissements.) Et je demanderai le vote nominal ! (Commentaires.)

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Sangdel, vous avez la parole.

M. Djawed Sangdel (LJS). Merci, Monsieur le président. Je voulais dire qu'il faut renvoyer cette motion en commission pour mieux l'étudier, parce que les arguments des deux bords sont valables.

Le président. Monsieur Sangdel, je m'excuse, mais on m'annonce que vous n'avez plus de temps de parole.

M. Djawed Sangdel. J'ai dit tout ce que je voulais dire, alors c'est bon ! (L'orateur rit.) Renvoi en commission ! (Commentaires.)

Une voix. Il n'avait plus de temps ! (Commentaires. Un instant s'écoule.)

Le président. Bien, Monsieur, vous avez demandé le renvoi en commission, c'est vrai, mais vous n'aviez plus de temps de parole. (Commentaires.)

Une voix. Mais il a le droit !

Une autre voix. Dès lors que vous lui avez donné la parole et qu'on a entendu une demande de renvoi...

Une troisième voix. Monsieur le président, la demande de renvoi en commission est faite hors temps de parole ! (Commentaires.)

Le président. Bien, Mesdames et Messieurs, nous allons voter sur le renvoi en commission. Monsieur le rapporteur de majorité, sur cette demande ?

M. Jacques Béné (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Nous sommes favorables au renvoi en commission pour la simple et bonne raison que beaucoup de choses qui ont été dites sont totalement fausses; il n'y a pratiquement que des atterrissages après 22h - les compagnies ne peuvent plus planifier de décollages après 22h -, et le PSIA est contraignant. Malgré tout, eh bien oui, il est important que l'on tienne compte des riverains, nous sommes tout à fait d'accord avec ça. C'est pour ça qu'il y a un fonds d'insonorisation, c'est pour ça que l'aéroport a prévu une diminution drastique des vols; il y a une vraie prise de conscience de l'Etat et aussi des partis qui veulent laisser l'aéroport poursuivre son activité, pour l'attractivité de Genève.

Si on peut faire un point de la situation en commission, pourquoi pas. Ce sera d'ailleurs très très bien pour rappeler qu'il faut arrêter de faire de l'aéroport le bouc émissaire de tous les maux de Genève et de la planète, puisqu'on sait que l'aviation mondiale, c'est entre 2% et 3% des émissions de gaz à effet de serre, alors qu'internet et tous les ordinateurs que vous avez là et utilisez pour voir ce qui se passe dans le monde représentent entre 6% et bientôt 8%. Il faut donc arrêter de prendre l'aéroport comme bouc émissaire. Je rappelle enfin que, pour l'aviation, ce sont 57 000 personnes qui sont touchées par le bruit entre 22h et 23h en Suisse, alors qu'elles sont 140 000 pour le ferroviaire et 700 000 pour la route ! Nous sommes donc favorables à un point de situation en commission.

M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de minorité. Monsieur le président, il suffit de parler d'aéroport pour que les esprits s'échauffent, pour que les invectives pleuvent et que les inepties décollent, si j'ose dire. (Rire.) Je suis assez peiné, je constate avec circonspection qu'en tout cas un de nos collègues tout à la fois prétend que ce texte vise à détruire ou à faire fermer l'aéroport et obtient l'intégralité ou la majorité de ses revenus de son entreprise située sur la plateforme aéroportuaire, ce qui pose la question du respect de l'article 24, alinéa 1, de notre règlement; j'aimerais bien que la présidence et le Bureau statuent sur la question. (Commentaires.) De deux choses l'une: soit cette... (Commentaires.) ...soit cette motion vise véritablement à affaiblir l'économie de l'aéroport et cette personne n'a pas à s'exprimer... (Remarque.) ...soit, comme c'est le cas, ce n'est pas son but et ce ne sera pas son effet... (Remarque.)

Le président. S'il vous plaît, Monsieur le député.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. ...et il est alors parfaitement légitime que cette personne s'exprime.

Le président. S'il vous plaît, un petit instant ! Vous pouvez vous asseoir, Monsieur ?

M. Julien Nicolet-dit-Félix. J'en arrive au fait: je regrette que le débat se soit enflammé de la sorte... (Commentaires.) ...je regrette que les arguments présentés soient infondés, je regrette que les faits aient été trahis. De ce fait, j'imagine qu'un renvoi en commission n'améliorerait pas sensiblement les débats et je pense qu'il faut trancher nettement. Les choses sont claires...

Le président. Monsieur le chef de groupe socialiste, est-ce que vous pouvez aller discuter dehors avec le représentant du groupe LJS ? Parce que vous avez peut-être des choses très importantes à vous dire, mais vous comprenez qu'ici... Voilà ! (Commentaires. Rires.)

M. Julien Nicolet-dit-Félix. Oui ! (L'orateur rit.) La proposition - je vais essayer de terminer - est en fait d'une simplicité biblique; elle n'affectera aucunement l'aéroport... Si M. Nidegger pouvait s'empêcher de prendre des photos ou de filmer la séance, ça m'arrangerait, merci ! (Remarque.) A ma connaissance, la loi portant règlement de ce Grand Conseil interdit la prise de photos pendant les séances, mais peut-être ai-je tort ! Vu que j'étais dans le viseur, vous me permettrez de vous demander d'effacer les documents qui... (Remarque.) Je vous remercie !

Je reprends: cette motion est d'une simplicité absolue. Elle n'aura qu'un impact très marginal sur les activités économiques de l'aéroport et cet impact sera positif puisqu'il remettra les activités aéronautiques sur la voie que chacune et chacun espère...

Le président. Monsieur le député, vous devez vous arrêter: vous avez épuisé votre temps de parole.

M. Julien Nicolet-dit-Félix. ...et c'est bien pour cela que nous refuserons le renvoi en commission. Je vous remercie.

Le président. Nous passons maintenant au vote sur la demande de renvoi en commission.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2918 à la commission de l'économie est adopté par 51 oui contre 41 non. (Vifs commentaires durant la procédure de vote. Exclamations et applaudissements à l'annonce du résultat.)