Séance du
vendredi 22 novembre 2024 à
14h
3e
législature -
2e
année -
7e
session -
39e
séance
PL 13463-A
Premier débat
Le président. Nous abordons à présent le PL 13463-A (catégorie III). Madame Buffet-Desfayes, vous avez la parole. (Un instant s'écoule.)
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR), rapporteuse. Voilà, le temps de traverser la salle et je suis à vous ! Ce projet de loi a été accepté à l'unanimité, la commission reconnaissant évidemment l'importance et le rôle fondamental du Musée de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
Vous êtes au courant du fait que ce musée est au coeur d'un certain nombre de discussions et d'enjeux très importants qui se jouent au niveau de la Berne fédérale; nous profitons donc du fait qu'une unanimité ait reconnu ses actions fondamentales quant au droit humanitaire international et à la diplomatie multilatérale ainsi que son rôle essentiel pour la Genève internationale pour rappeler combien il est important de continuer à soutenir très fortement ce Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et de se donner tous les moyens pour le faire survivre, en premier auprès de nos représentants à Berne. Ceux-ci doivent comprendre qu'il est absolument fondamental de ne pas laisser en plan tout un pan de la Genève internationale et du droit humanitaire international, comme cela semble être le cas dans les volontés actuelles.
Pour simplement poser le cadre, à l'intention de ceux qui n'auraient pas suivi l'ensemble du dossier, nous avons affaire à une volonté de supprimer, ou au mieux de modifier, la subvention fédérale au Musée international de la Croix-Rouge. Je vous rappelle que le canton, des privés et la Confédération soutiennent ce musée et que le subventionnement fédéral représente un quart du budget total.
Pour l'instant, il est vraiment important, comme je l'ai dit tout à l'heure, de continuer notre soutien à cette institution fondamentale pour le droit humanitaire et pour Genève et de faire en sorte que le musée n'ait pas à mettre la clé sous la porte dans deux ans.
En effet, au-delà des concepts que je viens de rappeler, ce musée joue aussi un rôle essentiel pour l'information, pour la sensibilisation aux enjeux liés au droit humanitaire international - je pense que je n'ai pas à vous rappeler l'importance fondamentale de bien connaître ces enjeux pour les personnes de tout âge et de tout horizon. (Brouhaha.)
Le président. Un instant, Madame. Est-ce qu'on pourrait avoir un peu de silence dans la salle, s'il vous plaît ? Celles et ceux qui veulent parler peuvent le faire dehors; il y a deux salles magnifiques dans lesquelles vous pouvez vous entretenir. Laissez quand même notre camarade députée poursuivre son allocution.
Mme Natacha Buffet-Desfayes. Je n'ai pas l'habitude qu'on m'appelle camarade, mais je continuerai ! (Rires.) Je vous remercie beaucoup, Monsieur le président. Je crois que j'en étais là: je dirai encore que le musée a un succès phénoménal, en plus de tout ce qui a été relevé tout à l'heure, et qu'il faut tout mettre en place pour continuer à le soutenir. Merci beaucoup.
Le président. Je vous remercie, Madame la camarade libérale ! (Rires.) La parole est à Mme Valiquer Grecuccio.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), députée suppléante. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, bien évidemment, le parti socialiste va dans le même sens que la rapporteuse de majorité, puisque, il faut le rappeler, l'ensemble des groupes politiques a voté à l'unanimité cette aide financière, et ce alors que la Confédération - mais plus exactement M. Ignazio Cassis - se veut très menaçante envers ce musée, Mme Buffet-Desfayes l'a relevé.
Aujourd'hui, il nous appartient de dire qu'à travers ce musée, ce que nous défendons, c'est en fait les droits humains, la fonction de Genève, ville internationale qui est la nôtre, et bien sûr le multilatéralisme, qui offre à notre pays le succès que l'on connaît, et son rôle indispensable, surtout aujourd'hui, en des temps plus que troublés.
Vous l'aurez compris, le sens de mon intervention est de dire que nous devons parler d'une seule voix, intervenir auprès de ce conseiller fédéral en espérant qu'il comprenne, vu son rôle, l'importance de la Genève internationale et celle de la thématique des droits humains. Nous devons évidemment interpeller nos représentantes et nos représentants à Berne pour qu'ils aillent dans le même sens, tous partis confondus, et qu'on fasse ainsi en sorte que Genève parle d'une seule voix !
Par ailleurs, nous devons insister sur le rôle culturel du Musée de la Croix-Rouge. J'ai été frappée par l'affiche qui se trouve maintenant dans nos rues pour inciter le public à s'y rendre et qui dit: «Marcher vers la paix, c'est aller au musée.» Parce qu'effectivement, ce musée se trouve à l'avenue de la Paix. C'est une magnifique invite, qui rappelle aussi le rôle culturel que joue Genève.
Ce musée s'ouvre à tous les publics, avec les billets suspendus, il favorise les résidences d'artistes, ce qui s'inscrit dans la politique culturelle de notre canton, et j'aimerais rappeler qu'il a joué un rôle dans une des pièces de Tiago Rodrigues - qui, comme vous le savez, est devenu depuis directeur du Festival d'Avignon -, dont le titre était «Dans la mesure de l'impossible». Des délégués du CICR ont été interrogés et ces témoignages ont servi de socle pour cette pièce. Ce musée joue donc un rôle indispensable pour la culture.
C'est aussi à travers la culture que l'on sensibilise au respect des droits humains et finalement qu'on renforce la volonté d'instaurer la paix entre toutes les populations. Pour ces raisons, le groupe socialiste vous invite évidemment à voter ce texte, mais surtout appelle de ses voeux une action collective auprès du Conseil fédéral. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Bien évidemment, comme l'ensemble des membres de la commission des finances, nous voterons ce projet de loi et ce financement pour le Musée de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Néanmoins, nous avons une inquiétude face au désengagement de la Confédération envers Genève, qui touche non seulement ce musée, mais également d'autres activités de la Genève internationale.
Parce que la Confédération est bien contente d'avoir Genève, qui est une métropole de dimension internationale, qui rayonne, parfois davantage que d'autres métropoles de notre pays. Mais ce prestige dérange un peu la Confédération, qui, malheureusement, n'est pas correcte avec Genève. Elle n'est pas correcte parce qu'on lui verse, au titre de la péréquation intercantonale, des montants qui sont, au sens du MCG, abusifs; il y aurait une négociation à mener. Comme je l'ai déjà fait, j'encourage la cheffe du département des finances à aller négocier et à mettre tous les moyens à disposition pour que la péréquation aille davantage dans le sens de Genève, que nous ne soyons pas un peu les dindons de la farce une fois de plus. Cela permettrait de faire des économies. Ces économies, on va les faire bien évidemment dans tous les secteurs, mais à Genève, nous sommes particulièrement exposés.
Alors ils aiment bien nous voir quand on leur donne de l'argent, parce que Genève, c'est un peu la poule aux oeufs d'or, c'est une manne financière dont les autres cantons et la Confédération profitent, mais quand il s'agit de payer ce que la Confédération devrait assurer, alors là, on voit qu'elle est absente. Loin de moi - pour l'instant - la volonté de demander une indépendance du canton de Genève... (Commentaires.) ...mais je pense que la relation entre Genève et la Confédération doit être beaucoup plus équilibrée, et cela se passe à tous les niveaux.
J'ai conscience que la discussion est délicate pour le Conseil d'Etat, qu'elle est également difficile pour nos représentants à Berne. Néanmoins, il faut aller dans cette direction, il faut défendre les intérêts de Genève; c'est important pour ce musée, mais aussi pour toutes les activités de la Genève internationale, qui rayonnent sur l'ensemble de notre pays. Merci, Monsieur le président.
M. Vincent Subilia (PLR). Au risque d'enfoncer une porte ouverte, je tenais à saluer la très saine unanimité qui anime cet hémicycle. Cela a été dit, au-delà du symbole et des retombées, qu'elles soient culturelles ou économiques, de cette institution qu'est le Musée de la Croix-Rouge - d'ailleurs, M. Ivanov le connaît par coeur, n'est-ce pas, Christo ? Pardon, je ne dois pas l'interpeller; vous transmettrez, Monsieur le président -, il faut se rappeler qu'elle est la pierre angulaire, le fondement de ce qu'est aujourd'hui la Genève internationale, qui vaut à Genève d'être la capitale mondiale de la gouvernance, ce haut lieu du multilatéralisme et, comme l'a rappelé ma préopinante, la députée Valiquer - vous transmettrez -, ce creuset d'un multilatéralisme qui est actuellement en danger.
Je crois qu'il est donc particulièrement important que nous nous acquittions du rôle qui est le nôtre, à savoir rappeler l'importance que revêt cette institution. Notre présidente du Conseil d'Etat, chargée également de la Genève internationale, s'est employée à le dire, certains de nos représentants sous la coupole fédérale l'ont fait aussi. Je pense que ce combat s'amorce et qu'il doit se poursuivre.
Cette Genève internationale fait partie intégrante de l'ADN genevois. Cela a été souligné, y compris dans la bouche du député Baertschi, du MCG, elle court aujourd'hui un risque, parce que trop souvent à Berne, on oublie que Genève - Mme Fontanet, avec sa casquette de grande argentière, le sait aussi - est l'un des seuls cantons contributeurs à la péréquation financière. A ce titre, il serait bon, dans les équations et les arbitrages budgétaires douloureux, encore une fois menés par une magistrate PLR... Chacun voit midi à sa porte en la matière, mais s'attaquer à la Genève internationale, c'est finalement porter atteinte à ce qui constitue le fondement même de l'ADN genevois et de notre pays. Je rappelle aussi que la Genève internationale est le troisième pilier de la politique étrangère suisse, et qu'à ce titre, elle sert les intérêts non seulement de notre aimable bourgade, mais également au-delà, que c'est une contribution de Genève aux valeurs que défend notre pays, encore une fois en des temps troublés.
Pour toutes ces bonnes raisons, je crois que ce signal donné aujourd'hui, toutes et tous appuyant sur leur bouton pour un oui clair afin de soutenir ces démarches, doit résonner sous la coupole fédérale, pour que demain nous n'ayons plus à nous battre dans ce contexte d'austérité budgétaire pour faire entendre la voix de Genève et de la Suisse dans le monde. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Je remercie la rapporteure pour la qualité de son rapport ainsi que les différents intervenants, qui ont souligné à juste titre l'attitude assez néfaste de la Confédération dans les projets qui sont les siens - ce ne sont encore que des projets, nous espérons que les choses changent et que la subvention dédiée au Musée de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge soit maintenue.
Nous avons entendu ici des aspects culturels et économiques, d'autres relevant du droit humanitaire, et il est normal de les souligner, parce que la Confédération en bénéficie aussi très largement, y compris par le biais de ce musée.
On parle beaucoup d'Ukraine et du Moyen-Orient en ce moment, mais il ne faut pas oublier qu'à l'heure actuelle, il y a dans le monde 58 conflits, soit largement plus que tout ce qu'on a enregistré depuis 1946. 58 conflits, que ce soient des guerres civiles ou entre Etats, ou encore du terrorisme, avec des centaines de milliers de victimes.
Je crois que le Musée de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge joue ici un rôle important, un rôle de mémoire, un rôle de culture, un rôle de rappel et un rôle de souvenir. C'est aussi pour défendre cet aspect-là que Le Centre vous recommande d'accepter ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il faut évidemment soutenir le Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, pour toutes les raisons qui ont été mentionnées par mes collègues ainsi que pour la Genève internationale - c'est aussi pour ça que la majorité de la commission des finances a voté presque un million de soutien. Bien entendu, il faut appuyer les démarches effectuées auprès de Berne pour que le financement continue, parce qu'il est fondamental de soutenir cette démarche et ce musée, pour notre histoire, pour notre culture et surtout pour le rôle qu'il joue auprès de tous les enfants et de toute la jeunesse de notre canton. Il y a beaucoup d'écoles qui se rendent dans ce musée, beaucoup de jeunes ont droit à des visites et ont ainsi accès à un petit morceau d'histoire de notre passé.
C'est aussi ça, tout le rôle de ce musée, qui est vraiment très important, encore plus aujourd'hui, s'agissant de la mémoire - cela a été souligné, mais c'est important de le redire - et du rappel de notre passé. C'est un passé qu'il ne faut pas oublier, que ce soit nous aujourd'hui et demain, ou les générations futures. Donc bien évidemment, nous soutenons ce projet de loi et vous recommandons vivement de le voter. Merci. (Applaudissements.)
Mme Carole-Anne Kast, conseillère d'Etat. Je tiens à rassurer la rapporteure; j'espère que sur ce dossier, tous les élus genevois peuvent se donner du camarade, car je pense que nous tirons toutes et tous à la même corde, au-delà des partis, au-delà des départements et au-delà des instances, qu'elles soient cantonales, fédérales ou communales.
J'en veux pour preuve les interventions de pas moins de trois conseillères et conseillers d'Etat dans les médias ces dernières semaines pour dénoncer les coupes de la Confédération visant directement la Genève internationale, et plus particulièrement pour défendre le Musée international de la Croix-Rouge.
Au travers de cette magnifique institution, c'est effectivement la Genève internationale qui est abandonnée, ou du moins pas reconnue à sa juste valeur, par la Confédération, tout comme d'autres prestations qui lui sont relatives, telles que la brigade de sécurité diplomatique.
Parce qu'au-delà de l'ADN genevois - ça fait partie des arguments que j'ai entendus dans l'hémicycle -, du rayonnement de Genève en Suisse et de la qualité culturelle de cette institution, il ne faut pas oublier, et c'est ce que nous essayons de rappeler à la Confédération à tous les niveaux, que la Genève internationale est un pilier de la diplomatie suisse.
Comment la Suisse pense-t-elle peser dans le concert des nations, qui malheureusement se transforme toujours plus en cacophonie ? Comment la Suisse pense-t-elle défendre le multilatéralisme, qui est aujourd'hui toujours plus important dans la situation internationale que nous connaissons, sans les outils, la tradition, le savoir-faire et la présence des organisations qui font la Genève internationale ? Finalement, défendre ces institutions, ce savoir-faire et cette tradition, ce n'est pas seulement défendre Genève, mais aussi la place de la Suisse au niveau international.
Et c'est évidemment pour rappeler cet engagement du Conseil d'Etat, je dirais, sur tous les terrains de la Genève internationale, pour rappeler qu'il faut effectivement des interventions à tous les niveaux parlementaires à cet égard, également pour expliquer que nous avons déjà sensibilisé nos parlementaires fédéraux à cette question et qu'ils ont évidemment soutenu ces démarches et comptent agir au niveau confédéral pour défendre cette institution et les autres de la Genève internationale qui peuvent être dans le collimateur des économies fédérales, que je me permets, en suppléance de mon collègue Thierry Apothéloz, mais je crois en représentation de tout le Conseil d'Etat, de prendre la parole pour vous remercier pour les mots qui ont été prononcés et pour vous inviter évidemment à voter ce projet de loi. Merci beaucoup, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13463 est adopté en premier débat par 90 oui (unanimité des votants).
Le projet de loi 13463 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13463 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 92 oui (unanimité des votants).