Séance du
jeudi 3 octobre 2024 à
20h30
3e
législature -
2e
année -
5e
session -
28e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Alberto Velasco, président.
Assiste à la séance: Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Antonio Hodgers, Anne Hiltpold, Carole-Anne Kast et Pierre Maudet, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Masha Alimi, Michael Andersen, Thierry Arn, Diane Barbier-Mueller, Virna Conti, Sébastien Desfayes, Patrick Dimier, Joëlle Fiss, Adrien Genecand, David Martin, Xhevrie Osmani, Charles Poncet, Skender Salihi, Vincent Subilia et François Wolfisberg, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Sebastian Aeschbach, Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Rémy Burri, Anne Carron, Gabrielle Le Goff, Patrick Lussi, Philippe Meyer, Daniel Noël, Frédéric Saenger et Nicole Valiquer Grecuccio.
Discussion et approbation de l'ordre du jour
Le président. M. Ferati souhaite demander l'urgence sur la M 3038. Pour une telle demande, la majorité des deux tiers est requise. Monsieur Ferati, vous avez la parole.
M. Leonard Ferati (S). Merci, Monsieur le président.
Une voix. Non, on vote, il ne s'exprime pas avant !
M. Leonard Ferati. C'est pour demander l'urgence, Monsieur le député, uniquement pour ça ! (Remarque.) Oui, c'est juste, c'est la commission de l'économie qui demande l'urgence sur cette motion.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je lance la procédure de vote.
Mis aux voix, le traitement en urgence de la proposition de motion 3038 est adopté par 29 oui contre 13 non (majorité des deux tiers atteinte).
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous traitons dès à présent la M 3038, pour laquelle l'urgence vient d'être votée. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. La parole est à Mme Delphine Bachmann.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Monsieur le président. La commission m'avait préalablement informée que cette demande d'urgence serait faite. Cette motion traite d'entreprises qui, durant la crise covid, ont pu bénéficier d'aides cas de rigueur, dont le dispositif est, je le rappelle, régi par la Confédération, les cantons étant quant à eux chargés de son application.
Il est vrai que dans le cadre de la mise en place du dispositif, il y a eu une étape durant laquelle on a demandé aux entreprises de procéder, dans la mesure du possible, à des abandons de créance, ce qui a résulté pour un certain nombre d'entre elles en un bénéfice comptable. Aujourd'hui, au moment des contrôles qui sont effectués par le canton, cela nécessite pour certaines entreprises de procéder à des remboursements de ces aides cas de rigueur, dans la mesure où, au vu de leurs résultats comptables, elles n'auraient pas dû ou pas pu en bénéficier.
Je tiens à rappeler que le Conseil d'Etat est parfaitement au courant de cette problématique et que nous sommes particulièrement attentifs à accompagner toute entreprise qui pourrait être en difficulté liée à la période post-covid, liée aussi aux éventuelles aides cas de rigueur qui auraient été octroyées et dont le remboursement serait aujourd'hui nécessaire. Nous procédons vraiment dans la mesure du possible à des aménagements et à des adaptations pour les entreprises que cela mettrait en difficulté. Maintenant, très clairement, le cadre légal est fédéral; j'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, d'interpeller le SECO et le conseiller fédéral chargé de l'économie. A ce stade, les négociations n'ont pas permis d'aboutir à une prise en compte de ces abandons de créance différente de celle en place actuellement.
Des textes avaient aussi été déposés au niveau fédéral, sur lesquels le Parlement et le Conseil fédéral ne sont pas entrés en matière. Dès lors, le canton est obligé de prostituer... de procéder, excusez-moi ! (Rires.) Ce petit moment de solitude, je m'en souviendrai ! (Rires.) De procéder à l'exécution de cette exigence de remboursement des trop-perçus, puisque, je le rappelle, cet argent est dû à la Confédération et pas au canton. Ce que je peux vous dire, c'est que le Conseil d'Etat accueillera avec bienveillance cette motion de commission et s'engage évidemment à faire tout ce qui est en son possible pour éviter des fermetures d'entreprises et d'éventuels licenciements que cela causerait, mais rappelle toutefois que nous sommes soumis à un cadre fédéral très strict, auquel la Confédération n'entend pas déroger, même après de nombreuses discussions. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je lance la procédure de vote sur cette motion.
Mise aux voix, la motion 3038 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 65 oui contre 1 non (vote nominal).
Premier débat
Le président. Nous reprenons le traitement de l'ordre du jour, en commençant par le PL 13363-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Madame Alia Chaker Mangeat, vous avez la parole.
Mme Alia Chaker Mangeat (LC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi intitulé «Pour une gouvernance plus démocratique des fondations d'utilité publique» vise en réalité une seule fondation, à savoir la FAE, la Fondation d'aide aux entreprises. Et par «gouvernance plus démocratique», les signataires entendent en fait augmenter le nombre de politiciens au sein du conseil de ladite fondation.
Ils estiment en effet que tous les partis du parlement doivent être représentés au sein de ce conseil, contrairement à ce que prévoit la législation actuelle, à savoir que deux représentants du Grand Conseil siègent parmi les neuf membres qui le composent. On passerait ainsi de deux représentants du parlement à sept. Je rappelle que la FAE joue à Genève un rôle essentiel de soutien aux entreprises et que son activité est clairement cadrée par la loi, par les règlements, par un contrat de prestations conclu avec l'Etat de Genève et par un contrat de collaboration entre la FAE et la structure Cautionnement romand.
Quatre leviers sont à disposition de la fondation pour réaliser ses objectifs d'aide aux entreprises. Il s'agit principalement du cautionnement, puis de l'avance de liquidités et enfin de la prise de participation et du financement des mandats, ces deux derniers leviers ne représentant des activités que très marginales.
En plus du premier signataire, la commission a bien sûr auditionné le département de l'économie et de l'emploi et la direction de la FAE. Tous deux ont rappelé que le conseil de fondation fonctionne parfaitement aujourd'hui et ont confirmé que sa composition donne également satisfaction, qu'elle est le fruit de consensus - cette question du nombre de représentants du Grand Conseil au sein de la FAE a en effet donné lieu à plusieurs débats au sein de notre parlement.
Aujourd'hui, au sein du conseil, il y a deux représentants du parlement, deux représentants des partenaires sociaux et cinq experts du domaine du financement. Parce qu'il faut aussi rappeler que ce conseil, contrairement à d'autres régies publiques, a un rôle opérationnel et qu'il doit en effet examiner les demandes de financement. Les expériences et les expertises des uns et des autres sont essentielles pour assurer le bon fonctionnement et l'atteinte des objectifs de la FAE.
La majorité de la commission a estimé en substance que voter ce projet de loi reviendrait à alourdir en temps et en financement le fonctionnement du conseil de fondation, parce qu'un membre coûte entre 15 000 et 20 000 francs à l'Etat.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Alia Chaker Mangeat. Merci. Ce serait aussi favoriser l'idéologie au détriment des compétences et de l'efficacité. La commission a donc refusé l'entrée en matière, à la quasi-unanimité, et vous invite à faire de même. Je vous remercie.
M. Amar Madani (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames les députées, Messieurs les députés, contrairement à ce que vient d'affirmer la rapporteuse de majorité, ce projet de loi représente une tentative cruciale visant à garantir une représentation équitable des différents partis au sein de cette institution.
En effet, en intégrant un membre par parti, la composition du conseil de fondation de la FAE refléterait mieux la diversité des opinions politiques et assurerait une représentation plus équitable plutôt que de privilégier les partis majoritaires, comme c'est le cas actuellement. Cela assurerait par ailleurs une représentation plus diversifiée, et les décisions prises par le conseil seraient susceptibles d'être plus consensuelles et moins sujettes à la partialité politique, ce qui favoriserait des politiques plus stables et durables dans le domaine de l'aide aux entreprises.
Mesdames et Messieurs, inclure un membre de chaque parti, comme le demande ce projet de loi, pourrait renforcer la transparence et la reddition des comptes, car chaque parti aurait une voix dans le processus de prise de décision. Cela contribuerait également à réduire les soupçons de partialité politique dans l'allocation des ressources.
Ce projet de loi contribue également à une prise en compte des différentes perspectives. Chaque parti politique a ses propres valeurs, sa propre identité, ses propres priorités et perspectives sur le plan des politiques économiques. En incluant un membre de chaque parti, le conseil de fondation serait mieux informé des différentes perspectives et pourrait prendre des décisions plus éclairées et équilibrées. Enfin, le fait d'accorder à chaque parti une voix dans le processus décisionnel renforcerait la légitimité démocratique de la fondation en reflétant plus fidèlement la diversité des opinions politiques au sein de la société.
Si, comme l'a estimé la majorité de la commission, la présence des experts et spécialistes est nécessaire pour l'efficience et l'efficacité de la fondation - et sur ce point, nous n'avons aucun doute, car ces derniers jouent un rôle crucial en apportant leurs compétences et leur expertise économique à la fondation -, il n'en demeure pas moins que l'inclusion d'un membre par parti politique peut également constituer une valeur ajoutée en renforçant la transparence et en assurant une représentation équilibrée des intérêts politiques. En combinant l'expertise technique des spécialistes avec une représentation politique diversifiée, la fondation pourrait bénéficier d'une approche plus holistique et équilibrée dans la formulation de ses politiques et de ses programmes.
En résumé, avoir un membre par parti représenté au Grand Conseil au sein du conseil de fondation de la FAE pourrait favoriser une prise de décision plus équilibrée, consensuelle, transparente et démocratique, ce qui bénéficierait à la gestion et à l'allocation des ressources ayant pour but de soutenir nos entreprises locales. Pour toutes ces raisons, la minorité vous invite à accepter ce projet de loi.
M. André Pfeffer (UDC). Augmenter le nombre de représentants politiques au sein du conseil de fondation de la FAE serait presque dangereux ! Il faut savoir que l'objectif même de ce conseil de fondation est d'analyser les demandes de financement des PME. Pour ce faire, les gens doivent évidemment avoir certaines connaissances liées au tissu économique et aux besoins de nos PME et surtout, surtout, être capables d'analyser les risques de ces financements.
Si vous augmentez, démultipliez les membres de ce conseil, les décisions risquent de ne plus être techniques. On risque de ne plus avoir une majorité de gens qui analysent les financements en fonction des faits, de la réalité, des besoins et des risques; ces décisions pourraient devenir une affaire politique. Ce projet de loi doit absolument être refusé, car il est contreproductif et nocif pour nos PME. Il risque simplement d'avoir pour conséquence que les analyses de risques se fassent moins bien, au détriment des Genevois, à savoir nous autres, les contribuables. Merci de refuser ce texte. Je vous remercie de votre attention.
M. Diego Esteban (S). Avec toute la sympathie que je porte au rapporteur de minorité - et j'en ai bel et bien, je vous rassure ! -, je ne suis pas du tout d'accord avec les arguments qu'il défend. Cette fondation fonctionne bien aujourd'hui, c'est quelque chose qui a été répété tout au long des travaux de commission. D'ailleurs, l'exposé des motifs du projet de loi n'indique pas le contraire. Cette fondation fonctionne bien, on ne voit pas en quoi l'état de fait qui semble être recherché dans l'argumentation des défenseurs de ce projet de loi permettrait encore mieux d'atteindre les objectifs.
Bien au contraire, cette proposition revient à créer du risque, parce qu'effectivement, le besoin de contrôle démocratique sur le fonctionnement de ces fondations se justifie au plus haut point lorsqu'elles disposent de compétences telles qu'elles deviennent actrices à part entière de la mise en oeuvre des politiques publiques, comme c'est le cas des grandes régies publiques, comme les TPG, les SIG, l'Aéroport - on les connaît; mais ici, il s'agit vraiment d'un rôle qui, comme l'a dit la rapporteure de majorité, est extrêmement opérationnel.
Augmenter le nombre de représentants de partis politiques ferait qu'il y aurait plus de personnes à qui il faudrait expliquer les subtilités de l'analyse comptable de chaque demande de soutien financier. On prend le risque de politiser et de tendre les discussions à l'interne de cette fondation, qui, aujourd'hui, n'a pas forcément besoin de se poser la question de la coloration de tel ou tel projet, de savoir si ses porteurs sont membres de telle ou telle fédération économique. Le statu quo donne donc aujourd'hui satisfaction, raison pour laquelle le groupe socialiste vous enjoint de refuser l'entrée en matière. (Applaudissements.)
Mme Céline Zuber-Roy (PLR). Nous remercions la rapporteure de majorité, qui a très bien présenté les travaux de la commission et relevé les enjeux. Comme l'ont souligné mes préopinants, clairement, la fondation fonctionne bien, il n'y a aucune raison d'élargir la composition du conseil. Le PLR soulignera qu'on devrait au contraire s'en inspirer: nous plaidons depuis de nombreuses années pour dépolitiser au maximum les conseils d'administration des différentes institutions. Le fonctionnement avec des spécialistes, en recherchant la qualité et la compétence des personnes, donne satisfaction; il ne faut donc pas le changer. Je vous remercie.
M. Stéphane Florey (UDC). Effectivement, la vraie question de cette affaire est non pas de savoir s'il faut augmenter ou non le nombre de représentants, mais de savoir qui on met dans ce conseil. Alors si le MCG a des petits copains à placer, comme c'est généralement le cas avec des gens qui n'ont aucune compétence... (Exclamations.) Non, mais il faut être réaliste ! (Exclamations.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Stéphane Florey. Même chez nous, je le dis très franchement, on a des gens qui siègent dans des commissions qui, forcément, n'ont pas toujours les vraies et les bonnes compétences ! (Commentaires.) On nous demande de mettre des gens, soit un homme, soit une femme; eh bien au bout d'un moment, ça coince, et vous mettez la personne que vous avez sous la main ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Voilà la réalité. Alors maintenant, on doit se demander si on veut étendre cette nullité démocratique également à la FAE ou si on veut réellement viser les compétences. C'est ça la vraie question ! Et pour le cas de figure qui nous occupe, comme de toute façon, on le sait, on n'y arrivera pas, mieux vaut en rester là...
Le président. Merci, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. Et comme le dit ma collègue, il faudrait étendre le même principe à toutes les commissions officielles... (Le micro de l'orateur est coupé.)
Le président. Merci.
M. Stéphane Florey. ...plutôt que voter des projets de lois ayant pour but de placer ses petits copains. Je vous remercie.
M. Thierry Cerutti (MCG). Monsieur le président, vous transmettrez à notre collègue Florey que si à l'UDC ils ont l'habitude de placer leurs petits copains, j'ose espérer que ce n'est pas le cas des autres partis. En règle générale, nous sommes assez responsables pour désigner des gens qui ont les compétences nécessaires pour siéger là où on veut les placer.
Mesdames et Messieurs les députés, pourquoi avons-nous déposé ce projet de loi ? Simplement pour être en adéquation avec le fonctionnement de l'ensemble des conseils d'administration. Vous dites qu'on est en train de politiser la FAE, mais je vous rappelle juste qu'à la commission de la pêche, on est tous représentés ! Vous voulez que je vous cite la liste de tous les conseils d'administration où tous les partis sont représentés ? Moi, je pense que c'est intéressant d'avoir un membre par parti au sein de la FAE. Bien sûr que cette fondation fonctionne dans l'état actuel; elle a distribué 11,7 millions l'année passée, elle aurait pu en distribuer 15. Mais l'enjeu, c'est aussi d'éviter les conflits au sein de cet hémicycle quant aux décisions prises par la FAE.
En ayant une vraie représentativité, la FAE pourrait avancer plus vite, aller plus loin et plus longtemps. C'est ça, l'idée et la force du projet; ce n'est pas pour y placer des petits copains ou des gens qui n'ont rien à y faire. Bien au contraire, on veut mettre des gens compétents et professionnels à la FAE, de façon à ce qu'on soit tous représentés de manière équitable. Mais si ça vous dérange qu'on passe à 14 membres à la FAE pour une question de moyens - le budget de la FAE est, je crois, d'un peu plus de 57 millions, ils ont 57 millions dans leurs poches -, alors, Mesdames et Messieurs, déposez un projet de loi pour qu'on vire l'ensemble des partis représentés dans tous les autres conseils d'administration: la pêche... (Exclamations.) Tous les autres ! A un moment donné, soyez cohérents dans ce que vous faites et ce que vous dites ! (Remarque.) Mais vous ne l'êtes pas ! (Remarque.)
Une voix. Laissez-le parler un peu !
Le président. S'il vous plaît !
M. Thierry Cerutti. Et quand j'entends certains qui parlent de politiser... On ne veut pas politiser les conseils d'administration ! Je rappelle juste à celles et ceux qui ont des représentants de leur parti politique au sein des conseils que ceux-ci y travaillent sans faire de politique. Ils sont là pour faire de la gestion, du management d'entreprise, et non pas autre chose !
Mais si vous voulez vraiment dépolitiser les conseils d'administration, j'invite le PLR à retirer ses deux candidats à la Cour des comptes, qui est clairement politisée. J'invite les socialistes et les Verts à faire de même. Mais non, Mesdames et Messieurs, vous voulez dépolitiser, mais vous politisez tout, tout, tout, quand ça vous arrange ! Donc s'il vous plaît, votez ce projet de loi; sinon, soyez cohérents, déposez-en d'autres pour virer tous les partis politiques qui sont représentés dans les autres conseils d'administration. La balle est de votre camp, Mesdames et Messieurs ! Merci. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. La parole est à M. Amar Madani. (Commentaires.) Effectivement, Monsieur le rapporteur, l'usage veut que vous vous exprimiez à la fin du débat. Je cède donc le micro à Mme Laura Mach.
Mme Laura Mach (Ve). Merci, Monsieur le président. Je vais être un peu plus terne que mon préopinant. Je tiens déjà tout simplement à féliciter ma collègue qui a présenté le rapport de majorité, parce que je trouve qu'elle l'a vraiment très bien fait. J'aimerais ajouter que les travaux en commission autour de ce projet de loi ont clairement mis en évidence que la technicité des dossiers traités par la FAE nécessite avant tout une expertise professionnelle et qu'augmenter le nombre de représentants politiques pourrait notamment compromettre l'efficacité de cette institution, alors que son fonctionnement ne semble poser aucun problème aujourd'hui. Par conséquent, le groupe des Verts refusera ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
M. Murat-Julian Alder (PLR). J'ai entendu beaucoup d'excitation dans les propos de certains, j'aimerais appeler au calme. La Fondation d'aide aux entreprises est une structure qui, de par sa nature, a besoin d'autonomie. C'est une fondation particulière, ce n'est pas n'importe quelle commission ou délégation officielle, elle a une loi qui lui est spécifique, elle a une existence propre. Et si vous vous intéressez aux profils des personnes qui composent son conseil de fondation, vous remarquerez que la FAE est présidée par une avocate, que le vice-président est un expert fiduciaire diplômé, qu'il y a des entrepreneurs, qu'il y a un représentant de l'Union des associations patronales genevoises, un juriste, un entrepreneur, une experte en financement d'entreprises et un représentant du Conseil d'Etat, issu du département de l'économie et de l'emploi. Deux représentants sont désignés par le Grand Conseil, ce sont des représentants de milice qui ont des compétences techniques.
Qu'est-ce que des représentants des partis politiques viennent faire là-dedans ? Quelle plus-value vont-ils apporter à cette fondation ? S'il vous plaît, ce projet de loi ne répond à aucun problème, à aucun besoin. De toute évidence, ceux qui sont à l'origine de ce texte souhaitent bénéficier d'une présence dans ce conseil de fondation. En soi, c'est légitime, mais alors qu'ils présentent des personnes qui ont les compétences et qui sont professionnellement qualifiées pour pouvoir en justifier !
Pour le PLR, toutes ces entités de droit public ont au contraire besoin d'autonomie, de pouvoir remplir leur mission sans que les partis politiques et leurs représentants viennent leur dicter leur conduite ou le nombre de frontaliers qu'elles sont autorisées à engager. Mesdames et Messieurs, ce projet de loi est un non-sens absolu, je vous invite à ne pas voter l'entrée en matière !
Une voix. Bravo !
M. Vincent Canonica (LJS). Je me rallierai bien évidemment à la majorité de mes préopinants, qui ont presque tout dit ! Pour être factuel, quand s'adresse-t-on à la FAE ? Notamment quand une entreprise ne va pas bien, qu'elle a des problèmes de trésorerie et qu'elle se retrouve dans une situation d'urgence, de grande difficulté. La FAE a justement été mise en place pour soutenir des entreprises qui en ont besoin. Dans ces cas-là, quand un entrepreneur fait appel à la FAE, il a besoin d'une décision rapide, efficace, qui va lui servir dans la durée.
Par conséquent, politiser les décideurs amenés à se prononcer sur l'avenir d'une entreprise, ce n'est absolument pas un gage de qualité. Les travaux de commission n'ont pas du tout mis en exergue un besoin. Dans ce projet de loi, on voit effectivement plutôt un souhait politique, une envie de politiser ce conseil, alors que cela ne répond nullement à un besoin. Comme la majorité des préopinants, nous estimons que la qualité de la prestation et la célérité doivent prévaloir sur l'idée de faire entrer dans ce conseil un grand nombre de personnes, qui n'ont rien à y faire s'agissant de décisions sur l'avenir des entreprises. Le groupe LJS refusera donc lui aussi ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Madani pour vingt secondes.
M. Amar Madani (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Je dirai brièvement qu'à entendre les interventions de certains préopinants, j'ai l'impression que les élus de ce parlement sont analphabètes, sauf peut-être ceux de l'UDC et du PLR. J'aimerais juste revenir sur un point essentiel, Mesdames et Messieurs: quand on parle de la représentation au sein des fondations, il y a deux dimensions. La première est la dimension technique, qui est inhérente aux experts, et la deuxième est la dimension stratégique. C'est la raison pour laquelle le MCG dit non à la technostructure et oui à la politique, qui doit primer ! Merci.
M. Diego Esteban (S). J'écoute attentivement ce débat et j'ai l'impression qu'on s'éloigne un peu de l'objet du projet de loi. Les interventions vont dans le sens d'un choix entre tout ou rien, entre des représentants de partis politiques partout ou alors nulle part. Ce n'est pas du tout l'objet du texte, je crois que personne ici ne pense sérieusement que la Fondation d'aide aux entreprises est la pierre angulaire de cette discussion-là. Si c'est vraiment le débat qu'on veut avoir, il faudrait que nous ayons devant nos yeux un projet de loi sur cette question; ce n'est pas le cas.
On a donné l'exemple de la commission de la pêche: la grande différence entre cette commission et la Fondation d'aide aux entreprises, c'est que la première peut émettre des préavis, ce qui n'est pas le cas de la FAE. Du coup, le pouvoir sur la mise en oeuvre des politiques publiques est quand même notoirement différent - vous savez à quel point un préavis négatif peut torpiller la réalisation d'un projet, alors que la Fondation d'aide aux entreprises n'a pas ce pouvoir. Merci beaucoup.
Mme Alia Chaker Mangeat (LC), rapporteuse de majorité. J'aimerais juste répondre sur les questions de transparence et de contrôle: je rappelle que le rapport de la FAE est soumis annuellement à la fois au Conseil d'Etat et au Grand Conseil. Merci.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je rappelle ici que la Fondation d'aide aux entreprises a pour objectif de soutenir et d'aider des entrepreneurs ou des entreprises en difficulté. Elle a aussi pour but de les aider à démarrer dans un projet entrepreneurial. Ce qui doit primer au sein d'un conseil, ce sont les compétences permettant d'analyser la viabilité des dossiers, leur capacité à être pérennes, à être viables.
A ce stade, j'estime que la composition du conseil, qui - je le rappelle - contient deux représentants du Grand Conseil, est satisfaisante. Je ne crois pas qu'il s'agisse ici de discuter de la représentativité des différents courants politiques; je crois au contraire qu'elle n'y a pas de place, puisque à mon avis - j'en suis certaine - chacun et chacune dans cet hémicycle a à coeur le soutien apporté à des entreprises genevoises. Je considère que c'est aussi ce qui prime dans l'esprit des deux personnes qui représentent le parlement au sein de ce conseil de fondation.
Dès lors, je crois qu'il n'est pas nécessaire de politiser cette institution plus qu'elle ne l'est déjà. Au contraire, je crois que les compétences, qui priment au sein d'un conseil de fondation, c'est réellement ce qu'on va chercher afin d'être assuré qu'on soutient les bonnes entreprises et les bons projets. Par conséquent, à l'heure actuelle, la FAE et son conseil, dans la composition qui est la sienne, ont toute ma confiance. Le Conseil d'Etat vous invite donc à rejeter le présent objet.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote d'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13363 est rejeté en premier débat par 75 non contre 13 oui.
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au PL 13364-A, que nous traiterons en catégorie II, trente minutes. Monsieur Vincent Canonica, vous avez la parole.
M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Ce projet de loi a été étudié à la commission de l'économie. Il a pour objet de... Attendez, excusez-moi. (L'orateur consulte son ordinateur. Un instant s'écoule.) Je m'y suis mal pris. (Un instant s'écoule à nouveau.)
Le président. Que ferons-nous le jour où les ordinateurs tomberont en panne ! (Commentaires.)
M. Vincent Canonica. En panne sèche ! (L'orateur rit. Commentaires.) Ce projet de loi a donc pour but de supprimer la nécessité, pour un commerçant, de renouveler son autorisation pour la vente à l'emporter de boissons alcooliques, de produits du tabac et de produits assimilés au tabac. Tout exploitant qui souhaite vendre des boissons alcooliques à l'emporter ou du tabac, ainsi que tout produit assimilé au tabac, doit obtenir une autorisation préalable délivrée par l'autorité concernée moyennant la remise d'un certain nombre de documents - environ douze. La loi actuelle prévoit que l'autorisation délivrée a une durée limitée à quatre ans et que, pour chaque renouvellement, tous ces documents - les douze - doivent être présentés à nouveau. Pour ceux qui souhaitent en savoir plus, ces douze documents sont listés aux articles 3 et 4 du règlement d'exécution de la loi sur la remise à titre gratuit et la vente à l'emporter de boissons alcooliques et de produits du tabac.
Ce projet de loi n'a pas pour objet de supprimer la demande d'autorisation préalable. En cas de changement d'exploitant, le repreneur doit par ailleurs se conformer aux mêmes modalités que tout nouvel exploitant. En cas de problème avec l'obtention de l'un ou l'autre document, l'exploitant risque de devoir cesser temporairement son activité; la limitation de cette autorisation dans le temps n'est pas justifiée dès lors que le règlement d'application prévoit un contrôle régulier des exploitants. Et lors de l'audition de la PCTN, nous avons bien entendu que de nombreux contrôles ont régulièrement lieu pour vérifier le respect par les commerçants des conditions de l'autorisation.
J'insiste sur le fait que cette modification législative ne s'appliquera qu'en cas de renouvellement par le même exploitant, pas en cas de changement d'exploitant. Sa teneur s'inspire de la LRDBHD, qui stipule que les restaurateurs ne sont pas soumis à l'exigence de renouvellement de leur autorisation initiale.
Le président. Vous parlez sur le temps de votre groupe, Monsieur le député.
M. Vincent Canonica. Merci, Monsieur le président. Les deux activités sont comparables; il serait donc de bon aloi que les mêmes conditions s'appliquent. Il ne s'agit que d'une simplification administrative et les services concernés pourront toujours effectuer des contrôles en cas de doute. Le projet de loi prévoit également des dispositions transitoires pour les commerçants au bénéfice d'une autorisation, pour que celle-ci devienne automatiquement pérenne. Je reprendrai la parole par la suite, en fonction des débats qui suivront.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, ceux qui ont mon âge ou plus se souviennent peut-être d'une série de dessins animés dans laquelle un petit poussin noir coiffé d'une demi-coquille avait pour refrain: «Mais c'est vraiment trop trop trop trop trop injuste !» (L'orateur prononce la citation en zozotant.) On peut regretter que certains membres de ce parlement aient ça pour guide dans l'exercice de leur fonction plutôt que les lumières de leur conscience, pour reprendre le serment que nous avons prêté en début de législature. Cette loi est vraiment un exemple archétypique de cette façon de faire de la politique que nous dénonçons, et qu'évidemment nous regrettons. D'où est-ce que c'est parti? D'un kiosquier de l'aéroport qui, alerté par certains de ses collègues vendeurs d'alcool et de tabac, estime que, décidément, devoir produire à intervalles réguliers, c'est-à-dire tous les quatre ans - les années olympiques -, une série de documents, c'est vraiment trop trop trop trop trop trop injuste ! (L'orateur prononce la fin de la phrase en zozotant. Rires.) Voilà pour le cadre.
Un projet de loi a été déposé pour supprimer la nécessité de renouveler cette autorisation et je dois vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, que la commission de l'économie - en tout cas ses membres de gauche - a souhaité le traiter avec énormément de rigueur et de sérieux. Parce que nous sommes tout à fait conscients que le travail des vendeurs, des commerçants, n'est pas évident et que cette nécessité de produire quelques pièces à intervalles réguliers est peut-être trop exigeante, qu'elle nuit peut-être à leur activité, et que ce n'est peut-être pas la meilleure façon de réguler des produits pour le moins sensibles: le tabac et l'alcool. Nous avons donc désiré faire ce travail avec soin et - pour être clair - la commission nous en a empêchés !
Alors, la première chose que nous avons faite, c'est examiner la liste à laquelle le rapporteur de majorité - vous l'aurez reconnu, c'est aussi l'auteur de ce projet de loi, ce qui n'est pas tout à fait respectueux de l'article 188, sauf erreur, de la LRGC, mais c'est un autre problème - a fait référence. Je vous invite à l'examiner: ce ne sont évidemment pas douze documents qui sont demandés ! Ce chiffre de douze englobe des documents qui s'excluent eux-mêmes: vous ne pouvez pas être simultanément citoyen suisse et disposer d'un permis d'établissement, vous ne pouvez pas être simultanément locataire et propriétaire de votre local. La PCTN, le seul organisme qu'il nous a été loisible d'auditionner, nous a très clairement signalé que pour les citoyens suisses résidant à Genève, le nombre de ces documents est de sept; pour les citoyens étrangers, de huit; pour les citoyens étrangers ne résidant pas à Genève, il est légèrement supérieur: au maximum de onze. Ces documents, à trois exceptions près, sont tous disponibles soit dans les registres de l'entrepreneur soit sur simple demande gratuite, comme l'extrait du registre du commerce. Il n'y a que trois documents qui doivent être commandés, avec une légère attente.
Dans l'exposé des motifs comme lors de son audition, l'auteur du projet de loi a prétendu que la PCTN avait du retard dans le traitement des autorisations. Cela relève du mensonge ! La PCTN nous a assuré que les seuls retards qu'il y a eu ont été occasionnés par l'insuffisance des pièces fournies ou les problèmes rencontrés dans leur traitement. La PCTN, je l'ai dit, a été auditionnée et nous a enjoint de ne pas accepter cette demande parce que la procédure en question est un des rares moyens de limiter le taux de fraude, qui est extraordinairement élevé dans ce canton: il dépasse 10% lorsque les achats tests portent sur l'alcool et le tabac et, vous avez sans doute lu le communiqué qui le signale, on atteint 40% d'achats illégaux lorsqu'ils portent sur les puffs, ces petites cigarettes électroniques jetables.
Je ne demanderai pas moi-même le renvoi en commission: je vais laisser mon excellente collègue Sophie Demaurex s'en charger et j'utiliserai les trois minutes qui me seront allouées pour présenter le volet santé de cet objet. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Sophie Demaurex (S), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, que dit Addiction Suisse en juillet 2024 ? «L'alcool continue d'être vendu illégalement à bien trop de jeunes en Suisse. Des contrôles d'âge rigoureux s'imposent [...]. Ce sont les constats tirés des achats tests effectués en 2023 par différentes entités publiques ou privées. Addiction Suisse a analysé ces achats tests sur mandat de l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières. [...] Globalement, les résultats ne montrent pas de réelle amélioration par rapport à 2022.» Dans 27% des cas, de la bière, du vin ou des spiritueux ont été vendus illégalement aux jeunes, soit un taux identique à celui enregistré en 2022.
Cette petite introduction pour vous dire: parlons alcool et santé puisque cette commission n'a souhaité parler que d'économie. En Suisse, 5% de personnes sont alcoolodépendantes. Un quart des jeunes qui arrivent aux urgences sont alcoolisés et vont devenir alcooliques. Miser sur la liberté et la responsabilité individuelle, c'est oublier la nature de cette substance. L'alcool fort est facile à obtenir et toujours moins cher; les admissions aux urgences avec un taux d'alcoolémie supérieur à 2 pour mille prennent l'ascenseur, et la corrélation entre ces taux et la libéralisation de la vente d'alcool est démontrée. Les mesures structurelles, à l'instar de la LTGVEAT, sont certes impopulaires, mais elles sont tellement efficaces ! Or, les lois suisses sur la vente d'alcool sont les plus libérales du monde.
Comme l'alcool est légal, on oublie que c'est aussi une drogue puissante induisant des changements sur le fonctionnement du cerveau - un cerveau en pleine maturation chez les 15-25 ans. Entre parenthèses, il semblerait que la question des drogues puissantes anime un petit peu les débats et ait animé cette arène la semaine passée - je ne pense à aucune drogue ! Je reviens à l'alcool: ne pas dramatiser mais ne pas banaliser, telle est la ligne suivie par les milieux de la prévention. Il s'agit de travailler sur les comportements et les mesures structurelles de réduction des risques, et cette loi en est une.
En résumé, l'accessibilité de l'alcool devrait réellement être prise au sérieux par ce parlement, pas uniquement sous un angle économique mais également sanitaire. Dois-je vous rappeler les motions, les pétitions, les projets de lois, les résolutions qui traitent de dépendances et de comportements à risque, comme le crack ou le tabagisme passif, déposés par les mêmes groupes qui veulent abolir les autorisations contrôlées et renouvelées par la LTGVEAT ? Aussi, je vous recommande de renvoyer ce projet de loi à la commission de la santé et d'auditionner les spécialistes du terrain, notamment Carrefour addictionS. Vous en conviendrez, chers députés, la santé ne peut pas être séparée de l'économie ou écartée par elle. Les coûts de l'assurance-maladie ne sont pas un problème à considérer uniquement sous l'angle de l'économie ou de la santé, mais sous l'angle des deux. Aussi, je vous remercie d'approuver un renvoi à la commission de la santé. Et puis, santé ! (L'oratrice lève un verre en direction de l'assemblée et boit.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole au rapporteur de première minorité - sur le renvoi en commission, Monsieur.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. La rapporteuse de deuxième minorité propose un renvoi à la commission de la santé: c'est un renvoi qui est à notre sens tout à fait opportun. Pourquoi cela ? Parce que, les plus anciens de ce parlement se le rappellent sans doute, la LTGVEAT, déposée en 2018, avait été présentée par le DSES qui était le département de la santé de l'époque. C'est une loi qui n'a pas pour but de servir ni même d'encadrer les commerçants: elle a un but de santé publique ! Elle a essentiellement pour but d'empêcher que l'alcool et le tabac, qui sont des substances problématiques, sensibles, puissent être accessibles à notre jeunesse et occasionner des excès dommageables, à la fois pour les auteurs de ces excès mais aussi pour l'entier de la société.
Comme l'a dit la rapporteuse de deuxième minorité, la commission a souhaité examiner ce projet de loi également sous l'angle de la prévention des addictions en auditionnant des spécialistes de ce domaine, c'est-à-dire Carrefour addictionS. Cette demande a été présentée à deux reprises à la commission; elle a été écartée à deux reprises - la deuxième fois à égalité mais, vous le savez, cela équivaut à un non dans des débats en commission. Cela est plus que regrettable parce que cela laisse entendre que tant la LTGVEAT que ce projet de loi particulier ne doivent être envisagés que sous l'angle du confort des commerçants, dont je n'essaierai pas de réimiter l'état d'esprit.
J'irai même plus loin: en définitive, une loi relativement stricte qui cadre les commerçants vertueux les protège également ! Parce que, on l'a dit, il suffit d'aller enquêter auprès des jeunes: ils savent très bien où se procurer de l'alcool, ils savent très bien où se procurer du tabac. Ils témoignent même que certains commerçants profitent de cette loi pour surtaxer l'alcool en dehors des heures de vente légale ou pour surtaxer le tabac auprès de mineurs pour ne pas demander leur pièce d'identité. C'est un monde qui est parfaitement interlope; les commerçants qui respectent la loi doivent être protégés et il faut au contraire une loi stricte et bien établie pour écarter ceux qui ne remplissent pas les exigences minimales que la société attend d'eux. C'est pourquoi nous vous proposons d'accepter le renvoi en commission. Je vous remercie.
M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de majorité. Il s'agit ici d'un faux débat, parce que ramener la question du renouvellement de l'autorisation à la problématique de la consommation d'alcool ou de l'accès à sa consommation par les jeunes... Cela n'est pas lié à cette simplification administrative. C'est par les contrôles effectués auprès des commerçants que l'on peut évaluer la problématique, mais ce n'est pas lié à la délivrance ou non d'une autorisation ! Ce n'est pas en fonction de... au moment de la délivrance que l'on peut savoir si la personne va respecter ou non la loi ! C'est uniquement par le biais de contrôles. Lors de l'audition de la PCTN, elle a relevé que les commerçants dans la restauration passent un diplôme de patente, ce qui les rendrait plus honorables que ceux qui exploitent un kiosque, de par la formation les rendant plus attentifs au respect - ou pas - de la loi. Cela est un leurre; la réalité, quand on pourra maîtriser... On ne se bat pas pour favoriser la consommation d'alcool et ce n'est pas du tout l'objectif de ce projet de loi: nous sommes bien sûr absolument opposés à la consommation d'alcool, et ce n'est pas cette modification qui favorisera davantage de consommation d'alcool par les jeunes. Nous refusons donc le renvoi en commission.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. S'agissant du renvoi en commission, j'y suis favorable... (Protestations.) ...ne serait-ce que pour une question de forme: le Conseil d'Etat n'a pas été auditionné sur ce texte ! Les milieux concernés n'ont pas été auditionnés sur ce texte ! (Protestations.)
Le président. S'il vous plaît !
Mme Delphine Bachmann. On peut estimer qu'on se passe de notre avis - ou pas; il n'empêche que je souhaite vous rendre ici attentifs et attentives à cet état de fait.
Ensuite, je voudrais quand même revenir sur un élément: oui, pour être titulaire d'une patente, vous suivez effectivement des cours. Oui, vous travaillez aussi avec le département et la police du commerce sur la prévention des risques de consommation chez les jeunes. Et je suis persuadée que ce travail que nous menons en collaboration avec les faîtières de l'hôtellerie-restauration n'est pas un leurre ! C'est un travail de fond, parce que l'idée n'est pas d'interdire: c'est également de sensibiliser les milieux qui délivrent ou sont amenés à servir de l'alcool, de les associer à la démarche de prévention.
Je rappelle par ailleurs que le Conseil d'Etat, notamment porté par le magistrat chargé de la santé, souhaite faire - et a fait dans son programme de législature - de la prévention et de la promotion de la santé une de ses priorités. Dès lors, je vous remercie de bien vouloir soutenir ce renvoi à la commission de la santé pour que le Conseil d'Etat et les milieux concernés aient aussi l'occasion de s'exprimer sur ce qu'on appelle une simplification administrative. Et je suis favorable aux simplifications administratives, mais aux vraies, pas à celles qui visent à faciliter la distribution d'alcool au grand public. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13364 à la commission de la santé est adopté par 53 oui contre 40 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Premier débat
Le président. Nous passons au PL 13410-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Monsieur Pascal Uehlinger, vous avez la parole.
M. Pascal Uehlinger (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous parlons ici de la modification d'une loi qui est très, très, très ancienne, car elle date du 28 janvier 2022 ! Elle a fait l'objet d'un processus d'adoption assez long. Aujourd'hui, cette loi n'est modifiée que sur une disposition, à savoir l'article 18, alinéa 2, selon lequel afin de limiter progressivement les émissions de CO2, les voitures utilisées doivent remplir différents critères. La première étape voulait que dès le 1er juillet 2024, les voitures aient une efficacité énergétique correspondant aux catégories étiquette-énergie A, B, C ou D. On a vu qu'avec les délais de recours, l'application de cette première étape s'est révélée difficile. La conseillère d'Etat, avec l'aval de ses collègues du gouvernement, a finalement dit que l'application de cette disposition allait être repoussée et que le point de départ de cette loi serait celui de la deuxième étape. Celle-ci prévoit que dès le 1er juillet 2027, les voitures en question aient une efficacité énergétique correspondant à la catégorie étiquette-énergie A. La dernière étape est que dès le 1er juillet 2030, ces véhicules n'émettent plus de CO2.
La modification proposée par ce projet de loi consiste à repousser au 1er juillet 2035 l'exigence de ne plus émettre de CO2. Il s'agit donc d'un retour en arrière dans la transition énergétique et tout ce qu'on peut mettre en place dans notre société pour l'atteindre. En plus de cela, nous avons reçu des garanties du Conseil d'Etat. Même pour la deuxième étape, on s'est rendu compte que pour certains types de taxis ou de véhicules lourds, des déplacements pouvaient être problématiques. La conseillère d'Etat s'est aussi engagée à communiquer et à continuer de discuter avec les professionnels de cette branche; elle a indiqué que courant 2026, elle reviendrait vers eux pour leur exposer la réalité des problèmes présents à ce moment-là.
Nous avons une deuxième problématique aujourd'hui, et je pense qu'exercer une certaine pression via ces échéances représente aussi pour l'Etat le défi de mettre suffisamment de bornes de recharge pour ces professionnels. In fine, si on commence à délayer ces échéances, la pression pour mettre ces bornes et équiper l'Etat, la Ville de Genève et le canton se fera moins forte et la transition sera plus lente et difficile.
Quand j'ai commencé dans ma branche d'activité il y a vingt ans, on m'avait dit que le lendemain ou le surlendemain, les voitures feraient comme les avions, qu'elles suivraient des bornes le long des grands axes routiers. Dix ans après, aucune borne n'était installée sur les routes, et les voitures conduisaient toutes seules sur des autoroutes ou des routes principales. Cela signifie que personne ne peut dire à quelle vitesse et comment va évoluer la technologie. Est-ce que demain le métier de chauffeur de taxi sera comme aujourd'hui ? Aura-t-il évolué ?
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Monsieur le député.
Pascal Uehlinger. Oui, merci, Monsieur le président. Est-ce que demain les voitures pourront se déplacer sur des distances de 1000 à 2000 kilomètres avec des batteries qui utiliseront de nouvelles technologies ? On n'en sait rien. Moi, je pense qu'en fin de compte, pour ce projet de loi, il est urgent d'attendre. La loi qui a été adoptée à une large majorité à l'époque et qui, je vous le rappelle, date du 28 janvier 2022 est évidemment en vigueur et peut être appliquée aujourd'hui avec un certain pragmatisme. J'en ai terminé, Monsieur le président.
Mme Gabrielle Le Goff (MCG), députée suppléante et rapporteuse de minorité. Le PL 13410 propose de surseoir temporairement à l'entrée en vigueur des obligations irréalisables prescrites à l'article 18, alinéa 2, de la LTVTC. Rappelons que cette disposition prévoit une réduction drastique et progressive imposée par l'Etat des émissions de CO2 depuis trois mois, qui frappe l'ensemble des véhicules taxis et VTC du canton, avec une interdiction de circuler pour les véhicules de cette catégorie qui émettent le moindre gramme de CO2 à compter du 1er juillet 2030.
Cela constitue littéralement une entrave à l'activité économique, basée sur des motifs pseudo-écologiques. En imposant par la contrainte des objectifs aussi stricts, la LTVTC plonge 3060 travailleurs et familles dans l'incertitude économique et le stress professionnel. Les autorités semblent conscientes du problème, à tel point que pour y remédier, la conseillère d'Etat Delphine Bachmann a fait une déclaration surprenante lors de son audition en indiquant qu'elle allait proposer au Conseil d'Etat de ne pas contrôler le respect du délai fixé au 1er juillet 2024, mais seulement à partir du 1er juillet 2027.
De plus, on retiendra que le canton, qui dispose d'une capacité extrêmement limitée en infrastructures pour recharger rapidement les véhicules taxis et VTC électriques, envisage donc de faire supporter le poids de sa transition écologique à une seule profession. Après les taxis et VTC utilisés comme cobayes pour satisfaire les ambitions écologiques de l'Etat, il est probable que viendra ensuite le tour de nos concitoyens, à qui l'on risque également bientôt d'interdire de conduire des véhicules thermiques à Genève.
Ce n'est pas l'Etat qui dicte l'échéancier de la transition écologique, c'est l'économie. Et dans les faits, les enjeux technologiques et économiques sont d'une telle complexité et d'une telle ampleur qu'il est absolument impossible de savoir quand ces technologies seront disponibles commercialement à un prix abordable. En revanche, l'Etat peut soutenir l'économie genevoise en s'assurant que la vie des taxis et VTC genevois ne soit pas plus difficile que celle des 2500 taxis et VTC étrangers autorisés par la PCTN à travailler dans le canton, qui, eux, ne sont pas contraints par la LTVTC.
Je vous rappelle que l'Union européenne a fixé à 2035 la date à laquelle il ne sera plus possible d'acheter de nouveaux véhicules émetteurs de gaz à effet de serre. C'est pourquoi plutôt que d'inciter les travailleurs du canton à enfreindre une loi inapplicable et inéquitable, le MCG vous recommande d'accepter le PL 13410, qui permet de reporter raisonnablement à 2035 l'entrée en vigueur des dispositions problématiques de la LTVTC. Mesdames et Messieurs les députés, merci de votre attention. (Applaudissements.)
M. Stefan Balaban (LJS). Les rapporteurs de majorité et de minorité ont relativement bien exposé la problématique, je ne vais pas répéter ce qui a été dit. Cette loi est discutée depuis 2022, il s'agit d'un sujet assez chaud. Après, il faut quand même garder en tête que cette loi est le fruit d'un de nos objectifs, le plan climat, visant à améliorer la qualité de vie de nos concitoyens. C'est un objectif noble et nous le saluons.
Aussi, nous tenons à remercier le département de l'économie et de l'emploi et Mme la conseillère d'Etat Bachmann d'avoir fait preuve d'empathie et de flexibilité en décidant de reporter l'application de la loi à 2027 - il faut quand même souligner cette flexibilité.
Cependant, il reste des zones d'ombre dans cette loi. Le problème qui n'est pas pris en compte - là, je suis surpris d'entendre nos voisins de la droite, censés comprendre l'économie ! - est le suivant: lorsqu'un chef d'entreprise, un indépendant, doit investir et acheter un actif, ici un véhicule, tout le monde sait que ça ne s'amortit pas en une année. On a besoin d'avoir de la clarté, une certitude, une vision, un regard à long terme sur notre activité. Et puis, dire qu'il n'y a pas matière à défendre les taxis et les VTC revient selon moi à négliger ce secteur d'activité sur le plan économique.
Il y a un autre aspect qui n'a pas été pris en compte dans cette loi et dans son application. Il est évident, toute personne qui prend un taxi... Dans la majorité des cas, nous avons affaire par exemple à des Toyota Prius. On sait qu'elles respectent les classes énergétiques, il n'y a donc pas de problème avec ça. Par contre, un point essentiel qui a été omis, c'est la Genève internationale et, parallèlement - on a tendance à l'oublier -, le fait que Genève est une zone importante, que les touristes y arrivent pour partir ensuite à Gstaad, à Megève. Ces gens-là n'y vont pas en calèche, ils utilisent des vans, des véhicules de huit à neuf places, et il faut transporter les skis. On fait comment pour transporter ces gens si on applique la loi en l'état ? C'est en raison de la non-prise en considération de ce segment-là que nous demandons le renvoi en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole aux rapporteurs sur cette demande de renvoi en commission, en commençant par la rapporteure de minorité. (Un instant s'écoule.) Madame, soutenez-vous le renvoi en commission ?
Mme Gabrielle Le Goff. Oui !
Le président. Très bien, la parole est au rapporteur de majorité.
M. Pascal Uehlinger (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. J'entends bien les propos qui sont tenus. J'ai pour ma part une entière confiance en Mme la conseillère d'Etat, qui nous a dit qu'elle avait bien remarqué que deux ou trois types de véhicules, dont ceux que mon préopinant a cités, étaient potentiellement une cible de problèmes pour 2027 en fonction des évolutions technologiques. C'est pour ça que je disais qu'il est urgent d'attendre le retour du Conseil d'Etat une fois qu'il aura consulté les professionnels de la branche, pour déterminer si ce sera toujours un problème en 2026 et, le cas échéant, si on fait des modifications ou pas.
On voit toujours les députés des bancs de droite comme les méchants qui luttent contre la biodiversité et la transition énergétique; ce projet de loi a été initié par un parti vert. Je suis prêt à le voter et à le soutenir. Ce sont les Verts qui ont amené ces discussions. Il a été voté à une large majorité. Personnellement, je ne suis pas en faveur d'un renvoi en commission, mais si la majorité souhaite renvoyer ce texte, je vivrai très bien avec. A titre personnel, je trouverais assez drôle que certaines personnes souhaitent retarder la transition énergétique, surtout quand c'est eux qui ont mis la loi en place. J'en ai terminé, Monsieur le président.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Je vous laisserai effectivement juger de l'opportunité et de la nécessité de renvoyer ce texte en commission au vu du nombre d'amendements et des discussions. Je souhaitais juste revenir sur quelques points. Le premier, c'est que, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire un peu plus tôt dans la soirée, cette disposition relative à la transition écologique et à la contribution des véhicules professionnels à cet effet avec pour objectif d'atteindre le plan climat a été souhaitée par le parlement lors de la dernière révision de la LTVTC, votée, je le rappelle, en 2022.
Une fois que ce cadre-là est posé, je rappelle également que des recours ont eu lieu, que le Tribunal fédéral a tranché très récemment, il y a quatre mois, en faveur du Grand Conseil, déterminant ainsi qu'il était parfaitement légitime de fixer ces objectifs. Si la compétence législative est bien évidemment celle de votre Grand Conseil, celle du gouvernement est d'appliquer le principe de proportionnalité dans la mise en oeuvre de la loi. Suite à cet arrêt du Tribunal fédéral, qui tombait très peu de temps avant la première échéance du 1er juillet 2024, mes services ont commencé par faire un inventaire pour savoir où on en était dans l'atteinte de ces objectifs.
Je relève à ce propos que 70% des taxis sont aujourd'hui aux normes et respectent les exigences fixées au 1er juillet 2024. Cela représente une progression de 20% par rapport à 2020. Je pense que c'est quand même un indicateur qui démontre que quand on fixe des objectifs, cela met effectivement une pression, rend les gens attentifs et les encourage à changer leur pratique. Maintenant, très clairement, entre le moment où la loi a été votée et le moment où l'arrêt du Tribunal fédéral est tombé, un temps s'est écoulé. Durant ce temps-là, des leasings ont été renouvelés, et on comprend parfaitement qu'au vu de l'incertitude juridique, ces leasings qui n'ont peut-être pas été renouvelés dans la bonne catégorie en début d'année 2024 puissent faire aujourd'hui l'objet d'une dérogation. Mes services ont émis une directive et les situations qui pourraient se révéler problématiques sont traitées au cas par cas. En tout cas, à ce jour, on ne m'a pas remonté le cas d'un taxi à qui on aurait interdit d'exercer parce qu'il aurait obtenu, entre l'entrée en vigueur de la loi et l'arrêt du Tribunal fédéral, un renouvellement de leasing pour une voiture qui n'était pas encore tout à fait aux normes.
Ensuite, je rappelle aussi que cette même loi votée en 2022 par ce parlement a instauré la commission consultative sur la LTVTC, qui réunit l'ensemble des acteurs du domaine. Cette commission siège sous ma présidence quatre fois par année en moyenne. On y présente toutes les actualités, on y discute typiquement de l'atteinte de ce type d'objectifs. Et oui, j'ai transmis à cette même commission, au même titre que je l'ai expliqué à la commission des transports, qu'aujourd'hui, on maintenait les objectifs fixés à 2027 ainsi que le suivant - c'est ce que le parlement avait voulu -, et qu'on monitorerait, année après année, la capacité de la profession à y répondre.
Et vous avez raison, quand on se fixe un objectif, on doit se donner les moyens de l'atteindre, et c'est la raison pour laquelle nous avons également présenté au sein de cette commission l'intégralité du plan électromobilité du canton. Une task force est mise en place. L'augmentation du nombre de bornes de recharge rapide fait bien partie des objectifs. Nous travaillons en collaboration avec la Fondation des parkings et les SIG pour nous donner les moyens d'avoir une offre suffisante en 2027 pour les taxis, les VTC et les professionnels du transport.
Voilà ce que je souhaitais vous dire; au vu du nombre d'amendements et de l'état des discussions, je laisse bien évidemment au libre arbitre de votre parlement de décider ou non d'un renvoi en commission, mais si le projet devait être renvoyé, je vous transmettrais en résumé les mêmes éléments, peut-être de manière un peu plus précise. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13410 à la commission des transports est adopté par 71 oui contre 21 non.
Débat
Le président. Voici le prochain point: la M 2711-A (catégorie II, trente minutes). Je cède la parole à M. Jacques Blondin.
M. Jacques Blondin (LC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, cette proposition de motion «pour une politique ambitieuse en matière d'emploi et de réinsertion professionnelle» a été déposée au mois de novembre 2020. Il faut se remettre dans le contexte de l'époque: le covid venait juste de nous tomber dessus et il y avait de fortes préoccupations à ce moment-là, ce qui a justifié le dépôt de ce texte.
Quelques mots sur les invites - j'y reviendrai après. La première consiste «à renforcer le suivi et le soutien aux demandeurs et demandeuses d'emploi inscrits auprès de l'OCE». Il s'agit surtout d'une critique vis-à-vis de l'office cantonal de l'emploi quant à sa manière - cela lui a été reproché - de gérer les affaires plutôt que d'offrir un accompagnement. Ce point a fait l'objet de larges discussions au sein de la commission, qui a siégé cinq fois pour traiter cette problématique.
Ensuite, il est demandé de développer l'offre et de privilégier la formation qualifiante pour les personnes inscrites auprès de l'office cantonal de l'emploi. Cette idée a été jugée très intéressante par les commissaires, mais les syndicats eux-mêmes ont relevé le côté incongru de la chose, c'est-à-dire qu'à partir du moment où un chômeur suit une formation quelconque, il n'est plus disponible pour répondre à des offres d'emploi, donc il n'a plus droit au chômage. Aussi, cet élément est plus contreproductif que positif par rapport à l'idée de base des initiants.
Je continue: «à supprimer les obstacles administratifs tendant à dissuader certains et certaines bénéficiaires potentiels des prestations de l'assurance-chômage de s'inscrire auprès de l'OCE». Ce problème était lié au nombre élevé de demandes - je crois qu'il y a eu 170 000 entretiens à ce moment-là -, au fait que les collaborateurs n'étaient pas toujours disponibles. Or on a constaté que l'office cantonal de l'emploi avait mis en place des entretiens via internet de façon à aller plus vite.
L'un des points fondamentaux, c'est la volonté de supprimer le nombre de postulations obligatoires par mois pour toucher les allocations chômage. Là aussi, on est parti du principe que dans le pataquès de l'époque, si vous arrivez à vous en souvenir - heureusement qu'on peut maintenant l'oublier -, c'était compliqué, mais cet aspect relève finalement du droit fédéral, l'office cantonal de l'emploi ne fait qu'appliquer des normes fédérales et sa marge de manoeuvre est très faible à cet égard.
Quant à mener une étude pour évaluer l'impact de la crise, il était envisagé que l'Université de Genève s'en charge; je dois vous avouer que je ne sais pas si cette enquête a été réalisée ou pas.
Lors des nombreuses auditions - à l'époque, c'est Mme Fischer qui était à votre place, Madame Bachmann, et qui était venue avec le directeur de l'office cantonal de l'emploi -, on nous a clairement rappelé que l'office cantonal de l'emploi n'était qu'un organe d'exécution et que s'il n'appliquait pas les normes fédérales, des sanctions tombaient. On peut l'interpréter comme on veut, mais ils estiment avoir fait le job, ils estiment même avoir utilisé le bas de l'échelle des normes «répressives», entre guillemets, pour ne pas sanctionner trop fortement les personnes en situation difficile.
Un point important qui a été mis en avant à l'époque, c'est que beaucoup de personnes ne savaient pas qu'elles avaient l'obligation, à partir du moment où elles étaient au chômage, de contacter tout de suite des employeurs et d'effectuer des recherches d'emploi. A ce sujet, des contacts ont été pris avec les associations professionnelles pour y remédier de manière à ce que la personne au chômage sache que si elle n'entreprenait pas immédiatement des démarches, elle risquait d'être pénalisée.
Par ailleurs, l'Etat a mis en place des bonus employabilité ainsi que le programme Level+ - rappelez-vous - pour réinsérer les personnes de plus de 50 ans.
Nous avons reçu l'UAPG, qui nous a donné des explications quant à la situation économique. Evidemment, entre le moment où la motion a été déposée et les auditions, il s'est passé pas mal de temps. On a vu qu'il y avait des inquiétudes à l'époque du dépôt, mais entre-temps, grâce à la flexibilité du marché de l'emploi, les choses ont fonctionné. Soulignons également l'efficacité du dispositif de RHT, qui a vraiment été utile: on a pu sécuriser le salaire de beaucoup de monde, et c'était le but.
Il faut relever la rapidité - c'est fort heureux - avec laquelle le marché de l'emploi s'est rétabli. Au moment des dernières auditions, c'est plutôt l'économie qui était en recherche de main-d'oeuvre, puisqu'il y avait une pénurie généralisée dans tous les secteurs. L'Etat a alors mis en place une task force employabilité; à titre personnel, je n'ai jamais eu connaissance du rapport, mais je crois que certains membres de la commission de l'économie l'ont lu.
J'en reviens à la CGAS, parce qu'il a fallu interroger les syndicats sur cette affaire - ce sont d'ailleurs eux-mêmes qui ont souligné la problématique des formations qualifiantes. J'aimerais vous lire un extrait du rapport - si je retrouve la page, mais je vais la retrouver, oui, c'est la page 17: «En effet, pour avoir droit à une indemnité chômage au sens de la LACI, il faut être apte à l'emploi, ce qui implique une disponibilité à n'importe quel moment. Ce point est donc incompatible avec une formation certifiante, au sens de la LACI. Les chômeurs en formation deviennent inaptes au placement et perdent leur droit à l'indemnité chômage.» C'est cette incongruité du droit fédéral que la CGAS a mise en avant. De plus, même les syndicats ont indiqué que l'ensemble des problèmes qui avaient été relevés appartenaient au passé, en précisant quand même qu'on peut toujours faire mieux.
La majorité de la commission en est arrivée à la conclusion que ces invites étaient devenues obsolètes, fort heureusement. De par la nature des choses, l'économie s'est rétablie, des mesures ont été mises en place, quand bien même il y a toujours ici et là des personnes qui ont souffert de cette période difficile. En conséquence, nous vous recommandons de refuser cette motion. Merci.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, comme cela a été indiqué, cette motion date de novembre 2020 et les considérants évoquent surtout le covid-19 ainsi que la réduction de l'horaire de travail. Le contexte a évidemment changé depuis, et les deux dernières invites sont obsolètes. C'est pourquoi la minorité vous propose un amendement pour les supprimer.
Quant aux autres invites - «à renforcer le suivi et le soutien aux demandeurs et demandeuses d'emploi inscrits auprès de l'OCE; à développer l'offre et à privilégier la formation qualifiante pour les personnes inscrites auprès de l'OCE; à supprimer les obstacles administratifs tendant à dissuader certains et certaines bénéficiaires potentiels des prestations de l'assurance-chômage de s'inscrire auprès de l'OCE» -, elles sont encore d'actualité et ont toute leur raison d'être.
Notre économie est très prospère et crée de nombreux emplois, mais la concurrence sur le marché du travail est rude. La raison pour laquelle il faut soutenir cette motion, c'est que Genève compte à peu près 400 000 postes de travail pour un bassin de recrutement englobant toute l'Union européenne, qui est peuplée d'environ 450 millions d'habitants.
En septembre 2022, «Le Dauphiné libéré» - c'est le journal de la Haute-Savoie - écrivait que le taux de chômage du canton de Genève était de 11% sur la base des mêmes critères que ceux employés en France et que celui des régions françaises périphériques était de 6%. En appliquant les mêmes critères pour évaluer le taux de chômage à Genève et à la France voisine, Genève était à 11% et la France voisine à seulement 6% lorsque le rapport a été établi.
C'est une évidence: pour piloter efficacement une politique de l'emploi, Genève doit évaluer efficacement le nombre de personnes en recherche d'emploi. Plusieurs outils performants existent, j'en cite quelques-uns ici: allocations d'initiation au travail, allocations de formation, etc. Toutefois, pour que ces dispositifs soient utilisés et mis en oeuvre de manière efficace, les prestations doivent être connues et les personnes doivent pouvoir en bénéficier le plus rapidement possible.
Les minoritaires ont toujours soutenu la réinsertion professionnelle. Là, nous sommes face à une motion - et je dirais presque: juste à une motion - permettant une prise de conscience, proposant une petite amélioration. Je répète que nous recommandons de supprimer les deux dernières invites, respectivement «à supprimer le nombre de postulations obligatoires par mois pour toucher les allocations chômage» et «à mener une étude sur l'impact de la crise à court, moyen et long terme sur l'ensemble des secteurs économiques de notre canton, évaluer les risques de faillite d'entreprise, les suppressions d'emploi et identifier les branches qui pourraient rapidement recréer des emplois». Ces deux invites ne sont plus d'actualité.
Pour terminer, j'espère qu'avec la suppression des deux dernières invites, la minorité deviendra majoritaire et je vous invite à accepter cet objet. Merci de votre attention.
M. François Baertschi (MCG). Comme l'a très bien montré le rapporteur de minorité, la situation est extrêmement critique à Genève, où la pression sur les demandeurs d'emploi est importante, bien plus importante que sur ceux de la région frontalière, comme le relève à juste titre «Le Dauphiné libéré», un journal qui est bien au fait de la situation, puisqu'il se trouve de l'autre côté de la frontière et observe la réalité de cette pression frontalière qui nous frappe de plein fouet.
Ce contexte, ce sont les chômeurs genevois qui en subissent les conséquences. Au début, le MCG était opposé à la motion, notamment en raison des deux dernières invites, mais le rapporteur de minorité a déposé un amendement qui nous satisfait tout à fait, car il va dans le bon sens, c'est-à-dire qu'il s'agit d'abaisser la pression excessive sur les chômeurs genevois.
En fait, deux problèmes fondamentaux ne sont pas traités par le texte, mais nous interpellent, parce qu'il faut s'intéresser aux causes, aux raisons véritables de ce qui pose problème sur le marché de l'emploi. D'une part, il y a la loi fédérale sur l'assurance-chômage, qui est problématique, qui est poussiéreuse, qui mériterait d'être remaniée, mais cela ne concerne notre parlement genevois que de manière indirecte, puisque nous ne légiférons pas au niveau fédéral, heureusement - enfin, je ne sais pas si c'est heureux, vu les décisions que prennent parfois les Chambres fédérales. Bon, je suis également très critique à l'égard de notre parlement, mais cela relève plus du commentaire que d'autre chose.
D'autre part, il faut relever cette pression qui constitue la cause première de la situation que subissent les chômeurs ainsi que les travailleurs genevois, cette pression considérable des travailleurs frontaliers. Je précise que ce ne sont pas eux qui sont en cause, mais le système: un système d'oppression des travailleurs genevois, un système qui crée des working poors en grande quantité, un système dans lequel même le canton de Genève, de par sa politique de ressources humaines, faillit, est défaillant, ne fait pas ce qu'il devrait faire. Tout cela pour vous dire qu'avec l'amendement, le MCG soutiendra ce texte. Merci, Monsieur le président.
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, il s'agit ici de renforcer la formation professionnelle, ce que nous défendons naturellement - on y reviendra probablement dans le cadre de l'objet suivant. Dans le cas de cette motion, le but est de soutenir la formation professionnelle des personnes en recherche d'emploi, celles qui sont enregistrées à l'office cantonal de l'emploi (OCE), et on est tout à fait d'accord de demander ça. Quelqu'un a indiqué tout à l'heure que la formation professionnelle ne devait pas concerner uniquement les chômeurs, je ne me rappelle plus qui c'était - si vous vous en souvenez, Monsieur le président, vous transmettrez à la personne concernée.
Ici, le texte est très axé sur le covid, sur le contexte dû à la pandémie. Même si cette situation a été dépassée depuis, nous pensons qu'il est toujours d'actualité. Les conditions ont évolué, mais la problématique reste très actuelle. En effet, les métiers liés à la transition énergétique seront de plus en plus demandés, l'évolution des emplois suite à la numérisation de certains secteurs ira en s'accélérant. Il convient ainsi de donner à l'OCE les moyens d'orienter les demandeurs et demandeuses d'emploi vers des métiers d'avenir. Et si je peux me permettre cette parenthèse, ces professions ne doivent pas seulement être valorisées en termes de formation, mais également au niveau social et même, si vous le voulez bien, au niveau salarial.
La motion demande un meilleur suivi, un meilleur accompagnement, un abaissement des obstacles administratifs et une identification des branches qui pourraient rapidement recréer des emplois. Bien entendu, ce sont des objectifs que nous ne pouvons que saluer. Sans entrer dans le détail des invites, on notera que l'Etat a déjà pris un certain nombre de mesures, par exemple le bonus employabilité ou le programme Level+ - cela a été mentionné par le rapporteur de majorité -, mais nous estimons que bien des efforts supplémentaires restent nécessaires. Comme je le soulignais plus tôt, ces efforts constituent un investissement essentiel pour assurer une transition harmonieuse vers les métiers qui auront du succès pendant les 75 dernières années de ce siècle.
Un dernier mot sur l'amendement: en ce qui nous concerne, nous soutenons l'entier du texte, mais nous pouvons comprendre l'amendement visant à supprimer les deux dernières invites, probablement un peu trop orientées vers la situation liée au covid. S'agissant de la dernière invite, la possibilité d'une étude prospective sur les secteurs économiques qui pourraient avoir de l'avenir est intéressante, nous sommes donc en sa faveur. Dès lors, nous ne voterons pas l'amendement, mais si celui-ci passe, nous accepterons quand même le texte de la motion in fine. Je vous remercie.
M. Jacques Béné (PLR). Voilà encore un de ces textes qui traînent à l'ordre du jour depuis pas mal de temps: bientôt deux ans que le rapport a été déposé. Il s'agit d'une motion typiquement liée au covid: toutes ses invites sont complètement obsolètes. La CGAS elle-même l'a reconnu. Certaines invites ne sont même pas légales.
Que va-t-il se passer ? Le département va nous répondre en nous expliquant comment l'OCE fonctionne, c'est-à-dire très bien. Il existe déjà des mesures pour le marché du travail - les fameuses MMT, si je ne me trompe pas -, et on veut encore plus les renforcer alors que tout le monde y a accès. On veut développer l'offre de la formation qualifiante, mais ce n'est malheureusement pas possible, parce que les personnes en formation ne sont pas plaçables, donc elles ne peuvent pas être inscrites au chômage.
Quant à supprimer les obstacles administratifs, ça a été fait, parce que c'était compliqué pendant la crise covid, donc c'est obsolète. S'agissant du nombre de postulations, l'office cantonal de l'emploi dispose d'une certaine marge de manoeuvre et l'utilise, donc c'est obsolète. Enfin, mener une étude d'impact de la crise à court terme: il existe une task force pour l'employabilité qui est devenue un conseil consultatif et qui travaille bien avec le département, donc c'est obsolète. Cette motion est totalement obsolète et je vous invite tout simplement à la rejeter.
Des voix. Bravo !
M. Grégoire Carasso (S). Très brièvement, au groupe socialiste, nous reviendrons sur les arguments de fond lors du traitement de l'objet suivant. Nous saluons la volonté de compromis de l'UDC et du MCG, même si nos ressorts et motivations sont bien distincts. Nous soutiendrons donc l'amendement, invitons les Verts à en faire de même, et rendez-vous au point suivant pour le reste. Merci.
M. Vincent Canonica (LJS). En écoutant les diverses prises de parole, je m'interroge. On a tendance à oublier ou à vouloir mettre derrière nous - et c'est tant mieux - la situation covid. Certes, elle est derrière nous, mais la pandémie a eu des conséquences, des conséquences que l'on paie encore aujourd'hui; l'économie subit des changements qui se sont produits dans la vie de tous les jours pour chacun d'entre nous. Il ne suffit pas de dire, même si c'est très bien, que l'économie a été soutenue pendant la crise covid, il faut continuer à la soutenir après le covid et se réinventer, repenser, revoir les choses.
L'exposé des motifs indique clairement, en se référant à la période covid, mais aussi post-covid, que certains secteurs économiques continueront à subir les répercussions de la crise durant encore plusieurs mois, voire années. C'est tout à fait juste, et dans ce cadre-là, nous voterons l'amendement de l'UDC en lien avec l'employabilité s'agissant des gens qui ont été forcés d'arrêter leur travail pendant l'épidémie, de changer de carrière, de se réorienter.
En effet, il y a une vraie nécessité d'aider toutes les personnes qui ont été obligées de changer d'emploi à se réorienter. Les efforts autour de l'employabilité des personnes au chômage doivent être poursuivis, et c'est, notamment dans cette motion, l'une des conséquences de la crise qui doit être prise en compte. Pour cette raison, nous accepterons l'amendement de l'UDC.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs, je le répète et je suis absolument clair sur ce point: cette motion vise seulement à soutenir la réinsertion professionnelle. Et j'aimerais rassurer le PLR: les trois invites que je propose de maintenir sont encore d'actualité et tout à fait raisonnables.
Je vais les lire. (Exclamations.) Première invite: «à renforcer le suivi et le soutien aux demandeurs et demandeuses d'emploi inscrits auprès de l'OCE». Deuxième invite: «à développer l'offre et à privilégier la formation qualifiante pour les personnes inscrites auprès de l'OCE». Troisième invite: «à supprimer les obstacles administratifs tendant à dissuader certains et certaines bénéficiaires potentiels des prestations de l'assurance-chômage de s'inscrire auprès de l'OCE».
Il n'y a vraiment rien de choquant là-dedans, rien qui pourrait inciter le PLR à ne pas accepter cette motion. Dès lors, je vous propose de l'adopter. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie. Vous savez, Monsieur Pfeffer, en principe, tout le monde sait lire ! (Rires.) La parole revient à M. Blondin pour trente secondes.
M. Jacques Blondin (LC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. A entendre les propos tenus, on a l'impression que rien n'a été entrepris depuis que le covid a quasiment disparu - quasiment, parce que ses conséquences se font toujours sentir, je pense que la conseillère d'Etat le soulignera. Il n'est pas question de ne rien faire, les choses avancent, mais ce texte se réfère à une période qu'on aimerait oublier, c'est vrai.
A voir ce qui va se passer ! On va voter un texte qui, comme on le dit souvent, ne mange pas de pain, c'est-à-dire qu'il ne servira pas à grand-chose, mais bon, pourquoi pas, on peut vivre avec ça. De notre côté, nous maintenons notre opposition à cet objet et nous appelons à le refuser ainsi que l'amendement, mais comme il a été indiqué dans le cadre d'un autre objet, nous pourrons vivre avec une motion amendée qui, somme toute, je le répète, ne mange pas de pain. Merci.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je vais peut-être prendre un instant pour vous relire les invites... (Rires.) ...parce qu'il faut tout de même que nous soyons au clair ! Mais avant toute chose, j'aimerais rappeler que l'exposé des motifs est effectivement lié à une situation qui n'est plus vraiment d'actualité - heureusement, d'ailleurs. Bon, visiblement, vous allez supprimer les deux dernières invites, donc je vous en fais grâce, mais il convient tout de même de s'arrêter un instant sur les trois premières.
Première invite: «à renforcer le suivi et le soutien aux demandeurs et demandeuses d'emploi inscrits auprès de l'OCE». Eh bien c'est un peu le job de l'office, n'est-ce pas, et je vous le détaillerai volontiers dans une réponse du Conseil d'Etat, mais vous avez l'assurance de mon engagement politique plein et entier, je défends bien entendu le fait qu'il faut soutenir les demandeurs et demandeuses d'emploi.
Ensuite, «à développer l'offre et à privilégier la formation qualifiante pour les personnes inscrites auprès de l'OCE». Bon, encore une fois, c'est un peu le job de l'office, donc je vous réitère l'assurance de mon plein soutien à cette deuxième invite. J'aimerais préciser qu'on critique souvent la loi fédérale, mais le SECO a eu un instant d'éveil, puisque au mois d'août 2024, il a indiqué: «Dans la mesure où elles sont opportunes pour le marché du travail et respectent le principe de proportionnalité, les formations continues, reconversions et formation de demandeurs d'emploi de l'AC sont activement encouragées.» Nous sommes ravis de l'apprendre !
Quant à la troisième invite, soit «à supprimer les obstacles administratifs», vous m'en voyez ravie, n'hésitez pas à signaler les éventuels obstacles qui subsisteraient, mais sachez que l'objectif de l'OCE n'est pas de placer des obstacles administratifs pour celles et ceux qui recherchent un emploi, mais bel et bien de les accompagner pour les réinsérer.
Voilà, passé cette petite relecture, un mot encore pour vous rappeler d'une part que le conseil pour le développement de l'employabilité planche sur un certain nombre de mesures - nous y reviendrons certainement dans le cadre du texte suivant -, d'autre part que l'offre de formation continue et les dispositifs de reconversion professionnelle ont été complètement repensés depuis le covid. L'idée est de répondre aux besoins de l'économie et des secteurs à pénurie, et c'est là notre plus grand challenge: il s'agit de faire correspondre les compétences en main-d'oeuvre à celles recherchées par le marché de l'emploi. Il est vrai que nous n'avons pas encore réussi à reboucher complètement ce trou aujourd'hui, mais l'ambition est bel et bien là.
En conclusion, vous ferez ce que vous voulez de cette motion qui, comme l'a indiqué - vous transmettrez, Monsieur le président - le rapporteur de majorité - ou de minorité, on ne sait plus exactement -, ne mange pas de pain, mais vous avez déjà en substance ici ma réponse. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes saisis d'un amendement de M. André Pfeffer consistant à biffer les quatrième et cinquième invites.
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 78 oui contre 10 non.
Mise aux voix, la motion 2711 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 59 oui contre 27 non (vote nominal).
Débat
Le président. Nous passons à la M 2731-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité de M. Serge Hiltpold est repris par Mme Natacha Buffet-Desfayes. Le rapport de deuxième minorité de Mme Amanda Gavilanes est quant à lui repris par Mme Sophie Demaurex. Madame Buffet-Desfayes, vous avez la parole.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Nous avons affaire à un texte dont le titre est alléchant, puisqu'il parle d'emplois verts, qui vise à octroyer des moyens pour des reconversions professionnelles et des formations afin d'assurer la transition écologique. Le contenu des invites nous montre cependant très vite qu'il s'agit surtout de hurler et de répéter des mantras verts et non pas de s'occuper réellement ni de formation ni de reconversion professionnelle.
J'en veux pour preuve l'inlassable répétition des mots urgence climatique, plan climat, objectifs climatiques, processus de transition, développement durable et «clean tech». Le but de cette rhétorique bien huilée, vous l'aurez compris, c'est de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. En effet, quelques rappels s'imposent: la formation professionnelle est organisée en partenariat avec un certain nombre d'acteurs professionnels. Dans cette organisation, ce sont les associations professionnelles qui sont au coeur - et c'est tant mieux ! Ce sont avant tout elles qui ont la vision globale des besoins de formation professionnelle et du marché de l'emploi.
Il faut par ailleurs toujours veiller à ne pas créer des formations hors sol. Or, dans ce texte, nous avons l'impression qu'elles sont déconnectées des besoins. Ce n'est pas à l'Etat de décider seul de ce qui doit être fait s'agissant de formations et de reconversions professionnelles. Toutefois, en tant que partenaire central et nécessaire, l'Etat n'a bien entendu pas attendu ce texte pour se saisir des attentes et des questions liées à la formation professionnelle, qui évidemment est étroitement liée à l'employabilité.
Le département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse, le département de l'économie et de l'emploi et le département de la cohésion sociale se sont occupés et s'occupent de ces questions très régulièrement. Il a été évoqué à plusieurs reprises lors de nos débats ce soir qu'en ce qui concerne l'employabilité, nous sommes passés d'une task force à une commission consultative et que de nombreux efforts sont déployés à ce sujet.
Soutenir ce texte équivaudrait donc à nier que les besoins de formation professionnelle sont déterminés à trois niveaux différents. Il s'agit, je le rappelle, de la Confédération, du canton et du monde du travail. Soutenir ce texte équivaudrait à nier que les formations professionnelles sont liées aux besoins du marché du travail, qui s'organise déjà très bien, qui est au courant du fait que les besoins évoluent et qui entre-temps a déjà proposé un certain nombre de formations, telles que celle d'installateur solaire ou de spécialiste de la thermique du bâtiment - pour ne prendre que ces deux exemples.
En conclusion, il ne faut évidemment pas de formation professionnelle dictée par le seul Etat et par ses seuls besoins...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Natacha Buffet-Desfayes. ...il faut en revanche continuer, inlassablement, toujours et en toute occasion, à valoriser les formations professionnelles, qui font la fierté de la Suisse. Nous vous invitons donc à rejeter ce texte. Je vous remercie.
M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, avant que j'oublie, je tiens tout de suite à dire qu'évidemment, cette proposition ne demande pas que le seul Etat s'occupe de ces reconversions; si on lit bien le texte, on constate que toute cette action doit être réalisée en concertation avec les organisations du monde du travail, de la recherche et de la formation. Je pense qu'il est important - en tout cas, ça l'est pour moi - que la reconversion et tout ce qui concerne la formation dans le domaine des métiers liés à la transition soient bien entendu pensés à travers une collaboration entre l'Etat et les milieux professionnels. Je ne nierai pas du tout que ces derniers ont également déployé un certain nombre de mesures de formation; mais pour ce qui est la reconversion, ce n'est pas forcément dit.
La motion que nous sommes en train de traiter est en fait une extension de la précédente, puisqu'elle ne concerne pas que les personnes en recherche d'emploi, mais vise toute la formation initiale, la formation continue et les reconversions. Elle demande en bref d'identifier le potentiel d'emplois liés à la transition et de renforcer l'offre en formations initiales et continues. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il nous semble que gouverner, c'est prévoir, et que ces objectifs sont bien alignés avec ceux du Conseil d'Etat, qu'il s'agisse du DIP ou du DEE, détaillés dans les programmes de législature ainsi que dans les programmes annuels du Conseil d'Etat; on constate en effet que ces objectifs sont totalement inclus dans ces différentes feuilles de route.
Loin d'être une lubie utopiste, le concept d'emploi vert - je ne reprendrai pas les divers termes mentionnés par la rapporteure de majorité - est issu de la prise de conscience environnementale. Il est défini par l'Organisation internationale du travail (OIT). Bien au-delà des épiceries participatives souvent citées en exemple par la majorité de façon caricaturale, la définition de l'OIT englobe de nombreuses activités dans l'industrie et l'agriculture comme dans les services.
Selon une étude de McKinsey, les transformations d'emplois du fait de la transition énergétique et de la numérisation vont se dérouler de manière deux fois plus rapide que par le passé. Même si nous ne renions pas la capacité du marché à s'adapter, comme je l'ai dit, nous pensons qu'il est essentiel que l'Etat donne également une impulsion décisive.
Quand on parle de transition, on nous demande souvent si nous disposons de la main-d'oeuvre nécessaire; dans diverses commissions, que ce soit à la commission de l'économie ou dans d'autres commissions, on nous dit: «Oui, mais il n'y aura pas assez de monde pour poser les panneaux solaires, etc.» Alors on observe effectivement en Suisse une importante pénurie dans certains domaines. A Genève, cette pénurie est particulièrement problématique dans le secteur de la construction - le gros oeuvre, le second oeuvre et la technique du bâtiment.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Pierre Eckert. «Pour réussir sa transition énergétique, Genève a besoin de professionnels compétents et motivés. [...] Ces nouveaux métiers, qui fourniront les emplois de demain, impliquent de repenser profondément l'offre de formation, initiale comme continue, de l'apprentissage jusqu'aux hautes écoles». Je cite ici le plan cantonal de l'énergie.
Par ailleurs, la pénurie de personnel dans les domaines concernés conduit à une immigration professionnelle depuis l'Union européenne comparativement supérieure aux autres domaines d'activité. Celles et ceux qui critiquent en permanence la libre circulation des personnes feraient bien de soutenir cette motion, qui permettra non seulement de relocaliser les emplois, mais surtout d'offrir des débouchés intéressants aux personnes formées dans le canton. Je vous remercie, je m'arrête là. (Applaudissements.)
Mme Sophie Demaurex (S), rapporteuse de deuxième minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, alors oui, en effet, la task force employabilité s'implique. Pourtant, nous pensons qu'il est important de donner une impulsion politique supplémentaire en faveur d'emplois permettant de garantir la transition écologique. C'est un signal fort puisque, comme cela a été dit, atteindre la neutralité carbone en 2050 est ambitieux et nécessite des efforts importants.
Que propose cette motion ? Des solutions concrètes afin de garantir cette transition. On en a parlé, les changements du marché du travail imposent de s'assurer que des emplois soient créés au niveau local. La Suisse manque de personnel qualifié en la matière, bien plus que dans les autres types d'emplois, ce qui induit une augmentation de recrutements à l'étranger. Il faut donc accroître les efforts en matière de formation et de requalification pour que l'on puisse répondre à la demande de travailleurs qualifiés dans l'économie circulaire, durable et basée sur les énergies renouvelables.
Puisque c'est une soirée durant laquelle nous avons des petits moments de lecture... (Rires.) Dans cette motion, nous invitons effectivement le Conseil d'Etat «à mettre sur pied des mesures pour renforcer l'offre et l'accès à des formations initiales et continues, ainsi que des programmes de reconversion et de requalification, permettant de répondre aux besoins actuels et futurs» - je ne vous lis pas la suite -, tout ça dans le domaine de la recherche et de la formation.
Un point intéressant que j'aimerais partager avec vous: dans un article de la FER paru le 13 octobre 2023, je lisais justement qu'il fallait mettre les bouchées doubles, qu'il y avait une énorme pression temporelle pour multiplier les emplois, qu'on allait avoir besoin d'ici 2030 du double de travailleurs dans ce domaine par rapport au nombre actuel, que les entreprises de la branche misaient sur une formation continue et une reconversion professionnelle; cela correspond effectivement à l'invite que nous proposons d'envoyer au Conseil d'Etat. On lit aussi dans cette même publication que la pénurie de main-d'oeuvre ne doit pas freiner la transition écologique. Je vous conseille donc de lire cet article assez intéressant, écrit probablement par des gens qui viennent plutôt de l'autre bord, celui opposé à cette motion.
Face à de nouveaux métiers qui émergent dans ce domaine, à d'autres qui disparaissent dans les énergies fossiles, avec des travailleurs menacés qui cherchent à se reconvertir et d'autres qui aspirent à se former, ce que j'aimerais vous proposer, c'est tout simplement un renvoi à la commission de l'enseignement supérieur. Oui, des métiers et un nouvel apprentissage ont été créés, mais on aimerait bien savoir ce qui se passe, avoir un retour sur ce qui a été mis en place. Si le Conseil d'Etat a une task force employabilité et que cette dernière s'implique, je pense qu'il serait intéressant de savoir où en est la formation. Il y a une pénurie; dans cette commission, on traite de pénurie au niveau de l'informatique, pourquoi ne traiterions-nous pas de la pénurie dans ce domaine-là, comme l'ont suggéré d'autres intervenants ce soir ?
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Sophie Demaurex. Merci. Je propose donc un renvoi à la commission de l'enseignement supérieur.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Eckert, vous avez la parole concernant la demande de renvoi en commission dont nous sommes saisis.
M. Pierre Eckert (Ve), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Ça me paraît être une idée intéressante. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est vrai que ça peut concerner une formation initiale avant 18 ans - ça peut donc viser cette partie-là. Cela concernerait dès lors plutôt la commission de l'enseignement, mais je suis bien conscient que cette motion prend en compte plus particulièrement la reconversion. On parle ici de reconversion de personnes qui sont déjà en activité, qui ont déjà un emploi. Bien entendu, d'après ce que je peux comprendre, c'est plutôt la commission de l'enseignement supérieur qui est responsable du domaine de la reconversion lorsqu'il s'agit non plus de mineurs mais de personnes majeures. De ce point de vue là, je soutiens très volontiers un renvoi à la commission de l'enseignement supérieur.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR), rapporteuse de majorité ad interim. Je m'opposerai à cette demande de renvoi à la commission de l'enseignement supérieur puisque la formation professionnelle - je pense que je ne l'ai pas assez dit assez, donc je me permets de le rappeler - est directement liée au marché du travail et aux besoins de l'économie. Si ce texte a été traité à la commission de l'économie, c'est pour une bonne raison, puisque c'est là qu'on a le lien direct avec les entreprises.
Et puis, par rapport à la formation, je vous rappelle simplement que l'exposé des motifs ainsi que les invites mentionnent aussi le fait que les formations initiales doivent être développées et multipliées dans le domaine de la transition écologique. Et ça, contrairement à ce qui vient d'être affirmé, ça ne concerne pas l'enseignement supérieur, mais l'enseignement tout court, à savoir la formation initiale. Pour toutes ces raisons, je vous conseille de ne pas renvoyer ce texte en commission. Je vous remercie.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, je pense que les travaux ont été menés. De plus, sur cette motion, ils sont relativement récents. Le conseil pour le développement de l'employabilité, je le rappelle, est tripartite: l'objectif est de travailler ensemble à répondre aux besoins de l'économie. Et puis, accessoirement, sur toutes ces questions de transition écologique et de création d'emplois spécifiquement liés à cette thématique, cela doit se faire en collaboration avec les partenaires sociaux, avec les entreprises, qui doivent aussi avoir la capacité de former et d'engager ensuite durablement ces personnes. Le Conseil d'Etat est engagé au travers de toutes ces démarches, le conseil pour le développement de l'employabilité les suit. Dès lors, il ne me semble pas nécessaire de revenir en commission pour présenter des éléments qui l'ont déjà été. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Nous passons au vote sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la proposition de motion 2731 à la commission de l'enseignement supérieur est rejeté par 51 non contre 30 oui.
Le président. Nous poursuivons donc notre débat, avec la prise de parole de M. Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, puisque nous parlons passablement ce soir du marché de l'emploi et de la formation, j'aimerais rappeler qu'en Suisse, l'ensemble des thématiques relatives aux formations est en général traité par la Confédération, les cantons et les OrTra. Pourquoi ce système tripartite ? Simplement parce qu'au sein de ces instances, on arrive à définir les besoins de formation en fonction des demandes du marché, et c'est cette logique-là qui doit prédominer.
Ces organisations définissent les besoins de formation en fonction des demandes existantes sur le marché du travail, parce qu'elles sont composées de personnes qui connaissent le terrain. Ce sont en général des organisations professionnelles - syndicales et patronales -, accompagnées par l'Etat. Ce dernier ne dispose ici que d'une fonction d'accompagnement.
Il faut aussi préciser que de nombreuses formations voient le jour à l'heure actuelle en matière de protection de la nature et du paysage, en matière de gestion des déchets, de construction durable, de recyclage, etc. A titre d'exemple, je vous signale que Swissolar, l'association suisse des professionnels de l'énergie solaire, a récemment lancé un programme de certificat fédéral de capacité et d'attestation de formation professionnelle d'installateur solaire pour l'année 2024-2025. Ces formations se mettent donc en place, la souplesse de ces employeurs et de ces travailleurs, qui pratiquent un tripartisme, est favorable à leur développement.
La motion parle d'une création d'emplois conduite par l'Etat. C'est contraire au système actuel: l'Etat peut accompagner et pourvoir à un certain financement, mais ce n'est pas à lui de conduire ce type de travail. Ce mode de fonctionnement est couronné de succès à l'heure actuelle simplement parce que les organisations dont j'ai parlé sont en phase avec le marché du travail et réussissent à réagir suffisamment rapidement.
Un mot peut-être sur le financement: ça n'a pas été abordé jusqu'ici, mais le financement existe puisque 150 à 200 millions sont récoltés au sein de la Fondation pour la formation professionnelle et continue, dont les comptes présentent chaque année un bonus, les fonds n'étant pas totalement utilisés.
En conclusion, je dirai simplement: laissez faire ceux qui connaissent le terrain. Je vous remercie de refuser cette motion.
M. André Pfeffer (UDC). Ce texte propose des reconversions professionnelles. Il est question d'identifier les emplois nécessaires pour assurer la transition écologique, de renforcer l'accès aux formations permettant de répondre aux besoins actuels et futurs de la transition écologique, d'attribuer les ressources financières nécessaires, etc., etc. Comme d'autres l'ont déjà dit avant moi, cette motion a été étudiée en parallèle de la M 2711, que nous venons de traiter, qui concerne, elle, le rôle et le fonctionnement de la task force employabilité.
Il faut aussi rappeler qu'au niveau des formations, l'ensemble des différentes thématiques est géré par la Confédération, les cantons et le monde du travail. Il faut également préciser qu'une réinsertion ne peut être efficace que si les formations sont en accord avec les besoins du marché du travail. Bref, ce texte mélange formation, réinsertion et transition écologique. Pour ces raisons, je vous propose de le rejeter. Merci de votre attention.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Julien Nicolet-dit-Félix pour deux minutes.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Merci beaucoup, Monsieur le président. Je crois que la soirée est placée sous le signe de l'alphabétisation et de la lecture. Nous avons été traités d'analphabètes tout à l'heure, nous avons eu plusieurs lectures de textes tout à fait exemplaires. A écouter la rapporteure de majorité et l'intervention de M. Guinchard, je me demande si je ne suis pas devenu analphabète sans m'en rendre compte, parce que les mots qu'ils évoquent - je cite: «clean tech», urgence climatique, développement durable ou encore «l'Etat doit conduire des formations», pour reprendre la formulation de M. Guinchard avec ce verbe conduire - ne figurent pas dans les invites, du moins pas dans celles que je parviens à lire ! Alors peut-être que l'alphabet a changé ! Mais voilà, ce sont bien les invites qui forment le coeur d'une motion; vous le savez parfaitement, c'est dans les invites que nous trouvons les intentions présentées au Conseil d'Etat.
La question centrale, qui a été développée par mes préopinants de droite, est de savoir si le marché libre est en capacité de suffisamment anticiper pour proposer les emplois qui répondent non pas aux besoins d'aujourd'hui, mais bien à ceux que le marché aura d'ici dix, quinze, vingt, trente ou quarante ans. C'est bien là, Mesdames et Messieurs les députés, la question qui est posée par cette motion.
Et la réponse figure dans la question: nous sommes à la veille d'une crise démographique (regardez la tête de la pyramide des âges et vous saurez pourquoi nous sommes à l'aube d'une pénurie de personnel), climatique, environnementale et peut-être sociale - peut-être que nous sommes déjà largement dedans. Il faut que l'Etat s'engage pour anticiper les besoins en matière de personnel, de formation, que nous aurons à l'horizon 2035, 2040 ou 2045, pour la bonne et simple raison que les entreprises soumises aux contraintes de l'économie libérale, c'est-à-dire devoir vivre à un horizon très court d'un, deux ou cinq ans, ne sont pas en capacité d'investir suffisamment pour imaginer ces emplois. C'est bien pour cela que les Vertes et les Verts ont déposé cette motion et qu'il faut la soutenir ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Mme Ana Roch (MCG). Cette motion a été étudiée parallèlement à la M 2711, sur laquelle nous venons de voter. De nombreuses discussions ont eu lieu concernant le rôle et le fonctionnement de la task force employabilité initiale. Si celle-ci a suscité de grandes attentes et a produit des résultats positifs pour certains, il est important de reconnaître que ces réalisations ont été mitigées, voire décevantes, pour d'autres.
Pour les groupes majoritaires, il convient de rappeler que s'agissant des formations, la Confédération, les cantons et les OrTra gèrent l'ensemble des différentes thématiques, en lien avec les besoins du marché du travail. Ce sont ces entités qui définissent les priorités et les besoins en matière de formation, et non ce type de motion. Les associations professionnelles et les entreprises n'ont d'ailleurs pas attendu ce texte pour s'orienter vers des secteurs porteurs, adaptant leur stratégie en fonction des évolutions économiques et des opportunités du marché.
De plus, il est important de rappeler que le projet de loi sur le financement de la perception des cotisations de la Fondation pour la formation professionnelle et continue apporte des moyens supplémentaires pour renforcer la formation continue dans notre canton. Ce projet a été révisé, soutenu et voté à l'unanimité de notre parlement, ce qui démontre que nous avons déjà pris des mesures concrètes pour muscler le dispositif de la formation continue.
En conclusion, ce texte, bien qu'intéressant dans son approche, ne répond pas aux réalités actuelles de la gestion des formations ni aux besoins du marché du travail. Les outils existent déjà, nous devons les consolider plutôt que de créer de nouvelles couches administratives. Je vous invite donc à tenir compte de ces réflexions et à refuser ce texte. Je vous remercie.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. On arrive au terme de nos échanges sur cette motion. Je vous précise peut-être encore que le conseil pour le développement de l'employabilité a travaillé sur un plan directeur de l'employabilité, qui comporte des mesures extrêmement précises. Elles sont toutes chiffrées sur la base des moyens requis, que ce soit en ETP ou en francs. Elles ont été travaillées de manière tripartite. La consultation à l'externe est en cours, avant une présentation et une validation par le Conseil d'Etat.
Les travaux avancent bien, et je tiens à réitérer ici que les préoccupations consistant à assurer des postes dans le domaine de la transition écologique et, de manière plus générale, à orienter les compétences vers les secteurs qui subissent des pénuries, sont pleinement prises en compte dans les ambitions de ce plan directeur. Le Conseil d'Etat estime donc que cette motion n'est pas nécessaire et que les préoccupations exprimées sont d'ores et déjà incluses dans les travaux en cours. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons tout d'abord voter sur l'amendement de M. Eckert, qui figure à la page 13 du rapport et qui propose de modifier la troisième invite comme suit:
«- à inclure dans cette étude l'identification du potentiel de stages formateurs dans les métiers verts, à l'échelle de l'Etat de Genève, des communes et des établissements publics;»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 36 oui.
Mise aux voix, la proposition de motion 2731 est rejetée par 56 non contre 26 oui (vote nominal).
Débat
Le président. Nous en venons à la M 2734-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de minorité de Mme Amanda Gavilanes est repris par M. Grégoire Carasso. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Que propose cette motion dont le titre est «Soutenir plutôt que punir: pour un changement de philosophie et de pratiques à l'office cantonal de l'emploi» ? De mettre un terme à la politique consistant à contrôler et à punir. Elle vise par ailleurs à redonner une approche humaine et bienveillante à cet office.
Indépendamment du fait que ces deux propositions n'amènent rien, il faut relever qu'elles constituent presque une attaque contre l'office cantonal de l'emploi. Elles sont également fausses: durant les auditions que nous avons menées, on nous a indiqué qu'entre 2012 et 2020, la moyenne nationale des suppressions d'indemnités était de 4,9% sur l'ensemble des indemnités payées. A Genève, pour cette même période, ces suppressions d'indemnités représentaient seulement 3,2%. Il y a donc eu beaucoup, beaucoup moins de suppressions d'indemnités à Genève que dans le reste de la Suisse.
Pendant les années 2016 à 2020, Genève était même 31% en dessous de ce qui se faisait au niveau national. Par conséquent, prétendre que dans notre canton, on punit et on contrôle, c'est faux ! De plus, en 2020, Genève avait sanctionné 94 personnes sur 1000, alors que sur le plan national, ce ratio relatif aux sanctions était de 106 pour 1000. Encore une fois, Genève est en dessous de la moyenne suisse.
Je le répète: non, Genève ne contrôle et ne punit pas plus que les autres cantons; non, Genève n'a pas une approche inhumaine. Par contre, il faut quand même relever que dans ce domaine, Genève doit évidemment respecter les règles et les contraintes fédérales - on ne peut pas faire autrement. Bref, cette proposition de motion n'apporte aucune plus-value. Pour ces raisons, la majorité vous propose de la refuser. Merci de votre attention.
M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de minorité ad interim. Mesdames les députées, Messieurs les députés, à titre liminaire, je soulignerai tout d'abord l'exercice de style, quasi de haute voltige, que vient de réaliser le rapporteur de majorité, car les trois invites portent sur les sanctions à l'OCE, sur l'accompagnement des chômeurs et sur la reconversion professionnelle, et le rapporteur de majorité, qui vient de s'exprimer à l'instant, a plaidé en faveur de ces trois axes il y a exactement vingt minutes. C'était peut-être sur la base d'un texte dont le style était un peu différent - c'est sans doute la différence entre une rédaction Caroline Marti et une rédaction Grégoire Carasso.
Peut-être que mon style est un peu plus abrasif, mais ce texte porte sur l'accompagnement des chômeurs - première invite -, sur le nombre de recherches d'emploi imposées de manière absolue en termes quantitatifs aux personnes en recherche d'emploi - deuxième invite - ainsi que sur la reconversion professionnelle - troisième et dernière invite -, cela méritait d'être relevé.
Pourquoi le groupe socialiste attache-t-il de l'importance aujourd'hui à cette problématique ? Parce que, et ce sont les chiffres du Conseil d'Etat tels qu'il les a énoncés dans son projet de budget 2025, la croissance se porte mieux - les Verts ne seront peut-être pas contents, mais on attend entre 1,2 point de croissance cette année et 1,7 point l'année prochaine. L'inflation baisse, de 1,3% à 1%. En même temps, le chômage continue d'augmenter à Genève. Monsieur Pfeffer - vous lui transmettrez, Monsieur le président -, vous vous éleviez contre cette réalité tout à l'heure, précisément parce qu'il faut agir. Il faut agir, certes, mais au niveau où nous pouvons le faire: la base légale est fédérale et la base réglementaire du canton de Genève ne peut pas s'en écarter.
En revanche, pour ce qui est de la pratique administrative de l'office cantonal de l'emploi - ça concerne la première invite -, là, le canton, le politique et en particulier l'exécutif, a une grande marge de manoeuvre. La nouvelle conseillère d'Etat... Peut-être qu'il faudrait remonter à l'époque de M. Poggia, parce qu'effectivement, le canton de Genève avait la tradition, jusqu'en 2015 ou 2016, d'être peu violent avec les personnes en recherche d'emploi. Typiquement, si vous ne faisiez pas vos douze recherches d'emploi en un mois - ce qui est déjà une absurdité en soi; on privilégie le quantitatif au qualitatif -, à l'époque, Genève sanctionnait peu.
Depuis que M. Poggia a repris la barre de l'OCE et a nommé un nouveau directeur, eh bien, la réalité statistique a changé. Les chiffres que vous avez donnés portent sur 2012 à 2020. Monsieur Pfeffer - vous lui transmettrez, Monsieur le président -, regardez-les de plus près ! C'est un sujet sur lequel nous avons eu des majorités à l'époque du covid, parce que tout le monde trouvait scandaleux de continuer à imposer des nombres de recherches d'emploi hallucinants en pleine période de covid. Si vous n'atteignez pas ces nombres de recherches d'emploi, vous êtes sanctionné. Une sanction à l'office cantonal de l'emploi, qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'on retient une partie de votre indemnité de chômage et que vous touchez dans le meilleur des cas 80%. A chaque manquement, typiquement pour un nombre insuffisant de recherches d'emplois, vous perdez des centaines de francs, et ce mois après mois. Sur ce point, le groupe socialiste a toujours été extrêmement ferme, et il le demeurera ! Il faut privilégier la qualité des recherches et certainement pas la quantité.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Grégoire Carasso. Ensuite, sur le plan des pratiques administratives - ce sur quoi Genève a un impact -, Mme Fischer a souhaité modifier la pratique de l'office. Elle a fait face aux plus grandes difficultés. La raison pour laquelle ce texte est important aujourd'hui, c'est que lorsqu'on regarde les statistiques, on constate que les sanctions repartent à la hausse à Genève. Monsieur Pfeffer, les sanctions repartent à la hausse ! Mme la conseillère d'Etat, dans une interview parue en mars 2024 dans la «Tribune de Genève», nous disait au sujet de l'assouplissement des pratiques administratives que la question n'était plus d'actualité.
C'est donc une préoccupation majeure du groupe socialiste que de mettre en évidence les risques qui pèsent à nos yeux sur cet office ainsi que ce besoin de moins contrôler, moins punir, mais de mieux aider et soutenir les personnes en recherche d'emploi. Privilégier non pas la quantité, mais la qualité dans le nombre et le type de recherches d'emploi qui sont imposées aux chômeurs. Et enfin travailler dans le sens de la directive du SECO publiée cette année - heureusement qu'elle arrive ! -, mais Genève doit aller plus loin parce qu'historiquement, nous avons toujours été avant-gardistes sur le volet de la formation et de la reconversion professionnelle.
Vous l'aurez compris, les talents locaux, nous les connaissons, ils sont là, nous avons besoin de soutenir la reconversion professionnelle et l'accompagnement des chômeurs à Genève. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, le rapporteur de minorité a raison, pas sur l'ensemble des points qu'il a évoqués, mais en tout cas sur un point: nous venons de traiter la M 2711, dont les invites sont pratiquement similaires à celles de la M 2734. Nous assumons la position que nous avons adoptée pour la M 2711, et refuserons donc également la présente motion. Cette dernière se réfère à des périodes passées, notamment les années durant lesquelles nous avons été impactés par le covid, en particulier lors du confinement.
Durant la précédente législature, je me souviens d'avoir signé un texte, également rédigé à l'époque par le rapporteur de minorité, parce qu'effectivement, je trouvais complètement aberrante la sévérité de l'office cantonal de l'emploi vis-à-vis de chômeurs dans l'hôtellerie ou la restauration que l'on obligeait à déposer des demandes auprès d'établissements fermés, parce que confinés, et qui n'avaient donc aucun moyen d'avoir des retours de la part des directions, des RH ou d'un petit patron de bistrot qui, de toute façon, n'était pas dans son établissement.
Au niveau des sanctions, le rapporteur de majorité l'a signalé, nous sommes en dessous de la moyenne suisse, et contrairement au rapporteur de minorité, je n'ai quant à moi pas de certitude par rapport à l'augmentation actuelle de ces sanctions. Je précise toutefois que sur les recours (car des recours sont toujours possibles contre ces sanctions), la Cour de justice a confirmé dans 95% des cas, tout de même, les sanctions infligées par l'office cantonal de l'emploi.
La LACI, la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, est un cadre fédéral - cela a été rappelé -, qui est extrêmement contraignant et qui laisse vraiment peu de latitude à des initiatives cantonales en la matière.
Enfin, il faut quand même remarquer que depuis un an - et ce n'est pas un hasard ! -, on constate dans ce contexte un meilleur accompagnement des chômeurs et une vision consistant à privilégier... Je n'arrive plus à me relire ! Privilégier le placement et la réinsertion. J'arrive au bout ! Le Centre vous recommande dès lors de refuser la M 2734. Je vous remercie.
M. François Baertschi (MCG). Cette motion est une tromperie, parce qu'en fait, l'essentiel des règles appliquées par l'OCE depuis des années est imposé par la Confédération. Or le parti socialiste a un rôle important au niveau national, c'est donc quelque part Dr Jekyll et Mr Hyde ! Parce qu'on couvre ou on soutient des lois au niveau fédéral qui sont très dures pour les chômeurs; comme on n'a pas réussi à faire de changement législatif, on les approuve quand même à Berne, et puis à Genève, on ment aux chômeurs en disant: «Regardez, ici, nous vous soutenons !», alors qu'en fait, c'est tout et son contraire. C'est vraiment un procédé pas tout à fait honnête, excusez-moi du terme, Monsieur le président, en tout cas pas tout à fait acceptable, pour rester plus poli.
L'OCE a toujours été moins strict et moins sévère que ce que prévoient les directives de la Confédération. C'est une constante depuis des années. Alors il y a eu des renforcements à des moments donnés et des assouplissements à d'autres, mais très souvent, c'est le SECO, donc la Confédération, qui a véritablement mis la pression sur l'office genevois. Il faut quand même être honnête et reconnaître cet élément-là ! (Remarque.) Si on ne le voit pas, c'est véritablement jouer les hypocrites. Si on ne veut pas voir ces réalités, qu'on fait semblant de croire certaines choses, ce n'est pas honnête envers la population ni envers les chômeurs.
Bien évidemment, il y a un travail à faire quant à la bienveillance envers les chômeurs, mais à quoi sert d'envoyer les chômeurs dans une concurrence folle, de soutenir les frontaliers... (Exclamations.) ...d'envoyer tous les travailleurs genevois au casse-pipe, et ensuite de dire: «Regardez, nous voulons réduire les sanctions au niveau du chômage !» ? Mais ça sert à quoi ? C'est vraiment ridicule, il faut véritablement faire un travail de fond et arrêter l'hypocrisie à tous les points de vue, c'est la raison pour laquelle le MCG refusera cette motion.
M. Jacques Béné (PLR). Soutenir plutôt que punir, on ne peut être que d'accord, et comme l'a dit tout à l'heure Mme Bachmann, c'est le rôle de l'office cantonal de l'emploi que de soutenir. Maintenant, si des règles fédérales sont mises en place, elles sont aussi là pour être respectées.
Personnellement, quand on parle de ces dix recherches d'emploi par mois, j'ai toujours beaucoup de peine à me dire que ce n'est pas faisable. Qu'est-ce qui n'est pas possible ? Quand on est au chômage, ça veut dire qu'on ne travaille pas; on a donc au minimum - au minimum ! - une bonne vingtaine d'heures, en tout cas, dans la semaine, donc quatre-vingts heures par mois, pour faire une dizaine de recherches d'emploi. Où est le problème ? Où est le problème ? Je n'en vois pas ! Il suffit d'aller sur Jobup, on n'est même pas obligé de faire une grande lettre de motivation, on envoie à tous les postes pouvant correspondre notre postulation avec les mêmes documents. Franchement, si ça prend, allez, une demi-heure par demande d'emploi, cela ne fait toujours que cinq à six heures par mois - et c'est vraiment le maximum ! Par conséquent, revenir à chaque fois sur ces recherches et dire que les gens ne sont pas capables de les faire, c'est totalement inadmissible.
Maintenant, on parle beaucoup des cas où des décisions défavorables pour les chômeurs sont rendues, parce que celles-ci sont très médiatisées, alors que toutes celles qui leur sont favorables ne le sont évidemment pas. Quand on reçoit à la commission de l'économie des associations de défense de chômeurs, bien entendu celles-ci vont défendre des chômeurs qui ont des problèmes, qui n'ont peut-être pas compris. On ne dit pas qu'il n'y a pas de cas problématiques, mais on souligne que ce n'est largement pas la majorité des situations.
Et puis, je vais terminer en citant une personne auditionnée en commission: elle «souhaite tout d'abord clarifier l'idée [...] répandue que Genève mènerait une politique indépendante "anti-chômeurs" de son propre chef. Elle rappelle que la politique du chômage est fédérale et que la Confédération, respectivement le SECO, est particulièrement interventionniste dans ce domaine. Il est inexact de croire que les cantons ont la possibilité d'opérer des changements de fond sur la politique du chômage. En effet, dans la réalité, c'est le SECO qui décide, contrôle et finance le fonctionnement de l'OCE et plus particulièrement de l'ORP [...]. Il ne finance pas que les indemnités payées aux chômeurs, mais également le budget de fonctionnement de l'ORP. Ainsi, la marge de manoeuvre cantonale, par rapport aux directives du SECO, est limitée.» Non, ça n'est pas une citation de Mme Fontanet, mais de Mme Fischer ! Tout est dit ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Joli !
Une autre voix. Bravo !
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion part du constat que cet office a une tendance à contrôler et punir les chômeuses et les chômeurs plutôt que de les replacer sur le chemin de l'emploi, voire de les orienter vers un nouvel emploi par une reconversion professionnelle. Comme d'autres l'ont dit, nous avons déjà traité de cette question ce soir à travers la M 2711. La question de la reconversion professionnelle nous est évidemment très chère au sein des Vertes et des Verts. Ici, ce n'est pas tout à fait ce sujet que nous traitons, mais plutôt l'aspect punitif.
Même si ce n'est probablement pas systématique, on voit que les pratiques de l'OCE sont parfois très pointilleuses. On a notamment cité une sanction donnée à une personne qui avait envoyé sa lettre de postulation avec un très léger retard, mais qui a finalement gagné un recours au Tribunal fédéral. Ce dernier a conclu que le formalisme de l'OCE était excessif.
J'aimerais encore faire une parenthèse: bien entendu, on a dit que c'était relativement facile d'écrire des lettres de motivation et d'envoyer des postulations, mais pour moi, ce n'est pas ça qui est vraiment important; ce qui compte, c'est que la postulation en question soit sérieuse. Si c'est pour envoyer dix postulations alibi, à mon avis, ce n'est pas tellement utile non plus à la réinsertion et pour retrouver un travail.
Les statistiques de sanctions du canton de Genève - on en a parlé tout à l'heure - peuvent être considérées comme étant plutôt élevées, même si les chiffres sont sujets à discussion. Quoi qu'il en soit, l'émission de pénalités pour recherche insuffisante est quasiment automatique - c'est ce qu'on a constaté. Les directives concernant le cumul des pénalités ne sont pas respectées. Le réseau de solidarité Trialogue et la CGAS, que nous avons auditionnés, reçoivent en fait beaucoup de personnes qui contestent ces sanctions.
Même si, comme cela a été rappelé, l'office doit impérativement respecter le droit fédéral, nous estimons qu'une marge d'appréciation peut toujours être explorée. Le droit d'être entendu a notamment été introduit en 2021; c'est tout de même un comble que cela n'ait pas été le cas avant !!! Et je mets bien trois points d'exclamation à cet endroit-là !
Le rapport mentionne en outre une étude sur l'effet des sanctions qui aurait été demandée à l'Université de Genève - il serait d'ailleurs très utile d'en obtenir les conclusions.
Outre la discussion sur les sanctions, comme je l'ai déjà dit tout à l'heure, notre groupe soutient l'accentuation des mesures d'accompagnement pour les reconversions professionnelles, raison pour laquelle nous appuyons fortement la troisième invite. Je vous remercie de soutenir cette motion. (Applaudissements.)
M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de minorité ad interim. Je m'exprimerai brièvement, car il est tard ! Je tiens tout d'abord à saluer et à remercier les conseillères et conseillers en placement, qui font un travail difficile, dans un cadre franchement pas facile. La plupart d'entre eux le font avec beaucoup de bienveillance - j'en suis, et le groupe socialiste avec moi, absolument convaincu.
Le champ qui est le nôtre est le champ politique. Dans le contexte du chômage, ce n'est pas la base légale fédérale... Et je renvoie M. Baertschi à ses réalités fédérales, maintenant qu'il peut les tutoyer avec ses camarades de jeu; non, le groupe socialiste n'a jamais soutenu la LACI telle qu'elle est actuellement formulée. Je me réjouis de voir comment vos camarades UDC vont se positionner sur le sujet, mais ça m'effraie déjà à l'avance quand je vois et sais que le conseiller d'Etat le plus violent à l'OCE sur le plan politique a été M. Poggia.
D'ailleurs, tant qu'il était à la tête de l'office cantonal de l'emploi, le MCG n'a plus rien dit sur la thématique du chômage. Alors ça, si ce n'est pas du gros foutage de gueule - vous transmettrez, Monsieur le président -, je ne sais pas ce que c'est ! (Exclamations. Applaudissements.)
Une voix. C'est inadmissible !
M. Grégoire Carasso. Je terminerai, Monsieur le président, non pas sur la pratique administrative, mais sur ce que signifie pour une personne au chômage durant seize mois le fait de devoir envoyer 160 lettres de postulation. Ce rapport à la quantité, au nombre de lettres... Des conseillers en placement n'acceptent pas forcément des rendez-vous, certains appliquent la règle de manière stricte: vous devez envoyer dix lettres par mois pendant seize mois, sans quoi vous êtes pénalisé sur votre maigre revenu, c'est juste une aberration du système. Nous pouvons le changer sous l'angle de la pratique administrative. Poggia a été horrible en la matière, Mme Fischer a essayé d'apporter une inflexion. (Commentaires.) Pour la suite, tout est ouvert ! Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Je serai également bref et reviendrai surtout sur le sujet de cette motion. Celle-ci a été traitée en 2020. A cette époque, les chiffres montraient que Genève sanctionnait moins que la moyenne suisse. En 2020, il y avait moins de suppressions d'indemnités et moins de sanctions à Genève que dans le reste du pays. Le titre de cette motion, «Soutenir plutôt punir: pour un changement de philosophie et de pratiques à l'office cantonal de l'emploi», est, selon moi, déplacé et surtout faux ! Pour ces raisons, la majorité vous recommande de refuser cette motion.
Mme Delphine Bachmann, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais...
Une voix. Monsieur le président, le MCG a été mis en cause. Madame la conseillère d'Etat, un de vos prédécesseurs a été mis en cause, c'est scandaleux ! On ne peut pas accepter ce type de discours ! Il y a une manière de présider qui n'est absolument pas honnête et qui...
Le président. Vous n'avez pas la parole, Monsieur.
Mme Delphine Bachmann. Alors...
La même voix. Je crois que c'est quand même un grand problème, Madame la conseillère d'Etat. Vous ne pouvez pas...
Le président. Vous n'avez pas la parole, Monsieur.
La même voix. Madame la présidente, enfin, Monsieur le président...
Des voix. Chut !
Mme Delphine Bachmann. Mesdames et Messieurs les députés, je ne préside pas ce Parmelin... (Rires. L'oratrice rit.) Ce Parmelin ! Ce parlement ! Allez, on y est !
La même voix. On ne peut pas laisser passer des insultes comme ça ! (Exclamations.)
Des voix. Oh, c'est bon !
Mme Delphine Bachmann. Mesdames et Messieurs les députés...
Le président. S'il vous plaît, laissez parler la conseillère d'Etat !
La même voix. Je demande la parole, vous ne me l'avez pas donnée, Monsieur le président.
Des voix. C'est bon !
Le président. Asseyez-vous, Monsieur le député.
Mme Delphine Bachmann. Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite revenir sur le texte de cette motion et sur le propos qui a en effet été le mien dans la «Tribune de Genève»: je disais qu'effectivement, c'était de l'histoire ancienne. L'histoire ancienne, c'est la directive qui avait été donnée à l'office cantonal de l'emploi de ne plus sanctionner. On se trouvait alors hors pratique administrative, puisqu'on était complètement hors cadre légal. Et ça, en tant que conseillère d'Etat, je me devais de le corriger.
Donc oui, effectivement, le cadre légal fédéral prévoit des sanctions, qu'on le veuille ou non ! Oui, vous avez raison, Monsieur le rapporteur de minorité - vous transmettrez, Monsieur le président -, pour ce qui est de la pratique administrative, nous avons une marge de manoeuvre. C'est la raison pour laquelle la direction juridique de l'OCE a établi un barème sur le prononcé de toutes les sanctions et qu'il prend systématiquement la sanction la plus basse au sein de sa marge de manoeuvre.
Vous avez cité des chiffres, je vais vous donner ceux pour 2023: s'agissant du nombre de sanctions pour 1000 demandeurs d'emploi, la moyenne suisse est de 103, alors qu'à Genève, c'est 82. Pour l'année 2024, à ce jour - à fin septembre -, la moyenne de sanctions pour 1000 demandeurs d'emploi est de 106 au niveau suisse alors que pour Genève, c'est 89. Je peux donc vous assurer qu'en tout cas depuis mon entrée en fonction, nous mettons un point d'honneur à être au plus juste et à agir aussi de manière pragmatique.
Je reçois très régulièrement des requêtes de chômeurs qui ont été sanctionnés, et c'est vrai qu'il est arrivé, aussi en raison de tournus avec l'arrivée de nouveaux employés au sein du service juridique, où la marge administrative et le pragmatisme mettent un peu de temps à être transmis, typiquement qu'une erreur soit commise dans l'adresse e-mail utilisée pour envoyer une candidature. Eh bien, dans ces cas-là, ces sanctions peuvent systématiquement être annulées quand un recours est fait et que nous estimons qu'il est justifié. Donc oui, l'humain est au centre de l'accompagnement par les conseillers ORP et au centre de la prise en charge de l'office cantonal de l'emploi.
Ce que je peux aussi vous dire, c'est que nous avons renforcé notre communication, en collaboration avec les entreprises. Quand vous finissez dans un emploi, vous avez l'obligation de commencer à chercher un autre poste avant que le premier ne se termine; c'est une obligation au sujet de laquelle, force est de le constater, les employés ne sont pas suffisamment informés. Or, ils peuvent en effet être sanctionnés dès leur entrée au chômage. C'est la raison pour laquelle nous avons mis en place des campagnes d'information à destination des entreprises et des employés, pour tenter de prévenir plutôt que de sanctionner ensuite.
Voilà ce que je peux vous dire sur la pratique administrative et sur la direction de l'office telle qu'elle s'exerce aujourd'hui, depuis que je suis entrée en fonction. Donc oui, nous respectons le cadre légal fédéral, ça me semble important... (Remarque.) ...et nous tentons de le faire au quotidien avec justesse et avec équité. Je pense que cette motion n'a dès lors plus de raison d'être. Cas échéant, n'hésitez pas à poursuivre... Je sais que des questions écrites urgentes sont régulièrement posées sur ce sujet, nous sommes toujours à disposition pour donner les chiffres actualisés en ce qui concerne les sanctions et la pratique administrative de l'office. Je vous remercie de refuser cette motion et vous souhaite d'ores et déjà une excellente soirée - pour ce qu'il en reste !
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote sur cet objet.
Mise aux voix, la proposition de motion 2734 est rejetée par 58 non contre 31 oui (vote nominal).
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous remercie et vous dis à demain.
La séance est levée à 23h.