Séance du
vendredi 30 août 2024 à
16h05
3e
législature -
2e
année -
4e
session -
20e
séance
La séance est ouverte à 16h05, sous la présidence de M. Alberto Velasco, président.
Assiste à la séance: M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et MM. Nathalie Fontanet, présidente du Conseil d'Etat, Thierry Apothéloz, Anne Hiltpold, Carole-Anne Kast, Pierre Maudet et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Michael Andersen, Diane Barbier-Mueller, Jacques Béné, Jennifer Conti, Véronique Kämpfen, David Martin, Xhevrie Osmani, Charles Poncet, Ana Roch, Skender Salihi et Celine van Till, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Sebastian Aeschbach, Darius Azarpey, Céline Bartolomucci, Thomas Bruchez, Oriana Brücker, Rémy Burri, Stéphane Fontaine, Gabrielle Le Goff, Philippe Meyer et Daniel Noël.
Annonces et dépôts
Néant.
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez reçu par messagerie les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de Amar Madani : Inquiétude sur l'avenir du CUI (Centre universitaire d'informatique) : besoin urgent de soutien financier et humain (QUE-2103)
Question écrite urgente de Skender Salihi : Existe-t-il un plafond pour la délivrance de permis G par l'office cantonal de la population et des migrations ? (QUE-2104)
Question écrite urgente de Lionel Dugerdil : Nouvelle convention d'objectifs entre l'Etat et l'AIG : pourquoi le modèle zurichois n'a-t-il pas été retenu ? (QUE-2105)
Question écrite urgente de Stéphane Florey : Noyades dans le Rhône : l'Etat prendra-t-il enfin ses responsabilités ? (QUE-2106)
Question écrite urgente de Skender Salihi : Conditions d'emploi et lieu de travail des directeurs de service : état des lieux (QUE-2107)
Question écrite urgente de Marjorie de Chastonay : Quand est-ce que les HUG respecteront enfin les règles de l'Etat ? (QUE-2108)
Question écrite urgente de François Baertschi : Infirmières-infirmiers aux HUG : équivalence des diplômes (QUE-2109)
Question écrite urgente de François Baertschi : Parkings de la CPEG pour les pendulaires frontaliers (QUE-2110)
Question écrite urgente de Celine van Till : Récurrence des incendies dans les centres de recyclage à Genève - la prévention est-elle suffisante ? (QUE-2111)
Question écrite urgente de Raphaël Dunand : Exportation des matériaux d'excavation : quelle est la réalité de 2020 ? (QUE-2112)
Question écrite urgente de Stefan Balaban : Adapter à la réalité du marché les exigences de la loi relatives aux émissions de CO2 des véhicules professionnels (QUE-2113)
QUE 2103 QUE 2104 QUE 2105 QUE 2106 QUE 2107 QUE 2108 QUE 2109 QUE 2110 QUE 2111 QUE 2112 QUE 2113
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Questions écrites
Le président. Vous avez également reçu par messagerie les questions écrites suivantes:
Question écrite de Souheil Sayegh : Existe-t-il un numerus clausus pour le permis moto ou voiture pour notre jeunesse ? (Q-4014)
Question écrite de Jean-Marc Guinchard : Sarco, le mouroir mobile (Q-4015)
Question écrite de Matthieu Jotterand : Où sont parqués les bateaux et où habitent leurs propriétaires ? (Q-4016)
Question écrite de Jacklean Kalibala : Médecine et genre (Q-4017)
Question écrite de Laurent Seydoux : Bilan de la présence du canton de Genève à la Maison Suisse lors des JO 2024 à Paris (Q-4018)
Question écrite de Grégoire Carasso : Quel est le coût, à la charge des parents, du matériel scolaire obligatoire pour un élève de l'enseignement secondaire II ? (Q-4019)
Question écrite de Murat-Julian Alder : Effets d'un impôt fédéral sur les successions et les donations dans le canton de Genève (Q-4020)
Question écrite de Sylvain Thévoz : Résolution 989 « Ukraine : halte à la guerre - solidarité avec le peuple ukrainien ». Quelles actions et quel suivi du Conseil d'Etat ? (Q-4021)
Q 4014 Q 4015 Q 4016 Q 4017 Q 4018 Q 4019 Q 4020 Q 4021
Le président. Ces questions écrites sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Premier débat
Le président. Nous reprenons nos travaux avec le PL 13025-A, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Le rapport de majorité de M. Daniel Sormanni est repris par M. Thierry Cerutti, le rapport de première minorité, rédigé par mes soins, par Mme Caroline Renold et le rapport de deuxième minorité de M. David Martin par M. Philippe de Rougemont. Monsieur Cerutti, vous avez la parole.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, voilà un projet de loi novateur, innovant, qui va apporter un peu de bien-être, de soleil à nos habitantes et habitants, aux résidents de notre canton. Vous savez toutes et tous que le rôle d'un homme politique, et d'une femme politique aussi d'ailleurs, est d'être un facilitateur pour le bien-être de notre population et également une force de proposition afin d'améliorer le quotidien dans divers domaines. D'ailleurs, on l'a vu hier avec les assurances-maladie et le texte que vous avez lamentablement refusé, alors que c'était une proposition exceptionnelle ! (Rires.)
Ici, on se trouve presque dans le même débat: avec ce projet de loi, on va permettre à toutes et tous d'accéder à un rêve, un désir que chacun vit en son for intérieur et qui sommeille en lui, à savoir être propriétaire de son logement. Etre propriétaire, ce n'est pas simplement avoir son propre logement, c'est aussi pouvoir léguer un patrimoine à sa famille, à ses descendants, être indépendant quant au logement et s'assurer la pérennisation d'un bien à un prix et à un coût raisonnables.
Mesdames et Messieurs les députés, on a déjà eu l'occasion de traiter ce projet de loi; la population a même voté sur cette proposition. Elle l'a malheureusement refusée, suite à des arguments trompeurs des opposants, qui agitaient notamment la peur du congé-vente ainsi que d'autres éléments, alors qu'il s'agissait bien naturellement d'esbroufe. En tous les cas, ce projet a été refusé par la population de très peu, ça s'est joué à 2%.
Forts de ce refus, sous la plume de M. Cyril Aellen, nous avons repris ce projet de loi qui avait en son temps été déposé par le MCG et notre excellent ancien député Ronald Zacharias. Nous avons tenu compte des soucis dont la gauche et la majorité de la population avaient fait part sur le congé-vente, le prix de vente, l'occupation, enfin tous ces fantasmes que l'on trouve dans les séries fantastiques, qui existent seulement dans les rêves et pas dans la réalité. Nous l'avons fait afin d'apporter un nouveau projet, qui protège toutes et tous les locataires actuels.
En l'occurrence, qu'est-ce qu'on propose ? Le premier point est qu'il ne faut pas que ça constitue un projet de vente. Ça veut dire qu'il n'y a pas d'obligation pour le locataire d'acheter son logement; non, le locataire ne se fera pas congédier s'il ne veut pas acheter son logement - ça, c'est clairement garanti dans le projet de loi. Le deuxième élément est que les bénéficiaires finaux sont des personnes qui occupent leur appartement depuis trois ans. Vous ne pouvez pas louer votre appartement et trois jours après dire que vous allez l'acheter et trouver un accord avec le propriétaire afin de procéder à la vente. Non, Mesdames et Messieurs les députés, il faudra être locataire depuis trois ans pour pouvoir solliciter l'achat - ou en tout cas trouver une possibilité d'achat si c'est ce que le propriétaire veut aussi.
Le troisième critère est que l'achat ne peut se faire que par l'occupant. C'est quand même important; non seulement on doit être titulaire du bail, mais on doit l'occuper. C'est pour éviter toute forme de spéculation, ce qui était une grande crainte de la gauche. Ce critère garantit que ce ne sera pas le cas. Le quatrième point est que l'occupant doit s'engager à y rester pendant un certain temps. On a délimité cette durée à cinq ans, parce qu'on veut qu'il continue d'habiter dans son logement. En général, quand un locataire acquiert son logement, c'est pour y habiter. Et puis, le cinquième élément est le prix: il est limité avec un plafond très bas, qui correspond au prix moyen des PPE en zone de développement. Pour rappel, aujourd'hui, sur le marché, ce prix se situe à peu près à 6000 francs le mètre carré...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe, Monsieur le député.
M. Thierry Cerutti. Merci, Monsieur le président. Il faut juste se rappeler qu'aujourd'hui, pour des immeubles anciens, le prix au mètre carré se situe entre 13 000 et 16 000 francs, et pour des bâtiments neufs, entre 18 000 et 21 000 francs - alors qu'ici, on est à 6000 francs, ce qui fait que lorsque les gens acquièrent leur logement, en lieu et place de payer 2000 ou 3000 francs de loyer, ils pourront diviser ce loyer par deux !
Voilà, Mesdames et Messieurs, je vous invite à voter ce projet de loi pour faire en sorte que notre population genevoise soit heureuse, qu'elle puisse acquérir un logement, qu'elle devienne propriétaire, parce que c'est du bon sens et que c'est une volonté de Dieu, qui a voulu qu'il en soit ainsi. (Rires. Commentaires.) Merci.
M. Philippe de Rougemont (Ve), rapporteur de deuxième minorité ad interim. Les Verts demanderont le renvoi en commission. Ce projet de loi tel qu'il est rédigé présente un grave risque de retour à la spéculation immobilière à Genève, que personne dans le canton n'a intérêt à voir revenir, ainsi que le risque pour ses auteurs de se retrouver face à un référendum qui pourrait être facilement gagné. Nous proposons donc un renvoi en commission. Merci de votre attention.
Le président. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons procéder au vote sur le renvoi en commission.
Une voix. Et les rapporteurs ? Ils ne s'expriment pas sur la demande de renvoi ?
Le président. Ils n'ont pas demandé la parole, je ne peux quand même pas les obliger à s'exprimer !
La même voix. Mais si !
Le président. Vous voulez que j'oblige des députés à prendre la parole ? C'est magnifique !
Une autre voix. C'est bon, c'est bon, ils ont appuyé !
Le président. Effectivement, ils se sont réveillés, et ils ont appuyé sur le bouton ! Madame Renold, vous avez la parole.
Mme Caroline Renold (S), rapporteuse de première minorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Je soutiens le renvoi en commission.
Le président. Bien. Je cède le micro à M. Thierry Cerutti.
M. Thierry Cerutti (MCG), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Monsieur le président. Non, bien sûr que non, je ne soutiens pas le renvoi en commission. Je pense qu'agiter devant nous le drapeau de la défaite en cas de référendum, c'est vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Monsieur le député, je peux vous dire que ce référendum, on va le gagner ! (Commentaires.)
Le président. Merci beaucoup, Monsieur le député. J'ouvre la procédure de vote sur la demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13025 à la commission du logement est adopté par 47 oui contre 31 non. (Commentaires pendant la procédure de vote.)
Premier débat
Le président. J'appelle maintenant le PL 13028-A. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes, et la parole va à M. Djawed Sangdel.
M. Djawed Sangdel (LJS), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Chers collègues, la commission du logement s'est réunie à cinq reprises et a examiné en détail le projet de loi 13028 qui propose des modifications à la loi sur l'aide à la propriété individuelle. Il s'agit de répondre à une problématique majeure pour nos citoyens, surtout pour la classe moyenne.
Pour rappel, la loi actuelle sur l'aide à la propriété individuelle, adoptée en 1997, n'a jamais été appliquée en raison de sa complexité, de sa formulation qui ne correspond pas aux besoins d'aujourd'hui. Il est important de souligner que l'article 180 de la constitution genevoise stipule: «L'Etat encourage l'accès à la propriété du logement.» Cela représente donc une obligation constitutionnelle.
Ce texte vise à encourager en particulier la classe moyenne à devenir propriétaire. En effet, à cause de conditions extrêmement strictes exigées par les banques, surtout en ce qui concerne les fonds propres - on parle de 20%, mais parfois, ça peut aller jusqu'à 5% de plus, sans parler des frais de notaire -, il est très difficile pour les gens d'accéder à la propriété, même pour ceux qui perçoivent des revenus élevés.
Ce projet de loi propose que l'Etat cautionne des prêts hypothécaires couvrant jusqu'à 15% des fonds propres nécessaires à l'achat d'un logement. Cette mesure permettrait de réduire significativement les barrières financières auxquelles font face certains de nos concitoyens qui touchent des revenus suffisamment conséquents pour acquérir un logement. Bien évidemment, il est question d'appartements modestes, pas de villas ou de biens de luxe, le but est d'aider des familles qui ont envie de devenir propriétaires depuis plusieurs années mais ne trouvent pas les moyens financiers.
Rappelons le taux de propriétaires dans le contexte immobilier genevois, c'est-à-dire le taux le plus bas du pays: 18,7%, c'est vraiment très peu. Même à l'échelle nationale, la Suisse possède le taux de propriétaires le plus bas d'Europe, surtout par rapport à certains standards internationaux. La majorité de la commission vous invite à valider ce projet de loi afin de donner une chance à certains de nos concitoyens qui rêvent de devenir propriétaires de leur logement. Je vous remercie.
Mme Caroline Renold (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, la minorité de la commission est opposée à ce projet de loi pour quatre raisons. Tout d'abord, celui-ci encourage le surendettement individuel. Actuellement, comme vous le savez probablement tous, l'acquéreur doit amener 20% de fonds propres, dont au maximum 10% provenant de la LPP, et ne pas dépasser un endettement maximal de 80%. Ce sont les exigences mises en place par les milieux bancaires pour limiter les risques liés aux crédits.
Avec ce texte, il serait possible d'acheter un logement avec un endettement de 95%, soit uniquement 5% de fonds propres, puisque 15% additionnels seraient prêtés par l'Etat. La dette de 15% devrait être remboursée après dix ans. De plus, l'acquéreur devrait rembourser 15% de son endettement après quinze ans. Ainsi, en quinze ans, l'acquéreur devrait rembourser 30% de son emprunt. Dans un contexte où les taux hypothécaires augmentent - le projet de loi a été déposé à un moment, et c'est explicitement indiqué dans l'exposé des motifs, où les taux étaient bas et donc les coûts de l'emprunt aussi -, c'est encourager le surendettement des personnes.
Je relève que tant Swiss Banking que la FINMA ont indiqué par écrit à la commission qu'elles s'opposaient à une hausse de l'endettement. Swiss Banking souligne qu'«un amortissement parallèle de la dette hypothécaire [...] et du prêt d'Etat [...]» - ce sont donc les deux dettes dont je vous parlais tout à l'heure - «devrait conduire dans la grande majorité des cas à une violation des seuils d'endettement définis dans le règlement interne des banques». La FINMA explique: «[...] nous sommes généralement très réservés, voire extrêmement critiques, à l'égard des efforts tendant à réduire les fonds propres que doit apporter le preneur de crédit ainsi que toute autre initiative visant à assouplir les critères d'octroi dans le domaine hypothécaire».
La minorité se rallie aux avis de la FINMA et de Swiss Banking, et est extrêmement surprise que la droite ne suive pas les recommandations des milieux bancaires. Nous sommes fortement opposés à ce que l'on encourage des personnes à se surendetter et refusons ce projet de loi qui est un cadeau empoisonné pour les acquéreurs. Pour anticiper ce que la droite me rétorquera par rapport à des prises de parole antérieures, je précise qu'il y a un intérêt public à ce que les appartements en PPE soient répartis de manière équitable; en revanche, il n'y a aucun intérêt public à ce que les propriétaires de ces logements se surendettent.
Deuxièmement, aux yeux de la minorité, ce projet de loi est dangereux pour le marché du logement, car il entraînera une surchauffe immobilière. Ce n'est pas que moi qui le dis, mais Swiss Banking - je cite à nouveau son courrier: «Il est bien possible qu'un encouragement supplémentaire de la demande fasse encore augmenter les prix des logements à usage personnel, ce qui maintiendrait les obstacles financiers à un niveau élevé pour les personnes souhaitant accéder à la propriété.» Vous encouragez une mesure qui créera de la surchauffe immobilière sur un marché où il y a déjà une surchauffe pour tout type de logements, parce que pour répondre à d'autres commentaires précédents, ni Dieu ni les gens ne rêvent d'être propriétaires, ils souhaitent avant tout un logement abordable et de qualité.
Voici le troisième argument de la minorité: le coût de ce dispositif est totalement inconnu et pourrait aller, soyons honnêtes, de zéro franc à des millions. L'Etat devra prêter des montants importants pour permettre aux gens d'acquérir leur logement; on imagine, pour 15% d'un bien, qu'on tourne autour de 100 000 à 200 000 francs. L'impact financier du projet est donc indéterminé et il n'y a aucune limitation aux engagements de l'Etat. Je vous rappelle qu'il a été lancé par des partis qui veulent toujours limiter l'engagement financier de l'Etat; nous sommes donc surpris que dans ce cas-là, ils ne s'en soucient absolument pas. D'autant plus que l'Etat devra assumer une activité quasiment bancaire pour laquelle je ne suis pas certaine qu'il ait les compétences, et des engagements supplémentaires seront nécessaires ou alors le projet restera lettre morte, ce qui est peut-être le souhait populiste des partis qui le proposent et le soutiennent.
Quatrièmement, ce projet de loi est très probablement inutile. En effet, je ne travaille peut-être pas dans le milieu bancaire, mais je peux aisément concevoir qu'un banquier qui a sur sa table deux dossiers, l'un avec surendettement à 95% et l'autre avec un endettement à 80%, choisisse celui qui comporte le moins d'endettement, ce qui est d'ailleurs ce que les établissements bancaires entendus nous ont confirmé. La Banque cantonale de Genève, notamment, interrogée par la commission, ne s'est pas montrée enthousiaste du tout quant à l'utilité du texte, elle n'arrivait pas à estimer si davantage de dossiers seraient sélectionnés.
En dernier lieu, la minorité considère que cette proposition ne vise à aider qu'un nombre extrêmement restreint de personnes. En effet, selon une évaluation du DT qui date de 2021 - depuis lors, les coûts sur le marché immobilier ont encore augmenté -, pour l'acquisition d'un bien de cinq pièces à 875 000 francs - encore faut-il trouver sur le marché un logement à ce prix-là -, la caution ne sera accessible qu'à un revenu supérieur à 200 000 francs pour une personne qui possède une fortune allant jusqu'à 435 000 francs. Ainsi, vous pourriez disposer d'une fortune de 400 000 francs, toucher un revenu de 200 000 francs et encore accéder à cette aide ! Nous pensons que ce n'est pas une priorité de soutenir cette part de la population avec des sommes allant jusqu'à - on peut l'imaginer, parce que ce n'est pas chiffré - 150 000 ou 200 000 francs.
Pour la minorité, l'objectif est que l'Etat mette tous ses efforts pour que chaque habitant et habitante du canton dispose d'un logement abordable et de qualité sans qu'il soit nécessaire d'engager des montants importants pour aider une population déjà privilégiée à devenir propriétaire. Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à rejeter ce projet de loi avec fermeté. Merci.
M. Lionel Dugerdil (UDC). Chers collègues, il s'agit évidemment ici du projet de loi dont je parlais tout à l'heure. La rapporteuse de minorité n'a pas manqué de relever l'antagonisme de ses propres prises de position, ce qui m'évitera de le faire moi-même. Par contre, je tiens à signaler que quand elle nous dit que personne ne rêve d'être propriétaire à Genève, c'est faux, bien sûr que c'est faux; j'en veux pour preuve la rareté des objets et le peu de temps pendant lequel ils restent sur le marché avant d'être acquis.
Oui, l'Etat doit favoriser l'accès à la propriété, parce que bon nombre de Genevoises et de Genevois souhaitent acquérir leur logement, en devenir propriétaires. La rareté des objets de même que les conditions exigées pour les prêts bancaires représentent un parcours du combattant rendant l'accès à la propriété extrêmement difficile et quasiment impossible pour la classe moyenne inférieure.
Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs, l'UDC soutiendra ce projet de loi. Nous trouvons que c'est une bonne réponse à une réelle attente de beaucoup de nos concitoyennes et de nos concitoyens, et nous vous enjoignons de voter en faveur de cet objet.
M. Julien Nicolet-dit-Félix (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la rapporteuse de minorité a expliqué de façon claire qu'il n'y a pas qu'une seule raison de refuser ce projet de loi, il y en a plusieurs, au minimum quatre. J'avais prévu de développer trois d'entre elles, je ne vais pas forcément reprendre mot pour mot ses arguments.
Celle qui est peut-être la plus frappante et qui montre bien à quel point ce dispositif ne bénéficiera ni à l'Etat ni aux acquéreurs, c'est que le marché du logement est essentiellement spéculatif, c'est-à-dire que les prix sont fixés en fonction de l'offre et de la demande. Ce texte, Mesdames et Messieurs, consiste simplement à faciliter l'accès au crédit, à mettre davantage d'argent sur la table, donc il aura pour effet immédiat d'augmenter les prix.
Ainsi, les acquéreurs vont se retrouver avec les mêmes objets qu'auparavant, mais qu'ils devront payer plus cher; ils auront un taux d'endettement plus élevé qu'actuellement, qui passera de 80% jusqu'à 95%: on peut légitimement parler de surendettement. Ces gens auront davantage de charges, donc un pouvoir d'achat diminué d'autant; ils seront exposés à des risques tellement grands que les banquiers, qui sont pourtant des professionnels du risque financier, refuseront de leur allouer des prêts.
Dès lors, en cas d'évolution des taux hypothécaires - nous avons vu au cours des années précédentes que ceux-ci sont très volatils, et plus ils sont bas, plus les changements exprimés en points de pour cent ont des effets importants sur le montant à rembourser -, si vous êtes endetté à hauteur de 95%, l'effet sur votre pouvoir d'achat, sur ce que vous devrez payer mois après mois sera extrêmement conséquent.
A cela s'ajoutent évidemment les autres arguments brillamment exposés par Mme Renold tout à l'heure, mais ce point-là suffit, me semble-t-il, Mesdames et Messieurs, pour vous faire la démonstration que ce projet de loi va exactement à l'encontre des buts qu'il prétend viser: il ne va pas faciliter l'accès à la propriété individuelle, qu'il s'agisse d'un rêve ou non de nos concitoyens et des résidents du canton, au contraire, il va le rendre beaucoup plus hasardeux, beaucoup plus cher et beaucoup plus dangereux sur le plan financier. C'est bien pour cela qu'il faut le refuser. (Applaudissements.)
M. Amar Madani (MCG). Le MCG maintient la position qu'il a exprimée lors des travaux de commission, et ce pour plusieurs raisons. J'en citerai deux. La première est inhérente au surendettement: comme la rapporteure de minorité l'a bien expliqué, un prêt additionnel pourrait inciter certains acquéreurs à s'engager dans des achats au-dessus de leurs moyens et ainsi à risquer un surendettement.
Deuxièmement, les finances publiques pourraient en pâtir. Je rappelle, Mesdames et Messieurs, que notre parlement a déjà renvoyé en commission un projet de loi qui vise à encourager la classe moyenne à accéder à la propriété. La multiplication de ce genre de texte n'aura qu'un effet contreproductif. C'est pourquoi le MCG ne soutient pas ce projet de loi.
M. Sébastien Desfayes (LC). J'aimerais revenir sur certains arguments invoqués par le parti socialiste et les Verts. Tout d'abord, il ne s'agit pas d'une révolution, parce qu'aujourd'hui déjà, il existe un mécanisme - c'est le cautionnement - qui permet à une personne d'acquérir un bien avec 5% de fonds propres seulement; ce cautionnement de 15% permet d'atteindre la limite de 20% exigée par les banques.
Ensuite, j'ai entendu le député Julien Nicolet-dit-Félix nous dire: «Ça va favoriser la spéculation, les prix vont monter.» Alors je l'invite à consulter une nouvelle fois le projet de loi, parce qu'on parle ici avant toute chose de zone de développement, donc il y a une limitation de prix: au-dessus d'un certain montant, le dispositif prévu ne sera tout simplement pas applicable.
S'agissant des coûts pour l'Etat, cela sera-t-il cher ? Je ne le pense pas, d'une part parce que l'Etat perçoit des intérêts qui sont légèrement supérieurs à ceux du marché, d'autre part parce qu'il existe - cela a été souligné par le rapporteur de majorité - un mécanisme d'amortissement. De qui parle-t-on ? On parle de personnes qui touchent des revenus relativement importants, mais qui ne disposent pas de liquidités suffisantes pour avancer les fonds propres; cela étant, les revenus qu'ils perçoivent sont censés leur permettre de faire face au remboursement de la dette hypothécaire.
Si ces gens n'ont pas les moyens de rembourser les amortissements, ils n'obtiendront tout simplement pas ce prêt de l'Etat. Il est d'ailleurs extrêmement douteux qu'une banque - cela a également été indiqué, cette fois par la rapporteure de minorité - avance des fonds et permette la conclusion d'un contrat de vente immobilière si l'acquéreur est manifestement en état de surendettement, cela ne passera pas. Voilà pourquoi l'argument de surchauffe ne tient pas la route. On ne peut pas soutenir en même temps: «Cela concerne très peu de personnes» et «Cela va provoquer une surchauffe immobilière», c'est soit l'un, soit l'autre.
Pour ma part et en toute transparence, je considère que ce projet de loi est plus symbolique qu'utile, parce que les cas où l'Etat prêtera ces 15% seront extrêmement limités, il faut avoir l'honnêteté intellectuelle de le reconnaître. Mais pour le symbole et parce qu'il faut bien faire quelque chose pour l'accession à la propriété, qui fait partie des engagements constitutionnels de l'Etat, sachant par ailleurs que du fait notamment de l'échec du PAV, il n'existe plus tellement d'options pour les Genevois de devenir propriétaires, nous devons faire preuve de créativité et nous montrer inventifs. Aussi, pour le symbole, Le Centre soutiendra ce texte qui, il est vrai, ne révolutionnera absolument rien. Merci.
Le président. Je vous remercie. La parole va à M. Yvan Zweifel. (Le président prononce le nom «Zweifel» de manière erronée.)
M. Yvan Zweifel (PLR). Presque ! (Rires.) Merci, Monsieur le président. D'autres l'ont relevé avant moi, mais il faut répéter ce principe essentiel: le but de ce projet de loi est de permettre à des gens qui le souhaitent de devenir propriétaires dans un canton où, pour rappel, seule 17% de la population est propriétaire alors que dans le reste du pays, c'est environ 34%, tandis que dans les pays qui nous entourent, c'est en général bien plus que 50% - même deux tiers en France.
Ainsi, on n'est pas dans une situation où il y aurait une immense majorité de propriétaires et où il faudrait aider une petite partie de personnes qui ne le sont pas à le devenir. On voit clairement que les gens souhaitent acquérir un bien - cette proportion le démontre - et il s'agit ici de trouver un moyen de les y aider, donc de permettre à plus de personnes de devenir propriétaires.
Mme Renold, dans un débat que j'ai eu précédemment face à elle, nous expliquait: «Il y a des gens qui aimeraient accéder à la propriété» - elle l'a donc avoué elle-même - «mais qui n'en ont pas les moyens, donc c'est réservé aux gens de la classe moyenne "supérieure supérieure"» - je reprends ses paroles, n'est-ce pas, ce n'est pas moi qui le dis comme ça.
En réalité - et M. Desfayes l'a très justement exposé -, il faut savoir opérer une distinction à ce niveau: il se peut que quelqu'un dispose de très bons revenus, mais pas nécessairement d'une fortune importante, et qui, avec ses revenus - parce qu'il vient peut-être d'obtenir un nouvel emploi qui lui permet de toucher un meilleur salaire -, sera tout à fait en mesure de s'acquitter à la fois de l'amortissement de la dette et des intérêts qui vont avec, mais au moment où il veut devenir propriétaire, n'a pas forcément les liquidités requises - 20% d'un montant important, ça reste un montant tout aussi important -, n'a pas les moyens de les mettre sur la table.
Il est question ici d'un coup de pouce de l'Etat pour des gens qui sont solvables, mais qui n'ont pas les liquidités suffisantes, faute de quoi les seuls qui pourront devenir propriétaires ne sont pas ceux qui perçoivent de bons revenus et sont solvables, mais ceux qui nagent dans l'argent, ceux entre tous que préfèrent vos collègues - M. Thévoz, par exemple, ou encore M. Nicolet-dit-Félix -, soit l'oncle Picsou, ou, plus prosaïquement, ceux qui ont les moyens, c'est-à-dire des institutionnels.
Mais alors là, on va se retrouver dans la situation - et cela a été mis en avant dans un article paru dernièrement - où les plus gros propriétaires ne sont pas des particuliers, mais des institutionnels, alors que le but ici, c'est vraiment d'aider la personne qui rêve d'être propriétaire à le devenir.
Mme Renold a également déclaré: «La FINMA, l'ASB» - enfin, tous ceux qu'on a auditionnés - «nous ont écrit que les normes bancaires ne permettaient malheureusement pas d'aller de l'avant avec ce projet de loi.» Eh bien il se trouve - mais peut-être a-t-elle raté cet élément-là - que suite aux auditions, des amendements ont été déposés, et comme le rapporteur de majorité le précise dans sa conclusion, ceux-ci permettent de rendre le texte conforme aux normes tant de la FINMA que de l'ASB. Dès lors, cet argument ne me semble plus valable.
Quant au reproche qui est adressé à la droite selon lequel on va vider les caisses de l'Etat alors qu'on essaie en général de serrer les boulons, Mesdames et Messieurs, il ne faut pas confondre une dépense avec un investissement. Si l'Etat prête de l'argent à quelqu'un qui, par hypothèse, est solvable - parce que le travail de vérification aura été effectué -, alors ce n'est pas une dépense pour l'Etat, bien au contraire, c'est un investissement qui rapporte, puisqu'un intérêt sera ponctionné à la personne qui a obtenu le prêt; et cet intérêt représente un revenu supplémentaire pour l'Etat, vous devriez donc plutôt en être ravis.
Oui, Mesdames et Messieurs, il est évident que si un banquier a la possibilité de prêter à quelqu'un qui ne s'endette qu'à hauteur de 80% par rapport à un autre qui s'endette à 95%, probablement qu'il choisira le premier, mais il n'en demeure pas moins qu'on permet quand même à une personne solvable avec un endettement de 95% d'acheter un bien, ce qu'elle n'aurait pas pu sans le dispositif, donc ce projet de loi a toute son utilité. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, le PLR vous enjoint de voter ce projet de loi. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
Mme Danièle Magnin (MCG). Pour ma part, je voudrais rappeler que lorsque l'on fait l'acquisition d'un bien immobilier, il y a 3% de taxes diverses: les droits de mutation, la création des cédules hypothécaires, tout cela qui engraisse déjà l'Etat. Et une fois qu'on a eu la chance de devenir propriétaire, si on occupe son bien, on doit verser un impôt sur la valeur locative, auquel s'ajoute encore un impôt immobilier complémentaire.
Alors, Mesdames et Messieurs à gauche qui êtes si opposés à ces prêts éventuels, ne voudriez-vous pas plutôt songer à demander la diminution de ce qui constitue un impôt - et non une taxe - et restreint la classe moyenne dans ses possibilités d'acquérir un bien dans lequel elle pourra loger avant de le léguer à ses enfants, le cas échéant, ce qui améliorera la vie de tout le monde ? Je compare souvent les Genevois à un peuple de limaces, qui n'ont même pas, comme les escargots, une coquille pour habitation. Merci.
M. Philippe de Rougemont (Ve). A quoi assiste-t-on dans ce parlement ? On observe des vendeurs de logements - il y a beaucoup de personnes différentes dans cette salle, y compris des vendeurs de logements - qui ont de la peine à se défaire de leurs biens tellement ils sont chers, alors on dépose un projet de loi pour que l'argent de l'Etat les aide à leur faire vendre davantage de logements. Par contre, l'argent public, lui, doit servir à construire des logements d'utilité publique, puisque le but est d'en avoir 20%. Or les mêmes milieux veulent ponctionner là-dedans et diminuer les moyens de l'Etat pour réaliser cet objectif de politique publique.
On est témoins de ça et peut-être qu'au fil des années à siéger ici, on s'en accommode, on se dit que c'est normal, mais personnellement, je trouve que c'est ahurissant. On a de la peine à concrétiser les politiques publiques, et les fonds publics sont utilisés pour faire plaisir aux vendeurs de logements ! Faites vraiment très attention, Mesdames et Messieurs, pensez aux besoins des milliers de personnes et de ménages qui sont en attente d'un logement - on en connaît tous et toutes; ces personnes-là ne veulent pas acheter un bien, elles cherchent simplement un appartement qu'elles ont les moyens de payer. Aussi, faisons très attention, toutes et tous, et refusons ce projet de loi. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Mme Caroline Renold (S), rapporteuse de minorité. Je tiens à relever l'honnêteté intellectuelle de ceux qui défendent ce projet de loi, mais admettent qu'il est de nature symbolique. C'est exactement ce que j'ai indiqué: il est inutile, et s'il n'est pas inutile, il est dangereux.
Par ailleurs, j'invite M. Dugerdil à vérifier l'enquête sur le budget des ménages: il est impossible pour la classe moyenne inférieure, aux prix actuels, d'acquérir un appartement en PPE en zone de développement; ce type de logements est réservé à la classe moyenne «supérieure supérieure» qui, pour rappel, avec ce projet de loi, pourrait posséder une fortune jusqu'à 430 000 francs et tout de même bénéficier de l'aide de l'Etat. Il ne me paraît vraiment pas prioritaire d'investir de l'argent public dans ce domaine.
Enfin, Mesdames et Messieurs, l'amendement dont parlait M. Zweifel ne change absolument rien à la question du surendettement évoquée par la FINMA et Swiss Banking. Ce problème-là, qui est lié aux risques du crédit, n'est tout simplement pas réglé alors que c'est l'écueil principal du projet de loi. Partant, la minorité vous invite à refuser fermement ce texte.
M. Djawed Sangdel (LJS), rapporteur de majorité. Je pense qu'il y a un malentendu. La plupart des collègues pensent que l'Etat fait un cadeau; non, ce n'est pas un cadeau, c'est un prêt avec intérêts ! C'est-à-dire que les banquiers - on parle des banquiers, on ne parle même pas du département des finances -, qui font tous les jours des analyses de risques, de l'anticipation des risques, vont vérifier les dossiers; les banquiers, qui étudient vraiment la situation non seulement actuelle, mais aussi passée et future, avant de valider, vont déterminer si les acquéreurs ont la capacité de rembourser leur dette.
Ce projet de loi a été étudié de manière précise, il concerne seulement une partie de la population, pas l'ensemble des citoyens genevois. Il n'y aura pas de crise du logement, il n'y aura pas de crise financière, on donne juste une chance à certaines personnes qui en ont les moyens de devenir propriétaires.
Vous parlez de 20% de fonds propres, chers collègues. Non, ce ne sont pas juste 20%, les banques exigent beaucoup plus ! Des fois, elles demandent 25%, voire 30%, auxquels s'ajoutent les frais de notaire; parfois aussi, il y a une différence entre le prix validé par les banquiers et le prix d'achat du bien.
En ce qui me concerne, je pense que ce texte est une façon très claire d'indiquer à nos concitoyens que les politiciens les soutiennent dans leur démarche pour devenir propriétaires, pour laisser un héritage positif à leurs enfants, pour laisser un héritage également à notre canton, à notre pays.
Si cet objet est refusé, quelle est l'alternative ? Bien évidemment, la plupart des gens iront voir ailleurs, ils iront chercher ailleurs pour acheter une maison, parce que c'est moins cher là-bas, parce qu'il y a moins d'exigences; là-bas, c'est juste à côté.
Alors pour éviter que les fortunes de Genève, de la Suisse fuient ailleurs, qu'il y ait plus d'immigration de gens qui ont les moyens, que les personnes quittent notre canton ou notre pays pour aller voir ailleurs parce qu'il y est beaucoup plus facile de devenir propriétaire, il faut donner une réponse précise, rapide et pragmatique à nos concitoyens, à une partie d'entre eux, à une minorité faisant partie de la classe moyenne supérieure, il faut leur donner la chance de devenir propriétaires et de laisser un héritage à notre canton. La majorité vous invite, chers collègues, à dire à nos concitoyens que nous les soutenons pour qu'ils deviennent propriétaires. Je vous remercie.
Le président. Merci beaucoup. La parole retourne à M. Dugerdil.
M. Lionel Dugerdil (UDC). Merci, Monsieur le président, de me laisser l'opportunité de répondre à la rapporteuse de minorité qui, une fois de plus, déploie toute sa mauvaise foi en nous indiquant en préambule que l'on va endetter des gens qui n'ont pas les moyens, puis en concluant que seule la classe moyenne «supérieure supérieure» et fortunée aura droit à ces prêts.
Mme Caroline Renold (S), rapporteuse de minorité. Le surendettement est lié aux revenus, donc on peut être surendetté si on prend un prêt trop important par rapport à ses capacités et à sa fortune.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat est fondamentalement opposé à ce projet de loi pour les raisons qui ont été brillamment exposées par la rapporteure de minorité. J'aimerais cependant revenir sur quelques éléments saillants, en commençant par un point philosophique: pas plus tard qu'il y a une heure, sur les bancs de droite de ce parlement, on nous expliquait - ce qui est vrai - que la propriété est de la propriété privée, que les propriétaires privés ne doivent rien à l'Etat, que l'Etat doit juste respecter la propriété privée et ne pas s'en mêler.
Puis, au point suivant de l'ordre du jour, on demande à l'Etat de se mêler de la propriété privée en mobilisant des ressources publiques, celles du contribuable, pour que certains et certaines qui seraient les élus de ce dispositif puissent avoir plus de chance d'accéder à la propriété privée, laquelle resterait tout de même leur propriété, malgré l'utilisation de fonds publics. Voilà le premier doute philosophique du Conseil d'Etat.
Le deuxième est plutôt de nature macro-économique. Le problème de l'accès à la propriété ne relève pas de la demande, mais bien de l'offre. Tous les logements en PPE, pour autant évidemment qu'ils soient dans les prix raisonnables du marché, trouvent acquéreur et on sait, selon les opérations immobilières en zone de développement, qu'il y a cinq à sept dossiers solvables par appartement attribué. Par conséquent, que va-t-il se passer avec ce projet de loi ? Eh bien le nombre de demandeurs sera porté à huit, à neuf ou à dix. Mais il y aura toujours un seul logement à attribuer !
L'enjeu, si vous voulez qu'il y ait davantage de propriétaires dans ce canton, ce qui est également l'objectif du Conseil d'Etat, c'est d'augmenter l'offre, c'est de voter nos plans d'aménagement, c'est de valider les modifications des limites de zones et les plans localisés de quartier qui vont avec. Voilà la réserve de logements en PPE - et de locatifs, bien sûr, mais surtout de PPE. Ainsi, il serait intéressant que celles et ceux qui défendent l'accès à la propriété se déterminent avec autant de force au moment des déclassements, car quand ceux-ci sont refusés, cela restreint l'offre. Vous pouvez augmenter la demande d'un point de vue macro-économique, mais si vous ne touchez pas à l'offre, vous n'aurez pas plus de propriétaires à la fin. Voilà la principale faiblesse du projet de loi, comme l'a relevé d'ailleurs le député Desfayes avec beaucoup d'honnêteté.
Enfin, cela a été souligné, mais tout de même, Mesdames et Messieurs les députés: quand l'Association suisse des banquiers vous écrit que ce dispositif constituerait une violation des seuils d'endettement définis dans le règlement interne des banques, quand le représentant de la BCGE indique que les fonds de l'Etat ne seraient pas considérés comme des fonds propres, quand les représentants de la FINMA soulignent qu'ils sont très réservés, voire extrêmement critiques, à l'égard des efforts tendant à réduire les fonds propres, eh bien il faut les entendre ! L'amendement, au final, ne change strictement rien à cela.
D'ailleurs, la DGFE n'a pas commenté, donc le problème fondamental, c'est que pour des raisons qui appartiennent à ce pays, il y a une volonté des autorités fédérales, de la FINMA, du Conseil fédéral, de l'ASB d'exiger de ceux qui acquièrent un logement d'avoir les reins suffisamment solides, c'est-à-dire d'apporter 20% de fonds propres; on peut trouver que c'est dur, que c'est exigeant, mais cela fait partie de la solidité financière de notre pays. Or les auteurs du texte tentent de courber cette règle en disant: «Non, non, vous pouvez venir avec 5% et malgré tout obtenir un bien.» Il est normal que les autorités fédérales, qui sont les garantes de l'orthodoxie du système hypothécaire de notre pays, se montrent dubitatives.
Mesdames et Messieurs les députés, comme beaucoup dans cette salle, j'estime que ce dispositif ne va pas amener plus de dossiers éligibles par rapport au régime actuel, je pense qu'on est dans le registre du déclaratoire. C'est pourquoi, de la part du Conseil d'Etat, il n'y aura pas de querelle autour d'un troisième débat ou de quoi que ce soit, mais je tenais tout de même à souligner une fois de plus la faiblesse intrinsèque de ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous procédons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13028 est adopté en premier débat par 48 oui contre 46 non et 1 abstention.
Le projet de loi 13028 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13028 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 49 oui contre 45 non et 1 abstention (vote nominal).
Premier débat
Le président. A présent, nous étudions le PL 13036-A, dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Je cède la parole à M. André Pfeffer.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi propose d'aider notre classe moyenne à acquérir un appartement en zone de développement. Premièrement, le besoin de soutien de cette part de la population est indiscutable. A Genève, il y a seulement 18% de propriétaires au niveau cantonal. En ville de Genève, seuls 8% des habitants possèdent un bien. Dans notre canton, à l'exception de la zone de développement, la classe moyenne n'a quasi aucune possibilité d'acheter un logement.
Les appartements en zone de développement sont accessibles à la classe moyenne. En effet, il n'est pas question d'apport de fonds propres importants ni d'avoirs conséquents de la caisse de pension. Le prix moyen d'un objet en zone de développement se situe entre 600 000 et 800 000 francs, donc il faut 60 000 à 80 000 francs de fonds propres et autant en deuxième pilier. Pour ces logements dont le prix est contrôlé, le montant des charges mensuelles est très proche de celui d'un loyer.
Par ailleurs, ce projet de loi s'inspire de ce qui se pratique au niveau du travail - la préférence cantonale - ainsi que pour l'octroi de logements sociaux, on reprend le même mécanisme. Très concrètement, il vise à favoriser les Genevois qui sont déjà résidents et assujettis à l'impôt dans notre canton depuis quatre ans au moins. Enfin - et c'est un point important -, ce texte répond à l'intérêt général de mixité dans nos quartiers, promeut l'équité sociale pour accéder au logement et renforce la cohésion sociale.
En ce qui concerne l'argument des opposants, qui parlent toujours de spéculation, je relève trois points. Le premier, c'est que les appartements en zone de développement sont vraiment accessibles à la classe moyenne, et lorsqu'on parle de classe moyenne, ce n'est pas la classe moyenne supérieure, mais celle dont le salaire correspond au revenu médian à Genève.
Deuxièmement, je propose aux gens qui font toujours un amalgame entre propriété privée et spéculation de demander aux propriétaires, lors de leurs caucus ou de leurs assemblées générales, s'ils utilisent vraiment leurs logements privés pour des opérations spéculatives.
Dernier élément, et les opposants sont également les partis qui se préoccupent de cette question un tout petit peu plus que les autres: ce projet de loi a aussi le mérite de réserver les grands appartements en zone de développement aux familles.
Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs, pour permettre à cent ou peut-être à mille Genevois de la classe moyenne - voire à encore plus - d'acquérir un logement en zone de développement, je vous invite à accepter cet objet. Merci de votre attention.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, vous vous souvenez certainement d'un projet de loi qui est allé jusqu'en votation populaire, qui a malheureusement été accepté à une très, très courte majorité de la population et qui prévoyait que les personnes voulant obtenir un logement subventionné devaient avoir résidé pendant quatre ans sur le territoire cantonal.
La minorité que je représente considérait déjà à l'époque ce mécanisme comme injuste et inégalitaire; or s'il est injuste et inégalitaire pour les locataires, il l'est également pour les personnes qui chercheraient à acquérir un appartement en PPE. C'est la raison pour laquelle nous refuserons ce texte qui propose tout simplement de reprendre le système imposé au logement social et de le mettre en place pour la vente de biens en PPE.
J'aimerais profiter de cette prise de parole pour revenir sur deux points, d'abord sur le titre, qui indique: «Aidons notre classe moyenne à accéder à la propriété». Mais enfin, Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas un accaparement des logements en PPE par des personnes qui seraient résidentes depuis moins de quatre ans à Genève qui empêche la classe moyenne d'accéder à la propriété, ce sont les conditions financières exigées, c'est la cherté des prix de vente de ces appartements qui constituent une entrave.
Et je parle de la vraie classe moyenne, pas de la classe moyenne selon la définition du Conseil d'Etat, dont le revenu annuel s'élève à 400 000 francs. Aujourd'hui, la classe moyenne qui touche le salaire médian n'a pas accès à la propriété. Différentes études diligentées soit par le Conseil d'Etat, soit par certaines institutions bancaires montrent que seule 18% de la population a les moyens, que ce soit par les revenus ou la fortune, d'acheter un appartement à Genève; évidemment, la classe moyenne n'en fait pas partie.
C'est peut-être l'occasion d'effectuer un premier petit bilan de cette loi qui impose quatre ans de résidence avant de pouvoir obtenir un logement subventionné - dispositif qu'on essaie ici d'étendre à l'acquisition d'un logement en PPE: ce que l'on constate, c'est qu'elle ne fonctionne pas. On le savait au moment où on a voté la loi, on l'observe maintenant qu'elle est entrée en vigueur. En effet, ce mécanisme crée des situations injustes: des personnes qui ont résidé à Genève pendant quasiment toute leur vie, qui partent pour une raison ou pour une autre pendant quelques années à l'étranger ou simplement ailleurs en Suisse et qui veulent revenir à Genève parce qu'elles y ont leurs attaches, parce qu'elles y ont leur famille, sont entravées dans leur recherche de logement.
Ce qu'on relève par ailleurs, c'est que le système ne permet pas de réduire le nombre de personnes en attente d'un logement subventionné, il ne diminuera donc pas non plus le nombre de celles qui veulent acheter un appartement en PPE. Sur le plan des logements sociaux, l'entrée en vigueur de la loi a occasionné une très légère baisse du nombre de demandes la première année, mais dès l'année suivante, soit 2023, le nombre de gens sur liste d'attente auprès des fondations immobilières de droit public a de nouveau augmenté. Au final, c'est un jeu à somme nulle, c'est un miroir aux alouettes, cela produit des situations injustes et c'est la raison pour laquelle nous vous invitons à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Existe-t-il encore des libéraux au PLR ? De vrais libéraux ? On a l'habitude que le MCG et l'UDC déposent des projets de lois qui sont tout simplement inconstitutionnels, mais que vous autres vous affiliiez à ce genre de proposition est extrêmement choquant.
La rapporteuse de minorité a mis en avant le fait que ce projet de loi est parfaitement injuste et rappelle celui soumis à votation récemment sur les logements sociaux. Pour les Genevois et les Genevoises qui vivent en dehors du canton, qui l'ont quitté pour des raisons professionnelles, qui ont déménagé parce qu'ils ne trouvaient pas d'appartement à Genève, qui se retrouvent en France voisine ou dans le canton de Vaud ou même un peu plus loin, cela signifie qu'ils ne peuvent plus acheter de bien à Genève.
Si c'est une décision que vous êtes prêts à assumer au PLR et au PDC - au Centre, excusez-moi -, eh bien vous êtes libres de le faire, mais vous l'assumerez également devant votre électorat. C'est quand même assez fou que la liberté économique et celle de pouvoir acquérir un logement là où on veut soient défendues par ma personne; c'était votre travail et vous avez misérablement failli. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
M. Sébastien Desfayes (LC). Comme l'a souligné l'ancien président du Conseil d'Etat Antonio Hodgers s'agissant de la PPE en zone de développement, on fait face à une crise de l'offre, pas de la demande. Antonio Hodgers dit: «Pour un bien en vente, nous avons sept demandes». Ça, c'est le premier jour; après une semaine, il y en a quatre-vingts. Bref, les logements sont vendus avant même que la première pierre soit posée.
Que faire par rapport à ça ? La réponse donnée par Antonio Hodgers est juste, mais purement théorique: construire, donc donner suite à des modifications de zones. Or on sait très bien que cette option sera toujours plus compliquée. Pourquoi ? Rareté des terres, opposition des communes, contestation de partis populistes, qu'ils soient à droite ou à gauche. Moi, très franchement, je suis extrêmement inquiet pour le développement à Genève et je pense que ces prochaines années, sur un horizon 2050, on aura toujours plus de peine à faire passer les projets. Alors que faire ? Il faut trouver des solutions, et le présent projet apparaît tout à fait juste et équilibré.
Quand j'entends le parti socialiste et les Verts nous faire la leçon en s'exclamant: «C'est inacceptable, c'est contraire aux droits humains !», je les invite juste à reconsulter le PL 12591 de M. Dandrès qui figurait au point 34 de l'ordre du jour. Cet objet du parti socialiste soutenu par l'ensemble de la gauche proposait exactement la même chose; il en proposait encore d'autres qui étaient absolument inadmissibles, mais la gauche nous a bel et bien soumis cette option. Pourquoi, quand c'est le pauvre député André Pfeffer qui dépose un texte de loi, une telle solution deviendrait-elle tout à coup intolérable ? Je l'ignore.
Il faut, pour justifier une restriction à un droit fondamental, un intérêt public. Or on a déjà pas mal taillé à coups de canif dans le droit de propriété en zone de développement - je fais référence à la loi Longchamp, qui, au demeurant, est extrêmement importante et utile - et je pense que la présente proposition est une solution de simple bon sens. Les Genevois n'arrivent pas à se loger, eh bien ils doivent bénéficier d'une certaine priorité par rapport à des gens qui vivent à l'étranger ou dans d'autres cantons.
En réalité, tout ce parlement est d'accord, parce que la gauche a voté pour le projet de loi de la gauche tandis que Le Centre et la droite sont alignés sur celui d'André Pfeffer. Il existe donc une unanimité, mais que viennent entacher certaines oppositions qui, à mon avis, sont stériles et pas dignes de notre Grand Conseil. Merci.
Une voix. Très bien.
M. Amar Madani (MCG). Je présenterai brièvement la position du MCG, qui, bien évidemment, est en faveur de ce projet de loi. J'aimerais juste rappeler, en référence aux arguments évoqués par le rapporteur de majorité et contrairement à ce qui a été prétendu par nos amis de la minorité, que la loi MCG qui a été soumise à votation et acceptée, même à une courte majorité - qu'importe, la bataille a été remportée -, a produit des résultats satisfaisants dans la mesure où elle a réduit la liste d'attente des demandeurs de logement. Pour ce qui est du présent texte, le MCG va le soutenir; nous aurions même souhaité aller encore plus loin et établir la durée de résidence préalable à cinq ans. Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à voter ce projet de loi. Merci.
M. Thierry Oppikofer (PLR). Pour le PLR, qui reçoit beaucoup de leçons de libéralisme - c'est toujours très agréable -, ce projet de loi est effectivement tout simple et pétri de bon sens - je parle du texte, pas de son auteur. Notre canton manque de PPE pour la classe moyenne, un grand nombre de locataires souhaitent accéder à la propriété, on le sait; parmi eux, beaucoup en ont les moyens, mais ne trouvent pas d'objet à leur convenance malgré le dispositif de contrôle des prix en zone de développement, malgré l'intérêt pour notre Etat de favoriser l'accession à la propriété - cela permet de loger des familles, d'éviter des déplacements pendulaires, de maintenir la substance fiscale sur le territoire, etc.
Nos collègues signataires nous proposent finalement quelque chose de limpide: accorder une priorité, s'agissant de l'acquisition de PPE, aux personnes assujetties à l'impôt sur le revenu à Genève depuis quatre ans. Il vaut la peine, et je ne doute pas que vous l'ayez tous fait, mes chers collègues - le cas échéant, refaites-le, et j'invite le public qui nous regarde à le faire également -, de lire les seize pages du rapport de la commission du logement sur cet objet. La proposition modérée - on parle de préférence cantonale «soft» - de nos collègues a déclenché des salves d'arguments d'une virulence exceptionnelle.
Du côté d'Ensemble à Gauche, cette formation qui n'a pas eu le quorum, mais dont tous les projets ou presque sont repris par nos collègues socialistes ou Verts, on n'a pas hésité à invoquer - je cite, parce que ça en vaut la peine - «l'internationalisme prolétarien et la solidarité internationale». Alors effectivement, on parlait tout à l'heure de vieux slogans ressassés par la droite, je vois que les vieilles devises de la gauche se situent à peu près au même niveau - voire un peu en dessous. D'autres collègues de gauche ont donné des cours de libéralisme économique - on vient d'en subir un autre - et de liberté du marché à ceux qui, au PLR, avaient l'outrecuidance de soutenir ce texte.
Pour notre groupe, il s'agit simplement d'ajouter un petit élément au cadre légal et réglementaire déjà bien fourni de la LGZD, il s'agit d'encourager certains de nos contribuables à renoncer à acheter hors du canton et, pour une fois, à se féliciter d'être fiscalisés en terres genevoises, le tout sans que cela coûte quoi que ce soit. Nous adopterons donc ce projet de loi, Mesdames et Messieurs, et vous invitons à faire de même. (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). De nombreux Genevois souffrent de la pénurie de logements. C'est malheureusement un gros problème auquel chacun d'entre nous peut faire face, nous connaissons tous des personnes confrontées à cette difficulté. Il faut dès lors trouver des solutions pragmatiques et simples.
On a évoqué l'option qui avait été proposée par le MCG et soutenue par d'autres groupes responsables de ce Grand Conseil consistant à exiger des personnes un temps de résidence à Genève avant qu'elles puissent bénéficier d'un logement social, ce qui est la moindre des choses quand on sait le coût du logement social et la forte demande en la matière.
Je remercie le groupe UDC et son représentant André Pfeffer d'avoir lancé cette initiative qui va dans la même direction, ainsi que les autres partis responsables de ce parlement de les avoir suivis pour faire en sorte de soulager quelque peu la tension au niveau de la propriété par étage, pour aider les Genevois à accéder aux appartements en PPE.
Bien sûr, il n'y aura pas de miracle, on le sait, on l'a dit également en ce qui concerne le logement social, on peut juste apporter une petite amélioration, mais c'est déjà beaucoup. Nous devons nous montrer responsables, arrêter avec ces délires idéologiques qui ne nous mènent nulle part et penser d'abord au bien des habitants de ce canton. Mesdames et Messieurs, je vous demande de voter ce projet de loi. Merci, Monsieur le président.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de majorité. J'aimerais revenir sur un sujet qui a été soulevé, à savoir la cherté des appartements en zone de développement. Je rappelle que le prix de ces logements est contrôlé par l'Etat et s'élève en moyenne à 7000 francs le mètre carré. Ainsi, selon leur taille, le prix de ces biens se situe entre 600 000 et 800 000 francs.
Pour la classe moyenne, celle qui, je le répète, dispose du revenu médian - le salaire médian à Genève est aux alentours de 70 000 à 75 000 francs par année -, il y a vraiment un intérêt. Economiser des fonds propres à hauteur de 60 000 à 80 000 francs, c'est de l'ordre du possible. Ces gens, lorsqu'ils travaillent, possèdent également des avoirs en deuxième pilier, des sommes certainement de ce niveau-là aussi, donc tout cela n'est pas totalement inaccessible.
Pour finir, si on fournit cet effort, on s'aperçoit que les coûts mensuels, soit respectivement les intérêts, amortissements et charges de copropriété, représentent environ un loyer moyen. Bref, l'objectif de ce projet de loi est vraiment de donner la possibilité à notre classe moyenne d'accéder à la propriété privée.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité ad interim. Très brièvement, j'aimerais répondre à M. Desfayes qui se demandait pourquoi le parti socialiste refusait ce projet de loi alors que nous avions nous-mêmes déposé un texte qui a été précédemment discuté. C'est quand même complètement différent de proposer - c'était l'objet du projet de loi de M. Dandrès - qu'une partie des logements en PPE soient attribués par l'office du logement de façon neutre et égalitaire. Aujourd'hui, on a plus ou moins de chance d'obtenir un appartement en fonction des contacts, du réseau, si on connaît quelqu'un dans le milieu immobilier... L'objectif était véritablement de viser une égalité de traitement entre les différentes personnes qui souhaiteraient devenir propriétaires.
Ici, on est dans un registre totalement différent: il s'agit, de manière extrêmement populiste, de réserver les appartements en PPE à des personnes résidant depuis plus de quatre ans à Genève. On discrimine ainsi les gens en fonction du seul lieu de résidence. Ce n'est pas comme ça qu'on permet une égalité de traitement dans l'attribution des logements en propriété par étage. Pour le surplus, j'ai évoqué les différents autres arguments qui amènent la minorité à refuser ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame. La parole retourne à M. Desfayes pour sept secondes.
M. Sébastien Desfayes (LC). Merci, Monsieur le président. En fait, il faut simplement regarder le projet de loi de Christian Dandrès qui, outre la possibilité pour l'Etat de choisir le locataire ou l'acquéreur, fixe une obligation supplémentaire, à savoir le domicile fiscal dans le canton de Genève deux années consécutives.
Le président. Je vous remercie. Monsieur Genecand, c'est à vous pour trente-quatre secondes.
M. Adrien Genecand (PLR). Merci, Monsieur le président, pour votre générosité ! Manifestement, le Conseil d'Etat pouvant encore et toujours nous expliquer après coup quelles étaient les mauvaises raisons pour accepter tel ou tel projet de loi, je rappellerai de façon très simple que notre canton ne compte aujourd'hui que très peu de propriétaires: 15% versus 35% en Suisse.
La réalité, quoi qu'en dise la gauche, c'est que ses représentants entretiennent la location, parce qu'ils en vivent. A ce titre, tout ce que nous pouvons faire pour permettre aux gens d'accéder à la propriété et de vivre quelque part de leur logement doit être encouragé. C'est la raison pour laquelle il faut voter ce projet de loi.
Plus généralement, Monsieur le président - vous qui, en tant qu'ouvrier, je le sais, êtes soucieux de ces questions-là depuis toujours -, ce que chacun veut, au fond de soi, c'est acquérir son logement, c'est pouvoir devenir propriétaire. Il s'agit en effet de la meilleure épargne qu'on puisse faire. Monsieur le président, vous le savez depuis cinquante ans, et je ne comprends pas que la gauche se refuse à cela. Tout ce qui peut permettre l'accession à la propriété devrait être favorisé.
Le président. Merci, Monsieur le député, mais pour autant qu'on en ait les moyens ! La parole va à Mme Magnin.
Mme Danièle Magnin (MCG). Pour deux secondes, Monsieur le président, je vous remercie. Je voulais juste rappeler à cette assemblée une émission de radio où on a entendu M. Carlo Sommaruga indiquer qu'il ne fallait pas être propriétaire de son logement, parce qu'on perdait ainsi le droit à des aides, à des subventions, à toutes sortes de choses. Voilà pourquoi la gauche s'y oppose.
Le président. Merci. La parole est à Mme Marti.
Mme Caroline Marti (S), rapporteuse de minorité ad interim. Ça vole tellement haut que je renonce à prendre la parole ! (Rires. Applaudissements.)
Le président. Merci bien. Je mets le texte aux voix.
Mis aux voix, le projet de loi 13036 est adopté en premier débat par 63 oui contre 31 non.
Le projet de loi 13036 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13036 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui contre 31 non (vote nominal).
Le président. Vous avez donc accepté l'illusion de pouvoir acquérir un logement. (Exclamations. Commentaires.)
Premier débat
Le président. Voici le prochain objet figurant à l'ordre du jour, que nous traitons en catégorie II, trente minutes: le PL 13101-A. Monsieur Grégoire Carasso, la parole vous revient.
M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, le meilleur moyen de contextualiser ce projet de loi qui vise à modifier la loi sur les eaux, c'est de partir de 2019. 2019, c'est la première ouverture, le début de la belle histoire de la plage des Eaux-Vives; 2019, c'est aussi la décision de la commune de Collonge-Bellerive - la bien nommée Collonge-Bellerive - d'interdire l'accès à ses plages publiques aux non-résidents de la commune. On trouve là, entre une démarche de libre accès et une pratique restrictive et discriminatoire, l'origine et la raison d'être de ce texte.
Il repose sur des principes que je vais brièvement rappeler. Tout d'abord, l'accès public au lac. Ensuite, la gratuité; on parle d'une gratuité de principe, c'est-à-dire que, à l'instar des bains des Pâquis, s'il y a des infrastructures à disposition ou des prestations fournies, alors il est possible d'établir un prix d'entrée modeste et non discriminatoire. Enfin, chers collègues, le dernier axe, je viens de l'évoquer, c'est le principe de non-discrimination: non-discrimination quant à l'accès aux rives du lac, non-discrimination quant au prix. Pour toutes ces raisons, au nom de la majorité de la commission, je vous invite à adopter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Comme vous l'avez lu dans mon rapport de minorité, Mesdames et Messieurs, les objections formulées par la minorité ne sont pas tellement liées au fond du projet de loi que le Conseil d'Etat a déposé. Pour resituer le contexte à l'intention de ceux qui ne sont pas au fait du dossier, en résumé, on a traité de cette question parce qu'une commune voulait facturer l'entrée de ses plages de façon différenciée entre ses résidents et les autres. De là a découlé un texte de loi.
Cette nouvelle loi que le Conseil d'Etat propose est construite sur l'idée qu'il n'est pas possible pour les communes d'établir des tarifs différenciés entre leurs résidents et les personnes qui viendraient sur leur territoire, voilà ce qui nous est soumis aujourd'hui. Or, selon moi - et on verra si une majorité pense de la même façon -, il y a quelques petites phrases importantes: avec ce dispositif, quelqu'un qui veut entrer aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage et qui n'a pas un sou peut légitimement saisir la justice en arguant: «Je n'ai pas les moyens, j'ai droit à un accès gratuit.»
La réalité, c'est que si on vote cet objet tel quel ce soir, sans les amendements, Mesdames et Messieurs, tous les aménagements que les collectivités, quelles qu'elles soient - Ville, canton, communes -, réalisent en matière d'accès au lac seront remis en cause. On ne pourra plus les rendre payants, on ne pourra plus permettre à Genève-Plage ou aux bains des Pâquis de faire payer l'entrée, puisqu'il y a quelque part une notion de capacité financière en jeu.
C'est pourquoi il faut voter quelques amendements qui vous sont présentés dans le rapport de minorité: il s'agit de supprimer les mentions «en principe gratuitement» à l'alinéa 1 et «La tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population» à l'alinéa 2 de l'article 27A.
Donc pour tous ceux qui ont encore la capacité de digérer cette question, vous comprenez bien que philosophiquement - c'est ce que je vous expliquais -, soit les collectivités publiques peuvent facturer un prix d'entrée, soit elles ne le peuvent pas. A aucun moment on ne peut envisager que le gardien des bains des Pâquis commence à effectuer un «assessment» financier de la personne qui doit payer 2 francs pour entrer après 11h. De la même manière, si Genève-Plage a décidé que l'entrée coûte 7 francs pour les services mis en place, ce qui permet de...
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Adrien Genecand. Merci, Monsieur le président. J'aurais bien voulu que vous me donniez ce temps avant, mais peu importe. Voilà la réalité, Mesdames et Messieurs les députés, et je m'en tiendrai à cela. Si nous n'acceptons pas les deux amendements que je vous soumets, Genève-Plage et les bains des Pâquis n'existeront plus. (Rires.)
M. Florian Dugerdil (UDC). Chers collègues, notre parti est attaché à l'égalité de traitement entre nos concitoyens, de quelque classe qu'ils soient issus et peu importe leur lieu de domiciliation. Selon nous, bien que le fond du projet de loi soit louable sur trois aspects - il permet l'accès au lac au plus grand nombre de Genevois et de Genevoises, assure une équité de traitement dans l'accès à la trentaine de sites lacustres à disposition et maîtrise le prix d'entrée de ces lieux qui, en principe, doivent être gratuits, mais peuvent devenir payants si la commune justifie des charges importantes -, les différentes auditions et les nombreuses discussions qui ont suivi ont déclenché bon nombre d'interrogations, de craintes et de points de suspension.
Premièrement, comme évoqué par Mme le maire de Collonge-Bellerive, l'uniformisation du coût d'entrée aurait pour effet de déclencher le mécontentement des communiers; a contrario, pour le reste de la population qui ne réside pas au bord du lac, un sentiment de discrimination pourrait se faire ressentir. Secondement, nous pourrions valider le principe selon lequel lorsqu'une commune construit des infrastructures et met un service à disposition de la population, elle souhaite rentabiliser cet investissement; a contrario, une distorsion du prix pourrait naître entre les différents sites et ainsi créer une forme d'exclusion d'une certaine frange de la population.
Finalement, malgré les nombreuses séances dédiées au traitement de ce texte, l'Union démocratique du centre estime malheureusement que celui-ci est mal rédigé et provoque plus de problèmes qu'il n'en solutionne. Mesdames et Messieurs les députés, au vu de tous les éléments précédemment mentionnés, notre groupe vous invite à renvoyer ce projet à la commission d'aménagement du canton afin d'essayer d'y apporter des modifications et de le rendre efficient, pertinent et impactant. A défaut, notre groupe le refusera. Merci.
Une voix. Très bien.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets aux voix la proposition de renvoi en commission qui nous a été soumise... (Commentaires.) Non, Mesdames et Messieurs, vous ne pouvez pas demander la parole au moment où je lance le vote, ce n'est pas possible ! En tant que président qui gère cette assemblée, je ne peux pas prendre le micro pour un vote et ensuite vous donner la parole, ça ne va pas. Il faut la solliciter avant, votre collègue a proposé un renvoi en commission et vous l'avez entendu. Mais bon, exceptionnellement, Monsieur Carasso, je vous laisse intervenir.
M. Grégoire Carasso. Je renonce, Monsieur le président.
Le président. Alors c'est le tour de M. Genecand.
M. Adrien Genecand. Je renonce également.
Le président. C'est très gentil ! (Commentaires.) Mesdames et Messieurs les députés, j'en appelle au sérieux de notre travail: lorsqu'une demande de renvoi en commission est formulée, si les rapporteurs à la table ne se manifestent pas, ils ne peuvent plus le faire après. Voilà, et maintenant nous passons au vote.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 13101 à la commission d'aménagement du canton est rejeté par 54 non contre 35 oui.
Le président. Nous poursuivons la discussion. Je donne la parole à Mme Bayrak.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, j'ai entendu dans la bouche de l'UDC que ce projet de loi était louable; il est plus que louable, il est nécessaire ! En effet, vous l'avez vu, il fait chaud, et quand il fait chaud, les gens ont envie de se baigner, et quand les gens ont envie de se baigner, il leur faut des endroits à disposition. J'imagine qu'hier soir, vu la chaleur dans cette salle, nous n'aurions pas dit non à un petit plouf dans le lac.
Cela étant, on a constaté que certaines communes ne jouaient pas le jeu, préféraient limiter l'accès au lac à leurs seuls communiers, et ça ne fonctionne pas. Non, ça crée une inégalité entre les différents habitants des communes genevoises, ce qui n'est tout bonnement pas acceptable. Lorsqu'il fait chaud, nous devons offrir, surtout aux personnes qui ne peuvent pas se permettre de voyager à l'étranger, celles qui subissent de plein fouet le réchauffement climatique, des lieux de baignade, toutes les communes doivent jouer le jeu. Et s'il y a des infrastructures à disposition - c'est prévu dans la loi -, un prix raisonnable peut être fixé.
Non, Monsieur Genecand - vous transmettrez, Monsieur le président -, les dispositions qui figurent dans le texte - l'article 27A - ne signent pas la fin des bains des Pâquis ni des établissements qui existent déjà. Si les notions juridiques vous semblent indéterminées, s'il devait y avoir un quelconque doute quant à l'application qui peut être faite de ces modalités, il est possible pour le Conseil d'Etat de préciser ces éléments par le biais d'un règlement.
En tout état de cause, il n'est pas très compliqué de comprendre ce qui est signifié ici: il n'y a pas de différence de prix pour accéder aux rives du lac selon le fait que la personne habite dans la commune ou pas, il n'est pas possible de fixer des tarifs prohibitifs. Ce n'est pas bien complexe. Il me semble, dans cette logique qui relève tout simplement du bon sens, que tout le monde peut se permettre une dépense de 2 francs; en tout cas, ce n'est pas un prix discriminatoire, contrairement à certains tarifs qu'on pourrait imaginer - 35 francs, peut-être 50 francs pour un accès au lac sans infrastructures, ce sont des choses qui ne sont pas acceptables, qui devront être déterminées avec l'usage.
Ce projet de loi est nécessaire, il faut que toutes les communes jouent le jeu, il faut que toutes les communes se serrent les coudes pour que les Genevoises et les Genevois, peu importe leur commune de résidence, puissent accéder aux sites lacustres, surtout quand il fait chaud. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Sébastien Desfayes (LC). Pour Le Centre, ce sera la liberté de vote. Certains de nos membres sont sensibles à l'autonomie communale et estiment que qui paie commande et que ce n'est pas à l'Etat jacobin de fixer les règles. Au demeurant, les événements de 2019 sont derrière nous; aujourd'hui, il semblerait que la commune gère très bien l'entrée aux plages de la Nymphe et de la Savonnière.
D'autres considèrent qu'en cette période de réchauffement climatique, il est évident que les Genevois doivent avoir accès à l'eau, surtout au sein des collectivités publiques, et qu'il s'agit d'un bon projet de loi, puisqu'il offre une marge de manoeuvre aux communes s'il existe certaines installations qui justifieraient le prélèvement d'un prix d'entrée. Enfin, ce qui est également important pour ces députés, c'est qu'il n'y ait pas de discrimination selon le lieu de domicile, parce que cela reviendrait à ouvrir la boîte de Pandore. Merci.
M. Marc Falquet (UDC). Concernant la plage de la Savonnière, je voudrais dire qu'il y a quand même une certaine logique à différencier le prix selon les gens. Pourquoi ? Déjà, il y a un gardien qui est payé par les contribuables de la commune, qui officie carrément à plein temps sur place. L'endroit est magnifique, il a été aménagé à coups de millions par la municipalité, uniquement grâce aux impôts des communiers.
Ensuite, des agents municipaux sont dédiés à la protection et à la sécurité du lieu tandis que des agents de sécurité privés rémunérés par la commune passent encore le soir. L'entretien est parfait, on ne trouve jamais un papier par terre, donc il y a un réel investissement par la commune des impôts des résidents, ce qui justifie une différence de prix, parce que c'est nous qui finançons - enfin, ce sont les habitants de Collonge-Bellerive qui financent - cette plage à 100%, on peut le dire, et elle est superbe, c'est vrai.
De plus, si vous observez les plaques d'immatriculation des voitures, vous voyez que deux tiers des visiteurs sont des Français. Alors c'est très bien, on les accueille avec plaisir, ils viennent profiter des plages ici et ils ont raison, mais c'est normal qu'ils participent un minimum aux frais d'entretien et aux coûts que représente cette magnifique plage. D'où la justification d'une différenciation des tarifs. Voilà ce que je voulais dire. Merci beaucoup.
M. Raphaël Dunand (LJS). Je vais éviter de répéter tout ce que mes préopinants ont indiqué ce soir par rapport à ce projet de loi. Je tenais juste à préciser que suite à la polémique à Collonge-Bellerive qu'a évoquée le rapporteur de majorité, le Conseil d'Etat a décidé de se saisir de la question de l'accessibilité des rives du lac. Je pense, et mon groupe se joint à moi, qu'il est fondamental de garantir l'accès au lac à toute la population.
Oui, il fait chaud aujourd'hui, mais peu importe, qu'il fasse chaud ou froid, les rives du lac sont propriété publique et, de ce fait, tout un chacun peut - devrait pouvoir - se baigner sans être discriminé de quelque manière que ce soit, par exemple quant au prix proposé - même si des infrastructures sont installées par les communes - ou par des dispositions communales liées au lieu de domicile.
En résumé, pour Libertés et Justice sociale et moi-même, ce projet de loi est clair comme de l'eau de roche - enfin, comme de l'eau du lac: il vise purement et simplement à garantir l'accès aux secteurs de baignade publics à la population. C'est pour cela que mon groupe et moi-même vous invitons à le soutenir - je ne sais pas si les amendements ont été déposés, mais en tout cas à le soutenir sans les amendements proposés.
M. Patrick Dimier (MCG). Pour rappel, notre constitution stipule que l'eau est un bien universel. Or si c'est un bien universel, il est évident que son accessibilité est essentielle. Merci.
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Manifestement, les gens n'ont pas exactement compris l'essence du sujet, c'est-à-dire que la gratuité de l'accès au lac... On ne remet pas en cause, personne ne remet en cause l'accès aux rives du lac. La question philosophique est la suivante: que permet-on de faire à ceux qui opèrent autour du lac ? Historiquement, ce projet de loi vient du fait qu'une commune a décidé de facturer un prix d'entrée à ses plages plus élevé à ceux qui ne sont pas ses communiers.
Moi, je vous le dis, Mesdames et Messieurs: cette loi n'ira nulle part si elle n'est pas amendée, parce qu'à aucun moment, «en principe gratuitement»... Monsieur le président, je serais le premier citoyen, j'irais à Genève-Plage, puis aux bains des Pâquis et j'exigerais la gratuité. Si on vote ce texte ce soir, après-demain, je me rends aux bains des Pâquis et à Genève-Plage, c'est gratuit ! Il n'y a aucun lien entre l'accès au lac et les infrastructures à disposition, donc sauf à voter mes quelques amendements, on ne permet absolument rien.
L'étape d'après, Mesdames et Messieurs, c'est que je vais dire que le nécessaire n'a pas été fait dans le Rhône pour me permettre de me baigner «en principe gratuitement». En effet, j'adorerais sauter depuis le pont de la Jonction et nager jusqu'à la pointe, d'accord ? De toute façon, si les deux amendements qui sortent de commission - l'un qui supprime «en principe gratuitement» et l'autre - ne sont pas acceptés ce soir, cet objet n'aura aucune portée.
C'est dommage, parce que l'idée de base était de souligner que l'accès à l'eau est important et que les communes ne peuvent pas le restreindre en décidant de faire des choses diverses et variées. Là, on va se retrouver dans une situation où à la fois les bains des Pâquis et Genève-Plage ne pourront plus faire ce qu'ils font extrêmement bien aujourd'hui. Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, cette loi votée telle quelle punira Genève-Plage et les bains des Pâquis. Je vous remercie.
M. Grégoire Carasso (S), rapporteur de majorité. Monsieur le président, combien de temps de parole me reste-t-il ?
Une voix. Zéro.
M. Grégoire Carasso. Zéro ? Alors deux mots pour dire que... (Le chronomètre s'affiche.) Ah, il m'en reste largement assez !
Le président. Mais oui !
M. Grégoire Carasso. C'est bien ce qu'il me semblait, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur de minorité est en train de boire la tasse et tout le monde l'a bien compris. Les amendements du PLR, pour celles et ceux qui les ont lus, sont les suivants: ils consistent à supprimer de la loi toute référence à la gratuité. Par ailleurs, si on écoute notre collègue de l'UDC, il faudrait non seulement abolir la gratuité, mais encore réintroduire la discrimination !
Une voix. Ça n'a rien à voir.
M. Grégoire Carasso. Onze communes ont un accès aux rives du lac, onze communes ! Cela signifie, si on suit les quelques voix égarées du Centre qui souhaitent leur laisser la possibilité de restreindre l'accès aux plages, que ces onze communes pourraient interdire leurs lieux de baignade à tous les résidents du canton qui ne sont pas leurs communiers. C'est un véritable scandale ! Ça, c'est pour nos camarades du Centre qui hésitent encore un petit peu, sous couvert d'une autonomie communale pour le coup spécialement mal placée, par rapport à celles et ceux qui ont bien compris l'intérêt, réchauffement climatique oblige - vous avez vu l'été qu'on vient de passer -, de favoriser l'accès à l'eau.
Pourquoi le PLR propose-t-il de supprimer la mention «en principe gratuitement» ? Parce qu'il veut pouvoir permettre, par exemple à Collonge-Bellerive ou pourquoi pas aux bains des Pâquis, de facturer une entrée à 100 francs.
Une voix. Mais non !
M. Grégoire Carasso. Eh oui, c'est ça ! En théorie, si vous votez les amendements du PLR, c'est ce qui pourrait se passer. On n'a aucun doute sur le fait que cela ne se produira pas en ville de Genève, que cela ne se produira pas au Vengeron, que cela ne se produira pas à Versoix, car il s'agit d'infrastructures financées tantôt par le canton, tantôt par les communes avec, de manière générale, le principe du libre accès; cela ne se produira pas non plus à la plage des Eaux-Vives, cela ne se produira pas pour les infrastructures équipées par la Ville de Genève aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage.
Supprimer toute référence à la gratuité, c'est ouvrir la voie à une entrée à 100 francs. Voilà ce que notre collègue, avec supercherie et un brin de mauvaise foi, essaie de vous vendre. J'en veux pour preuve l'alinéa 2; prenez le soin de le lire, il propose de supprimer la phrase «La tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population.» Ce serait prétendument un problème, parce que si on n'a pas les moyens de payer 2 francs, alors on pourrait faire tomber la loi; c'est l'argument fumeux qu'on avance ici.
Je conclurai ainsi: si on veut la gratuité pure et simple, à ce moment-là, on la garantit en supprimant «en principe», et c'est gratuit partout. Mais cela signifie que les collectivités publiques, typiquement aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage, devront compenser le manque à gagner. Un équilibre a été trouvé ici avec les onze communes concernées, soutenu par une écrasante majorité de la commission. Je vous invite dès lors à réprimer cette agitation et à adopter le projet de loi tel que sorti de commission. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci. Monsieur Genecand, vous avez la parole pour quinze secondes.
M. Adrien Genecand (PLR), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. «Les secteurs de baignade des rives du lac, propriété des collectivités publiques, sont accessibles au public en principe gratuitement. Un accès différencié en fonction du domicile est prohibé.» Quand on supprime le principe de gratuité, on ne supprime pas tout le reste que vient de citer M. Carasso; on supprime juste le fait que par exemple les bains des Pâquis, qui sont historiquement une grande conquête de la gauche, peuvent facturer une entrée à 2 francs. Demain, Monsieur le président, les bains des Pâquis ne pourront plus le faire. (Commentaires.) La réalité, c'est que la gauche, à travers ce texte, veut permettre l'accès aux rives du lac sur toutes les propriétés de la rive gauche comme de la rive droite. (Commentaires.)
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ainsi que cela a été souligné, ce projet de loi pose un principe, et un principe fort, à savoir l'universalité de l'accès aux rives du lac. A qui appartient le lac ? Aux Genevoises et aux Genevois, et pas aux communiers. Je pense qu'il faut le dire et le réaffirmer ici, parce que c'est le dessous de l'affaire, c'est le non-dit de ce débat.
Dans cette salle, certains et certaines continuent à soutenir que chaque commune devrait pouvoir différencier le prix d'entrée à ses lieux de baignade. Mais quid si demain, la Ville de Genève décide de limiter l'accès aux bains des Pâquis à ses seuls résidents ? Genève-Plage, Baby-Plage ? Qu'en penseraient les habitantes et habitants du reste du canton ? S'agit-il vraiment d'une option envisageable ? Non, absolument pas, parce que Genève est une ville-centre, une ville d'ouverture. Mais pourquoi ce principe, qui semble si évident pour la Ville de Genève, ne le serait-il pas pour les dix autres communes riveraines du lac ? Je vous invite vraiment, Mesdames et Messieurs les députés, à vous montrer très clairs quant au message adressé à l'égard des communes.
Ensuite, on peut toujours débattre de la question de la gratuité. Ce compromis - cela a été relevé par le rapporteur de majorité - a été trouvé avec les onze communes. Une chose est sûre, Mesdames et Messieurs les députés: on ne peut pas arguer, sur la base de l'énoncé selon lequel «la tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population», qu'il existe un droit d'accès individuel. Ce genre de formulation juridique figure dans bon nombre de nos lois: pour les transports publics, pour l'accès à la santé, pour certaines prestations culturelles. Il est normal d'exiger tout de même un certain prix.
Alors nous nous réjouissons du recours de M. Genecand une fois que cette loi aura été votée, mais juridiquement, selon tous les avis pris tant au sein qu'à l'extérieur du département, rien ne permet de croire que ce texte fragilise l'équilibre qui est celui déjà trouvé aux bains des Pâquis ou à Genève-Plage. Si d'autres communes, par exemple du côté de Collonge-Bellerive, offrent une prestation conséquente aux baigneurs, elles peuvent, elles aussi, instaurer une tarification que l'on entend modeste.
Quelle est l'idée là derrière ? C'est qu'il s'agit d'un espace public, comme un parc, comme un lieu où on se balade. A partir de là, on peut facturer l'entrée 2 francs, mais si on passe à 5 francs, si on passe à 10 francs, cela devient exclusif, surtout vis-à-vis des familles. La portée de cet article est juste là. Tarification, oui, mais tarification modeste. C'est exactement l'équilibre qui a été validé par les communes. Aussi, Mesdames et Messieurs, ne vous cachez pas derrière des prétextes pour refuser ce projet de loi et permettez à tout le monde d'accéder au lac. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous procédons au vote d'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 13101 est adopté en premier débat par 59 oui contre 33 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1, al. 1, lettre e (nouvelle, les lettres e et f anciennes devenant les lettres f et g).
Le président. Nous sommes saisis de deux amendements de la minorité à l'article 27A. Le premier vise à supprimer la mention «en principe gratuitement» à l'alinéa 1.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 34 oui et 1 abstention.
Le président. La seconde modification consiste à retirer de l'alinéa 2 la phrase suivante: «La tarification ne doit pas constituer une mesure excluant de l'accès aux secteurs de baignade certaines catégories de la population.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 58 non contre 35 oui.
Mis aux voix, l'art. 27A (nouveau) est adopté.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13101 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 57 oui contre 36 non et 1 abstention (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs, nous allons faire une pause de dix minutes.
La séance est levée à 17h50.