Séance du
jeudi 29 février 2024 à
20h30
3e
législature -
1re
année -
9e
session -
58e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Nathalie Fontanet, Anne Hiltpold et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.
Exhortation
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mmes et M. Thierry Apothéloz, Carole-Anne Kast et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Lara Atassi, Jacques Béné, Cédric Jeanneret, Matthieu Jotterand, Charles Poncet, Skender Salihi, Alexandre de Senarclens, Francisco Taboada, Louise Trottet et Pascal Uehlinger, députés.
Députés suppléants présents: Mme et MM. Sebastian Aeschbach, Céline Bartolomucci, Thomas Bruchez, Rémy Burri, Patrick Lussi, Philippe Meyer et Frédéric Saenger.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'une procureure. Je prie le sautier de la faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (La procureure entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Madame, vous êtes appelée à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyenne et comme magistrate du Ministère public;
- de constater avec exactitude les infractions, d'en rechercher activement les auteurs et de poursuivre ces derniers sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, le Suisse comme l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment: Mme Vanessa Schwab.
La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du Pouvoir judiciaire. Je prie le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Les magistrats entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Madame et Monsieur, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Diana Zehnder et M. Bernard Delacoste.
La présidente. Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Communications de la présidence
La présidente. Au point 7 de notre séance de 17h, dans les communications de la présidence, j'ai commis un oubli - totalement inadmissible de ma part - que je vais réparer à l'instant: vous aurez tous constaté que j'ai oublié de féliciter le Genève Servette Hockey Club...
Des voix. Ah !
La présidente. ...pour sa victoire à la coupe d'Europe ! (Exclamations. Applaudissements.)
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
La présidente. Nous passons à notre premier point fixe, l'IN 180-B. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. La parole revient à M. Murat-Julian Alder.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Je vous remercie, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, l'initiative 180 «Pour + de logements en coopérative» propose que d'ici 2030, 10% de l'ensemble du parc de logements de notre canton soit détenu par des coopératives d'habitation sans but lucratif. La majorité de la commission, après un examen approfondi de ce texte, a pris la décision de vous proposer de le rejeter. La principale raison est qu'il va trop loin, d'abord parce qu'il fixe un taux totalement arbitraire en ce qui concerne la proportion de logements en coopérative d'habitation sans but lucratif: pourquoi 10% ? Pourquoi pas 5% ou 15% ?
Ensuite, il nous paraît illusoire de tenir le délai imparti par cette initiative, qui exige que cela soit fait d'ici 2030, soit dans moins de six ans - autant dire que ce délai n'est absolument pas réaliste. Nous ajoutons aussi que curieusement, ce texte exclut totalement de son champ d'application les coopératives d'habitation avec but lucratif: on ne comprend pas pourquoi seules celles sans but lucratif devraient être concernées.
Surtout, nous nous inquiétons également du risque que ce texte créerait en ce qui concerne le recours au droit de préemption de l'Etat en la matière. Nous ajoutons aussi que la problématique de la mixité sociale a fait l'objet d'un accord en 2020, autour de la révision de l'article 4A de la LGZD, la loi générale sur les zones de développement. Cette initiative revient sur un accord accepté à une large majorité.
En définitive, nous n'ignorons pas qu'il y a une forte demande en ce qui concerne ce type d'habitations. Nous ne remettons bien évidemment pas en question les bienfaits qu'il apporte. Néanmoins, cette initiative se garde bien aussi de dire le besoin des Genevois de pouvoir se loger sous la forme de PPE, de propriété par étages, besoin qui est tout aussi important et qui est tout autant soumis à la tension du marché que nous connaissons aujourd'hui.
Pour l'ensemble de ces raisons, nous vous recommandons de rejeter cette initiative. Néanmoins, nous sommes soucieux de chercher des solutions en la matière; même si cette initiative va trop loin sur les points que j'ai exposés, elle a le mérite de faire des propositions concrètes, et nous souhaiterions approfondir le sujet dans le cadre de l'élaboration d'un contreprojet par la commission du logement, raison pour laquelle nous vous invitons à soutenir aujourd'hui le principe d'un contreprojet, dont les contours seront définis ultérieurement par la commission du logement. Merci beaucoup de votre attention.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de première minorité. Je ne vais pas vanter tous les mérites des coopératives, je me bornerai à mentionner le sondage «Genève 2050», qui a produit des résultats assez parlants en ce qui concerne le besoin et la demande pour ce type de logements: 90% des 5000 réponses reçues se sont révélées favorables à un développement des projets participatifs en coopérative d'habitation.
Cette initiative ne fait que répondre à cette demande en fixant un objectif similaire au ratio de logements situés en coopératives que l'on observe dans d'autres centres urbains; pour ne citer que ces exemples, Zurich compte 20% de logements situés en coopératives, Bienne 14%, Lausanne 8% et Genève que 5%. Ce que le sondage «Genève 2050» démontre est que ce chiffre pourrait être augmenté. Quant au taux de 10% préconisé par les initiants, le rapporteur de majorité estime qu'il est arbitraire, mais je n'ai pas l'impression que c'est ce chiffre de 10% qui pose problème à la majorité, car n'importe quel taux aurait posé problème.
De la même manière, le reproche fait au délai fixé à 2030 comme étant une date trop proche d'aujourd'hui est aussi à mettre en lumière avec les efforts démesurés mis en oeuvre pour empêcher cette initiative d'être soumise à un vote populaire ou pour en retarder l'échéance, comme en démontre le recours jusqu'au Tribunal fédéral pour, au final, être totalement désavoué. On peut encore citer les arguments qui reprenaient les éléments du recours et qui ont été démontrés comme faux. Cet objectif de 10% est un objectif général, et l'initiative est assez bien formulée parce qu'elle prévoit les différentes étapes de concrétisation pour le cas où le ratio de 10% ne pourrait pas être atteint en 2030.
Ainsi - c'est même le Tribunal fédéral qui l'a reconnu -, cette initiative est bien formulée, elle répond à un besoin, et je pense que ce n'est pas pour rien qu'elle fait l'objet d'autant de tentatives de ralentissement de la part des milieux immobiliers, parce que finalement, ce que cette initiative porte comme message, c'est de renforcer le parc immobilier via des logements abordables pour une majorité de la population. Pour toutes ces raisons, la première minorité de la commission vous encourage à l'accepter et à refuser le principe d'un contreprojet.
M. Philippe de Rougemont (Ve), rapporteur de deuxième minorité. A Genève, les coopératives ont fait leurs preuves, elles ont récemment fêté leurs cent ans d'existence. Aujourd'hui, elles fournissent des logements qui, selon l'OCSTAT, sont 38% moins chers que les loyers hors coopératives. Pourquoi ? Parce qu'elles sont sans but lucratif. L'éventuel bénéfice fait par une coopérative est versé sur un fonds qui sert à acquérir et à construire de nouvelles coopératives. Il y a d'autres aspects très intéressants, auxquels sont sensibles 75% de la population et non pas quelques petits pourcentages qui peuvent se permettre les 200 000 francs de fonds propres pour acheter un appartement - en réponse au rapporteur de majorité.
La première chose très intéressante est que les loyers sont plus bas, mais il y a aussi le fait que les habitants sont codécideurs. On remarque que dans les coopératives, l'indice de dépense de chaleur est beaucoup plus bas; si les dépenses de chaleur sont beaucoup plus basses, c'est parce que ce sont les habitants qui décident et qui déclenchent des rénovations thermiques. Si tous les habitats à Genève étaient des coopératives, on ferait un progrès fantastique dans la rénovation des bâtiments, sans nullement devoir forcer les propriétaires. Pendant des semaines, on a vu un théâtre dans cette salle au sujet de la loi sur l'énergie, ça continue peut-être... Eh bien, on n'aurait pas cette situation-là si on avait des coopératives gérées par leurs membres.
Même si ces coopératives sont à but non lucratif, elles constituent des provisions avec lesquelles elles continuent à construire. Elles sont comprises dans les critères LGL. Par conséquent, sauf quelques exceptions, il y a un contrôle du taux d'occupation et du revenu des coopérateurs, ce qui les rend accessibles à tous les niveaux de revenus, à tous les ménages.
Les ménages à haut revenu ne connaissent pas la crise du logement à Genève; pour eux, il n'y a pas de problème, ils peuvent se payer des loyers très élevés, mais pour la vaste majorité des autres ménages, les coopératives constituent la solution, ici et maintenant, pour accéder au logement. Ne faisons donc pas les naïfs, c'est pour ça qu'il y a un engouement pour les coopératives, c'est pour ça que les Genevois veulent voter sur cette initiative. Malheureusement, on a perdu beaucoup de temps avec un recours au tribunal. Ce dernier a tranché, l'initiative est tout à fait correcte. Maintenant, allons devant le peuple !
Pourquoi est-ce qu'il y a une controverse sur cette initiative, finalement ? Elle répond aux besoins de la population, on rénove davantage, on renforce la démocratie participative - ce qu'aiment les habitants de ce pays -, pourquoi donc une telle opposition ? Parce qu'il y a une grande tension, comme on dit, sur le foncier à Genève, il y a une course à l'or vers le terrain. Vous avez des représentants d'intérêts financiers privés qui tentent de vous persuader que l'intérêt du canton n'est pas celui des coopératives. Je vous invite toutes et tous à faire très attention, à regarder quels sont les intérêts qui luttent contre cette initiative et à vous rappeler que la vaste majorité des ménages à Genève ont besoin de plus de coopératives.
La présidente. Vous parlez sur le temps de votre groupe.
M. Philippe de Rougemont. Augmentons ce taux à 10%, 15%, 20% ! Pour répondre à la question des délais, regardons aussi ce qui se passe avec l'ordonnance sur la protection contre le bruit, l'ordonnance sur la protection de l'air: on est familier de ces objectifs avec des délais difficiles à atteindre, mais qui servent à motiver la population et les autorités à avancer.
Pour toutes ces raisons, les Vertes et les Verts vous invitent à être indépendants des défenseurs d'intérêts acquis privés, qui veulent se faire passer pour des défenseurs de l'intérêt public. Restez indépendants et votez en faveur de cette initiative ! Ne perdons pas du temps avec un contreprojet ! Merci, Mesdames et Messieurs, de votre attention. (Applaudissements.)
M. Sébastien Desfayes (LC). Nous, centristes, sommes absolument favorables à la construction de coopératives, et nous tenons d'ailleurs à remercier le rapporteur de deuxième minorité, qui, dans son rapport, a cité l'ancien conseiller d'Etat Serge Dal Busco, qui avait dit lui-même que la coopérative remplit à moindres coûts l'objectif politique de maîtriser les coûts de la vie et de fournir des loyers modérés.
Bien sûr qu'il faut soutenir les coopératives, mais pas n'importe comment ! Le problème avec cette initiative, c'est que la piste proposée ne mène nulle part. C'est un miroir aux alouettes, ça apportera des difficultés, ça ralentira la construction et ça ne permettra pas la construction de coopératives en quantité. Comme l'a dit le rapporteur de majorité, un «Freisinniger»... (Rires.) ...l'objectif est irréaliste: on n'arrivera pas à construire plus de 12 000 coopératives d'ici 2030, soit en six ans, sachant que l'on construit 2000 logements par année et que les terres se font rares - c'est une réalité qu'il faut prendre en considération.
Alors sauf à déclasser tous les terrains agricoles, ce qui est impossible et que nous ne souhaitons pas, cet objectif ne sera jamais atteint, ni même approché ! D'ailleurs ça a été reconnu par un des rapporteurs, qui a dit: «Oui, mais c'est un objectif général, ce n'est pas un objectif contraignant.» La question qui se pose est très simple, c'est une question rhétorique: à quoi bon fixer des objectifs, à quoi bon voter cette initiative si nous savons d'ores et déjà qu'elle ne sera pas réalisée ?
Autre problème évident, la question de la hiérarchisation normative, à savoir l'articulation entre l'article 4A LGZD et cette initiative, avec les blocages inhérents qui apparaîtront dans le cadre des autorisations de construire et des PLQ entrés en force.
Troisième problème - je ne vais pas être exhaustif, le temps me manque, malheureusement -, l'instrument utilisé agit sur l'exercice du droit de préemption, avec pour conséquence que seule une partie de la population genevoise pourra avoir accès à ces logements. Il existe des solutions pour construire plus de coopératives, et c'est dans ce sens qu'il faut, bien entendu, voter pour le principe d'un contreprojet. La première de ces solutions, c'est évidemment d'introduire une dose, un pourcentage de logements en coopérative dans l'article 4A. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
J'entends déjà Antonio Hodgers me dire: «Oui, mais vous rajoutez une contrainte supplémentaire qui va gêner les promoteurs immobiliers.»
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Sébastien Desfayes. Je tiens d'ores et déjà à le rassurer: on peut tout à fait aménager l'article 4A, notamment son alinéa 2 mentionnant les HBM, pour prévoir de faciliter et donc de diminuer les contraintes existantes.
La présidente. Merci.
M. Sébastien Desfayes. Enfin, un dernier mot, ce qu'il faut favoriser, ce sont les petites coopératives, à savoir celles formées par des groupes d'amis ou de connaissances, qui visent à construire un logement et non pas à se substituer à... (Le micro de l'orateur est coupé.)
M. Amar Madani (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, face au problème du logement, qui est crucial dans notre canton, toute idée visant à développer un logement abordable mérite d'être étudiée. Cette initiative 180 est louable pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'elle permet une accessibilité financière aux familles à revenus modestes et offre une approche collaborative favorisant un concept de communauté.
Toutefois, plusieurs bémols font que l'initiative telle que présentée relève presque, excusez-moi du terme, de l'utopie. D'abord, l'objectif, à savoir 10% du parc en coopératives d'ici 2030, est pour le moins irréalisable, car pour y arriver, il faut construire plus de 12 000 logements par an, sachant que notre canton en construit chaque année à peine 2000, tous types confondus.
Ensuite, il y a des problèmes réglementaires, qui constituent aussi un obstacle majeur. L'initiative va à l'encontre de la loi qui fixe un quota par catégorie de logements, la LGZD. Elle exclut de facto toute autre catégorie de logements, ce qui est une menace pour la diversité de l'offre immobilière et une entrave à la variété, voire à la liberté des citoyens quant à leurs besoins.
Le principe d'un contreprojet, en revanche, est un bon compromis pour répondre aux préoccupations de toutes les parties concernées par cette problématique. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, le MCG refuse l'initiative telle que présentée, mais accepte le principe d'un contreprojet. Je vous remercie. (Applaudissements.)
La présidente. Merci. (Brouhaha.) Je ne voudrais pas déranger le caucus PLR qui a lieu au fond de la salle... (Remarque. Rires.) Monsieur Florey, vous avez la parole.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Madame la présidente. Cette initiative pose différents problèmes. D'expérience, on le sait, le passé l'a confirmé, quand vous avez une initiative qui vous impose des délais, des objectifs, des montants trop précis, ça ne fonctionne pas. L'exemple le plus parlant est celui de l'initiative 144, qui parlait des pistes cyclables; aujourd'hui, on nous reproche sans cesse de ne pas avoir tenu les délais, ça nous coûte bien plus que ce que prévoyait au départ l'initiative - on était à 8 millions selon les initiants, on en est à plus de 150 millions quant au budget réellement investi -, et finalement, cette initiative sur les coopératives va nous amener, si elle est acceptée telle quelle, au même résultat.
On sera sans cesse accusés de faire tout ce qu'on peut pour freiner la construction de ce type de logements, on sera constamment accusés de ne pas voter les fameux crédits demandés, enfin bon, on sera accusés de tous les malheurs du monde et de freiner l'extension des coopératives dans notre canton. Alors que finalement, la réalité est que certes, les coopératives sont un bon système de logement, j'habite moi-même une coopérative... (Commentaires.) ...je veux dire, c'est très bien comme système, mais pas comme le voudraient les initiants. Il faut garder une certaine marge de manoeuvre, on doit laisser les coopératives se créer comme elles le font jusqu'à présent, c'est-à-dire de manière libre.
Aujourd'hui, il est relativement facile de créer une coopérative, il suffit de quelques personnes qui se mettent en association, qui montent un dossier, vous pouvez en plus bénéficier du fonds LUP, et, pour quelques centaines de francs investis au départ, vous vous retrouvez avec une coopérative. La réalité, elle est là aujourd'hui, et c'est du reste comme ça que celle dans laquelle j'habite s'est créée, lors d'une petite réunion entre plusieurs personnes au cours de laquelle ils ont monté ce dossier, ils ont mis 150 ou 200 francs chacun au départ et ils sont allés taper là où il fallait. C'est ça la réalité. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Par conséquent, finalement, nous recommandons de rejeter cette initiative pour les raisons que je viens d'invoquer.
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Stéphane Florey. Bien évidemment, il faudra un contreprojet pour marquer quand même une volonté d'aller de l'avant avec ces coopératives. Surtout, ce qu'il ne faut pas, c'est que l'Etat préempte pour tous ces terrains, car il sera obligé de préempter pour les vingt prochaines années si on veut réellement tenir les objectifs irréalisables de cette initiative.
La présidente. Merci.
M. Stéphane Florey. Refusons donc cette initiative et acceptons le contreprojet. Je vous remercie.
Mme Caroline Renold (S). Mesdames et Messieurs les députés, les constats sont partagés par tous et toutes: nous faisons face à une grave crise du logement et nous devons construire pour répondre aux besoins de la population. L'enjeu est donc le suivant: qui construit et quoi construire ? Parce qu'à Genève ce ne sont pas les constructeurs qui manquent, mais les terrains qu'on s'arrache. J'aimerais vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, que se loger est un besoin fondamental et un droit humain. Ça ne doit pas être une occasion de se faire de l'argent.
Et pourtant, les associations de défense des milieux immobiliers et les partis de la droite élargie qui les représentent ici, dans notre Conseil, souhaitent uniquement défendre leur recours à la spéculation foncière. Il n'est pas possible de construire du logement bon marché en laissant libre cours à la spéculation sur les terrains. Ce sont des concepts antinomiques !
Comme le proposait l'initiative fédérale de l'ASLOCA «Davantage de logements abordables» - refusée en Suisse alémanique, mais largement acceptée à Genève -, il faut donner la priorité aux maîtres d'ouvrage d'utilité publique pour construire des logements abordables. C'est ce qui a été fait dans le passé à Bienne et en ville de Zurich. Les coopératives sont des maîtres d'ouvrage d'utilité publique qui construisent par et pour les habitants, avec des loyers au plus proche des coûts.
Elles offrent aux locataires une sécurité du logement puisque les baux ne sont résiliés que dans des cas extrêmes. Elles empêchent la spéculation foncière, car les biens y sont durablement soustraits. Je souligne que même les prix des logements en zone LGZD ne sont contrôlés que pendant dix ans: ensuite, la spéculation reprend ses droits, contribuant au renchérissement des prix des loyers, ce qui est exactement le jeu voulu par les milieux immobiliers.
Avoir un socle de 10% de l'ensemble du parc de logements détenu par des coopératives d'habitation sans but lucratif, c'est développer des habitats à des loyers abordables pour la population et de qualité, c'est également lutter durablement contre la spéculation foncière. Mais cela, la majorité de droite de ce parlement ne veut pas l'entendre, bien qu'elle n'assume pas de le dire. Elle protège les intérêts des milieux immobiliers, qui souhaitent augmenter leurs profits au détriment de logements abordables pour la population. Elle veut s'accaparer une ressource très rare - les surfaces à bâtir - pour spéculer, que ce soit dans le PAV ou au détriment des coopératives. Car construire de la PPE est extrêmement profitable aux milieux immobiliers, alors que construire une coopérative ne profite qu'aux habitants et habitantes.
Le principe d'un contreprojet n'a qu'une visée dilatoire, repoussant l'échéance du vote de l'initiative devant le peuple, alors que la population genevoise veut des logements abordables, notamment en coopérative. Mesdames et Messieurs les députés, ayons le courage de faire ce que la population nous demande: construire rapidement des logements à loyers abordables. Acceptons cette initiative ! (Applaudissements.)
M. David Martin (Ve). Mesdames et Messieurs, chers collègues, notre groupe soutient bien évidemment l'initiative dont nous débattons ce soir, qui vise à augmenter la part de coopératives. Nous saluons ce texte lancé par le groupement genevois des coopératives, qui - il est important de le dire - regroupe une grande diversité de coopératives: certaines historiques, construites il y a cent ans, d'autres dans lesquelles les promoteurs immobiliers sont actifs, d'autres enfin plus participatives. Tous ensemble, ils ont proposé une initiative dont l'objectif est de porter à 10% la part de coopératives dans le parc de logements du canton.
On nous dit: «Eh bien non, mieux vaut faire un contreprojet.» Mais quel contreprojet doit-on attendre ? Nous n'en savons absolument rien ! A ce stade, il n'y a pas l'once d'une piste pour ce contreprojet. En revanche, qu'est-ce qu'il y a ? Une peur de voir cette initiative aboutir, puisque, Mesdames et Messieurs, les gens veulent ce type de logements. Comme on l'a dit, cela ressort des sondages, il y a énormément de gens inscrits pour des coopératives. Par conséquent, ne nous laissons pas embarquer par un contreprojet, qui ressemble à ce stade à une coquille vide.
Puis, on nous dit que ce n'est pas compatible avec l'article 4A LGZD; aucun problème, cette disposition prévoit que la part de PPE est d'un tiers - elle n'est pas menacée -, par contre, les deux tiers restants contiennent du locatif. Or pour ce dernier, on l'a également dit, rien n'exclut qu'il devienne cher à terme, parce qu'au-delà des dix ans, les appartements en location ont des loyers qui grimpent alors que les coopératives les maintiennent bas. Pourtant, on ne veut pas en faire, des coopératives. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Pourquoi ? Cherchez l'anguille sous roche ! (Rires.)
Par contre, ça a été dit de façon très honnête, la principale menace contre l'augmentation du nombre de coopératives, c'est le manque de terrains, terrains dont ont besoin les promoteurs pour faire leurs profits.
La présidente. Il vous faut conclure.
M. David Martin. Je vous invite donc à soutenir cette initiative visant à faire passer la part de coopératives, qui n'est aujourd'hui que de 5% dans notre canton, à 10%. A Zurich, ils sont à plus de 20%... (Le micro de l'orateur est coupé.)
La présidente. Merci. La parole est à Mme Diane Barbier-Mueller.
Mme Diane Barbier-Mueller (PLR). Merci, Madame la présidente. Je ne vais pas répéter ce qui a déjà été très justement dit par le rapporteur de majorité et certains de mes préopinants. Je ne vais pas non plus revenir sur les propos mensongers de Mme Renold, parce que je pense qu'elle est trop intelligente pour y croire - il s'agit donc forcément de propagande électoraliste mensongère. Je vais juste clarifier certains points.
On idéalise souvent la coopérative, on a fait la comparaison avec les coopératives zurichoises, qui représentent 20%; or, il faut rappeler que celles-ci existent depuis le XVIIIe siècle, qu'elles avaient pour vocation d'abriter des ouvriers à proximité des usines, qu'elles étaient autofinancées avec un apport de 20% de fonds propres - alors qu'à Genève, l'apport demandé n'est que de 5% - et qu'elles sont très souvent créées via des terrains mis à disposition par l'Etat. Ce sont donc deux philosophies très différentes; à Genève, les coopératives suivant ce modèle zurichois, à savoir celles qui permettent de réaliser une plus-value, sont très rares.
Un autre élément, c'est que l'initiative fixe un délai court. Nous sommes à 5% et le texte demande de réaliser 5% supplémentaires, ce qui représenterait 12 000 logements de plus. Le délai de sept ans est très court. Enfin, j'aimerais rétablir un petit point: on entend beaucoup cette opposition des méchants acteurs privés qui veulent faire de l'argent versus les très gentils acteurs publics qui ne pensent qu'au bien-être commun; or, les coopératives d'habitation ne sont que des entités privées qui ont des intérêts différents, comme toutes les coopératives et comme tous les privés ! Certaines veulent faire quelque chose de qualitatif à bas prix, d'autres souhaitent faire des logements pour abriter une part de population peut-être différente de celle imaginée.
C'est pour toutes ces raisons ainsi que celles déjà évoquées par Me Murat Alder... M. Murat Alder, pardon ! (Remarque.)
Une voix. Le «Freisinnig» !
Mme Diane Barbier-Mueller. Le «Freisinnig», en effet ! C'est pour toutes ces raisons que le groupe PLR rejettera l'initiative et soutiendra l'idée d'un contreprojet. Notre groupe n'est pas opposé à l'initiative dans son intégralité, mais il souhaite encourager un certain ratio de coopératives pour que cette évolution du marché genevois - effectivement déjà très favorable, très porteur et où tout le monde peut décider à qui on attribue les terrains ou pas parce que tout le monde veut construire dessus - ne se fasse pas au détriment de certains logements, notamment sociaux. Il faut rappeler que si l'on développe davantage la coopérative, ça ne se fera pas que sur la part des méchants promoteurs privés, mais ça pourrait aussi se faire sur une part du logement social. Par conséquent, afin de ne pas péjorer toutes les catégories de logements, il faut retravailler cette proposition via un contreprojet qui tienne compte de tous les besoins de la population. Merci, Madame la présidente. (Applaudissements.)
M. Djawed Sangdel (LJS). Chers collègues, lors des travaux effectués en commission, bien évidemment, la majorité des commissaires n'étaient pas contre la construction de logements à Genève, même sous forme de coopératives. Nous étions tous pour construire plus de logements, car nous en avons besoin à Genève. Nous avons tous conscience de la crise du logement, cependant il faut penser à des projets faisables, dont on peut concevoir la réalisation, plutôt qu'à des projets qui vont rester uniquement sur le papier sans être concrétisés.
Bien entendu, le groupe LJS est toujours en faveur des projets de logements, que ce soit en coopératives ou non, mais cette initiative soulève des questions quant à la réalisation de ces 12 000 logements par an. Tout d'abord, le rapporteur de majorité l'a bien dit, le fait d'atteindre 10% du parc de logements en coopératives d'ici 2030 représente une course contre la montre vouée à l'échec - ce n'est pas possible de construire autant. Le deuxième élément est l'aspect financier: selon nous, sans plan financier robuste, ce texte risque de promettre plus que ce qu'il sera en mesure d'obtenir.
Se pose aussi la question des terrains: il faut en trouver si l'on veut construire des logements. Selon plusieurs auditions que nous avons menées au sein de la commission du logement, nous avons à Genève un vrai problème de terrain non seulement pour ce que propose cette initiative mais de manière générale. Il n'y a pas assez d'espace disponible. Cela signifie que même si la majorité du parlement vote cette initiative, on aura de toute façon des problèmes de terrain.
Le groupe LJS est favorable à un contreprojet qui devra contenir certains objectifs réalistes: par exemple, obtenir 3% ou 5% de logements en coopératives d'ici 2030, ou encore d'autres objectifs. Au nom du groupe LJS, nous préconisons, sur la base des raisons que je viens d'expliquer, un contreprojet plus réaliste et plus équilibré, en faveur des Genevois et Genevoises. Je vous remercie.
La présidente. Merci. Il n'y a plus de temps de parole pour le rapporteur de seconde minorité. Je cède le micro au rapporteur de première minorité, M. Diego Esteban, pour vingt-deux secondes.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. Je tiens juste à relever qu'il est curieux de dire de cette initiative qu'elle est à la fois dangereuse et inutile. Retenons tout simplement qu'elle fait quasi l'unanimité au sein de la population, raison pour laquelle nous vous invitons à la soutenir.
La présidente. Je vous remercie. La parole est au rapporteur de majorité, M. Murat-Julian Alder, pour trente-trois secondes.
M. Murat-Julian Alder (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. L'unanimité qui vient d'être évoquée ressort d'un sondage, qui, comme tous les sondages, est hautement discutable. Le seul sondage qui, moi, m'intéresse, c'est la volonté populaire lorsqu'elle se sera exprimée dans les urnes. Je vous invite aussi à étudier plus en profondeur la question des coopératives à Zurich: vous verrez qu'en réalité, elles sont beaucoup plus tournées vers l'argent que vers des idéaux politiques, contrairement à ce que vous pourriez penser. Par conséquent, comparaison n'est pas raison. Encore une fois, je vous invite à voter contre cette initiative et à accepter le principe d'un contreprojet. (Applaudissements.)
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat soutient cette initiative. Il est assez rare que le gouvernement soutienne une initiative populaire; s'il le fait, c'est qu'elle est raisonnable, pondérée et réaliste. Cela a été dit, le logement coopératif permet en effet avant tout d'offrir un loyer abordable sur la durée. Les statistiques le montrent, un appartement en coopérative a un loyer de 38% plus bas que son équivalent en logement libre. 38% moins cher, Mesdames et Messieurs ! Ça illustre les effets de la spéculation sur Genève: il n'y a pas d'économies sur les matériaux, pas d'économie sur la qualité, ni sur les mètres carrés; le même logement en coopérative est 38% moins cher que dans le privé. Voilà pour ce qui est du pouvoir d'achat des Genevois.
On l'a également entendu, l'initiative prend pour modèle Zurich. C'est juste de relever que la tradition ouvrière à Zurich, comme à Genève d'ailleurs, a donné lieu à des coopératives historiques, traditionnelles, comme on les appelle. Ce socle important de 20% en ville de Zurich est en effet divers et varié. Permettez-moi de clarifier une chose à ce propos: les coopératives très participatives, très écologiques et autres représentent une sous-catégorie. Ce n'est pas parce qu'on est en coopérative qu'on doit avoir des toilettes sèches. C'est bien que ça existe, mais une coopérative, c'est avant tout un loyer abordable et non spéculatif.
On constate que le modèle zurichois offre des coopératives plutôt axées sur l'innovation sociale et écologique, mais également d'autres solutions similaires à nos vieilles sociétés coopératives - d'ailleurs, un député UDC en profite bien... (Remarque. Rires.) - qui sont des immeubles locatifs comme les autres. Il n'y a pas de kibboutz dans les coopératives: on vit chacun dans son appartement, sauf qu'on paie un loyer moins cher. Ça, c'est quand même le coeur de ce débat.
Ces coopératives, Mesdames et Messieurs, contrairement à ce qu'a dit le député Desfayes, sont complètement compatibles avec l'article 4A LGZD puisque l'initiative permet à une coopérative d'être du LUP, du locatif libre (ZDLOC) et même d'offrir de la PPE, qui, elle aussi, sera moins chère que sa cousine dans le privé. Légalement - cela a étudié et c'est la position juridique du Conseil d'Etat -, dans le 10% préconisé par cette initiative, il peut y avoir des coopératives en PPE. Par conséquent, les trois tiers de l'article 4A LGZD seraient parfaitement respectés; cette initiative ne change pas ces équilibres que votre parlement a voulus.
Alors vous me direz: pourquoi 10% ? C'est vrai, c'est un chiffre politique. A Zurich, ils visent 30%; 10%, c'est plutôt raisonnable. Les objectifs fixés sous forme de taux de parts de logements sont toujours des chiffres politiques; pas plus tard que dimanche prochain, nous voterons sur une proposition consistant à retenir 24% de PPE au PAV: pourquoi 24% et pas 20% ou 30% ? Cette proposition contient en plus une disposition qui prévoit qu'il faut que le prix de la rente soit de 10 francs par mètre carré et par an; tout ça dans une loi ! Pourquoi un tel niveau de précision ? On voit donc que la majorité qui aujourd'hui critique une notion qui est habituelle - on a bien voté dans ce parlement un socle de 20% de LUP, qui lui aussi était un chiffre politique - fait ainsi le procès d'un chiffre qui, dans le fond, Mesdames et Messieurs, est raisonnable pour un canton comme Genève. 10% de coopératives sur l'ensemble du parc immobilier, c'est un taux raisonnable ! C'est moins que le 20% de LUP, c'est beaucoup moins que dans d'autres métropoles - on l'a dit.
Reste la question du délai: c'est le point faible de l'initiative, il faut le reconnaître. Il sera matériellement presque impossible d'atteindre ce socle de 10% dans un délai aussi court - ce ne sera d'ailleurs pas 12 000 logements, parce que le nombre total de logements sera plus élevé; or, il s'agit ici d'un pourcentage de la totalité des logements. Mais écoutez, c'est un délai d'ordre, comme on dit, ce n'est pas un délai qui défigure l'objectif. A nouveau, on peut prendre comme exemple les 20% de LUP présents dans la loi votée par l'unanimité de ce Conseil. Nous n'avons pas non plus atteint ce pourcentage, et pourtant ça n'annule pas la loi. On peut également citer la loi de dimanche prochain autour du PAV: si la population accepte ces 24% de PPE, ces derniers ne seront pas non plus disponibles pour 2030, sans que cela annule l'objectif. Dans nos lois sur le logement, nous avons des objectifs qui sont politiques, qu'on doit savoir accepter ou pas, mais qui en soi, même si le délai prévu est dépassé, ne sont pas non pertinents par rapport à l'objectif, à savoir aujourd'hui celui d'accroître, de doubler le parc de coopératives.
Mesdames et Messieurs, pour ces raisons, le Conseil d'Etat vous invite à voter l'initiative telle qu'elle vous est présentée. S'il y a la volonté d'un contreprojet, le département y contribuera bien évidemment. En l'état, dans ce débat, nous n'avons pas entendu ce que pourrait être ce contreprojet. L'initiative respecte en tous points les lois sur le logement et représente certainement la volonté d'une grande majorité des Genevoises et des Genevois de bénéficier d'un logement avec un loyer abordable, ce qui est au coeur du projet des coopératives. Je vous remercie. (Applaudissements.)
La présidente. Merci. Nous procédons au vote. Je vois qu'il y a une demande de vote nominal...
Une voix. Il a lieu d'office !
La présidente. Le vote nominal a effectivement lieu d'office dans la mesure où il s'agit d'un vote final. Je soumets tout d'abord à votre approbation la prise en considération de l'IN 180.
Mise aux voix, l'initiative 180 est refusée par 58 non contre 31 oui (vote nominal).
Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est accepté par 60 oui contre 32 non (vote nominal).
Le rapport IN 180-B est renvoyé à la commission du logement.
Débat
La présidente. Nous traitons maintenant notre deuxième point fixe, qui regroupe les RD 1562-A, R 1028-A et RD 1563-A. Le débat est classé en catégorie II, quarante minutes. En ce qui concerne les deux premiers objets relatifs au programme de législature, il y a un rapport de majorité de Mme Natacha Buffet-Desfayes, un rapport de première minorité de M. Stéphane Florey et un rapport de deuxième minorité de M. Sandro Pistis. Quant au troisième texte qui a trait au plan financier quadriennal, le rapport est de Mme Marjorie de Chastonay. Pour commencer, la parole va à Mme Buffet-Desfayes... si elle veut bien venir s'installer à la table centrale. (Un instant s'écoule.) Allez-y, Madame.
Mme Natacha Buffet-Desfayes (PLR), rapporteuse de majorité. Oui, merci, Madame la présidente. Je présente effectivement le rapport de majorité. Il nous a été expliqué à la commission des finances que ce programme de législature était le fruit d'une discussion... (Les rapporteurs de minorité parlent entre eux. L'oratrice s'interrompt.)
Une voix. Non, mais allez-y !
Mme Natacha Buffet-Desfayes. Merci, c'est gentil ! Merci beaucoup ! ...que ce programme de législature était le fruit d'un consensus et d'une discussion qui avait eu lieu entre les conseillers d'Etat, qu'il reflétait les prises de position des différents départements avec leurs priorités pour ces quelques années à venir.
On nous a aussi honnêtement indiqué que le résultat ne correspondrait jamais complètement à l'ensemble des sept magistrats: chacun y place l'essentiel de sa vision politique en espérant que les projets de lois suivront et que le parlement ira dans le sens des intentions du Conseil d'Etat.
Cela a en partie déplu à certains députés qui considéraient que ce programme ne reflétait pas exactement leur appréciation des choses ni leurs idées politiques. Le PLR souligne qu'il s'agit d'une vision, comme je l'ai signalé tout à l'heure, pour les cinq ans à venir, d'un cap à tenir avec des volontés d'action marquées dans tous les domaines d'importance pour l'instant.
C'est la raison pour laquelle notre groupe a décidé de soutenir ce programme de législature, estimant qu'il donnait ainsi un bon signal de soutien de la part du parlement envers la vision politique du Conseil d'Etat dans son ensemble pour la république de Genève ces cinq prochaines années. Je vous remercie.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de première minorité. Non, plus sérieusement... (Rires.) ...ce programme de législature n'a rien d'un programme. Comme je le mentionne dans mon rapport, il est vide de sens, il sonne creux. Très franchement, c'est la déception de la législature ! (Exclamations.)
Une voix. Oooh !
M. Stéphane Florey. Non, mais sincèrement, Monsieur le conseiller d'Etat, vous pouvez sourire, mais on était déjà très sceptiques, voire déçus, du discours de Saint-Pierre, qui, en plus, vous l'avez admis vous-même à la grande stupeur d'une partie de l'assemblée, avait été écrit par l'AI et ChatGPT... (Commentaires. Rires.) ...ce qui est déjà hautement discutable...
Des voix. L'IA !
M. Stéphane Florey. Ouais, l'IA ou l'AI, je ne sais pas ! Je ne suis pas fan de ces technologies, Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris, mais quand on vient en plus le dire devant une assemblée entière alors que le discours de Saint-Pierre constitue tout de même un événement marquant de la législature, il y a de quoi se poser un certain nombre de questions.
On était largement en droit d'attendre bien plus de ce programme de législature. Finalement, la question qui se pose, et c'est la conclusion de mon rapport, est la suivante: aujourd'hui, vaut-il encore la peine de perdre du temps avec un débat qui n'a absolument aucune portée ? En effet, on en connaît les conséquences: qu'on l'accepte ou qu'on le refuse, pfff, de toute façon, ça ne change rien ! La législature ne va pas s'arrêter pour autant, le Conseil d'Etat viendra de toute façon avec un certain nombre de propositions, et voilà.
Aussi, à quoi bon rendre un rapport, faire travailler toute une administration sur un semblant de rapport à propos d'un programme de législature qui ne veut absolument rien dire ? Très franchement, la commission soit législative, soit des droits politiques devrait se demander s'il ne faut pas plutôt réviser la loi, abandonner ce débat ridicule sur le programme de législature et renforcer le discours de Saint-Pierre, lequel devrait être un vrai discours, pas un texte rédigé par des machines... (Commentaires.) ...mais un discours qui donne réellement un signal.
Aujourd'hui, le signal est nul, il n'a absolument aucun sens, donc en définitive, nous, la première minorité, préconisons de refuser ce programme de législature et d'attendre la suite des événements, à savoir le dépôt de quelque chose d'un peu plus concret au niveau politique avec de vraies actions et de vraies propositions du Conseil d'Etat.
En ce qui concerne ce plan-ci, on est plus que soucieux, on a de grandes craintes quant à la direction dans laquelle on va aller, d'autant plus que certaines pistes déjà évoquées dans la presse n'invitent pas à instaurer cette confiance qu'on serait en droit d'attendre. Mesdames et Messieurs, je vous recommande de ne pas prendre acte du RD 1562 et de refuser la résolution 1028. Je vous remercie.
M. Sandro Pistis (MCG), rapporteur de deuxième minorité. Le groupe MCG refusera le programme de législature pour diverses raisons. Dans un premier temps, le MCG tient à préciser qu'il est en faveur d'une bonne gestion de l'Etat, mais celle-ci n'est pas possible lorsque la rétrocession excessive de 350 millions de francs par année à la France n'est pas renégociée. Il en va de même avec la péréquation intercantonale, qui est défavorable à notre canton et que nous souhaitons voir rediscutée en prenant en compte l'entier des frontaliers.
Pour nous, une bonne gestion est impossible si la politique d'engagement prioritaire des résidents genevois à l'Etat n'est pas renforcée, comme nous le demandons notamment par la création d'un préposé à la préférence cantonale. Rappelons que la France interdit, dans une large partie de son Etat, voire dans son intégralité, l'embauche de personnes étrangères à des fonctions étatiques.
En matière de politique régionale, nous devons sortir des illusions cultivées depuis trop longtemps, toujours de manière unilatérale et sans succès. Aujourd'hui, Genève est un îlot de prospérité entouré d'un pays qui va mal, la France. Ce même pays profite de façon excessive de la prospérité de notre canton. Nous pouvons dresser une très longue liste d'exemples: l'afflux abusif de frontaliers, la concurrence de sociétés établies dans des conditions douteuses, la somme excessive - plus de 350 millions par an - que Genève rétrocède à l'Ain et à la Haute-Savoie, ce qui fait plus de 3 milliards sur dix ans, l'impossibilité pour de nombreux résidents genevois de trouver un emploi, la main basse de certains travailleurs frontaliers sur les structures de formation, le taux de change qui n'est pas favorable à Genève, et j'en passe.
A la lecture du plan financier quadriennal qui est en relation avec le programme de législature, nous constatons que l'effort est exigé principalement de la fonction publique. D'autres pistes de recettes peuvent être trouvées en lieu et place de ces coupes excessives. Cette direction porte atteinte à la cohésion de la société genevoise, à laquelle le MCG est attaché. Pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG refusera ces textes.
Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, en tant que rapporteuse de commission, je vais vous expliquer comment se sont déroulés nos travaux et mettre en avant les divergences qui ont émergé. Il s'agit d'un exercice complexe, on va dire, parce qu'on était tous d'accord de ne pas être d'accord, mais pas pour les mêmes raisons.
Une voix. Ah oui ?!
Mme Marjorie de Chastonay. Voilà, donc ce sera une présentation un peu scolaire, veuillez m'en excuser, mais je trouve que parfois, c'est bien aussi quand c'est un peu scolaire. Enfin, j'exprimerai la position des Verts sur le programme de législature et sur le plan financier quadriennal.
En préambule, il faut rappeler que le plan financier quadriennal 2024-2027 est fortement lié au programme de législature: celui-ci propose une vision et des projets tandis que le PFQ prévoit le financement de ces intentions. C'est la raison pour laquelle les débats sont conjoints, mais les rapports distincts. D'ailleurs, les prises de position divergent d'un groupe parlementaire à l'autre en fonction du rapport.
Par ailleurs, il est important de préciser que le PFQ a été élaboré avec, comme point de départ, le projet de budget 2024 publié en septembre 2023. Or, nous le savons aujourd'hui, ce budget a été considérablement amendé, et c'est pour cette raison que la commission des finances a demandé un complément d'information et des ajustements: il s'agit de l'addendum qui a été reçu avec la mise à jour du PFQ. Néanmoins, il s'agit d'une mise à jour statique.
Le département des finances a présenté le PFQ en soulignant certains points de base, par exemple que la planification financière est élaborée chaque année pour les trois ans suivant le budget et que les estimations du PFQ «sont des prévisions et non des prédictions L'objectif du PFQ est de fournir une perspective à moyen terme en extrapolant les tendances, afin de s'assurer de l'équilibre des finances publiques et, si nécessaire, d'anticiper les décisions à prendre».
Le département des finances a également précisé certains éléments comme le fait que ce plan financier quadriennal respecte l'objectif annoncé dans le programme de législature concernant les dispositions sur l'équilibre budgétaire et la conformité avec les dispositions du frein au déficit.
Le PFQ est marqué par une croissance très significative des revenus de 1,5 milliard, dont près de 1,2 milliard de revenus fiscaux supplémentaires; il reste cependant soumis aux conséquences financières des importants flux migratoires tandis que les coûts sociaux sont en forte progression. Le respect du déficit maximum admissible est conditionné à la réalisation de mesures d'économie permettant d'améliorer le résultat de 229 millions.
Si l'on prend en considération les ajustements effectués suite au vote du budget 2024 par ce plénum et en partant du principe que tous les amendements ont un effet pérenne sur les années 2025-2027 du PFQ et que la planification n'est pas modifiée, il en résulte que la détérioration du résultat du PFQ est évaluée à environ 15 millions, selon le département des finances. La prise en compte du budget 2024 aurait ainsi un effet limité sur l'évolution du PFQ dès lors que les estimations fiscales y sont déjà intégrées.
Plusieurs simulations nous ont été présentées qui comprenaient l'évolution des postes. Toutefois, elles sont à considérer avec prudence, puisque les effets des amendements ne sont pas forcément pérennes. Le PFQ est donc tel que décrit, mais il faut quand même savoir que le PFQ 2025-2028 intégrera l'ensemble des modifications.
Lors des travaux, des discussions ont eu lieu sur l'évolution du résultat de fonctionnement, les charges et revenus entre 2023 et 2027, les recettes fiscales - elles augmentent -, l'évolution des charges et des postes - ils progressent aussi - et enfin les mesures structurelles proposées par le Conseil d'Etat. C'est à ce moment-là que les divergences sont apparues de manière plus claire.
Voici en vrac différentes mesures structurelles proposées par le Conseil d'Etat. J'en ai sélectionné trois, mais il y en a d'autres: la répartition des charges entre le canton et les communes, l'augmentation de la durée d'enseignement au cycle obligatoire - les fameuses deux heures supplémentaires - et le plan de gestion des absences. Il y en a d'autres, comme je viens de le dire.
Le gouvernement a également présenté des mesures qui concernent directement le personnel de l'Etat; parmi celles-ci, on peut mentionner la suspension de l'annuité tous les deux ans, donc en 2025 et en 2027, ainsi que la modification de la répartition employeur-employé pour les taux LPP. Toutes ces mesures de même que la question de la hausse des postes ont braqué une majorité de la commission des finances, laquelle vous recommande dès lors de ne pas prendre acte de ce rapport. Merci. (Remarque.) Celui sur le PFQ, bien sûr, puisque j'en suis la rapporteuse.
Passons à la position des Verts. Je vais enchaîner sur le programme de législature, que nous avons accepté, et expliquer pourquoi nous avons refusé le PFQ. Les Vertes et les Verts soutiennent le programme de législature du Conseil d'Etat, parce que nous sommes satisfaits de ses grandes orientations et espérons que ces belles intentions seront mises en oeuvre. Nous saluons les propositions intéressantes ainsi que les mesures ciblées et concrètes en faveur de la transition écologique spécifiquement. Nous voulons donner un signal fort, même s'il reste symbolique, car ce programme de législature 2023-2028 met l'accent sur cette fameuse transition écologique.
Nous sommes effectivement en attente d'améliorations sur ce point. Si le Conseil d'Etat s'engage à réduire de 60% les émissions de CO2 d'ici 2030 dans le cadre du plan climat que nous connaissons toutes et tous par coeur, notamment grâce à des mesures de rénovation et d'exemplarité, il faudra y parvenir malgré les retards pris, le manque de moyens accordés lors du vote du dernier budget et la suppression des nouveaux postes essentiels à ces projets. Il faut rappeler aussi la nécessité d'accélérer la mise en application de ces mesures.
Par ailleurs, le programme de législature a l'ambition de développer une véritable politique du handicap. Genève est très en retard en la matière, et les Vertes et les Verts espèrent que les travaux sur ces questions se concrétiseront rapidement. C'est pour toutes ces raisons que nous prendrons acte du rapport concernant le programme de législature.
Par contre, et là je poursuis avec la prise de position des Vertes et des Verts sur le plan financier quadriennal, nous sommes opposés à la prise d'acte du rapport, parce que même si nous saluons la vision de ce programme de législature, nous ne sommes pas du tout d'accord avec les mesures et les moyens financiers proposés. (Un instant s'écoule.)
Des voix. Voilà, voilà !
Mme Marjorie de Chastonay. Non, non, non ! Par exemple, le Conseil d'Etat utilise systématique le personnel de l'Etat comme variable d'ajustement avec la suppression des annuités une année sur deux. Il pourrait quand même faire preuve de plus d'imagination pour trouver des alternatives à cette solution systémique injuste et incohérente qui touche le salaire de la fonction publique.
Un autre exemple: les fameuses deux heures d'enseignement supplémentaires. C'est vraiment ignorer le métier des enseignants qui oeuvrent sur le terrain et qui font face à de nombreuses difficultés, à l'augmentation des besoins, à la hausse des violences.
Nous nous opposons à toutes ces mesures néfastes au fonctionnement de l'Etat et au maintien de la qualité des prestations, et c'est la raison pour laquelle nous ne prendrons pas acte de ce PFQ. Merci.
M. Yvan Zweifel (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, concernant d'abord le RD 1562-A, c'est-à-dire le programme de législature, pour le groupe PLR, il s'agit tout simplement de la concrétisation du discours de Saint-Pierre. On arrive enfin à des projets tangibles, on commence à visualiser ce qu'entend réaliser le Conseil d'Etat. La vision est plus claire; on peut la partager ou non - on a entendu ceux qui se sont déjà exprimés -, mais au moins, les choses s'éclaircissent.
Nous jugeons ce programme plutôt positif en ce sens que son objectif principal est de préserver et d'assurer la prospérité de Genève. Cette prospérité est d'abord économique, mais si notre canton se porte bien économiquement, il sera également prospère socialement, car on aura les moyens d'offrir des prestations de qualité à notre population et, partant, d'améliorer le bien-être commun.
Le vocabulaire employé ici est essentiel: on parle de prospérité, de fiscalité attractive, d'équilibre financier, de prestations efficaces pour la population, de mise en valeur de nos entreprises, en particulier de nos PME. Le poids des mots a de l'importance; le Conseil d'Etat a utilisé ceux-là, et cela nous semble évidemment empreint de bon sens et aller précisément dans le bon sens.
Le programme se veut aussi ambitieux, cela a été souligné, notamment en matière de transport - je pense au transport professionnel -, en matière d'infrastructures - celles de demain, celles qui forgeront notre canton pour le futur - et surtout, c'est important, en matière de formation. Une certaine gauche ne retient que l'histoire des deux heures non pas supplémentaires au total, mais d'enseignement, alors que c'est pratiqué dans d'autres cantons, mais d'autres projets sont aussi proposés par la conseillère d'Etat chargée du DIP, et on ne peut que les saluer.
Il me semble, à la lecture de ce programme de législature et pour aller dans le sens inverse du député Florey, qu'au Conseil d'Etat, l'intelligence n'est pas qu'artificielle, ce qui est plutôt positif, malgré ce que pense M. Florey.
Mais derrière cette volonté, il y a celle, affichée, du Conseil d'Etat de maîtriser les dépenses. Evidemment, le PLR ne peut qu'en être ravi, mais pour nous, il y a quelque chose d'important qui doit être dit et redit ici. Ce plan est ambitieux, mais il ne doit en aucun cas générer à la fin des hausses massives de charges ni l'engagement pléthorique de fonctionnaires. Le bon sens et l'innovation doivent être pris en compte par le Conseil d'Etat. Somme toute, je suis d'accord avec Mme de Chastonay: le gouvernement peut faire preuve d'un peu plus d'imagination; elle parlait des revenus, je pense pour ma part aux charges.
Concernant le PFQ 2024-2027, il s'agit de la traduction chiffrée du programme de législature. Sur ce point, le PLR manifeste plutôt son approbation, car des réformes structurelles sont proposées, dont certaines que nous appelons de nos voeux depuis fort longtemps. Aussi, nous nous en réjouissons.
Deux bémols, néanmoins. Le premier, je l'évoquais plus tôt, c'est que pour tout nouveau projet - qui, en soi, peut être positif -, on a l'impression que le Conseil d'Etat estime toujours que des moyens supplémentaires sont nécessaires. Alors cela peut se justifier dans certains cas, il en est d'autres où on peut penser à des réorganisations, à des simplifications ou à des compensations de charges ailleurs. Nous souhaiterions effectivement, comme l'a indiqué Mme de Chastonay - ce n'est sans doute pas exactement ce qu'elle voulait dire, mais je le reprends volontiers à mon compte -, un peu plus d'imagination de la part de l'exécutif à cet égard.
D'autre part, nous avons un problème qui se situe non pas dans la vision à court terme, puisque ce PFQ va jusqu'en 2027, mais à plus long terme. 2027 est la dernière année où on «profitera», entre guillemets, du déficit maximum admissible selon l'article 68 LGAF qui autorise, selon le plan évoqué, un déficit de 209 millions; cela signifie que dès 2028, quand le déficit devra être de zéro, il faudra prendre des mesures beaucoup plus dures. Là, quelque chose ne va pas: on aurait attendu du Conseil d'Etat que des mesures soient déjà prises pendant ces cinq ans pour se rapprocher du déficit zéro et éviter le fossé important qui s'annonce en 2028.
C'est pour ces raisons, Mesdames et Messieurs, que nous vous invitons à voter oui au programme de législature proposé, mais que le groupe PLR s'abstiendra sur le plan financier quadriennal. Nous émettons des doutes à ce sujet, mais le doute profitant à l'accusé, nous ne le refuserons pas, nous nous contenterons de nous abstenir. (Applaudissements.)
Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, sur un document aussi vaste que le programme de législature, nous pouvons évidemment relever un certain nombre de points qui nous plaisent, sur lesquels nous sommes en concordance avec le projet du Conseil d'Etat; je pense notamment à la volonté de consolidation du système de protection sociale, le fort accent mis sur la politique de la petite enfance, ce qui nous réjouit, les ambitions affichées dans le domaine de la transition écologique et numérique, la politique de soutien et d'accompagnement des personnes âgées ainsi que toutes les mesures mises en place pour une construction plus rapide du Grand Genève.
Mais ce sont là des considérations très générales; de l'aveu même du Conseil d'Etat, il s'agit de tracer les grandes lignes des projets de la législature. Le groupe socialiste considère que ces ambitions sont bien trop timorées pour répondre aux enjeux auxquels nous allons faire face au cours des prochaines années, précisément dans le cadre de cette législature: des phénomènes sociaux, sociétaux et environnementaux d'une ampleur sans précédent, en commençant par l'augmentation de la précarité, la baisse du pouvoir d'achat de la classe moyenne et des classes populaires, l'urgence climatique - et j'en passe, il y en a de nombreux autres.
Le sentiment général qui est le nôtre en lisant ce document - d'ailleurs, cela me réjouit d'une certaine manière de voir qu'avec M. Zweifel, nous avons la même lecture de ce plan, il y voit des aspects positifs, pour ma part nettement plus négatifs -, c'est le constat que le Conseil d'Etat cherche à formater l'Etat de même que les services publics délivrés par l'administration pour répondre aux besoins de l'économie avant ceux des citoyennes et des citoyens. Or, pour le groupe socialiste, la priorité doit être accordée aux besoins de la population, en particulier des classes les plus précaires.
Un autre reproche que l'on pourrait formuler à l'encontre de ce programme de législature, c'est la mise sous pression des services de l'Etat: cela passe d'abord par une détérioration des conditions de travail de la fonction publique à travers la réforme de la LPAC, puis par une volonté de compression des coûts, ce qui met le personnel sous pression. En réduisant les moyens à disposition, en diminuant les ressources humaines nécessaires pour fournir les prestations aux usagères et usagers, on finit par dégrader la qualité de celles-ci.
Et tout cela pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés ? Pour préparer le terrain à des baisses d'impôts annoncées noir sur blanc dans le cadre de ce programme de législature et auxquelles le parti socialiste s'oppose. En effet, les diminutions fiscales ne bénéficient pas du tout à celles et ceux qui auraient besoin en priorité de l'aide de l'Etat, puisque ce sont des personnes qui ne paient pas d'impôts; en revanche, elles profitent énormément aux gens qui touchent les revenus les plus confortables.
Nos craintes se voient renforcées à la lecture du plan financier quadriennal qui, de façon extrêmement claire, fait passer à la caisse la fonction publique avec, cela a été rappelé par Mme de Chastonay, une augmentation des heures de travail pour les enseignants du cycle, la suspension de l'annuité une année sur deux, la hausse des cotisations LPP pour les travailleurs de l'Etat, ce qui représente une perte nette de salaire.
Pourtant, la situation comptable - et donc financière - de notre canton est excellente, rien ne justifie de placer l'ensemble des services et des collaboratrices et collaborateurs de l'Etat sous une telle pression, comme le fait le Conseil d'Etat. C'est la raison pour laquelle nous refuserons le programme de législature ainsi que le plan financier quadriennal. Je vous remercie.
M. Laurent Seydoux (LJS). Voilà un drôle d'exercice auquel on nous invite à nous livrer: approuver le programme de législature du Conseil d'Etat, programme auquel nous n'avons pas participé et auquel nous ne pouvons apporter aucune modification. En plus, si nous le refusons, il n'y a aucune conséquence. En réalité, ce que l'on nous demande, c'est de valider le fait que le gouvernement nous a présenté un programme de législature, et à cette question, le groupe LJS répond positivement.
Maintenant, s'agit-il d'un bon programme de législature pour Libertés et Justice sociale ? Ici, notre réponse est plus mesurée. En effet, pour le groupe LJS, ce plan est organisé trop en silos, par département. Il y a des manques criants dans l'identification des problématiques actuelles, ce qui aurait pu être effectué au travers d'un diagnostic de ce qui pose problème aujourd'hui, lequel aurait pu figurer en introduction au document.
Prenons un exemple d'actualité: les crèches. Mettre en place des crèches n'est pas une finalité, ce n'est pas l'objectif ultime, mais cela peut constituer un outil pour répondre à des besoins. Le rôle des crèches est-il de prendre en charge automatiquement des enfants dont les deux parents travaillent ? Est-ce une façon de permettre aux parents d'avoir un peu de temps libre pour eux ? Ou est-ce une nécessité absolue dans le développement des enfants de moins de trois ans ? On aurait en effet identifié que les petits n'étant pas passés par les crèches rencontrent plus de difficultés à l'école ensuite. Le programme de législature ne dit rien sur les besoins auxquels les crèches sont amenées à répondre, donc impossible de déterminer par la suite si les solutions proposées améliorent la situation.
En résumé, une approche sociologique fait très clairement défaut à ce programme de législature qui est trop orienté solutions sans diagnostic préalable de ce qui cause problème. S'agissant des projections, nous pouvions attendre de meilleures propositions pour répondre aux enjeux qui seront ceux de notre canton dans les années à venir, par exemple l'évolution de l'emploi via l'employabilité, notamment des seniors, la mobilité, l'aménagement du territoire. Mais surtout, il manque une vraie vision des défis pour la région du Grand Genève et notre relation avec la Confédération de même qu'une approche globale et cohérente qui pourrait apporter de véritables améliorations face aux difficultés que nous subissons sur un territoire à la mesure de notre prospérité économique.
Malheureusement, les choses ont déjà mal commencé avec la répartition des dicastères, puisque le Conseil d'Etat a décidé de fragmenter dans quatre départements différents les relations avec nos entités voisines, que ce soit Mme la conseillère d'Etat Kast pour les communes, M. le conseiller d'Etat Maudet pour la mobilité transfrontalière, Mme la conseillère d'Etat Fontanet pour les affaires extérieures et avec la Confédération ou M. le président du Conseil d'Etat Hodgers pour les questions transfrontalières. Dans ces conditions, il semble difficile de mener une politique publique ambitieuse à l'échelle de la région.
Pour terminer, concernant le plan financier quadriennal, comme pour tout business plan dans le secteur privé, il est nécessaire pour placer un cadre financier, mais une chose est sûre, c'est qu'il ne correspondra jamais à la réalité. Cela étant, comme je l'ai indiqué en préambule, le groupe LJS ne s'opposera ni au programme de législature ni au plan financier quadriennal, qui ne nous appartiennent pas, et se pose même la question de l'utilité de cette validation. Merci.
M. Jacques Blondin (LC). Mesdames et Messieurs les députés, je tiens entre les mains le programme de législature, je pense que vous l'avez tous lu, il fait 70 pages. Dans l'introduction, il y a un commentaire intéressant que le Conseil d'Etat a fait lui-même, je vous le lis: «Gouverner, c'est tenir le gouvernail d'un vaisseau qui navigue parfois par beau temps, parfois dans des eaux tumultueuses, l'objectif étant de ne jamais perdre le cap [...]. Là est la première tâche du Conseil d'Etat: fixer les objectifs, définir les moyens d'y parvenir et mobiliser les forces vives pour les atteindre.»
L'image est bonne. Effectivement, il est facile pour nous aujourd'hui de reprendre l'entier de ce document qu'on a qualifié de liste à la Prévert - on peut l'appeler comme on veut. Le plan est complet, tout y passe, chaque département a fait la liste des objectifs. Le représentant du PLR a dit: «L'objectif est de garantir la prospérité de Genève», mais j'ajouterais pour ma part: avec les moyens qui vont de pair. Et là se pose la question de savoir quels sont les moyens qui vont de pair.
Ce programme de législature est effectivement un catalogue très ambitieux comprenant de nombreux objectifs. Si on peut discuter de ceux-ci - selon les orientations politiques, certains les envisageront d'une manière ou d'une autre -, il est tout de même important de noter que le Conseil d'Etat a accompli un travail conséquent, est allé au fond des choses. Le résultat correspond aux desiderata des différents départements tels qu'ils existent actuellement.
Pour ce qui est du Centre, il n'en demeure pas moins que nous nous attendions à une recherche de réformes globales et structurelles beaucoup plus importante que ce qui a été mentionné jusqu'à présent. Or nous n'en trouvons pas trace dans ce programme, et c'est vraiment gênant. On peut espérer que ce sera le cas prochainement, parce qu'il ne faut pas oublier - c'est mentionné dans le règlement - que ce plan peut être amendé en tout temps par le Conseil d'Etat en cours de législature, faire l'objet de corrections et d'adaptations à la situation. Bien évidemment, le PFQ qui en découle représente le moyen d'assurer que le programme de législature est financièrement supportable. Voilà l'exercice, c'est la raison pour laquelle les deux rapports sont liés.
Au niveau du PFQ, on constate, entre les charges et les revenus, une augmentation des recettes de 1,5 milliard de francs sur la période donnée. A Genève, nous avons la chance exceptionnelle d'avoir des finances résilientes et des augmentations considérables de revenus. Dans ce contexte financier extraordinaire, on peut se demander pourquoi le Conseil d'Etat n'est pas parvenu à équilibrer les budgets.
En effet, sur les quatre ans, contrairement à ce que la gauche soutient, malgré des recettes supplémentaires de 1,5 milliard, on a des budgets déficitaires à hauteur de 200 à 275 millions chaque année. Et, cela a été souligné, en 2028, une guillotine va tomber et compliquer les choses. On peut aussi se demander, Mesdames et Messieurs les députés, ce que ferait le canton de Genève si, par hypothèse, les revenus n'étaient pas à la hauteur de ce que nous attendons ces prochaines années.
Par ailleurs, il faut rappeler que les deux documents ont été réalisés peu de temps après le début de la législature; les nouveaux conseillers d'Etat ont été élus, il a fallu faire le job. Le budget 2024 a été considéré comme un budget de transition, ce que Le Centre comprend très bien compte tenu de la nouvelle composition du Conseil d'Etat.
Dès lors, nous attendons avec impatience le budget 2025, qui sera la concrétisation de toutes ces volontés, qui reflétera les intentions véritables du Conseil d'Etat, lequel ne sera plus un gouvernement de transition, je l'espère, mais bien un gouvernement de gestion. Confiant dans l'avenir et dans le travail que sera capable d'effectuer notre exécutif, Le Centre prendra acte des deux rapports qui concernent le programme de législature et le PFQ. Merci.
M. François Baertschi (MCG). Le problème de ce programme de législature n'est pas ce qu'il contient, mais ce qu'il ne contient pas. Pour le groupe MCG, le Conseil d'Etat est en total décalage avec la réalité du canton de Genève, mais surtout avec ce que vivent les citoyens. Regardons la vérité en face: aujourd'hui, Genève est un îlot de prospérité entouré d'un pays qui dysfonctionne, la France. Ce même pays vit en parasite au détriment de notre canton.
Nous pouvons dresser une longue liste de toutes les conséquences de cette triste réalité: l'afflux abusif de frontaliers, la rétrocession de 350 millions à la France, la difficulté pour de nombreux jeunes et habitants de ce canton de trouver un emploi, le nombre excessif de travailleurs frontaliers (permis G) à l'Etat de Genève, etc. Nous constatons que le déni face à cette situation aboutit à un programme de législature hors sol, qui ne répond à aucun problème important des résidents du canton de Genève.
Et quand le MCG propose des solutions, le Conseil d'Etat fait l'impossible pour les repousser, choisissant la politique du pire. Dernier exemple en date, il convient de le relever, l'initiative du MCG limitant le nombre de frontaliers à l'Etat: au lieu de laisser à la population le soin de trancher selon l'adage «in dubio pro populo» - je traduis: «dans le doute, donnons la parole au peuple» -, le gouvernement a décidé d'invalider cette initiative. Le MCG a saisi les tribunaux face à ce déni clair de démocratie porté par des arguments branlants et superficiels.
Ce qui manque à ce programme de législature, c'est le courage: courage de défendre les intérêts du canton de Genève, courage de demander une révision de la péréquation intercantonale - qui se fait au détriment de Genève et qui va plomber durablement les finances publiques du canton -, courage de prendre les mesures fondamentales qui s'imposent.
Tout cela aura des suites négatives pour la vie des Genevois. Cela apparaît très nettement dans le plan financier quadriennal, le fameux PFQ, qui, comme cela a été indiqué, est lié au programme de législature et qui prévoit des coupes, notamment de l'annuité, des coupes cruelles et dangereuses pour la fonction publique, pour la population, pour les prestations aux citoyens. Les habitants du canton de Genève devront se restreindre pour qu'on puisse faire des cadeaux à coups de centaines de millions à la France voisine et aux autres cantons suisses. C'est la politique qui reste une fois qu'on a enlevé son masque de beaux sentiments et révélé ses mauvaises intentions, hélas. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Résolument, le groupe MCG refusera ce programme de législature qui nous mène dans la mauvaise direction et qui est nocif pour notre canton et pour ses habitants, en particulier les nombreux jeunes...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. François Baertschi. Merci, Madame la présidente. ...qui sont poussés vers le chômage, qui sont exclus de la société, qui doivent quitter le canton, quitter le pays...
La présidente. Merci...
M. François Baertschi. C'est une situation dramatique que l'on prépare... (Le micro de l'orateur est coupé.)
M. Yves Nidegger (UDC). Mon préopinant, mais également le rapporteur de première minorité se sont interrogés quant au titre même de l'objet que nous avons à traiter, à savoir le programme de législature du Conseil d'Etat, se demandant s'il ne s'agissait pas quelque part d'une escroquerie intellectuelle relativement réussie, parce que s'il y a bien une législature, oui - il suffit de fragmenter le temps en période de cinq ans pour avoir une législature -, en revanche, y a-t-il réellement un programme ?
Nous nous trouvons dans une situation de nihilisme assez impressionnante; alors c'est peut-être consubstantiel à l'état de l'Occident en général aujourd'hui, et je vous recommande, Mesdames et Messieurs, puisque j'y suis, la lecture du fameux démographe et historien Emmanuel Todd, qui voit trois étapes dans les systèmes de croyances: l'étape où on y croit, celle où on a cessé d'y croire, mais où on a gardé de bonnes habitudes de l'époque où on y croyait - c'est l'état zombie - et enfin l'état zéro.
Si on devait se poser la question de l'idée de programme dans cette république, je dirais que nous sommes entrés dans l'état zombie après l'époque de Guy-Olivier Segond (2001), c'est-à-dire qu'on faisait encore semblant de croire à un certain nombre de principes de gouvernement, mais on n'y croyait plus, et que nous avons atteint l'état zéro vers 2012, suite à Mark Muller et Mme Künzler. Depuis, nous sommes dans l'état zéro, c'est-à-dire que non seulement on n'y croit plus, mais on ne fait même plus semblant d'y croire. Et on se retrouve avec des discours de Saint-Pierre qui sont une suite d'intentions où on vous dit: «Bof, si vous nous accordez des finances, peut-être qu'on pourrait faire cela; si vous ne nous en donnez pas, eh bien on ne fera rien», et on nous fait passer cela pour un programme de législature.
M. Andersen, au nom de notre groupe, parlera de l'aspect financier de la chose, je me bornerai à sa dimension philosophique. Je pense que le programme de législature projeté sur les quatre prochaines années est une plaisanterie. On a parlé de l'intelligence artificielle venant au secours d'un Conseil d'Etat qui n'a plus d'inspiration aucune, et c'est certainement symptomatique de ce sur quoi on nous demande de voter, à savoir un non-sujet, il n'y a pas de programme.
Nous allons évidemment refuser ce nihilisme programmatique. Alors on peut trouver des fulgurances à Nietzsche, mais le nihilisme, en général, c'est l'adoration de la catastrophe, c'est la vénération du faux, c'est le culte rendu à ce à quoi on ne croit pas, et c'est exactement ce qu'est le programme de législature qu'on nous présente.
La présidente. Je vous remercie. La parole va à M. Michael Andersen pour une minute.
M. Michael Andersen (UDC). Merci, Madame la présidente. Je m'exprimerai assez succinctement sur ce plan financier quadriennal 2024-2027 pour répéter la position de l'UDC en ce qui concerne le déficit. Aujourd'hui, le plan financier ne fait que parler de réduire le déficit, se cache derrière le principe d'un déficit admissible mis en place dans le cadre d'une réforme dont on ne cesse de dire qu'elle a été largement absorbée.
Et quand on ose évoquer des réformes structurelles en signalant qu'il va falloir transférer des charges sur les communes, eh bien des projets de lois sont soutenus, notamment sur la transition énergétique, où on décide d'augmenter le crédit à 500 millions et, par là même, d'inclure les communes - parce que celles-ci n'ont pas les moyens de financer leur transition énergétique. Tout cela me fait un peu rire et surtout montre l'utopie de ce plan financier quadriennal qui n'est d'ores et déjà pas respecté dans les premiers mois de la législature. Pour toutes ces raisons, l'UDC vous invite à refuser ce PFQ.
La présidente. Merci. Je donne la parole à Mme la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Merci beaucoup, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, merci pour ce moment. (Un instant s'écoule. Rires.)
Une voix. Excellent !
La présidente. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. A présent, nous procédons au vote.
Mise aux voix, la résolution 1028 est adoptée par 47 oui contre 36 non et 1 abstention (vote nominal).
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 1562.
Mis aux voix, le rapport du Conseil d'Etat RD 1563 est rejeté par 55 non contre 18 oui et 21 abstentions (vote nominal).
Le rapport du Conseil d'Etat RD 1563 est donc renvoyé à son auteur.
Débat
La présidente. Nous abordons à présent les urgences, en commençant par la R 1018-A, que nous traitons en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité de M. Jacques Béné est repris par M. Yvan Zweifel, à qui je passe la parole.
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Avant de parler du fond, il s'agit de rappeler que pendant des années, certains l'ont peut-être connu, les ouvertures d'offres étaient publiques. Par conséquent, les différents partenaires intéressés pouvaient se rendre dans une salle où toutes les enveloppes étaient ouvertes. On découvrait, au fur et à mesure, chacune des offres proposées. Evidemment, le passage à l'électronique a fait que de moins en moins de monde était intéressé, et on a modifié la pratique avec cette fois-ci un PV établi lors de chaque ouverture d'offre. Petit à petit, cela a quasiment disparu. Effectivement, certaines entités aujourd'hui ne font plus preuve de transparence du tout sur cette question.
La R 1018 «invite le Conseil d'Etat à modifier immédiatement le règlement sur la passation des marchés publics en prévoyant expressément que les membres de la commission consultative [...] qui en émettent le souhait reçoivent spontanément et directement des autorités adjudicatrices sollicitées dans ce cadre les procès-verbaux d'ouverture des offres mentionnés à l'article 38 alinéa 2 RMP». Quel est le but ? C'est d'abord de garantir la transparence, mais c'est surtout de permettre à des experts neutres, en l'occurrence ici les partenaires sociaux, qui sont représentés dans cette commission consultative, d'apporter un oeil externe utile. C'est utile d'abord pour lutter contre les offres anormalement basses.
Je crois qu'il n'est pas nécessaire - mais je vais quand même le faire - de rappeler un élément qui nous a beaucoup occupés dans ce parlement: le fameux chantier des TPG à En Chardon, pour lequel justement une offre anormalement basse avait été faite puisqu'elle était estimée à environ 7 millions, alors que le coût estimé total selon le marché était de 14 millions, c'est-à-dire le double, et que le seul coût d'achat des matériaux était lui-même déjà estimé à 7 millions; il paraissait donc invraisemblable qu'une offre de 7 millions puisse être rentable. On peut dès lors regretter que les TPG, en l'occurrence, n'aient pas écouté le message de cette commission consultative et des partenaires sociaux alors que cela a été évoqué.
L'objectif est ensuite de lutter contre le travail au noir puisque la Fédération genevoise des métiers du bâtiment, notamment, publie une liste noire des entreprises sanctionnées pour avoir des pratiques non conformes au droit. Cela permettrait justement à la FMB, faisant partie de ces partenaires sociaux, lors de ces appels d'offres, de ces ouvertures d'offre, de repérer les entreprises qui ne seraient pas conformes et d'en informer les autorités adjudicatrices.
La commission est évidemment consciente que cette modification risque d'être temporaire au vu du nouvel accord intercantonal sur les marchés publics, version 2019, qui pourrait interdire tout simplement cette pratique. Les membres de la commission de l'économie font néanmoins confiance à leurs collègues de la CACRI - c'est un message que je fais passer, comme ça vous l'enregistrez. Lorsque vous traiterez de cet AIMP version 2019, vous vérifierez si cette pratique peut néanmoins rester en vigueur.
Dans tous les cas, Mesdames et Messieurs, en attendant cela, cette modification s'avère nécessaire et utile, car c'est précisément au moment de l'ouverture de ces offres que l'on peut agir. En conséquence de quoi, la majorité de la commission - la quasi-unanimité en l'occurrence - vous invite à voter cette modification utile et nécessaire, souhaitée également par les partenaires sociaux ainsi que par les entreprises para-étatiques que nous avons reçues en commission.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le titre de cette résolution est: «Procès-verbaux d'ouverture des offres dans les procédures de passation des marchés publics: la transparence doit primer». Personne n'est contre la transparence, et encore moins contre la lutte contre la concurrence déloyale. Sur le fond, tout le monde est d'accord, mais cette proposition de résolution interpelle sur plusieurs points.
Le premier est le suivant: le règlement sur la passation des marchés publics, à son article 38, indique que les procès-verbaux d'ouverture des offres contiennent uniquement le nom des soumissionnaires, les dates de réception et les prix des offres. L'unique revendication de cette résolution ne dit strictement rien sur les exigences des travaux, la compétence, la capacité de les exécuter ni sur tout autre élément - le directeur général des SIG le relève clairement. L'office cantonal de l'inspection et des relations du travail signale les entreprises problématiques via une fiche. Toujours selon les SIG, ces informations transmises par l'OCIRT devraient éviter tout problème. Bref, le titre de la résolution évoque le fait que «la transparence doit primer», mais les informations dont il est question sont relativement insignifiantes et surtout n'apportent quasiment rien selon certains et rien pour les autres.
J'en viens au deuxième point: certains considérants de cette résolution sont douteux, voire carrément faux. L'un d'eux propose d'éviter des scandales comme le chantier TPG En Cardon... (Rires.)
Des voix. En Chardon !
M. André Pfeffer. Pour rappel, le raté de ce chantier TPG provenait du fait que les travaux estimés à 13 millions avaient été adjugés à 7 millions, et suite à une incapacité de fournir les prestations, une seconde entreprise les a exécutés pour 25 millions. Les TPG ont perdu 12 millions. Mais sur ce chantier et sur ce scandale, les TPG avaient délivré les procès-verbaux d'ouverture d'offre. Ce que demande cette résolution avait été appliqué, et malgré cela, il n'a pas été possible d'éviter ce trou de 12 millions. Le président de la FMB l'a clairement relevé. De plus, ce dernier a également précisé que les éventuelles remarques liées aux procès-verbaux d'ouverture ne sont pas contraignantes. Bref, avec ou sans procès-verbaux d'ouverture, rien ou quasi rien ne change.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. André Pfeffer. J'aborde à présent le troisième point. Nous avons d'un côté la FMB qui souhaite l'application de cette mesure et de l'autre les SIG, régie publique, qui sont pour le moins très réticents. Les SIG trouvent les informations de l'OCIRT suffisantes, ils sont sceptiques sur l'efficacité, ils relèvent l'absence de protection de données pour les entreprises, etc., etc. Aujourd'hui, les SIG ne transmettent pas les procès-verbaux, vu l'absence de base légale, alors que tout le monde, comme les TPG, semble transmettre les procès-verbaux, et cette résolution sert principalement à ce que les SIG le fassent aussi.
Quatrième point: faut-il réglementer dans un domaine où, au minimum, les SIG ne le demandent pas ? (Remarque.) Evidemment, il est question d'une mini-mesurette, d'une petite contrainte, de petites tâches et de petits frais administratifs, etc., mais est-ce que cette pratique ne crée pas des effets contraires ? Est-ce que ces informations très limitées et sans grande importance ne favoriseraient pas l'augmentation de réclamations et de contestations ? Cette question reste ouverte.
Le cinquième et dernier point que je souhaite aborder est que l'UDC est très préoccupée par la sous-enchère, par la concurrence déloyale. L'UDC avait déposé - sans succès, il faut le relever - deux ou trois textes pour contrôler sérieusement le travail au noir, les titres de séjour et les permis de travail. Genève effectue plus de contrôles que les autres cantons, mais les contrôles par les partenaires sociaux se limitent au paiement des prestations sociales. Pour améliorer la situation dans notre canton, et surtout pour diminuer la sous-enchère et la concurrence déloyale, il faudrait que Genève suive l'exemple de certains autres cantons. (Remarque. Rires.)
Le groupe UDC a toujours défendu le partenariat social, et certains membres de notre groupe sont favorables à imposer, via un changement de règlement, que les membres de la commission consultative qui le souhaitent reçoivent ces procès-verbaux d'ouverture. Par conséquent, notre groupe laisse la liberté de vote sur ce sujet... (Exclamations.) ...mais le rapporteur de minorité trouve que cette résolution n'apporte pas la réponse adaptée. Pour cette raison, je pense qu'il faudrait la refuser. Merci de votre attention. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo, André.
La présidente. Merci. Je suis navrée, Monsieur Florey, mais il n'y a plus de temps de parole pour l'UDC. (Rires. Brouhaha.) La parole est à Mme Ana Roch. Avant de lui céder le micro, je demande un peu de silence dans la salle.
Mme Ana Roch (MCG). Merci, Madame la présidente. Nous évoquons ici une pratique qui a toujours existé au sein de l'Etat, celle de dévoiler les noms des lauréats et les récompenses attribuées; une transparence qui, à notre avis, devrait être étendue aux procédures de passation des marchés publics. Cette démarche garantit bien une transparence accrue, évitant ainsi les écueils rencontrés... (Remarque. Rires.) ...lors du récent épisode lié à En Chardon. Il est impératif que les procès-verbaux d'ouverture détaillant l'ensemble des offres présentées soient rendus publics. Cette transparence totale permettrait de résoudre le problème de la sous-enchère salariale en identifiant les pratiques de sous-traitance. Cela contribuerait à accorder une importance accrue au respect des conditions salariales, un aspect fondamental de nos engagements.
La question se pose alors: ne devrions-nous pas envisager une transparence encore plus complète en transmettant les procès-verbaux à toutes les personnes qui en font la demande ? C'était possible par le passé, lorsque l'ouverture des offres était publique. Il est temps de rétablir cette pratique afin de promouvoir une gouvernance ouverte et participative. Tout le monde convient de l'importance de transmettre les procès-verbaux d'ouverture, car c'est à ce moment-là que des actions concrètes peuvent être entreprises. La commission de l'économie devrait aussi se pencher sérieusement sur le nouvel AIMP, car selon les auditions recueillies, la version 2019 de cet accord pourrait engendrer des problèmes majeurs.
Le groupe MCG reconnaît les progrès qui pourraient être effectués grâce à cette résolution, bien que nous la considérions comme insuffisante. Il est essentiel de rappeler que le MCG travaille depuis longtemps pour favoriser nos entreprises locales afin de permettre à ces dernières de gagner des marchés publics au détriment de la concurrence nationale et internationale. Nous contribuons à leur réussite par la transparence totale et un soutien continu, notamment en votant pour cette résolution. Pour ces raisons, le MCG vous enjoint d'en faire de même.
M. Pierre Eckert (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, à quoi sert la communication des procès-verbaux d'ouverture des offres en amont, à savoir lors du moment de la mise à disposition des offres ? Cela sert simplement à détecter en amont des problèmes de crédibilité d'une offre. Je rappelle que ce n'est pas en aval, suite à la décision du jury, mais en amont ! On a un exemple, l'OCBA, notre office des bâtiments, qui met systématiquement à disposition ses procès-verbaux d'ouverture. Nous avons notamment auditionné la FMB, qui formule une dizaine de remarques qui souvent sont retenues par les divers jurys qui examinent la situation en question. L'utilité d'une mise à disposition plus généralisée est donc patente - et je ne parle pas seulement du problème épineux d'En Chardon, qu'on a déjà évoqué tout à l'heure. Le «problème épineux», ça m'a été soufflé par mon collègue de droite, j'espère que vous appréciez ! (Rires.)
Une voix. Il n'est pas là pour l'entendre ! (Commentaires.)
M. Pierre Eckert. J'aimerais encore parler des SIG, qui sont mentionnés dans la résolution. Ils ne mettent pas leurs procès-verbaux à disposition, mais ils n'y sont pas opposés, comme cela ressort de leur audition. Ils ont simplement dit qu'ils ne le faisaient pas parce qu'ils n'y sont pas obligés, point d'exclamation, c'est comme ça ! Donc si on les y oblige, ils le feront, mais ils n'ont rien contre.
Enfin - on l'a déjà mentionné -, nous avons pris connaissance de l'incompatibilité possible entre cette résolution et l'AIMP 2019, que le canton de Genève n'a d'ailleurs pas encore ratifié. Nous sommes un des rares cantons à ne l'avoir pas encore fait. Par conséquent, nous recommandons vivement d'une part d'engager rapidement le processus de ratification de l'AIMP 2019, et d'autre part que la commission qui examinera cet AIMP révisé, c'est-à-dire la CACRI, analyse dans quelle mesure la mise en oeuvre cantonale pourra prendre en compte la présente résolution.
Moyennant ces considérations, nous vous engageons à accepter ce texte. Je vois que le député Florey est un peu frustré de ne pas avoir parlé. Je lui laisse volontiers le reste de mon temps de parole ! (Exclamations.)
La présidente. Je vous remercie. Je rappelle que le temps de parole n'est pas transférable entre les groupes. Je cède le micro à M. Romain de Sainte Marie.
M. Romain de Sainte Marie (S). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste sera naturellement en faveur de cette résolution, comme il l'a été au sein de la commission de l'économie. Il s'agit en effet d'apporter davantage de transparence dans les adjudications de marchés publics. Naturellement, il va falloir aller dans ce sens.
C'est vrai - cela a été soulevé -, il y a l'aspect juridique, avec notamment le fait que ce nouvel accord intercantonal, qui n'a pas encore été ratifié - M. Eckert l'a mentionné - entraînera nécessairement des révisions juridiques et une adaptation par rapport à ce texte au moment de sa ratification.
Dans cet hémicycle, tout le monde est d'accord sauf M. Pfeffer, qui est isolé comme rapporteur de minorité - on peut le saluer pour son effort ! (Rires.) Mais on peut tout de même mentionner ici l'enjeu des marchés publics et de la transparence: au-delà de celle-ci et de cet enjeu pour le Conseil d'Etat, on espère que la commission de l'économie sera aussi invitée à connaître les négociations du Conseil d'Etat sur la ratification de cet accord.
Nous soulignons l'importance d'avoir des critères d'adjudication des marchés publics qui soient, on va dire, les plus respectueux possible d'un point de vue social et environnemental ainsi que les plus durables d'un point de vue économique. On le voit aujourd'hui, ces accords, malheureusement, font toujours la part belle à la question du prix. Cet aspect ne prend pas suffisamment en considération les enjeux environnementaux et sociaux ainsi que les enjeux concernant les conditions de travail. Lorsqu'on parlait du problème épineux - comme le disait M. Eckert - du dépôt En Chardon, on voit que la question sociale des conditions de travail était particulièrement négligée dans cet aspect-là - ce qui est peut-être dû également à un manque de transparence.
Le groupe socialiste votera naturellement cette résolution, tout le monde est absolument d'accord, mais par contre, notre groupe est soucieux et particulièrement engagé pour la suite quant au développement de critères d'adjudication des marchés publics qui soient beaucoup plus durables et qui prennent en compte ces enjeux environnementaux et sociaux, qui permettent également de favoriser nos entreprises locales genevoises par rapport à des entreprises qui pourraient venir d'extrêmement loin et qui rafleraient aussi des marchés publics à Genève. Je vous remercie.
M. Jean-Marc Guinchard (LC). Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, je tiens à remercier le rapporteur de majorité, qui a repris ce rapport au débotté et qui a réussi à nous offrir une synthèse tout à fait remarquable et absolument claire, à laquelle je ne peux qu'adhérer totalement.
En revanche, je suis un peu déçu - et c'est peu dire - du rapporteur et du rapport de minorité; j'ai de la peine à admettre le mépris qu'il semble afficher, par exemple, pour les membres de la commission consultative, qui sont issus de services spécialisés, qui connaissent le domaine de la construction et qui sont parfaitement capables d'émettre des critiques lorsqu'ils voient un soumissionnaire proposer des prix de 50% inférieurs au reste. De ce côté-là, nous partageons donc le souci de transparence, raison pour laquelle notre groupe soutiendra et votera cette résolution.
Je tiens aussi à rassurer les orateurs qui se sont exprimés à ce sujet. Le président de la CACRI tiendra compte des remarques qui ont été faites, et avant de se prononcer et d'adhérer au partenariat de l'AIMP 2019, la CACRI va bien entendu quérir l'avis de la commission de l'économie. Je vous remercie.
La présidente. Merci. La parole est à M. Adrien Genecand pour deux minutes cinquante.
M. Adrien Genecand (PLR). Merci, Madame la présidente. Je n'aurai a priori pas besoin d'autant de temps. Je remercie le rapporteur de majorité - et manifestement aussi le reste de ce plénum, dont j'ai l'impression que ce texte consensuel et modeste va remporter l'assentiment. Je souhaite parler de l'UDC qui n'a pas pu s'exprimer en dehors du rapporteur de minorité, pour dire que, connaissant relativement bien l'UDC, je ne conçois toujours pas qu'étant eux-mêmes un peu soucieux de cette question de transparence, notamment pour défendre les entreprises locales genevoises et suisses contre une concurrence venant de l'étranger, qui serait déloyale, ils n'aient pas pu faire entendre raison à leur collègue. Je pense m'exprimer au nom d'une forme de minorité - ou majorité ! - de l'UDC, qui n'a pas pu s'exprimer, mais pense comme nous. (Rires.)
M. Vincent Canonica (LJS). Vous ne serez pas surpris, le groupe LJS soutient cette résolution, même si elle ne résout pas tous les problèmes, comme cela a déjà été évoqué. Elle contribue néanmoins à éviter des erreurs de casting dans le choix des adjudicataires. Une plus grande transparence dès l'ouverture des offres de candidature est le préalable minimum pour un traitement méticuleux des offres proposées. Effectivement, cette communication du prix des offres soumises peut lancer une alerte en cas d'écart très important d'une offre à l'autre.
Ce qui est également cher à LJS, c'est de lutter contre le dumping salarial et en faveur des entreprises locales, qui sont confrontées à une concurrence parfois déloyale des grands groupes internationaux, ce contre quoi nous luttons activement - combat que nous souhaitons poursuivre lors des prochains travaux, qui iront encore plus loin en ce qui concerne les marchés publics. Je vous remercie, Madame la présidente.
La présidente. Merci. Je passe la parole au rapporteur de majorité pour un peu moins de deux minutes.
M. Yvan Zweifel (PLR), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Je ne voudrais pas rallonger les débats, mais pour être le plus clair possible et peut-être rassurer M. Pfeffer, je répète ici que les partenaires sociaux que nous avons reçus, tant la CGAS que la FMB, trouvent cette proposition utile et positive. Pour revenir à l'exemple d'En Chardon, M. Pfeffer a raison de dire qu'à la fin, il y a bien eu un problème, mais il n'en demeure pas moins que c'est précisément parce que les partenaires sociaux ont, ici... (L'orateur insiste sur le mot «ici».) ...vu le problème qu'ils ont alerté les TPG. A l'époque, ces derniers n'ont rien voulu savoir, mais le problème avait bien été détecté. Or, si cette possibilité n'avait pas existé, on ne l'aurait même pas vu et la conséquence aurait pu être pire. Donc oui, ça a bien un intérêt !
Enfin, et par rapport aux SIG, j'aimerais citer le rapport de majorité à la page 17: «M. Brunier indique que l'avis de droit a été demandé afin de prouver qu'il n'existait pas d'obligation de transmettre ces procès-verbaux. Les SIG n'ont aucun problème à ce que le règlement soit modifié [...]» Il y a donc unanimité sur cette question, et j'invite M. Pfeffer et tous les autres qui penseraient comme lui à rejoindre l'immense majorité et à voter cette résolution.
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous ai compris ! (Rires.) Le Conseil d'Etat accepte cette résolution ! (Exclamations. Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Nous passons au vote.
Mise aux voix, la résolution 1018 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 73 oui contre 1 non (vote nominal). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Premier débat
La présidente. Nous continuons avec l'urgence suivante, à savoir le PL 13396-A, qui est classé en catégorie II, trente minutes. Je donne la parole à M. Esteban, rapporteur de majorité.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de majorité. Merci, Madame la présidente. Comme vous l'aurez peut-être constaté à la lecture du rapport, ce projet de loi n'est que le dernier d'une longue liste d'éléments qui jalonnent le parcours du premier exercice de ce bureau de médiation administrative (BMA), dont les membres ont été nommés pour la première fois au début de la dernière législature et dont le renouvellement a été retardé afin de traiter les éléments qui nous parvenaient non seulement de la commission législative mais également de la commission de contrôle de gestion... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)
La présidente. Attendez, excusez-moi. Je sais, c'est compliqué: comme d'habitude, on procède à un vote et après il faut passer au point suivant - c'est compliqué. Ceux qui veulent en discuter peuvent sans autre sortir, et ça vaut aussi pour le dernier rang ! Je sais qu'on ne se sent pas concerné quand on est au dernier rang, mais si ! Monsieur Nicolet-dit-Félix, vous êtes concerné. Monsieur Genecand ! Je continue la liste ? (Rires. Commentaires.) OK ! Nous allons traiter ce point et quand nous l'aurons fini, nous rentrerons chez nous ! (Exclamation de joie.) Ça peut prendre plus ou moins de temps; ce qui est sûr, c'est que nous allons le traiter. (Brouhaha. Un instant s'écoule.)
M. Diego Esteban. Merci, Madame la présidente.
La présidente. Non, je ne vous ai pas encore redonné la parole. (Rires.)
M. Diego Esteban. Pardon.
La présidente. Excusez-moi, mais il n'y a de loin pas le silence ! Je ne sais pas où il y a un malentendu, mais il n'y a pas le silence ! Monsieur Curaçao !
Des voix. Carasso ! (Rires.)
La présidente. Carasso, excusez-moi ! (Commentaires. Rires.) OK ! On va y arriver.
M. Sylvain Thévoz. C'est Carasso !
La présidente. Carasso, effectivement. Eh bien, Monsieur Thévoz, ça tombe bien: vous n'êtes pas à la bonne place ! Vous vous êtes perdu, là. (Rires. Commentaires.)
Une voix. Il a changé de parti !
La présidente. Je disais à M. Thévoz qu'il n'est pas à la bonne place !
M. Sylvain Thévoz. Moi, je ne parle pas !
La présidente. Si vous ne parlez pas, c'est très bien, mais quand on se déplace vers un autre groupe, ce n'est en général pas pour y être silencieux ! (Exclamations.) Est-ce qu'on peut poursuivre le débat ?! Très bien, Monsieur Esteban, vous avez la parole.
M. Diego Esteban. Merci, Madame la présidente - et merci à mes collègues de parti de me laisser continuer à parler ! Je disais donc que le renouvellement a été retardé afin de traiter les éléments qui nous parvenaient non seulement de la commission législative mais également de la commission de contrôle de gestion, ainsi que les conclusions de la Cour des comptes, qui a rendu un rapport attendu sur le sujet au début de l'été dernier. En parallèle, la commission législative avait refusé l'entrée en matière sur un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat (le PL 13097), faisant courir le risque d'un nouveau processus de désignation se déroulant selon les mêmes règles que cinq ans auparavant, ce qui, pour une partie des membres de la commission législative, était une perspective guère réjouissante. D'où le dépôt d'un projet de loi dont j'étais le premier signataire (le PL 13198), qui proposait justement de mettre sur la table des mesures urgentes afin que le renouvellement se déroule dans une plus grande quiétude que cinq ans plus tôt - un processus relativement chaotique, dans lequel la commission législative, un organe politique, a tenu un rôle de RH en examinant à neuf l'entier des dossiers de candidature pour les postes de titulaire et de suppléant du bureau de médiation administrative; cela ne s'est guère révélé idéal pour un certain nombre de raisons qui sont bien sûr détaillées dans le rapport.
Le PL 13396, que nous examinons, a été déposé par le Conseil d'Etat, se nourrissant des discussions abondantes devant la commission. Il permet a minima de répondre aux craintes de la commission législative sur le mécanisme de désignation et applique en partie - je dis bien en partie - les recommandations de la commission de contrôle de gestion et celles de la Cour des comptes, tout en ne fermant bien sûr pas la porte à un travail subséquent qui, s'il est évidemment nécessaire, est moins urgent que la désignation, déjà plusieurs fois reportée.
La pierre d'achoppement de ce débat, c'est bien entendu la question du remplacement du titulaire et s'il doit se faire à travers une suppléance, comme aujourd'hui, une délégation de tâches au personnel ou - c'est la troisième voie - un poste d'adjoint. Un vote indicatif devant la commission a donné un résultat relativement peu concluant, avec trois voix favorables, une voix défavorable et cinq abstentions. Au final, la majorité que je représente préfère opter pour la sécurité, à savoir un projet de loi qui se cantonne aux éléments les plus directement pertinents pour le processus de renouvellement, en ne fermant bien entendu pas la porte à un débat ultérieur sur le poste d'adjoint. Pour toutes ces raisons, je vous invite à accepter l'entrée en matière ainsi que le projet de loi tel que sorti de commission.
Mme Laura Mach (Ve), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs, chers collègues, je vais refaire un tout petit peu l'historique, parce que tout le monde ne se représente peut-être pas correctement ce sujet. Pour revenir donc en arrière: l'article 115 de la constitution a mené à la loi sur la médiation administrative (LMéd-GE) adoptée en avril 2015. S'agissant de la genèse de cette loi - on l'apprend en lisant les différents rapports sur ce sujet, je m'y suis longuement plongée -, la première proposition faite par le Conseil d'Etat prévoyait que le bureau de médiation soit constitué d'un médiateur, d'un adjoint et d'un juriste pour un budget total de 760 000 francs.
Le budget ayant cependant été jugé trop élevé, le Conseil d'Etat a déposé un second projet de loi pour que la fonction de médiateur soit assumée par les préposés à la protection des données - je le rappelle, ils fonctionnent en binôme, avec un préposé titulaire et un adjoint -, pour un coût de 270 000 francs.
Cette proposition a elle aussi été refusée par la commission de l'époque, qui a décidé alors que le bureau de médiation ne comporterait pas d'adjoint mais un suppléant payé à l'heure, n'intervenant qu'en cas d'empêchement du médiateur titulaire. Dans ma compréhension des choses, l'empêchement est ici entendu comme une situation dans laquelle le médiateur ne pourrait pas se montrer totalement impartial et qui devrait par conséquent être traitée par quelqu'un d'autre ayant les mêmes compétences que lui. On a donc voté en 2015 une loi qui considère que travailler seul ou travailler avec un adjoint revient finalement au même, tout en faisant des économies.
Eh bien, le temps nous a montré combien on s'est trompé ! Le rapport du BMA a en effet été refusé, car le travail effectué ne correspondait pas à ce qui est demandé dans la loi, notamment à l'article 10, alinéa 6, qui précise qu'en plus du travail de médiation habituel, on attend du médiateur ou de la médiatrice «des recommandations à l'attention de l'administration». C'est d'ailleurs cette particularité qui semble justifier sa classe salariale, proche de celle du préposé à la protection des données, qui cependant travaille avec un adjoint.
Afin de comprendre pourquoi il s'est avéré impossible, pour le bureau, de fournir le travail demandé, celui-ci a fait l'objet de multiples travaux: il y a eu la commission législative, puis la commission de contrôle de gestion, puis un rapport de la Cour des comptes, pour enfin revenir à la commission législative. A travers ce périple riche en production de divers rapports, on apprend que le médiateur n'a en effet émis aucune recommandation mais a surtout écouté, informé et aiguillé nos concitoyens dans leurs demandes, sans grande interaction avec l'administration.
Le médiateur explique à la commission de contrôle de gestion que le problème est dû au fait que le poste de suppléant n'est pas une ressource fixe, alors que cette fonction, au vu des besoins, devrait être celle d'une médiatrice adjointe à mi-temps. Il précise que ce système de suppléance est le seul à exister sous cette forme et que les structures comparables, notamment chez nos voisins vaudois...
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
Mme Laura Mach. ...ont plutôt tendance à avoir un adjoint ou une adjointe. A la commission législative, le médiateur explique encore que pour émettre des recommandations, il a besoin de confronter ses idées, d'enrichir son point de vue. Or, le poste de suppléant ne permet pas ce travail d'échange puisque le suppléant n'intervient qu'en cas d'empêchement sur un dossier. Lors d'une de ses auditions, la médiatrice suppléante a elle-même proposé de travailler de façon fixe à 20% ou 30% afin de permettre cette continuité dans les échanges, mais la définition du poste ne le permettait pas.
Je vais aller un petit peu plus vite. Il était donc important de supprimer le poste de suppléant tel qu'il a été conçu dans cette loi datant de 2015. Cela a été fait par la commission législative - c'est important. Ensuite, eh bien rien: on s'est arrêté là ! En effet, voyant l'échéance de la nouvelle nomination arriver, la commission législative s'est un peu précipitée dans son travail et a omis de répondre à la demande principale: permettre au bureau de médiation de produire un rapport acceptable l'année suivante, en faisant que ses activités correspondent à ce qui est stipulé dans la loi et justifient la classe salariale accordée au médiateur. Or, je le répète - et cela ressort de l'audition du médiateur mais aussi des rapports de la Cour des comptes et de la commission de contrôle de gestion -, ce travail nécessite une collégialité interne, un échange de responsabilités comme on peut les retrouver dans la collaboration entre notre préposé à la protection des données et son adjoint.
Bon, je crois que j'ai... Je ne vais pas prendre trop trop de temps. On a avancé qu'il n'est pas possible d'introduire un adjoint parce que ça ferait exploser le budget. Alors là, je vous réponds que c'est faisable parce qu'il faut prendre en considération le fait que les cadres d'aujourd'hui sont friands de temps partiel, surtout quand leur salaire est confortable, et le médiateur a lui-même proposé de baisser son temps de travail à 80% voire à 70%. Le deuxième argument de la commission était qu'il y aurait risque de conflit entre deux personnes; on ne peut que citer en exemple le bon fonctionnement de l'équipe du préposé à la protection des données, qui donne entière satisfaction à ce sujet.
Ainsi, Mesdames et Messieurs, nous vous proposons de prendre le temps, dans cette assemblée, de terminer le travail autour de ce projet de loi afin de ne pas nous retrouver avec un nouveau dysfonctionnement lors du prochain mandat. Nous vous proposons donc d'accepter les amendements: ils permettront d'engager un médiateur ou une médiatrice et son adjoint ou son adjointe tous deux à temps partiel afin de garantir un budget constant. Le Conseil d'Etat déciderait s'il est question que l'un travaille par exemple à 80% et l'autre à 20%, tout en gardant la possibilité de compléter son salaire par une activité annexe. Ce système permettra au BMA d'émettre des recommandations à notre administration, de fonctionner collégialement comme le recommandent la Cour des comptes et la commission de contrôle de gestion, d'assurer un remplacement mutuel entre les deux médiateurs et de façon immédiatement opérationnelle, et de respecter le budget imparti. Merci. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de deuxième minorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je pense que la seconde minorité rejoint en grande partie les propos tenus par la rapporteuse de première minorité et je me contenterai de résumer dans les grandes lignes les raisons qui nous poussent à refuser le rapport de majorité.
Ce projet de loi vise essentiellement à modifier le mode de désignation du médiateur ou de la médiatrice, en réaction effectivement au processus de nomination en vigueur lors de la précédente législature. Cette modification est certes nécessaire, mais elle n'est pas suffisante. Le fonctionnement du BMA a été mis en cause par la commission de contrôle de gestion et la Cour des comptes. Il faut donc absolument traiter de l'organisation du bureau avant d'en définir le mode de nomination: il ne faut pas faire les choses à l'envers.
Le projet de loi qui vous est soumis règle certes ce processus de désignation, mais il prévoit également que des fonctionnaires puissent mener l'entier des médiations, sous la supervision d'un médiateur ou d'une médiatrice. Or il s'agit d'une question fondamentale qui touche au fonctionnement de ce bureau, mais n'a pas été traitée et discutée de façon suffisamment approfondie en commission. Il faudrait donc substituer le poste de suppléant ou de suppléante par celui d'adjoint ou d'adjointe, à l'instar de ce qui est en vigueur - ma préopinante rapporteuse de première minorité l'a dit - dans le cas du préposé à la protection des données.
Il a effectivement été relevé, lors des auditions, qu'il est nécessaire qu'un adjoint ou un collaborateur soit présent de manière fixe et pas uniquement en cas d'empêchement du titulaire. La moindre organisation a besoin de plus d'une personne pour fonctionner. Il est nécessaire, pour la médiation administrative, d'opérer de manière collégiale et pluridisciplinaire. La célérité ne doit pas s'imposer au mépris de la qualité. Pour ces motifs, le projet de loi ne doit pas être adopté tel quel, car le fonctionnement du BMA, mis en cause, n'est pas rendu plus optimal - au contraire.
Je vous invite donc à soutenir les amendements que nous avons déposés: ils visent à corriger le dysfonctionnement constaté. Le premier prévoit la désignation d'une adjointe ou d'un adjoint, ce qui permettra non seulement de régler la question de l'absence du médiateur, mais également de renforcer l'efficience et l'efficacité du bureau grâce à un fonctionnement collégial et pluridisciplinaire.
La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. Vincent Canonica. Merci. En deuxième lieu, la possibilité d'une activité à temps partiel offre aux titulaires de ces fonctions l'avantage de couvrir plus de domaines d'expertise, ce qui est un gage de compétence, sans coûts supplémentaires.
En troisième lieu, nous proposons un amendement qui prévoit, dans les dispositions transitoires, une clause stipulant que le budget alloué pour l'année 2024 ne peut pas être dépassé, afin de contenir les coûts de fonctionnement de ce bureau. Le but du bureau de médiation est quand même de réduire le nombre de conflits judiciarisés et, partant, les coûts des procédures judiciaires devront baisser. Il serait donc possible de ne pas pénaliser le budget de fonctionnement en prévoyant une réallocation des ressources - l'aspect relatif au budget 2024 pourrait être revu dans un deuxième temps, mais il était important pour les commissaires de ne pas toucher au budget de fonctionnement.
Avec cet équilibre et un fonctionnement tel que celui qui est proposé, j'espère que l'on pourra répondre au souci de gestion des coûts, tout en permettant un fonctionnement optimal du bureau de médiation, ce qui n'est pas le cas avec le projet de loi actuel. Je vous remercie, Madame la présidente.
La présidente. Je vous remercie. Il n'y a plus de temps de parole pour les Verts. La parole est à M. Murat-Julian Alder.
M. Murat-Julian Alder (PLR). Je vous remercie, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut simplement se référer à la page 11 du projet de loi déposé par le Conseil d'Etat pour bien comprendre l'enjeu du texte dont nous sommes saisis. Tout d'abord, il s'agit de clarifier la posture du BMA par rapport à la médiation en général. Il est aussi question de l'organisation du bureau, avec la suppression de la suppléance et l'instauration d'un système de délégation à du personnel, en ayant pour objectif de rester dans le cadre de la même enveloppe budgétaire; de la modification du processus de recrutement des candidats au poste de médiateur; et de l'exigence que la formation certifiée en médiation généraliste soit reconnue par la Fédération suisse médiation (FSM). C'est de cela que nous parlons.
Le débat ne porte pas sur la problématique d'un hypothétique adjoint, dont le Grand Conseil ne voulait pas lors de la législature 2013-2018, lorsque nous avons été chargés de mettre en oeuvre notre nouvelle charte fondamentale. Et il ne s'agit toujours pas aujourd'hui, avec ce projet de loi - qui a été déposé, faut-il le rappeler, par le Conseil d'Etat - de créer un poste d'adjoint, mais de supprimer le poste de suppléant, qui n'a pas donné satisfaction lors de la législature 2018-2023 qui s'est achevée il y a bientôt une année.
Dans ces circonstances, indépendamment du fait de savoir si on est pour ou contre un adjoint, ce qui vous est demandé aujourd'hui, ce n'est pas si vous voulez fromage et dessert - parce qu'on ne peut pas avoir les deux. La question qui vous est posée, c'est: est-ce que vous voulez le fromage ou le dessert ? Et rien ne vous empêchera, si vous prenez le fromage, de solliciter le dessert dans une phase ultérieure.
Plutôt que d'aller dans le sens des deux rapports de minorité, respectivement des amendements déposés - que je n'entends pas combattre ici sur le fond -, je pense qu'il faut mesurer l'urgence d'une modification de la structure actuelle pour ensuite, dans une phase ultérieure, aborder la question d'un éventuel poste d'adjoint. Et je rappelle que cette question a été à peine évoquée: elle a été simplement survolée dans le cadre des travaux; ce n'était pas l'objet principal de nos travaux. (La présidente agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
C'est aussi pour éviter un renvoi inutile en commission que je demande au Grand Conseil, au nom du PLR, de bien vouloir approuver le projet de loi tel qu'il est sorti des travaux de commission, tel qu'il a été défendu par le rapporteur de majorité, qui a lui-même retiré un projet de loi sur cette même question. C'est finalement la paix des braves...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Murat-Julian Alder. ...qui vous est proposée aujourd'hui. Ce serait dommage de rouvrir un front inutilement, de perdre du temps et de retarder les réformes indispensables que cette instance de médiation administrative doit mettre en oeuvre au plus vite. Merci beaucoup de votre attention.
Mme Alia Chaker Mangeat (LC). Merci à M. Alder d'avoir si bien résumé les enjeux liés à ce projet de loi. Vous l'avez compris, la plupart des points relatifs aux enjeux principaux ont été adoptés quasi à l'unanimité en commission. La pierre d'achoppement qui perdure, c'est la question du médiateur adjoint, la minorité considérant que la loi actuelle ne permettrait pas au bureau de fonctionner. Ce qui est complètement faux, parce que la loi actuelle - et le projet de loi également - permet au médiateur d'engager le personnel du bureau, le personnel nécessaire. Il y a donc déjà une disposition dans la loi qui permet ces engagements. Il y a en outre une disposition relative à la délégation des tâches: le médiateur ou la médiatrice peut déléguer des tâches à plusieurs membres de son personnel - et le projet de loi le permet aussi. Ce n'est donc pas que le titulaire est isolé: simplement, la minorité veut que l'adjoint soit nommé par le Grand Conseil et ait une fonction équivalente.
Je vous rappelle que le médiateur titulaire est aujourd'hui en classe 31 de l'échelle des traitements. Ça équivaut au minimum à 177 000 francs par an, au maximum à 240 000 francs. Et on nous dit maintenant qu'on veut se référer au système vaudois; eh bien dans le système vaudois, Mesdames et Messieurs, il y a un médiateur titulaire et c'est lui qui engage, s'il en a besoin, des adjoints. S'agissant des adjoints, c'est amusant, il y a justement une annonce en ce moment dans le canton de Vaud: l'adjoint y est en classe 13. Et la classe 13, c'est minimum 107 000 francs et maximum 155 000 francs. Vous voyez que la différence est de près de 100 000 francs ! Je veux bien que le niveau de vie soit bien plus bas au-delà de la Versoix, mais, franchement, je ne pensais pas à ce point ! Je suis donc assez étonnée.
Pour ces motifs, nous pensons aussi... La question n'est pas uniquement budgétaire. Bien sûr, la question budgétaire doit être prise en considération, mais nous pensons que le bureau ne peut fonctionner qu'avec une équipe constituée et engagée par le médiateur lui-même, si on part du principe qu'on va lui allouer un budget plus important. Mais ça, ça doit venir dans un second temps. Pour l'instant, nous vous invitons donc à adopter ce projet de loi tel qu'il est sorti de commission, car il répond, franchement, aux principales critiques s'agissant du fonctionnement formulées par la Cour des comptes et à celles émises lors de la dernière législature. Je vous remercie.
M. Cyril Mizrahi (S). Mesdames et Messieurs, chers collègues, je voudrais tout d'abord dire, au nom du groupe socialiste, que nous avons toujours soutenu ce bureau de médiation administrative. Nous l'avons non seulement soutenu dans son principe, mais nous l'avons également soutenu dans son travail concret, qui a fait l'objet d'attaques selon nous injustifiées. La réforme qui vous est soumise aujourd'hui porte sur deux choses essentielles: d'une part la suppression de la suppléance, qui n'a pas donné satisfaction au niveau institutionnel - cette suppléance n'a tout simplement pas fonctionné, pour des raisons qui ont été bien expliquées et sur lesquelles je ne reviens pas. Le deuxième élément, c'est la réforme du système d'élection; il y a donc urgence à voter cela aujourd'hui. Pour le groupe socialiste, c'est l'enjeu essentiel.
Quant aux amendements, qui concernent le médiateur adjoint ou la médiatrice adjointe, nous pouvons nous y rallier moyennant des amendements mineurs qui vous seront distribués. Mais nous voterons le projet de loi, que ces amendements soient acceptés ou non. Nous préférerions effectivement un poste d'adjoint, mais nous pensons qu'il pourrait également être introduit dans un deuxième temps.
S'agissant de ce qu'a dit Mme Chaker Mangeat sur la rémunération, celle-ci n'est de toute façon pas fixée dans la loi: c'est de la compétence du Conseil d'Etat, et il y a un consensus large - au niveau politique mais aussi, je crois, du point de vue du médiateur - pour dire que la rémunération en classe 27 serait également satisfaisante. Il ne faut donc pas prendre prétexte de cela pour dire qu'on ne pourrait pas introduire de médiateur ou médiatrice adjoint. Ces amendements nous semblent jouables moyennant quelques adaptations mineures, mais l'essentiel est de voter le projet de loi - avec ou sans les amendements. Je vous remercie.
M. Amar Madani (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi déposé par le Conseil d'Etat et qui vise à modifier la loi sur la médiation administrative, en lien avec le mode de nomination et les prérogatives de la médiatrice ou du médiateur, part d'un constat - constat qui a été bien expliqué par mes préopinants, M. Alder et Mme Chaker Mangeat. Cette modification concerne la suppression de la suppléance et l'amélioration du mode d'élection; cela va conduire à plus d'efficacité dans le fonctionnement du bureau de médiation administrative, ce qui ressort des auditions. La commission a estimé dans son ensemble que la suppléance n'est pas pertinente d'un point de vue purement légal, mais aussi en matière de fonctionnement. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, le MCG soutiendra le projet de loi tel que sorti de commission et vous invite à faire de même. Quant aux amendements, il incombe au médiateur titulaire de choisir son adjoint et d'organiser le bureau pour parvenir à un bon fonctionnement. Merci pour votre attention.
La présidente. Je vous remercie. Je passe maintenant la parole aux rapporteurs. Monsieur Canonica, il vous reste une minute vingt.
M. Vincent Canonica (LJS), rapporteur de deuxième minorité. Je serai très bref, Madame la présidente. Il est fort dommage que le rapport de la Cour des comptes n'ait pas été complètement lu par l'ensemble de la salle, parce que, réellement, le fonctionnement était mis en cause. Il relevait que le fonctionnement du bureau de médiation n'était pas du tout optimal. Ne régler aujourd'hui que la question de l'élection est donc un mauvais choix et conduira à un dysfonctionnement du BMA; voter cette loi, c'est voter en faveur d'un dysfonctionnement du bureau de médiation, ce que je ne peux évidemment pas recommander.
La présidente. Je vous remercie. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole pour quarante secondes.
M. Diego Esteban (S), rapporteur de majorité. Merci. Une petite divergence avec le rapporteur de seconde minorité: la dynamique aujourd'hui dysfonctionnelle entre le titulaire et la suppléance disparaîtrait avec le vote de ce soir. Cela constitue donc déjà un pas en avant par rapport à ce que relève la Cour des comptes. Il faut rappeler que la Cour des comptes s'adressait davantage au législateur qu'au bureau de médiation administrative, dont elle disait qu'il «coordonne de manière satisfaisante ses activités et gère de manière rigoureuse le suivi de ses dossiers». Concernant les amendements, la majorité ne les suivra pas pour les diverses raisons énoncées ce soir, qu'il s'agisse...
La présidente. Il vous faut conclure.
M. Diego Esteban. ...du coût que ça représente ou du fait que ça risque de mettre en péril l'essentiel de ce projet de loi, qui concerne les règles de désignation.
M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, merci à la commission pour ses travaux. Je crois que même si on achoppe sur un point, l'essentiel est posé et le Conseil d'Etat se rallie pleinement au rapport de majorité. Maintenant, il reste la question - elle relève peu de l'opérationnel, il faut le dire - du poste d'adjoint, qu'on inscrirait dans la loi. Le modèle qui nous est proposé par les amendements, il convient de le souligner, Mesdames et Messieurs les députés, n'est pas un modèle usuel pour un adjoint, parce qu'en lui donnant la légitimité de la prestation de serment devant le Grand Conseil, on va plutôt créer un tandem ! Et c'est bien cette notion de tandem qui, en partie, a provoqué les dysfonctionnements passés. Je crois qu'il faut souligner que, d'une manière générale, c'est pareil dans l'administration: on nomme des chefs de service et des chefs d'office qui parfois, selon la taille du service, nomment eux-mêmes des adjoints ou délèguent certaines tâches à des personnes qu'ils ont eux-mêmes recrutées. Et cet équilibre ne serait pas atteint par le biais d'un amendement qui ne prévoit pas un simple adjoint mais un adjoint qui prête serment devant le Grand Conseil, ce qui lui donne une légitimité identique à celle du titulaire.
Si là-dessus on rajoute le critère du temps partiel pour maîtriser le budget, défendu par les rapports de minorité, on aurait deux personnes à 60% ! Qui ne se verraient dès lors, par définition, qu'une fois par semaine ! En matière de management et de cohésion de l'action de ces deux personnes, on peut donc s'interroger. Enfin, et la députée Chaker Mangeat l'a dit, le texte qui vous est proposé n'empêche pas le médiateur ou la médiatrice de déléguer des tâches à ses collaborateurs ou collaboratrices - à part évidemment les recommandations, qui doivent être validées: cela correspond à la délégation usuelle d'un certain nombre d'activités au sein d'une équipe, d'une petite équipe.
Le Conseil d'Etat s'en tient donc à la solution trouvée par la majorité; cela ne ferme pas le débat, s'agissant des enjeux qui ont été soulevés. Nous aurons l'occasion d'y revenir, mais nous avons besoin que cette loi soit votée ce soir pour aller de l'avant. Nous vous remercions de suivre le rapport de majorité.
La présidente. Je vous remercie. Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à vous prononcer sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 13396 est adopté en premier débat par 88 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
La présidente. Nous passons au deuxième débat. De nombreux amendements ont été déposés, je vous prie donc d'être attentifs.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. A l'article 4, nous avons un amendement dans le rapport de première minorité et un autre que vous avez reçu dans vos messageries. Nous commençons par l'amendement de la première minorité, qui figure dans le rapport de Mme Mach: s'il est accepté, il fait tomber l'autre amendement; s'il est refusé, nous voterons sur l'amendement suivant. (Remarque.) Je n'ai pas entendu. (Remarque.) Vous voulez que je lise l'amendement ? Il figure dans le rapport, mais le voici:
«Art. 4 (nouvelle teneur)
Le bureau se compose d'une médiatrice administrative titulaire ou d'un médiateur administratif titulaire (ci-après: médiatrice ou médiateur), d'une médiatrice administrative adjointe ou d'un médiateur administratif adjoint (ci-après: adjointe ou adjoint), ainsi que du personnel nécessaire à son fonctionnement.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 37 oui et 1 abstention. (Commentaires pendant la procédure de vote. Rires.)
La présidente. Nous allons donc voter sur l'amendement de la seconde minorité, déposé par M. Canonica, qui dit ceci:
«Art. 4 (nouvelle teneur)
Le bureau se compose d'une médiatrice administrative ou d'un médiateur administratif titulaire (ci-après: médiatrice ou médiateur), d'une médiatrice adjointe ou d'un médiateur adjoint (ci-après: adjointe ou adjoint), ainsi que du personnel nécessaire à son fonctionnement.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 38 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 4 (nouvelle teneur) est adopté.
La présidente. J'ai maintenant une question pour les rapporteurs de minorité: vu que le principe de l'adjoint a été refusé, est-ce que vous voulez maintenir vos autres amendements ? Madame Mach ?
Mme Laura Mach (Ve), rapporteuse de première minorité. Non, puisque...
La présidente. Vous retirez vos amendements ?
Mme Laura Mach. Je les retire puisque le principe de l'adjoint a été refusé.
La présidente. Merci. Monsieur Canonica ? (Remarque.) Très bien, je vous remercie, les autres amendements ne seront donc pas traités.
Mis aux voix, l'art. 5, al. 1 et 3 (nouvelle teneur), al. 5 (nouveau), est adopté, de même que les art. 6, lettre d (nouvelle teneur), à 21, al. 2 à 4 (nouveaux).
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que les art. 2 et 3 (soulignés).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13396 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 75 oui contre 3 non et 10 abstentions (vote nominal).
La présidente. Nous nous arrêtons là pour aujourd'hui; nous reprendrons demain à 14h. Je vous souhaite une bonne soirée.
La séance est levée à 23h.