Séance du vendredi 15 décembre 2023 à 8h
3e législature - 1re année - 7e session - 43e séance

La séance est ouverte à 8h, sous la présidence de Mme Céline Zuber-Roy, présidente.

Assistent à la séance: Mmes et M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Nathalie Fontanet, Anne Hiltpold et Carole-Anne Kast, conseillères d'Etat.

Exhortation

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Thierry Apothéloz, Pierre Maudet et Delphine Bachmann, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Jennifer Conti, Virna Conti, Diego Esteban, Leonard Ferati, Joëlle Fiss, Philippe Morel, Geoffray Sirolli et François Wolfisberg, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Thomas Bruchez, Oriana Brücker, Rémy Burri, Gabrielle Le Goff, Patrick Lussi et Nicole Valiquer Grecuccio.

Annonces et dépôts

Néant.

PL 13360-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat établissant le budget administratif de l'Etat de Genève pour l'exercice 2024 (LBu-2024) (D 3 70)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VII des 14 et 15 décembre 2023.
Rapport de majorité de M. Jacques Blondin (LC)
Rapport de première minorité de Mme Caroline Marti (S)
Rapport de deuxième minorité de Mme Marjorie de Chastonay (Ve)
Rapport de troisième minorité de M. Michael Andersen (UDC)

Suite du deuxième débat

Budget de fonctionnement (tome 1) (suite)

F - FORMATION (suite)

Amendements relatifs à la politique publique F

La présidente. Mesdames et Messieurs, nous reprenons le traitement de la politique publique F «Formation» entamé hier soir. Nous en étions à la fin du débat et M. Jacques Blondin avait sollicité la parole. Allez-y, Monsieur le rapporteur de majorité.

M. Jacques Blondin (LC), rapporteur de majorité. Je vous remercie. (Un instant s'écoule.) Vous m'excusez, Madame la présidente, juste le temps de me remettre à la bonne page... (L'orateur rit.)

La présidente. Pourtant, nous n'avons pas fait une très longue pause ! (Rires.)

M. Jacques Blondin. Non, effectivement, on s'est quittés hier soir et on reprend à la première heure ce matin en formation réduite - mais ça ne va pas durer !

Je voulais juste intervenir sur cette politique publique avant que le Conseil d'Etat prenne la parole. Tout d'abord, Mesdames et Messieurs, il faut rappeler qu'il s'agit ici d'un département mammouth, au volume très important donc: la quasi-moitié de la fonction publique travaille au DIP, et nous sommes tout à fait conscients du défi qui est celui de la conseillère d'Etat.

Cela étant, deux ou trois points méritent d'être précisés, au sens de la majorité. Hier, on a parlé de l'OMP; sachez que nous n'avons effectué aucune coupe dans le budget de l'OMP, les demandes de la gauche consistent en des montants additionnels. Il est vrai que, dans un premier temps, une variable avait entraîné une coupe, mais elle a été compensée, parce qu'on sait très bien que ce service est en difficulté - on va formuler ça ainsi. Je souligne par ailleurs que l'année dernière, en fin de législature, la magistrate avait demandé un ajout massif de postes de travail à l'OMP, ce qui avait été accordé par la commission des finances compte tenu de l'urgence.

Ce qu'on attend de la nouvelle conseillère d'Etat, ce sont des informations quant au fonctionnement et à la structure de l'OMP, étant entendu, pour ceux qui ne le savent pas, que c'est compliqué; je crois que l'OMP oeuvre sur une centaine de sites - c'est bien ça, n'est-ce pas ? -, donc on peut imaginer que les choses ne sont pas faciles à gérer. Néanmoins, je le répète, il n'y a pas eu de suppression de postes de notre part dans ce service.

Concernant les amendements, la majorité va un tout petit peu éclater. En effet, vous avez vu que le MCG demande 10 millions en faveur des écoles professionnelles tandis que l'UDC, à l'inverse, souhaite enlever une somme équivalente du budget de l'université sous prétexte qu'il y a un problème avec les taxes. Alors on peut discuter de la question des taxes, mais priver l'UNIGE de plusieurs millions dans le contexte actuel - européen et autre - ne nous paraît pas le meilleur moyen d'intervenir. L'un compensant l'autre en termes budgétaires, il serait facile de penser qu'une main lave l'autre, mais la situation est plus complexe que ça, donc nous refuserons les deux amendements. Après, puisque l'un d'eux provient du MCG, eh bien ce groupe prendra évidemment la liberté de voter ce qu'il propose.

Je regarde si j'avais encore quelque chose à ajouter... Eh bien non, ce sera tout pour moi, Madame la présidente, merci beaucoup.

Mme Anne Hiltpold, conseillère d'Etat. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, j'espère que vous êtes bien reposés, bien réveillés et que vous avez pu profiter d'un bon café avant de commencer cette longue journée !

Vous le savez, cela a été rappelé, le département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse pèse très lourd, si vous me passez l'expression, dans le budget de l'Etat: les charges pour l'année 2024, on l'a souligné aussi, s'élèvent à un peu plus de 2,4 milliards de francs, soit près du quart du budget de l'Etat, en augmentation de 78 millions.

Le nombre d'ETP est également très important, puisque nous sommes à 9567 postes, soit un peu plus de la moitié des postes de fonctionnaires, en hausse de 265 dans le budget 2024, dont, je le précise, 90 postes que vous avez déjà accordés cette année pour faire face à l'afflux migratoire. Ainsi, les variations de ce budget s'expliquent, pour près de la moitié, par des charges contraintes et transversales et, pour l'autre moitié, en très résumé, par des besoins liés à l'accueil des élèves issus de la migration et à d'autres paramètres.

Parmi ces autres besoins, Mesdames et Messieurs, notons l'augmentation des effectifs d'élèves prévue pour 2024, une augmentation de 1,8%. Ce sont donc 127 postes d'enseignants supplémentaires qui ont été proposés, ce qui correspond à une hausse de 0,7%. Je le répète: une hausse de 0,7% du nombre de postes d'enseignants pour une croissance de 1,8% du nombre d'élèves.

Mesdames et Messieurs les députés, je souhaite par avance vous remercier pour le soutien que vous réserverez au budget de ce département, parce que j'ai conscience que les moyens demandés sont conséquents, que tout n'a pas été coupé à la commission des finances et que tout ne sera pas refusé aujourd'hui - donc merci.

Cela étant dit, j'aimerais brièvement revenir sur les amendements adoptés en commission ou que vous vous apprêtez à voter. Vous avez décidé de refuser un certain nombre d'ajouts à la nature 31 pour un montant de plus de 2,2 millions, dont près de 350 000 francs qui correspondent à des réallocations internes. Il s'agit là de vraies coupes, parce que vous avez supprimé une hausse, mais sans enlever l'économie qui en découlait en parallèle, donc oui, vous avez procédé à de vraies coupes. C'est la raison pour laquelle le Conseil d'Etat a déposé des amendements relatifs aux montants de la nature 31, nous vous proposons de rétablir ces réallocations internes.

Il y a également des dépenses liées à la prise en charge des élèves en décrochage scolaire, que ce soit au cycle d'orientation ou au secondaire II: nous vous demandons de réintégrer un certain nombre de sommes servant à l'accompagnement des jeunes décrocheurs au sein de dispositifs externes. Comme vous le savez, lorsqu'un élève n'arrive plus à suivre, est en rupture, nous l'invitons à effectuer des stages soit avec l'association Païdos, soit avec la Croix-Rouge, soit avec d'autres entités. Ces stages ont un certain coût, et malheureusement, les élèves en décrochage sont plus nombreux. Voilà pourquoi nous avions prévu des suppléments dans le budget 2024. Nous vous saurions vraiment gré de les réinstaurer, parce qu'il nous semble primordial d'agir pour ces jeunes. Naturellement, s'il n'y avait plus de décrochage, ce serait parfait; c'est ce à quoi nous souhaitons oeuvrer et c'est ce que nous nous attacherons à faire dans le cadre de cette législature, mais vous imaginez bien que tout n'est pas si simple.

Quant aux postes, Mesdames et Messieurs, vous avez choisi de ne pas accepter l'augmentation sollicitée en refusant près de 67 ETP, dont 50 d'enseignants, c'est-à-dire la moitié des postes d'enseignants et quelques autres postes liés à l'évolution du nombre d'élèves. Là encore, je tiens à vous remercier pour les ETP maintenus. Mais s'agissant de ceux que vous avez supprimés, le Conseil d'Etat vous demande d'en remettre au moins douze qui sont absolument essentiels... Enfin, plus que onze, puisque vous en avez refusé un hier. A cet égard, je souligne que tous les postes inscrits au projet de budget 2024 étaient fondamentaux.

Le Conseil d'Etat prend acte de votre position et des choix que vous avez effectués à la commission des finances; il n'ambitionne pas de rétablir l'ensemble des postes rayés, mais une partie seulement. Il reste notamment onze postes liés à l'implémentation du système informatique SAFE au sein du département, un projet d'investissement que vous avez accepté, pour la mise en route duquel l'addition de postes avait été annoncée. Le Conseil d'Etat souhaite la réintégration de ces ETP afin que nous puissions installer ce système primordial pour le DIP.

Nous vous invitons également à accepter les postes d'assistants sociaux au secondaire II. Il s'agit de +2,8 ETP: non pas de nouveaux collaborateurs, mais une hausse de l'activité pour répondre à l'augmentation des cas de harcèlement scolaire et de difficultés psychiques des élèves. Car oui, certains jeunes ne vont pas bien, et oui, les assistants sociaux sont confrontés à une recrudescence des sollicitations. Nous vous recommandons d'approuver ces postes, étant entendu que le Conseil d'Etat fait de la santé mentale et psychique de nos enfants l'une de ses priorités.

Par ailleurs, Mesdames et Messieurs, nous devons aujourd'hui contrôler 16 000 casiers judiciaires de personnes qui travaillent dans la petite enfance et les institutions subventionnées, c'est lié au nouveau droit fédéral VOSTRA. Le procureur général a décidé que cette mission serait centralisée et réalisée par les services de notre département. Nous vous avons soumis l'ajout de trois postes d'auxiliaires afin d'effectuer le contrôle de ces 16 000 casiers judiciaires et vous les avez rejetés, Mesdames et Messieurs de la majorité, comme vous vous apprêtez à les refuser maintenant. Ce n'est pas admissible ! Nous devons opérer la vérification de ces dossiers, nous n'avons pas le choix. Dès lors, le Conseil d'Etat vous présente un nouvel amendement visant à restaurer ces postes d'auxiliaires.

Et non, il n'est pas possible de déplacer un ou une secrétaire, une assistante administrative du SPMi, de l'enseignement obligatoire ou du secrétariat général pour effectuer cette tâche, nous ne pouvons pas réaffecter des employés à cette fin. Nous voulons que ce travail soit accompli par des personnes auxiliaires, raison pour laquelle nous avons réintroduit ces postes. Je vous invite vraiment à les soutenir.

Maintenant, je voudrais revenir sur les postes d'enseignants que vous avez décidé de couper. Je prends acte, Mesdames et Messieurs de la majorité, du fait que vous souhaitez que le nombre d'élèves par classe augmente...

Des voix. Oui !

Mme Anne Hiltpold. Voilà. Comme nous avons entendu de nombreux chiffres, je vais moi aussi vous citer un certain nombre de données que vous pouvez trouver sur le site de l'Office fédéral de la statistique s'agissant du nombre d'élèves par classe dans notre pays. Moyenne suisse pour le degré primaire: 18,6 élèves par classe; à Genève: 19,3. Le seul autre canton dont ce taux est plus élevé est Zurich. Moyenne helvétique pour le degré primaire de la 3P à la 8P: 19,1; nous sommes à 19,8. Encore une fois, seul Zurich a un niveau plus haut que le nôtre. Enfin, moyenne suisse pour le degré secondaire: 18,8; dans le canton de Genève: 19,5.

Eh oui, Mesdames et Messieurs, notre canton présente déjà le nombre d'élèves par classe le plus élevé. Alors on peut encore l'augmenter, on peut passer de 19,8 à 19,9 ou à vingt, mais vous comprendrez bien que sur un total de près de 82 000 élèves, ce n'est pas un dixième qui représentera la vraie conséquence. Simplement, il y a des classes du secondaire II où on se retrouvera avec 24 ou 25 élèves, parce que dans d'autres, on doit prévoir moins d'élèves, on ne peut pas se permettre d'en avoir vingt; je pense à certaines filières du cycle d'orientation, je pense à des classes avec des élèves qui rencontrent plus de difficultés. Il semble évident et facile à comprendre que moins une classe comporte d'élèves, mieux ceux-ci peuvent apprendre. Non, le but n'est pas de réunir trente élèves par classe; même si c'était ainsi à l'époque, ce n'est pas du tout notre objectif.

A ce propos, Mesdames et Messieurs les députés, vous savez pertinemment que les élèves genevois ne sont pas les mêmes que dans le canton d'Appenzell ou d'Argovie: le taux de jeunes issus de la migration est supérieur ici à celui des autres cantons et, partant, nous devons nous donner les moyens de relever ce défi. Il ne convient pas de jouer avec un nombre d'élèves par classe trop élevé.

D'ailleurs, si ce n'est pas le nombre d'élèves par classe qui augmente, ce seront certains qui seront déplacés. C'est précisément ce que nous avons déjà dû faire au cycle: l'an passé, nous avons opéré le déplacement forcé de cent élèves. Cela signifie qu'un jeune peut commencer dans un établissement en 9P et, l'année suivante ou celle d'après, être affecté ailleurs parce que nous n'avons plus de place, nous ne pouvons plus ouvrir de nouvelles classes car nous ne disposons pas des enseignants nécessaires. Il nous faut ainsi effectuer des regroupements. Alors c'est plus efficient, me direz-vous, mais il n'empêche que si votre enfant est muté de l'école où il est scolarisé après une année ou deux pour être transféré dans un autre cycle et qu'il doit prendre le bus ou le tram pour un trajet de trente minutes, eh bien vous serez les premiers à venir vous plaindre. Nous avons reçu énormément de doléances l'année passée en raison du déplacement de ces cent élèves. Voilà encore une conséquence du refus des postes d'enseignants.

Bien entendu, nous pouvons également agir sur les parcours scolaires, et sachez que c'est prévu. Aujourd'hui, les coûts sont très importants parce que certains élèves suivent de longs parcours, passent du collège à l'ECG pour finir dans une formation CFC. Il s'agit d'un aspect sur lequel nous allons travailler et qui figure à la fois dans la feuille de route et dans le programme de législature, parce que cela pourra avoir une influence sur les frais. En outre, nous travaillerons à la réforme du cycle d'orientation, mais je pense que la solution ne consistera pas à revoir le nombre d'élèves par classe. En effet, vous savez fort bien que nous devons prendre soin des élèves en difficulté au cycle, nous ne pouvons pas jouer avec ce ratio-là.

Je vous ai entendu comparer l'évolution du nombre d'élèves avec celle des enseignants, cette dernière ayant été plus importante entre 2011 et 2023; c'est vrai. Toutefois, Mesdames et Messieurs, il faut comparer ce qui est comparable. En 2011, HarmoS n'était pas en place; en 2011, il n'y avait pas d'école le mercredi matin; en 2011, si vous consultez les chiffres de départ, FO18 n'existait pas; en 2011, il n'y avait pas autant d'élèves issus de la migration. Avec FO18, c'est 1% de ce pourcentage que vous pouvez ajouter; les crédits accordés pour la migration, c'est +2,2%; et HarmoS, +3%. A l'aune de tels différentiels, nous ne pouvons pas comparer ces taux. Certes, le nombre d'enseignants a plus progressé que celui des élèves, mais les choses ont évolué, il y a davantage d'enseignement: on a évoqué hier la troisième heure de gym au cycle d'orientation et le fait qu'il y a plus de périodes au primaire maintenant qu'en 2011. Compte tenu de ces paramètres, il ne s'agit pas tout à fait de la meilleure comparaison.

Enfin, je conclurai en indiquant que notre programme de législature contient énormément de propositions, que nous nous emploierons, dans le cadre de la feuille de route du département, à trouver les meilleures options pour optimiser, si c'est ce que vous souhaitez, les montants liés à l'instruction publique. Aujourd'hui, cependant, je vous demande de ne pas lésiner sur les moyens à allouer, parce que la formation est essentielle: les jeunes représentent notre avenir, nous devons accompagner nos enfants, les éduquer, prendre soin également des élèves allophones.

D'aucuns estiment que ceux-ci font baisser le niveau; c'est possible, mais nous voulons justement que le niveau augmente, nous voulons offrir à ces jeunes la possibilité d'apprendre, de progresser dans la vie, de devenir autonomes, de trouver un travail, d'être employés, d'arriver sur le marché de l'emploi et à l'âge adulte en étant autonomes, en ne dépendant pas de l'aide sociale. Pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, il faut nous donner les moyens de former ces jeunes, et ces moyens sont ceux que nous sollicitons dans le projet de budget 2024. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous allons nous lancer dans le vote des amendements à cette politique publique. Tout d'abord, M. Carasso et cosignataires nous soumettent une augmentation de 4 millions de francs.

Une voix. Vote nominal !

La présidente. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, vous l'êtes.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 31 oui et 1 abstention (vote nominal).

La présidente. Nous sommes ensuite saisis d'un amendement de Mme Marti et cosignataires: +2 577 439 francs. Je vois que le vote nominal a été demandé. (Appuyé.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 31 oui et 1 abstention (vote nominal).

La présidente. L'amendement suivant, qui émane du Conseil d'Etat, vise une hausse de 274 162 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 31 oui et 1 abstention.

La présidente. Le gouvernement demande également un ajout de 148 580 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 31 oui et 1 abstention.

La présidente. Je mets maintenant aux voix un sous-amendement de M. Zweifel et cosignataires à un amendement du Conseil d'Etat de +454 689 francs: il s'agit de ramener ce montant à +228 565 francs.

Mis aux voix, ce sous-amendement est adopté par 57 oui contre 29 non et 3 abstentions.

La présidente. Dès lors que le sous-amendement a été validé, nous nous prononçons sur la demande de l'exécutif ainsi modifiée, à savoir +228 565 francs.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 76 oui contre 12 non et 1 abstention.

La présidente. Nous continuons avec une proposition de Mme Marti et cosignataires pour l'octroi de 953 francs. (Un instant s'écoule. Commentaires.)

Des voix.  Ça n'a pas marché !

La présidente. Le résultat était clair, mais par souci de transparence, je relance l'opération - il y a assurément de grandes incertitudes quant à l'issue du vote ! (Rires.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 42 oui.

La présidente. Voici le prochain amendement, toujours de Mme Marti et cosignataires: +969 499 francs.

Une voix. Vote nominal !

La présidente. Est-ce que vous êtes soutenue ? (Plusieurs mains se lèvent.) Tel est le cas.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 32 oui (vote nominal).

La présidente. La demande d'amendement suivante nous vient du Conseil d'Etat et prévoit un montant de +332 021 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 32 oui.

La présidente. L'exécutif demande ensuite +767 600 francs. Le vote nominal est sollicité. (Appuyé.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 32 oui (vote nominal).

La présidente. A présent, Mesdames et Messieurs, je soumets à votre approbation un amendement de Mme Marti et cosignataires pour +306 819 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 41 oui.

La présidente. Nous enchaînons avec une proposition de M. Carasso et cosignataires consistant à ajouter 2 millions de francs à la nature 30 «Charges de personnel».

Une voix. Vote nominal ! (Plusieurs mains se lèvent.)

La présidente. Vous êtes suivi, nous procédons donc au vote nominal.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 32 oui (vote nominal).

La présidente. M. Carasso et cosignataires présentent le même amendement à la nature 36 «Charges de transfert», soit +2 millions de francs. Le vote nominal est encore demandé. (Appuyé.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 60 non contre 32 oui (vote nominal).

La présidente. Nous en venons à la prochaine demande de Mme Marti et cosignataires: +156 504 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 43 oui.

La présidente. Toujours de Mme Marti et cosignataires, voici un amendement proposant d'accorder 349 961 francs supplémentaires. Nous sommes saisis d'une demande de vote nominal. (Appuyé.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 61 non contre 33 oui (vote nominal).

La présidente. Je vous invite maintenant à vous exprimer sur un amendement du Conseil d'Etat d'un montant de +215 848 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 33 oui.

La présidente. Le gouvernement souhaite encore ajouter 107 707 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 62 non contre 33 oui.

La présidente. L'amendement suivant est de Mme Marti et cosignataires. Il s'agit d'une augmentation de 206 293 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 43 oui.

La présidente. MM. Baertschi et Pistis ont déposé un amendement de +10 millions de francs.

Des voix. Vote nominal !

La présidente. Etes-vous soutenus ? (Plusieurs mains se lèvent.) Oui, c'est bon.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 49 non contre 46 oui (vote nominal).

La présidente. C'est au tour de l'UDC de nous soumettre une requête: une diminution de 9 686 310 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 83 non contre 12 oui.

La présidente. Ensuite, j'ouvre le vote sur un amendement de Mme Marti et cosignataires prévoyant +321 499 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 43 oui.

La présidente. Nous poursuivons avec une demande de l'UDC, à savoir -126 000 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 82 non contre 12 oui.

La présidente. Le Conseil d'Etat présente encore un amendement ajoutant la somme de 125 000 francs.

Mis aux voix, cet amendement est adopté par 83 oui contre 12 non.

La présidente. La prochaine proposition est celle de Mme Marti et cosignataires qui entendent octroyer 138 880 francs de plus.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 43 oui.

La présidente. Pour conclure, nous votons sur un amendement de l'UDC pour une réduction de 109 253 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 83 non contre 12 oui.

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous procédons au vote sur l'entier de la politique publique F telle qu'amendée.

Mise aux voix, la politique publique F «Formation» ainsi amendée est adoptée par 51 oui contre 12 non et 33 abstentions.

Votes nominaux relatifs à la politique publique F

La présidente. Nous arrivons à la politique publique G «Aménagement et logement». J'ouvre le débat. Monsieur Murat-Julian Alder, vous avez la parole.

M. Murat-Julian Alder (PLR). Merci, Madame la présidente. J'interviens sur les deux amendements socialistes visant à réintroduire la subvention du RPSL, le Rassemblement pour une politique sociale du logement. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je vous invite à consulter le site internet du RPSL, qui est tout à fait transparent sur ce que représente cette entité. Parmi les associations membres, on trouve Caritas, qui a un contrat de prestation avec l'Etat, le Centre social protestant, qui a un contrat de prestation avec l'Etat, le SIT, Unia et le SSP - trois syndicats - ainsi que quatre partis de gauche: le parti socialiste genevois, le parti du Travail, solidaritéS et les Vert point e point s. (Rires.) On y trouve en outre l'ASLOCA Genève et le Mouvement populaire des familles. A teneur de ses statuts, «le RPSL vise à promouvoir une meilleure protection des locataires ainsi qu'une politique sociale dans le domaine du logement. A cet effet, il s'efforce de regrouper les diverses organisations genevoises qui se préoccupent de la défense des intérêts des locataires» et «assume leur représentation permanente, ainsi que la défense de leurs intérêts».

Mesdames et Messieurs, ça fait plusieurs années que cette question de la subvention du RPSL revient sur le tapis lorsqu'on vote le budget. Il y a sur les onze entités constitutives du RPSL quatre partis politiques, qui bénéficient des mesures de soutien financier aux partis politiques, comme nous en bénéficions tous ici en tant que partis envoyés par le peuple dans ce parlement. En plus, deux associations sont au bénéfice d'un contrat de prestation. Cette subvention est contraire à la LGAF, à la LIAF - à savoir la loi sur les indemnités et les aides financières -, elle a pour effet de contourner l'application des règles sur le financement des partis politiques puisque quatre partis se retrouvent favorisés par cette subvention via des moyens supplémentaires qui leur sont alloués pour mener leur politique.

Encore une fois, comme je le faisais hier avec l'AVIVO, je ne remets pas en question l'existence du RPSL, ni son but, ni ses membres, ni son activité, ni les objectifs qu'il peut poursuivre, mais il n'y a pas de raison que le contribuable verse le moindre centime à cette association qui poursuit des buts strictement politiques, qui ne fournit aucune prestation au service du public, qui ne fournit pas la moindre prestation d'intérêt général. Par conséquent, cette subvention est illicite, et si elle devait être votée, je me réserve le droit de porter l'affaire devant la Cour des comptes. (Commentaires.)

La présidente. Je vous remercie. (Brouhaha.) S'il vous plaît, un peu de silence. La parole est à Mme Caroline Renold.

Mme Caroline Renold (S). Je vous remercie, Madame la présidente. La politique publique G couvre un champ de prestations fondamentales pour la population: l'aménagement et le logement. Dans le contexte d'un territoire contraint, avec une spéculation immobilière rampante qui se nourrit d'une grave pénurie de logements, il faut des infrastructures pour les besoins de la population et il faut des logements abordables pour la loger. Cela passe par le contrôle des loyers, notamment après réalisation de travaux ou dans les zones de développement. Et cela passe aussi par la construction de logements, en premier lieu des logements d'utilité publique.

La complainte répétée de la droite élargie défendant les milieux immobiliers, c'est qu'à Genève, la procédure pour construire est trop lente et qu'on n'arrive jamais à construire. Et pourtant, la droite élargie coupe aujourd'hui la demande de cinq postes formulée par le Conseil d'Etat pour accélérer les procédures en matière d'aménagement, notamment pour l'aménagement et le développement au PAV, pour la procédure de préavis du service des monuments et sites, qui est toujours décriée comme trop lente, et pour améliorer la comptabilité dans le cadre des LUP. Ces coupes sont un non-sens, même pour la droite. J'invite donc la droite élargie à reconsidérer sa position, qui constituerait un frein pour la construction de logements dans notre canton, et ainsi à accepter l'amendement socialiste visant à réintégrer les postes coupés.

Deuxièmement, par rapport à ce qu'indiquait mon préopinant, il ne semble pas tenir compte de la situation de la population genevoise. Cette dernière subit de plein fouet la crise du logement, et elle est composée à 80% de locataires, qui, eux - il faut peut-être le rappeler suite aux débats que nous avons eus hier sur l'indexation des salaires -, voient leurs loyers adaptés à l'indexation automatiquement, contrairement aux salaires qui ne bougent pas, même dans la fonction publique. Dans ce contexte, le Rassemblement pour une politique sociale du logement promeut une politique sociale du logement et défend les intérêts des locataires, soit 80% de la population de ce canton. Ce n'est pas un soutien aux partis politiques, c'est une défense des intérêts de 80% de la population - peut-être que le PLR, vous transmettrez, Madame la présidente, a oublié que 80% de la population a besoin de voir ses intérêts représentés.

La droite majoritaire, ou devrais-je dire la droite immobilière, coupe la subvention octroyée au Rassemblement pour une politique sociale du logement, et cela est inacceptable. C'est un mépris pour la population, qui a besoin de se loger à un prix abordable. C'est un dédain pour la société civile et sa liberté d'association et d'expression. Le parti socialiste vous invite donc à accepter l'amendement visant à réintégrer la subvention destinée au RPSL. Je vous remercie, Madame la présidente. (Applaudissements.)

M. Murat-Julian Alder (PLR). Madame la présidente, si vous me permettez une brève réplique que je vous prie de bien vouloir transmettre à Mme Renold, je crois qu'il y a une confusion entre le rôle de l'ASLOCA, qui est celui de la défense des locataires et qui est son droit le plus strict, et celui du RPSL, qui est une faîtière de différents organismes dont la majorité bénéficient déjà de prestations financières de la part de l'Etat, sans oublier la Ville de Genève, qui participe aussi à cette plaisanterie.

J'aimerais vous poser cette question: qu'est-ce que le RPSL a fait au cours de ces vingt dernières années pour faire baisser les loyers à Genève ? Rien du tout ! Est-ce que les locataires ont besoin du RPSL ou est-ce qu'ils ont besoin d'être défendus par des représentants, des avocats lorsque leur augmentation de loyer leur est signifiée ? Je ne vois pas ce que le RPSL apporte à un locataire. C'est un rassemblement de circonstance dans des cas particuliers lorsqu'il y a des votations, c'est une association politique et tout financement qui bénéficierait à ce RPSL est contraire à la LGAF, à la LIAF et à la loi sur le financement des partis politiques. C'est aussi simple que cela ! Merci beaucoup de votre attention.

M. David Martin (Ve). Pour réagir très brièvement à cette discussion sur le RPSL, j'invite le PLR à mener une politique sociale du logement. A ce titre, il peut rejoindre le RPSL, comme n'importe quelle structure qui se reconnaît dans ce type d'objectifs et de valeurs. Je pense que finalement, la question est aussi simple que cela. (Applaudissements.)

Mme Caroline Renold (S). Très brièvement, pour dupliquer: il n'y a aucune confusion, ne vous en souciez pas - vous transmettrez, Madame la présidente, à M. Alder -, entre l'ASLOCA et le RPSL. Ce dernier défend au niveau collectif les intérêts des locataires et une politique sociale du logement. Je sais bien que pour la droite, il est toujours difficile de concevoir qu'on peut ne pas prendre position pour l'économie libérale et qu'on a le droit d'avoir une position politique en tant qu'association. De plus, les positions de groupements économiques que représente le PLR sont aussi des positions politiques en elles-mêmes. (Commentaires.)

Par ailleurs, pour répondre, le RPSL soutient les politiques publiques pour des logements sociaux, ce qui est dans l'intérêt des locataires de ce canton, et participe à la nomination des représentants des locataires dans les instances judiciaires, ce qui est également dans l'intérêt des locataires de ce canton. Il y a donc bien évidemment un intérêt pour 80% de la population à voir cette subvention renouvelée. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Sébastien Desfayes (LC). Vous l'aurez tous compris, l'enjeu de la politique de l'aménagement et du logement, ce n'est pas de savoir si certains amis du parti socialiste seront engraissés par le contribuable. La question, c'est plutôt celle de l'accès au logement pour les Genevois. Alors on avait réussi il y a quelques années, sous la férule du conseiller d'Etat Antonio Hodgers, à obtenir un accord historique, celui des trois tiers. C'était un magnifique acte politique, il doit encore cependant être concrétisé, notamment dans le plus grand périmètre de l'Etat, à savoir le PAV, où, étrangement - et en tant que démocrates-chrétiens, on pourrait qualifier cela d'hérésie -, on aurait 62% de logements sociaux.

Un autre enjeu de la politique du logement et de l'aménagement, c'est la qualité des constructions. On a vu lors de votations une certaine réticence de la population à continuer dans cette politique-là, au regard des biens, des immeubles qui sont sortis de terre. Aujourd'hui, la politique de l'aménagement se heurte à une réalité, l'étroitesse du territoire genevois, la rareté des terres. En parallèle à cette problématique, il y en a une deuxième, qui est celle des fronts: dans le domaine de l'aménagement, on constate, dans les communes ainsi que par rapport à certains groupes d'intérêts, que les fronts se sont durcis à l'encontre des déclassements.

Je vais vous donner un exemple qui est assez significatif, et je me réjouis que le conseiller d'Etat Antonio Hodgers en parle, c'est le périmètre de la Susette. Ce dernier est situé dans une zone qui, à teneur du plan directeur, doit être densifiée parce que ces terrains se trouvent à côté d'axes forts de mobilité. On pourrait dire: profitons de ce périmètre pour construire des logements. Mais il y a tellement d'oppositions de tous genres - en l'occurrence, ce sont plutôt, manifestement, des oppositions des Verts du Grand-Saconnex, c'est-à-dire des personnes du même parti que ce conseiller d'Etat - qu'au lieu de profiter de ce périmètre pour densifier, on veut créer une ferme urbaine, qui occupera 40% à peu près du périmètre, quand bien même dans un rayon de 200 mètres se trouvent déjà deux fermes réelles, et non pas des fermes bobos.

Alors voilà, ça pose des problèmes: si on ne densifie pas ce que l'on peut et ce que l'on doit densifier, est-ce que cela sera compris ? Et est-ce que par exemple des propriétaires de villas comprendront que l'on veuille déclasser en zone 5 ? Est-ce que des agriculteurs comprendront, ou pourraient comprendre, que l'on veuille déclasser des terres agricoles quand le Conseil d'Etat n'a pas le courage politique, parce qu'il a des adversaires, de densifier dans les périmètres qui doivent l'être ?

Nous avons une certaine confiance, pour ne pas dire une confiance certaine, dans le conseiller d'Etat, mais voilà les problèmes que nous devons affronter. Nous aimerions avoir certaines réponses par rapport à la volonté réelle de densifier ce qui peut l'être et non pas de densifier en zone agricole et en zone villas. Merci.

La présidente. Je vous remercie. La parole est à M. Marc Falquet.

M. Marc Falquet (UDC). Déjà ? Ah bon, ça n'a pas clignoté. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, à entendre la gauche et le département, nous avons compris que nous sommes la dernière génération à vivre à Genève sur Terre. Pourquoi ? Parce que vous dites qu'il faut se précipiter, qu'il faut se dépêcher de construire, mais on sait en fait qu'il n'y a plus de terrains à bâtir. Cela veut dire que si on se précipite pour construire aujourd'hui, cela constitue une forme d'égoïsme pour les générations futures, qui ne pourront plus du tout construire. C'est donc une erreur fondamentale: on n'a vraiment pas besoin d'engager du monde pour s'empresser de construire. Il faut laisser de la place et aussi laisser la chance à nos enfants et petits-enfants de pouvoir garder du terrain à bâtir.

Si on construit aujourd'hui, on le fera où ? Il faudra peut-être acheter du terrain en France pour bâtir. Il n'y a donc aucun besoin de se précipiter: de toute façon, il n'y aura jamais assez de place pour tout le monde à Genève, vu, en plus, la politique d'immigration non contrôlée qui est la nôtre. Si nous devons accueillir chaque année 10 000 personnes dont 9800 vont se retrouver à l'Hospice général et qu'il faudra loger, évidemment que cela va poser des problèmes. Par conséquent, ne nous précipitons pas. Il n'est pas du tout utile d'engager du monde: restons tranquilles et gardons de la place et du terrain à bâtir pour les générations futures. Merci beaucoup.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Je pense que nous pouvons nous accorder pour dire que les problèmes de logement, même hors budget, sont concrets, qu'il n'y a pas assez de logements, que le parc immobilier à Genève est trop vieux, qu'il est trop cher pour la plupart des personnes et qu'il n'est pas assez entretenu. On peut aussi s'accorder sur le fait que l'aménagement est un domaine complexe quand on a un territoire aussi exigu. M. Desfayes l'a mentionné tout à l'heure, à la commission de l'aménagement, les fronts sont de plus en plus marqués.

Je tiens à dire qu'il y a certains propos qu'on ne devrait plus entendre dans ce parlement. On a vu que les fronts sont plus marqués. Or si c'est le cas, il faut convaincre. Pour convaincre, il faut des projets qui font envie à la population. Est-ce qu'il faut faire des blocs de bâtiments au motif qu'on doit densifier, et densifier n'importe comment ? C'est cette densification qui n'est pas pensée et qui n'est justement pas bénéfique pour la population qui engendre les résultats que nous constatons lors de votations populaires.

Quand j'entends la droite attaquer notamment des projets de participation citoyenne tels que des fermes urbaines, je ne l'accepte pas ! En allant contre ce type de projets, vous créez des climats qui ne sont juste pas acceptables pour des quartiers populaires. Si vous voulez vivre dans des quartiers où il n'y a ni parc, ni ferme urbaine, ni projet participatif, eh bien vous êtes libres d'y déménager et d'évacuer les zones villa ! Merci. (Rires. Applaudissements.)

M. Lionel Dugerdil (UDC). Chers collègues, je remercie Sébastien Desfayes pour ses propos, auxquels je souscris tout à fait. Je tiens à rappeler brièvement que l'expérience nous démontre aujourd'hui que plus l'Etat augmente le nombre de ses collaborateurs, moins les procédures sont simples et moins on peut construire vite. (Commentaires.) L'UDC vous propose donc de ne pas voter ces amendements.

M. Pierre Eckert (Ve). Je tiens juste à dire brièvement qu'on s'attaque assez souvent au nombre de personnes qu'on doit loger, mais je rappelle que si on doit loger des personnes, c'est aussi parce qu'on crée beaucoup d'emplois. On crée beaucoup plus d'emplois que de logements, ce qui pose des problèmes. Posons-nous donc la question générale de la croissance de Genève plutôt que de toujours parler seulement de l'immigration.

Maintenant, comme j'ai été pris à partie en tant que Vert du Grand-Saconnex, j'aimerais dire que la zone de la Susette est, il me semble, une zone industrielle et artisanale depuis les années 1980. Par conséquent, où est-il possible de créer du logement là-dedans ? C'est vrai que certains projets proposaient d'y mettre un peu de logements. Actuellement, un nouveau projet est présenté. Il s'agit d'un projet beaucoup plus moderne, qui contient du logement, bien entendu, qui contient des infrastructures d'intérêt public, peut-être une école supplémentaire pour la population qui emménagera dans cette zone, peut-être une salle de gymnastique et bien entendu une ferme urbaine, pour laquelle une demande a été formulée. Sachant que la commune du Grand-Saconnex est fortement impactée par Palexpo, par l'autoroute, par l'aéroport, on peut bien faire quelque chose d'un peu plus végétalisé pour la population. Par conséquent, nous soutiendrons ce projet. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Par rapport à ce qu'a dit très justement mon collègue Marc Falquet, il faut simplement revenir à un peu plus de réalité. Vous dites que ce n'est pas la faute de l'immigration, mais son impact est énorme et se situe bien au-delà de l'immigration connue; il faut voir la pression que mettent les sans-papiers sur notre canton. Il faut bien faire le constat que ces gens-là ne dorment pas sous les ponts. On nous dit chaque fois qu'on n'arrive pas à les évaluer, qu'on ne connaît pas tous les chiffres, etc. Selon certaines estimations, à Genève, il y a entre 20 000 et 30 000 sans-papiers. Mais en réalité, on le sait, ils sont beaucoup plus nombreux. Si vous réduisez la proportion de sans-papiers, de ces illégaux qui n'ont rien à faire chez nous, vous détendez le marché en libérant entre 20 000 et 30 000 logements du jour au lendemain ! Il vous suffit de vous poser cette simple question et vous aurez résolu la quasi-totalité des problèmes de logement dans ce canton. Je vous remercie.

M. Djawed Sangdel (LJS). Depuis hier, quand nous analysons n'importe quelle politique publique dans ce projet de budget, on revient chaque fois sur un problème d'immigration. Pour moi, ce n'est pas acceptable. Même dans cette salle, certains sont à l'origine des immigrants. A titre personnel, je suis venu ici il y a vingt ans sans papiers. J'étais là, j'ai travaillé et j'ai aussi créé du travail pour les autres. J'ai donné naissance à des enfants qui, aujourd'hui, deviennent avocate et étudiant en troisième année de médecine. C'est une fierté pour Genève d'accueillir des gens comme ça. Vous avez aussi dans cette salle un conseiller d'Etat qui, à l'origine, était un migrant. C'est également le cas de certains députés. Vous ne pouvez pas, chaque fois, attaquer et dire qu'il faut couper ci, qu'il faut couper ça, parce qu'il y a un problème d'immigration: il faut savoir comment vous voulez faire les choses. Quand on ne sait pas comment régler une situation, on rejette la faute sur les autres. Si aujourd'hui nous sommes fiers que des personnes viennent dans notre canton et dans notre pays pour travailler, pour contribuer à son développement... Je pense en effet que c'est une fierté.

Maintenant, il faut trouver des solutions, il ne faut pas simplement jeter le problème sur l'immigration, parce qu'en faisant cela, on manque de respect à la moitié des députés présents dans cette salle. Aujourd'hui, des personnes d'origine étrangère, des enfants d'émigrants ainsi que des émigrants participent au développement de la Suisse. Moi-même, lorsque je voyage - vous pouvez chercher sur internet -, je défends d'abord l'intérêt de la Suisse et de Genève, avant même celui de mon pays d'origine. Si j'ai quitté mon pays d'origine, cinq cents ans d'histoire, ma famille, mes proches, mes amis, c'est parce que je crois en la Suisse.

Pour respecter notre travail, il nous faut imaginer des solutions avec créativité et innovation afin de répondre aux besoins actuels et futurs. Il faut arrêter de toujours rejeter la faute sur l'immigration. Je pense que c'est une fierté pour notre pays et pour notre canton. Je vous remercie beaucoup. (Vifs applaudissements.)

Des voix. Bravo !

La présidente. Merci. La parole est à M. Marc Falquet.

Une voix. Encore ?

M. Marc Falquet (UDC). Merci, Madame la présidente. Oui, alors je m'excuse, ça dévie un peu sur l'immigration ! (Rires. L'orateur rit. Exclamations. Commentaires.) C'est pour ça que je prends la parole !

La question qu'il faut se poser aujourd'hui, c'est: est-ce que la Suisse est un pays d'immigration ? Est-ce que nous avons du travail à donner à des gens qui ne parlent pas français et qui n'ont pas de formation, alors qu'à Genève, il y a au moins 60 000 personnes qui sont sans emploi parce qu'elles subissent la concurrence de la France ? Combien de ces immigrés vont trouver du travail ici à Genève ? Il faut arrêter d'attirer les gens en leur faisant croire qu'ils vont trouver une solution pour leur vie. Est-ce que c'est une solution... Hier, un collègue disait qu'on les accueille dans des conditions inadmissibles; c'est exact ! C'est pour ça qu'on devrait accepter seulement les gens dont on a besoin et non faire croire à ces personnes qu'en venant ici sans parler le français, sans être intégrées, avec d'autres cultures, d'autres habitudes, elles vont pouvoir s'épanouir. Elles n'ont carrément aucune chance puisque déjà les Genevois ne trouvent plus de travail ! Même les Genevois qui ont une formation, les Genevois qui sont nés ici, nos enfants ne trouvent plus de travail, et vous pensez que les immigrés qui ne parlent pas français, qui sont venus en disant des mensonges sous le couvert de l'asile... (Protestations.)

Une voix. Mais oui !

M. Marc Falquet. Exactement, ce sont des réfugiés économiques à qui on fait croire qu'ils vont trouver du travail en Suisse, c'est un mensonge ! Il y a donc un mensonge derrière l'immigration, il y a des gens qui s'enrichissent avec cette immigration déguisée sous l'asile. (Commentaires.) C'est ça qui pose des problèmes dans tous les domaines ! (Remarque.) Le budget de l'Etat est axé sur toutes les dépenses causées par le chaos... (Exclamations.) ...issu de l'immigration illégale déguisée sous l'aspect de l'asile, sans compter les sans-papiers. La loi sur les étrangers n'est donc pas appliquée à Genève et c'est un scandale ! C'est ce chaos à Genève qui nous coûte cher. (Vifs commentaires.) En fait, les besoins réels de la population, c'est-à-dire les besoins de ceux qui travaillent, les besoins de ceux qui paient des impôts ne sont pas respectés. On gaspille l'argent pour rien: des dizaines de millions soi-disant pour des programmes d'intégration bidons qui ne servent à rien ! Finalement, ces gens se retrouvent à l'aide sociale à vie, sur le dos des Genevois. Et c'est ça le véritable problème à Genève ! (Protestations. Commentaires.)

Défendons donc les intérêts des Genevois et qu'on arrête cette hypocrisie. Si on dit qu'on ne peut pas accueillir les gens dans des conditions normales, alors il faut respecter le fait qu'on choisisse l'immigration en accueillant les personnes dont on peut s'assurer qu'elles trouveront du travail. Mais là, personne ne peut assurer qu'on va donner un logement à ces gens et leur trouver un travail. La seule chose, c'est qu'ils vont se retrouver à l'asile, devenir la clientèle des psychiatres et prendre des antidépresseurs à vie. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Une voix. Bravo ! (Commentaires.)

La présidente. Je rappelle qu'il faut s'adresser à la présidence, mais il me semble que... (Exclamations.) D'accord ! Je rappelle aussi qu'il faut écouter les orateurs: si vous n'êtes pas d'accord avec ce qu'ils disent, vous appuyez sur le bouton et vous exprimez le moment venu. (Commentaires.) Regarder une personne ? Il a regardé face à lui. Monsieur Falquet, s'il faut le rappeler, merci de regarder vers moi quand vous vous exprimez. Madame Bayrak, vous avez la parole.

Mme Dilara Bayrak (Ve). Merci, Madame la présidente. Je suis extrêmement choquée par ce que nous avons entendu, mais ce n'est pas la première fois que je suis étonnée des propos tenus par l'UDC. Je vais lui donner le bénéfice du doute - vous transmettrez, Madame la présidente - et lui rappeler que les immigrés, dans le cadre de l'aménagement et du logement - je resitue le débat -, sont victimes des marchands de sommeil. Ils n'occupent donc en réalité pas beaucoup de place, Monsieur Falquet, et ils procurent un revenu, entre guillemets un «retour sur investissement», extrêmement élevé pour l'économie genevoise - je parle en termes économiques, peut-être que vous serez plus attentif à ces arguments-là. (Remarque.) S'il vous plaît, laissez-moi parler, Monsieur Ivanov, vous parlez déjà assez. (Rires.)

Aujourd'hui, quand on parle d'immigrés et d'immigration illégale qui causeraient un problème, un chaos dans l'aménagement et le logement à Genève, c'est complètement faux, c'est factuellement faux, archifaux ! Intéressez-vous à l'historique du logement à Genève: le logement, la mobilité, l'aménagement, l'économie, sont des thèmes liés. Quand on promeut pendant des années, des années et des années des entreprises et une croissance économique qui fait que plusieurs d'entre elles sont venues s'installer à Genève et ont - je le dis de manière provocante, mais c'est volontaire, contrairement à vous...

La présidente. Merci de vous adresser à la présidence. (Exclamations.)

Mme Dilara Bayrak. Madame la présidente, je m'adresse...

La présidente. Et vous pouvez me regarder par la même occasion.

Une voix. Alors celle-là, elle est bonne !

Mme Dilara Bayrak. C'est incroyable, Madame la présidente, vous avez une tendance à ne couper les débats que d'un côté et pas de l'autre. (Applaudissements.) Je souhaiterais terminer, merci, Madame la présidente.

Quand on parle du logement, ce sont des entreprises qui ont fait que le logement disponible sur le marché genevois a été, entre guillemets, «accaparé». Je citerai l'exemple de Procter & Gamble. Le taux de vacance était le plus élevé juste avant la venue de cette société. Procter & Gamble est arrivé avec tous ses employés, avec un «package deal», en proposant des logements, et nous nous sommes retrouvés avec énormément de biens soustraits du marché. Je ne cite même pas les business du type Airbnb, qui enlèvent chaque année énormément de logements de notre marché immobilier. Donc maintenant, arrêtez avec les fausses vérités ! Madame la présidente, vous transmettrez que ces mensonges, on ne peut plus les entendre. C'est assez bestial, c'est assez primaire chez vous de donner ces éléments comme des vérités absolues; c'est faux, archifaux, arrêtez maintenant ! (Applaudissements.)

M. Djawed Sangdel (LJS). Madame la présidente, vous passerez le message à certains de mes collègues: le droit d'asile, ce n'est pas une faveur, c'est une obligation pour l'Etat selon les conventions internationales. Avoir accès à la formation, ce n'est pas non plus une faveur, c'est un droit.

On parle de l'intégration. C'est normal qu'une personne qui vient ici ne parle pas le français: elle va l'apprendre; et c'est tout à fait logique qu'elle ne maîtrise pas la culture, elle vient pour l'apprendre. Il y a des immigrés qui n'ont pas besoin de parler français pour travailler à Genève. (Commentaires.) On ne peut pas juste attaquer en disant qu'il faut apprendre le français. Est-ce que vous apprenez leurs langues ? Il faut remercier les personnes qui viennent ici sans parler un seul mot de français, comme moi lorsque je suis arrivé il y a vingt ans. Aujourd'hui, je parle français, j'écris des articles et des livres au nom de la Suisse. Je représente la Suisse, mon pays, dans le monde entier.

Il ne faut pas parler contre les valeurs de la Suisse. Refuser à ces personnes de venir chez nous, ce n'est pas conforme à nos valeurs suisses. On accueille les gens avec un certain respect, une certaine responsabilité et certaines contributions. Si on compare l'exemple de la Suisse avec ceux d'autres pays en matière d'immigration, on constate que la Suisse a mieux réussi que certains pays. Regardez ce qui se passe chez nos voisins. En Suisse, on vit ensemble, on travaille ensemble, on pense ensemble pour la créativité de la Suisse. Il ne faut pas détruire ces valeurs, il faut au contraire les protéger, les améliorer et trouver des solutions. Si on se cache toujours derrière ces éléments, je pense qu'on ne trouvera jamais la solution, qui ne peut venir que du fait qu'on travaille ensemble, qu'on réfléchisse ensemble pour la Suisse et pour notre canton. Je vous remercie beaucoup.

M. Vincent Subilia (PLR). Je vais m'employer à prendre la parole avec le plus de sérénité envisageable dans cet hémicycle qui bouillonne et dont je croyais qu'il avait à débattre non pas de l'immigration, mais du logement - manifestement, ce sont ici deux paramètres intimement corrélés. Je pense qu'il est bon de porter, et je m'y emploie modestement, un discours raisonné ou raisonnable, face aux propos qu'on peut entendre ici.

D'abord, et vous transmettrez, Madame la présidente, à la gauche pour qui la pénurie de logements est notoirement imputable à la croissance économique du canton: bien sûr que cette croissance exerce une pression sur les paramètres, à commencer par le logement, mais cette même croissance économique qui nous vaut la prospérité dont nous pouvons toutes et tous nous réjouir aujourd'hui, eh bien c'est elle qui génère de l'emploi, et vous en conviendrez - vous transmettrez, Madame la présidente, à l'attention de la députée Dilara Bayrak -, cette prospérité est la meilleure des garanties pour la dignité par le biais de l'emploi.

Par ailleurs, je m'autorise à l'inviter - vous le ferez, Madame la présidente - à revoir un certain nombre de faits: on est toujours plus crédible lorsqu'on accuse les bancs d'en face de prodiguer de fausses vérités si nos propos sont eux-mêmes véridiques. Procter & Gamble, que vous avez nommément mis en cause - je pense que cela est assez peu élégant -, est l'une des multinationales parmi les deux mille que nous comptons dans notre canton. Je vous rappelle que pour être une multinationale, il suffit de déployer son activité dans deux cantons - un épicier peut donc être une multinationale - ou dans deux pays. Procter & Gamble est implanté à Genève depuis plus de soixante ans. Je tiens ici à les remercier pour tous les emplois qu'ils ont créés, y compris au bénéfice des Suisses et des Genevois. C'est la première des vérités que je souhaitais rétablir en rappelant un certain nombre de fondamentaux.

La seconde est la suivante: je souhaite dire qu'effectivement, pour garder la sérénité, je pense qu'il est assez bon qu'on évite ces plaidoyers où l'on porte au pilori l'immigration, comme j'ai pu l'entendre en provenance des bancs situés géographiquement à ma gauche. J'en ai encore d'ailleurs un acouphène tant les propos étaient virulents. J'ai été pour ma part très sensible à d'autres plaidoyers portant précisément sur l'apport de l'immigration. Je rappelle ici à celles et ceux qui ne souhaitent pas l'entendre que la Suisse - et Genève en particulier - s'est construite sur son ouverture au monde. La prospérité qui nous vaut de siéger dans ce magnifique hémicycle est imputable à celles et ceux qui, dans un pays alpin qui produisait des fermiers et des mercenaires, ont contribué à nous faire bénéficier de leurs savoir-faire.

Plusieurs de nos collègues, dont celui qui s'est exprimé tout à l'heure et que je tiens à remercier, sont des contributeurs très directs de cette prospérité. Il me paraît un peu binaire de vouloir sans cesse - mais je sais que c'est là votre propos - s'en prendre à cette immigration de qualité qui contribue à notre prospérité. Je suis moi-même vaudois d'origine et j'ai une mère belge. Je pense qu'aux yeux de l'UDC, je suis probablement un immigré, mais un immigré fier d'être genevois depuis vingt ans et qui espère modestement contribuer à cette même prospérité qui nous vaut de débattre du logement et de trouver avec sérénité et collectivement les solutions qui s'imposent pour notre population. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Jean-Pierre Tombola (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, la question de l'immigration ne doit pas être au centre de nos préoccupations s'agissant du thème du logement. L'immigration n'a pas lieu seulement dans un sens. Vous le savez très bien, si vous voyagez en Australie, vous remarquerez que les gens qui habitent là-bas ne sont pas uniquement des aborigènes. Est-ce qu'il y a eu une immigration ou pas ? Si vous vous rendez au Brésil, vous vous rendrez compte de la diversité de la population brésilienne. Y a-t-il eu une immigration ou pas ? En Amérique latine, pareil; en Afrique du Sud, pareil. Il faut qu'on cesse de toujours penser que les personnes qui viennent ici sont les seules immigrées, comme s'il n'y avait pas aussi une immigration dans le sens inverse. C'est extrêmement important de retenir cela.

Entre 1993 et 2023, plus de 50 000 personnes ont perdu la vie en cherchant à venir en Europe, soit 1666 personnes par année. Ces personnes ne viennent pas en Europe uniquement pour avoir un logement dans notre canton ou ailleurs, elles partent de chez elles parce qu'il n'y a plus d'espoir. Ce n'est pas sur ça que porte notre débat, mais je voulais simplement dire que si l'on parle des questions de logement ou des problèmes d'aménagement du territoire, ce qui pose problème, parmi tant d'autres préoccupations, c'est plutôt la question des familles, qui, parfois, divorcent, se séparent. Cela signifie que lorsqu'il y a des problèmes dans la famille et que les personnes se séparent ou divorcent, alors il faut deux appartements pour une même famille, alors que ces personnes sont censées normalement vivre dans le même logement. Cela double les besoins en logements.

Il y a aussi la question des personnes qui vivent seules pendant longtemps. Un projet de l'université intitulé «1h par m2» offre la possibilité aux étudiants d'être logés chez des personnes âgées qui vivent seules, ce qui permet de résorber une partie de la demande. Il y a en effet des appartements qui ont de grandes capacités mais qui sont sous-occupés. Le fait que ces personnes aient la légitimité de continuer à y habiter augmente aussi le besoin en appartements. Je donne ces éléments pour souligner qu'il ne faut pas toujours réduire le problème du logement et de l'aménagement du territoire à l'immigration. Je suis aussi un immigré et je suis fier de l'être. Je vous remercie de revenir à la raison et de vous attaquer aux vrais problèmes, aux vraies préoccupations de la population, sans toujours jeter de l'huile sur le feu en visant les étrangers. Merci. (Applaudissements.)

Mme Patricia Bidaux (LC). J'entends bien qu'on parle de logement et qu'on peut ne pas être d'accord sur certaines thématiques, mais parler d'immigration de la manière dont certains se sont exprimés ce matin me choque et m'écoeure, ce qui me pousse à prendre la parole. Il y a des propos qui engendrent de la confusion, qui la nourrissent, et il ne faudrait pas oublier l'engagement des travailleurs pour la construction, pour l'agriculture.

Finalement, et je serai très brève... J'en perds mes mots tellement je suis écoeurée par ce que j'ai entendu. Vous transmettrez, Madame la présidente, que je souhaite conclure cette prise de parole par mon nom issu de l'immigration: Patricia Rodriguez. Je vous remercie.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. David Martin (Ve). Certains disent que le débat dévie un peu, mais je ne crois pas. En réalité, on est pile-poil sur le bon sujet à propos de cette politique publique G, qui parle de développement du territoire et de logement.

Une voix. C'est exactement ce que je dis !

M. David Martin. J'aimerais réagir aux propos de M. Subilia, vous transmettrez, Madame la présidente - j'ai fait comme il fallait ! Les propos de ma collègue Dilara Bayrak ne visaient pas à critiquer la prospérité économique, mais simplement à mettre en évidence que si on se réjouit d'avoir une économie florissante, qu'on fait une promotion économique à tout-va, qu'on adopte une fiscalité hyper attractive pour les entreprises, eh bien cela crée un développement extrêmement fort, des emplois et donc des besoins en logement, ce qui impacte le territoire. Il faut ensuite assumer cela avec la construction, c'est en l'occurrence le défi qui se pose pour notre agglomération.

A ce sujet, les propos de l'UDC sont absolument incohérents et honteux: incohérents parce que l'UDC est le parti qui soutient le développement économique le plus intense, mais lorsqu'il s'agit d'assumer ses conséquences dans le domaine de la construction, alors il n'y a plus personne; honteux - et je rejoins certains de mes préopinants - car c'est absolument indigne de ce parlement de prononcer certains des propos tenus précédemment. Certains membres du PLR et du Centre doivent être aujourd'hui dans leurs tout petits souliers, car l'alliance de droite se révèle à son grand jour; certains ici doivent être bien embêtés d'en être arrivés là. Je vous remercie. (Applaudissements.)

M. Sylvain Thévoz (S). J'aimerais rappeler à l'UDC que durant la crise du covid, nous avons vu des dizaines de milliers de personnes sortir de terre, celles et ceux que personne ne voulait voir, celles et ceux qui font tourner l'économie domestique et l'économie de l'hôtellerie, celles et ceux que l'UDC traite aujourd'hui avec mépris. L'économie a repris, ces personnes sont redevenues moins visibles. Pourtant, elles sont là, elles ont des besoins pour se loger, pour se soigner. Ce sont elles qui, en partie, font tourner l'économie. L'UDC détruit l'économie, détruit la Suisse ! Moi, je suis fier d'être suisse et de la tradition humanitaire. J'étais fier des trains qui partent et qui arrivent à l'heure. Aujourd'hui, à cause de l'UDC, la tradition de la Suisse est en train d'être mise à mal, que ce soit celle de sa ponctualité ou de son droit humanitaire. Honte à l'UDC ! A minima, excusez-vous, ce sera la moindre des choses ! Merci. (Applaudissements.)

M. Skender Salihi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais juste intervenir parce que je me sens un peu concerné par les propos de l'UDC. Je tiens à rappeler à l'UDC qu'aujourd'hui, l'immigration n'est pas un crime, mais plutôt une source de richesse culturelle et de talents pour notre pays. D'ailleurs, certains des talents suisses les plus remarquables ont des origines diverses, contribuant ainsi à la prospérité et au succès de notre pays. Alors vous rappellerez à l'UDC, Madame la présidente, qu'il est crucial de comprendre que l'immigration n'est pas seulement bénéfique quand Shaqiri marque un but pour la Suisse ! Merci. (Applaudissements.)

Mme Caroline Renold (S). Je serai très brève, simplement une minute de «fact checking»: selon l'Office fédéral de la statistique, les demandes de logement sont en hausse principalement en raison de l'augmentation des ménages - donc de leur individualisation -, du vieillissement de la population et de l'augmentation des ménages à une personne chez les jeunes, beaucoup plus qu'en raison de la migration. Selon les statistiques de l'OFS, c'est 48% en raison de l'individualisation et 44% en raison d'une migration, un pourcentage composé en grande partie de la migration dont parle le PLR. L'UDC ferait donc peut-être bien de s'intéresser à la question du vieillissement, qui fait rage sur ses bancs. Je vous remercie. (Rires. Applaudissements.)

M. Yves Nidegger (UDC). Je tiens à prononcer quelques mots en tant que chef du groupe du parti que vous insultez depuis maintenant une bonne vingtaine de minutes au motif que certains sujets seraient tabous, mais c'est de ça qu'il s'agit, chers collègues...

La présidente. Merci de vous adresser à la présidence. (Exclamations.)

M. Yves Nidegger. ...chers collègues, y compris Madame la présidente ! On a parlé de l'UDC sans arrêt, sans demander à Mme la présidente de transmettre les insultes. Vous me permettrez donc de faire une considération générale sur ce que je viens d'entendre.

Dans le cadre de ce débat budgétaire, il a suffi d'un seul mot pour que la droite et la gauche puissent communier à nouveau dans une saine détestation de l'UDC et se retrouver d'accord sur les fondamentaux de la morale. Il y a un petit problème, les gars, c'est qu'on parle de logement et que le logement, ou la crise du logement, la pénurie de logements ou la cherté du logement, c'est un rapport mathématique entre un nombre de biens et un nombre de personnes qui ont besoin d'y habiter. Dire que la démographie n'a rien à voir avec la question est évidemment une aberration et un aveuglement dont je vous laisse la responsabilité devant les gens qui vous ont élus. Dire que dans la démographie, le facteur de la migration, s'agissant d'une population malthusienne qui ne fait plus beaucoup d'enfants, ne serait pas une question fondamentale à considérer dans le cadre du logement, c'est une autre aberration, chers collègues.

La présidente. Je vous le redis, merci de vous adresser à moi. Je transmettrai avec plaisir vos propos.

M. Yves Nidegger. Alors c'est une autre aberration, Madame la présidente... (Rires.) ...vous transmettrez à mes collègues.

Une voix. Vous transmettrez à l'ensemble de la salle !

M. Yves Nidegger. Voilà. Nous nous sommes beaucoup demandé s'il était utile de participer à cette mascarade démocratique qu'est l'adoption d'un budget, ritualisée en décembre au milieu des manifs de fonctionnaires... Enfin, on reparlera du calendrier liturgique genevois certainement au troisième débat, mais ok, nous vous avons offert la possibilité de détester avec vigueur et vocalement de manière très forte quelqu'un qui vous sert de bouc émissaire parce que vous ne voulez pas, chers collègues - Madame la présidente, vous transmettrez -, vous intéresser de manière objective à un truc aussi bête que les chiffres: combien de logements, combien de personnes ayant besoin de logement et quels sont les paramètres.

Faire de l'immigration une espèce de tabou moral ou une espèce de totem, libre à vous - Madame la présidente, vous transmettrez. C'est complètement aberrant, c'est complètement irresponsable et ça fait partie de cet exercice alibi qu'on appelle l'adoption du budget à Genève en décembre, qui est une farce démocratique. (Applaudissements.)

M. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, merci pour ce débat relativement large et qui à mon sens - ça a été dit - met le doigt sur la question de fond, qui est effectivement celle de la croissance. Bien sûr, les propos de M. Nidegger tenus à l'instant sont justes: nous sommes dans une logique de croissance économique, cette dernière est soutenue par une croissance démographique et, ma foi, comme le disait un magnifique auteur suisse dans les années 60, 70, on voulait des bras et on a eu des hommes. Ces migrants, ce sont des êtres humains qui ont besoin de se loger, de se nourrir, de se scolariser, de se divertir - et de vivre, tout simplement.

C'est là que se trouve une intrication méconnue, ou en tout cas qui pose un problème intellectuel à l'UDC, parce que c'est un phénomène de cascades de causes à effets: il y a d'abord une dynamique économique qui a besoin de migrants. Une grande partie des gens qui viennent à Genève, 40% de la population migrante qui arrive dans notre canton, vient pour y travailler. On ne peut pas migrer directement dans l'assurance sociale, à l'Hospice général. Il n'y a que les Suisses de l'étranger qui peuvent se retrouver directement à l'aide sociale. Pour le reste et pour la grande majorité des personnes, on arrive dans le cadre des lois suisses migratoires avec un permis de travail, notamment sur la base des accords de libre-échange entre la Suisse et l'Europe. Dans d'autres cas, comme celui du député ou le mien, les personnes viennent de pays tiers par des voies plus difficiles: soit par la migration clandestine - ces personnes travaillent également, un clandestin ne reçoit par définition aucune aide sociale, il travaille -, soit par le biais de l'asile, qui représente 1% de la part migratoire et qui nécessite effectivement un processus d'intégration, mais qui permet ensuite de rejoindre à travers ce processus la filière normale de la migration, de la scolarisation et du travail.

Pourquoi est-ce que je le dis ? Parce que dans le fond, aujourd'hui on le voit, Mesdames et Messieurs les députés, il y a 41% d'étrangers au sein de la population genevoise, mais dans la population active, à savoir celles et ceux qui font tourner l'économie, ce pourcentage est de 50%. Cela renvoie à d'autres chiffres, ceux de l'AVS, de toute l'assurance sociale et même de la structure fiscale de notre canton et de notre pays, qui tiennent plus à la migration qu'aux Suisses. (Applaudissements.)

Le think tank Avenir Suisse, qu'on ne peut pas vraiment catégoriser comme gaucho, démontrait il y a une quinzaine d'années que les gains de productivité de notre économie sont liés dans 90% à 95% des cas à la migration ou à l'échange avec l'étranger. Le modèle de prospérité de la Suisse est celui de l'ouverture et de l'échange. L'histoire de notre canton... Mesdames et Messieurs, nous venons de fêter l'Escalade: que s'est-il passé au XVIe siècle ? L'histoire de notre canton a été d'ouvrir ses portes aux réfugiés protestants. La population de la ville de Genève a doublé, passant de 10 000 à 20 000 habitants, avec des surélévations qu'on peut encore voir au Bourg-de-Four. Effectivement, ces phénomènes d'arrivées de migrants créent des pressions sur le territoire et des défis très matériels et concrets en matière de construction. Mais ce qui est difficile à entendre, c'est qu'un parti comme l'UDC préconise une politique économique très attractive - et c'est son droit - en proposant une fiscalité, par exemple pour les multinationales, très basse; cela fait de la Suisse une place financière et économique forte, les entreprises recrutent à l'international et font appel à des étrangers parce que le marché de l'emploi en Suisse ne suffit pas; et ensuite, on s'émeut dans les mêmes rangs qu'il faille du logement pour tous ces gens. Il y a une incohérence intellectuelle crasse de la part de l'UDC, qui est vraiment problématique dans le débat que nous avons.

Cette incohérence se manifeste de manière plus large. J'ai entendu M. Desfayes me dire qu'il fallait avoir davantage de courage pour construire davantage; c'est bien, d'habitude, on me dit: «Hodgers bétonneur», donc je suis au moins content d'entendre parfois que je ne construis pas assez. M. Falquet l'a dit, de même que M. Florey: «Non, non, non, on ne veut pas vous donner ces postes, le but est de ralentir l'acte de construire parce qu'on construit trop.» Puis le président de l'UDC dit: «M. Desfayes a raison, je suis d'accord avec lui.» Donc le président de l'UDC est d'accord avec M. Desfayes, qui dit que le département ne construit pas assez, mais n'est pas d'accord avec ses propres membres, qui disent que le département construit trop. Voilà, Mesdames et Messieurs, un bon résumé de la position de l'UDC.

Je vous rassure, Mesdames et Messieurs les membres de la majorité de droite plurielle, vous êtes tous d'accord pour refuser ces cinq postes, qui... Pardon de parler de budget, Madame la présidente, je sais que c'est un peu hors sujet ! (Rires.) Ces cinq postes sur la politique publique G, Mesdames et Messieurs, que sont-ils ? Ils sont des ajouts çà et là suite à un travail d'allocation interne qui a été mené - cela ressortait des propos de M. Zweifel hier soir, propos que je partage pour le coup, car ils sont très pertinents pour la politique publique dont nous débattons. Pourquoi ? Car il y a beaucoup de projets qui se terminent et qui recommencent. Si vous voulez, il y a un énorme travail d'allocation interne que vous ne voyez pas ou peu en tant que députés, mais, ma foi, il n'y a pas ici de demande de postes supplémentaires: il y a bien des projets qui se terminent et on réaffecte des collaborateurs sur de nouveaux projets, mais il y a çà et là des goulets d'étranglement dans le processus administratif. Il s'agit bien évidemment du PAV, qui est en train d'exploser avec un volume de production, s'agissant de la planification, extrêmement important et pour lequel deux postes sont demandés. Plus particulièrement, un poste d'auxiliaire est aussi demandé à l'office cantonal du logement puisque nous n'arrivons pas à réduire le volume des autorisations de construire en matière de logement et de logement social, ce qui crée du retard. Il s'agit d'un poste d'auxiliaire, qui va donc tomber, ce n'est pas un poste fixe. Cela démontre le travail fin effectué au niveau de la politique publique G au sein du département du territoire pour ne demander que le strict minimum.

Ce strict minimum, je le regrette, une majorité de ce parlement semble continuer à le refuser, ce qui donnera raison finalement à M. Falquet et consorts sur leur volonté de ne pas donner de moyens à l'Etat pour l'acte de construire. Mesdames et Messieurs, le refus de ces postes entraînera bien évidemment des délais plus longs en matière d'autorisations de construire, mais pour autant, nous continuerons à avoir une politique de l'aménagement basée sur le développement, mais un développement qualitatif, avec des espaces verts, avec une mixité sociale issue de l'accord sur le logement et une politique d'accueil qui se traduit également par des infrastructures. Je vous remercie. (Applaudissements.)

La présidente. Merci. Nous allons voter sur les amendements relatifs à la politique publique G «Aménagement et logement». Le premier d'entre eux est déposé par Mme Marti et cosignataires et vise une augmentation de 193 508 francs. Je vois que le vote nominal a été demandé. (Appuyé.)

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 63 non contre 32 oui (vote nominal).

La présidente. L'amendement suivant, du Conseil d'Etat, porte quant à lui sur un montant de +77 924 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 63 non contre 33 oui. (Commentaires pendant la procédure de vote.)

La présidente. Les cinq amendements restants proviennent tous de Mme Marti et cosignataires. Le premier prévoit +50 000 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 63 non contre 31 oui.

La présidente. L'amendement suivant porte sur un montant de +7399 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 33 oui.

La présidente. Nous enchaînons avec l'amendement qui prévoit un montant de +347 418 francs.

Une voix. Vote nominal ! (Plusieurs mains se lèvent.)

La présidente. Je vois que vous êtes soutenue, nous procédons donc au vote nominal.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 33 oui (vote nominal).

La présidente. Nous poursuivons avec l'amendement portant sur une augmentation de 6770 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 65 non contre 33 oui.

La présidente. Le dernier amendement sur cette politique publique prévoit +47 396 francs.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 64 non contre 32 oui.

La présidente. Nous avons terminé les votes sur les amendements. Je soumets donc à votre approbation la politique publique G dans son ensemble.

Mise aux voix, la politique publique G «Aménagement et logement» est adoptée par 52 oui contre 12 non et 33 abstentions.

Votes nominaux relatifs à la politique publique G

La présidente. J'ouvre le débat sur la politique publique H «Sécurité et population». La parole va à M. Yves Nidegger.

M. Yves Nidegger (UDC). Merci, Madame la présidente. L'UDC continuera à s'opposer à toutes les propositions visant à aggraver le déficit, donc la dette. Je rappelle au passage que la dette, c'est de l'impôt qu'une génération n'a pas envie de payer elle-même pour ses dépenses et qu'elle balance à la génération d'après, qui, en plus des impôts nécessaires à ses propres dépenses, devra se coltiner ceux dont nous n'avons pas voulu nous acquitter. Voilà ce qu'est la dette, il faut le dire, il faut le répéter, et la dette est engendrée par le déficit.

C'est non seulement immoral, mais également suicidaire. C'est immoral, parce que nous sommes la génération qui avons hérité de la fortune du travail de nos ancêtres et qui allons laisser un trou à nos propres enfants; c'est suicidaire, parce qu'une société ou une collectivité humaine qui se préoccupe davantage du présent que du futur est morte.

Nous refuserons dès lors toute augmentation, quelles qu'en soient les excuses, quels qu'en soient les prétextes, y compris en ce qui concerne cette question qui fait très peur aujourd'hui, et à juste titre, à savoir le crack - et la prétendue lutte là contre. Voilà des mois, des mois et des mois qu'on parle, au sein des commissions, dans la presse et partout, de cette épouvantable chose que l'on a vue arriver, qui est la mise en place d'un modèle d'affaires sur la base d'une drogue hyperaddictive et très bon marché destinée à ruiner les sociétés occidentales.

En effet, le phénomène est surtout occidental, il ne faut pas se le cacher: ce sont des mafias européennes qui, à un certain moment, on le sait, ont investi les recettes d'activités illicites très longuement capitalisées dans la production de cette substance; il s'agit d'un modèle d'affaires international, quasiment franchisé. Quand vous êtes à Rabat, Maroc, celui qui vous propose du crack dans la rue provient d'un pays d'Afrique de l'Ouest bien connu; quand vous êtes à Madrid, celui qui vous propose du crack dans la rue provient du même pays d'Afrique de l'Ouest bien connu; quand vous êtes à Genève, idem; à Amsterdam, pareil; à Stockholm aussi. On est face à un modèle d'affaires complètement organisé et, pour y parer, on dispose d'une boîte de sparadraps.

Alors le sparadrap permet de mobiliser un demi-million par-ci, un autre demi-million par-là. Mes chers collègues, ces querelles byzantines - comme celle sur le sexe des anges, lorsque les troupes ottomanes faisaient le siège de la ville - pour savoir si les quatre piliers sont bien équilibrés ou pas tout à fait, c'est complètement ridicule. Nous considérons que la question du crack n'est absolument pas engagée comme une politique publique telle qu'elle devrait l'être, parce que ça se deale à un niveau international, national; nous considérons que ce modèle d'affaires est fondé sur la mafia, sur la contrebande, mais aussi sur l'immigration illégale, parce que le service de vente et d'après-vente n'est pas tout à fait incolore.

Et donc nous considérons que les remèdes proposés ici ne sont que des «peanuts», des alibis pour gonfler un peu plus l'autorisation de dépenses que l'on appelle budget annuel et qui sera de toute façon dépassée, parce que le Conseil d'Etat s'assiéra sur votre budget. Pour cette raison, nous rejetterons les augmentations de charges, y compris pour cette pseudo-politique de lutte contre le crack, lequel, à juste titre, fait peur à la population, mais n'est absolument pas abordé comme le problème qu'il est par ce parlement et ce gouvernement.

Mme Xhevrie Osmani (S). Il n'aura échappé à personne que l'UDC a toujours la bonne recette pour ne jamais rien faire. On ne comptera donc pas sur ses membres, on le sait déjà !

Mesdames et Messieurs les députés, 2024 sera l'année du développement de plusieurs axes: la cybersécurité, qui a déjà été évoquée hier soir - il y a des attentes importantes -, les mesures pour les victimes ou encore le renforcement de la prévention. Mais ce sera aussi une année charnière pour l'organisation policière, puisque la gouvernance de la gendarmerie et la formation cantonale à Genève seront mises en place. La thématique de la violence domestique, qui était jusqu'à récemment encore une priorité à Berne avant d'être placée dans un plan d'économies, fera également partie des travaux de l'an prochain.

En matière de détention, nous resterons extrêmement attentifs aux mesures de peines alternatives et de réinsertion professionnelle qui ont longtemps été plébiscitées dans ce canton et sont très attendues par une partie du parlement. Dernièrement, le département, sous la conduite de Mme Kast, est venu nous présenter les retours d'un projet pilote lancé précisément pour promouvoir les travaux d'intérêt général, qui, je le rappelle, selon une comparaison intercantonale, sont beaucoup trop faiblement envisagés à Genève.

Mesdames et Messieurs les députés, le fléau du crack fait des ravages et dépasse déjà les autorités de plusieurs villes européennes. Nous devons soutenir un plan fort et coordonné sur plusieurs domaines: sanitaire, social et sécuritaire. Pour ce faire, nous devons nous donner les moyens de répondre non seulement à l'urgence, mais également aux défis des années à venir, et cela ne pourra pas se faire si on taille dans les effectifs prévus pour la sécurité. La sécurité ne peut pas constituer le parent pauvre de cette action qui est transversale.

Enfin, puisque ce ne sont pas les seuls postes qui ont été coupés, je tiens à souligner l'écart assez hypocrite qui a été opéré par l'UDC. Nous avons été occupés par la LPol pendant presque trois ans, et la police nous a clairement indiqué qu'elle n'arrive plus à tout gérer, que ce soit au sein de la police judiciaire, du personnel administratif ou de la gendarmerie. Un député UDC n'a eu de cesse de nous rappeler qu'une seule patrouille circulait la nuit sur la rive droite. Puis, son collègue à la commission des finances a affirmé que les partis rencontrent régulièrement les syndicats de police et qu'il les a toujours entendus dire qu'il ne fallait pas d'ETP supplémentaires, mais bien une réorganisation des postes existants pour avoir plus de présence sur le terrain et moins dans l'administratif. Alors je ne sais pas, il a peut-être discuté avec les syndicats de la police argovienne, mais en ce qui concerne cette patrouille, je ne suis pas convaincue qu'entre 22h et 6h du matin, le personnel administratif qu'il sollicite soit plus important que le personnel destiné au terrain. Mesdames et Messieurs, je vous invite à accepter les amendements et vous remercie de votre écoute. (Applaudissements.)

Mme Dilara Bayrak (Ve). Je suis souvent - très souvent, beaucoup trop souvent - consternée par la défiance du parlement envers le Conseil d'Etat, lequel, notamment dans le cadre du budget, ne fait que concrétiser les projets que nous lui avons demandé de mettre en place. Ceux qui me connaissent et travaillent avec moi en commission savent que je cherche généralement le consensus, mais là, il faut dire les choses, et il y a plein de choses à dire sur le sujet, puisque vous êtes incohérents... Pardon, Madame la présidente: vous transmettrez - je vous voyais déjà appuyer sur votre micro - qu'il y a une certaine incohérence.

Je ne parlerai pas d'amnésie, je ne parlerai pas d'hypocrisie, Mesdames et Messieurs, vous tirerez les conclusions qui s'imposent. Je n'évoquerai pas non plus les détenus qui recevront moins à manger en raison de vos coupes; je ne mentionnerai pas le plan crack que le Conseil d'Etat a instauré parce que nous le lui avons demandé, parce que nous nous sommes indignés.

Et puis je ne vous parlerai pas non plus des flyers que nous avons reçus hier en entrant au parlement, chères et chers collègues, sur les associations de terrain, notamment Première ligne, qui sollicitent des moyens, qui ont besoin d'être écoutées. Je rappelle à cet égard que Première ligne n'incarne pas l'ensemble des quatre piliers, mais uniquement l'un des volets de la stratégie. Or nous ne pouvons pas tabler sur une seule organisation pour mener notre politique de lutte contre les addictions au sens large.

J'aimerais vous poser la question suivante, chères et chers collègues: ne nous sommes-nous pas révoltés lorsque nous avons appris que Première ligne avait cessé d'accueillir temporairement les usagers du crack ? Je pense au PLR - vous transmettrez, Madame la présidente -, notamment certains de ses membres avec qui j'ai discuté, par exemple M. Pierre Nicollier - vous transmettrez encore, Madame la présidente. Nous avons interpellé le Conseil d'Etat, nous avons exigé des suites, nous avons réclamé une action ambitieuse pour la prise en charge de l'addiction au sens large - il n'y a pas que le crack -, et aujourd'hui, on refuse des postes pour la mise en oeuvre de ces plans que nous avons tant revendiqués.

Les projets présentés par le Conseil d'Etat qui ont été rappelés par ma collègue Xhevrie Osmani ne sont pas ambitieux, ils ne représentent même pas ce que nous avons voté au sein de ce parlement. Ces mesures constituent des pansements - je reprends la métaphore utilisée par M. Nidegger - sur des blessures bien plus profondes, des pansements insuffisants, ce dont nous avons conscience quand nous en discutons en commission. Quand nous débattons en commission, nous arrivons à aboutir à des solutions audacieuses et courageuses - et encore ! -, mais quand il faut voter et les concrétiser, il n'y a plus personne.

Je me demande si certains de mes collègues ici - vous transmettrez, Madame la présidente - se rendent compte de l'importance des coupes effectuées par la commission des finances. Nous avons reçu les fascicules d'amendements qui précisent quels postes ou quels montants doivent être réintroduits. J'ai l'impression que ceux qui tiennent les propos les plus motivés, les plus passionnés en commission en vue de résoudre ces problématiques ne sont plus là quand on en arrive à une mise en oeuvre concrète, à un vote des budgets pour satisfaire ces ambitions. Pourquoi ? Pourquoi ? Aucune raison ne le justifie, si ce n'est que vous pouvez mener une communication extensive et vous autoféliciter du fait que vous avez su - Madame la présidente, vous transmettrez à l'ensemble de ce parlement - identifier les problèmes. Cependant, vous ne voulez pas les régler.

Je vous laisserai, Mesdames et Messieurs les députés, répondre à cette question, je vous laisserai prendre vos responsabilités, car identifier les problèmes ne suffit pas, il faut les résoudre, et pour cela, il faut des postes, il faut des budgets, il faut soutenir les associations qui nous informent qu'elles ont besoin de moyens; il faut les soutenir pas seulement quand vous les entendez à la commission de contrôle de gestion ou à celle de la santé, mais aussi à la commission des finances et en séance plénière lorsque nous votons les budgets. Merci. (Applaudissements.)

M. Charles Poncet (UDC). Quelques très brèves observations, Madame la présidente, si vous me le permettez. Notre collègue Nidegger évoquait tout à l'heure le fait que le remède proposé ici constitue un sparadrap; si vous le voulez bien, mes chers collègues, je voudrais m'extraire une seconde du sparadrap pour vous parler du vrai problème. Le vrai problème, ce ne sont pas les malheureux qui, victimes du crack, essaient de s'en sortir ou n'y arrivent pas et qu'on peut aider ou ne pas aider au gré des sensibilités dans un débat comme celui-ci.

Le vrai problème, mes chers collègues, et j'ai eu l'occasion de m'en entretenir avec Mme la conseillère d'Etat chargée du département qui nous occupe aujourd'hui, laquelle m'a prêté une attention que je vous prierai de qualifier, Madame la présidente, de perfectible - bienvenue, mais perfectible -, le vrai problème, c'est que nous sommes face à une organisation criminelle qui s'appelle la 'Ndrangheta, à savoir la mafia calabraise.

La mafia calabraise a le monopole - le quasi-monopole - de l'importation de la cocaïne en Europe, et cela représente un chiffre d'affaires de l'ordre de 50 milliards par année. En parallèle, la mafia sicilienne, la Cosa Nostra, a été atteinte, attaquée, endommagée; son dernier «chef», entre guillemets, Matteo Messina Denaro, qui s'était caché chez lui pendant vingt-cinq ans sans que personne n'arrive à l'arrêter - ce sont les joies de la Sicile -, quand il a été rongé par le cancer, est allé se faire soigner par l'Etat italien, puis est mort de sa maladie avec un patrimoine personnel de l'ordre du milliard. Voilà qui vous donne une idée de ce à quoi nous sommes confrontés.

Or, mes chers collègues, ces organisations en général et la 'Ndrangheta en particulier ne sont plus des groupes criminels à la façon des films que nous connaissons ou des romans de Mario Puzo, ce sont des organisations de recyclage. Le risque actuellement en Suisse, en Allemagne, en Hollande, dans les pays économiquement développés, c'est l'infiltration par le biais de l'acquisition de petites et moyennes entreprises: si vous êtes un chef d'entreprise en difficulté, tout à coup arrive le chevalier blanc - qui n'aura d'ailleurs probablement même pas un accent italien - et vous propose le moyen d'en sortir. Voilà le vrai problème. Certes, nous n'avons pas à nous en occuper maintenant, mais je me permets d'attirer votre attention là-dessus.

Je vous donne un seul exemple: un procureur italien héroïque - et je pèse mes termes - nommé Gratteri vient de requérir, dans le procès de Catanzaro, soit le procès contre la 'Ndrangheta, quatre mille années de prison contre une centaine de mafieux de la famille Mancuso - parce que la 'Ndrangheta présente cette caractéristique d'être organisée par cellules familiales, ce qui la rend extrêmement difficile à pénétrer. Lui-même soutient: «Nous allons en envoyer une cinquantaine en prison, cela ne changera rien, les choses continueront.»

L'enjeu, c'est de nous assurer que ces organisations criminelles n'arrivent pas à pénétrer le tissu économique genevois, parce que si elles y parviennent, un jour ou l'autre, vous vous retrouverez avec des soumissions pour le nettoyage des écoles faites par des entreprises de nettoyage contrôlées par la 'Ndrangheta. Je crois que nous sommes unanimes à vouloir éviter cela. Alors votez ce que vous voulez sur cette politique publique ponctuelle, si vous me permettez de le dire, mais nom d'une pipe, gardez à l'esprit que nous sommes en présence d'un danger majeur dans ce domaine. Je vous remercie. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo.

La présidente. Sur ces propos, nous allons marquer une pause. Nous reprendrons les travaux sur la politique publique H «Sécurité et population» à 10h... (Protestations.) 10h05 ! (Applaudissements.)

La séance est levée à 9h50.