Séance du
vendredi 1 septembre 2023 à
14h
3e
législature -
1re
année -
3e
session -
18e
séance
PL 12530-B
Premier débat
La présidente. Nous passons au point suivant de l'ordre du jour. Le rapport de majorité de M. Bertrand Buchs est repris par M. Guinchard. Le groupe Ensemble à Gauche ne faisant plus partie de ce Grand Conseil, le rapport de minorité de Mme Jocelyne Haller ne sera pas présenté. Nous sommes en catégorie II, quarante minutes. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité ad interim. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs, chères et chers collègues, à l'origine de ce texte se trouve un projet de loi qui proposait de permettre l'assistance au suicide dans les EMS, les hôpitaux et les cliniques. Les plus anciens d'entre nous se souviennent qu'il avait été déposé par Mme la députée Salima Moyard, du parti socialiste. Il reprenait les dispositions d'un projet de loi vaudois.
Le canton de Vaud avait été confronté à une situation extrêmement délicate: un suicide assisté dans une caravane sur le parking d'un EMS, simplement parce que la direction de l'EMS avait refusé la prise en charge par Exit dans ses murs, alors même que le résident ou la résidente - je ne sais plus - était membre d'Exit et avait décidé en toute connaissance de cause de faire appel à cette association pour disposer d'une fin digne. Exit avait alors alerté le Grand Conseil genevois de situations similaires dans notre canton, mais les travaux en commission, avec de nombreuses auditions, avaient très clairement démontré qu'aucun problème n'était survenu ici, aussi bien dans les EMS que dans les hôpitaux et les cliniques. Il est vrai qu'il y a bien des années, la situation était un petit peu différente, et il est vrai aussi qu'il est difficile de demander à des professionnels qui ont pour vocation de soigner de tout à coup accompagner des personnes qui veulent partir au moyen d'un suicide assisté.
Lors du vote du projet de loi de Mme Moyard, le PLR avait fait adopter un amendement, l'article 12A instituant une commission de surveillance en matière d'assistance au suicide. Pour des raisons expliquées à l'époque par M. le conseiller d'Etat Poggia, que la majorité de la commission de la santé a rejoint, cette instance n'a pas de raison d'être. Notre commission propose donc l'abrogation de cet article 12A, et a démontré également que l'article 39A, qui lui est lié, n'a plus de raison d'être. La majorité de la commission a donc désiré modifier la loi sur la santé en abrogeant ces deux articles, et vous demande de faire de même. Je vous remercie.
M. Florian Dugerdil (UDC). Chers collègues, je remercie le rapporteur de majorité pour la qualité de son rapport. Il permet ainsi à de nouveaux députés, tels que moi, de bien cerner les enjeux du projet de loi ici discuté. Au vu des constatations et des dispositions prises à la suite des auditions des diverses parties, mais aussi au vu des conclusions du rapport de majorité, le groupe UDC soutiendra ce projet de loi.
Mme Caroline Marti (S). Pour rappel, ce projet de loi déposé par le Conseil d'Etat proposait de supprimer l'article 12A de la loi sur la santé, qui instituait une commission de surveillance en matière d'assistance au suicide. Pour différentes raisons évoquées par certains, le Conseil d'Etat considérait que cette commission ne fonctionnait pas correctement, ce à quoi une large majorité, voire l'unanimité des commissaires se sont ralliés.
Cela étant, dans le cadre des travaux de commission, restaient un certain nombre d'interrogations et de craintes auxquelles il s'agissait de répondre, notamment les questions relatives à l'égalité de traitement face à la possibilité de faire appel au suicide assisté, qu'on réside à domicile ou en EMS, mais également le besoin d'une formation à l'accompagnement au suicide assisté pour les personnes qui suivent celles et ceux qui font ce choix. Ce sont des sujets importants, délicats, nécessitant des travaux qui respectent la dignité que nous impose ce sujet.
Or, nous avons été passablement choqués, consternés même, de voir qu'après des heures et des heures de discussions en commission, une majorité de commissaires a décidé en fin de séance, sur un coin de table, je dirais, d'abroger purement et simplement l'article 39A de la loi sur la santé, intégré quelques années plus tôt par ce Grand Conseil sur proposition d'un texte déposé par le parti socialiste afin de garantir l'accès au suicide assisté aux personnes qui résident en EMS. La suppression de cette disposition, faite sur un coin de table, comme je le disais, n'est pas acceptable, à notre sens. Il faut qu'on puisse revenir sur cette question, en rediscuter. Probablement que la situation actuelle n'est en effet pas satisfaisante notamment quant au fonctionnement de la commission de surveillance en matière d'assistance au suicide, mais on ne peut pas simplement jeter ainsi le bébé avec l'eau du bain.
C'est pourquoi nous demandons un renvoi en commission de ce projet de loi, ce qui permettra aussi de solliciter de la part du département de la santé et des mobilités qu'il revienne avec des propositions qui, on l'espère, pourront obtenir une majorité solide dans ce Grand Conseil. Nous devons à la population, sur ce sujet particulièrement sensible, de trouver une solution qui convienne au plus grand nombre, et nous devons avoir une majorité appuyée dans ce Grand Conseil. Je vous remercie. (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie. Le rapporteur de majorité souhaite-t-il s'exprimer sur cette demande de renvoi en commission ?
M. Jean-Marc Guinchard (LC), rapporteur de majorité ad interim. Volontiers, Madame la présidente. Je vais être sincère avec ma collègue, Mme Marti: à titre personnel, je n'ai pas assisté aux débats de la commission de la santé, et je n'étais pas à la table sur laquelle a été signé cet accord, ou abrogé cet article; mais j'ai tout de même pris la peine de lire l'ensemble des procès-verbaux, et il me semble, à cette lecture en tout cas, que les travaux ont été assez constructifs. Les conclusions auxquelles est arrivée la commission me semblent correctes. C'est pourquoi je recommande de refuser le renvoi en commission. Je vous remercie.
La présidente. Je vous remercie. Le vote est lancé.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12530 à la commission de la santé est rejeté par 38 non contre 35 oui.
La présidente. Nous continuons le débat. La parole est à Mme Louise Trottet.
Mme Louise Trottet (Ve). Merci, Madame la présidente. Le groupe des Vertes et des Verts regrette profondément le refus du renvoi en commission d'un projet de loi qui, on l'a dit, semble avoir été travaillé un peu rapidement, vu les enjeux. On parle quand même de suicide assisté, on parle d'un sujet qui divise dans notre société, qui peut parfois choquer, un sujet extrêmement sensible et important.
Par exemple, dans la mouture finale de ce projet de loi, sur laquelle nous nous apprêtons à voter aujourd'hui, figure tout de même la notion que les employés d'Exit n'auraient pas besoin d'une quelconque formation particulière, ce qui, à mon sens et au sens des partis de gauche, est très étonnant. Je profite donc de cette prise de parole pour demander à nouveau un renvoi en commission. Il faut que nous puissions en débattre plus sereinement, en prenant un peu plus de temps, en effectuant de nouvelles auditions qui pourraient se révéler nécessaires vu les enjeux. Je vous remercie pour votre attention.
La présidente. Je vous remercie. Nous sommes saisis d'une nouvelle demande de renvoi en commission. Monsieur le rapporteur de majorité, je pense que vous n'avez pas changé d'avis ? (Remarque.) Très bien. Nous votons donc sur cette demande.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 12530 à la commission de la santé est rejeté par 43 non contre 40 oui.
La présidente. Nous poursuivons le débat. La parole est à M. Pierre Nicollier.
M. Pierre Nicollier (PLR). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, je souhaitais simplement mentionner que la loi actuelle entraîne deux poids, deux mesures selon l'emplacement où le citoyen se trouve dans un cas de suicide assisté. Les discussions ont été parfois très émotionnelles. La conclusion était que sortir d'un cadre particulier au canton de Genève pour s'aligner sur la législation fédérale était sans doute la meilleure des options. Je vous recommande donc de soutenir ce projet de loi et de le voter. Merci.
La présidente. Je vous remercie. Il n'y a plus de demande de parole, nous votons donc sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 12530 est adopté en premier débat par 46 oui contre 31 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 12A (abrogé).
La présidente. Mme Haller propose deux amendements dans son rapport de minorité. Le premier est libellé comme suit:
«Art. 39, al. 3 (nouveau)
3 Les bénévoles intervenant dans le processus de fin de vie lors d'un suicide assisté sont au bénéfice d'une formation ad hoc certifiante.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 45 non contre 29 oui et 5 abstentions.
La présidente. Avant de vous soumettre le deuxième amendement, je passe la parole à Mme Caroline Marti pour une minute.
Mme Caroline Marti (S). Merci, Madame la présidente, ça suffira largement. C'est simplement pour préciser que cet amendement, qui figure effectivement dans le rapport de minorité présenté par Mme Haller, propose de réintroduire l'article 39A, supprimé lors du deuxième débat à la commission de la santé. Cet article permet d'assurer l'accès au suicide assisté quel que soit le lieu de résidence, domicile ou EMS. Cette disposition avait recueilli les deux tiers des voix de ce parlement au moment du vote sur le projet de loi qui introduisait cet article. C'est pourquoi je vous recommande d'accepter l'amendement.
La présidente. Je vous remercie. Nous votons sur le deuxième amendement de Mme Haller, qui biffe l'abrogation de l'article 39A, ce qui revient à laisser cet article dans la loi. Vous trouverez la teneur de l'article aux pages 18 et 19 du rapport de minorité.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 44 non contre 34 oui et 4 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 39A (abrogé) est adopté.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12530 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 48 oui contre 33 non et 3 abstentions (vote nominal).