Séance du
jeudi 23 mars 2023 à
20h30
2e
législature -
5e
année -
11e
session -
66e
séance
PL 13182-B
Premier débat
Le président. Nous passons maintenant au PL 13182-B, classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Amanda Gavilanes, qui est toujours remplacée par Mme Nicole Valiquer Grecuccio, à qui je donne la parole.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse ad interim. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai effectivement le privilège de remplacer Mme Amanda Gavilanes, avec d'autant plus de plaisir qu'il s'agit là d'un projet d'aménagement. Le projet de loi 13182 avait déjà fait l'objet d'un premier rapport et les mesures du projet d'agglomération 4 avaient été largement acceptées à la commission des travaux.
Vous vous en souvenez peut-être, ce rapport avait été renvoyé à la commission des travaux pour un examen non pas sur le fond, mais parce qu'il est apparu que la commission n'avait pas pu auditionner deux acteurs majeurs de la mobilité que sont le TCS et Genève mobilité... (Brouhaha. Des députés se tiennent devant le Conseil d'Etat et cachent la vue du président.)
Le président. Excusez-moi, Madame la rapporteure, mais je ne vous vois plus ! (Rires.) Je vous entends à peine et je ne vous vois plus ! Voilà. Vous pouvez poursuivre.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio. Merci, Monsieur le président ! (L'oratrice rit.) La commission des travaux a donc procédé à ces deux auditions complémentaires, afin d'avoir un rapport beaucoup plus complet. Elle a eu le privilège de recevoir le directeur du TCS et la secrétaire patronale de Genève mobilité, qui ont tous deux pu être entendus par le département des infrastructures et confirmer leur adhésion à ce projet d'agglomération 4.
Evidemment, la commission vous recommande à nouveau, dans sa grande majorité, de soutenir ce projet d'agglomération 4, car il correspond à une vision verte, multipolaire et compacte, comme cela nous a été rappelé par le département des infrastructures, mais aussi parce qu'il met en relation des actions de proximité, dans l'intérêt des habitantes et habitants de ce canton, et des ambitions également transfrontalières pour répondre au problème de Genève et de sa région.
Lors de cette audition, la commission des travaux a également pu entendre le conseiller d'Etat, M. Serge Dal Busco, qui nous a annoncé avec bonheur que le Conseil fédéral avait adopté dans son message le PA 4 (ces fameuses mesures du projet d'agglomération 4) et que surtout, surtout, tous les éléments concernant Genève y figuraient. C'est une raison de plus qui a poussé la majorité de la commission des travaux à accepter ce projet de loi, et nous vous invitons à faire de même. Je vous remercie.
M. Jacques Blondin (PDC). Je n'ai pas grand-chose à ajouter au rapport qui vient d'être présenté, tant il est complet et reflète les discussions de la commission. On aurait pu voter ce projet de loi le 16 décembre, ce serait déjà réglé. Cela a été dit, on a demandé des informations complémentaires. C'est surtout le TCS qui a été auditionné. Lors de l'audition, nous avons obtenu toutes les informations qui nous permettaient de nous conforter dans les préavis positifs qui concernaient le projet de loi.
Cela vient d'être dit, il s'agit du PA 4, cela veut dire qu'il y a eu avant les PA 1, PA 2, PA 3. Il y a une logique à suivre cela et il y a de l'argent - de l'argent bernois, suisse, comme vous voulez - à récupérer. Entre-temps, il nous a été dit que ces 83 millions que la Confédération mettait à disposition du canton de Genève étaient acquis. C'est donc une bonne chose. Et, sans vouloir répéter tout ce qui a été dit, avec la confirmation des usagers et des partenaires tels que Genève mobilité et le TCS, je vous recommande d'accepter ce projet de loi, qui, je répète, aurait pu l'être déjà le 16 décembre. Merci.
Mme Francine de Planta (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, vous l'avez compris, en procédant à ces auditions complémentaires, la commission des travaux a été totalement rassurée par le TCS et Genève mobilité, qui ont tous deux dit le plus grand bien de ce PA 4. Il s'agit d'un projet multimodal, avec une cohérence d'ensemble. Le timing est important, vous l'avez aussi compris. C'est un message clair, un signal fort pour la Confédération, avec ces 56 mesures qui ont toutes été détaillées et analysées devant la commission. Genève a tiré les leçons des précédents plans d'agglomération, qui étaient moins mûrs et moins soutenus par la Confédération. Il ne faut pas rater le PA 4. Ce projet de loi est indispensable au développement genevois et à sa dimension transfrontalière. Il faut l'accepter, comme le recommande la commission. Je vous remercie. (Commentaires.)
Une voix. Bravo !
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, encore une fois, nous sommes extrêmement dubitatifs... (Exclamation.) ...quant à ces projets d'agglomération.
Cela fait vingt ans - vingt ans ! - que la Confédération nous a recommandé... Elle verse de l'argent, c'est très bien, mais pour organiser notre bassin de vie ! Nous sommes quasiment un million, même plus qu'un million, à vivre dans cette région, et malheureusement, notre développement ne correspond pas aux investissements que nous y avons consacrés.
Alors je suis bien d'accord, il y a eu un référendum qui nous a empêchés de construire des parkings relais hors du canton. Tout cela a été une entrave, par exemple sur la question du trafic. Le trafic automobile... Cela fait vingt ans que, d'abord 70 000, ensuite 80 000, maintenant 110 000 voitures passent les frontières - et je ne parle pas des personnes, parce que c'est au-delà de l'imaginable ! 600 000 personnes viennent le matin et repartent le soir ! Je n'ose pas imaginer - enfin, on imagine très bien, on voit déjà quel barnum fait un stade de foot qui se remplit à 50 000 personnes, et on est dans cette situation-là.
Par conséquent, on court toujours après l'organisation de notre région. C'est bien, nous allons soutenir ce projet d'agglomération 4, mais il faut savoir qu'un jour ou l'autre - nos concitoyennes et concitoyens le réclament -, il faudra que des décisions soient prises pour essayer de pondérer le développement de notre canton et de faire en sorte qu'il soit plus qualitatif que quantitatif. Accueillir des multinationales qui... On accueille des pratiques internationales qui ne sont pas recommandables.
Nous soutiendrons donc ce plan d'agglomération, parce que, c'est vrai, il faut structurer notre région, il faut avoir une démarche internationaliste, si j'ose dire. (Remarque.) Mais de là à donner un blanc-seing à ce projet d'agglomération 4 sans remarquer ce que je viens de dire, ce serait abuser de la crédulité de nos concitoyennes et concitoyens, d'autant plus que ce projet d'agglomération 4 va repasser une fois ici: à chaque projet - et cela sera soumis à référendum -, notamment le pont de Lancy ou d'autres gros aménagements, nous aurons l'occasion de nous prononcer sur cette question-là, et j'entends bien, au moment de l'agrandissement à quatre voies sur le pont de Lancy, revenir sur cette question. Merci de votre attention.
M. François Baertschi (MCG). Ce projet d'agglomération, comme les précédents, est un marché de dupes. C'est un marché de dupes, parce que nous perdons le contrôle démocratique. Nous perdons la souveraineté de Genève. Nous perdons toutes les possibilités que nous laisse le contrôle démocratique par le référendum, en ayant un système qui est une sorte de, comment dire, de mélange de salade russe, je ne sais pas, quelque chose de tout à fait incontrôlable. (Commentaires.) C'est quelque chose de tout à fait incontrôlable que nous ne voulons pas. Nous ne voulons pas que ce soit Paris et Macron qui décident ! Ce sont Genève et les Genevois qui doivent avoir la priorité, les citoyens genevois - qui d'ailleurs, actuellement, sont noyés par la vague frontalière. (Exclamations.) Il faut résister à tous les niveaux. Il faut résister, face à l'arrivée massive à l'Etat de Genève de frontaliers dans la fonction publique, que tous les partis ont laissé d'une manière ou d'une autre entrer et qui se gaussent en permanence du MCG, qui ose attaquer l'arrivée massive des frontaliers à tous les niveaux. Mais nous ne voulons pas que Genève disparaisse ! Genève est une tête d'épingle sur une carte de géographie ! Cette tête d'épingle doit pouvoir vivre et ne pas être complètement submergée par la vague de la France, par la Suisse qui nous abandonne de manière dramatique. Ce qui est en train de se passer est véritablement un scandale. (Remarque.) Il faut s'opposer de toutes nos forces à ce projet d'agglomération et à cette destruction de la souveraineté genevoise. Au secours, Jean-Jacques Rousseau, reviens !
Une voix. Il s'est tiré ! (Rires. Commentaires.)
M. David Martin (Ve). Ce financement pour le projet d'agglomération est extrêmement important. Il comporte de très nombreuses mesures, en particulier pour les pistes cyclables, des voies vertes, des passerelles, de nouveaux espaces publics, le développement des transports publics - toute une série de mesures très importantes pour le programme des Verts.
Il est aussi important de rappeler que ce projet est avant tout un moyen, Messieurs du MCG, d'amener des fonds et des financements fédéraux pour Genève et pour le canton - très majoritairement pour le canton.
Ensuite, ce projet d'agglomération, c'est justement une façon de faire en sorte que ces mesures soient développées de façon cohérente entre elles et non pas de façon complètement éparpillée, d'où la pertinence d'un financement regroupé pour un ensemble de mesures.
Il faut rappeler qu'à force de tergiversations, nous avons perdu récemment 5% du financement fédéral. Pourquoi ? Notamment parce qu'un ministre qui a tangué un petit peu entre le PDC, le MCG et maintenant d'autres horizons n'a pas été particulièrement volontaire sur le déploiement des mesures et s'est avant tout attelé à déterminer si les motos allaient circuler sur les voies de bus ou sur les trottoirs... (Commentaires.) ...au détriment de l'avancement des mesures du projet d'agglomération et du déploiement des trams et des pistes cyclables. Parce que construire un tram ou une piste cyclable dans ce canton demande des efforts colossaux, il faut prendre son bâton de pèlerin à chaque étape: vous savez qu'il existe ici d'innombrables voies démocratiques pour discuter des différents morceaux de ces mesures; à chaque kilomètre de tram, il peut y avoir un référendum communal et à chaque mètre de piste cyclable, il peut y avoir un recours de voisins. La question du rythme est donc très importante. C'est pour toutes ces raisons que jusqu'à maintenant, nous avons plutôt perdu des financements.
J'aimerais donc remercier les équipes du département du territoire et du département des infrastructures pour le travail réalisé ces dernières années, qui fait qu'enfin nous voyons se déployer ces mesures du projet d'agglomération. Nous nous réjouissons de voter ce crédit d'investissement.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. François Baertschi pour une minute.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Juste pour répliquer aux jérémiades d'un préopinant... (Rires.) Non ! (Commentaires.) Non ! Il se plaint d'avoir perdu des miettes avec quelques retards, mais nous avons perdu des sommes considérables à deux titres: d'une part au titre de la péréquation intercantonale, qui est mal négociée par Genève... (Exclamation.) ...où nous perdons des montants considérables, d'autre part au titre de la rétrocession à la France, qui, malheureusement... (Exclamation.) ...nous est très défavorable, parce qu'elle est excessive ! (Remarque.) C'est à ce niveau-là qu'il faut véritablement poser les bonnes questions ! Merci, Monsieur le président.
M. Patrick Lussi (UDC). J'ai écouté avec attention tous les intervenants. Il me semble quand même que, dans l'actualité, et quand on entend surtout nos collègues d'en face, personne n'a osé parler aujourd'hui... On parle de développement, on parle de financement, d'arrangements, et puis, au début de la semaine, on avait de nouveau un rapport qui nous disait que, dans quelques jours, la catastrophe serait là, que le dérèglement climatique et le réchauffement climatique sont là et qu'en définitive, un des moyens de pallier cela serait peut-être de diminuer un petit peu le développement et les constructions. Personne n'en parle ! Permettez-moi simplement de dire à titre personnel - je n'engage pas mon groupe dans cela - que je trouve étonnant que tout le monde soit dans cette fuite en avant; alors que ce sont des experts qui viennent plus de vos rangs que des miens, on passe comme chat sur braise sur tout ce qu'ils disent. (Commentaires.) C'est un peu dommage. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, l'essentiel a été dit. Le projet d'agglomération 4 s'inscrit dans les précédents, avec une belle reconnaissance de la part des autorités fédérales, puisque ce sont 56 mesures qui sont cofinancées. Il y a derrière ce projet de loi un investissement genevois, mais qui nous permet d'obtenir aussi de l'argent de la Confédération, qui a d'ailleurs salué l'évolution des modalités d'application et de projection de ce projet d'agglomération.
Plusieurs questions sont soulevées, on l'entend dans les critiques sur ce projet ou sur l'organisation territoriale, qui se situe naturellement entre le Jura et le Salève. Tout d'abord, je dirai - mais vous le savez - que le Grand Genève n'est absolument pas un phénomène récent: du temps de l'Escalade, les échanges étaient tout aussi intensifs entre Genève et sa région - que ce soient les échanges économiques, culturels, les mariages -, et Genève a toujours vécu avec son arrière-pays.
Mais aujourd'hui, que se passe-t-il ? Le développement est si important que, s'il n'est pas organisé, comment les gens se déplacent-ils ? En voiture ! Et que font les autorités pour endiguer et réduire ce phénomène (sans le résoudre complètement, il est vrai) ? Elles investissent dans les infrastructures de transports publics, du tram, du bus, du ferroviaire, dans des voies cyclables, et, globalement, dans des aménagements qui permettent d'éviter l'étalement urbain.
Dire non à ce projet d'agglomération, c'est comme, il y a une dizaine d'années, dire non aux P+R. (Remarque.) C'est admettre davantage de voitures frontalières à Genève. (Commentaires.) C'est ça, la conséquence directe du refus de ce type de projet ! Parce que ce ne sont pas des projets de trams qui amènent le personnel frontalier: c'est notre économie florissante, avec ses avantages et ses inconvénients, mais avec sa grande prospérité. Si les gens ne peuvent pas venir en transports publics, s'ils ne peuvent pas venir à vélo, ils viendront en voiture. (Commentaires.) Telle est la conséquence de la politique du refus de la construction de l'agglomération: on laisse les gens dans les véhicules privés.
Ce projet nous permet d'inciter au report modal, d'organiser un peu mieux notre territoire commun. L'essentiel de ces mesures financées par Berne est sur territoire genevois - il y a des bouts de pistes cyclables en ville, dans les communes suburbaines, des bouts de tram, des bouts de bus. C'est fondamentalement à cela que sert ce projet: à réguler l'organisation territoriale. Donnons un signal fort à Berne, montrant que nous sommes à la hauteur de sa confiance, derrière l'acceptation de ce PA 4 ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je soumets à vos votes ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 13182 est adopté en premier débat par 67 oui contre 14 non et 2 abstentions.
Le projet de loi 13182 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13182 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 67 oui contre 15 non et 2 abstentions (vote nominal).