Séance du
vendredi 27 janvier 2023 à
18h
2e
législature -
5e
année -
9e
session -
54e
séance
PL 13209-A
Premier débat
Le président. Nous passons à notre urgence suivante, le PL 13209-A. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Le rapport de majorité est de M. Didier Bonny, à qui je cède la parole.
M. Didier Bonny (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, rappelons tout d'abord que ce projet de loi s'inscrit dans un catalogue de mesures prises par le Conseil d'Etat. Trois mesures sur les quatre concernent des modifications réglementaires, de sorte qu'il ne lui a pas été nécessaire de passer devant notre parlement.
Il s'agit premièrement de l'indexation de 3,7% au 1er janvier 2023 des allocations naissance et accueil, des allocations pour enfants et des allocations de formation, pour un montant de 30 millions financé par le fonds de compensation des allocations familiales; deuxièmement, de l'adaptation du forfait d'entretien pour l'aide sociale dont le montant est passé de 986 francs à 1006 francs depuis le 1er janvier 2023, l'augmentation de 3,8 millions étant intégrée dans le budget du canton que nous avons voté, du moins une majorité, le 16 décembre dernier; troisièmement, de la modification réglementaire, valable uniquement pour l'année 2023, relative à l'allocation de logement et consistant à faire passer le financement maximum par pièce de 1000 francs à 1400 francs par an à partir du 1er avril 2023 pour un coût estimé de 6 millions, également couvert par le budget que nous avons voté au mois de décembre.
La mesure relative aux subsides d'assurance-maladie seule nécessite un changement de loi; c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat a déposé ce texte. Celui-ci a pour but d'augmenter le montant destiné à la réduction des primes de certaines assurées genevoises et de certains assurés genevois, en tant que mesure de soutien destinée à protéger leur pouvoir d'achat dans un contexte de fort renchérissement. A cet égard, pour l'année 2023, l'augmentation moyenne des primes à Genève s'élève à 4,7% par rapport à l'année 2022. L'augmentation des montants des subsides d'assurance-maladie, pour un total de 26 millions de francs également inscrits dans le budget voté le 16 décembre, est prévue pour l'année 2023 uniquement. Il s'agit donc d'une dérogation aux montants normalement applicables figurant à l'article 22 LaLAMal.
Les personnes du groupe 9 ne sont pas concernées par ces augmentations, qui visent à apporter une aide ciblée à la classe moyenne inférieure. L'adaptation du montant des subsides proposée par ce projet de loi concerne 137 000 personnes. Les bénéficiaires de prestations complémentaires à l'AVS/AI et pour familles, ainsi que les personnes au bénéfice de prestations financières de l'aide sociale, ne sont pas mentionnées dans le présent projet de loi, puisque ces personnes sont soumises à une autre législation.
Si l'ensemble de la commission partage le constat que l'augmentation des assurances-maladie met, une fois encore, à rude épreuve le porte-monnaie de la population genevoise, les avis divergent sur la manière de lui venir en aide. Pour la majorité, une augmentation des subsides de 20 et 10 francs pour les adultes des groupes 1 à 8, de 15 francs pour les jeunes adultes et de 10 francs pour les enfants correspond à l'augmentation moyenne de la prime genevoise pour 2023. Elle n'a donc rien d'un arrosage, puisqu'elle ne fait que mettre à niveau des subsides qui sont d'ores et déjà progressifs depuis leur introduction en 2020. Dans le contexte inflationniste que nous connaissons, pouvoir bénéficier d'un subside de 720 francs supplémentaires pour une famille de deux adultes et deux enfants n'a rien d'anecdotique. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission vous invite à soutenir ce projet de loi.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de première minorité. Le caractère social de ce projet de loi est très discutable. En réalité, c'est un arrosage tous azimuts pour compenser l'inflation. L'UDC est pour une aide sociale, mais pas pour un tel arrosage; selon nous, l'aide sociale doit avoir un équilibre entre les incitations à la réinsertion et l'aide accordée. L'aide sociale doit être juste et équitable entre ceux qui la touchent et ceux qui la paient. Cet arrosage est inacceptable, d'autant qu'il est couplé à toute une série d'augmentations de prestations dont le coût est d'environ 70 millions.
Genève est le canton qui dépense le plus pour l'aide sociale; il est en outre le canton où les coûts augmentent le plus année après année. Genève est aussi le canton qui a le plus de personnes à l'aide sociale. Le taux d'aide sociale, au sens large, est de 14,6% de notre population, soit 74 000 Genevoises et Genevois. Je répète: 74 000 Genevoises et Genevois. Ces dix dernières années, le nombre de personnes à l'aide sociale a explosé de 67%. Si la situation est dramatique à Genève, ce n'est pas le cas en Suisse: dans le pays, en 2022, ce nombre a même baissé de 0,2%. A Genève, l'aide sociale est un échec total: il n'est plus question de département de cohésion sociale, mais de bureau d'arrosage de prestations sociales. Il faut une aide sociale, dont le principe n'est discuté par personne, mais un tel arrosage, sans équité, sans aucun rapport avec ceux qui travaillent, fait que ce bureau d'arrosage de prestations sociales est devenu une fabrique de dépendance, et surtout une fabrique de pauvres.
Il faut rappeler quelques faits. A Genève, il y a 320 000 postes de travail; si on tient compte des 100 000 frontaliers, des 35 000 Suisses habitant en France et des 40 000 pendulaires suisses, il faut relever que seulement 45% ou 50% des travailleurs de Genève habitent à Genève. Cette situation constitue un déséquilibre dramatique. En plus, 75% des habitants à Genève vivent avec l'aide sociale, au sens large je précise, cela en rapport avec les 150 000 travailleurs à Genève qui habitent à Genève. Cela aussi représente un déséquilibre absolument inacceptable.
Le président. Vous passez sur le temps de votre groupe.
M. André Pfeffer. Merci. 74 000 personnes habitant à Genève et vivant avec l'aide sociale, et seulement 140 000 personnes travaillant et habitant à Genève: voilà une situation que vous n'avez certainement nulle part ailleurs. Le constat est dramatique. En plus, tous les chiffres, toutes les tendances que j'ai données vont plutôt dans le mauvais sens. Bref !
Pour limiter l'arrosage, l'UDC vous propose d'offrir ces prestations uniquement et exclusivement aux groupes 1 à 4. Ces groupes correspondent à des revenus allant jusqu'à 48 000 francs par année pour les personnes seules. Je propose de limiter cet arrosage tous azimuts et d'accorder cette prestation exclusivement aux groupes 1 à 4. Si ce parlement accepte cet amendement, alors le groupe UDC acceptera ce projet de loi. Merci de votre attention.
Mme Joëlle Fiss (PLR), rapporteuse de deuxième minorité. Chers collègues, le rapporteur de majorité l'a dit, ce projet de loi s'inscrit dans un paquet de mesures prises par le Conseil d'Etat d'une valeur totale de 60 millions de francs - il a été présenté en novembre dernier. Concernant trois des quatre mesures proposées, il n'est pas nécessaire de passer par le parlement. Voici donc la seule mesure qui exige un changement législatif relatif aux subsides d'assurance-maladie; c'est pour cette raison que le Conseil d'Etat a déposé ce texte. Je vous rappelle que le montant des aides impliquées dans ce projet de loi est de 26 millions de francs.
Comme le rapporteur de majorité, M. Bonny, l'a dit, l'argument principal est la réduction des primes individuelles par une hausse de subsides pour soulager la classe moyenne de l'inflation. Le député Bonny a même parlé de la classe moyenne inférieure. L'objectif sur lequel, je pense, on s'accorde tous est plus qu'honorable: il faut soulager cette classe moyenne inférieure qui ne bénéficie habituellement pas de subsides et se trouve dans la difficulté.
Le problème de ce texte, selon nous, c'est la méthode choisie, qui ne soulagera pas les gens: ce projet ne va aider ni les personnes très précaires ni la classe moyenne initialement visée dans le texte. Personne ne pourra vraiment en bénéficier, voilà le problème. Pourquoi ? Parce que les sommes sont trop petites; elles sont distribuées à tout le monde, à toutes les catégories de barèmes de subsides. Or en donnant à tout le monde, on ne soulage personne: on attribue 20 francs mensuels aux groupes 1 à 6 et 10 francs aux groupes 7 à 8; on ne cible pas vraiment les bénéficiaires, ni les personnes en situation précaire, ni la classe moyenne qui a besoin d'un coup de pouce. Le PLR se demande si le choix de cibler une catégorie de bénéficiaires plutôt que de couvrir huit groupes avec des montants de 10 francs ou de 20 francs n'aurait pas été bénéfique à plus de personnes. En prenant des petites mesures pour tout le monde, on finit par n'aider personne. Voilà où se situe le problème, à notre sens.
Par ailleurs, j'aimerais souligner que le Conseil d'Etat avait assuré à la commission, comme pour la convaincre, que la loi peut être mise en oeuvre très rapidement, sans une adaptation complexe du point de vue administratif ou informatique: un système automatisé permet la facilitation des subsides assez rapidement. Je vous ferai remarquer qu'une loi n'est pas adoptée pour faciliter la tâche administrative du Conseil d'Etat. Il faut en premier lieu s'assurer que les personnes qui en ont vraiment besoin puissent accéder à l'aide. Tel est l'argument principal. Soulager les personnes les plus précaires, oui ! Soulager la classe moyenne qui ne reçoit actuellement pas de subsides, oui ! Mais malheureusement, ce projet de loi manque l'un de ces deux objectifs. Merci.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, j'avoue qu'entendre parler d'arrosage m'étonne un petit peu. Si c'est de ça qu'il s'agit, je vous conseille de souffler dans la pomme d'arrosoir, car un certain nombre de ses trous sont bouchés. Très sincèrement, pour parler d'arrosage quand il s'agit d'une augmentation de 20%, c'est-à-dire de la compensation de 4,7% en moyenne d'augmentation des primes d'assurance-maladie, il faut quand même être un peu à côté de la question. Si on n'adapte pas les prestations sociales à l'augmentation du coût de la vie, cela veut dire qu'on ne donnera plus aux gens les moyens de faire face à ces besoins et de couvrir ces charges. Il s'agit d'une adaptation.
Je corrigerai deux ou trois éléments, parce que je ne peux pas entendre certains propos. Vous dites que 75% de la population vit de l'aide sociale. Attendez ! Regardez les statistiques de l'OCSTAT: 14,6% de la population bénéficie des prestations, au sens large, donc toute prestation sociale confondue de type RDU, soit 73 841 personnes. Et puis, dire que les aides sociales fabriquent de la dépendance... Excusez-moi, mais un certain nombre de ces dispositifs visent précisément, autant que faire se peut, à ce que les gens retrouvent une autonomie et n'aient plus à bénéficier des aides sociales.
Quant à celles qui ne sont pas destinées à cela et servent à compenser la difficulté à affronter un certain nombre de charges, eh bien excusez-moi, mais la responsabilité n'est pas à chercher auprès des dispositifs d'aide sociale ou des personnes. Si on parle de ce qui nous occupe ce soir, à savoir une adaptation du système des subsides d'assurance-maladie à l'augmentation des primes, excusez-moi, mais il faut dire que la fabrique de la dépendance est due à cette augmentation constante ! Si vous craignez que les gens perçoivent trop d'allocations logement, abordez la question du montant des loyers dans notre canton, ne dites pas que la faute incombe aux dispositifs qui viennent corriger cette distorsion ou aux bénéficiaires de ces prestations. Prenez le problème à sa racine ! Revenez-en aux causes et luttez contre elles ! En l'occurrence, le dispositif prévu par le projet de loi qui nous est soumis vise simplement à donner aux bénéficiaires d'un subside d'assurance-maladie la possibilité de faire face à l'augmentation de leur prime.
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Jocelyne Haller. Faute de quoi, vous remettriez en question ce que nous avons voté au moment où nous avons modifié la loi sur les subsides d'assurance-maladie.
Le président. C'est terminé, Madame la députée.
Mme Jocelyne Haller. Par conséquent, je vous invite à soutenir ce projet de loi sans aucun amendement. Je vous remercie de votre attention.
Mme Badia Luthi (S). J'aimerais remercier ma préopinante d'avoir corrigé certaines imprécisions qu'on a voulu faire passer.
Cela fait des décennies que les primes des assurances-maladie augmentent d'une manière systématique chaque année. En 2021, les augmentations ont été de l'ordre de 4,5%; il s'agit de la plus forte hausse qu'a connue le canton depuis 2013. En 2022, la hausse était de l'ordre de 2,6%, alors qu'en 2023 elle a battu les records pour atteindre 6,6% pour certaines assurances.
De plus, nos concitoyennes et concitoyens paient les primes les plus chères de notre pays, plus particulièrement les jeunes de 19 à 25 ans. Cette tranche de population représente la cible la plus recherchée, car elle est considérée comme étant généralement en très bonne santé, donc la moins coûteuse pour le système.
Les primes d'assurance-maladie sont le reflet des coûts de la santé, qui ne cessent de flamber. Les charges augmentent, le coût de la vie aussi, mais en face, les salaires n'augmentent pas, ils stagnent ou connaissent une très faible augmentation qui ne répond pas à la réalité du coût de la vie. Il est donc évident que les salaires ne suivent plus l'inflation, et cela pose beaucoup de problèmes pour les familles à revenus modestes. En effet, les travailleuses et les travailleurs à bas et moyens revenus n'arrivent plus à suivre économiquement pour assumer les charges obligatoires. La population a subi, et continue à subir, une perte assez conséquente de son pouvoir d'achat.
Comme je l'ai déjà dit, les primes des assurances-maladie représentent une part très importante des dépenses des ménages genevois; la détresse financière des familles à revenus modestes mérite un regard attentif pour trouver une solution soulageant leur porte-monnaie. C'est le combat que le parti socialiste mène sans cesse, avec l'ambition que l'Etat reprenne le contrôle des coûts de la santé.
Le parti socialiste salue les mesures proposées par le département en vue d'augmenter les subsides d'assurance-maladie pour l'année 2023. Nous remercions également le Conseil d'Etat pour toutes les mesures qu'il a prises afin de limiter les impacts de l'inflation sur les classes précaires, voire la classe moyenne. Pour toutes ces raisons, le parti socialiste votera ce projet de loi. Merci. (Applaudissements.)
Mme Véronique Kämpfen (PLR). Cela a été dit, ce projet de loi s'inscrit dans un paquet d'aides lié au renchérissement, d'un montant total de 66 millions. De ces 66 millions de francs, seule l'augmentation des subsides d'assurance-maladie est soumise à l'appréciation du parlement; les autres aides ont été décrétées directement par le Conseil d'Etat.
L'augmentation prévue, entre 10 et 20 francs par mois pour les bénéficiaires de ces subsides d'assurance-maladie, ne représente pas grand-chose, c'est vrai, on peut le regretter. Cependant, avec 137 000 personnes subventionnées, la facture s'élève au total à 26 millions. La rapporteure de deuxième minorité l'a dit, le groupe PLR regrette que cette manne ne soit pas utilisée à meilleur escient: au lieu de donner la même somme à quasiment toutes les classes de revenus, il eût été préférable d'augmenter de manière plus substantielle les subsides pour les classes de revenus les plus faibles.
Il est à noter aussi que ce texte ne prévoit cette augmentation que de manière temporaire, soit pour l'année 2023, ce qui est étonnant. Je n'imagine pas une minute que le département revienne dans une année pour annoncer une diminution des subsides par rapport aux sommes qui nous sont proposées ce soir.
J'ajouterai un mot sur l'inflation, qui est la raison invoquée pour l'augmentation des subsides. Elle s'est établie à 2,8% à Genève et en Suisse à fin décembre. La moyenne de l'inflation depuis les années 1960 jusqu'à aujourd'hui est de 2,4% par année. Avec un taux de 2,8%, il ne s'agit pas d'une inflation extraordinaire; ce n'est certes pas une inflation agréable, mais elle n'est pas extraordinaire. Il faut aussi relever que l'augmentation moyenne des salaires s'est établie à 2,2% pour 2022, venant ainsi compenser en grande partie cette inflation. Il est juste que les employeurs ne compensent pas totalement l'inflation sur une année, puisque celle-ci est par essence fluctuante alors que les salaires ne le sont pas. Il faut éviter de prendre des mesures pérennes pour corriger des effets conjoncturels. Pour 2023, d'ailleurs, les prévisions conjoncturelles sont meilleures qu'en 2022.
Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe PLR vous propose de refuser ce projet de loi. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Patricia Bidaux (PDC). Je serai rapide, puisque beaucoup des arguments que j'avais préparés ont été avancés. Je tiens à relever que ce texte est le seul chemin pour libérer les fonds nécessaires à une aide financière supplémentaire dans le cadre des subsides d'assurance-maladie. Ce projet de loi vise à absorber l'augmentation des primes, avec une moyenne de 20 francs par mois, selon le schéma qui nous a été décrit.
Le PDC-Le Centre tient à relever que la lutte contre la hausse des primes d'assurance-maladie ne doit pas se faire au sein de ce parlement, mais devrait être énergiquement menée à Berne. Le PDC acceptera ce projet de loi sans aucun amendement. Je vous remercie.
Mme Ana Roch (MCG). Notre groupe acceptera ce projet de loi pour les raisons qui ont été expliquées jusqu'ici. Je ne qualifierai pas cette mesure d'arrosage. Je pense que chaque aide qui peut être amenée pour payer nos primes d'assurance-maladie... Nous sommes toutes et tous pris à la gorge avec l'augmentation de ces assurances. Peu importe le montant qui peut être donné, ce sera de toute façon un petit soulagement. C'est pourquoi nous aussi, nous soutiendrons cet objet. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Bertrand Buchs pour deux minutes.
M. Bertrand Buchs (PDC). Ce sera très court, Monsieur le président, je vous remercie. Chers collègues, il faut remarquer que, parmi ces aides de 60 millions proposées et appliquées par le Conseil d'Etat, une grande partie vient des privés, puisque ces aides sont notamment des allocations familiales: même si le fonds de compensation a beaucoup d'argent et qu'il peut le mettre à disposition, les deux tiers des aides proviennent de l'économie privée. Il faut quand même le dire: une aide importante est apportée par l'économie privée. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe maintenant la parole au rapporteur de majorité. (Remarque.) Auparavant, M. Pfeffer, rapporteur de minorité, a demandé à intervenir. Je lui cède la parole pour une minute quarante.
M. André Pfeffer (UDC), rapporteur de première minorité. Merci beaucoup. J'aimerais quand même préciser une chose. Je le répète, le taux d'aide au sens large est de 14,6% de la population, soit 74 000 Genevois. Ce point a aussi été relevé hier par M. Wenger; s'il y a une confusion au sujet de ce chiffre, je propose aux membres de la gauche de voir avec leurs collègues. Un tel déséquilibre, je regrette, n'existe dans aucun autre canton suisse et montre quand même l'échec de notre politique sociale.
Un deuxième déséquilibre est très inquiétant: une moitié, ou même un tout petit peu plus, des gens qui travaillent à Genève habitent ailleurs. Je répète encore une fois ces chiffres: Genève compte environ 320 000 postes de travail; si nous prenons les 100 000 frontaliers, auxquels nous ajoutons les 30 ou 35 000 Suisses qui habitent en France voisine et les pendulaires du canton de Vaud, on arrive à une moitié, voire plus, de gens qui travaillent à Genève sans y habiter.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. André Pfeffer. Où existe-t-il un autre exemple d'un tel déséquilibre ? Je vous pose cette question. Maintenant, j'aimerais quand même revenir...
Le président. C'est terminé, Monsieur le député, vous n'avez plus de temps de parole.
M. André Pfeffer. Il reste encore quelques secondes. (Rires.)
Le président. C'est fini. Je passe la parole à Mme Joëlle Fiss pour vingt secondes.
Mme Joëlle Fiss (PLR), rapporteuse de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. C'est un objectif honorable de soulager des personnes précaires ou la classe moyenne. Oui ! Mais ce projet de loi donne de petites sommes à tout le monde et finit par n'aider personne. Merci.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur le rapporteur de majorité, il vous reste une minute trente.
M. Didier Bonny (Ve), rapporteur de majorité. Plus !
Le président. Deux minutes quatorze, pardon.
M. Didier Bonny. Ah ! Ça fait toute la différence. Merci, Monsieur le président. Je reviens sur deux ou trois éléments évoqués au cours de ce débat, peut-être en reprenant le dernier qui a été relevé par Mme Fiss. Peut-être que pour certaines personnes, certaines familles, 720 francs de plus n'ont aucune importance, mais je crois que pour la plupart des familles, bénéficier de 720 francs supplémentaires de subsides d'assurance-maladie sur un an est plutôt quelque chose d'intéressant.
Ensuite, je répondrai à Mme Kämpfen - ça tombe bien, elle est juste en face de moi -, qui a tenu un discours sur l'inflation. On parle de l'augmentation des assurances-maladie, et on sait très bien qu'elles ne sont pas comprises dans l'inflation. Ce sont deux choses totalement différentes dont on parle.
Je voudrais également répondre à M. Pfeffer. Le débat, qui va se terminer à présent, ne porte pas sur l'aide sociale - on sait qu'il adore parler de cela -, mais sur l'augmentation des subsides d'assurance-maladie. Et les assurances-maladie, Monsieur Pfeffer - vous transmettrez, Monsieur le président -, on les paie toutes et tous; il n'est pas question de personnes qui sont ou non à l'aide sociale, le sujet concerne tout le monde !
Les subsides d'assurance-maladie, comme je l'ai dit précédemment, ont déjà différents paliers, qu'il s'agit d'indexer pour les garder tels qu'ils étaient auparavant. Si vous souhaitez les changer, il faut déposer des textes; il est ici simplement question d'une mise à niveau, non par rapport à l'inflation, je le répète, mais par rapport à l'augmentation moyenne des primes d'assurance-maladie à Genève ! Pour celles et ceux qui s'apprêtent à refuser cette augmentation, je pense que le peuple saura s'en souvenir le moment venu, soit pas plus tard que le 2 avril. Merci. (Commentaires.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, au-delà des questions purement électorales, je pense qu'on a le devoir de formuler l'interrogation suivante: comment pouvons-nous soutenir celles et ceux pour qui les fins de mois sont particulièrement difficiles, notamment celles et ceux qui commencent à compter déjà à partir du 10 ou du 15 de chaque mois? Le Conseil d'Etat a pris un train de mesures en novembre dernier, on l'a rappelé et je ne vais pas y revenir; j'ai toutefois le devoir de rappeler quelques éléments en réponse à ce que j'ai entendu dans ce débat.
Quand, Monsieur le député Pfeffer, vous confondez l'aide sociale avec les subsides d'assurance-maladie, alors que vous siégez depuis quatre ans à la commission des affaires sociales, permettez-moi de m'inquiéter. En imaginant que les subsides d'assurance-maladie sont un moyen d'aide sociale au sens strict, vous les confondez et cela ne va pas. Ce d'autant que dans l'aide sociale que vous confondez sont comprises toutes les prestations complémentaires, toutes les aides financières accordées aux personnes à l'assurance-invalidité. Vous dites à ces personnes-là qu'elles sont à l'aide sociale, c'est faux ! Elles sont indépendantes, mais ont un revenu insuffisant, pour les retraites par exemple, que le canton a le plaisir, l'honneur de compléter afin qu'elles vivent dignement à Genève au vu de la cherté que nous y connaissons.
L'autre élément sur lequel j'aimerais revenir, c'est le mot d'arrosage que vous appliquez à ce projet de loi. Vous oubliez, Mesdames et Messieurs les députés qui avez dit cela, que si nous avons mis en oeuvre en 2020 une réforme complète des subsides d'assurance-maladie, c'est parce que nous avons obtenu un accord entre le Conseil d'Etat et le parlement s'agissant d'une révision fiscale dite RFFA; et que vous avez vous-mêmes voté la réforme. On ne peut donc pas qualifier ces subsides d'arrosage, puisque nous avons convenu de la cible que nous voulions atteindre: le gouvernement a été clair, le département tout autant, sur le fait que nous souhaitions cibler un peu plus la classe moyenne, notamment inférieure, soit celles et ceux qui gagnent juste trop pour obtenir une aide régulière, mais pas assez pour vivre dignement dans notre canton. Il est regrettable que vous disiez qu'il s'agit d'un arrosage massif, car vous omettez l'accord obtenu et le vote favorable de la RFFA et de son pendant pour les subsides d'assurance-maladie.
Troisièmement, quant à la compensation d'assurance-maladie pour 2023 seulement, il faut se rappeler que chaque franc reçu par une personne est immédiatement réinjecté dans le circuit économique. Ces personnes n'ont en effet pas la possibilité d'épargner et utilisent chaque franc disponible pour vivre à Genève. Or ce retour à l'économie est aussi important, notamment pour celles et ceux qui ont besoin d'un plus grand soutien à une économie la plus locale possible.
Encore un mot à propos de la démonstration relative aux places de travail. Oui, il y a environ 320 000 places de travail à Genève, mais je trouve la démonstration incomplète: il manque, Monsieur le député, le nombre de personnes actives dans le canton et capables de remplir ces places de travail, soit 238 000. 100 000 places environ ne seraient par conséquent pas pourvues si nous devions nous arrêter au seul chiffre que je viens d'articuler.
Je réagis à présent à l'intervention de Mme Fiss. Comme il s'inscrit dans une loi déjà existante, le projet de loi permet des économies d'échelle en matière administrative: cela nous permet par exemple d'éviter de reconstruire un processus administratif et financier, et d'utiliser des outils connus et reconnus. En ce sens, je pense qu'on a le devoir - auquel je vous sais particulièrement sensible - d'utiliser les deniers publics pour la prestation plutôt que pour le back-office; nous avons utilisé les subsides d'assurance-maladie en ce sens et en fonction de cette volonté.
J'ajouterai un mot à propos des personnes précaires que vous avez mentionnées à plusieurs reprises: les primes moyennes des personnes dans la précarité sont assumées par le canton, la couverture est donc assurée au maximum. Je prends l'exemple d'un couple avec deux enfants, au salaire minimum, avec un revenu brut de 106 000 francs. Grâce à ce projet de loi, cette famille, qui fait partie du groupe 5, bénéficierait ainsi en 2023 d'une augmentation des subsides de 100 francs par mois, à savoir 20 francs pour les adultes, 10 francs pour les enfants. Un couple avec deux enfants qui touche un revenu brut de 140 000 francs bénéficierait lui aussi d'une augmentation de 10 francs par adulte et par enfant. On peut effectivement considérer les efforts comme ciblés; la prime est individuelle, il n'y a pas d'arrosage. Le subside est calculé en fonction de la cible d'une part et des conditions de ressources de l'autre. Le gouvernement vous propose de ne pas voter l'amendement et de suivre le vote favorable de la commission.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13209 est adopté en premier débat par 88 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. A l'article 51, nous sommes saisis d'un amendement présenté par le rapporteur de première minorité:
«Art. 51, al. 9 (nouvelle teneur)
9 En dérogation à l'article 22, alinéa 1, le montant des subsides pour l'année 2023 est de:
- Groupe 1: 320 francs par mois;
- Groupe 2: 270 francs par mois;
- Groupe 3: 220 francs par mois;
- Groupe 4: 180 francs par mois.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 59 non contre 31 oui.
Mis aux voix, l'art. 51, al. 9 à 11 (nouveaux), est adopté.
Mis aux voix, l'art. 1 (souligné) est adopté, de même que l'art. 2 (souligné).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 13209 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 61 oui contre 28 non (vote nominal).