Séance du vendredi 25 novembre 2022 à 18h10
2e législature - 5e année - 7e session - 42e séance

PL 12734-A
Rapport de la commission des transports chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Thierry Cerutti, Florian Gander, André Python, Daniel Sormanni, Ana Roch, Danièle Magnin, Sandro Pistis, Francisco Valentin, Françoise Sapin, Jean-Marie Voumard modifiant la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière (LaLCR) (H 1 05)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session III des 2 et 3 septembre 2021.
Rapport de Mme Marjorie de Chastonay (Ve)

Premier débat

Le président. Nous poursuivons avec le PL 12734-A dont le débat est classé en catégorie II, trente minutes. Le rapport est de Mme Marjorie de Chastonay... à qui je céderai la parole quand elle se sera installée à la table des rapporteurs. (Un instant s'écoule.) Allez-y, Madame.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission des transports a traité ce projet de loi en une séance. Celui-ci vise à modifier la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière via un nouvel article 2, alinéa 2, qui demande très exactement: «Toute restriction de la circulation sur les routes des réseaux routiers primaire et secondaire de nature à péjorer fortement la fluidité du trafic est subordonnée à un préavis favorable du Grand Conseil, à l'exception des manifestations temporaires de 5 jours.»

Après la présentation par l'auteur, la majorité des commissaires a refusé d'entrer en matière par 12 non, car ils ne souhaitent pas solliciter le Grand Conseil chaque fois qu'il y a des travaux ou des manifestations, ce serait ingérable en termes de temps, d'organisation et de logistique. En effet, il existe un service qui s'occupe des chantiers et une plateforme qui coordonne l'ensemble. Cela concerne des milliers d'interventions. Par ailleurs, on sait très bien que l'ordre du jour du parlement est complètement surchargé.

En conclusion, ce texte pose des problèmes de constitutionnalité, car il ne respecte pas la séparation des pouvoirs, il engendre des problèmes juridiques par manque de bases légales et enfin il génère une mise en application de la procédure longue et complexe. Pour toutes ces raisons, la commission des transports, dans sa majorité, vous invite à refuser l'entrée en matière. Merci.

M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, comme l'a mentionné la rapporteuse, l'entrée en matière sur ce projet de loi a été refusée en commission. Celui-ci déroge au droit fédéral, ce serait au Grand Conseil de s'occuper de mesures prises par la police en matière de circulation, ce qui paraît être une grosse aberration.

Ce texte pose des problèmes de constitutionnalité par son non-respect de la séparation des pouvoirs, manque de bases légales et surtout génère une mise en application de la procédure complexe et longue. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC rejettera l'entrée en matière. Je vous remercie.

M. François Baertschi (MCG). Ce projet de loi demande que notre Grand Conseil donne un préavis quand il y a des modifications concernant la circulation. C'est important, les communes ne peuvent pas faire tout et n'importe quoi. Voilà l'objectif de ce texte, c'est ce qui est souhaité. Nous ne voulons pas que, par exemple, la Ville de Genève, ou d'autres communes...

On voit que des politiques très négatives sont menées, qu'il y a un esprit anti-voitures partagé par le département de notre magistrat, qui se trouve dans la salle et qui fait profession de foi... ou, disons, qui est quelque peu asservi en la matière au parti des Verts alors que nous n'arrivons plus à circuler dans ce canton...

Une voix. N'importe quoi !

M. François Baertschi. D'ailleurs, on se demande s'il ne va pas demander son adhésion au parti des Verts et quitter Le Centre ou le PDC, mais ça, c'est son problème.

Il n'en demeure pas moins qu'on se retrouve, par exemple aux Eaux-Vives, dans des quartiers où on ne peut plus circuler. Un ancien député, par ailleurs commerçant dans ce quartier, nous a confié: «J'ai perdu 40 000 francs !» 40 000 francs à cause de modifications de circulation inacceptables, qui font perdre des moyens. C'est tout un quartier qu'on détruit, parce que la Ville de Genève, irresponsable, prend des mesures, et il faut à tout prix lutter contre cette irresponsabilité. Voilà pourquoi le MCG a déposé ce projet de loi, il s'agit de défendre la population genevoise et le canton. Merci.

Une voix. Bravo, François.

M. Jacques Blondin (PDC). Je n'avais pas l'intention d'intervenir sur ce projet de loi, car le résultat de la commission est assez clair, mais juste pour illustrer les propos qui nous ont été rapportés, il y a 4000 chantiers par année dans le canton de Genève, alors imaginez si ne serait-ce que la moitié d'entre eux étaient concernés par ce texte, cela en ferait cinq à dix par jour ouvrable, toute l'année ! Dans ce cas, on devrait aussi ajouter dans ce projet de loi la création d'une commission ad hoc qui siégerait jour et nuit toute l'année pour rendre ses préavis, si possible en un jour, faute de quoi les travaux coûteraient encore plus cher qu'actuellement. Effectivement, il y a un problème de praticabilité, et c'est la raison pour laquelle la commission a tranché très vite et décidé de ne pas soutenir ce projet de loi, ce que nous ne ferons pas non plus. Merci.

M. Alexandre de Senarclens (PLR). Je crois en effet qu'il faut passer peu de temps sur ce projet de loi tant il n'est pas conforme au droit supérieur, tant il intervient avec des notions juridiques indéterminées, tant il est totalement contraire à la séparation des pouvoirs et tant il rendrait nos travaux ingérables et impraticables, avec quelque 2000 à 4000 textes qui nous reviendraient chaque année. Pour ces motifs, Mesdames et Messieurs, nous vous invitons à refuser cet objet. Merci, Monsieur le président.

Le président. Je vous remercie. Monsieur François Baertschi, je vous rends la parole pour une minute quatre.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. On parle d'inconstitutionnalité du projet de loi, mais j'aimerais bien entendre ces grands juristes s'exprimer sur d'autres textes que nous traitons au sein de ce parlement. C'est une manière un peu facile de balayer un objet qui dérange. Pourquoi est-ce qu'il dérange ? Il faut que les partis qui s'opposent à ce projet de loi reconnaissent qu'ils bloquent les quartiers de Genève, ils sont les complices, voire les acteurs directs, de ce blocage. Allez aux Pâquis, Mesdames et Messieurs, allez aux Eaux-Vives, allez dans de nombreux quartiers de Genève où on ne circule plus. Pourquoi ? Parce qu'il y a ce blocage institutionnel. Certains sont complices de cette situation dans ce Grand Conseil.

Le MCG, lui, s'oppose au blocage de la ville. Nous faisons l'impossible pour aller là contre. C'est vrai que nous sommes très minoritaires, malheureusement...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. François Baertschi. ...parce que de nombreux partis sont irresponsables. Nous sommes...

Le président. C'est terminé...

M. François Baertschi. Merci, Monsieur le président.

M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, moi non plus, je ne pensais pas intervenir sur cet objet qui a été déposé par le MCG, qui a été voté par un seul député MCG en commission, mais enfin... Ça fait toujours mal au coeur d'entendre le MCG essayer de nous faire croire que c'est le seul parti qui défend la population alors que là, en l'occurrence, c'est tout le contraire. On en reparlera tout à l'heure avec les questions de phonoabsorbant et de réduction de la vitesse à 30 km/h, mais aujourd'hui, à Genève, 120 000 personnes souffrent des nuisances sonores quotidiennement, des nuisances qui dépassent les normes - j'y reviendrai - de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit.

Enormément de personnes, Monsieur Baertschi, souffrent de la pollution liée au trafic individuel motorisé, et quand vous vous exclamez: «Allez aux Pâquis, allez aux Eaux-Vives !», je vous réponds: «Mais allez, vous, aux Pâquis, aux Eaux-Vives !» Vous nous avez trouvé un seul commerçant qui n'était pas très content pour son chiffre d'affaires. Un commerçant ! Mais allez discuter avec les gens, allez discuter avec les associations de quartier, allez discuter avec les personnes qui vivent au jour le jour dans ces quartiers, ils n'en peuvent plus ! Ils n'en peuvent plus de quoi ? En partie, ils n'en peuvent plus du bruit du trafic aérien et en partie, s'ils n'habitent pas dans ces zones-là, ils n'en peuvent plus du bruit du trafic individuel motorisé. (Commentaires.) Quand il est question de mobilité... Monsieur Sormanni, écoutez ce qu'on vous dit, parce que pour les nuisances sonores, vous n'êtes pas mal non plus ! (Rires.) A un moment donné, il faut aller dans les quartiers écouter les gens qui n'en peuvent plus de toutes ces nuisances.

Alors il faut entreprendre des mesures, et bien entendu, Monsieur le président, que cela ne consiste pas à ce que le Grand Conseil - donc une commission, comme l'a relevé mon collègue - préavise sur les plus de 4000 décisions à prendre par année quant aux réseaux primaire et secondaire. Vous imaginez le Grand Conseil préaviser sur tel bout de rue, tel bout de rue, tel bout de rue ? C'est absolument impossible !

Ce que je vous dis, Monsieur Sormanni et Monsieur Baertschi, c'est que le résultat sera exactement le même, parce qu'une immense majorité de la population genevoise veut un trafic apaisé, plus de qualité de vie, moins de nuisances sonores, moins de pollution, et qu'on change enfin notre manière de nous déplacer à Genève. Merci beaucoup. (Applaudissements.)

Des voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous nous prononçons maintenant sur ce projet de loi.

Mis aux voix, le projet de loi 12734 est rejeté en premier débat par 68 non contre 11 oui et 2 abstentions.