Séance du
vendredi 25 novembre 2022 à
14h
2e
législature -
5e
année -
7e
session -
40e
séance
PL 13086-A
Premier débat
Le président. Nous examinons le PL 13086-A. Le rapport est de M. Jacques Blondin, à qui je laisse la parole.
M. Jacques Blondin (PDC), rapporteur. Merci beaucoup, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, ce projet de loi, dont le nouvel intitulé est «Pour une transition rapide vers le solaire à Genève, partout !», répond à la problématique de la pose de panneaux photovoltaïques dans les zones 4B protégées. Vous vous souvenez tous des articles parus dans la presse sur ce paysan de la région de Lully qui s'énervait face aux complications qu'il rencontrait pour placer des installations solaires sur sa grange - laquelle, a priori, n'avait rien de patrimonial - selon des raisons diverses mises en avant par la CMNS. Il y avait évidemment une très grande incompréhension par rapport à ça. Or, vous le savez, 30% des surfaces de toitures susceptibles d'être couvertes de panneaux photovoltaïques se trouvent en zone 4B protégée, il était donc nécessaire d'intervenir pour corriger les choses.
Ce texte a fait l'objet d'une belle unanimité en commission, il faut le saluer. Tous les groupes se sont ralliés à cette décision, à l'exception d'une seule abstention. En substance, que stipule ce nouvel accord ? Le principe général est le suivant: une autorisation de construire n'est plus obligatoire pour la pose d'installations solaires dans la zone 4B protégée et dans le périmètre des rives du lac, exception faite pour les bâtiments à haute valeur patrimoniale, qui nécessitent toujours une autorisation avec préavis de l'office du patrimoine et des sites.
Au départ, la proposition paraissait impossible à mettre en place tant les contraintes fédérales étaient importantes, mais finalement, avec l'aide du département et des différents services concernés, nous avons trouvé une solution intéressante. La règle est simple: pour 50% des bâtiments, il y a un assouplissement en ce qui concerne la pose d'installations photovoltaïques. C'est très heureux, car nous devons développer cette possibilité de manière importante eu égard à la crise énergétique que nous traversons actuellement.
N'oublions pas que pour les propriétaires de toitures, que ce soit de PPE ou de bâtiments divers, l'intérêt est double. D'une part, il est possible de produire de l'énergie, et on en a besoin, on la recherche désespérément partout. D'autre part, depuis quelque temps, on peut utiliser soi-même directement l'énergie produite sur son toit, ce qui permet bien évidemment non seulement l'autonomie pour le propriétaire de la maison, mais de substantielles économies financières, et ce n'est pas négligeable. Et puis alors quand vous conciliez le thermique et le photovoltaïque, vous parvenez à des bilans très intéressants. Le seul bémol, mais cela n'a rien à voir avec cet objet, c'est qu'il faudra un jour qu'on trouve le moyen de stocker cette énergie, ce qui permettrait de faire face aux aléas climatiques qui sont les nôtres.
En tant que rapporteur de la commission, j'espère que vous allez ratifier ce projet de loi qui permettra, dans le délai imparti d'une quarantaine de jours, de changer des règles qui étaient très contraignantes et faisaient que Genève portait le bonnet d'âne au niveau fédéral par rapport à la pose de panneaux solaires. Je vous remercie de soutenir ce PL 13086. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo.
M. Rémy Pagani (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, je suis la personne qui, au nom du groupe Ensemble à Gauche, s'est abstenue en commission et je tiens à expliquer cette position. Cela ne concerne pas les cellules photovoltaïques sur le fond, d'autant plus qu'une amélioration de la technologie a été développée - en Suisse, d'ailleurs -, ce qui fait que l'Europe va reprendre le leadership de la production de panneaux solaires, mais le fait qu'il s'agit peut-être d'un miroir aux alouettes.
En effet, d'abord, certaines personnes vont sûrement installer un patchwork sur leur toit, et ce n'est pas de bon aloi; dans certaines régions, on le voit notamment en France voisine, cela dénature complètement les villages. Mais en plus, quand vous posez des installations photovoltaïques, on vous demande après... Bon, il y a l'abaissement de l'indice d'évaporation du CO2, mais il faudra ensuite isoler les toits, donc il faudra redéposer les cellules solaires.
La démarche logique consisterait à faire en sorte que les bâtiments soient bien isolés et surtout qu'on change les chaudières à mazout, parce qu'aujourd'hui encore, des chaudières à mazout sont installées pour plus de trente ans, malheureusement; certaines personnes en profitent encore. Voilà la démarche que nous soutenons, une démarche systématique et surtout - surtout ! - les économies d'énergie.
Le texte laisse en effet à penser qu'on va gagner de l'argent avec la transition. Or, Mesdames et Messieurs, il faut savoir que les économies d'énergie que nous devons réaliser pour les générations futures vont coûter beaucoup d'argent, et à tout le monde, y compris à l'Etat de Genève. Dès lors, nous nous abstiendrons, bien que nous soutenions cette proposition qui vise à améliorer les conditions-cadres pour l'installation de cellules photovoltaïques. Je vous remercie de votre attention.
M. André Pfeffer (UDC). Ce projet de loi initialement intitulé «Accélérons la transition énergétique» est très encourageant, c'est même un grand succès. Faciliter les processus et réduire la complexité du système genevois pour la pose de panneaux solaires est salutaire. En Suisse, entre janvier et octobre 2022, l'installation de panneaux photovoltaïques a progressé de 50%. En 2023, cette augmentation devrait être encore supérieure.
Grâce à ce type de projet, Genève devrait rattraper son retard et même aisément atteindre son objectif, qui est de multiplier par cinq le nombre d'installations solaires d'ici 2030. Les vrais bénéficiaires de ce texte seront nos entreprises ainsi que toutes celles et tous ceux qui souhaitent poser des panneaux photovoltaïques sur leur maison ou leur bâtiment. L'Union démocratique du centre soutiendra le PL 13086. Merci beaucoup de votre attention.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi est effectivement de bon aloi pour faciliter - enfin ! - la pose de panneaux solaires, parce qu'il y avait énormément de tracasseries administratives, même pour des requêtes assez évidentes et même pour de gros projets industriels. Par conséquent, il fallait changer quelque chose si on voulait faire en sorte que les processus s'accélèrent, tout en gardant bien entendu les cautèles des dispositions fédérales pour protéger un certain nombre de bâtiments et de sites.
Dès à présent, pour l'essentiel des toits d'immeubles de notre beau canton de Genève, il ne sera plus nécessaire de déposer de demandes d'autorisation de construire, et je pense que c'est une bonne chose pour aller de l'avant. C'est la raison pour laquelle le MCG vous invite à soutenir ce texte. Pour une fois que nous avons réussi à atteindre un consensus à la commission de l'énergie sur quelque chose de positif qui nous permet d'aller de l'avant, c'est une excellente chose et je vous encourage encore une fois à adopter ce projet de loi. Merci.
M. Yvan Zweifel (PLR). Je me devais de réagir aux propos de M. Pagani. La politique, c'est faire des choix. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à une crise, la crise climatique, et ceux qui disent qu'elle est la plus importante jamais connue sont les mêmes qui, lorsqu'on propose des solutions pragmatiques - c'était en l'occurrence la volonté du groupe PLR, notamment de mon collègue Adrien Genecand -, arrivent toujours à trouver quelque chose à redire: «Ah, je ne veux pas tout à fait l'accepter, alors je vais m'abstenir, parce que ça m'embête que quelqu'un d'autre ait fait cette proposition à laquelle j'aurais moi-même dû penser avant.»
Précisément, ce projet de loi résout un problème réel, celui de la crise climatique, mais le fait de manière pragmatique, c'est-à-dire pas extrémiste. Ici, nous opérons un choix, celui de dire: oui, cette crise est importante. Aujourd'hui, il faut absolument développer les panneaux photovoltaïques, il faut que l'énergie solaire de manière générale soit la plus répandue possible. De nombreux propriétaires à Genève seraient contents et d'accord de se lancer, mais on leur oppose une bureaucratie administrative insupportable - pas seulement sur ce sujet-là d'ailleurs, mais en particulier ici. Eh bien, Mesdames et Messieurs, il faut clairement faire ce choix aujourd'hui et dire: non, la bureaucratie ne doit jamais constituer un frein, surtout pas sur un sujet aussi important. C'était l'objectif de ce projet de loi, et je tiens pour ma part à remercier, au nom de mon groupe, tous les autres partis qui l'ont massivement accepté. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je sais que nous sommes aux extraits, mais le Conseil d'Etat ne peut pas ne pas vous remercier pour cette belle alliance autour d'un projet de loi PLR, comme cela a été souligné, qui a mis le doigt sur une problématique récurrente, laquelle a souvent interpellé mon département. Il y a eu quelques arrêts judiciaires, des débats avec les communes et les associations concernées pour que nous parvenions finalement à trouver un équilibre.
Un équilibre entre deux valeurs qui nous sont chères et que l'ensemble des députés et des groupes partagent visiblement, à savoir la transition énergétique d'une part et, d'autre part, la préservation de la beauté de nos paysages, de nos villages, de la richesse architecturale, de l'histoire qui se cache derrière les bâtiments. Je pense que Genève, face à la transition énergétique, ne doit pas non plus se défigurer, et ce projet de loi ne constitue pas un blanc-seing complet pour dire: «Peu importe la vieille pierre, on posera des panneaux solaires sur chaque mètre carré du canton.» Non, c'est plutôt un appel à l'équilibre.
Aujourd'hui, il faut être clair: nous bougeons le curseur en faveur de la transition énergétique, et l'effet légal du projet de loi que vous vous apprêtez à voter sera de réduire de moitié les bâtiments concernés par la protection du patrimoine et des sites. A l'heure actuelle, en effet, environ 30% des immeubles du canton doivent, en cas de requête pour l'installation de panneaux photovoltaïques, suivre le parcours administratif du patrimoine; demain, il n'y en aura plus que 15%.
En quoi consistent ces 15% ? C'est évidemment la Vieille-Ville, c'est aussi la ceinture fazyste, c'est le vieux Carouge, soit des secteurs importants, qui marquent l'histoire et le territoire genevois; ce sont encore quelques villages, ceux reconnus par la Confédération dans le patrimoine ISOS, et puis ce sont les bâtiments remarquables qui se trouvent sur notre territoire.
Attention: même sur ces 15%, il sera encore possible de poser des installations solaires; il faudra simplement, pour le requérant, avoir une approche plus nuancée, plus douce, plus intégrative, c'est-à-dire passer par un regard patrimonial qui n'empêche pas la pose de panneaux solaires, mais comprend des exigences esthétiques de construction supplémentaires qui, il est vrai, renchérissent en général le projet de l'ordre de 20% à 30%, mais préservent les qualités esthétiques. La transition énergétique peut aller de pair avec la préservation de la qualité architecturale, historique et patrimoniale de notre canton, et c'est ce que votre projet de loi s'apprête à prouver. Merci encore de votre consensus. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 13086 est adopté en premier débat par 75 oui et 9 abstentions.
Le projet de loi 13086 est adopté article par article en deuxième débat.
Mise aux voix, la loi 13086 (nouvel intitulé) est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 72 oui et 10 abstentions.