Séance du
vendredi 8 avril 2022 à
14h
2e
législature -
4e
année -
10e
session -
56e
séance
M 2783-A
Débat
Le président. Voici le texte suivant: la M 2783-A. Le rapport est de M. Didier Bonny, qui ne prend pas la parole... (Remarque.) Ah, si ! Excusez-moi, Monsieur, vous avez été plus rapide que mes yeux. Allez-y.
M. Didier Bonny (Ve), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames les députées, Messieurs les députés, permettez-moi, en guise de préambule, de dire toute ma satisfaction quant au fait que cet objet, d'une grande importance pour la cohésion sociale de notre canton, soit soumis à notre parlement très exactement un mois après la fin des travaux de commission. Cette proposition de motion demandant au Conseil d'Etat de «rendre un rapport circonstancié sur l'avenir de la FASe et de l'évolution de la politique de l'animation socioculturelle qu'il entend mettre en place, en lien avec le dossier du désenchevêtrement canton-communes» a été déposée le 3 septembre 2021. Son traitement a commencé le 2 novembre 2021, alors que le Conseil d'Etat avait mis en consultation un avant-projet de loi visant à «renforcer l'implication des communes dans le financement, puis la gouvernance de la Fondation genevoise pour l'animation socioculturelle (FASe)».
Cet avant-projet de loi est devenu, le 1er décembre 2021, un projet de loi tout court, le PL 13044. Il a été examiné en primeur par la commission des finances avant le vote du budget 2022 en raison de ses implications financières, soit un transfert de charges d'un peu plus de 20 millions aux communes. Il aurait pu être accepté sur le siège le 9 décembre 2021, mais le Grand Conseil n'a pas voulu voter dans la précipitation et l'a renvoyé à la commission des affaires sociales pour qu'il y soit étudié. Or celle-ci a décidé de geler son traitement pour «permettre au département de finaliser les entretiens, voire les négociations avec les différents intervenants», comme elle l'a annoncé dans son communiqué de presse du 23 février 2022.
Compte tenu de ce qui précède, l'examen de la M 2783, laquelle se focalise sur la question de l'animation socioculturelle, a été fortement influencé par le dépôt du projet de loi qui, lui, concerne plus particulièrement le financement et la gouvernance. Le compte rendu des auditions, qui se trouve dans le rapport, en est la meilleure preuve. Toutefois, malgré ce contexte particulier, les membres de la commission des affaires sociales ont tenu à ne pas lier les deux objets. Il leur a en effet semblé primordial de montrer dès maintenant leur préoccupation quant à l'avenir de l'animation socioculturelle. Leur questionnement autour d'un projet qui ait du sens et qui réponde aux besoins de la population, indépendamment de la forme que pourrait prendre un éventuel transfert aux communes, attend une réponse prompte et détaillée du Conseil d'Etat qui permettra, le cas échéant, de reprendre l'analyse du PL 13044 avec les éléments qui auront été communiqués par le gouvernement. Dès lors, je vous invite, Mesdames les députées, Messieurs les députés, en tant que rapporteur, à adopter cette proposition de motion qui a reçu un accueil unanime, moins une abstention, de la part des membres de la commission.
Mais je n'en ai pas fini pour autant, Monsieur le président, puisque je vais à présent exprimer la position de la députation Verte...
Le président. Vous passez sur le temps du groupe.
M. Didier Bonny. Ma foi, ça tombe bien, puisque j'allais précisément formuler la position de mon groupe ! La députation Verte, ô grande surprise, rejoint le rapporteur. En deux mots, pour les Vertes et les Verts, une cohérence territoriale est essentielle; elle passe par le renforcement du partenariat entre canton, communes, associations et organisations du personnel dans le cadre de la FASe, et non pas le contraire, comme le PL 13044 pourrait le faire craindre. L'animation socioculturelle joue un rôle primordial pour la cohésion sociale, comme l'a relevé la Cour des comptes dans son rapport qui demande au conseil de fondation de la FASe de prendre des mesures facilitant une meilleure anticipation de la dynamique sociale des nouveaux quartiers. C'est pourquoi la députation Verte soutiendra le renvoi de ce texte au Conseil d'Etat et sera très attentive à ce que le rapport qui nous sera transmis aille dans le sens d'un renforcement de l'animation socioculturelle avec les garanties nécessaires. Voilà, Monsieur le président, cette fois j'ai terminé.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Déposée dans un contexte d'interrogation et d'inquiétude quant à l'avenir de l'animation socioculturelle dans notre canton et au devenir des activités placées sous la gouvernance de la FASe, cette proposition de motion fait écho aux préoccupations des professionnels et bénévoles qui oeuvrent dans les divers lieux de pratique de l'animation socioculturelle; elle prend aussi le contrepied du projet de loi 13044 traitant du transfert de la FASe aux communes, un projet mal aimé de tous, à juste titre, qui propose une approche uniquement financière s'agissant d'un aspect de politique publique essentiel à la cohésion sociale et fait l'impasse sur la définition du socle d'animation socioculturelle que l'Etat doit garantir sur l'entier du territoire pour répondre aux besoins de la population.
Le PL 13044, dans sa hâte de déléguer aux communes la gestion de la FASe et, soyons honnêtes, sa charge financière, se révèle être un chèque en blanc, le département se donnant en l'occurrence deux ans pour revenir sur la question du contenu. Une manière particulièrement téméraire de mettre la charrue avant les boeufs, ou plutôt de vendre les boeufs sans savoir comment sera tirée la charrue.
Le présent objet, outre qu'il met en lumière les préoccupations sur l'avenir de la FASe qui taraudent tant la Fédération des centres de loisirs et de rencontres que les comités des associations gérant au quotidien les lieux d'animation socioculturelle et les professionnels, entend souligner que le futur de l'animation n'est pas qu'une question de financement ou de contrôle, mais qu'il est avant tout nécessaire de définir un concept d'animation socioculturelle applicable sur l'ensemble du territoire cantonal; il rappelle qu'avant de parler de se partager l'addition, il faut impérativement déterminer le contenu de cette politique publique et les besoins des personnes auxquels elle se doit de faire face partout de manière égale.
L'animation socioculturelle non seulement répond concrètement aux besoins de rencontres et d'animation de la population dans toute sa diversité, mais permet également l'implication citoyenne des habitants dans la vie publique; elle est un indéniable facteur d'intégration et un instrument de cohésion sociale. C'est pourquoi il est primordial de soutenir les associations de bénévoles actives dans ce domaine plutôt que de les écarter au motif qu'elles présentent actuellement certaines fragilités. Ce n'est pas en les mettant de côté qu'on les renforcera.
Le traitement du projet de loi 13044, lequel faisait l'unanimité contre lui, a été gelé; de notre point de vue, le texte aurait dû être retiré. De nouvelles négociations entre le département de la cohésion sociale et l'Association des communes genevoises sont en cours. Il est donc indispensable de ne pas réitérer la même erreur, le sens doit être défini en priorité. C'est l'objectif de cette proposition de motion: elle demande au Conseil d'Etat, cela a été indiqué, de rendre un rapport circonstancié sur l'avenir de la FASe et les évolutions de la politique d'animation socioculturelle qu'elle entend mettre en place. Il s'agit d'une nécessité, et nous vous invitons à soutenir cet objet, Mesdames et Messieurs les députés.
Mme Ana Roch (MCG). Comme nous sommes aux extraits, je ne vais pas prolonger le débat en répétant tout ce qui a été dit. Je suis, et mon groupe avec moi, très contente de constater que la commission soutient ma proposition de motion à l'unanimité. Il est important de souligner que l'animation socioculturelle doit être une mission du canton, et il est question ici d'une égalité au niveau des communes; on sait que ce n'est pas le cas aujourd'hui. A l'inverse du projet de loi déposé par le Conseil d'Etat, nous devons déterminer ce que devient l'animation socioculturelle, et pas seulement qui commande et qui paie. J'espère que l'ensemble de la plénière suivra l'avis de la commission. Merci.
M. Emmanuel Deonna (S). Le secteur de l'animation socioculturelle a été happé par un exercice bien connu à Genève, l'imposition d'économies au budget sans s'interroger sur leur nécessité ni sur leurs effets secondaires néfastes. Heureusement, personne ne plaide pour l'instant en faveur d'une réduction de la somme globale des subventions. Ainsi, le rôle de l'animation socioculturelle est encore reconnu.
On évoque seulement, au travers notamment du projet de loi que la plupart des groupes rejettent heureusement, le scénario d'un transfert de 23 millions de subventions cantonales aux communes. S'il fallait transiter vers un groupement intercommunal, à l'exemple du groupement intercommunal pour l'animation parascolaire, on peine à imaginer que toutes les communes seront d'accord de préserver la place des citoyens au sein du dispositif, une place à laquelle, à gauche, nous sommes particulièrement attachés. Il est sans doute beaucoup plus probable que le groupement lui-même et les services sociaux des communes se mettent à donner le ton dans l'animation socioculturelle.
C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, comme l'ont rappelé mes préopinants, il est important de défendre une conception citoyenne de l'animation socioculturelle, qui est un vecteur indéniable d'intégration et de cohésion sociale. Le groupe socialiste vous recommande d'approuver cette proposition de motion.
Le président. Merci. A présent, Mesdames et Messieurs, je mets cet objet aux voix.
Mise aux voix, la motion 2783 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 80 oui et 2 abstentions.