Séance du
vendredi 29 janvier 2021 à
10h20
2e
législature -
3e
année -
8e
session -
50e
séance
M 2726
Débat
Le président. Voici l'urgence suivante: la M 2726. Nous sommes en catégorie II, trente minutes, et je donne la parole à son auteur, M. le député Cyril Aellen.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette motion part de différents constats simples, vise des objectifs modestes mais importants, et propose une solution qui, du point de vue de ses auteurs, semble mesurée et praticable. Nous sommes confrontés à une crise sanitaire qui nécessite des mesures adéquates pour limiter la diffusion du virus - il n'est pas question de remettre en cause ce principe. La préservation tant de la santé des habitantes et des habitants de notre canton que de notre système de santé doit évidemment rester une priorité. Personne ne sait quand nous allons sortir de cette crise: certains parlent de mois, d'autres d'années. Nous ne pouvons pas rester comme cela, sans rien faire.
La solution privilégiée par les autorités tant fédérales que genevoises a consisté à fermer les lieux propices à la diffusion du virus; il n'est pas question de remettre ici en cause les mesures prises. Les établissements publics et certains commerces ont dû fermer durablement, des systèmes d'indemnisation ont été mis en place provisoirement - nous en avons largement parlé aujourd'hui - mais un autre secteur subit de plein fouet les mesures étatiques: la culture. Pour le secteur culturel comme pour tous les autres, nous avons l'obligation de nous interroger quotidiennement sur l'adéquation des mesures prises. Pour le secteur culturel comme pour tous les autres, nous avons l'obligation de nous demander si d'autres mesures, moins dommageables, peuvent être ordonnées.
L'Espagne s'est interrogée et a évalué la possibilité de mettre en place d'autres mesures, moins dommageables. A Madrid, des musées ont ouvert; à Barcelone, des concerts ont eu lieu. Dans le premier cas, cela s'est fait dans la durée, avec la mise en place d'un plan de protection adéquat; dans le second, un concert test a été organisé. A ma connaissance, ces expériences se sont montrées concluantes: ces ouvertures n'ont pas contribué à augmenter la diffusion du virus du covid-19. Ce qui a été possible en Espagne doit l'être à Genève.
Cette motion invite donc les autorités genevoises à prendre langue avec les autorités fédérales pour mettre en place de telles ouvertures sans délai, mais progressivement et avec des plans de protection adéquats. Le texte fait état de différentes mesures adéquates pour des plans de protection: des masques, des tests rapides, des contrôles, du gel hydroalcoolique, le traçage des contacts, etc. Il s'agit d'exemples, et chacun devra rester dans son rôle pour les mettre en place et procéder aux contrôles.
Mesdames et Messieurs, je vous invite donc à soutenir cet objet. Il faut le soutenir pour permettre à nos artistes de s'exprimer, mais aussi parce que la culture participe à la richesse de notre canton et au lien social dans notre société. Cette motion est un soutien à tout le secteur culturel: elle vise les acteurs mais aussi les spectateurs. Elle vise à améliorer la situation de l'ensemble de la population dans cette période difficile. Je vous remercie de lui donner une suite favorable. (Applaudissements.)
M. Christian Zaugg (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, pardon, mais même pavées de bonnes intentions, les ficelles sont un peu grosses ! Le PLR ne s'intéresse d'ordinaire pas trop à la culture et il suffit... (Exclamations. Protestations.)
Des voix. C'est faux !
M. Christian Zaugg. Oui, oui, c'est faux ! Attendez un petit peu ! (Protestations.)
Le président. S'il vous plaît ! Monsieur Zaugg, un instant.
M. Christian Zaugg. ...et il suffit de constater à cet égard... (Protestations.)
Le président. Monsieur Zaugg, un instant !
M. Christian Zaugg. ...ses dispositions... (Protestations.)
Une voix. Attends une seconde, laisse-le reprendre.
M. Christian Zaugg. Pardon ! (Un instant s'écoule.)
Le président. S'il vous plaît, laissez l'orateur s'exprimer !
Une voix. Non mais quand il dit quelque chose, il s'en assure !
Le président. Monsieur Romain, vous êtes inscrit, ils vont vous réserver le même traitement ! Monsieur Zaugg, vous pouvez continuer.
M. Christian Zaugg. Merci, Monsieur le président, je vais m'expliquer. Il suffit de constater à cet égard ses dispositions concernant les motions culturelles relatives au Grand Théâtre, à la Comédie et à la Bibliothèque de Genève, qu'il s'est empressé de geler à la CACRI. Le PLR vient aujourd'hui avec un projet d'espaces culturels et d'encouragement à des manifestations spontanées. Nous nous permettons de sourire, d'autant que la culture alternative n'est pas exactement sa tasse de thé politique. On pourrait penser, si on se laissait aller à divaguer, qu'il s'agit là d'un projet électoraliste ayant quelque rapport avec une élection complémentaire !
Une voix. Mais non !
Des voix. Non !
M. Christian Zaugg. Nous rappelons, quant au fond des choses, que le peuple genevois a accepté à une majorité écrasante - plus de 83% des électeurs de notre canton - l'initiative lancée par les milieux de la culture: «Pour une politique culturelle cohérente à Genève». Un vote presque unanime ! Dès lors, nous invitons le PLR à commencer par le début et à donner suite à cette initiative avant de se lancer dans des projets qui n'ont ni queue ni tête et, par voie de conséquence, à dégeler les motions qu'il a entrepris de mettre au frigo à la CACRI. Une attitude qui nous pose problème, puisque la commission de contrôle de gestion a souhaité reprendre la problématique du Grand Théâtre en auditionnant la Cour des comptes avec l'assentiment de la CACRI.
Toutefois, pour conclure, afin de ne pas donner un signal qui pourrait ne pas être compris par les milieux que nous défendons, frappés par la pandémie, en particulier au plan fédéral, Ensemble à Gauche ne va pas refuser cet objet... (Exclamations.) Ah oui, oui, oui ! ...prétendument culturel et purement électoraliste. Nous nous contenterons donc de nous abstenir poliment et invitons le Grand Conseil à en faire de même. (Applaudissements.)
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S). Vous le savez, Mesdames les députées, Messieurs les députés, le secteur culturel est extrêmement précarisé; aujourd'hui, c'est le coeur même de leur métier qui est touché. Si les spectacles ont dans un premier temps été reportés, ils sont aujourd'hui de plus en plus nombreux à être annulés, au vu de la pandémie. Cela veut dire que la création est touchée et qu'il deviendra difficile de montrer certains spectacles programmés; cela empêchera même leur tournée. Pour ces raisons, il nous semble important que ce parlement soit uni derrière la culture.
Je citerai un des acteurs culturels qui dit: «A force de nous mettre en note de bas de page dans les directives fédérales, nous avons basculé dans l'angle mort.» Il faut sortir les acteurs culturels et les actrices culturelles de cette invisibilité; ce sont des hommes, des femmes qui veulent travailler. Alors il est urgent d'intervenir auprès de la Confédération pour demander une réouverture progressive, dès le mois de mars, et en cela - en cela - nous soutenons cette motion qui invite à mettre en place des projets pilotes pour permettre cette réouverture progressive. Nous attirons quand même l'attention du PLR sur le fait qu'il n'y aura pas besoin de chercher des volontaires: les acteurs et les actrices culturels veulent ouvrir. Il n'y a pas besoin de s'interroger sur leur motivation: ils sont motivés, ils continuent à travailler chaque jour. Il n'y a pas besoin de leur demander de prendre des mesures sanitaires: ces mesures sanitaires, à l'instar d'autres acteurs, dont les restaurateurs, ils les ont déjà prises.
Il y a aussi, vous l'avez souligné, les musées: eh bien appuyons-nous sur l'exemple du canton de Vaud qui, pendant la période de Noël, avait ouvert ses musées. Les expériences en plein air nous montrent par ailleurs que le public - dont nous faisons partie - est avide de ces événements: regardez ce qui se passe en ville de Genève avec Geneva Lux ou avec ces affiches pour lesquelles la ville a mis à disposition des espaces afin de les montrer au public.
En conclusion, nous sommes d'accord de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat: soyons unis pour la culture, les acteurs culturels ont très clairement besoin que l'on parle ensemble. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Jean Romain (PLR). Eh bien, chers collègues, nous connaissions M. Cyril Aellen plutôt comme un homme de chiffres, vous l'avez découvert maintenant comme un homme de lettres... (Exclamations.) ...et même M. Zaugg, j'en suis sûr, avec son bon sens, est prêt à le reconnaître. La culture ne se satisfait pas, chez nous, d'être cantonnée au seul divertissement. Divertir, c'est conduire hors du chemin, c'est s'écarter; au contraire, la culture telle qu'on la voudrait ici conduit au centre de nous-mêmes. Toute société a eu à coeur, pratiquement depuis le début de l'histoire, de faire une place à la culture et il est inacceptable qu'à Genève le secteur ait dû fermer sept mois sur douze l'année dernière.
La situation actuelle est difficile parce qu'elle met à mal non seulement un aspect de notre société, mais aussi une partie, je dirais, de notre identité. Toutes les grandes civilisations ont accordé une place importante à la culture, au même titre qu'à l'art et à la religion. Cette motion, chers collègues, est raisonnable: elle ne demande pas à l'Etat d'intervenir plus que nécessaire. D'ailleurs, pour être libre, la culture a besoin de s'affranchir le plus possible de l'Etat. Quelqu'un évoquait tout à l'heure ce principe: qui paie commande. Nous n'aimerions pas, pour ce qui est du domaine de la culture, que l'Etat payeur puisse aussi exiger de commander. La culture a besoin d'être libre.
Au fond, cette motion permet de remettre la machine en route plutôt rapidement. Oui, Madame Valiquer, vous avez raison: le monde culturel - à Genève et peut-être en Suisse, voire au-delà - est aujourd'hui à genoux. Il est clair que cet objet seul ne le remettra pas debout, mais il lui permettra peut-être de se relever un peu. C'est ce que nous souhaitons et c'est pourquoi le PLR demande de renvoyer directement cette motion au Conseil d'Etat. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Mme Katia Leonelli (Ve). Mesdames les députées, Messieurs les députés, je vous préviens - et ça ne va pas trop vous plaire - que les Verts s'abstiendront sur cette motion: si elle démontre beaucoup de bonne volonté, elle n'aura malheureusement pas réussi à nous convaincre. Permettez-moi tout d'abord de remettre cet objet à sa place: d'une part dans la case des textes électoralistes - je l'ai dit une fois, je ne le répéterai pas - et d'autre part dans la case de ceux qui, malheureusement, reposent sur au moins une mauvaise prémisse.
Cette mauvaise prémisse, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que les lieux culturels sont dangereux, qu'ils sont de hauts lieux de transmission du virus. Or il n'en est rien. Si on a un minimum d'honnêteté intellectuelle, on admet que la seule et unique raison pour laquelle on a décidé d'ouvrir les magasins mais pas les musées et les théâtres, c'est parce que ces lieux, pour la plupart subventionnés, coûtent sensiblement la même chose à l'Etat qu'ils soient ouverts ou fermés. Alors que si on ferme les entreprises, non seulement elles ramènent moins d'impôts, mais l'Etat est en plus obligé de les aider - économiquement, le choix est donc vite fait. C'est bien dommage, croyez-moi: nous aurions beaucoup à gagner en tant que société si, dès le 1er mars, on ouvrait les lieux culturels et non les magasins, et que les gens se ruaient sur des expos et des représentations plutôt que sur les soldes.
Tout ce que nous voulons, c'est que les lieux culturels rouvrent aussitôt que la situation sanitaire le permet, indépendamment de prétextes économiques. Si cette motion s'était arrêtée là, nous l'aurions probablement soutenue. Malheureusement, telle qu'elle est aujourd'hui, il nous est impossible de la soutenir: ce texte met plus de bâtons dans les roues aux institutions culturelles qu'autre chose et crée en outre un certain nombre d'inégalités. Pourquoi mettre en place toutes ces restrictions, par exemple un théâtre limité à cinquante places, et ne rien demander aux centres commerciaux ? Ils ont eu l'opportunité d'ouvrir alors que les lieux culturels étaient fermés, et ils auront certainement le droit d'ouvrir à nouveau sans mille conditions supplémentaires.
Les lieux culturels avaient déjà des protocoles de protection sanitaire qui, jusqu'à preuve du contraire, ont parfaitement fonctionné: il n'y a jamais eu, à ma connaissance, des cas d'infection prouvés dans des lieux culturels. Ajouter du traçage, des tests après dix jours dans le cadre d'un projet pilote - tout cela sans aucune considération financière de la part des auteurs - est donc tout simplement aberrant. Ce type de restrictions sanitaires absurdement exagérées ne peuvent en aucun cas permettre aux petites structures d'être rentables. Par conséquent, on comprend bien à qui s'adresse ce type de mesures bourgeoises PLR. Si c'est pour ouvrir le Grand Théâtre et laisser le Théâtre de l'Usine fermé, on dit non merci. (Applaudissements.)
M. Souheil Sayegh (PDC). Chers collègues, je serai bien plus bref que mes préopinants; la motion en elle-même est déjà suffisante.
C'est une motion qui fait du bien,
Qui nous permet de rêver;
En regardant un peu plus loin
Elle nous permet de nous projeter.
Théâtres, salons, expos, concerts,
Autant de lieux toujours déserts !
En analysant bien les invites,
On remarquera toute sa prudence.
Le sanitaire et les loisirs,
Cette motion en a conscience.
Elle nous apporte des solutions
En lieu et place d'interdictions,
Elle nous propose une reprise
Après le stop dû à la crise.
Aux artistes encore sonnés,
A nos loisirs encore fermés,
Il serait temps de révéler
Ce que covid a étouffé.
Pour ces motifs, le PDC
Va, cette motion, la renvoyer
Au conseiller pour la traiter
Et nos artistes ainsi aider.
Je vous remercie. (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Une voix. Très joli !
Le président. Très bel exercice, Monsieur Sayegh. La parole est maintenant à Mme la députée Danièle Magnin.
Mme Danièle Magnin (MCG). Je vous remercie, Monsieur le président. Je voudrais vous dire que peu me chaut que la motion soit électoraliste: l'important, c'est la culture. Et pourquoi la culture est-elle importante ? Parce qu'elle dit qui nous sommes par rapport au reste du monde. La culture est une nourriture de l'âme, contrairement à la nourriture du corps qui implique que des centres commerciaux soient ouverts. Je vous parle en qualité de présidente de la commission des arts et de la culture du Conseil municipal de la Ville de Genève, en tant qu'ancienne membre du conseil de fondation du Grand Théâtre; je connais les difficultés.
Nous auditionnons les gens, et je peux vous dire qu'aussi bien les grandes institutions que les petites sont très menacées, que les petits indépendants n'ont pas de quoi vivre et vont se retrouver à l'aide sociale alors qu'on pourrait trouver des moyens pour que des concerts, des opéras aient lieu. Puisqu'on peut le faire à Barcelone et qu'il a été démontré qu'il n'y a pas d'augmentation des contaminations à la covid, je pense qu'on doit pouvoir trouver des manières de le faire chez nous aussi.
Des amendements à cette proposition de motion demeurent bien entendu possibles; si quelqu'un veut en déposer, ma foi, nous les étudierons avec plaisir. Mais je vous rappelle que l'important, c'est la culture: les gens dans la précarité, les institutions qui ont des dépenses fixes auxquelles il est impossible de renoncer. Il faut très, très rapidement les aider par tous les moyens possibles, et ils ne sont pas seulement financiers: c'est aussi leur permettre d'ouvrir les portes en définissant des conditions, en établissant un protocole de surveillance tel qu'il est imaginé ici - mais il pourrait l'être autrement. Je vous en prie, c'est très important, votez cette motion. Merci. (Applaudissements.)
M. Thomas Bläsi (UDC). Etant issu d'une culture ou d'une éducation scientifique, je ne suis peut-être pas le mieux à même de parler de ce sujet, mais ça me permet d'avoir justement une vue un petit peu transversale. Le «click & collect», dans le domaine culturel, c'est compliqué, ça fonctionne mal. Les librairies sont fermées, l'accès à la culture elle-même est difficile. Il y a des secteurs qui sont sinistrés mais qu'on entend, comme les cafés et les restaurants, qu'on entend même, à juste titre, beaucoup. Etrangement, les milieux culturels, qu'on entend souvent quand ça va bien, sont cette fois peu entendus alors qu'ils souffrent énormément.
Quelques voix s'expriment toutefois, entre autres parmi les Verts: celle de M. le conseiller municipal Yves Herren en est une. On l'entend s'exprimer fort souvent sur ce sujet, que ce soit sur les réseaux sociaux ou lors des séances du Conseil municipal. M. Aellen, qui visiblement fait les frais d'une attaque, qui est critiqué parce qu'il s'empare de ce sujet, organise sur internet - et je vous les recommande - des interviews où il se confronte à différents milieux: l'architecture, le handicap, la culture. Il se confronte ainsi à des personnes qui ne sont pas forcément de son avis et qui parfois le mettent en difficulté, mais il a malgré tout le courage de le faire, bien qu'il soit candidat à une élection. L'UDC présente également un candidat à cette élection, M. Yves Nidegger, mais est-ce que nous devrions, en tant que députés, refuser un projet qui par ailleurs est bon parce qu'ils sont en concurrence ?
L'UDC a eu, dans le passé, des membres éminents de la culture qui étaient députés de notre Grand Conseil - des députés d'extrême gauche qui sont finalement devenus des élus UDC; je pense en l'occurrence à M. Jack Yfar dont nous regrettons aujourd'hui le manque d'activité. Ce qui veut bien dire que la culture est quelque chose d'universel, qui va de la droite à la gauche; il n'y a pas de chasse gardée sur ce genre de thème, et surtout pas lorsqu'on est dans une période de pandémie. M. Aellen s'est emparé du sujet de la culture et il nous propose aujourd'hui une motion; l'UDC l'en remercie. L'UDC la soutiendra et, en faisant ça, l'UDC a l'impression de soutenir les milieux culturels. Merci, Monsieur le président.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie. La parole est à M. le député Patrick Dimier pour une minute.
M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président, je n'ai jamais besoin d'autant. Je voudrais juste dire que la culture, c'est ce qui reste lorsque tout a disparu. Ce qui m'amène à dire la chose suivante: je me demande s'il ne vaut pas mieux, parfois, être Abu Dhabi qu'à bout d'arguments. (Rires. Commentaires.)
Le président. Bon... elle est bien recyclée, celle-là ! Monsieur le député Cyril Aellen, vous avez la parole pour douze secondes comme auteur et quarante-sept secondes sur le temps du PLR, soit presque une minute. A vous la parole.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Quand je me suis engagé en faveur de la rénovation du Musée d'art et d'histoire, on ne m'a pas taxé d'électoralisme; quand je m'engagerai, après les élections, pour la Cité de la musique, on ne me taxera pas d'électoralisme. Entre les deux, je m'engagerai aussi pour que la culture redevienne très vite accessible aux citoyens et s'épanouisse - si je dois être taxé d'électoralisme pendant cette période-là, ce n'est pas très grave ! (Applaudissements.)
M. Thierry Apothéloz, conseiller d'Etat. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la culture n'est pas un agent pathogène. La culture n'est pas un agent pathogène; pourtant, les gouvernements de Suisse tout comme le gouvernement fédéral ont décidé d'appliquer des mesures fortes dans le cadre d'une situation sanitaire difficile, y compris en matière de culture. Ils poursuivaient et poursuivent deux objectifs: un objectif autour des lieux - ils sont en effet fermés - mais aussi la réduction des déplacements des habitantes et des habitants pour que la situation sanitaire, à défaut d'être stabilisée, s'améliore. Ces deux missions dictées par les conditions sanitaires, que les autres pays européens, à part l'Espagne en partie et le Portugal, se sont également fixées, créent des situations difficiles, extraordinairement difficiles pour les acteurs et les actrices des arts et de la culture. Pourquoi ? Parce que leur objectif est évidemment non seulement de créer, de faire de la recherche, de travailler, mais surtout de faire en sorte que le public puisse bénéficier des moments de partage qu'ils créent.
La culture n'est pas un agent pathogène, la culture est bienveillante. Elle est positive, elle est stimulante, elle permet de comprendre le monde dans lequel nous vivons, de comprendre la crise, de l'interpréter, de la dépasser. C'est pourquoi le Conseil d'Etat s'est largement engagé à la soutenir sur différents plans. La toute première décision qu'il a prise est de maintenir les subventions aux entités ainsi qu'aux actrices et aux acteurs concernés pour atteindre son objectif, qui est le maintien à Genève d'un tissu culturel riche.
Deuxième élément: vous avez voté, Mesdames les députées, Messieurs les députés, des soutiens financiers conséquents et je vous en remercie. La Confédération a joué le jeu - un jeu que nous connaissons, soit un franc pour un franc; c'est ainsi que 32 millions ont été accordés dans le cadre du budget 2020 et que 22 millions l'ont été pour l'année 2021, dont 11 effectivement inscrits dans le projet de budget que vous avez voté. D'autres partenaires sont également actifs en matière financière: citons peut-être la Ville de Genève avec 2,3 millions en soutien à la culture dans le cadre de la crise covid et l'organe de répartition de la Loterie romande, qui a accordé 2 millions pour le soutien aux artistes - nous les en félicitons. Nous n'allons toutefois pas simplement en rester à ce constat: nous allons travailler à un objectif - «Objectif mars» - pour construire, avec les cantons romands, un plan de relance qui permette d'organiser la reprise et surtout de faire en sorte qu'elle soit autorisée par les autorités fédérales, notamment sanitaires.
Nous y travaillons, comme nous l'avons déjà fait cet automne avec les collègues romands pour nous organiser ensemble en vue de la reprise; malheureusement, la nouvelle vague qui a frappé notre pays et notre canton nous a obligés à prendre d'autres décisions en novembre. Nous avons également travaillé, avec les cantons romands, à développer des projets. C'est l'esprit de l'ordonnance fédérale covid dans le secteur de la culture, mais c'est aussi le souhait de l'ensemble des Conseils d'Etat romands. A Genève, nous avons par ailleurs milité, avec mon département, pour que la rencontre avec les différentes faîtières, avec les actrices et les acteurs culturels, puisse être florissante de propositions; nous y travaillons, évidemment.
«Objectif mars», c'est un objectif que nous partageons avec vous, Mesdames et Messieurs les députés, on le voit notamment au travers de cet objet, et j'aimerais vous en remercier. Il y a peut-être un point sur lequel il faut faire preuve de vigilance quant à l'étendue de cette motion, car, M. le député Aellen l'a dit, le texte servira à soutenir des projets pilotes. Mais, Mesdames les députées, Messieurs les députés, les milieux culturels n'ont pas seulement besoin de projets pilotes: ils ont besoin de votre soutien à travers l'ensemble des dispositifs que nous aurons à mettre en place. Je pense notamment au soutien des artistes; à des projets de recherche; à des projets de transformation; à garantir le maintien des entités; à faire en sorte que nous puissions, ensemble, mettre en oeuvre l'IN 167 évoquée et que les priorités culturelles du canton soient également suivies par votre Conseil. Cette mission-là nous incombe à toutes et tous; il est de notre devoir de répondre non seulement à l'urgence de toutes celles et tous ceux qui souffrent de la situation actuelle, mais aussi à leurs besoins quotidiens. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote.
Mise aux voix, la motion 2726 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 70 oui contre 1 non et 21 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)