Séance du
vendredi 29 janvier 2021 à
8h
2e
législature -
3e
année -
8e
session -
49e
séance
PL 12857
Premier débat
Le président. Nous reprenons le traitement des urgences avec le PL 12857. Il est classé en catégorie II, trente minutes. Je donnerais bien la parole à la carte 0012, mais je ne sais point qui c'est !
Une voix. Mme Bayrak ! (Commentaires. Un instant s'écoule.)
Le président. Ah, c'était une erreur ? (Commentaires.)
Mme Dilara Bayrak. Non non ! (Commentaires.)
Le président. Vous voulez la parole ?
Mme Dilara Bayrak. Oui !
Le président. Ah, très bien ! Parce que je ne vois pas votre nom. Maintenant, oui ! Vous avez la parole.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Merci, Monsieur le président. Le groupe des Vertes et des Verts a conscience de l'importance de Palexpo pour notre canton ainsi que de ses retombées économiques dans différents secteurs, cependant... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le président. S'il vous plaît !
Mme Dilara Bayrak. Cependant, nous regrettons que Palexpo refuse de réviser sa conception pour le futur des salons et des congrès. (Brouhaha.)
Une voix. On n'entend rien !
Une autre voix. Chut ! (Commentaires.)
Mme Dilara Bayrak. En effet, l'engouement autour des salons internationaux connaissait déjà un déclin considérable... (Brouhaha.)
Le président. Madame la députée, s'il vous plaît ! Mesdames et Messieurs, si vous voulez entendre l'orateur ou l'oratrice, ça ne sert à rien de crier: «On n'entend rien !» Taisez-vous simplement et écoutez ! (Rires. Vifs commentaires.) Madame la députée... (Commentaires continus. Un instant s'écoule.) Madame la députée, continuez !
Mme Dilara Bayrak. Merci, Monsieur le président, pour ces paroles pleines de sagesse ! Je recommencerai donc. Le groupe des Verts et des Vertes a... (Brouhaha continu.)
Le président. Madame la députée ! Un instant, s'il vous plaît ! (Un instant s'écoule.)
Mme Dilara Bayrak. Merci, Monsieur le président. Le groupe des Vertes et des Verts a conscience de l'importance de Palexpo pour notre canton ainsi que de ses retombées économiques dans différents secteurs. Cependant, nous regrettons que Palexpo refuse de réviser sa conception pour le futur des salons et des congrès. En effet, l'engouement autour des salons internationaux connaissait déjà un déclin considérable avant la crise du covid. Aujourd'hui, cet engouement se retrouve d'autant plus fragilisé par l'utilisation par substitution des moyens virtuels. Il est illusoire de penser que des individus vont continuer à se déplacer sur plusieurs milliers de kilomètres pour prendre des photos avec des voitures ou s'émerveiller devant des montres de luxe.
Malgré ce constat, la direction de Palexpo a clairement exprimé sa volonté de continuer à attirer un public international, sans réellement revoir sa vision et l'adapter aux changements sociétaux, notamment au changement de comportement des individus, mais aussi et surtout au réchauffement climatique. Cette vision est totalement décalée par rapport à la réalité et ne doit pas être encouragée par un prêt étatique. Nous vous soumettons donc deux amendements à ce projet de loi, afin de conditionner le prêt à un changement de modèle d'entreprise. Je me permettrai de les présenter lors du deuxième débat.
Tout de même conscientes et conscients des implications d'une faillite de Palexpo SA - surtout pour les quelque 200 employés concernés -, nous avons décidé de laisser au groupe la liberté de vote.
Des voix. Aaah ! (Commentaires.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je prie les députés assis aux places 0094 et 0219 d'insérer leurs cartes de façon à ce que je puisse leur donner la parole. (Un instant s'écoule.) En attendant, je cède la parole à M. le député Jacques Blondin.
M. Jacques Blondin (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, s'il y a une manifestation qui a été clairement impactée par le covid l'année dernière, c'est bien le Salon de l'auto et indirectement Palexpo. (Remarque.) Je vous rappelle que quand la pandémie a connu sa première explosion, le Salon de l'auto était prêt à démarrer, tous les stands avaient été montés, construits et il n'y avait plus qu'à lancer la manifestation. Il a fallu bien évidemment l'annuler, ce qui était logique, compte tenu de ce qui s'est passé depuis. C'est ce qui conduit maintenant Palexpo à demander un prêt de 30 millions pour manque de liquidités sur les deux à trois ans à venir, qui s'explique simplement par l'évolution des chiffres. Sans entrer dans les secrets du business plan de Palexpo, le chiffre d'affaires planifié pour 2020 était quand même de 90 millions. Le chiffre d'affaires effectif a été de 32 millions. Le business plan prévoyait un équilibre financier en résultat des courses, or on s'est retrouvé à quasiment moins 40 millions, compte tenu des frais engagés et de tout le personnel qui était bien évidemment à disposition.
Le budget 2021, qui a été établi avec prudence, selon les mots de la direction et de la présidence, tourne sur 45 à 50 millions et devrait quand même conduire cette année à un résultat négatif d'une quinzaine de millions. L'équilibre est prévu pour 2023 et il faut déjà relever - quand on regarde les chiffres, et cela a été fait à la commission des finances - que l'équipe de Palexpo a tout fait pour essayer de sortir le mieux possible de cette pandémie, notamment en gardant son personnel, qui a été payé jusqu'à l'automne et qui est en RHT depuis lors - 120 personnes quand même.
Pour rebondir sur ce qui vient d'être dit par ma collègue Verte, s'agissant du business plan, la direction et la présidence nous ont clairement démontré que, bien évidemment, ils avaient tenu compte de l'évolution sociétale. Le Salon de l'auto, vous le savez tous, était le pilier qui faisait tourner Palexpo; je crois que, dans le business plan de l'année prochaine, ils ont clairement réduit la voilure, pour autant que le salon ait lieu - mais en principe, rien n'est perdu, et ça, c'est une bonne nouvelle. Par ailleurs, bien entendu, d'après Palexpo, les surfaces à disposition seront reprises par d'autres activités: la première, qui est très locale, c'est l'horlogerie - avec un grand groupe qui va mettre sur pied un immense salon qui devrait devenir très important - et, naturellement, toutes les manifestations culturelles, sportives, qui ont lieu à Palexpo.
S'agissant des contrôles, il n'y a pas de surendettement de cette société, il y a simplement une capacité financière réduite, et c'est maintenant que Palexpo a besoin de cet argent, et pas dans une année. Raison pour laquelle, partant du principe que le canton est actionnaire à hauteur de 80% de cette société, qu'il y a 120 emplois en jeu, 600 millions de retombées financières pour la région, 40 millions de retombées fiscales, le parti démocrate-chrétien soutiendra la demande de prêt qui a été déposée et n'entrera pas en matière sur les deux amendements proposés. Merci. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Il est fort tôt, mais nous avons un problème de système informatique. Nous allons donc relancer le système. A cette fin, je vous demande à tous d'enlever vos cartes. Il y en a pour cinq minutes.
La séance est suspendue à 8h09.
La séance est reprise à 8h14.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, le système a été relancé: il fonctionne à nouveau. Vous pouvez remettre vos cartes. (Un instant s'écoule.) Remettez vos cartes !
Une voix. Dans quel sens ?!
Une autre voix. Excusez-moi, Monsieur le président: votre micro a été coupé, ils ne vous ont pas entendu !
Le président. Il paraît que mon micro ne fonctionnait pas. Maintenant, il fonctionne. Voilà ! Donc mettez vos cartes ! Et puis, pour le...
Une voix. Dans quel sens ?
Le président. ...pour le sens, eh bien, trouvez celui qui fonctionne ! Mais à mon avis, c'est dans le sens dans lequel vous voyez encore votre photo. (Remarque.) M. le sautier me précise que cela fonctionne dans n'importe quel sens. Tant mieux ! Nous reprenons nos débats sur le PL 12857, la parole va maintenant à M. le député François Baertschi.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Palexpo est vital pour Genève. Cela représente 200 emplois. En plus de cela, c'est toute une partie de notre économie locale qui dépend de Palexpo, même nos organisations internationales, même l'OMM, où nous nous trouvons en ce moment, dépendent d'une certaine façon de la possibilité d'avoir un centre de conférences tel que Palexpo. C'est cela qui est important. Nous voulons éviter les licenciements; c'est pour ça que nous voterons, sans les amendements, le projet de loi. Il faut savoir, on nous l'a dit en commission, que Palexpo ne dispose plus que de quelques mois de trésorerie; il doit verser des montants très importants chaque mois et bientôt, il n'aura plus d'argent. Si on ne lui donne pas les moyens de continuer, on prend des risques importants.
On comprend les Verts. Je vais quand même reconnaître que la députée Verte a fait preuve de modération dans la présentation de ses amendements. J'ai compris que c'était une posture politique. C'est vrai qu'avec le groupe MCG, il y a une divergence. On se trouve là face à une écologie dogmatique, c'est la ligne des Verts, je ne vais pas la leur reprocher, c'est leur vision des choses. Nous, le MCG, nous avons plutôt une vision d'écologie citoyenne, c'est-à-dire au service du citoyen, et non pas au service d'une idéologie théorique. On a donc compris que les Verts voulaient changer de modèle économique, mais quelque part, c'est enfoncer une porte ouverte ! Parce qu'actuellement, Palexpo est contraint de changer son modèle économique - et il le fait, il va le faire ! Alors bien évidemment qu'il y a la crise covid et qu'elle empêche de réaliser certaines choses, mais on est dans cette direction. Des mesures brutales n'auraient qu'un effet: détruire ce système, détruire aussi la chance que nous avons de bénéficier d'une structure qui permet d'agir, même s'agissant de la question climatique, avec des congrès, des discussions. Palexpo est un outil formidable dont nous disposons. La Genève internationale est aussi un outil formidable. Encore faut-il bien l'utiliser ! Je crois que c'est ça, l'enjeu. C'est pour ça que je vous demande de rejeter les amendements des Verts, qui partent de bonnes intentions - mais, comme on dit, l'enfer est pavé de bonnes intentions. Merci, Monsieur le président.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames les députées, Messieurs les députés, ce n'est pas la peine, j'imagine, de vous rappeler que nous vivons une crise sanitaire, une crise sociale, une crise économique depuis maintenant plusieurs mois, et bien entendu, Palexpo, d'autant plus étant donné le secteur dans lequel il oeuvre, rencontre d'énormes problèmes, notamment financiers, puisque, comme mes préopinants l'ont rappelé, on peut dire qu'à Genève, le début de la crise du covid-19 coïncide avec l'annulation, en mars de l'année passée, du Salon de l'auto, qui allait débuter.
Palexpo est effectivement très important pour Genève. Il permet d'accueillir un certain nombre de manifestations et de congrès. En ce qui concerne les socialistes, il y a certains congrès ou manifestations qu'on préfère, d'autres qu'on aime moins - on cite bien entendu le Salon de l'auto -, mais Palexpo, ce sont aussi des manifestations culturelles, dont le Salon du livre, ainsi que des manifestations sportives, comme le Concours hippique international ou de grandes manifestations notamment tennistiques.
Alors oui, Palexpo, ce sont des retombées économiques, des retombées en emplois, pour les hôtels, pour les restaurants, pour les taxis, pour les magasins, certainement aussi pour nos musées et nos lieux culturels, mais ce sont aussi beaucoup de retombées négatives, ce qu'on appelle les externalités négatives: trafic aérien, trafic automobile tout autour de Palexpo, nuisances sonores, pollution de l'air, etc.
Je le dis d'emblée, le groupe socialiste soutiendra ce prêt de 30 millions. Mais le gros bémol que contient ce projet de loi de soutien, c'est celui des RHT: les employés de Palexpo sont, bien entendu, en RHT depuis le printemps passé, mais, à la fin de l'année, la direction de Palexpo a décidé, vu la situation financière, de ne plus compenser les RHT de 80% à 100%, ce qui fait que les employées et les employés sont payés aujourd'hui à 80%. Nous déplorons le fait que Palexpo ait pris cette décision. Avec le prêt de 30 millions, nous espérons encore que Palexpo pourra revenir sur cette décision et payer ses employés à 100% en comblant les 20%, même si nous avons bien compris en commission qu'il serait très difficile de trouver une majorité sur ce point.
Donc, aujourd'hui, comme je l'ai dit, nous nous trouvons dans une période de crise, le groupe socialiste fera face à ses responsabilités par rapport à Palexpo et soutiendra ce prêt de 30 millions. Mais nous demandons, à l'instar des Verts, que Palexpo réfléchisse après la crise au développement d'une autre stratégie: une stratégie différente quant aux manifestations qu'il accueille, une stratégie plus en phase avec l'urgence climatique, une stratégie qui permette de mieux protéger l'environnement et de diminuer les nuisances dues aux différents congrès et expositions accueillis. Merci, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Patrick Dimier pour vingt secondes.
M. Patrick Dimier (MCG). Merci, Monsieur le président. Je serai très bref. Sauvons Palexpo et évitons que ça ne devienne une pâle expo ! (Rire. Commentaires.)
Le président. Merci. Oui, vous l'avez fait en moins de vingt secondes ! C'est la première de la journée ! Je passe maintenant la parole à M. le député Vincent Subilia.
M. Vincent Subilia (PLR). Merci, Monsieur le président. Je vois que cette bonne boutade fait naturellement rire les députés à ma gauche, et moi aussi, mais l'essentiel est ailleurs. Nous sommes accueillis ici aujourd'hui par l'un des fleurons de la Genève internationale, nous l'avons été hier à l'UIT et au centre de congrès; eh bien, Palexpo participe finalement à cet écosystème genevois qu'est celui de la tradition d'accueil de notre ville. C'est l'esprit de Genève qui souffle à Palexpo, et l'on peut même dire que cette infrastructure, très riche, que beaucoup nous envient, est le vaisseau amiral de l'esprit d'accueil de Genève. C'est celui-ci aujourd'hui qui traverse la tempête, parce qu'il faut le dire, Palexpo a été le premier des acteurs économiques du canton à entrer dans la crise - j'entends que ça fait rire sur ma gauche - et il sera certainement le dernier à en sortir. On l'a rappelé, le marqueur, ce fut le Salon de l'auto. Et puis, l'industrie - j'ose le terme - de l'accueil, avec tout l'écosystème qui gravite autour - on pense à nos hôteliers, à nos restaurateurs qui sont aujourd'hui en détresse - sera parmi les dernières à sortir de la crise. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs, nous en avons tous conscience ici: il s'agit de prendre nos responsabilités. Palexpo est une infrastructure décisive, j'allais dire systémique, pour Genève. Elle a besoin de notre soutien. Lorsque nous avions besoin du soutien de Palexpo, Palexpo répondait présent. (Brouhaha.) Si je peux demander un peu de silence - c'est véritablement pénible, Monsieur le président !
Le président. Un instant, Monsieur le député. (Un instant s'écoule.) A la demande de M. Vincent Subilia, je vous remercie - à sa gauche - de faire silence !
M. Vincent Subilia. Merci de votre intervention ! On s'entendra tous davantage et ça me permettra de parler moins fort !
Quelques chiffres pour illustrer la réalité dont nous sommes saisis aujourd'hui: Palexpo, sur dix ans, ce sont 1200 événements, et pas uniquement des événements qui génèrent les externalités que dénonçaient nos amis socialistes, non ! Ce sont des événements économiques, certes, mais aussi culturels, sportifs. Qui n'a pas vibré en allant voir des joueurs de tennis s'affronter à la Laver Cup, un cheval franchir les obstacles du concours hippique, ou, pour ceux qui aiment la moto, le super cross ? Autant d'exemples, Mesdames et Messieurs, qui témoignent de l'importance de Palexpo.
Sur le plan financier, Palexpo, ce sont 6 millions... 600 millions, pardon - j'avais oublié deux zéros, c'est dire à quel point c'est essentiel - de retombées économiques en 2019, dont 40 millions dans l'escarcelle du canton. C'est un peu la même chose que l'aéroport: par beau temps, personne ne s'en soucie ! Et lorsque la tempête sévit, et celle que l'on vit aujourd'hui est historique, c'est là qu'on se rappelle que ces institutions ont leur part dans ce qui fait la vitalité de Genève. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
A ce propos, j'aborderai un dernier point. Nous l'avons tous compris, et c'est pour ça qu'une très large majorité - il faut s'en réjouir, parce que le symbole est important - apportera son soutien à Palexpo: il s'agit d'un prêt. Il s'agit d'un prêt, et d'un prêt dont la lecture qui est donnée ici est assez conservatrice, parce qu'il faut faire face, en 2021, à une crise qui se prolonge, avec tous les dommages collatéraux que l'on connaît. En 2020, Palexpo, comme tout acteur économique, aussi étatique qu'il puisse être, a fait face à ses responsabilités: ils avaient thésaurisé, et ils l'ont fait sans que la casse sociale...
Le président. Merci.
M. Vincent Subilia. ...doive malheureusement être au rendez-vous. C'est donc un excellent élève que nous défendons ici, un élève...
Le président. Merci, c'est terminé.
M. Vincent Subilia. ...qui se trouve en mode survie et qui n'attend qu'une chose: que nous appuyions sur le bouton «oui». Quant aux amendements...
Le président. Non, Monsieur, c'est terminé. Je passe la parole...
M. Vincent Subilia. J'en ai terminé. Je rappelle juste, s'agissant des amendements des Verts...
Le président. ...à M. le député Jean Burgermeister.
M. Vincent Subilia. ...que c'est la deuxième plus grande centrale photovoltaïque de Suisse, avec 30 000 mètres carrés de panneaux solaires. Voilà un bel exemple de durabilité pour Palexpo, qui devrait vous dispenser de toute forme d'amendement ! Je vous souhaite une bonne journée. (Rire.)
M. Jean Burgermeister (EAG). Ecoutez, du point de vue d'Ensemble à Gauche, ce projet de loi est, dans l'ensemble, assez raisonnable. L'idée qu'il faille aujourd'hui prêter à Palexpo peut facilement se comprendre, tant son secteur d'activités est sinistré par la crise que nous traversons aujourd'hui. On apprend aussi dans le projet de loi - c'est à la page 5 - qu'il est important de protéger Palexpo des prêteurs et des marchés financiers. Ensemble à Gauche ne peut qu'emboîter le pas au Conseil d'Etat dans cette sage méfiance de la finance. Raison pour laquelle c'est l'Etat qui doit consentir à ce prêt.
Cela étant dit, ce projet de loi, même s'il est assez raisonnable, souligne quelques aspects déraisonnables de Palexpo. D'abord, une structure qui interroge: vous le savez, Palexpo est une société anonyme - cotée en bourse, Mesdames et Messieurs ! Alors on me répondra que l'Etat détient 79% des actions, certes, c'est vrai ! Mais comme on le voit aujourd'hui, l'Etat assume 100% des risques, puisque c'est lui, et lui seul, qui est à même d'injecter les liquidités essentielles à la survie de Palexpo. Les autres actionnaires en sont incapables et n'en ont d'ailleurs pas la volonté.
Par ailleurs, cette structure privée, même si elle est essentiellement en mains publiques, a pour avantage - si j'ose dire, c'est un peu malheureux - de faciliter la dégradation des conditions de travail. Ce point a été relevé par le député Thomas Wenger, du groupe socialiste, qui a mentionné le fait que si les salariés étaient dans un premier temps indemnisés à 100% de leur salaire - c'est-à-dire que Palexpo compensait le manque à gagner entre le salaire ordinairement perçu et les RHT -, cette mesure a été rapidement abandonnée par l'entreprise et, aujourd'hui, les employés ne perçoivent que 80% de leur salaire, contrairement aux autres employés du grand Etat. Mesdames et Messieurs, si l'Etat joue le rôle qu'il joue à Palexpo, il doit se donner les moyens d'en faire une structure véritablement publique, et cela signifie aussi protéger le travail et les conditions de travail.
C'est pour cette raison d'ailleurs qu'Ensemble à Gauche a déposé un amendement, qui demande à Palexpo de s'engager à ne pas effectuer de licenciements durant l'année 2021 en échange du prêt, sauf évidemment en cas de faute grave et avérée. A nouveau, c'est le même type d'amendement que nous avons déposé systématiquement lorsque l'Etat vient en aide aux entreprises. L'idée qu'une entreprise, qui plus est détenue à 79% par l'Etat et à qui, de surcroît, l'Etat prête 30 millions, ne doit pas effectuer de licenciement est tellement raisonnable que je m'étonne qu'elle ne figure pas dans le projet de loi. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Je m'en étonne d'autant plus que lors des auditions, il est apparu qu'il n'y avait aucun accord avec l'Etat et que cette question n'avait pour ainsi dire même pas fait partie des négociations ! C'est-à-dire que l'Etat prête 30 millions, mais ne met pas sur la table la question essentielle de la défense de l'emploi.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les conséquences, quand on a une structure privée, plutôt que - comme cela devrait être, conformément à la pratique...
Le président. Merci.
M. Jean Burgermeister. ...comme nous le voyons aujourd'hui - une structure publique. Cela devrait être une structure publique, mais cette libéralisation favorise...
Le président. Merci, Monsieur Jean Burgermeister.
M. Jean Burgermeister. ...la fragilité des salariés. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Christo Ivanov (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, Palexpo est en effet le vaisseau amiral de notre canton, tant sur le plan économique que sur le plan touristique. Il est extrêmement important pour toutes les entreprises, les sous-traitants qui travaillent pour cette institution, qui leur permet de rayonner sur le plan international.
Outre tout ce qui a été dit sur Palexpo, cette noble institution a parié sur le photovoltaïque et a été la première station de Suisse; aujourd'hui, c'est la deuxième, derrière une plus grande du canton de Zurich.
Je rappellerai que l'Etat de Genève est actionnaire de Palexpo à hauteur de quasiment 80% et que le canton de Vaud est également engagé dans son capital. Par conséquent, il s'agit vraiment d'une société contrôlée par nos cantons et non par le secteur privé.
Il conviendra de refuser les amendements dogmatiques présentés par les tenants de la décroissance. Pour toutes ces raisons, le groupe UDC votera ce PL 12857 demandant un prêt qui nous semble plus que raisonnable. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Nathalie Fontanet, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés... (Le micro de l'oratrice est coupé et un fort effet larsen retentit. Commentaires. L'oratrice rit.) Je suis navrée ! Mesdames et Messieurs les députés, je ne peux que vous encourager à voter ce projet de loi. J'aborderai différents éléments.
Tout d'abord, j'aimerais remercier la commission de l'économie, son président, les députés, mais aussi la commission des finances, son président et les députés, qui ont accepté, au cours de ces dernières semaines, de travailler dans l'urgence, avec des prolongations d'horaires, et qui l'ont fait avec un engagement exceptionnel, en facilitant la vie du Conseil d'Etat, tout cela dans l'intérêt, évidemment, de notre économie, des commerces et en l'occurrence de Palexpo. Je vous en remercie très sincèrement.
Sur ce projet de loi portant sur Palexpo, il me semble qu'il faut rappeler deux éléments. D'abord, Palexpo n'a procédé à aucun licenciement. Depuis les premiers mois de cette crise, il a au départ été en mesure de compléter les RHT, à savoir de payer les 20% de plus, de façon à ce que les salariés reçoivent 100% de leur salaire. A un moment donné, au début de l'été, ça n'a plus été possible. Palexpo a convoqué l'ensemble des salariés, soit environ 200 personnes, pour le leur expliquer. Il y a eu, dans les rangs de ces salariés, un immense soulagement, parce que leurs emplois étaient préservés et que la direction de Palexpo s'y est engagée. Je pense que c'est à relever. Le privé n'est pas forcément méchant. Le privé n'est pas opposé aux collaborateurs, bien au contraire: en ce moment, Mesdames et Messieurs, la plupart des entreprises, voire leur immense majorité, font tout pour conserver leurs salariés. Pour Palexpo, conserver ses salariés, c'est absolument essentiel et c'est pour cela que l'entreprise se bat, parce que sans eux, elle ne se relèvera pas, et lorsque cette crise sanitaire et économique que nous vivons prendra fin, notre canton aura besoin de Palexpo et de ses équipes humaines pour continuer de permettre à notre économie de se développer.
Un élément encore, Mesdames et Messieurs, concernant les amendements: il n'y a pas lieu de les accepter. L'amendement du groupe des Verts est intéressant, mais, cela a été dit, Palexpo a investi plus de 200 millions de francs en dix ans, il a obtenu la certification ISO 20121 en 2018 et il s'agit d'une entité très attentive aux questions de développement durable. S'agissant de l'engagement à ne pas résilier de relations de travail, Palexpo l'a démontré: il n'a pas résilié de relations de travail, et je pense qu'il n'est pas nécessaire d'exiger davantage. Si Palexpo se bat, c'est justement pour conserver ses collaboratrices et collaborateurs, qui sont l'outil essentiel du travail de Palexpo.
Voilà, Mesdames et Messieurs, au nom du Conseil d'Etat, je vous recommande d'accepter ce projet de loi. J'attire votre attention sur le fait qu'il est assorti d'une clause d'urgence, qui nécessite la majorité des deux tiers de vos votes. Je vous invite également, au nom du Conseil d'Etat, à refuser l'ensemble des amendements. Merci beaucoup.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous votons l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 12857 est adopté en premier débat par 79 oui et 3 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'art. 1.
Le président. Nous passons à l'article 2, pour lequel nous sommes saisis d'un amendement de Mme Dilara Bayrak, que je vous lis:
«Art. 2 Prêt (nouvelle teneur)
Le Conseil d'Etat est autorisé à consentir un prêt rémunéré d'un montant de 30 000 000 francs en faveur de Palexpo SA, destiné à fournir les liquidités nécessaires au maintien et à la poursuite des activités de la société dans le cadre de la crise sanitaire du coronavirus. Ce prêt est conditionné à l'engagement de Palexpo SA de présenter, d'ici au 31 décembre 2021, un modèle d'entreprise respectueux des principes du développement durable. Ce modèle d'entreprise engagera également les exposants, notamment en exigeant d'abaisser leur empreinte carbone.»
Madame Dilara Bayrak, vous avez demandé la parole ? (Remarque.) Elle est à vous.
Mme Dilara Bayrak (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. L'amendement est assez clair. L'engouement autour des salons internationaux, encore une fois, ne pourra pas reprendre comme avant. Cet amendement demande simplement qu'un nouveau modèle d'entreprise soit adopté et qu'il respecte les principes du développement durable, notamment en arrêtant de tabler sur un public international. Palexpo l'a clairement signifié lors des auditions: ils vont continuer à viser un public international. Ce n'est pas crédible ! (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.)
Est-ce que j'ose présenter le second amendement aussi ?
Le président. Faites, Madame la députée !
Mme Dilara Bayrak. Merci, Monsieur le président. Le second amendement est encore plus souple: il ne fixe pas de délai pour l'adoption d'un nouveau plan d'entreprise, il se contente de demander un engagement. On ne peut pas demander moins que ça ! S'il y a un domaine où il faut que l'Etat conditionne ses aides, c'est bien dans celui-là, car l'Etat a pris des engagements pour l'urgence climatique, pour la transition écologique, et il n'est pas possible de prêter 30 millions...
Le président. Merci.
Mme Dilara Bayrak. ...sans les conditionner, alors que nous sommes actionnaires de Palexpo à 80% ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je mets aux voix le premier amendement.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 50 non contre 39 oui et 1 abstention.
Le président. Cet amendement ayant été refusé, je mets aux voix le second amendement de Mme Dilara Bayrak, dont voici la teneur:
«Art. 2 Prêt (nouvelle teneur)
Le Conseil d'Etat est autorisé à consentir un prêt rémunéré d'un montant de 30 000 000 francs en faveur de Palexpo SA, destiné à fournir les liquidités nécessaires au maintien et à la poursuite des activités de la société dans le cadre de la crise sanitaire du coronavirus. Ce prêt est conditionné à l'engagement de Palexpo SA d'adopter un modèle d'entreprise respectueux des principes du développement durable, notamment en abaissant l'empreinte carbone des expositions.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 51 non contre 39 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'art. 2 est adopté.
Le président. Nous sommes maintenant saisis d'un amendement de M. Jean Burgermeister. Il s'agit d'introduire un article 2A, qui se présente comme suit:
«Art. 2A Condition (nouveau)
Pour bénéficier du prêt, Palexpo SA doit s'engager à ne pas effectuer de licenciements en 2021, sauf en cas de faute grave et avérée.»
Monsieur Burgermeister, vous n'avez plus de temps de parole, je suis désolé.
M. Jean Burgermeister. Je n'en ai plus ? Ah, écoutez...!
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 53 non contre 35 oui.
Mis aux voix, l'art. 3 est adopté, de même que les art. 4 à 6.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur l'article 7 «Clause d'urgence». Je rappelle que selon l'article 142 de la LRGC, pour être adoptée, la clause d'urgence doit être votée par le Grand Conseil à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres.
Mis aux voix, l'art. 7 est adopté par 65 oui contre 9 non et 13 abstentions (majorité des deux tiers atteinte).
Troisième débat
Mise aux voix, la loi 12857 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 65 oui contre 17 non et 6 abstentions.