Séance du vendredi 28 février 2020 à 18h10
2e législature - 2e année - 10e session - 56e séance

La séance est ouverte à 18h10, sous la présidence de M. Jean-Marie Voumard, président.

Assiste à la séance: Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Antonio Hodgers, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Pierre Maudet, Mauro Poggia, Nathalie Fontanet et Thierry Apothéloz, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Jacques Apothéloz, Anne Marie von Arx-Vernon, Antoine Barde, Thomas Bläsi, Amanda Gavilanes, Sylvie Jay, David Martin, Adrienne Sordet, Daniel Sormanni, Alberto Velasco, Salika Wenger et Yvan Zweifel, députés.

Députés suppléants présents: Mmes et MM. Dilara Bayrak, Sébastien Desfayes, Boris Calame, Nicolas Clémence, Joëlle Fiss, Patrick Malek-Asghar, Eliane Michaud Ansermet, Françoise Nyffeler, Jean-Pierre Pasquier et Francisco Valentin.

Annonces et dépôts

Néant.

M 2376-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Nathalie Fontanet, Murat Julian Alder, Pierre Conne, Alexis Barbey, Céline Zuber-Roy, Jean Romain, Raymond Wicky, Lionel Halpérin, Patrick Malek-Asghar, Patrick Saudan, Jacques Béné, Bénédicte Montant, Nathalie Hardyn, Alexandre de Senarclens, Gabriel Barrillier pour des vacances de Pâques plus longues et des ponts
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session VIII des 24, 25 et 31 janvier 2019.
Rapport de majorité de Mme Patricia Bidaux (PDC)
Rapport de première minorité de M. Olivier Baud (EAG)
Rapport de deuxième minorité de Mme Marjorie de Chastonay (Ve)

Débat

Le président. Nous poursuivons nos travaux avec la M 2376-A, classée en catégorie II, quarante minutes. Je cède ma place à la deuxième vice-présidente.

Présidence de Mme Salima Moyard, deuxième vice-présidente

La présidente. Et je passe immédiatement la parole à Mme Patricia Bidaux.

Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Madame la présidente de séance. Mesdames les députées, Messieurs les députés, la commission de l'enseignement a souhaité travailler sur deux propositions de motions en parallèle, la M 2328 déposée par les Verts en 2016 et la M 2376 déposée par le PLR en 2017, ces deux textes traitant du même sujet.

En novembre 2018, le groupe des Verts retirait la M 2328. En 2015, la M 2151 avait déjà entraîné de vifs débats au sein de cette assemblée et elle avait été balayée avant même d'être étudiée par la commission de l'enseignement. Cela démontre qu'aborder l'organisation des vacances scolaires n'est pas sans risques, tant les avis diffèrent, notamment sur les conséquences pouvant bouleverser non seulement les rythmes scolaires, mais inévitablement aussi le rythme de la société en général. Cependant, cette noble assemblée a choisi d'ouvrir la boîte de Pandore en donnant mission à la commission de l'enseignement d'étudier les deux objets.

Grâce à la M 2376 qui vous est présentée amendée, la majorité a pris en compte les difficultés d'apprentissage engendrées notamment par la durée de l'écart entre les vacances de Pâques et les vacances d'été ainsi que les besoins des enfants et des familles, éléments soulevés par l'étude du DIP à ce sujet. La commission, grâce aux auditions, a entendu les parents concernés par le rythme des vacances scolaires. Si, in fine, il y a une demande de refonte totale, cela aussi de la part des associations d'enseignants et de leurs porte-parole, la motion permettra, si vous l'acceptez, un début de remise en question du rythme scolaire.

Le texte ne demande pas un changement absolu; il vise à la mise en place d'une meilleure répartition durant le dernier trimestre de l'année scolaire, avec des vacances maintenant le lien avec les fêtes de Pâques en aval et augmentant les jours de congé en amont, soit des vacances débutant le vendredi saint et s'étendant sur les deux semaines suivantes. S'ajoute encore durant ce trimestre le vendredi du pont de l'Ascension. Pour ce faire et pour ne pas diminuer le nombre de jours d'enseignement, il est proposé de réduire les vacances d'été d'une semaine. Effectivement, selon la date de Pâques, l'écart entre le congé pascal et les vacances d'été peut atteindre treize semaines. L'ajout d'un vendredi de congé pour un pont lors du Jeûne genevois faisait partie au départ des demandes de la M 2376 du groupe PLR et cela imposerait tout simplement au département d'offrir ce congé aux enseignants.

La majorité - composée de 3 PLR, 3 socialistes, 2 PDC, 1 UDC et 2 MCG - a accepté l'amendement qui proposait justement de ne pas offrir de pont au moment du Jeûne genevois, tout en maintenant celui de l'Ascension et en rallongeant les vacances de Pâques. Comme je le disais, cela permet de garder le nombre de jours de vacances total sur l'année scolaire, mais surtout - et c'est une priorité tout de même - de maintenir le nombre de jours scolarisés. Je pense que nous reviendrons plus tard sur l'amendement proposé par M. le député Murat Alder, qui nous est parvenu hier.

Ce qui vous est proposé n'augmente pas les coûts de l'école: le nombre d'heures d'enseignement reste identique et les vacances d'été de sept semaines sont maintenues - ce qui demande certes un changement d'habitudes.

Parler de changement climatique et utiliser les températures en août comme argument pour réfuter la faisabilité des invites de la proposition de motion n'est pas justifié par les statistiques. Effectivement, les températures mesurées au mois d'août ne sont pas comparables à celles vraiment élevées du mois de juillet. Pour 2019, elles sont même à peine plus hautes que celles du mois de juin - je tiens le tableau des mesures des températures moyennes cantonales mois par mois depuis 2017 à disposition de M. le député Baud, rapporteur de minorité, vous transmettrez, Madame la présidente.

Mesdames les députées et Messieurs les députés, en acceptant cet objet, vous avez la possibilité d'initier une réflexion plus large de la part du Conseil d'Etat. La majorité de la commission vous encourage donc à accepter cette proposition de motion telle qu'amendée par la commission. Je le rappelle, cela ne coûtera rien de plus au canton et permet de maintenir le nombre de jours d'enseignement et de jours de vacances prévus.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de première minorité. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, la question des vacances scolaires est un serpent de mer; ça revient souvent, tout le monde a de bonnes idées. C'est un peu comme pour l'horaire scolaire, tout le monde a de bonnes idées, mais une fois qu'on a tout tenté, tout essayé, on constate qu'en bougeant une chose, tout le reste bouge et, pour finir, la solution est de revenir au point de départ.

Pourquoi s'opposer à des vacances de Pâques plus longues et à des ponts supplémentaires ? Essentiellement parce que les vacances d'été seraient en conséquence amputées d'une semaine en août, ce que le titre de la proposition de motion s'abstient précisément de mentionner. Il ne s'agit pas juste de mettre en place des vacances plus longues; non, il s'agit de rétrécir celles d'été ! Or, Mesdames et Messieurs les députés, l'enquête du SRED montre que la majorité des parents - 57% - ne désire pas une diminution de la pause estivale ; les familles sont même satisfaites à 81% de la répartition actuelle des congés scolaires. Cette enquête est récente, elle a été conduite en 2016, justement à un moment assez crucial, quand la période d'enseignement de fin d'année scolaire a duré treize semaines, ce qui était assez exceptionnel. C'est long, c'est vrai, et on aurait pu penser que ça aurait justement pu influencer les familles. Eh bien non ! Ça rejoint l'enquête du GAPP - le groupement des associations de parents d'élèves, qui s'appelle maintenant la FAPEO - qui présupposait que les familles voulaient diminuer la durée des vacances scolaires d'été. Or, sur les 8629 réponses reçues, 67,4% des parents rejetaient la réduction des vacances d'été.

Mesdames et Messieurs les députés, changer quelque chose, c'est prendre le risque de tout chambouler: en 1976 déjà, une semaine de congé avait été enlevée en été. Avant, on commençait début septembre; maintenant, fin août. Plus aucune rentrée scolaire n'a lieu au mois de septembre. Si on enlève encore une semaine, les écoliers feront leur rentrée scolaire à la mi-août. J'ai cru comprendre qu'il y avait une urgence, avec le réchauffement climatique, etc. Si c'est pour ouvrir les écoles mi-août, en pleine canicule, quand il fait 40 degrés dans les classes, et les fermer ensuite parce que ce n'est pas tenable, je ne vois pas très bien ce qu'on aura gagné !

Mesdames et Messieurs les députés, Ensemble à Gauche vous recommande donc la prudence: jusqu'à présent, ces vacances satisfont la grande majorité. Ne bougeons pas, laissons les vacances telles qu'elles sont. Huit semaines en été, ce n'est ni trop ni trop peu; ça permet de faire beaucoup de choses, notamment l'entretien des bâtiments. C'est court, mais ce n'est pas négligeable quand on voit l'état des écoles de notre canton.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de deuxième minorité. Madame la présidente de séance, Mesdames et Messieurs les députés, pour nous, les Verts et les Vertes, le compromis voté par la commission est minimaliste, même si cela va dans le bon sens. En effet, il arrive certaines années, comme en 2016, que le troisième trimestre dure plus de treize semaines, menant à une fatigue généralisée des élèves et du corps enseignant. C'est la raison pour laquelle les Vertes avaient déposé une proposition de motion Verte, la M 2328, «Des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques». Le titre est explicite et cette motion invitait le Conseil d'Etat, dans la perspective de mieux répartir les périodes de travail et de repos, à fixer une semaine de vacances scolaires au printemps découplée de la date fluctuante des fêtes de Pâques.

La question du calendrier scolaire est centrale car elle influence toute notre société. En effet, les adultes se calquent sur le système scolaire pour organiser son fonctionnement. Or, à Genève, les dernières modifications des vacances scolaires datent de 1976: il y a quarante-trois ans ! Pour les Vertes, une telle réflexion aurait nécessité une large consultation et non une petite enquête sur un panel étroit de parents avec des questions orientées. Mais très peu a été fait et aucun débat incluant la population n'a eu lieu hormis à la commission de l'enseignement. Le DIP a préféré choisir l'option inverse, à savoir attendre la décision de ce plénum, puis éventuellement ouvrir une large consultation en fonction du vote. Mais, une fois le vote accompli, à quoi bon consulter ? Voilà le premier non-sens que nous, les Vertes, souhaitions mettre en avant.

C'est aussi l'une des raisons qui ont poussé les Vertes à retirer la M 2328 afin de lancer un signal au département et à la commission et de marquer un temps d'arrêt pour mener à bien cette démarche de consultation et de débat public cruciale à nos yeux.

Les enjeux touchent la société dans son ensemble, mais prioritairement les élèves et en particulier leurs besoins ainsi que les rythmes d'apprentissage. L'école inclusive en fait partie. La vision Verte de l'école est de répondre aux besoins des enfants. Or, la M 2376 sur laquelle nous nous penchons ce soir satisfait une catégorie de parents d'élèves qui souhaitent notamment faire des ponts et partir en vacances. Selon nous, cette motion ne répond pas à certaines recherches scientifiques qui préconisent entre autres des rythmes d'apprentissage réguliers: huit semaines d'apprentissage, deux semaines de vacances, huit semaines d'apprentissage, deux semaines de vacances, etc. Ce texte ne répond pas non plus aux demandes des associations de parents d'élèves de l'enseignement obligatoire et postobligatoire. La M 2376 n'offrira pas non plus le pont du Jeûne genevois.

En conclusion, les Vertes sont insatisfaites parce que cette proposition ne va pas jusqu'au bout du raisonnement et ne prend en considération ni nos demandes réitérées en matière de consultation large, ni les besoins des élèves, ni ceux des enseignants, ni les études sur la chronobiologie et la chronopsychologie, ni les revendications des associations de parents d'élèves depuis des années, ni les revendications des fédérations d'associations d'enseignants depuis des années, ni l'école inclusive, ni la question de l'adaptation des loisirs, etc.

Mesdames et Messieurs, suite aux auditions et aux discussions internes, une partie des Vertes vous recommande donc de refuser cette motion afin d'organiser une consultation générale auprès de la population: que chacune et chacun puisse participer à un dialogue constructif et fondamental pour nos enfants et nos jeunes. (Applaudissements.)

M. Stéphane Florey (UDC). Madame la présidente, ce débat frise le ridicule ! On cherche des problèmes là où il n'y en a pas. Je l'ai dit à maintes reprises, à chaque fois qu'on a abordé cette question, et je le redis volontiers ici: s'il y a bien un sujet sur lequel il n'y a pas de problème à l'école, c'est celui des vacances scolaires ! On peut dire tout ce qu'on veut sur le DIP, mais il n'y a jamais eu de problème par rapport aux vacances, les études le démontrent. Madame la conseillère d'Etat, vous connaissez très bien ces études, elles datent du temps où j'étais encore à la commission de l'enseignement. (Commentaire.) Même la plus récente que vous pouvez avoir sous le coude le démontre: la majorité des familles est satisfaite du système actuel. Alors pourquoi vouloir en changer ? C'est un peu la question qu'on s'est posée au caucus en étudiant cet objet. Finalement, on veut réinventer la roue et tout chambouler à chaque fois. Peut-être que ça tombe bien, avec le changement climatique, mais nous passerons bientôt nos vacances d'été à Noël et ainsi de suite à force de tout modifier ! Ou on fait comme en France, les vacances à la carte: c'est aussi une possibilité.

La seule vraie question que soulève cette motion est celle des ponts. Effectivement, là-dessus, on aurait pu trouver une autre solution que celle de vouloir tout changer dans les vacances. Une des solutions possibles qui ne coûterait pas grand-chose serait de compenser les quelques ponts annuels avec - je le dis à la louche - cinq à dix minutes de cours de plus par jour. Ça suffirait largement pour donner les ponts et ça ne coûterait pas plus cher puisque le nombre d'heures de cours serait tout à fait identique. Avec dix minutes en plus quotidiennement, l'élève ne voit pas de différence et cela contenterait tout le monde. Pour le reste, qui ne sert strictement à rien, le groupe UDC refusera cette motion et vous invite à faire de même.

M. Grégoire Carasso (S). Quel beau sujet que les vacances scolaires ! En préambule, le groupe socialiste est évidemment favorable au compromis - certes minimaliste, mais c'en est un malgré tout - sorti de commission, et nous appelons de nos voeux la large consultation à laquelle il a été fait référence. C'est une évidence que de modifier les vacances scolaires en passant par la consultation des associations de parents d'élèves et nous avons pleine confiance dans la capacité du DIP à mener cette consultation le moment venu. Oui, c'est un compromis minimaliste, mais qui va dans le bon sens. Je cite la rapporteuse de minorité, qui doit finalement être un peu embarrassée, parce que le statu quo est encore moins confortable par rapport au rythme d'apprentissage des enfants, point qui nous réunit pourtant.

Pourquoi le statu quo est-il moins satisfaisant ? Parce que vous savez bien que Pâques ne tombe pas chaque année à la même date. Pâques tombe le premier dimanche après la pleine lune qui suit l'équinoxe de printemps. (Exclamations.) Autrement dit, au plus tard le 25 avril, ce qui ne pose pas de problème par rapport au rythme d'apprentissage des enfants, mais au plus tôt - cela arrive aussi - le 21 mars. Lorsque les vacances de Pâques tombent tôt, cela signifie que les élèves ont à enchaîner treize semaines de cours, soit trois mois d'école: avril, mai, juin. Vous transmettrez, Madame la présidente de séance, c'est dur pour les élèves !

C'est la raison pour laquelle un compromis échafaudé en commission propose d'étudier l'hypothèse suivante: ôter la dernière semaine des vacances durant l'été. On y gagne cinq jours. Sur ces cinq jours, collons les vacances de Pâques systématiquement après le vendredi saint de sorte que, même quand Pâques tombe tôt, cela fera toujours une semaine de moins sur cette longue période jusqu'aux vacances d'été. Et puis, ce faisant, quatre jours sont mobilisés, le cinquième et dernier jour gagné grâce aux vacances d'été ainsi raccourcies d'une semaine. Eh bien, ce cinquième jour, nous proposons de le placer précisément au milieu de cette période - au moment de l'Ascension dont la date est fonction de celle de Pâques, je ne vous apprends rien ! Placer ce jour de congé ce vendredi-là donne une petite pause bienvenue pour les enfants au milieu de cette période d'apprentissage potentiellement très longue.

Oui, c'est un compromis minimaliste; oui, au-delà de ce compromis, il faudra mener une consultation au terme de ces votes, mais c'est en pensant précisément au rythme d'apprentissage des enfants que le groupe socialiste vous invite à voter le compromis proposé par la commission. Merci de votre attention. (Applaudissements.)

M. Murat Julian Alder (PLR). Au nom du groupe PLR, j'aimerais remercier la commission de l'enseignement pour l'accueil semi-favorable réservé à la motion déposée par la conseillère d'Etat Nathalie Fontanet lorsqu'elle était encore députée dans notre parlement, il y a quelques années. Semi-favorable, vous l'aurez compris, parce que nous ne comprenons pas la justification qu'il y a à faire le pont de l'Ascension mais pas celui du Jeûne genevois. Surtout que si l'on enlève une semaine de vacances en été, cela a pour conséquence d'augmenter l'intervalle séparant la rentrée scolaire de ce fameux week-end du Jeûne genevois, l'une des principales célébrations de notre canton, au cours de laquelle beaucoup de familles aimeraient prendre encore quatre jours de congé avant de rentrer dans le vif du sujet de l'année scolaire.

Le groupe PLR se réjouit de ce compromis, mais ne peut s'en contenter; raison pour laquelle il a déposé un amendement que je vous présenterai tout à l'heure. En substance, la question qui se pose à vous, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, est de savoir si nous voulons les deux ponts et deux semaines à Pâques ou si nous ne voulons qu'un seul pont, deux semaines à Pâques et un jour en plus durant cette même période.

Finalement, c'est ce point que nous devrons trancher, et à ce stade, Mesdames et Messieurs, j'aimerais vous inviter, au nom des libéraux-radicaux, mais aussi des libéraux-radicales et des libérales-radicaux, à entrer en matière sur cette proposition de motion.

Mme Katia Leonelli (Ve). Messieurs les députés, Mesdames les députées, notre groupe s'opposera ou s'abstiendra en partie sur ce texte parce qu'il ne correspond pas à nos souhaits de mettre en place des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques, mais a aussi l'avantage d'améliorer la situation actuelle. Il y a quelques mois, notre groupe a retiré l'excellente proposition de motion qui demandait justement des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques, car le département avait promis aux associations de parents d'élèves et aux associations professionnelles de mener au préalable une large consultation, ce qui permettrait une discussion à grande échelle pour répondre aux besoins et aux souhaits des principaux concernés. L'objectif de notre texte était de fixer deux semaines de congé au milieu de la longue période qui sépare les vacances de février des vacances d'été, cela indépendamment de la date des fêtes pascales. En effet, comme l'a souligné M. Carasso, la date de Pâques varie d'année en année et tombe parfois très tôt, ce qui laisse jusqu'à treize semaines d'enseignement non-stop.

Pour le bien-être des élèves et pour leur assurer de meilleures conditions d'enseignement, nous aurions préféré pouvoir alterner un nombre maximum de semaines de cours - par exemple huit - avec des vacances suffisamment longues pour être reposantes - par exemple deux. Il se trouve que ce texte ne va pas aussi loin que notre idée et ne répond pas aussi bien au rythme d'apprentissage des élèves, mais l'amendement PS voté en commission rend cette motion plus proche de notre idée initiale en proposant que les deux semaines de vacances suivent le vendredi de Pâques pour rendre un peu moins difficiles les années extrêmes où Pâques tombe très tôt dans l'année. Nous n'allons évidemment pas voter l'amendement PLR qui, dans sa substance, revient au texte initial et s'éloigne de notre volonté.

Ce n'est pas une solution idéale, mais c'est déjà mieux que la situation actuelle. Le pont qui suit l'Ascension permettra aussi d'apporter une pause supplémentaire durant cette longue période printanière. Vous l'aurez compris, nous aurions préféré des vacances de printemps plutôt que des vacances de Pâques et c'est la raison pour laquelle nous allons à la fois nous abstenir et voter contre ce texte. Dans tous les cas, ce que nous aurions voulu, c'était une large consultation pour avoir une vision globale sur le calendrier scolaire et le considérer comme un ensemble cohérent, et répondre au mieux au rythme d'apprentissage des élèves.

La présidente. Je vous remercie. Je passe la parole à M. Jean Romain.

M. Jean Romain (PLR). Pour combien de temps, Madame la présidente ?

Une voix. Trois heures !

M. Jean Romain. Trois heures, ça va !

La présidente. Pour deux minutes quinze, Monsieur le député.

M. Jean Romain. Merci. Lorsque Pâques tombe très tôt surgissent les récriminations, vous le savez, Madame la présidente. En revanche, lorsque Pâques arrive plus tard, on se claquemure dans un silence compassé parce qu'en fait, ça va pas mal ! (Rire.) Pour nous, parce que ce n'est pas raisonnable, il est hors de question de dissocier les vacances de Pâques de la fête de Pâques. Ça, c'est important: nous devons conserver ce synchronisme ! En touchant aux vacances, on risque la seule chose qui ne va finalement pas si mal avec l'école genevoise: l'école genevoise, on y est très bien quand on n'y est pas ! (Rires.) On risque d'ouvrir une boîte de Pandore, une boîte à problèmes dans laquelle s'engouffrera toute une série de personnes qui se disent que nous devons changer les vacances quelles qu'elles soient. Trente-huit semaines et demie de vacances... (Commentaires.) ...ça semble intouchable - et ça doit l'être, évidemment, vous l'avez compris.

A l'école, je crois que le gros problème, ce sont les huit semaines d'été. Pour une partie des gens, c'est beaucoup trop: j'entends certaines personnes de chez nous qui disent que c'est l'horreur d'occuper nos enfants pendant huit semaines. Pour d'autres, vous vous en souvenez, c'est pas mal, les grandes vacances ! Quel rêve c'était, lorsque nous pouvions partir en grandes vacances, à seize ans, dix-sept ans ou même un peu plus tard ! Je crois que ces grandes vacances sont importantes, et moi, je suis finalement assez favorable à ces huit semaines. (Commentaire.) C'est ça ! En revanche, s'il faut modifier...

La présidente. En revanche, il va falloir conclure, Monsieur le député !

M. Jean Romain. C'est fini ?

Une voix. Vas-y !

La présidente. Je vous ai dit qu'il allait falloir conclure - vous avez encore cinq secondes.

M. Jean Romain. Cinq secondes pour conclure ! Je vous remercie de votre générosité, Madame la présidente de séance ! Pour conclure, je crois qu'on peut évidemment toucher aux vacances, mais il faut faire attention, en y touchant...

La présidente. Terminez votre phrase !

M. Jean Romain. ...de ne pas avoir plus de problèmes que de solutions ! Je vous remercie.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole au rapporteur de première minorité, M. Olivier Baud, pour cinquante secondes.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, bon, ça m'a amusé d'entendre le député Romain dire qu'il y avait 38,5 semaines de vacances ! Lapsus intéressant. Non, ce sont 38,5 semaines d'enseignement, et les élèves ont 13,5 semaines de vacances.

Au départ de cette proposition de motion, l'idée était de raccourcir la période de cours après les vacances de Pâques jusqu'aux vacances d'été. Elle y répond en partie, mais le problème, je le répète quand même, c'est cette réduction au mois d'août. Le questionnaire date de 2016; on peut faire chaque année des questionnaires du SRED, si vous voulez, et je ne sais pas combien d'études Mme la conseillère d'Etat a encore sous le coude, mais 23% des familles sont très satisfaites de la répartition actuelle, 58% assez satisfaites, 15% peu satisfaites, 4% pas satisfaites.

La présidente. Vous passez sur le temps de votre groupe.

M. Olivier Baud. Ah, j'ai encore beaucoup de temps !

La présidente. Absolument !

M. Olivier Baud. C'est un peu compliqué de naviguer comme ça, à vue, sans aucune indication ! J'ai peut-être accéléré inutilement. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de prendre en compte cet avis des familles. C'est l'enquête du SRED, ce n'est pas l'enquête des associations professionnelles ou autres. C'est véritable, ça date de 2016; comme l'a dit M. Romain, qui a un peu confondu les semaines de vacances avec les semaines d'enseignement - mais ce n'est pas grave - il faut veiller à ne pas tout chambouler. Si on change ça, on ne sait pas très bien ce qu'on aura, et je crois sérieusement, pour l'avoir vérifié sur le terrain, que huit semaines pour faire des travaux dans les écoles l'été, c'est très peu ! Parce que le reste du temps, ce n'est pas possible, ça oblige à fermer une école entière; on n'a pas beaucoup de bâtiments libres à Genève. Donc soyons raisonnables, c'est un statu quo, même s'il dure depuis 1976; au fil des ans, de génération en génération, personne ne s'y est opposé frontalement, l'enquête du SRED de 2016 le prouve !

Mme Patricia Bidaux (PDC), rapporteuse de majorité. Le Conseil d'Etat a eu une position claire au sujet du temps disponible pour faire des travaux dans les écoles: sept semaines sont suffisantes. Notre conseillère d'Etat a clairement dit que c'est possible, je tenais à le souligner.

D'autre part, cette étude sur la modification de la durée des vacances scolaires relève que ce sont les vacances d'été qui seront les plus faciles à organiser pour les familles en cas de diminution. Voilà, je m'en tiendrai là, je garde un peu de temps pour discuter de l'amendement.

La présidente. Si vous souhaitez vous exprimer sur l'amendement, il faut le faire maintenant, Madame la rapporteuse !

Mme Patricia Bidaux. OK, excusez-moi ! Je vais le faire tout de suite. J'ai été surprise de recevoir cet amendement de la part de M. Murat Alder, puisque trois députés PLR ont tout de même accepté le changement. Ça m'étonnait un peu de voir réapparaître la demande de revenir sur le pont du Jeûne genevois. Je rappelle aussi que si on le fait, ce sera un gain pour les enseignants puisqu'il n'y a pas de compensation. Cela veut dire qu'on enlève non seulement un vendredi, mais encore un autre vendredi et, en plus, il n'y aurait pas de compensation sur les heures scolaires ! Si effectivement certains à droite veulent offrir un jour de congé supplémentaire aux enseignants, je les laisserai peser le pour et le contre !

La présidente. Je vous remercie et je passe la parole à M. Murat Alder.

M. Murat Julian Alder (PLR). Merci, Madame la présidente. L'objectif de cet amendement...

La présidente. Je ne passe en fait pas la parole à M. Murat Alder, car ma collègue de gauche me dit que vous n'avez plus de temps de parole.

M. Murat Julian Alder. Mais je peux juste présenter mon amendement ?

La présidente. Vous l'avez fait préalablement, Monsieur le député.

M. Murat Julian Alder. Si vous me laissez juste trente secondes...

La présidente. Je vous rappelle que nous sommes dans un débat unique puisqu'il s'agit d'une motion et non d'un projet de loi; il y a visiblement un peu de flottement chez les rapporteurs aussi; nous avons un seul débat, l'amendement ou les amendements doivent être discutés à ce moment-là. Et vous avez épuisé votre temps de parole !

M. Murat Alder. Ayant été mis en cause par la rapporteure de majorité, je demande trente secondes pour présenter mon amendement. (Exclamations. Rires.)

La présidente. Bien essayé, mais vous n'avez pas été mis en cause ! Je vous remercie de vous asseoir.

M. Murat Julian Alder. Si, si !

La présidente. Non, Monsieur le député ! Je cède très brièvement la parole à M. Olivier Baud.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de première minorité. Merci, Madame la présidente. C'était juste pour dire - j'ai oublié de le faire avant - qu'Ensemble à Gauche vous recommandait de rejeter cet amendement.

La présidente. Merci. Nous arrivons à la fin du débat, je peux passer la parole à Mme la conseillère d'Etat. Madame Anne Emery-Torracinta, vous avez la parole.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Madame la présidente. La question des vacances scolaires ne concerne pas que les enseignants et les élèves, mais bien l'ensemble de la société, et on voit combien les débats peuvent être animés à ce sujet. Je rappellerai quelques éléments du contexte pour revenir ensuite sur l'importance du rythme scolaire et ce qu'il faut faire ou pas dans ces cas-là.

Pour le contexte, l'idée de réfléchir aux vacances scolaires ne date pas d'aujourd'hui, elle remonte aux discussions sur le rajout du mercredi matin à l'école primaire. A l'époque, le conseiller d'Etat Charles Beer s'était engagé auprès des associations de parents à proposer une réflexion plus générale sur l'ensemble du calendrier scolaire - et donc des vacances - une fois le mercredi matin en place. J'avais donc été sollicitée par ces mêmes associations de parents et j'avais répondu avec ce fameux sondage auprès des familles. Plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de familles - je ne me le rappelle plus - avaient été interrogées pour savoir s'il fallait changer les vacances scolaires, si elles étaient satisfaites de la situation aujourd'hui, etc. Effectivement, en 2016, environ 80% - ou 70% - des personnes trouvaient que les vacances actuelles étaient satisfaisantes. Par contre, la quasi-totalité des familles interrogées demandaient qu'on discute de la question des deux ponts du Jeûne genevois et de l'Ascension. Ça, c'est la première chose.

Ensuite, deux propositions de motions ont été déposées coup sur coup au parlement: une par les Verts, une par le PLR, ce qui a obligé la commission de l'enseignement à se saisir du sujet. Dans ce cadre-là, nous avons regardé quels étaient les éléments qui militaient ou pas pour une modification du calendrier scolaire. Qu'est-ce que l'on constate, qu'est-ce que les études nous montrent ?

Premièrement, que les vacances d'été sont trop longues; pourquoi ? Parce qu'on sait qu'un certain nombre d'enfants, notamment ceux qui ont des difficultés scolaires, oublient entre juin et septembre ce qu'ils ont appris durant l'année écoulée. Cela veut dire qu'ils démarrent l'année scolaire suivante avec un handicap, en quelque sorte: ils ont perdu un certain nombre de connaissances et ils n'arrivent pas à les rattraper. Toutes les études montrent qu'il faudrait raccourcir l'été ou trouver des solutions pour ces enfants-là. Ce n'est pas un problème dans les milieux stimulants et favorisés, parce que là, les parents peuvent aider leurs enfants, mais dans des milieux plus précarisés, c'est une cause supplémentaire d'échec scolaire.

Deuxième constat, on l'a rappelé, lorsque Pâques tombe tôt, on a une très longue période entre la fin mars et les vacances d'été: les enfants sont fatigués, les enseignants le disent. Il faudrait trouver une façon d'améliorer les choses. Les Verts ont raison, dans l'absolu: si on pouvait avoir des vacances de printemps, on les mettrait où on veut. Toutefois, Mesdames et Messieurs les députés Verts, je vous rappelle que l'ensemble de la population n'a pas les vacances des enseignants, et au-delà de la question de la fête religieuse, si on séparait le week-end de Pâques des vacances de printemps, on aurait de temps en temps trois jours de vacances - le week-end de Pâques du vendredi saint au lundi de Pâques - qui seraient isolés et à ce moment-là, une période beaucoup plus courte de vacances scolaires de printemps à un autre moment. Ça ne répondrait pas à un autre élément qu'on connaît grâce à la recherche scientifique, à savoir que des vacances sont vraiment bénéfiques pour les enfants lorsqu'elles durent au moins deux semaines.

Dernier élément: la chronobiologie. Ce fameux rythme selon lequel il faudrait alterner sept à huit semaines d'enseignement avec deux semaines de vacances n'a aucun fondement scientifique ! Les études divergent à ce propos et on n'a aucune certitude que ce rythme soit favorable ou pas. Je pense qu'il ne faut pas en faire un argument pour ou contre puisque les études divergent à ce propos.

A partir de ces réflexions, qu'est-ce que la commission a fait d'intelligent ? Elle a essayé de rallonger les vacances de Pâques pour avoir ces fameux quinze jours. Elle a aussi essayé de diminuer les vacances d'été pour répondre à l'argument dont je vous ai parlé tout à l'heure. Elle a aussi proposé d'offrir le congé de l'Ascension. En faisant cela, en rajoutant une semaine après Pâques, on est sûr que, même quand Pâques tombe beaucoup plus tôt, on aura une semaine de vacances de Pâques en plus qu'aujourd'hui dans tous les cas. Lorsque Pâques tombe tôt, c'est bien plus favorable aux enfants.

Par conséquent, le département peut vivre avec cette solution-là, je l'avais dit en commission. Nous avons quand même souhaité la soumettre à une large consultation et cette consultation a eu lieu, auprès de tous les organismes concernés, y compris des partis politiques. Et je me permets de dire que, si le PLR a répondu «très satisfaisant» à toutes les questions qui étaient posées, M. Florey et l'UDC n'ont malheureusement pas souhaité répondre - nous n'avons jamais eu de réponse de l'UDC !

M. Stéphane Florey. On n'a jamais rien reçu là-dessus !

Mme Anne Emery-Torracinta. L'UDC aurait pu se prononcer sur ce fait ! Quels sont les résultats du sondage ? Je simplifie, vous aurez les résultats avec le rapport au Grand Conseil. En gros, les entités interrogées - il y a tous les partis, il y a les mouvements de jeunesse, il y a les associations de parents, il y a le mouvement populaire des familles, les mouvements du handicap, etc. - sont favorables à 75% au calendrier proposé. Par conséquent, si votre Grand Conseil vote cette proposition de motion, le Conseil d'Etat ira dans ce sens-là et la première année d'application serait l'année 2022-2023.

Puisque M. Alder n'a pas pu présenter son amendement, j'explique le contexte de celui-ci, si on m'en laisse le temps, Madame la présidente.

La présidente. Allez-y ! Allez-y !

Mme Anne Emery-Torracinta. Parmi les organismes ou les entités qui se sont opposées à la proposition, il y avait des entités qui disaient qu'elles étaient contre parce que ça n'allait pas assez loin. Ça a été par exemple la réponse des Verts ou de certaines associations d'enseignants; certaines étaient favorables, d'autre pas. Elles auraient voulu le système 8-2-8-2 ainsi que la dissociation des vacances de printemps des fêtes de Pâques. Et le Pouvoir judiciaire nous a dit qu'il y avait un problème avec les féries judiciaires en raison de leur durée. Je vous passe les détails, mais si on devait aller dans ce sens-là, on aurait peut-être l'obligation d'avoir trois semaines d'arrêt pour le Pouvoir judiciaire. Je me suis quand même dit que c'était bizarre, parce que nos voisins vaudois ont ce système-là ! Nous avons donc téléphoné au Pouvoir judiciaire vaudois qui est juste tombé par terre en prenant connaissance de la question que les Genevois se posaient ! La réponse a été qu'il n'y a aucun souci: les féries judiciaires ont lieu ainsi que prévues par la loi et, ma foi, les affaires judiciaires se déroulent normalement durant la semaine supplémentaire de vacances. Ce bémol-là tombe donc, à mon avis.

Quelqu'un a évoqué les travaux sur les bâtiments: sept semaines l'été, c'est peu pour des rénovations, mais l'office cantonal des bâtiments a dit que c'était génial: en rallongeant le congé de Pâques, on pourra faire des travaux à ce moment qu'on n'avait jamais le temps de faire jusqu'à présent ! Donc, voilà une majorité de personnes favorables; si votre Grand Conseil va dans ce sens, le Conseil d'Etat suivra la proposition et, je le répète, dès 2022-2023, nous aurons ce nouveau calendrier scolaire.

La présidente. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Nous sommes en procédure de vote, je vais vous faire voter sur l'amendement général plus ou moins présenté par le PLR. Il s'affiche, il est d'un seul bloc, il y a un seul vote:

«invite le Conseil d'Etat

à modifier la grille des jours de congé et les vacances scolaires des élèves du canton de Genève afin de tenir compte des résultats de l'enquête communiqués par le SRED au mois de janvier 2017 en:

- fixant les vacances de Pâques de manière à ce que celles-ci durent deux semaines complètes et coïncident avec la période des féries judiciaires de Pâques, soit du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques;

- accordant congé aux élèves les vendredis qui suivent les jeudis de l'Ascension et du Jeûne genevois;

- réduisant d'une semaine la durée des vacances d'été, en avançant la date de la rentrée scolaire d'une semaine.»

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 45 oui et 1 abstention.

La présidente. Nous votons maintenant sur la proposition de motion.

Mise aux voix, la motion 2376 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 62 oui contre 19 non et 11 abstentions.

Motion 2376

M 2390-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Nathalie Fontanet, Pierre Conne, Jean Romain, Murat Julian Alder, Céline Zuber-Roy, Jacques Béné, Bénédicte Montant, Nathalie Schneuwly, Raymond Wicky, Philippe Morel, Gabriel Barrillier, Nathalie Hardyn : Pour un personnel soignant formé à Genève !
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session XII des 22, 23 février et 1er mars 2018.
Rapport de majorité de M. Alexis Barbey (PLR)
Rapport de minorité de M. Olivier Baud (EAG)

Débat

Présidence de M. Jean-Marie Voumard, président

Le président. Notre objet suivant est classé en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole à M. le député Alexis Barbey.

M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. On oblige ici le Grand Conseil à un exercice de mémoire: ce projet date d'une époque qui paraît maintenant lointaine, mais cette proposition de motion n'en est pas moins encore tout à fait d'actualité puisque la problématique abordée n'a pas été résolue.

Les motionnaires se basent sur les statistiques de formation: 67% du personnel infirmier des HUG provient de France alors que Genève manque de places de formation. C'est ce manque de places qui limite la formation du personnel par la HEdS - la Haute école de santé - et non pas l'absence de besoins des HUG ou un manque de vocations des étudiants. Ce texte cherche à s'attaquer à ce facteur limitant en demandant que de nouveaux locaux soient mis à disposition de la HEdS chargée de la formation du personnel de santé en général et des infirmiers et infirmières en particulier. De nouveaux locaux doivent être attribués pour assurer ces formations, et ce n'est pas un problème simple à résoudre, parce qu'on ne peut pas mettre à disposition une salle de classe normale: il faut des possibilités étendues, pour des travaux pratiques et autres. Néanmoins, ça vaut la peine de se pencher sur la question et de dépasser le nombre de 160 places actuellement disponibles pour atteindre 200-250, voire 300 places de formation, ce qui représente la réalité des besoins infirmiers des établissements du canton. C'est pourquoi je vous invite à accepter cette motion.

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le rapporteur de majorité a dû faire un effort de mémoire parce que cette proposition de motion date effectivement: elle est même caduque. Elle l'était en quelque sorte déjà en arrivant en commission, parce que le temps qu'elle arrive, la motivation première des signataires avait été dépassée. La pénurie du personnel soignant à Genève est un problème que personne ne nie; elle est justement relevée dans le premier considérant, mais ensuite, on n'en parle pas dans les cinq invites et la difficulté à recruter du personnel soignant n'est plus du tout mentionnée. Ce thème semble même avoir été évacué, comme si le problème résidait ailleurs.

Or, le problème qui occupait les signataires se retrouve dans le titre: «Pour un personnel soignant formé à Genève !». Pourquoi cette proposition de motion ? En fait, pour s'opposer à la création d'un institut de formation en soins infirmiers prévu à Gaillard-Ambilly, c'est-à-dire en France voisine, mais qui a été abandonné ! Selon le département, c'était même un projet mort-né; il n'en était même plus question et ce texte aurait objectivement dû être retiré puisque l'objet n'était plus du tout d'actualité. Ça fait plus de deux ans que le rapport de minorité a été déposé. Effectivement, peut-être que toutes les réponses en matière de formation du personnel soignant ne sont pas résolues et ne seront pas forcément résolues demain. La Haute école de santé doit pouvoir former plus de personnes, on est tous d'accord, mais cette proposition de motion là - qui n'a pas été amendée pour finir - n'est pas la réponse. Mesdames et Messieurs les députés, il est donc plus raisonnable de la refuser, quitte à faire une autre proposition ou à étudier vraiment le problème.

M. Patrick Saudan (PLR). Monsieur le président, vous transmettrez à notre estimé rapporteur de minorité qu'il a malheureusement tout faux ! Il a tout faux, parce que - et je vais mettre du baume au coeur à nous autres, députés de milice - il se peut que nos travaux en commission sur des propositions de motions aient un effet direct sur la vie de nos concitoyens !

Je ne peux pas le prouver, mais ces travaux ont fini en décembre 2017 et si vous reprenez les invites de cette motion, la troisième demandait d'étudier si des locaux vides aux HUG pouvaient être donnés provisoirement à la HEdS à cause du manque de salles de formation. Comme vous le savez, le BDL2 existe depuis 2014 et, après le transfert des patients du BDL1 au BDL2, plusieurs étages du BDL1 étaient inoccupés. Or, quelle n'a pas été ma surprise, dès janvier 2018, de voir que la demi-aile du sixième étage de l'aile Jura du BDL1 a été attribuée à la HEdS, avec des salles de formation encore utilisées à l'heure actuelle. Je ne vais pas nous attribuer ce crédit, mais les auditions menées durant les travaux en commission ont montré que la communication entre le DIP et le département de la santé n'était pas optimale et que ces deux départements se renvoyaient la balle. Je dois néanmoins rendre un grand hommage au DIP parce qu'un groupe de travail a été constitué depuis 2012 et s'est attaqué à cette problématique plus complexe qu'un simple problème de locaux de formation. Je pense donc que nous avons eu une petite influence qui a permis de libérer des locaux qui ont permis de mieux former nos étudiants infirmiers.

Cette proposition de motion - sa première invite - est toujours d'actualité, vous transmettrez au rapporteur de minorité: nous avons une pénurie de soignants, même si cela est en voie d'amélioration, puisque actuellement, deux tiers des jeunes infirmiers proviennent de nos instituts de formation et qu'on n'a plus besoin de les recruter dans d'autres pays. Néanmoins, cette problématique est toujours prégnante et je pense qu'un immense travail a été fait - par l'Etat de Genève d'une manière générale et par nos départements en particulier - pour essayer de régler cette situation. Un rapport circonstancié permettrait aussi de traiter les autres causes de cette pénurie de soignants, notamment la durée de vie professionnelle limitée des soignants - à peu près onze ans - ainsi que de revoir la répartition des tâches de soins entre les infirmières et les assistantes en soins et santé communautaire, ou les assistants, parce qu'il y en a aussi. Pour toutes ces raisons, je vous encourage à renvoyer cette proposition de motion au Conseil d'Etat.

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, à Genève, la pénurie de personnel soignant est un problème que nous devons empoigner et que nous devons régler: oui, il est nécessaire de former plus de personnel soignant ! Ça n'arrive pas tous les jours, mais le Conseil d'Etat a en l'occurrence travaillé plus vite que ce Grand Conseil puisque le rapport sur cette motion a été déposé il y a plus de deux ans. Le Conseil d'Etat a entre-temps pris un certain nombre de mesures et engagé des efforts conséquents pour augmenter le nombre de soignants formés à Genève afin de répondre à la pénurie que nous connaissons aujourd'hui. Je rejoins le rapporteur de minorité sur ce point, ce texte semble dépassé dans ses invites, même si la problématique qu'il soulève reste extrêmement importante et d'actualité.

Il y a aussi un certain nombre d'incohérences ou de la naïveté quand on nous explique qu'on va pouvoir régler le problème des locaux pour la formation, notamment en soins infirmiers, par la mise à disposition de locaux commerciaux vides: ça semble assez peu crédible. Avec les coûts que devrait engager l'Etat pour aménager ces locaux, cela paraît tout à fait impossible ! On a reconnu l'importance de la problématique et on a déjà engagé des moyens pour apporter une réponse. Or, les réponses apportées dans le cadre de cette motion semblent assez peu à même de régler véritablement le problème: le parti socialiste, après une pesée d'intérêts, s'abstiendra sur cette proposition de motion.

M. André Pfeffer (UDC). Monsieur le président, le besoin et l'urgence des deux premières invites font l'unanimité; la nécessité d'augmenter le pourcentage du personnel de santé formé à Genève est flagrante. Actuellement, 67% du personnel infirmier des HUG provient de France. Malgré cela, 60 à 80 jeunes sont refusés chaque année à la Haute école de santé. Ces refus sont essentiellement dus au manque de places et de locaux, comme on l'a déjà relevé.

Certes, des efforts ont été faits ces dernières années. Les places de formation à la Haute école de santé ont progressé depuis 2012, de 80 à 60 places, mais le nombre d'étudiantes et d'étudiants formés reste insuffisant. Les HUG ont besoin de 200 à 300 infirmières ou infirmiers chaque année. Ce besoin n'est pas seulement dû à un manque de relève, mais aussi à des carrières étonnamment courtes dans cette profession: on nous a dit qu'elles duraient sept ans. En trouvant quelques mètres carrés, notre problème de relève serait réglé et il est tout à fait légitime de demander à notre Conseil d'Etat de faire ce tout petit effort. Pour cette raison, le groupe UDC soutiendra cette proposition de motion.

M. François Baertschi (MCG). Depuis des années, le MCG se bat pour que le nombre disproportionné de frontaliers se réduise ou n'augmente pas de manière inconséquente et nous nous sommes mobilisés depuis de très nombreuses années, notamment pour qu'un effort conséquent soit fait aussi dans le secteur de la formation. Cet effort a été accompli en partie, il faut le reconnaître. Malheureusement, ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant pour quelle raison ? Parce que la demande en personnel formé dans ces secteurs est très importante, que les structures existantes doivent être agrandies, et cela de manière considérable. Elles ne l'ont pas été suffisamment parce que c'est un travail de longue haleine, parce qu'on a fait un ensemble de choix au début des années 2000 qui étaient des choix négatifs: le défi posé par le développement des professions de la santé est là, nous avons un bassin de population qui ne peut pas s'adapter immédiatement aux enjeux auxquels nous sommes confrontés. Nous devons malgré tout donner à ces enjeux l'importance qu'ils méritent et nous avons un moyen de leur donner une réponse, c'est de voter cette motion, parce qu'il faut impérativement qu'elle soit votée.

Il n'y a pas que ça, il y a tout un travail que nous devons continuer en commission. Nous le ferons et le MCG sera toujours là pour défendre les résidents genevois, pour défendre les habitants de notre canton, parce que c'est important. Très souvent, dans ce parlement, on a entendu beaucoup de gens qui plaisantaient sur ce sujet alors que c'est un sujet de première importance qu'il faut prendre au sérieux. Le MCG le prend au sérieux, avec cette proposition de motion, et continuera à le prendre au sérieux avec les travaux en commission, de manière permanente et continue, parce que c'est véritablement l'enjeu pour le canton de Genève.

Mme Delphine Bachmann (PDC). En premier, Monsieur le président, vous transmettrez à M. Baertschi que la formation d'infirmier ou d'infirmière intéresse malheureusement peu ou pas les étudiants suisses ! C'est malheureux, mais c'est un fait ! Nous avons quand même un certain nombre de frontaliers qui viennent suivre cette formation dans nos écoles genevoises. En bref, mieux vaut qu'ils soient formés chez nous qu'ailleurs ! J'en ai encore croisé sur le terrain, mais je serai ravie si vous nous trouvez 250 étudiants infirmiers suisses que cette formation intéresse. Je m'en réjouirais, Madame la conseillère d'Etat !

Pour revenir à cette proposition de motion, celle-ci pose la question de la relève chez le personnel soignant et cela concerne à la fois la formation et l'adéquation sur le terrain soignant ensuite. Ce problème se situe au croisement de plusieurs départements, ce qui rend probablement le développement des solutions plus complexe.

Il faut rappeler qu'il y avait deux problèmes. Il n'y avait pas seulement celui des locaux sur lequel il est vrai qu'un travail a été accompli: on a trouvé des salles permettant d'accueillir beaucoup plus d'étudiants. Il y a aussi le problème des places de stage: figurez-vous que la profession d'infirmière s'apprend aussi sur le terrain, c'est essentiel ! Malheureusement, on manquait de places de stage, et ce n'est toujours pas réglé aujourd'hui.

Pourquoi est-il important de former à Genève ? Je rappelle que pour bien exercer cette profession, il faut maîtriser le système dans lequel on travaille et connaître le réseau de soins. Aujourd'hui, vous avez du personnel qui ne connaît pas la différence entre la LAMal et la LCA ou qui ne sait pas ce que sont l'IMAD ou Sitex pour les soins à domicile: c'est un véritable problème dans la prise en charge des patients genevois ! Donc oui, c'est important et il y a un vrai défi à relever, parce que cela permettra de mieux soigner les gens dans notre canton.

Si des locaux ont été trouvés, d'autres problèmes subsistent. Mon collègue M. Saudan les a relevés, ainsi que d'autres ici: la durée de vie professionnelle est extrêmement brève. C'est probablement dû à un mélange entre des conditions de travail relativement pénibles et des horaires difficilement compatibles avec une vie familiale. Vraisemblablement, il y a aussi un problème dans le choix des services, car aujourd'hui, on approche des deux cents infirmiers formés annuellement, comme cela était exigé dans la planification sanitaire qui se terminait en 2019 pour répondre aux besoins en personnel. Pourtant, on constate qu'il y a toujours une vive pénurie dans les EMS et dans les services de soins aux personnes âgées, parce que c'est une réalité que l'intérêt des jeunes diplômés est moins élevé - c'est leur droit - pour ces services-là que pour les services de soins aigus. Pourtant, c'est dans ces domaines-là que les besoins sont les plus grands ! La vraie question est donc de savoir comment on va rendre cet aspect de la profession et ces services-là attractifs. Parce que si on veut répondre aux besoins, il faut aussi que le personnel formé accepte d'aller travailler dans ces endroits-là.

Se pose encore la question de la formation continue du personnel, dans un système de plus en plus spécialisé médicalement. Aujourd'hui, on a un bachelor; on parle de master; on parle de pratique avancée. Comment est-ce que tout ça s'organise ? Aujourd'hui, ce n'est à mon avis pas encore suffisamment formalisé, il n'y a pas suffisamment de reconnaissance de ces nouvelles formations et de ces sous-spécialisations. J'encourage vivement le département à aller vers cela, car des débouchés plus nombreux, et aussi plus visibles et clairs, rendront la profession beaucoup plus attractive.

Pour toutes ces raisons, le parti démocrate-chrétien votera cette motion. Si on est allé dans la bonne direction avec la création de locaux adaptés à la formation, il reste encore beaucoup de travail sur tous ces différents aspects pour que notre population genevoise ait réellement accès à des soins de qualité et qu'on ait un bassin de personnel soignant suffisamment bien formé pour notre système genevois. (Applaudissements.)

Le président. Merci. Je passe la parole à Mme la députée Danielle Magnin.

Mme Danièle Magnin (MCG). Pour combien de temps, Monsieur le président ?

Le président. Une minute cinquante.

Mme Danièle Magnin. Merci beaucoup ! Je voudrais simplement dire que c'est dans l'ADN du MCG de souhaiter qu'on emploie à Genève des résidents genevois. C'est la faute des personnes qui ont géré la santé pendant les Trente glorieuses si on a aujourd'hui cette situation de carence et qu'on est obligé depuis longtemps de faire venir de l'étranger des personnes formées dans le domaine de la santé. Nous le savons bien, ça s'est fait sous les divers conseillers d'Etat chargés de la santé, et c'est un grand regret. On a regretté aussi que beaucoup de nos jeunes aient été refusés à l'entrée de l'école d'infirmières de l'époque, même ceux de ma génération. Beaucoup de gens ont été refusés parce que les conditions d'entrée étaient difficiles, si difficiles qu'il fallait quasiment déjà être professeur à l'hôpital pour pouvoir y entrer !

Nous soutiendrons donc vivement et chaleureusement cette motion, aussi parce qu'il est honteux de siphonner le personnel de santé des pays voisins qui, eux, doivent ensuite aller siphonner le personnel de santé de pays un peu plus éloignés. Nous trouvons que c'est indigne !

M. Olivier Baud (EAG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, à vous entendre, on pourrait penser qu'on est tous d'accord: il faut former plus de personnel soignant. Je voudrais simplement dire que cette proposition de motion a beaucoup trop traîné et qu'elle n'est plus forcément d'actualité. C'est ça, notre problème ! J'entends bien M. Saudan dire qu'elle a déjà produit un effet. Eh bien tant mieux, c'est tout à fait louable ! C'est comme les pétitions: parfois, rien que le fait de déposer une pétition permet de résoudre le problème. Tant mieux, on ne peut que s'en féliciter. Le temps pris pour que ces objets arrivent en plénière est un autre problème qu'il faudra peut-être régler.

Si nous sommes aujourd'hui opposés à ce texte, ce n'est pas à la volonté de former plus de personnel soignant à Genève que nous nous opposons. Non, les invites ne prévoient pas tout à fait ça et, vous le voyez, vous allez voter cette proposition de motion pour des raisons assez diverses. Je viens d'entendre Mme Magnin dire qu'il faut employer des résidents genevois: est-ce que c'est ça, cette motion ? Est-ce qu'elle apporte de l'eau au moulin du discours anti-frontaliers du MCG dont on nous rebat les oreilles ? Le problème est qu'à l'origine, il y avait quand même cette fausse idée... (Remarque.) Vous me laisserez dire que c'est ça et qu'il n'y avait pas autre chose, cette idée qu'on ne pouvait pas délocaliser la formation en France. Il y avait une opposition à ça et cette idée avait été abandonnée avant même que la motion ne soit traitée. On peut certes craindre que le temps qu'arrive un nouveau texte, le problème ne sera jamais résolu, mais cette motion n'est objectivement plus totalement d'actualité et elle pourrait être rejetée pour donner une autre dynamique à cette problématique.

M. Alexis Barbey (PLR), rapporteur de majorité. Monsieur le président, j'aimerais répondre à M. Baud. Le fait que ces surfaces de formation prévues en France à Ambilly et à Gaillard n'aient pas été mises à disposition était une chose déjà connue au moment où on a discuté de cette proposition de motion en commission. Qu'on n'ait pas pu faire la formation en France est un élément qui contribue à péjorer le système et non à l'améliorer: c'était vu comme une solution possible qui aurait permis d'accueillir aussi bien des Français que des Suisses. Comme ces places de formation n'ont pas été mises à disposition, le problème retombait entièrement sur le canton de Genève.

Des efforts ont été faits, on l'a dit, mais ça n'enlève rien à la validité de cette proposition de motion dont la portée va plus loin que d'accroître pour une année ou deux le nombre d'étudiants et de places de stage mises à disposition à la Haute école de santé, où l'effort doit être poursuivi et où on doit déjà se préoccuper des années à venir pour trouver de nouvelles solutions. Réjouissons-nous que la situation se soit légèrement améliorée, mais ne baissons pas la garde; votons cette motion et continuons à offrir davantage de places dans les hautes écoles de santé.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que nous partageons tous cet avis sur la nécessité de former suffisamment de nos concitoyennes et concitoyens dans le domaine de la santé, mais je suis étonnée par le nombre d'erreurs ou d'imprécisions que j'ai entendues. Surtout, la proposition de motion dit que c'est une question de locaux, mais vous allez voir que ce n'est pas une question de locaux.

D'abord, quelques chiffres: jusqu'en 2011, 80 à 90 jeunes étaient effectivement formés à la Haute école de santé - c'était largement insuffisant; en 2012, ils étaient 149; entre 2014 et 2016, 160; en 2017, 173; en 2018, 180; depuis 2019, on peut accueillir 190 étudiants. Figurez-vous qu'on n'a même pas réussi à avoir tout à fait 190 étudiants cette année ! Il ne suffit pas d'offrir les places, il faut encore que les personnes soient admissibles. On a actuellement suffisamment de places, en tout cas à la rentrée dernière de 2019, puisque nous n'avons pas réussi à attribuer totalement le nombre de places offertes. Sans vouloir dire de bêtise, je crois qu'il y avait 186 étudiants.

Deuxième remarque concernant les locaux. D'énormes efforts ont été faits. J'ai une liste ici, je ne suis pas sûre qu'il faille vous la donner, mais il y a eu des déménagements. Des bâtiments vont être construits, la Haute école de santé va être refaite. On a dû déplacer ailleurs le centre de formation professionnelle de la santé, en tout cas une partie de ses locaux, etc. La question des locaux est donc réglée, ce n'est plus la question !

Maintenant, que se passe-t-il ? Je crois que la députée Bachmann l'a bien dit, le problème, c'est la durée de vie professionnelle d'un infirmier ou d'une infirmière. Dans l'absolu, si on voulait éviter d'avoir à aller chercher ailleurs du personnel infirmier, il faudrait surtout que ce personnel puisse rester, une fois formé; ce serait aussi plus efficient pour le canton, financièrement parlant.

Dernier élément, le vrai problème dans le domaine de la santé - parce qu'il n'y a pas que les soins infirmiers à la Haute école de santé: il y a l'apprentissage d'assistant en soins et santé communautaire, la formation d'aide en soins et accompagnement. A terme existera peut-être une école supérieure de soins infirmiers et que sais-je, mais la vraie question, dans le domaine de la santé, c'est de trouver des places de stage ! Ce n'est pas une question de locaux, ce n'est pas une question de volonté politique, c'est d'abord une question de places de stage. Depuis quelques années, nous nous voyons avec Mauro Poggia au minimum deux fois par an pour discuter de cette thématique-là - dont une fois avec tous les acteurs de la santé. Le problème est que si on offre plus de places de stage à la Haute école de santé, on voit en parallèle baisser le nombre de places d'apprentissage ou inversement. Donc, si vous souhaitez à terme qu'on ait plus de personnel soignant, il faut avoir plus de places de stage et plus de places d'apprentissage. Pour ça, je m'adresse entre autres à ce côté de l'échiquier politique... (L'oratrice se tourne vers les bancs de droite.) ...il faut encourager les cliniques privées - qui ne forment quasiment pas d'apprentis - à offrir des places d'apprentissage, parce que les apprentis peuvent faire une maturité professionnelle et entrer après à la Haute école de santé. Là est la vraie question, aujourd'hui, dans le domaine de la santé.

Je n'ai malheureusement pas pensé que vous feriez un débat sur la nationalité ou le domicile des personnes inscrites à la Haute école de santé et je n'ai donc pas pris ces chiffres ici. Il n'y a actuellement plus personne avec un bac français, mais uniquement des personnes qui ont un titre genevois ou suisse. Je rappelle que la Haute école de santé fait partie du dispositif HES-SO. D'ailleurs, ces dernières années, quand nous avions des jeunes du canton qui n'avaient pas de places à Genève, la proposition leur était faite d'aller dans un autre canton. Il n'y a donc plus de problème pour les jeunes issus des écoles secondaires genevoises: ils peuvent trouver une place à la Haute école de santé.

Mesdames et Messieurs les députés, vous pouvez bien évidemment voter ce texte et le Conseil d'Etat aura l'occasion de vous donner des éléments de réponse, mais je crois que les invites sont dépassées et ne répondent pas au vrai problème - qui est essentiellement un problème de places de stage, je le répète.

Le président. Merci bien. Nous passons au vote sur cette proposition de motion.

Mise aux voix, la motion 2390 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 53 oui contre 10 non et 30 abstentions.

Motion 2390

M 2402
Proposition de motion de Mmes et MM. Olivier Cerutti, Gabriel Barrillier, Jean-Luc Forni, Nathalie Fontanet, Murat Julian Alder, Céline Zuber-Roy, Alexandre de Senarclens, Vincent Maitre, Jean-Marc Guinchard, Bertrand Buchs, Jean-Charles Lathion, Anne Marie von Arx-Vernon, Delphine Bachmann, Patrick Saudan, Raymond Wicky, Geneviève Arnold, François Lance, Guy Mettan pour que l'Etat employeur augmente sensiblement son effort en faveur de l'apprentissage
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 22, 23 juin et 31 août 2017.
Délai de traitement en commission dépassé (cf. article 194 LRGC)

Débat

Le président. L'objet suivant nous revient de la commission de l'économie, avec un délai de traitement dépassé. Nous le traitons en catégorie II, trente minutes. Je donne le micro à M. le député Olivier Cerutti.

M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, le délai est effectivement dépassé, mais je pense qu'il est quand même important de rappeler ici que la formation duale - l'apprentissage, dit clairement - a toute son importance dans le dispositif éducatif, dispositif demandant des symétries entre le privé et le public. Un véritable état des lieux est nécessaire afin de comprendre et les difficultés de former et les difficultés des apprenants. On sait que les gens qui sortent aujourd'hui de nos cycles d'orientation ne sont pas toujours suffisamment aiguisés pour entrer dans la vie professionnelle. Or, cette vie professionnelle, tellement importante, demande beaucoup d'interactions.

Le but de cette proposition de motion n'est pas de dire que l'Etat ne fait pas ce qu'il doit faire; son but est de dire qu'on doit discuter ensemble, que le monde politique doit s'emparer de cette formation duale. C'est pour cette raison qu'avec les différents auteurs qui se sont engagés derrière ce texte, nous vous invitons à le renvoyer à la commission de l'économie en demandant à celle-ci de le traiter, cette fois. La commission doit se rappeler que l'apprentissage est quelque chose qui a toute son importance. (Applaudissements.)

M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion est intitulée «pour que l'Etat employeur augmente sensiblement son effort en faveur de l'apprentissage». Cela résonne harmonieusement avec le PL 11274 du groupe des Verts refusé hier soir par une majorité qui comprenait d'ailleurs les auteurs de cette proposition de motion. Ce texte a été refusé hier sous des prétextes divers: l'Etat en faisait suffisamment ou l'Etat ne devait pas se mêler de soutien à l'apprentissage.

Cette proposition de motion invite maintenant l'Etat en particulier à engager davantage d'apprentis alors que celui-ci est déjà le plus grand pourvoyeur de places d'apprentissage du canton ! Il est donc un peu «croquignolesque» de nous proposer que l'Etat crée plus de places d'apprentissage encore. Nous, nous attendons un plus grand effort des 90% d'entreprises qui n'en créent aucune ! Voilà la véritable anomalie genevoise, que nous avons décrite hier.

Mais nous ne refusons jamais d'étudier les idées des autres - même brièvement - et la discussion sur ce texte permettra aussi de contrer les idées fausses émises en commission. Peut-être permettra-t-elle aussi de faire émerger des propositions communes pour aider les entreprises - et pas l'Etat - à créer plus de places d'apprentissage. Nous soutiendrons donc le renvoi à la commission de l'économie dont le président, j'en suis convaincu, sera certainement soucieux de mettre rapidement cette motion à l'ordre du jour !

M. André Pfeffer (UDC). Monsieur le président, j'aimerais corriger les propos de notre collègue M. Lefort. Le texte d'hier était plutôt lié au contexte et aux conditions favorables nécessaires à l'employeur ainsi qu'aux apprentis. En rejetant ce texte, notre intention était de refuser le moyen proposé qui était simplement un subventionnement. Encore une fois, pour qu'un employeur puisse engager un apprenti, il faut éviter une surcharge de contraintes et une surcharge administrative. Autrement, l'employeur ne prendra pas d'apprenti, même s'il y a un subventionnement et même si on en double le montant. De même, il est absolument nécessaire qu'un apprenti bénéficie d'un environnement correct afin qu'il puisse acquérir des connaissances et apprendre son métier dans des conditions normales.

A notre avis, le projet de loi d'hier favorisait surtout une politique d'occupation des jeunes via un subventionnement. Là, nous parlons d'une proposition de motion qui inciterait l'Etat à augmenter le nombre d'apprentis au sein de ses services. Notre groupe soutiendra cette proposition de motion et nous sommes aussi favorables à ce qu'elle retourne en commission pour qu'elle y soit discutée et étudiée.

M. Serge Hiltpold (PLR). Monsieur le président, je rejoins en partie les propos de mon excellent collègue François Lefort. Il y a un certain paradoxe dans cette motion. Vous me permettrez de parler en tant qu'employeur: l'ADN de la formation duale, c'est l'entreprise privée et c'est l'employeur. A titre tout à fait personnel, je ne suis pas très favorable à l'esprit d'entreprise donné au sein de l'Etat. Je pense donc qu'il faut vraiment traiter cette motion en commission; il y a effectivement des formations duales que l'on peut avoir au sein de l'Etat ou des régies publiques autonomes, par exemple aux SIG pour des formations particulières d'électricien, de plombier ou d'installateur sanitaire. Une réflexion doit être menée, mais je ne suis pas très favorable à ce que les entreprises se défaussent sur l'Etat d'une certaine responsabilité de formation qui leur incombe véritablement.

Il faut obtenir une vision objective en commission et mener quelques auditions pour voir dans quels secteurs on peut trouver des pistes ou des formations adéquates. Je vous demanderai de suivre les précédents commissaires et de renvoyer ce texte à la commission de l'économie.

Le président. Merci. Je passe la parole à M. le député François Lefort pour une minute treize.

M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. Mon estimé collègue Hiltpold a justement fait la réponse que je destinais à M. Pfeffer ! L'important est de trouver la solution permettant la création de plus de places d'apprentissage dans le privé sans se reposer sur l'Etat pour créer ces places. Parce que, dans notre système, l'apprentissage doit justement être accompli dans les entreprises !

Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe Ensemble à Gauche soutiendra le renvoi de cette proposition de motion en commission parce qu'elle nous semble particulièrement importante. J'aimerais juste insister sur les propos qui viennent d'être tenus à la fois par M. Hiltpold et par M. Lefort demandant que l'on ne s'appuie pas sur l'Etat et que les places d'apprentissage se développent dans le privé. Certes, on peut les développer dans le privé, mais j'aimerais quand même rappeler que l'Etat est le plus grand employeur de ce canton, et il serait particulièrement dommageable qu'il ne donne pas un signal clair en la matière, à plus forte raison s'il en a les moyens.

J'aimerais encore relever que nous nous sommes penchés à plusieurs reprises sur une proposition de motion de commission, la M 2332 «pour une étude détaillée du chômage à Genève». Celle-ci invitait à réaliser une étude du profil des personnes en recherche d'emploi, par secteur et par formation, ainsi qu'à établir les besoins des employeurs, par activité et par branche. Une partie de cette invite est reprise dans la présente proposition de motion. Il est important que nous nous penchions sur cette question et que nous ayons enfin des informations, puisque la M 2332 a connu un triste sort en revenant à plusieurs reprises dans cette enceinte sans permettre de trouver de réponses. Il est temps aujourd'hui que nous puissions obtenir des informations précises à ce propos !

Le président. Merci. Je passe la parole à M. André Pfeffer pour cinquante secondes.

M. André Pfeffer (UDC). Oui, merci, Monsieur le président. Je partage cet avis, les apprentis devraient prioritairement être formés dans le privé, mais il faut quand même rappeler la réalité de Genève: il y a 65 000 fonctionnaires et la société privée à Genève qui a le plus de collaborateurs, c'est la Migros, avec 2500 employés ou collaborateurs. Donc, évidemment, l'Etat doit aussi faire un effort - et un grand effort - pour former des apprentis, à moins qu'on parte de l'idée que ceux-ci ne puissent pas apprendre à travailler au sein de l'Etat !

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'interviens très brièvement car nous aurons l'occasion de préciser certains points à la commission de l'économie, mais «procéder à un inventaire complet des métiers et fonctions offrant des places d'apprentissage et de stages dans le petit Etat», c'est fait ! Les «efforts pour engager davantage d'apprentis» à l'Etat, c'est fait ! On s'était fixé en 2015 un minimum de 4% d'apprentis à l'Etat: cet objectif a été atteint en 2017 et, figurez-vous, quel département est le meilleur élève sur cet objectif ?

Une voix. Le DIP !

Mme Anne Emery-Torracinta. Le DIP, exactement ! Avec pratiquement plus de la moitié des apprentis de l'Etat ! Pour ce qui est de «donner plus particulièrement une chance aux jeunes sortant directement de l'enseignement obligatoire», alors là, Mesdames et Messieurs les députés, il faut nous voter les postes qui vont avec ! Vous avez refusé à la commission des finances les postes demandés pour Go-Apprentissage, dispositif qui permet aux jeunes du cycle d'orientation d'entrer directement en apprentissage grâce aux conseillers en orientation de l'OFPC qui interviennent dans les cycles. Vous nous avez refusé des postes dont un à l'OFPC - 0,7 poste - dont la mission aurait été de chercher des places dans le privé. (Applaudissements.) «Présenter régulièrement, dès 2018, dans le cadre du traitement des comptes annuels, le bilan des efforts»: pourquoi pas, mais, j'insiste, si nous n'avons pas réduit le nombre de contrats d'apprentissage signés ces dernières années, c'est uniquement grâce à l'effort de l'Etat - du petit et du grand Etat - notamment grâce aux efforts des HUG, tout à fait exemplaires dans ce domaine aujourd'hui. Donc, oui à l'augmentation des places d'apprentissage, mais d'abord dans les entreprises privées ! Je parlais tout à l'heure des cliniques privées; eh bien, que celles-ci forment aussi des apprentis, et là, on répondra vraiment aux besoins du monde professionnel ! (Applaudissements.)

Le président. Merci. Nous passons au vote sur le renvoi à la commission de l'économie.

Mis aux voix, le renvoi pour six mois de la proposition de motion 2402 à la commission de l'économie est adopté par 86 oui (unanimité des votants).

Un rapport doit être rendu dans les six mois (article 194 LRGC).

M 2404-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Alexandre de Senarclens, Nathalie Fontanet, Patrick Saudan, Raymond Wicky, Céline Zuber-Roy, Murat Julian Alder, Pierre Conne, Michel Ducret, Nathalie Hardyn, Bénédicte Montant : Révolution 4.0 : pour une école en harmonie avec son temps
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session IX des 28 février et 1er mars 2019.
Rapport de majorité de Mme Marjorie de Chastonay (Ve)
Rapport de minorité de M. Patrick Saudan (PLR)

Débat

Le président. Nous arrivons à la M 2404-A, classée en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à ceux qui la demandent, dont Mme Marjorie de Chastonay.

Mme Marjorie de Chastonay (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport a traité cette proposition de motion en trois séances entre le 20 juin et le 12 décembre 2018. M. de Senarclens, premier signataire, a présenté ce texte qui proposait de questionner la place de l'enseignement de l'informatique et du numérique à l'école obligatoire essentiellement. La proposition de motion invite le Conseil d'Etat à faire tout d'abord un nouvel état des lieux de ce type d'enseignement dans notre canton et, ensuite, à étudier la possibilité d'instaurer des cours de codage informatique à l'école obligatoire.

Pour M. de Senarclens, ce texte porte sur une thématique centrale dans l'enseignement. Il pense qu'il y a urgence à mener cette réflexion afin de répondre aux problématiques nées de la révolution 4.0; que l'enseignement de toutes les autres disciplines n'est pas suffisant et qu'il faut prendre en considération le numérique de manière générale. Cette proposition de motion pose aussi la question de la formation des enseignants afin qu'ils puissent porter ce programme. Il faut dès lors développer une stratégie et réfléchir à l'instauration de cours de codage. Il ne s'agit pas de créer un cours spécifique, mais cette matière pourrait selon lui être enseignée de manière transversale.

En trois séances, la commission a notamment auditionné le département qui a transmis sa vision du numérique à l'école dans un dossier de presse intitulé «L'école au service de la citoyenneté numérique. Une vision pour l'instruction publique et le système de formation genevois». Pour le DIP, il s'agit de distinguer l'enseignement au numérique de l'enseignement par le numérique. Concernant l'enseignement au numérique, il s'agit de l'initiation à l'informatique, l'objectif étant que l'élève connaisse les bases de l'informatique, notamment le codage, mais aussi qu'il comprenne les dangers du numérique. Concernant l'enseignement par le numérique, selon le département, celui-ci est utile seulement s'il y a une plus-value, à savoir le travail collaboratif. La position du département était claire; les cantons romands sont déjà en pleine réflexion. Toujours selon le Conseil d'Etat, il est aussi nécessaire d'adapter la formation initiale et continue des enseignants. Il s'agit d'une vision du numérique qui se veut transdisciplinaire. Ensuite, le département a expliqué en détail ce qui se pratiquait dans les différents ordres d'enseignement, quels sont les projets pilotes en cours, en lien avec les tableaux blancs interactifs ou l'utilisation de tablettes par les élèves.

La commission a aussi auditionné la FAPPO, la Fédération des associations de parents d'élèves du postobligatoire. Leurs propos allaient dans le sens d'une vision transversale. Le code en lui-même n'a pas de sens et il doit être lié à des thématiques et des disciplines. Les dangers du numérique doivent aussi être enseignés, selon la FAPPO, qui pense qu'il faut accompagner l'enfant le plus tôt possible face au numérique. Cependant, ils n'ont pas encore assez de recul sur les effets néfastes de l'utilisation du numérique. Cette fédération soutient qu'il est important de savoir utiliser les outils liés à la bureautique, qui permettent de favoriser l'employabilité. La grille horaire scolaire qui n'est pas extensible reste quand même un problème et, selon les priorités, il faudrait peut-être sacrifier certaines branches, selon eux - et elles.

La commission a enfin auditionné le GRI - Groupement romand de l'informatique - qui avait demandé à être entendu. Selon lui, il faut anticiper - je cite - «l'analphabétisme numérique» et former les jeunes. Les enfants ont encore des connaissances lacunaires quant à la communication avec les machines. La proposition de motion demande une évaluation des cours d'informatique à l'école obligatoire. Or, selon le GRI, ces cours existent déjà. Cependant, le codage seul ne suffit pas, il ne faut pas former des codeurs mais sensibiliser les élèves à l'utilisation des outils numériques et - surtout - développer leur capacité à communiquer. Il faut donc éduquer les utilisateurs au décodage et au codage avec une approche transversale. Le GRI n'a toutefois pas de collaboration avec le SEM - service écoles-médias - ni avec l'université. Selon lui, la sensibilisation à l'informatique et à la société numérique peut commencer dès l'école primaire.

La majorité de la commission que je représente aujourd'hui s'oppose à cette proposition de motion. Certains commissaires considèrent que le DIP n'a pas les moyens de donner ces cours, sachant qu'au primaire il y a seulement un poste informatique par classe. Les moyens sont donc insuffisants. Pour d'autres, les attentes fondamentales dans les différentes disciplines sont encore difficilement acquises, cela n'est donc pas forcément la priorité. Par ailleurs, il existe déjà des cours TIC - technologies de l'information et de la communication. Enfin, les risques et dangers du numérique sont déjà enseignés.

Mesdames et Messieurs, suite à ces auditions et aux discussions internes, la majorité de la commission a refusé de renvoyer cette proposition de motion au Conseil d'Etat. Elle vous recommande de suivre cette décision.

Le président. Merci. Je passe la parole à M. le député Patrick Saudan.

M. Patrick Saudan (PLR), rapporteur de minorité. Merci beaucoup, Monsieur le président... (L'orateur tousse.) Je n'ai pas le corona ! (Rires.) Tout d'abord, je remercie la rapporteuse de majorité qui a fait une présentation assez exhaustive des travaux effectués en commission sur ce texte. Je vais diverger avec elle sur l'interprétation qu'elle a faite de ces auditions justement. La première audition du Conseil d'Etat en juin 2018 a montré un département assez favorable à cette proposition de motion. Celui-ci nous a par la suite expliqué son plan numérique, qui était l'enseignement au numérique et l'enseignement par le numérique. Tant l'audition de la FAPPO que celle du GRI ont plutôt montré une sympathie pour ce texte qui divergeait en fait très peu du plan d'action numérique du DIP, uniquement par plus de sensibilisation - c'est une des invites de la proposition de motion - à l'apprentissage du codage.

Or, patatras, qu'est-ce qui s'est passé ? La commission a refusé ce texte alors que les auditions avaient été assez favorables. Je remercie la représentante de la majorité de m'expliquer pourquoi la commission l'a refusé ! J'ai relu les procès-verbaux et, quand vous lisez le rapport de majorité, vous n'avez à aucun moment - je ne lui en porte pas du tout grief - la position des groupes sur le refus de cette proposition de motion. C'est quand même un peu gênant. D'autant plus que quand j'entends Mme Leonelli pour le groupe des Verts et Mme Bachmann pour le groupe PDC faire l'apologie du numérique et de l'intelligence artificielle qui vont être des données fondamentales dans l'éducation de nos enfants...! Vous en avez parlé lors du projet de loi sur la reconversion professionnelle et j'ai été un peu étonné par l'attitude négative des groupes face à cette proposition de motion alors que je pense qu'elle est toujours très pertinente et qu'il faut la renvoyer au Conseil d'Etat.

Tout d'abord, la commission des travaux, comme vous le savez, a refusé le projet de loi pour le crédit d'investissement visant à l'acquisition des 17 000 tablettes qui était l'élément fondamental de l'enseignement au numérique pour nos enfants. Toute la politique expliquée par le département pour le lancement du numérique est donc mise à mal par cette décision et renvoyer ce texte au Conseil d'Etat permettrait une actualisation de la politique du DIP sur cette thématique.

Ensuite, l'enseignement du codage informatique est vraiment quelque chose d'important et je ne peux pas résister à citer M. Moser, directeur de l'école du même nom qui a pris le virage numérique depuis quelques années dans son établissement. Il dit: «On n'enseigne pas le français pour que les jeunes deviennent écrivains. De la même manière, ils doivent apprendre à coder pour comprendre le monde dans lequel ils vivent.» Pour toutes ces raisons, je vous engage à ne pas suivre l'avis de la majorité de la commission et à renvoyer cette proposition de motion au Conseil d'Etat.

Mme Salima Moyard (S). Mesdames et Messieurs les députés, vouloir toujours plus de contenus d'enseignement à l'école en se plaignant des acquis actuels et sans lui donner les moyens de ces ambitions: voilà comment on pourrait résumer ce texte ! Avec pas moins de neuf invites, cette proposition de motion PLR demande d'abord un état des lieux exhaustif sur l'enseignement en matière de TIC - technologies de l'information et de la communication, comprenez l'informatique au sens le plus large et global du terme, de la technique pure jusqu'à son utilisation la plus générale. Mais, surtout, ce texte demande d'enseigner le codage à l'école obligatoire, de former ou d'engager des professeurs pour ce faire et d'acheter le matériel nécessaire ! Bref, une gageure !

Le moment est particulièrement piquant et il faut le relever: le PLR a été à la manoeuvre lors des discussions sur le budget pour ne pas octroyer les postes nécessaires au DIP, même pas ceux visant à suivre l'augmentation démographique des élèves ! Il a donc contraint le DIP à couper dans de nombreux nouveaux projets. Justement à cause de ces caprices budgétaires PLR, il n'a pas pu introduire l'informatique au collège, à l'exact inverse de la philosophie développée dans la proposition de motion. C'est quand même assez fort ! La deuxième chose qui est piquante, c'est de demander des engagements et de l'achat de matériel pour un nouveau projet alors qu'en même temps, ils demandent au DIP d'accueillir des centaines voire des milliers de nouveaux élèves avec le même nombre d'enseignants qu'à la rentrée précédente !

Plus sérieusement, sur le fond: le travail d'analyse a déjà été fait, grosso modo, par le DIP dans le document intitulé «L'école au service de la citoyenneté numérique» paru en novembre 2018. Gageons que la première partie des invites trouve ici déjà réponse. Par contre, pour les cours de codage à l'enseignement obligatoire, soyons sérieux ! Ceux qui nous disent déjà - et c'est fréquent - que les élèves de l'école obligatoire en sortent sans les acquis de base et que l'école publique genevoise n'atteint pas ses objectifs sont les mêmes qui veulent ajouter toujours plus de contenus et de nouveaux cours, dans une grille horaire qui déborde. Et ce sont toujours les mêmes, évidemment, qui ne font aucune proposition sur ce qu'il faudrait enlever en échange !

La préoccupation est pertinente, mais les solutions proposées inadéquates: le parti socialiste suit sa magistrate et soutient sa vision d'éducation au numérique et par le numérique. Il faut permettre aux élèves d'apprivoiser, de maîtriser et de comprendre le fonctionnement du numérique et de l'informatique. Ils doivent comprendre ses opportunités mais aussi ses dangers, dans une perspective citoyenne de construction d'une identité critique, réflexive et capable de s'adapter. Au-delà du numérique, la question porte sur le coeur de l'objectif d'enseignement du DIP tout entier, département à qui il faut encore donner les moyens de sa mission - volonté que les auteurs de ce texte n'ont pas montrée lors du vote du dernier budget.

C'est donc en toute cohérence et pour toutes les raisons exposées que le groupe socialiste vous propose de refuser cette proposition de motion, comme l'a fait la majorité de la commission. (Applaudissements.)

M. Alexandre de Senarclens (PLR). Monsieur le président, cette motion est avant tout une invitation à la réflexion. L'école est un processus de maturité, d'émancipation, de prise de liberté, et si sa mission est avant tout d'enseigner un héritage culturel, les humanités, l'histoire, les langues et les mathématiques, nous pensons que ça ne suffit plus au XXIe siècle - malheureusement, peut-être. Il faut donner à nos enfants les clés de ce qu'on appelle la quatrième révolution industrielle pour favoriser leur compréhension de ce monde numérique qui s'ouvre et des dangers qui y sont liés, tout en leur donnant le goût de l'innovation.

Cette proposition de motion a été déposée en juin 2017 et, suite à cela, peut-être à cause de cela, je l'espère un peu, le DIP a entrepris des réflexions, mais celles-ci ne sont pas encore abouties. Il convient de les encourager, de leur apporter un soutien politique par le vote de ce texte et, justement, d'évaluer ce que l'on fait déjà dans les cours de TIC, technologies de l'information et de la communication. Ensuite, il convient d'évaluer la possibilité d'instaurer des cours de codage informatique, non pas pour le codage en tant que tel, mais pour mieux comprendre ce que sont ces outils et ce qu'implique la logique informatique ainsi que les possibilités qui seraient offertes par ces cours. Je ne dis pas qu'il faut absolument les instaurer, je me rends bien compte de la difficulté d'allier les deux injonctions, peut-être contradictoires, d'enseigner d'une part les humanités et d'autre part des savoirs essentiels pour le développement de nos enfants, mais je pense qu'il convient d'avancer dans ces réflexions, d'apporter des réponses sur le XXIe siècle et sur le monde qui vient. Dans un sens, il faut aussi accompagner ces réflexions du DIP, réflexions tellement centrales que je ne pense pas qu'il soit nécessaire de faire l'économie d'un rapport sur ce sujet.

Le président. Je vous remercie !

M. Alexandre de Senarclens. C'est la raison pour laquelle je vous invite à voter cette proposition de motion.

M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le titre de cette proposition de motion est «Révolution 4.0: pour une école en harmonie avec son temps». Mesdames et Messieurs, il n'y a pas forcément besoin d'une révolution pour avoir une école en harmonie avec son temps ! Non, il faut simplement des moyens. Or, vous, la majorité de ce Grand Conseil, ne votez pas ces postes et ces moyens ! C'est un peu la conclusion de tous les objets qu'on a traités pour le département de l'instruction publique cet après-midi: on est donc dans le déclaratif et ça ne sert pas à grand-chose.

Ce que cette proposition de motion demande, évidemment, on peut y adhérer: oui, il faut encourager les élèves à s'intéresser à l'informatique, aux technologies de l'information et de la communication. Mais que demande ce texte ? D'étudier, d'évaluer, d'inventorier, de déterminer. Mesdames et Messieurs les députés, les besoins sont déjà connus et les moyens sont insuffisants. La rapporteuse de majorité l'a dit, les moyens de notre école en matériel informatique sont dérisoires par rapport à notre époque. A quoi sert d'étudier, d'évaluer, d'inventorier et de déterminer puisque les réponses sont connues ? A se donner bonne conscience ? Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas en pesant la truie qu'elle devient plus grosse ! Soyez conséquents, votez les postes, les moyens et les crédits nécessaires pour avoir une école en phase avec son temps ! (Applaudissements.)

Mme Patricia Bidaux (PDC). Mesdames les députées, Messieurs les députés, on parle souvent de révolution technologique et, pour le numérique en particulier, de révolution 4.0. En tout cas, c'est de ça que traite la M 2404 déposée en juin 2017. Mais aujourd'hui, plus de deux ans et demi après le dépôt de cette motion, est-ce que nous en sommes vraiment encore à la 4.0, et pas plutôt à... (Commentaires.) J'y viens ! ...à ce qu'on appelle la société intelligente 5.0 ? Que notre fonctionnement est lent ! Comment courir après ces technologies qui évoluent à la vitesse grand V avec deux ans et demi de délai ? Il faut bien le reconnaître, notre parlement est face à une difficulté que nous nous devons d'assumer ! Il y a des sujets que la lenteur ne permet pas d'aborder à temps.

Non qu'il s'agisse d'un sujet ne méritant pas notre attention; au contraire, ce sujet ne supporte pas de délais de traitement. Le numérique est immédiat, instantané. En améliorer les connaissances par l'informatique permet peut-être le développement de programmes d'enseignement transversaux. Un passage au travers des matières principales du PER par le numérique et un apprentissage interactif grâce au numérique est apporté par le programme TIC. Le codage n'est bientôt plus d'actualité; plus besoin ou presque de spécialistes; des programmes gratuits le font pour vous: c'est la société intelligente 5.0 qui a pris le dessus !

Bien plus intéressant est le développement de la pensée computationnelle dès le plus jeune âge, soit une approche plus globale permettant de comprendre de quelle façon les ordinateurs et la «data» peuvent nous aider à résoudre des problèmes complexes, sans savoir nécessairement programmer un ordinateur ou coder. Etre capable de penser un problème de façon computationnelle, avec logique, et trouver une solution dans le monde numérique est essentiel. A mesure que la technologie devient plus sophistiquée et omniprésente dans nos vies, la pensée computationnelle n'est pas seulement utile pour comprendre ce que fait la machine, comprendre le fonctionnement des algorithmes, elle sert aussi à façonner l'action de l'humain. Le PDC ne soutiendra pas cette motion.

Le président. Merci. Je passe la parole pour quarante-neuf secondes à Mme la députée Katia Leonelli.

Mme Katia Leonelli (Ve). Merci, Monsieur le président. Très rapidement, vous transmettrez à M. Saudan, lorsque votre collègue dit en commission que le numérique prend de manière générale une place considérable dans la société, je ne peux que le rejoindre, je ferais preuve de malhonnêteté intellectuelle si j'osais m'opposer à de telles prémisses. C'est vrai, il y a une prédominance de certaines technologies et le dire ne constitue même pas une position politique, mais un véritable constat. Cependant, il va falloir engager de vraies sommes, des moyens financiers astronomiques, pour mettre en place de véritables programmes, intéressants pour les élèves, et répondre aux avancées technologiques...

Le président. Je vous remercie, Madame Leonelli, le temps est terminé. (Remarque et rire de Mme Katia Leonelli.) Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. L'heure tournant, je me contenterai de remercier le député de Senarclens et de me féliciter de ce que le PLR votera au prochain budget tous les postes demandés pour le numérique à l'école ! Merci encore, Mesdames et Messieurs les députés ! (Applaudissements.)

Le président. Merci. Nous passons au vote.

Mise aux voix, la proposition de motion 2404 est rejetée par 40 non contre 31 oui et 7 abstentions.

Le président. Nous avons bien travaillé, je vous souhaite un excellent week-end et je lève la séance.

La séance est levée à 20h.