Séance du
vendredi 17 mars 2017 à
16h
1re
législature -
4e
année -
1re
session -
4e
séance
PL 10989-2-C
Premier débat
Le président. Nous arrivons au PL 10989-2-C, que nous traitons en catégorie II, quarante minutes. Je passe la parole à M. Aellen, rapporteur de majorité.
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je pourrais m'arrêter à la lecture du titre, puisque celui-ci indique qu'il s'agit de valider un contrat de prestations pour les années 2013 et 2014, et que le département a précisé que les TPG ont mis fin au marché et qu'il n'y a pas eu d'adjudication pour ce contrat de prestations. Si je lis les rapporteurs de minorité avec attention, je constate que selon le second, il faut refaire entièrement le projet de loi en plénière afin qu'il soit acceptable, et en plus, il faudrait le suspendre, parce que même en plénière, en réalité, on n'arriverait pas à le refaire. Dans l'argumentaire de la rapporteuse de première minorité, je lis que - je cite - ce texte est «cliniquement mort». Il faut l'admettre, ce projet de loi a été utilisé par une partie de ce parlement pour combattre une conseillère d'Etat; aujourd'hui, il est utilisé pour combattre un conseiller d'Etat. A titre personnel, je suis favorable aux vélos en libre-service, mais je ne peux décemment ni cautionner cette pratique politique, ni utiliser ce projet de loi à d'autres fins que ce pour quoi il est fait.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, je ne rejoins pas l'interprétation que fait M. Aellen de mon rapport de minorité, puisqu'il ne s'agissait pas à l'époque de dézinguer, comme vous semblez vouloir le dire, un conseiller d'Etat, mais plutôt de donner un signal positif de la part de ce parlement, un signal politique selon lequel les vélos en libre-service sont nécessaires et attendus par la population. Or, le refus de ce projet de loi en commission constitue le signal inverse. En effet, ce projet de loi date de 2012: cela fait donc cinq ans - et trois rapports de minorité - que nous nous retrouvons ici pour tenter, vainement, de convaincre ce parlement de l'utilité de se doter de vélos en libre-service. Cinq ans à attendre, alors que toutes les autres villes du monde plébiscitent ce système de vélos en libre-service. Tout cela parce qu'en effet, le parlement s'est illustré dans de mauvais règlements de comptes, des jeux politiques douteux - un bel exemple de provincialisme, pour une Genève qui se veut internationale. Ces stériles arguties, ces manoeuvres dilatoires n'ont eu pour effet que d'empêcher un service de se créer; pire, elles ont tout fait pour qu'un acteur privé puisse encore venir semer la zizanie en se comportant comme un cow-boy en plein Far West. (Remarque.)
Aujourd'hui, nous assistons atterrés à la création d'une nouvelle Genferei: en effet, le DETA a décidé de réduire le territoire sur lequel serait implanté un système cantonal de vélos en libre-service. Nous allons certainement nous trouver face à des cas de figure où des systèmes concurrents existeront, des systèmes concurrents et incompatibles les uns avec les autres. Ainsi, une personne décidant de se rendre de Cornavin au Grand-Saconnex - une personne courageuse, qui aurait envie de prendre le vélo ! - devra changer de vélo à mi-parcours parce que la commune du Grand-Saconnex ne figure pas pour le moment dans les plans du DETA. Aujourd'hui, donc, le signal à envoyer est clair; ce n'est pas un signal de défiance à l'égard du conseiller d'Etat, mais il consiste plutôt à dire: au lieu de tout raser, utilisons ce qui existe déjà, moyennant un certain nombre d'amendements, pour que le DETA puisse procéder de manière plus rapide et que ce système de vélos en libre-service soit mis en oeuvre le plus rapidement possible. Nous avons trop tardé; on sait que ces vélos sont plébiscités par la population et les touristes, cela ancre les cités du monde entier dans une nouvelle vision de la mobilité, une vision du XXIe siècle et non plus du XVIIIe siècle, comme je l'entends trop souvent par ici. Nous décidons ainsi de défendre ce projet aujourd'hui encore et incitons à ne plus refuser ce projet de loi, à le modifier et à envoyer un signal politique à la population selon lequel ces vélos en libre-service sont essentiels pour le canton.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, certes, il s'agit d'un projet de loi daté d'un certain nombre d'années, mais si vous lisez un peu plus attentivement que le rapporteur de majorité les amendements que je vous propose aux pages 65, 66 et 67 du rapport, vous verrez qu'il s'agit en fait de trois amendements et pas du tout de refaire l'entier du projet de loi, comme il l'a évoqué. Il faut apporter trois amendements à ce texte pour qu'il garde toute son actualité: d'abord changer les années, puisque évidemment, on ne va pas garder 2013 et 2014; l'amendement proposé indique 2017 et 2018. Il faut ensuite ajuster le montant légèrement à la baisse en faisant figurer 1 million, puisque M. Barthassat s'était engagé à plusieurs reprises, en disant qu'on n'avait pas besoin d'autant de moyens - peut-être même qu'on n'avait besoin de pas de moyens publics du tout pour mettre son projet sur pied, qu'il nous promettait d'ailleurs dans des délais bien plus courts. Il faut indiquer aussi, encore une fois, que c'est pour l'exercice comptable 2018 que ça se termine. Il s'agit donc de changer le titre et d'apporter deux autres amendements, Mesdames et Messieurs les députés, pour que ce projet de loi valide l'intention politique selon laquelle, oui, dans le canton de Genève, nous voulons des vélos en libre-service ! Je crois que c'est ça, l'intention; ce n'est pas de se demander quel type de vélos on veut - le Grand Conseil doit se mêler de ce qui le regarde. Ce n'est pas à nous de décider si les vélos doivent être bleus, verts, rouges...
Une voix. Roses !
M. Roger Deneys. ...ou roses, attachés, pas attachés... Ce n'est pas à nous de nous mêler de cette question-là ! On peut faire confiance au conseiller d'Etat pour qu'il essaie de trouver un système qui convienne, en concertation avec les communes, parce que c'est aussi ça, la question: ce n'est pas qu'un choix dans l'abstrait pour tel ou tel système; les communes doivent y adhérer, et c'est ce qui se passait avec le projet initial de Mme Künzler, que, malheureusement, le PLR a coulé à l'époque, volontairement, avec ce qui était une première dans l'histoire de la république: une audition à la commission des finances où on nous a amené à la salle de l'Alabama, pour une démonstration, un vélo biennois, de sorte que nous puissions voir à quoi ressemble un vélo en libre-service. (Remarque.) Il s'agissait d'une audition demandée par le PLR. Si ça, ce n'est pas couler un projet avec des arguments fallacieux, eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, je ne comprends plus rien à la politique !
C'est clair, aujourd'hui, si la possibilité existe de financer TPG Vélos SA dans le cas où le projet pourrait démarrer, il faut garder cette possibilité. Quand ce projet va démarrer, il sera d'abord utile aux touristes, il ajoutera à l'attractivité de Genève. Toutes les grandes villes du monde, et même les petites, ont des vélos en libre-service. Mesdames et Messieurs les députés, il faut encourager aujourd'hui la réalisation d'un tel projet, indépendamment de ce qu'on peut penser des aléas que M. Barthassat a aussi pu connaître dans ses intentions, qui n'avancent pas aussi vite que ce qu'il espérait. On peut le déplorer et on peut peut-être aussi regretter qu'il ait fait certaines promesses qu'il ne peut pas tenir, ma foi. Mais ce n'est pas ça, le problème ! Aujourd'hui, c'est le signal politique du Grand Conseil; il faut subventionner TPG Vélos SA, si le projet démarre, et je vous indiquerai encore une chose: il s'agit de 2017-2018 sous la réserve qu'il y ait une ligne budgétaire. Pour 2017, il n'y en a pas, donc ça veut dire que de toute façon, il n'y aura pas de subvention en 2017, mais il n'y a même pas besoin de l'amender, puisque ça correspond à ce qui est écrit dans la loi. (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) Mesdames et Messieurs les députés, ça permet de lancer le projet en 2018 si enfin il peut démarrer. Je vous encourage donc à donner ce signal d'avenir pour notre république.
Le président. Merci, Monsieur. Je donne la parole à M. Olivier Cerutti - je cite votre prénom, Monsieur, car il y a deux Cerutti.
M. Olivier Cerutti (PDC). Merci, Monsieur le président, de cet honneur ! Mesdames et Messieurs, chers collègues, ce projet de loi est aujourd'hui caduc. Le parti démocrate-chrétien est favorable à ce qu'un Vélib' se développe sur le territoire de notre canton, notamment de concert avec les communes. Je crois qu'aujourd'hui, les magistrats ont la possibilité de nous présenter un projet et vont le faire; il faut attendre, il faut être patient. Voter ce projet de loi, ce serait lui donner une certaine illisibilité. Trop de choses ont été dites, trop de choses ont peut-être déjà été relativement bien faites pour qu'on vote ce projet de loi à ce stade. Nous vous invitons donc à le refuser. Je vous remercie.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, les mots nous manquent pour décrire cette saga des vélos en libre-service genevois. On peut assurément parler de Genferei, on peut parler de gabegie, on peut parler - et c'est peut-être le terme le plus approprié - de déraillement, quand on voit comment ce projet a été mené. Je crois qu'on peut aussi dire, Mesdames et Messieurs les députés, que Genève a mal à sa mobilité douce, parce qu'il n'y a pas grand-chose qui fonctionne dans ce cadre. La Cour des comptes vient de rendre un rapport sur lequel je ne reviendrai pas - on n'en a pas le temps - qui pointe un certain nombre de lacunes dans l'application de l'initiative pour la mobilité douce acceptée par la population en 2011. La Cour des comptes est relativement sévère sur l'implication et la volonté politique de l'Etat pour mettre en oeuvre cette initiative. On voit que le slowUp est menacé maintenant, alors que quasiment une vingtaine de villes en Suisse en ont, qui rencontrent un engouement populaire important. A Genève, il y a des histoires avec Genève Tourisme, le déficit des fêtes, etc., mais on arrive quand même - une Genferei de plus - à mettre en cause ce slowUp apprécié par la population. Et puis, on parle maintenant de ce projet de vélos en libre-service qui n'arrive pas à avancer, Monsieur le président. Je rappelle toujours que la part modale du vélo à Genève, c'est 5% seulement, alors qu'à Bâle, c'est plus de 20%, à Copenhague ou à Amsterdam, où existent de vraies infrastructures, une vraie volonté politique, c'est 50%. Nous avons vraiment du chemin à faire pour rattraper notre retard. On l'a dit, des vélos en libre-service, il y en a dans toute l'Europe, dans je ne sais combien de villes suisses, on peut citer Bâle, Berne, Winterthour, Lucerne, Lugano, etc. Mais il y en a aussi - le rapporteur de minorité l'a dit - dans des petites villes comme Nyon, comme Prangins, comme Gland. Gland a son vélo en libre-service, Mesdames et Messieurs, et nous, nous sommes la capitale du monde... (Commentaires.) ...et nous ne sommes même pas capables de mettre en place un vélo en libre-service !
Les avantages du vélo en libre-service, vous les connaissez: la multimodalité; ça va bien sûr augmenter la part modale du vélo, on va donc peut-être enfin décoller un peu de ces 5%. Ça va baisser le trafic, parce que les gens qui utilisent les transports publics et ensuite les vélos en libre-service ne prendront peut-être plus leur voiture, notamment pour venir dans les centres urbains. Ça va diminuer la pollution. Et puis, de toute façon, faire du vélo, que ce soit avec le sien ou avec le système de vélos en libre-service, c'est bon pour la santé ! Vous faites du sport, vous pédalez, etc., il n'y a donc que des côtés positifs.
Qu'avons-nous fait à Genève ? Nous sommes toujours les champions du monde de la Genferei. Un projet a été déposé, puis débattu ici - je n'y étais pas encore. Il a été refusé par le PLR, on l'a dit, puis modifié par le nouveau magistrat. On a lancé un appel d'offres. En même temps, un système de vélos en libre-service parallèle, un peu pirate, s'est mis en place avec l'aide du TCS, je tiens quand même à le dire, et du coup, ce vélo en libre-service organisé avec l'aide du TCS met des bâtons dans les roues... (Remarque.) ...ou dans les rayons du vélo en libre-service public qu'on essaie d'avoir enfin. Il y a eu un recours, du coup, TPG Vélos ne pouvait pas ouvrir les enveloppes de l'appel d'offres. Ce recours a été perdu par le VLS parallèle. Enfin, les enveloppes pourraient être ouvertes, mais non, il y a eu un nouveau recours... (Le président agite deux fois la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...cette fois au Tribunal fédéral. La cloche sonne deux fois, je crois qu'on ne peut qu'applaudir la gestion de ce projet qui est vraiment incroyable... (L'orateur applaudit.) ...et finir en disant: Monsieur le président, pas de doute, le vélo en libre-service genevois a vraiment perdu les pédales.
M. Pierre Vanek (EAG). Après l'intervention brillante de Thomas Wenger, j'ai peu de choses à ajouter. A l'évidence, Genève a besoin d'un système de vélos en libre-service. A l'évidence, incompétence, sabotage, et j'en passe, ont conduit à une situation où Gland - notre collègue l'a dit - est mieux doté que nous en la matière. A l'évidence aussi, il y a un souci majeur; la comparaison avec Bâle, qu'on ressert régulièrement, est particulièrement parlante, en matière de mobilité douce en général, mais en matière de vélos en particulier: le rapport est de 1 à 4, en notre défaveur, quant à la part modale de la mobilité douce. Par pudeur, on ne parlera même pas de l'application de l'initiative populaire acceptée à une majorité modeste, certes, mais acceptée quand même, en faveur de mesures d'aménagement pour la mobilité douce. La seule manière de commencer un tant soit peu à se racheter et à démentir les propos de Thomas Wenger, ou ceux de Pierre Vanek, qui est parfois encore plus excessif, qui a parlé de sabotage, c'est d'adopter le plan d'urgence que Roger Deneys nous propose, consistant à amender ce projet de loi par les trois amendements qu'il indique. Toute autre mesure de ce parlement serait évidemment à interpréter comme absolument dilatoire, comme étant la continuation d'une volonté claire de ne pas aller de l'avant dans un dossier qui pourtant est indispensable si on veut pouvoir circuler un peu mieux à Genève, si on veut pouvoir respirer un peu mieux à Genève. Mesdames et Messieurs, notre groupe suivra le rapport de majorité... les rapports de minorité, pardon - je prends mes rêves pour des réalités - et votera, cas échéant, les amendements proposés par le rapporteur de minorité socialiste, que je remercie pour son travail.
M. Stéphane Florey (UDC). J'aimerais attirer votre attention sur un article paru sur le site du «Monde», qui cite le coût d'un vélo en libre-service en France. Les montants peuvent atteindre 4000 euros par vélo, ce qui, dans certains cas et par rapport à certaines voitures, coûte beaucoup plus cher qu'une voiture. Il faudrait plutôt s'inquiéter de ça: quand on compte toutes les déprédations qui ont lieu sur ces vélos en libre-service, on arrive facilement à plusieurs centaines de millions par année pour le libre-service de ces vélos. Finalement, il reste à se poser la question: Genève a-t-elle les moyens de mettre ça en libre-service... (Remarque.) ...d'autant plus que les entreprises privées comme Velospot le font très bien ? Elles prennent elles-mêmes en charge les déprédations, puisque ce sont des entreprises privées. Laissons donc faire au privé ce qu'il fait nettement mieux que l'Etat et refusons ce projet de loi. Je vous remercie.
Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, retards, obstacles, recul, mauvaise foi: le VLS est en train de devenir un objet tabou, dont on a honte de parler ici, tant la situation est devenue pathétique, alors même que cet objet devrait former sans équivoque un trait d'union, un lieu d'entente, un espace cohérent entre les différents modes de déplacement. Evidemment, nous ne sommes pas en train de vendre ici une utopie, nous ne sommes pas non plus en train de plaider pour un monde révolutionnaire, pour un monde sans moteur. Non, on est en train de parler de vélos en libre-service, ce système pacifique qui n'empiète sur aucun mode de transport, qui met de l'huile dans les rouages, un projet de mobilité des plus basiques, des plus conciliants, capable tout autant de développer la mobilité douce que de servir de produit touristique. Il est reconnu, expérimenté partout ailleurs en Europe, jusque dans les recoins des Centovalli. Pour rappel, le premier VLS - le système Vélo'v - voit le jour à Lyon le 19 mai 2005. On est donc loin du projet pilote, à tester, du risque à prendre; l'expertise est faite sous nos fenêtres. Autre exemple éloquent: à Montréal, l'organisme à but non lucratif Bixi a non seulement réussi à se dégager d'un système commercial, mais a obtenu aussi un large soutien politique.
Genève a les ressources et un énorme potentiel; elle bénéficie notamment de l'association Genèveroule, dont l'expérience serait bien utile. Elle a un réseau cyclable en devenir, qui attend impatiemment d'être développé, et que le VLS permettrait de dynamiser. La Cour des comptes nous rappelait encore dernièrement que le potentiel de développement de nos réseaux cyclables est encore largement à développer. Genève souffre de ses embouteillages, le transfert modal est une solution, il faut l'accompagner, le favoriser, lui donner ses chances. Sans aucun doute, l'implantation d'un VLS lui assurerait un certain succès. Qu'attendons-nous aujourd'hui, après avoir littéralement coulé ce projet ? Voulez-vous maintenant le noyer ? Le Grand Conseil doit envoyer un signal clair au Conseil d'Etat pour donner une véritable chance au VLS. Nous vous invitons, chers collègues, à refuser de classer ce projet de loi. Je vous remercie.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, on entend beaucoup de ferveur, beaucoup de passion, surtout sur les bancs d'en face. Mon Dieu, je ne vous en veux pas: le vélo, c'est votre truc, ce n'est pas forcément le mien, surtout qu'à mon âge, je vous trouve même un peu dangereux, car vu la manière dont vous sillonnez les trottoirs et autres, j'ai déjà failli me faire renverser deux ou trois fois. Mais le problème n'est pas là, Mesdames et Messieurs. On en est quand même au troisième rapport ! Nous avons eu plein d'études. J'ose vous rappeler que depuis le temps qu'on l'étudie - M. Wenger l'a dit - ce projet est vert, excusez-moi de vous le dire, il n'est pas mûr. Il n'est pas mûr ! Ça coûte trop cher ! On s'aperçoit... D'autres cités ont essayé de mettre en place ces vélos. Quel est le problème de ces vélos en libre-service ? Il faut en permanence un système qui permet de réachalander les stations, parce que les gens se déplacent de A à B, mais ne reviennent pas forcément de B à A. Vous avez d'énormes déprédations - le tiers du coût pratiquement vient des déprédations. Mesdames et Messieurs les députés, on a essayé de voir ce qu'il en était; je crois que M. le conseiller d'Etat nous avait même dit que le projet avec TPG Vélos avait dû être gelé, que ça n'allait pas. Quelque chose est à faire, oui, mais pas ce projet de loi là ! Ce texte devient caduc, ayons simplement le courage de ne pas entrer en matière, comme ç'a été le cas en commission. Refusons-le et attendons quelque chose qui corresponde à la situation actuelle. Certainement que le département ne va pas vous dire qu'on ne fait plus de vélo mais que de la voiture. Il faut simplement adapter le projet, et ce qu'on nous propose pour le moment n'est pas adapté, raison pour laquelle nous vous recommandons de ne pas entrer en matière. Je vous remercie.
M. Bertrand Buchs (PDC). J'aimerais revenir sur des termes un peu forts et sur les attaques dirigées contre le conseiller d'Etat Barthassat. Clairement, la situation actuelle... Je me demande pourquoi les vélos en libre-service n'existent pas: les communes pouvaient très bien développer un système par un accord, mais il a fallu qu'on fasse intervenir l'Etat alors qu'il n'y avait absolument pas besoin de cela si on voulait un système de vélos en libre-service. On était bien assez grand, dans les communes, pour se mettre d'accord, et on s'était mis d'accord, on avait voté des crédits pour ça. Il manquait très peu d'argent pour l'avoir, les communes ont voulu faire intervenir l'Etat et ça n'a pas marché. Il y a eu des recours, les tribunaux s'en sont mêlés, qu'est-ce que vous voulez y faire ? Le Tribunal fédéral décide de ces recours. Est-ce la faute du département s'il y a des recours ? Non. Troisième chose: tout le monde est d'accord avec l'idée du vélo en libre-service, mais selon les chiffres cités - je reviens sur l'article du «Monde» cité par M. Florey, que j'ai aussi lu, et on ne peut pas dire que «Le Monde» est un journal d'extrême droite - c'est clair que la Ville de Paris perd des dizaines de millions chaque année avec les vélos en libre-service, mais ça ne se dit pas, parce que ce n'est pas politiquement correct d'en parler. Ça coûte extrêmement cher, et il faudra aussi qu'on puisse évaluer ce coût. Maintenant, il faut repartir de zéro, les tribunaux ont décidé, le Tribunal fédéral a décidé, on va pouvoir relancer le vélo en libre-service, mais faisons-le le plus simplement possible, arrêtons de nous compliquer la vie et arrêtons de demander à l'Etat de faire des choses qu'il n'a peut-être pas besoin de faire. Laissons les communes se débrouiller entre elles si elles veulent des vélos en libre-service. Ça marche quand une ville décide; l'Etat n'a pas à intervenir sur les vélos en libre-service.
Enfin, on met en cause la responsabilité du conseiller d'Etat sur la suppression du slowUp, alors que c'est le fait de la gestion calamiteuse des Fêtes de Genève: ça devient vraiment n'importe quoi ! Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Pascal Spuhler (MCG). Nous allons refuser ce projet de loi, qui n'a plus de raison d'être. Nous avons refusé à l'époque le système Vélib'. Vous vous souvenez de la défense de ce dossier qu'avait assumée feu M. Pierre Weiss: il nous en avait expliqué toutes les incongruités et surtout le coût du projet prévu à l'époque. Aujourd'hui, TPG Vélos SA n'a plus à s'occuper de ce dossier. On pourrait imaginer remettre l'ouvrage sur le métier puis reproduire ou reproposer un dossier, mais à mon avis, comme vient de le dire M. Buchs, ce n'est pas au canton de s'occuper de ça ! Les communes sont assez grandes pour le faire ! On a un exemple parfait aujourd'hui: Meyrin l'a fait, Meyrin a pris en main sa mobilité douce et offre à l'heure actuelle un projet de Vélib' à ses citoyens. Pourquoi Meyrin est-elle capable de le faire et pas la Ville de Genève, ni la Ville de Carouge ou celle d'Onex ? Je vous le dis, si je vais à Paris, je vois que c'est la Ville de Paris qui offre ce système, non la région Ile-de-France; dans d'autres villes comme Lyon, ce n'est pas l'Etat ou la région, mais bien la Ville qui offre ce service. Nous estimons donc, Mesdames et Messieurs, qu'il faut peut-être laisser la main aux communes, d'autant plus que plusieurs offres formelles ont été faites, tant aux communes qu'à l'Etat d'ailleurs - M. Barthassat nous le confirmera - par des sociétés privées pour prendre le dossier en main et offrir à la population ce genre de service. Il n'est donc pas nécessaire que l'Etat mette forcément la main à la poche pour payer ce service qui serait ainsi proposé par des sociétés privées. C'est là encore un élément important. Enfin, entre le slowUp, merveilleux moment de mobilité douce, le temps d'un week-end, en famille, agréable, et le système Vélib' que nous voudrions financer des deniers de l'Etat - relation qu'on a tracée - il y a un grand pas que la mobilité douce doit faire très doucement.
Le président. Merci, Monsieur. La parole est à M. Catelain pour une minute quinze.
M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. C'est parfait, merci, Monsieur le président. Ce Vélib' est en effet un long serpent de mer. On nous a parlé de la commune de Lyon: c'est bien un projet communal, non étatique. A Lyon, ce n'est pas gratuit, c'est payant; vous pouvez louer le vélo via votre carte de crédit. Bien que ce soit payant, c'est subventionné et ça coûte 2000 euros de frais d'entretien par vélo par année. A ce prix-là, vous pouvez offrir des abonnements TPG et tout ira bien. Nous ne devons pas inverser les rôles. Dans le cadre de ce projet de loi, on demande à l'Etat de Genève, qui est dans une situation financière catastrophique, de financer un projet pour des communes qui se trouvent dans une situation bien meilleure. Il appartient donc aux communes de se concerter... (Le président agite la cloche pour indiquer qu'il reste trente secondes de temps de parole.) ...pour avoir un projet qui soit compatible entre elles toutes, qu'elles puissent financer, forcément, et sans emprunter. Dernier élément: j'ai dû passer à l'hôpital il y a deux ans pour un accident de ma fille. Nous discutions, et tout d'un coup, ils m'ont parlé de l'augmentation exponentielle des cas de fracture, notamment due aux vélos en libre-service, pas forcément aux vélos électriques...
Le président. C'est terminé, Monsieur.
M. Gilbert Catelain. ...parce que les gens ne savent pas rouler en ville.
Le président. La parole est à M. Deneys pour trente-deux secondes.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, lisez la page 68 du rapport: vous y trouvez l'extrait du Mémorial de la séance du 9 octobre 2014, où M. Barthassat demandait le renvoi en commission pour, justement, étudier les chiffres, le financement et adapter le projet. Il l'avait demandé, ce n'étaient pas des procès d'intentions. Mesdames et Messieurs les députés, je vous rappelle que nous votons ici sur le principe des vélos en libre-service, pas sur le montage, pas sur la participation des communes; c'est simplement le principe. A entendre les propos de certains, on aura bientôt à Genève un système de déambulateurs en libre-service ! (Commentaires.)
Le président. Merci. La parole est à Mme Forster Carbonnier, qui a un peu plus de temps.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve), rapporteuse de première minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'ai entendu beaucoup de choses, beaucoup de critiques sur le coût qui serait de dizaines de millions de francs. Le présent projet demandait à l'époque une subvention de 1,3 million par année, ce qui me semble assez éloigné, Monsieur Buchs, de la situation apocalyptique que vous nous avez décrite. Ensuite, il est évident que le canton doit s'impliquer, il est évident qu'il faut un système unifié, qui fonctionne dans tout le canton, pour éviter que des personnes aient à changer de vélo et de système en fonction de leur déplacement. Raison pour laquelle nous soutenons vraiment le département dans sa volonté de mettre en place un système de vélos en libre-service unifié.
Les vélos en libre-service, ce n'est pas un gadget inutile. On sait que cela favorise l'intermodalité: des automobilistes peuvent laisser leur voiture dans un parking, prendre un vélo pour faire des trajets plus courts en ville puis reprendre leur voiture le soir. Des usagers des transports publics peuvent faire de même. C'est vraiment quelque chose qui facilite le transport pour tout le monde. En plus, c'est un outil extrêmement apprécié des touristes à Genève, une vraie carte de visite pour les villes aujourd'hui. Je vous appelle donc vraiment à accepter ce projet de loi. Et comme je vois que ce sera un peu difficile aujourd'hui, je propose que nous le renvoyions à la commission des finances pour que le magistrat vienne nous expliquer où il en est dans sa politique de mise en oeuvre de vélos en libre-service et quels seront les montants qui seront nécessaires. Comme M. Deneys, je pense que quelques amendements à ce projet de loi accéléreraient nettement la mise en place de ce système de vélos en libre-service. C'est pour cette raison que je demande le renvoi en commission.
Le président. Merci, Madame. Sur cette demande de renvoi en commission, seuls les rapporteurs et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer. Monsieur Aellen ?
M. Cyril Aellen (PLR), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Brièvement, je crois qu'on fait fausse route. Je m'étonne de cette obstination des partisans du vélo en libre-service - dont je fais pourtant partie - sur ce texte, qui, à mon avis, risque davantage de bloquer que de libérer ce projet de vélos en libre-service. Il ne faut pas simplement procéder à quelques retouches à ce projet de loi, il faut revoir l'entier du contrat de prestations. Un appel d'offres a été lancé, il devrait bientôt aboutir; il fera l'objet d'un nouveau projet de loi. Imaginez que ce projet-ci s'entrechoque avec celui qui devrait arriver, qui doit arriver, que j'appelle de mes voeux: ce serait extrêmement dommageable. Pour toutes ces raisons, de mon point de vue, il est vraiment indispensable d'en finir avec un mauvais projet de loi pour en ouvrir un autre le plus rapidement et le plus sereinement possible. Dernier point: ce n'est pas bon de dire qu'on vote sur le principe du vélo en libre-service. Si par hasard ce texte était refusé, j'aimerais souligner que parmi les personnes qui l'auront refusé, certains souhaitent bien un vélo en libre-service.
Le président. Merci, Monsieur. Monsieur Deneys, vous avez épuisé votre temps de parole, mais vous avez une demande ?
M. Roger Deneys (S), rapporteur de deuxième minorité. Oui, sur le renvoi en commission...
Le président. Quelle est votre demande ?
M. Roger Deneys. Sur le renvoi...
Le président. Non, sur le renvoi en commission, vous n'avez plus de temps de parole, mais vous aviez une demande. Vous m'avez dit que vous vouliez le vote nominal.
M. Roger Deneys. Oui, j'aimerais le vote nominal sur tous les votes, mais il me semble que sur le renvoi en commission, on a le droit de parler en dehors du temps de parole, puisque ce n'est pas prévu dans ce temps. On ne peut pas savoir à l'avance !
Le président. Alors prenez la parole quelques secondes !
M. Roger Deneys. Simplement, pour la question du contrat de prestations, comme on l'a fait pour la Cité universitaire, il peut évidemment être adapté si on a des informations du conseiller d'Etat. Donc si le montant et le contrat de prestations sont modifiés, ça ne pose aucun problème particulier de renvoyer l'objet en commission, justement pour mettre à jour ce contrat. On le fait régulièrement. Je soutiens donc cette demande de renvoi à la commission des finances, puisqu'on l'a déjà traité là.
Le président. Vous avez demandé le vote nominal. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Très bien. Nous allons donc voter sur cette demande de renvoi à la commission des finances... (Commentaires.)
Des voix. Le conseiller d'Etat !
Le président. Non, il m'a demandé de parler après, seulement à la fin. Le vote est ouvert.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10989-2 à la commission des finances est rejeté par 57 non contre 32 oui (vote nominal).
Le président. Nous allons passer au vote d'entrée en matière. (Remarque.) Monsieur Barthassat, vous voulez parler maintenant ? (Remarque.) Très bien.
M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, sachez que le Vélib' reste bien entendu une priorité pour notre département... (Remarque.) Pardon ? (Rires.) Je répète: le Vélib' reste une priorité pour le département, mais je constate que les débats n'ont pas beaucoup changé depuis un certain nombre d'années. A mon arrivée dans ce département, on a bien vu qu'il y avait un problème avec le système financier, avec le coût. Toute la discussion a tourné autour de ces fameux projets qui se faisaient un peu concurrence. Ce parlement a décidé de repartir avec un nouveau projet qui serait remis, pour le support financier, à des organes privés. Vous savez qu'entre-temps, TPG Vélos SA s'est occupé de ce projet. On a mis en place un nouveau projet, qui, justement, ne coûterait pas cher, voire pas un centime à l'Etat. Aujourd'hui, nous avons un recours, lancé bien entendu aussi par Velospot - pour ne pas le nommer - qui voulait son système envers et contre tout, système qui combattait celui de Mme Künzler, si on peut l'appeler ainsi. Certaines communes utilisent ce système aujourd'hui, alors qu'il ne sert qu'à semer la confusion par rapport au projet sur lequel on travaille. Encore une fois, ce projet devrait être supporté par des privés. Nous avons gagné ce premier recours au niveau cantonal; nous devons maintenant le gagner au niveau fédéral, et nous devons patienter pour pouvoir arriver avec ce nouveau projet.
Quant au slowUp, loin de moi la responsabilité du fait qu'il est abandonné par l'organisation des Fêtes de Genève et de Genève Tourisme, qui a eu de gros déboires financiers. Pour économiser une centaine de milliers de francs, dont la moitié était assumée par des sponsors - une économie de 50 000 F, donc - il a été abandonné. Nous essayons de le sauver pour cette année, et si on n'y arrive pas, il sera sauvé pour l'année d'après, c'est sûr et certain, en collaboration étroite avec la Ville de Genève.
La Ville de Genève, encore une fois, ne défend pas le système que certains essaient de mettre en place sur le domaine public ou dans notre centre-ville, voire l'hypercentre. La commune de Carouge, celle de Genève et l'Etat serrent les rangs, toujours sur ce projet, qui est en attente d'un recours à Berne. Ainsi, Mesdames et Messieurs, continuons de travailler dans le bon sens, dans le sens d'un bon projet, qui prendra un peu plus de temps; mais le temps, c'est de l'argent, et je sais qu'aujourd'hui, avec votre projet, vous êtes toujours un peu les champions pour creuser des puits sans fond dans un contexte budgétaire qui ne nous le permet pas. Le fait de prendre un peu de temps nous fera gagner de l'argent et permettra, en plus, un projet qui tiendra la route, sans jeu de mots. Je vous conseille donc, Mesdames et Messieurs, de laisser tomber ce projet de loi, de ne surtout pas l'appuyer, afin que nous continuions tous ensemble à avancer et à bien travailler. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons enfin pouvoir voter sur l'entrée en matière.
Mis aux voix, le projet de loi 10989-2 est rejeté en premier débat par 59 non contre 32 oui (vote nominal).