Séance du vendredi 3 juin 2016 à 15h45
1re législature - 3e année - 5e session - 24e séance

M 2130-B
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation, de la culture et du sport chargée d'étudier la proposition de motion de Mmes et MM. Guy Mettan, Bertrand Buchs, Anne Marie von Arx-Vernon, Serge Dal Busco, Philippe Morel, Béatrice Hirsch, Michel Forni, Bernhard Riedweg, Jean-François Girardet, André Python, Henry Rappaz, Roger Golay, Thierry Cerutti, Marie-Thérèse Engelberts, Pascal Spuhler, Florian Gander pour le maintien de l'éducation à la citoyenneté à l'Ecole de culture générale (ECG)
Ce texte figure dans le volume du Mémorial «Annexes: objets nouveaux» de la session V des 7 et 8 mai 2015.
Rapport de majorité de M. Jean-Michel Bugnion (Ve)
Rapport de minorité de M. Jean-François Girardet (MCG)

Débat

Le président. Nous abordons à présent la M 2130-B en catégorie II, quarante minutes, et je passe la parole à M. Jean-Michel Bugnion, rapporteur de majorité.

M. Jean-Michel Bugnion (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, après avoir auditionné les professeurs de civisme de l'ECG Jean-Piaget, la majorité de la commission a maintenu son préavis de dépôt sur le bureau du Grand Conseil pour trois raisons essentielles. Premièrement, le contenu des notions d'éducation citoyenne est maintenu dans les plans d'études fédéraux de l'ECG concernant l'histoire et la géographie. Deuxièmement, les activités ponctuelles prisées des élèves telles que visites du Parlement à Berne, votations en blanc ou débats avec des politiciens invités sont parfaitement réalisables dans le cadre d'un cours de sciences humaines, que ce soit l'histoire ou la géographie, comme l'ont fait et le font encore plusieurs professeurs du collège. Et pour ce qui est de la troisième et dernière raison - pour le moment - il faut entendre la direction générale du secondaire II quand elle dit qu'il est nécessaire de renforcer la dotation horaire en sciences humaines, donc en histoire et en géographie, pour un parcours qui est, je vous le rappelle, un parcours de culture générale validé par la Confédération. Voilà, je m'arrête là pour le moment, je reviendrai pour le dessert !

Présidence de Mme Christina Meissner, première vice-présidente

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, j'aimerais simplement rappeler le titre de cet objet pour que tout le monde sache de quoi on parle: il s'agit d'une proposition de motion qui demande le maintien de l'éducation à la citoyenneté à l'Ecole de culture générale.

Cette motion a été déposée il y a bien longtemps. En effet, le 20 avril 2015 est la date du dépôt de ce rapport, mais on est là face à un deuxième rapport, raison pour laquelle il est suivi de la lettre B. Il y a eu toute une saga avant cela, puisque avant la motion nous avions même été saisis d'une pétition en 2012, déposée par la suite sur le bureau du Grand Conseil, puis le PDC a rédigé cette motion pour demander le maintien des cours de citoyenneté.

Je dois dire que le rapport de majorité m'a un peu déçu, dans la mesure où il entretient une confusion entre pétition et motion. En effet, il est indiqué au deuxième paragraphe que la commission de l'enseignement «conclut majoritairement à un dépôt sur le bureau du Grand Conseil», or une motion ne se dépose pas sur le bureau du Grand Conseil, Monsieur le député ! Du reste, à la fin de son rapport, le rapporteur dit que la commission a voté contre le renvoi au Conseil d'Etat. On n'en est pas là ! Cette motion a été préavisée négativement, on est d'accord, mais sans tenir compte de l'amendement qui avait été proposé au cours de l'un de ses trois passages devant notre Grand Conseil. En effet, M. le député Guy Mettan avait déposé un amendement, qui a d'ailleurs été redéposé pour préparer cette discussion finale avec vous. Alors je commenterai cet amendement ou je laisserai le député Guy Mettan le commenter, parce qu'il change quand même passablement les prises de position qui vont être celles des groupes par la suite.

Mme Magali Orsini (EAG). Bien sûr qu'il faut maintenir l'enseignement du civisme à l'Ecole de culture générale. Il faudrait l'instaurer partout, l'enseignement du civisme ! Depuis l'école primaire ! Ce serait un facteur d'intégration bien plus important que l'histoire des religions, surtout confiée à des religieux, n'est-ce pas ? (Exclamations.) Je pense donc qu'il est absolument indispensable, partout où cet enseignement est dispensé, qu'il soit en tout cas maintenu.

Quant au fait qu'on nous ait dit que le parlement n'a pas à s'occuper de la grille horaire, eh bien justement il s'en est occupé en matière d'histoire des religions, et il aurait pu s'abstenir ! En l'occurrence, je pense que cet enseignement qui est donné par des professeurs d'histoire et de géographie est tout à fait à sa place. Effectivement, j'appartiens à une génération où l'on étudiait bien l'histoire des religions grâce à nos professeurs d'histoire, qui nous expliquaient l'implantation de telle ou telle religion dans tel et tel espace géographique, et l'on n'avait pas besoin de catéchisme pour cela.

Je crois que si l'on assiste actuellement à une telle désaffection de notre jeunesse pour la politique, c'est dû en grande partie à une méconnaissance totale de nos institutions et de notre mode de fonctionnement, et je suis persuadée qu'elle s'engagerait beaucoup plus agréablement si elle avait des professeurs comme j'en ai vu, tout à fait motivants, pour lui expliquer à quel point le gouvernement de la cité et l'engagement peuvent être des choses tout à fait passionnantes. En conclusion, je vous invite donc à soutenir cette proposition de motion. (Quelques applaudissements.)

Mme Caroline Marti (S). Mesdames et Messieurs les députés, pour couper court aux critiques qu'on entend très fréquemment quand on aborde ce type de sujets, selon lesquelles on ne peut pas toujours ajouter différentes heures de différents cours sans trop alourdir la grille horaire, eh bien j'aimerais quand même souligner que, dans le cas présent, il n'est pas question d'ajouter des heures mais simplement de maintenir des heures qui étaient déjà présentes dans la grille horaire de l'ECG.

Parmi les raisons pour lesquelles le groupe socialiste acceptera cette motion aujourd'hui, il y a tout d'abord le fait que nous sommes extrêmement inquiets quant à l'avenir du contenu de ce cours d'éducation citoyenne. Le projet actuel consiste à intégrer, ou je dirais presque plutôt à diluer le contenu de cet enseignement dans les cours d'histoire et de géographie, or cela constitue un véritable risque de voir disparaître le contenu de cet enseignement, puisqu'il dépendra du bon vouloir ou plutôt de la bonne ou de la mauvaise volonté du professeur de transmettre ce type de savoir.

Le deuxième élément, c'est qu'il existe dans les établissements toutes sortes d'activités civiques hors cours, c'est-à-dire pas liées directement aux cours - on peut notamment citer des débats, des rencontres, des votes en blanc, des visites - qui sont très majoritairement organisées par les enseignants d'éducation citoyenne, et donc supprimer le cours spécifique d'éducation citoyenne en tant que tel revient à mettre en péril ce type d'activités civiques qui sont extrêmement importantes pour permettre aux élèves et aux étudiants de faire l'expérience concrète, par la pratique, de l'activité civique et citoyenne. Il est donc très important de ne pas faire de l'éducation citoyenne une branche subalterne.

Mais plus globalement, le parti socialiste a toujours soutenu et soutient encore aujourd'hui le maintien et même le renforcement des cours d'éducation citoyenne dans tous les types de cursus scolaire de notre canton. Nous souhaitons rappeler - c'est très important - que le système de démocratie directe en Suisse est extrêmement exigeant pour les citoyens: quand on se retrouve, comme c'est le cas le week-end prochain, avec, si l'on habite en ville de Genève - je prends cet exemple-là - treize sujets soumis à votation, sur trois niveaux différents, eh bien c'est extrêmement exigeant pour les citoyens, et il est impératif, pour que cet outil de la démocratie directe fonctionne correctement, que ces derniers soient en mesure de former leur opinion librement et qu'ils puissent voter en toute connaissance de cause quant aux sujets et aux procédures. Or ces connaissances théoriques de base, mais également le sens critique nécessaire pour exprimer librement son choix ne tombent pas du ciel: ça ne s'acquiert pas comme ça, par le sens commun, ça doit vraiment faire l'objet d'un processus d'apprentissage. Certes, ce processus d'apprentissage peut se faire d'autres manières - dans le cadre familial, dans le cadre associatif, ou avec des amis, par exemple - mais pour avoir l'assurance que chaque citoyen et chaque citoyenne de notre canton acquière les compétences théoriques de base et les connaissances de ce que sont la démocratie et la citoyenneté, eh bien cela doit passer par le cadre scolaire, c'est ainsi que nous pourrons nous assurer du bon fonctionnement de notre démocratie directe.

Enfin - je terminerai par là - on nous fait souvent la critique que ce n'est pas à nous, Grand Conseil, de nous mêler de la grille horaire des écoles et des différentes filières de formation; eh bien à mon sens et aux yeux du parti socialiste, en tant que premier pouvoir nous sommes parfaitement légitimés à donner ce message politique clair, à savoir le renforcement des cours d'éducation citoyenne dans les filières scolaires de notre canton. C'est pour toutes ces raisons que nous vous proposons de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat. (Applaudissements.)

Mme Danièle Magnin (MCG). En ce qui me concerne, et en ce qui concerne le MCG, j'aimerais dire que nous avons auditionné... Pardonnez-moi, je recommence ! Dans le cadre de l'association «Rencontres Suisses - Nouvelle Société Helvétique» dont je fais partie depuis une quinzaine d'années et dont le but est de faire connaître nos institutions aux différentes personnes et dans différents lieux de notre pays, nous avons auditionné sur le même sujet un certain nombre de jeunes qui venaient soit du collège, soit de l'Ecole Internationale, soit d'autres endroits, et nous nous sommes aperçus qu'il y avait d'immenses lacunes dans l'enseignement qu'on leur donnait, notamment dans l'enseignement de la citoyenneté. Nous avons également, comme clou de l'année, entendu M. Beer, qui nous a parlé de la manière dont était constituée cette fameuse grille horaire et du fait qu'il y avait maintenant une espèce de grande mare floue qui comportait l'enseignement de l'histoire et de la géographie, et dans laquelle l'instruction civique était effectivement incluse.

Mais ce plan d'études romand, le fameux PER, ne satisfait pas aux besoins de la population actuelle. Pourquoi ? A Genève, en particulier, nous avons dans notre population un nombre extrêmement important de migrants, qui n'ont pas appris la citoyenneté sur les genoux de leurs grands-parents, ni de leurs parents ! De ce fait, il est absolument indispensable de continuer à dispenser cet enseignement, et moi j'y ajouterais non pas des cours de religion, mais des cours de morale, pour que chacun sache comment on doit se comporter civilement, et également comment on doit faire usage de ses droits politiques. Je vous remercie donc de voter le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat... (Remarque.) Je n'ai pas compris !

M. Jean Romain (PLR). De tous les savoirs enseignés dans nos écoles, certains valent pour eux-mêmes parce que le contenu qu'ils véhiculent est en lui-même justifié. D'autres savoirs ne valent que parce qu'ils sont au service d'un autre accomplissement, c'est typiquement le cas des cours de civisme et de citoyenneté. On n'étudie pas le fonctionnement de notre démocratie pour lui-même, mais au contraire pour pouvoir utiliser cette démocratie et s'y impliquer en tant que citoyen. Ainsi, de par leur nature, les cours d'éducation civique obéissent à deux impératifs.

D'une part, ils sont pluridisciplinaires: ils ressortissent à l'histoire, à la géographie, et même, figurez-vous, à la philosophie politique. De multiples facteurs se focalisent sur eux pour assurer la multiplicité des facettes qu'ils mettent en oeuvre. Puisque rien n'est monolithique dans notre monde politique, rien de monolithique n'est convoqué pour ces cours.

D'autre part, ils sont tributaires du calendrier politique de notre canton et de notre pays. Au lieu de distiller toutes les semaines un cours fixe qui n'a pas de rapport direct avec ce qui se passe dans les urnes, le plus efficace est de mettre l'accent aux moments opportuns de notre vie démocratique; on gagne ainsi en densification et en efficacité.

La pérennité de ces cours est bel et bien garantie au niveau de l'Ecole de culture générale. Sous une forme effectivement un peu différente, mais non moins importante.

En conclusion, parce que le PLR est favorable aux cours d'une manière générale, parce que le PLR est favorable aux cours d'instruction civique et enfin parce que le PLR pense qu'il faut justement distiller ces cours non pas de façon unique, mais de façon multiple et plurivoque, eh bien il va refuser cette motion. (Quelques applaudissements.)

Une voix. Bravo !

Mme Delphine Klopfenstein Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, les Verts sont partagés quant à la meilleure manière d'intégrer le civisme dans le programme des écoles, mais ils s'accordent sur un point: l'éducation à la citoyenneté est essentielle dans le parcours scolaire.

Il est important de rappeler ici la mission et l'enjeu de ces cours. L'éducation à la citoyenneté est un réel outil d'intégration dans la société; elle est essentielle car elle permet à l'élève de développer son sens critique, d'opérer des choix, de se positionner par rapport à des objets et de donner son avis dans un contexte collectif. Par un processus participatif, l'éducation à la citoyenneté initie l'élève à la pratique du débat démocratique.

Elle permet aussi de connaître ses droits et les institutions locales; c'est vivre et agir dans une société en connaissant ses droits et les structures politiques dans lesquelles ils évoluent. En effet, savoir exercer ses droits et ses responsabilités est le pilier de nos sociétés démocratiques. De plus, l'éducation à la citoyenneté permet de devenir acteur de la société et de jouer un rôle dans celle-ci, car assumer des responsabilités n'arrive pas au hasard. Cela implique de construire des compétences afin de comprendre les enjeux de la société actuelle pour réussir à y faire face.

Aujourd'hui, le constat est préoccupant. Les jeunes votent de moins en moins: ils étaient 30% entre 18 et 19 ans à avoir voté en 2015, bien en dessous de la moyenne cantonale genevoise - elle-même déjà basse - qui s'élève à 46,8%. Nous devons donc rendre la politique accessible, décloisonner nos enceintes et sensibiliser les jeunes essentiellement, car la politique c'est passionnant et, surtout, cela concerne tout le monde. Dans cette mission, l'éducation à la citoyenneté joue un rôle central, mais parce qu'il existe plusieurs moyens de donner à l'éducation civique la place qu'elle mérite, les Verts auront la liberté de vote sur cette motion.

M. Guy Mettan (PDC). J'aimerais d'abord remercier Mme Orsini d'Ensemble à Gauche et Mme Marti du parti socialiste d'avoir très bien expliqué les raisons pour lesquelles il faut accepter cette motion, je ne vais donc pas y revenir. Ce que je trouve paradoxal, c'est qu'il y a des groupes - j'ai entendu par exemple le PLR tout à l'heure avec M. Romain - qui prétendent défendre l'éducation à la citoyenneté et qui en même temps la combattent en votant contre cette motion. Il faut quand même être logique: si nous avons déposé cette motion, c'est parce qu'il y avait suppression du cours ! Ce n'est pas du tout... Et les professeurs qui ont été auditionnés l'ont bien dit, il y a suppression du cours, qui va simplement être inscrit dans un programme vague d'histoire-géographie, ce qui consiste au fond à diluer complètement l'éducation à la citoyenneté dans cette galaxie, dans cette nébuleuse un peu vague d'histoire-géographie. J'adore ces deux disciplines et je pense qu'il est même très important qu'on puisse les étudier en tant que telles, mais à mon sens si l'on veut vraiment soutenir l'éducation à la citoyenneté, comme beaucoup de mes préopinants l'ont dit, il faut que ce soit nommément et explicitement marqué. Sinon, que va-t-il se passer ? Eh bien dans deux, trois, quatre ou cinq ans, cela aura complètement disparu, noyé comme je le disais dans une espèce de magma général.

Tout ce qu'on demande ici, ce n'est pas de rajouter des cours, Mme Marti l'a rappelé. Il s'agit simplement de maintenir ce qui existait, ce qui a toujours existé depuis des décennies. Ce n'est pas extraordinaire, ce n'est pas un effort supplémentaire demandé aux enseignants, ce n'est pas un effort supplémentaire demandé au DIP, et encore moins un effort financier, puisque cela existait déjà. A partir de là, je ne peux donc que vous demander de voter cette motion.

Encore un petit mot sur l'amendement. Effectivement, au cours des débats j'avais déposé un amendement, qui permettait d'être un tout petit peu plus souple - vous l'avez reçu - et qui invitait le Conseil d'Etat à garantir la pérennité de l'enseignement de la citoyenneté dans le plan d'études de l'Ecole de culture générale. Il reformule donc sous une forme un tout petit peu adoucie ce qui figurait dans l'invite de la motion. Je préfère autant, puisqu'il semble se dessiner une majorité, maintenir l'invite telle qu'elle avait été initialement rédigée, mais si vous acceptez l'amendement, ça va très bien aussi, même si pour ma part la première version me convient très bien. Merci de votre attention.

M. Stéphane Florey (UDC). Tout d'abord je tiens quand même à rappeler pourquoi il y a ce deuxième rapport, parce que là on est en train de refaire tout le débat qui avait eu lieu sur la M 2130-A, alors qu'il a déjà été fait ! Si ce rapport avait été renvoyé en commission, c'est parce qu'il s'était trouvé une majorité de circonstance sur le fait que, pour le rapport M 2130-A, on n'avait pas auditionné les professeurs, estimant que ce n'était pas nécessaire. Alors finalement il y a eu un deuxième traitement en commission, on a auditionné les deux professeurs en question mais, malheureusement pour eux, ils n'ont absolument pas convaincu la majorité de la commission du fait que leur cours allait disparaître, et du reste ils n'ont même pas pu le prouver ! En effet - et là nous rejoignons entièrement Mme Anne Emery-Torracinta sur ce sujet - d'une part le plan d'études garantit l'éducation à la citoyenneté au travers de l'histoire et de la géographie, donc il n'y a de toute façon pas d'autre possibilité à ce niveau-là, et d'autre part il y a également le fait - comme cela a été dit - que la Confédération, pour une question de reconnaissance des diplômes de l'ECG, a imposé que l'on augmente certaines heures. C'est la solution qui a été trouvée et elle nous convient parfaitement, puisque, comme l'a aussi dit très justement M. Jean Romain, il ne sert à rien de bourrer le crâne des enfants avec de la politique à longueur d'année, il vaut mieux intervenir sur des sujets spécifiques aux moments opportuns. Sur ce point nous sommes en tout cas convaincus que c'est la meilleure solution, et par ailleurs il appartient aussi aux parents de faire l'éducation citoyenne de leurs enfants d'une manière plus générale.

C'est pour ces raisons que nous ne changerons pas de position, c'est-à-dire que nous refuserons encore une fois cette motion, tout comme l'amendement, qui ne sert absolument à rien. En effet, si vous le lisez correctement, qu'est-ce qu'il fait, en réalité ? Il veut juste donner une reconnaissance au principal auteur de la motion, qui tente désespérément de maintenir son texte, parce qu'au fond il institue ce qui se fait déjà. Effectivement, si vous en faites la lecture, qu'est-ce qu'il est dit ? Eh bien que de toute façon c'est garanti, mais avec ça on peut faire ce qu'on veut... On va donc de toute façon maintenir cet enseignement dans l'histoire et la géographie, et il ne sert absolument à rien de le redire une fois, puisque c'est déjà en place. C'est pour tous ces motifs que finalement le groupe UDC vous recommande le rejet à la fois de l'amendement et de la motion.

M. Olivier Baud (EAG). Madame la présidente de séance, Mesdames et Messieurs les députés, oui, l'école est très sollicitée, oui, on demande chaque jour davantage à l'école, et il y a de multiples lobbies qui voudraient voir leurs centres d'intérêts respectifs entrer à l'école par tous les moyens possibles. Je trouve qu'il est particulièrement vain de nier cette réalité, mais ce n'est pas le problème de cette motion. Le véritable problème de cette motion, c'est que l'éducation à la citoyenneté, formellement, ça n'existe pas. Etre professeur d'éducation civique, ça n'existe pas ! Il n'y a pas de formation pour ça, ce sont même les professeurs qui sont venus en commission nous le dire. Et pourquoi ? Parce que l'éducation à la citoyenneté est inhérente à la fonction d'enseignant. Elle fait partie de la loi sur l'instruction publique que nous venons de revisiter entièrement. Elle est dans la mission de l'école. Et cette éducation à la citoyenneté est portée par le corps enseignant tout entier, il n'est pas nécessaire d'être professeur de géographie ou d'histoire, ce n'est pas relégué qu'à ces deux seules matières. Vous pouvez être professeur de biologie, de physique, de chimie, de français, d'allemand, de maths ou même de philosophie et avoir à l'esprit cette nécessaire éducation à la citoyenneté !

Alors j'entends bien que le parti socialiste a retourné sa veste; ce n'était pas du tout la position qu'il défendait en commission, et pour ma part je trouve ça regrettable, mais ce sont surtout les propos de la représentante du parti socialiste que je trouve lamentables, quand elle dit que cet enseignement dépendra, je cite, «de la mauvaise volonté» des enseignants. Quelle image a-t-elle du corps enseignant ?! C'est dévalorisant, c'est dégradant, et je pense que ce n'est pas admissible dans ce parlement, quand il s'agit de soutenir l'école au lieu de la torpiller une fois de plus.

Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite donc à refuser cette motion pour préserver à l'école toute sa mission, dans toute sa valeur et toute sa hauteur, sans justement l'amputer en lui enlevant quelque chose. Je vous remercie de votre attention.

Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, président

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Pierre Ronget pour une minute cinquante-six.

M. Pierre Ronget (PLR). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion pose évidemment un problème important - on vient de l'entendre avec mon préopinant - à savoir le rôle de l'éducation citoyenne. Malheureusement, l'invite n'est absolument pas opportune; il n'appartient pas au Grand Conseil d'organiser la grille, mais à l'école de porter cette notion citoyenne. Il faut développer une réflexion générale sur l'importance d'offrir aux élèves les connaissances nécessaires pour s'intégrer dans la vie de la société.

Si vous avez lu le rapport de majorité, vous avez pu constater combien il est fin et avec quel brio il défend sa position. Cette motion, en revanche, n'est qu'une défense corporatiste, qui ne cible qu'une seule discipline et que certains enseignants. Selon le rapporteur de majorité, que nous soutenons et nous regrettons du reste que son parti lui fasse défaut... (Exclamations.) - l'éducation citoyenne ne doit pas se limiter à une seule discipline, mais doit être envisagée dans ses rapports avec toutes les disciplines des sciences humaines et permettre à l'élève d'acquérir une vision globale, une perspective que les historiens connaissent plus l'approche de Braudel. Les commissaires socialistes l'avaient très bien compris en commission; ils ont dû modifier leur position...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Pierre Ronget. ...et c'est vraiment regrettable. Vouloir simplement défendre l'éducation citoyenne comme un cours à part entière, c'est dire que nous faisons des maths lorsque nous faisons du livret. Eh bien je pense qu'il faut faire autre chose, et j'invite chacun à quitter cette vision corporatiste et rétrograde pour avoir une vision ouverte, telle que nous l'a présentée... (Exclamations. Commentaires.) ...le rapport de majorité.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Marie-Thérèse Engelberts pour deux minutes.

Mme Marie-Thérèse Engelberts (HP). Merci, Monsieur le président. Je suis peut-être extrêmement fermée et restrictive, mais le discours de mes deux préopinants me semble quelque peu surréaliste et sans doute un peu idéaliste. Oui, c'est vrai que tous les professeurs sont investis d'une mission, mais je ne suis pas sûre qu'ils soient investis exactement de celle qui nous est proposée ici dans cette motion.

C'est vrai aussi que le Grand Conseil doit se prononcer sur un principe: nous ne sommes pas là pour organiser l'enseignement dans les classes et le nombre d'heures. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Par rapport au principe, nous avons évoqué à différents moments l'importance d'enseigner la citoyenneté dans ce canton. A mon sens, il est très intéressant de se rappeler qu'il y a des populations extrêmement différentes dans les écoles, et je pense qu'il est un peu présomptueux de dire qu'il suffit d'intégrer «le tout est dans le tout» et que finalement, qu'on enseigne l'histoire ou la géographie, il paraît aller de soi qu'on enseigne la citoyenneté. Ce n'est pas vrai ! Quand on enseigne les travaux manuels, on n'enseigne pas forcément la couture, ni la broderie, mais on enseigne peut-être aussi autre chose. Alors il me semble que pour cela, et sur ce principe, il y a lieu de renforcer cet enseignement et de le laisser spécifiquement dans la grille qui est proposée dans les différentes écoles, en particulier à l'ECG, où les populations sont extrêmement mélangées et où je pense quand même - je remercie d'ailleurs le PS de l'avoir bien souligné - que tout le monde n'a pas le même accès à la même culture. Car c'est aussi une question de culture ! Il ne s'agit pas simplement de développer quelques concepts par-ci par-là, qui sont attrapés par des personnes qui ont l'habitude de naviguer à ce niveau-là, notamment dans leur famille, car ce n'est pas la majorité des élèves de ce canton. Ce qui compte, en fait, c'est donc le fond...

Le président. Il vous faut conclure.

Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...le principe, et non sa forme. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. C'est parfait ! Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. François Baertschi pour deux minutes.

M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. Dans sa charte, le MCG demande de rétablir l'enseignement civique et l'histoire suisse dans les établissements scolaires, parce qu'actuellement la situation est assez catastrophique pour ces deux matières, je crois qu'il faut le reconnaître. Ce sont deux matières essentielles pour le MCG, et c'est pour cela que nous soutiendrons avec enthousiasme cette motion. Nous demandons vraiment d'aller encore beaucoup plus loin et de faire un effort considérable sur cet élément d'enseignement qui est central pour nous ainsi que pour les Genevois.

M. Guy Mettan (PDC). J'aimerais juste faire deux remarques pour répondre à M. Baud. Je dois dire que jusqu'à maintenant j'avais compris que c'était surtout une vocation de syndicaliste qu'il avait, notamment de défense des enseignants, alors j'avoue que j'ai un peu de peine à comprendre que maintenant il flingue les professeurs qui veulent, eux, promouvoir l'éducation civique. C'est exactement ce qu'il a dit tout à l'heure... Je ne comprends donc pas comment il peut concilier sa vocation de défenseur des enseignants avec le massacre de ces pauvres professeurs de civisme de l'Ecole de culture générale. (Commentaires.) C'est exactement ce qu'il nous propose de faire !

Deuxièmement, M. Florey nous avait habitués à davantage de rigueur ! Moi je croyais que son parti défendait plutôt des valeurs traditionnelles, une vision de la Suisse, une vision justement de la culture politique suisse, or là tout d'un coup il nous dit: «Non, non, tout ça n'a aucune importance; nous, nous allons voter contre l'instruction civique et l'éducation à la citoyenneté dans les écoles genevoises.» Expliquez-moi où est la cohérence, parce que j'avoue qu'elle m'échappe grandement !

Quant à la dernière intervention du PLR, tout ce qui nous est proposé par la bouche de MM. Romain et Ronget, c'est au fond d'assister à un immense «gloubi-boulga» pédagogique, où l'on mêlerait l'histoire, la géographie, le civisme, les mathématiques, l'arithmétique ou je ne sais quoi, dans une espèce de grande nébuleuse vague. Voilà ce qui nous est proposé. Si c'est ça la pédagogie ou la valeur de la pédagogie qui a été défendue par le PLR jusqu'ici, je demande aussi des explications, parce qu'alors je n'y comprends plus rien.

Tout ce qu'on veut, c'est le maintien de l'éducation civique à l'Ecole de culture générale, comme cela a été fait jusqu'à maintenant, sans rien demander de plus ni aux uns ni aux autres. Je crois que c'est clair, et je vous remercie encore une fois de votre attention.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Marion Sobanek pour une minute trente.

Mme Marion Sobanek (S), députée suppléante. Merci beaucoup, Monsieur le président. Vous direz à M. Baud que le PS n'a évidemment pas une mauvaise image des enseignants: on en a assez dans nos rangs, ça nous est régulièrement reproché, et nous connaissons l'enseignement. Mais comme l'ont dit mes préopinants, il ne faut pas créer une nouvelle nébuleuse, un nouveau mélange des enseignements, mais garder pour chaque branche sa spécificité, particulièrement à l'Ecole de culture générale, car elle compte énormément de jeunes gens issus de milieux où, comme l'a dit Mme Magnin, on n'apprend pas la citoyenneté sur les genoux de son grand-papa. A nos yeux, l'intégration passe par la connaissance et, comme l'a relevé Mme Marti, quand on est saisi de treize sujets soumis à votation, sur trois niveaux, il faut bien les comprendre. La spécificité de ces cours à l'Ecole de culture générale permet aussi des sorties comme nous en accueillons régulièrement ici au Grand Conseil, et nous les saluons. Pour toutes ces raisons, je pense qu'il faudrait vraiment appuyer cette motion. (Quelques applaudissements.)

Une voix. Très bien !

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Pascal Spuhler pour une minute vingt.

M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'instruction civique à l'école est très importante, mais pour autant qu'elle ne soit pas dispensée selon la liberté de chacun. Je m'explique. J'entends M. Baud nous dire que chaque professeur fait de l'instruction civique et que c'est un devoir. Certes, c'est très bien que l'instruction civique soit introduite dans chaque cours ou qu'on établisse des relations avec l'instruction civique sur certains sujets, mais quand ça devient un débat politique personnalisé selon les sensibilités de chacun, ça commence à être délicat. J'en veux pour preuve que j'ai deux enfants scolarisés qui entendent régulièrement des professeurs faire des commentaires tels que: «Le MCG ceci, l'UDC cela, EAG ceci...» Or c'est quand même un peu délicat lorsqu'un professeur essaie de faire de l'instruction civique en faisant de la propagande pour un parti ou pour un autre, ou en critiquant tel ou tel parti. En l'occurrence, il faut donc savoir un peu se réserver dans sa position d'instituteur et j'estime que, là, l'instruction civique a besoin d'être cadrée.

Une voix. Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme Claire Martenot pour trente secondes.

Mme Claire Martenot (EAG), députée suppléante. Merci, Monsieur le président. A thème démagogique, intervention caricaturale. Evidemment, quand on parle d'instruction civique, on se déchaîne sur les soi-disant besoins des jeunes et on oublie que l'ECG et le collège ne sont pas du tout si différents au niveau des populations ou au niveau des débouchés. Beaucoup d'élèves du collège passent ensuite à l'ECG, et il n'y a donc pas de raison de traiter différemment...

Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.

Mme Claire Martenot. ...l'éducation citoyenne au collège et à l'ECG.

Le président. Merci, Madame la députée. Je passe la parole à M. Stéphane Florey pour une minute.

M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Vous transmettrez ma réponse à votre collègue M. le député Guy Mettan, l'UDC n'a jamais été pour la suppression de l'éducation citoyenne ! Comme je l'ai dit, et je le répète, les deux enseignants que nous avons auditionnés n'ont pas été en mesure de nous prouver - parce qu'il n'y a pas de preuve, justement - que les cours de citoyenneté disparaissaient de l'enseignement à l'ECG. C'est pour cela que nous sommes en tout cas d'accord avec la solution qui a été trouvée par le département, à savoir que l'éducation citoyenne se fera en même temps que les cours d'histoire-géographie. Cette solution nous convient, et c'est pour cette raison que nous persistons dans notre position, c'est-à-dire le refus de la motion.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Jean Romain, je suis désolé, vous n'avez plus de temps de parole. Je cède donc le micro au rapporteur de minorité Jean-François Girardet pour une minute quarante.

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Il y a un point commun dans ce débat, c'est que tout le monde s'accorde à dire que l'éducation à la citoyenneté est importante, quel que soit le niveau, aussi bien à l'école primaire et au cycle que dans le postobligatoire. C'est pour cette raison que, en accord avec le motionnaire, nous avons déposé cet amendement qui invite à garantir la pérennité de l'enseignement de la citoyenneté dans le plan d'études de l'Ecole de culture générale. Et si ce plan d'études est rediscuté par les enseignants, y compris les enseignants concernés, il permettra un renforcement dans leur idée de maintenir cet enseignement de la citoyenneté dans le plan d'études. Cet amendement tend donc à remplacer le mot «cours» par le mot «enseignement», et c'est un point qui pourrait recueillir l'unanimité de ce parlement.

Deuxièmement, il permet d'intégrer un cours dans les sciences humaines, comme l'a suggéré le PLR, et d'éviter qu'on ait un cours qui soit complètement dissous dans l'enseignement de l'histoire ou de la géographie, de façon qu'il y ait spécifiquement un maintien d'une évaluation certificative pour l'enseignement de la citoyenneté et que cela ne disparaisse pas dans une nébuleuse, comme cela a été rappelé par le député Guy Mettan.

Enfin, c'est une solution constructive qui se fera ensemble, avec les enseignants spécialistes...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Jean-François Girardet. ...la direction de l'ECG et le DIP. Nous vous encourageons donc à voter cet amendement, parce qu'il ne préconise pas un enseignement à bien plaire...

Le président. Merci, Monsieur le député, c'est terminé.

M. Jean-François Girardet. ...mais un enseignement obligatoire, inscrit dans le plan d'études et évalué comme tel.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Jean-Michel Bugnion, rapporteur de majorité, pour deux minutes quarante.

M. Jean-Michel Bugnion (Ve), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Si mon ego politique peut tout à fait se satisfaire de passer d'une position majoritaire à minoritaire, mon éthique d'ancien professionnel de la formation m'oblige à vous rendre attentifs à deux ou trois points.

Je peux comprendre que certains partis ne veulent pas passer pour des fossoyeurs de l'éducation citoyenne, même si je m'échine à montrer qu'elle sera vivifiée par le rapport avec l'histoire d'un côté, et avec la géographie de l'autre. Par ailleurs, je peux saluer l'activisme du lobby des professeurs de l'ECG, qui leur a déjà permis de gagner deux ans de cours. Mais enfin, Mesdames et Messieurs les députés, dans la pesée des intérêts vous ne pensez pas que ceux de la formation et des élèves devraient l'emporter ? S'agissant de la formation, j'ai bien entendu les propos sur les pauvres élèves de l'ECG, mais vous savez de quoi vous parlez ? C'est une formation secondaire II certifiante, qui octroie un diplôme donnant accès aux formations tertiaires HES ! Dans ce cadre-là, Mesdames et Messieurs les députés, vous devez avoir une formation approfondie en histoire et en géographie ! (Remarque.) C'est nécessaire, ne serait-ce que pour continuer avec un niveau satisfaisant dans le domaine du tertiaire.

Le deuxième point concerne les élèves et leur intérêt. Vous savez bien sûr que l'intérêt pour un objet dépend de la signification qu'on lui porte. Or, justement, quelle signification une notion d'éducation citoyenne peut-elle avoir si vous enlevez d'un côté la dimension temporelle, et de l'autre la dimension de l'espace ? Vous savez ce que ça donne ? Ça donne les cours d'instruction civique que ceux de ma génération ont connus, qui étaient totalement rébarbatifs et insipides, parce que précisément ils ne prenaient pas en compte cette double dimension qui fait tout le sens de l'éducation citoyenne.

Enfin, j'aimerais vous citer une étude de la Fondation suisse pour la recherche en sciences sociales datant de 2012...

Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.

M. Jean-Michel Bugnion. ...qui rappelle que les jeunes citoyens privilégient les formes de participation occasionnelles, informelles, individuelles et n'engageant qu'à court terme. Vous pensez vraiment qu'un cours répond à ce type de préoccupations ? Comme d'ailleurs le disaient les jeunes ayant participé à la journée d'éducation citoyenne...

Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.

M. Jean-Michel Bugnion. Oui, je vais conclure, Monsieur le président ! ...ces cours ne leur apportaient pas grand-chose.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la conseillère d'Etat Anne Emery-Torracinta.

Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, en préambule je crois qu'on est au moins tous d'accord sur un point, c'est l'importance de l'éducation citoyenne ainsi que la nécessité que les jeunes et les moins jeunes comprennent et connaissent le fonctionnement de nos institutions et deviennent des citoyennes et des citoyens actifs. Cela s'apprend en partie à l'école, en partie dans des cours, mais aussi de nombreuses autres manières, et je pense d'ailleurs - j'ai eu plusieurs fois l'occasion de vous le dire ici - que c'est souvent bien plus en faisant participer les enfants et les jeunes à ce qui les concerne, en les intéressant au quotidien, en élisant des délégués dans les écoles, etc., qu'on leur donne le goût et l'intérêt pour la chose publique.

Mais ce n'est pas de cela que je voudrais parler maintenant. J'ai entendu aujourd'hui beaucoup de propos qui démontrent une méconnaissance totale de l'ECG et du système scolaire, mais aussi des prérogatives de la Confédération, des cantons et du parlement. Jusqu'à preuve du contraire, une formation scolaire dépend d'un plan d'études cadre qui est fédéral. Le plan d'études cadre de l'ECG parle effectivement d'éducation civique, mais il la met dans une espèce de nébuleuse, qui s'appelle d'ailleurs «Connaissances civiques, économiques et juridiques». Il n'est pas précisé dans quel cours cela doit se faire, mais il est indiqué qu'il faut par exemple maîtriser les notions et le vocabulaire de base de la vie politique, qu'il faut arriver à comprendre le mode de fonctionnement de l'Etat de droit, etc. Et cela fait partie d'un plan d'études cadre qui ne date pas, Monsieur Mettan, de décennies et de décennies, mais de 2004. Ce plan est actuellement en révision et on devrait parvenir à un nouveau plan d'études cadre - il entrera en vigueur en 2017 ou 2018 - qui va bien évidemment sans doute garder la notion d'éducation citoyenne, mais peut-être formulée autrement.

Voilà le cadre fédéral, que les cantons doivent appliquer. Il leur faut traduire l'intention fédérale, mais ils disposent d'une marge de manoeuvre d'interprétation pour savoir comment traduire cette intention fédérale. A l'ECG, il avait été décidé jusqu'à présent que les élèves de deuxième année auraient une heure d'histoire, une heure de géographie et un cours qui n'est pas un cours d'éducation civique, Monsieur Mettan, mais une espèce de nébuleuse, pour reprendre vos termes, cours qui s'intitule «Economie et civisme». Donc aujourd'hui déjà à l'ECG l'éducation citoyenne n'est pas enseignée pour elle-même; elle fait partie d'un autre cours.

Il y a un an ou deux, après un certain nombre de discussions, on s'est rendu compte que c'était probablement une très mauvaise idée de n'offrir qu'une heure d'histoire, et je rebondis sur les propos de l'UDC - ou du MCG, je ne sais plus - que je partage parfaitement quant à l'importance de l'histoire et de l'histoire suisse. Vous savez que j'ai enseigné cette discipline pendant trente-cinq ans... On sait aujourd'hui - et tous les enseignants et les enseignantes présents dans cette salle ou celles et ceux qui en connaissent le sauront - que le fait de donner à des élèves un cours d'une heure par semaine n'a aucun sens. L'idée est donc venue à ce moment-là au sein des directions de l'ECG - et des discussions ont été menées avec les enseignants - qu'au lieu d'avoir deux heures d'économie et civisme, cours qui était déjà une espèce de nébuleuse, un mélange, ainsi qu'une heure d'histoire et une heure de géographie, eh bien on allait mettre deux heures d'histoire et deux heures de géographie, sachant qu'on intégrerait à l'histoire et à la géographie les notions déjà enseignées actuellement dans ce cours d'économie et civisme. C'est cela qui a provoqué la réaction des quelques enseignants en question - et non pas de tous, d'ailleurs - qui voyaient disparaître leur façon d'enseigner.

Alors ce que je voudrais vous dire, c'est que quoi qu'il arrive, quel que soit le sort de cette motion, le département appliquera de toute façon les plans d'études cadres fédéraux, et nous verrons aussi ce que prévoit le prochain plan d'études cadre. En ce qui me concerne, je n'ai pas l'intention de continuer avec des cours d'histoire et de géographie d'une heure, car je trouve que c'est une erreur, mais il est bien évident que je respecterai le plan d'études cadre fédéral et que les heures de civisme seront données. Il est possible, vu que du temps s'est écoulé depuis le dépôt de cette motion, qu'on attende maintenant le nouveau plan d'études cadre fédéral pour modifier éventuellement quelque chose - je ne suis pas sûre qu'on le fasse dans l'intervalle - mais je ne veux plus de cours à une heure, car ça n'a aucun sens. Je trouve que l'enseignement de l'éducation citoyenne est essentiel, mais il peut se faire, comme au cycle, dans le cadre du cours d'histoire, par exemple, ou de géographie.

Par conséquent, si cette motion reste en l'état, je vous invite à la refuser. Et si par hypothèse vous votez l'amendement du MCG, eh bien vous nous direz ce que l'on fait déjà, c'est-à-dire que l'enseignement doit être garanti, peu importe dans quel cours il est donné. Je vous remercie de votre attention.

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. La parole n'étant plus demandée, nous allons voter tout d'abord sur l'amendement qui vous a été distribué et qui remplace l'invite au Conseil d'Etat de la motion par le texte suivant: «à garantir la pérennité de l'enseignement de la citoyenneté dans le plan d'études de l'Ecole de culture générale». (Commentaires.) Messieurs les rapporteurs, vous n'avez plus de temps de parole, mais je vous laisse vous exprimer brièvement sur l'amendement. Monsieur le rapporteur de minorité, c'est à vous.

M. Jean-François Girardet (MCG), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Tout d'abord, contrairement à ce qui vient d'être dit, ce n'est pas un amendement du MCG, mais un amendement des motionnaires et du rapporteur de minorité. Bien sûr qu'ils seront approuvés par leurs partis respectifs, mais ce n'est pas une affaire politique, on l'a vu, c'est surtout une question de spécification dans cette motion de la pérennité de ces cours de citoyenneté dans le plan d'études de l'Ecole de culture générale, comme cela vient d'être rappelé par Mme la présidente du département.

M. Jean-Michel Bugnion (Ve), rapporteur de majorité. J'aimerais simplement rappeler que nous n'avons pas qualité pour intervenir sur un plan d'études fédéral. C'est tout !

Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Je vais donc mettre aux voix l'amendement tel qu'il a été présenté, distribué et lu.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 52 non contre 29 oui et 10 abstentions.

Le président. Nous nous prononçons à présent sur la proposition de motion elle-même.

Mise aux voix, la proposition de motion 2130 est rejetée par 46 non contre 45 oui et 2 abstentions. (Commentaires pendant la procédure de vote. Exclamations à l'annonce du résultat.)