Séance du
jeudi 4 février 2016 à
17h
1re
législature -
2e
année -
13e
session -
89e
séance
M 2258
Débat
Le président. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à l'auteur de cette proposition de motion.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC vous propose cette motion qui a mis un certain temps à arriver, à cause de deux problèmes principaux qui existent dans le service de dermatologie. Le premier étant les personnes en formation FMH qui ne reçoivent pas à l'heure actuelle de rémunération conforme à leur travail. Ce sont des médecins déjà formés qui se spécialisent pour devenir dermatologues et qui, actuellement, ne reçoivent pas un traitement acceptable. Deuxièmement, il a été porté à notre connaissance le fait - comme je vous l'avais expliqué lors de la première présentation - que la possibilité de remettre le titre FMH par le secteur de dermatologie a été, à l'époque où la motion a été produite, remise en cause par la FMH elle-même à cause du déficit au niveau du service et de la formation.
L'UDC concède volontiers que certaines invites sont peut-être trop dures, en particulier celle sur le mode de nomination des professeurs, qui mérite probablement d'être atténuée ou en tout cas étudiée, et c'est pour cela que l'UDC vous demande un renvoi à la commission de la santé. Nous souhaitons surtout que nous puissions avancer sur la situation de ce personnel, et cette motion fera un excellent support pour cela.
Mme Sarah Klopmann (Ve). Après plusieurs motions de l'UDC sur la gestion interne des HUG, voilà encore une motion, cette fois sur le service de dermatologie. Donner des axes en matière de politique de la santé ou demander qu'il y ait une bonne gestion dans les institutions de la santé nous semble important. Assurer la qualité des soins, encore plus essentiel... Mais là, il ne s'agit pas de cela. Il s'agit juste de vouloir se mêler de la nomination et des affaires de personnel dans les différents postes au sein d'une grande régie publique autonome, et pour nous, les Verts, c'est clairement de l'ingérence. Nous ne souhaitons pas entrer dans ce jeu-là. Alors oui, les autres demandes - «appliquer toutes les mesures nécessaires au rétablissement d'un fonctionnement adéquat du service» et «s'assurer que la classification universitaire du service de dermatologie ne puisse être remise en cause» - peuvent être valables. Je souligne quand même le paradoxe de cette motion qui se plaint de la mauvaise gestion du service mais demande en même temps que l'on ne nomme des personnes que d'après leurs compétences cliniques et pas de gestion. Donc ce n'est pas ainsi que l'on va améliorer la gestion !
Tant que vous nous proposerez des motions qui nous demandent d'intervenir dans le choix de nomination du personnel, qui plus est en sous-entendant que les non-Suisses ne pourraient pas faire l'affaire, nous voterons non à vos textes.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le groupe démocrate-chrétien votera contre cette proposition de motion, simplement parce que c'est à l'Hôpital cantonal de s'occuper de ses propres affaires. Nous avons eu un débat cet après-midi sur la représentation dans les conseils d'administration. Donc, s'il y a des problèmes, les députés peuvent actionner leurs représentants au conseil d'administration de l'Hôpital. Il est vrai qu'il y a eu de gros problèmes au service de dermatologie pendant plus de trois ans, mais c'est à l'Hôpital de réagir. Cela est juste - et je remercie M. Bläsi d'avoir attiré l'attention sur ces problèmes - mais nous avons les moyens d'intervenir. Et si nous commençons à intervenir dans les nominations des professeurs à l'Hôpital cantonal et à l'Université, ce sera vraiment n'importe quoi ! Je vous remercie.
M. Jean-Charles Rielle (S). Nous avons deux propositions de motions, une que l'on traitera ce soir et l'autre un peu plus tard, une qui concerne la dermatologie et l'autre l'orthopédie. Elles datent bientôt d'une année. Celle sur la dermatologie est soumise maintenant à notre plénière. Ces deux motions méritent la même réponse: le politique ne peut se mêler d'intervenir directement dans les processus de nomination des professeurs ou chefs de service des HUG. Il y a pour cela des commissions spécialisées intégrant de nombreux critères tels que bibliographies, CV, etc. Elles ont pour mission de choisir les meilleurs candidats. Dire qu'il faut être genevois de souche pour pouvoir occuper ce genre de postes c'est s'opposer à la mondialisation du savoir et des compétences, et, dans ce sens-là, il faut pouvoir s'entourer de personnes compétentes, qu'elles soient de Genève ou d'ailleurs.
Ce qui nous occupe ce soir c'est le service de dermatologie. Certes, il y a un an, il pouvait être légitime de se préoccuper de la suite après le départ du chef de service, Jean-Hilaire Saurat, chez qui j'avais travaillé deux ans, et je peux mesurer l'importance de ce service. Il fallait effectivement que la dermatologie puisse poursuivre sa mission et, je le dirais en caricaturant, c'est un passage de la pommade empirique au laser, et dans ce sens-là, c'est un moment assez clé pour ce genre de spécialité.
Depuis un an, les inquiétudes semblent retombées. Une normalisation se fait dans ce service. On ne saurait donc venir interférer actuellement et nous devons faire confiance à la direction des HUG qui doit être le vrai responsable de la qualité des prestations que l'hôpital fournit à la population et notamment dans toutes ses spécialités qui font la force de Genève. Vous l'aurez compris, les socialistes vous demandent de refuser cette proposition de motion qui n'a plus de raison d'être.
Mme Danièle Magnin (MCG). Moi je pense le contraire de mes deux préopinants pour la raison suivante. Nous avons assisté à Genève à ce que je peux sans difficulté appeler des scandales dans la manière dont se sont comportés des chefs de service, que l'on a bel et bien remerciés mais que l'on a remerciés en leur versant des montants d'indemnités incroyables pour qu'ils nous débarrassent le plancher et qu'ils cessent de démolir le travail de leurs prédécesseurs dans les départements concernés. Je vais me garder de vous donner des noms, mais ils seront prononcés à la commission de la santé pour peu que vous vouliez bien y renvoyer cette motion.
Je voudrais ajouter ceci. Nous avons assisté à la nomination d'une professeure médecin d'origine allemande qui est venue avec un nombre de millions apportés de l'Union européenne, millions que nous n'avons finalement pas eus. Pendant ce temps, cette dame a causé de graves difficultés, elle a fait perdre son oeil à une personne qui, je crois, n'en avait déjà plus qu'un. Depuis, elle a certes fait des progrès en chirurgie. Mais les millions promis ne seront pas là, et elle exerce l'essentiel de son activité dans des choses qui peuvent être faites en ville, à savoir des injections de produit contre la dégénérescence maculaire, et cela alors que ces produits sont imposés, notamment par santésuisse. On nous impose d'utiliser un produit Novartis - je l'ai déjà dit plusieurs fois - qui coûte un millier de francs par injection alors qu'un autre produit coûte 8 F. Tout cela, ce n'est pas seulement de l'organisation. C'est quelque chose qui nous concerne tous, nous les députés, parce qu'il y a un contrôle à faire. Et ce contrôle, visiblement, entre l'ancien directeur médical, le recteur de l'Université qui n'a peut-être pas toutes les informations, les bidouillages de toutes sortes, eh bien nous assistons à la destruction de nos services voire même de certains départements, et cela justifie parfaitement que l'on traite cette motion.
M. Pierre Conne (PLR). Au vu du tsunami qu'on nous annonce, je ne sais pas si je vais rester longtemps à Genève... Soyons sérieux ! Des institutions hospitalières aussi importantes et aussi complexes que l'hôpital général universitaire ne peuvent pas ne pas connaître de difficultés. Ces difficultés sont inhérentes à la nature de l'activité, à la diversité des activités, à la diversité des métiers, et il est effectivement dans les règles de bonne gestion et de bon contrôle de la qualité des soins, notamment des HUG puisque ce sont les HUG dont on parle, de s'assurer que les incidents, et leurs origines, soient identifiés et corrigés de manière qu'ils ne se reproduisent pas, et tout cela se fait sous la responsabilité des directeurs de service, de la direction générale, de la direction professionnelle...
Ce n'est pas notre rôle d'assurer le contrôle des activités médicales des hôpitaux universitaires de Genève. Il y a pour cela - et je me permets, Monsieur le président, de m'adresser à ma préopinante - une commission de surveillance des professionnels de la santé et des droits des patients, à laquelle il pourrait éventuellement être bon de s'adresser si un événement comme cela s'était produit.
Pour revenir à la motion, finalement mon introduction me donne aussi la conclusion. Les considérants et les invites de cette motion montrent bien qu'il s'agit d'un problème interne aux HUG, en l'occurrence d'un problème interne au service de dermatologie, qui est survenu par le fait que la période de l'intérim entre le précédent médecin chef de service, qui a pris sa retraite en 2009, et l'actuel qui a été engagé en 2012, a peut-être été un peu longue. Durant cette période, il y a eu un peu de flottement, et effectivement la qualification pour la formation FMH n'a pas été reconnue, chose qui est corrigée maintenant avec le nouveau chef de service entré en fonction en 2012. Aujourd'hui nous pouvons dire, sans nier qu'il y a eu des problèmes, qu'ils sont corrigés, que les HUG ont fait leur travail de correction de ces erreurs et qu'il n'est pas de notre ressort de s'occuper de ces dossiers. Pour toutes ces raisons, le PLR vous propose simplement de refuser ce projet de motion.
Le président. Merci. Je passe la parole à M. Daniel Sormanni pour vingt-quatre secondes.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Mme Magnin a parlé à titre personnel. Le groupe MCG refusera cette motion. Effectivement je crois que c'est aux hôpitaux de régler leurs problèmes internes, et je rejoins tout à fait les propos de mon préopinant, M. Conne. D'ailleurs les problèmes ont été résolus depuis, puisque cette motion date d'environ un an. Je crois que nous n'avons pas à nous mêler de la gestion directe. Ce n'est pas notre rôle ici. C'est la raison pour laquelle nous refuserons cette motion.
M. Jean-Luc Forni (PDC). Le conseiller d'Etat disait tout à l'heure qu'il y avait beaucoup de contre-vérités et de manipulations dans ce parlement. Nous avons entendu beaucoup de contre-vérités sur la pharmacie de l'Hôpital cantonal; pour cette motion, nous entendons des contre-vérités sur l'utilisation abusive de certains médicaments. Alors, si je n'ai pas autant d'indulgence pour le premier auteur de la motion sur l'hôpital, parce qu'il savait exactement qu'il disait des contre-vérités, j'en aurais peut-être un peu plus pour la députée d'Ensemble à Gauche... (Exclamations.)
Une voix. Du MCG !
M. Jean-Luc Forni. ...qui nous dit que dans certains cabinets médicaux, on utilise certaines substances que l'on ne devrait pas utiliser, notamment pour les injections des yeux. Je pense qu'il faut savoir qu'il existe des substances originales, des substances génériques et des biosimilaires, et ces trois substances, même si elles n'ont pas la même appellation, ont une efficacité semblable, et ce type de pratiques est utilisé dans les Hôpitaux universitaires de Genève, dans les cabinets privés, ici aussi à Genève, et dans les hôpitaux privés genevois. Voilà, c'est tout ce que je voulais dire. Je vous remercie.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Madame Magnin, vous n'avez plus de temps de parole. (Commentaires.) Non, pas du tout ! (Exclamations. Mme Danièle Magnin s'exprime hors micro.) Monsieur Bläsi, vous avez la parole.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Combien de temps me reste-t-il, s'il vous plaît ?
Le président. Trois minutes.
M. Thomas Bläsi. Je vous remercie. Je souhaite préciser un certain nombre de choses, parce qu'il y a visiblement des gens qui ne touchent pas le puck ce soir ou alors qui sont très énervés. Concernant les déclarations, à titre personnel, de la députée, elle nous parlait du service d'ophtalmologie où la nouvelle doctoresse est arrivée avec un panier garni de Novartis qui a entraîné un changement du produit injectable qui n'était plus le produit utilisé avant à 8 F mais le nouveau à 1000 F. Dans le même temps, nous avons perdu dans le service d'ophtalmologie dix-huit spécialités. Nous avons aussi perdu un nombre conséquent de spécialistes qui ont démissionné.
Concernant la dermatologie, je vais vous expliquer pourquoi j'ai déposé cette proposition de motion. Cela sera plus simple. La femme d'un patient x est venue me voir pour me parler du diagnostic porté sur son mari par le chef de service, sans tenir compte de l'avis de ses adjoints, qui lui demandaient d'avoir un avis angiologique. Finalement, ce cas a abouti à une amputation. La personne a dû être montée dans les étages. Elle s'est agitée dans son lit et s'est rompu le col du fémur. Comme elle était dans les étages privés, elle n'a pas été opérée pendant dix jours. J'ai évité ce genre de sujet, et je l'ai évité seulement parce que je pense que la réputation des HUG est importante. Vous pouvez vérifier, Monsieur Poggia, il n'y a aucun souci par rapport à ce que je viens de vous dire.
Quant à M. Forni et les contre-vérités, vous devriez savoir de quoi l'on parle avant de prendre la parole, parce que le service d'ophtalmologie n'a rien à voir, en l'occurrence, avec des histoires de génériques que je connais assez bien aussi. Merci, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole au conseiller d'Etat Mauro Poggia.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Il y a effectivement eu des difficultés de management et de communication, qui ont été identifiées par des enquêtes internes, mais ces enquêtes n'ont pas relevé de dysfonctionnements dans la pratique médicale et la prise en charge des patients. Il y a effectivement eu des difficultés, comme je l'ai dit. Mais ces difficultés n'ont pas menacé la formation des futurs spécialistes. Un à deux chefs de clinique obtiennent d'ailleurs leur FMH par année, et, depuis, des mesures d'accompagnement ont été mises en place. Il s'agissait évidemment d'un professeur qui venait de l'étranger avec une culture différente, et les HUG sont désormais plus attentifs pour l'encadrement et l'accompagnement de médecins qui n'ont peut-être pas été formés selon notre culture. Je voudrais simplement dire au premier motionnaire, d'une manière générale, que si chaque fois qu'un événement se produit, une motion est déposée, évidemment nous ne rattraperons pas notre retard comme l'ont fait les Vaudois ! Si vous avez des préoccupations légitimes, et je les respecte, déposez une question urgente. Interpellez-moi directement plutôt que de mettre tout cela sur la place publique. Je pense que ce n'est dans l'intérêt de personne, et certainement pas dans l'intérêt des HUG qui, comme tous les grands établissements hospitaliers, rencontrent évidemment des problèmes sur leur parcours. Merci !
Le président. Je vous remercie, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vais tout d'abord faire voter sur le renvoi de cette proposition de motion à la commission de la santé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2258 à la commission de la santé est rejeté par 70 non contre 15 oui et 1 abstention.
Mise aux voix, la proposition de motion 2258 est rejetée par 70 non contre 10 oui et 6 abstentions.