Séance du
vendredi 29 janvier 2016 à
17h
1re
législature -
2e
année -
13e
session -
84e
séance
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Antoine Barde, président.
Assistent à la séance: Mme et MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Anne Emery-Torracinta, Mauro Poggia et Luc Barthassat, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Pierre Maudet, Serge Dal Busco et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. Sandra Golay, Lionel Halpérin, Serge Hiltpold, Béatrice Hirsch, Vincent Maitre, Cyril Mizrahi, Simone de Montmollin et Pierre Ronget, députés.
Députés suppléants présents: Mmes et MM. Delphine Bachmann, Christian Decorvet, Jean-Charles Lathion, Patrick Malek-Asghar, Nathalie Schneuwly, Charles Selleger, Alexandre de Senarclens et Marion Sobanek.
Communications de la présidence
Le président. Nous souhaitons un prompt rétablissement à notre collègue Béatrice Hirsch, cheffe du groupe PDC, qui a été victime d'un petit accident. Par ailleurs, vous pouvez vous inscrire à MonDossierMedical.ch à la salle des Pas-Perdus. (Un instant s'écoule.) Monsieur Stauffer, vous avez la parole. Je m'excuse d'avoir été aussi rapide !
Discussion et approbation de l'ordre du jour
M. Eric Stauffer (MCG). Ce n'est pas grave, Monsieur le président ! Le groupe MCG demande l'ajout à l'ordre du jour du rapport sur le projet de loi 11622 relatif aux cliniques de Joli-Mont et de Montana. Nous demandons l'ajout, uniquement l'ajout.
Le président. Monsieur Stauffer, vous avez déjà fait vos deux demandes.
M. Eric Stauffer. C'est une modification de l'ordre du jour...
Le président. Oui, vous avez déjà utilisé vos deux demandes. Voilà. Je suis navré.
M. Eric Stauffer. Monsieur le président, excusez-moi... (Remarque.) ...selon l'art. 72, un député peut en tout temps demander la modification de l'ordre du jour... (Remarque.) Oui, mais ce n'est pas dans...
Le président. Limité à deux ! (Commentaires.)
M. Eric Stauffer. Alors, en tout temps...
Mme Nathalie Fontanet. Eric ! Je la reprends !
M. Eric Stauffer. Merci ! (Remarque.)
Mme Nathalie Fontanet. Eh oui ! (Rires.)
Le président. Madame Fontanet, vous avez la parole.
Mme Nathalie Fontanet (PLR). Merci, Monsieur le président. Monsieur le président, je reprends cette demande d'ajout.
Le président. Très bien. Mesdames et Messieurs les députés, je vais donc vous faire voter sur l'ajout du point que vous avez mentionné, dont vous voudrez bien me rappeler le numéro.
Mme Nathalie Fontanet. Justement, il n'y a pas de numéro puisque c'est un ajout !
M. Eric Stauffer. 11622 !
Mme Nathalie Fontanet. Ah, 11622, oui !
Le président. 11622, très bien. Je vous fais donc voter sur l'ajout à l'ordre du jour du PL 11622-A.
Mis aux voix, l'ajout à l'ordre du jour du rapport PL 11622-A est adopté par 48 oui contre 12 non et 1 abstention.
Annonces et dépôts
Néant.
Questions écrites urgentes
Le président. Vous avez trouvé sur vos places les questions écrites urgentes suivantes:
Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Les directeurs de l'enseignement secondaire ont-ils le droit d'enseigner ? (QUE-418)
Question écrite urgente de M. Olivier Baud : Les directeurs de l'enseignement primaire ont-ils les compétences et titres pour enseigner ? (QUE-419)
Question écrite urgente de M. Patrick Lussi : Migrants violeurs : quelle est la politique de communication de la police genevoise ? (QUE-420)
Question écrite urgente de M. François Baertschi : Caisse de pension de la police et de la prison : comment le Conseil d'Etat peut-il prendre des décisions contraires à la loi actuelle ? (QUE-421)
Question écrite urgente de M. Jean Romain : Les places de stationnement supprimées à la rue du Commerce seront-elles compensées ? (QUE-422)
Question écrite urgente de M. Jean-Charles Rielle : Manifestation kurde à l'aéroport, le 5 janvier 2016 : qui a décidé l'intervention policière « musclée » ? (QUE-423)
Question écrite urgente de M. François Lefort : Le Conseil d'Etat pense-t-il un jour créer enfin la Maison de l'environnement ? (QUE-424)
Question écrite urgente de Mme Nathalie Fontanet : Hospitalisation sociale de mineurs en raison du manque de places en foyer : quelles mesures prévues par le Conseil d'Etat ? (QUE-425)
Question écrite urgente de Mme Isabelle Brunier : Pourquoi le président du Conseil d'Etat estime-t-il devoir se mêler de défendre un sujet mis en votation et purement municipal de la Ville de Genève ? (QUE-426)
Question écrite urgente de Mme Jocelyne Haller : Genève : quelles mesures pour empêcher le commerce du pétrole de Daech ? (QUE-427)
Question écrite urgente de M. Alberto Velasco : Qu'en est-il de la répartition des mandats de curateurs et des sommes facturées à l'Etat et aux pupilles ? (QUE-428)
Question écrite urgente de M. Roger Deneys : Déclassement des Cherpines-Charrotons : qui sont les propriétaires actuels ? (suite... mais sans doute pas fin) (QUE-429)
QUE 418 QUE 419 QUE 420 QUE 421 QUE 422 QUE 423 QUE 424 QUE 425 QUE 426 QUE 427 QUE 428 QUE 429
Le président. Ces questions écrites urgentes sont renvoyées au Conseil d'Etat.
Questions écrites
Le président. Vous avez également trouvé sur vos places la question écrite suivante:
Question écrite de Mme Bénédicte Montant : Comment est calculé le renchérissement pour les investissements et que couvre-t-il ? (Q-3766)
Le président. Cette question écrite est renvoyée au Conseil d'Etat.
Annonce: Séance du vendredi 18 décembre 2015 à 17h20
Cette question écrite urgente est close.
Annonce: Séance du vendredi 18 décembre 2015 à 17h20
Cette question écrite urgente est close.
Annonce: Séance du vendredi 18 décembre 2015 à 17h20
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Annonce: Séance du vendredi 18 décembre 2015 à 17h20
Cette question écrite urgente est close.
Premier débat
Le président. Nous commençons avec notre première urgence, le rapport sur le projet de loi 11584, classé en catégorie II, cinquante minutes. Je cède le micro à M. le rapporteur de majorité Frédéric Hohl. (Brouhaha. Un instant s'écoule. Remarque.)
M. Frédéric Hohl (PLR), rapporteur de majorité. Oui, oui, je vais y aller ! J'attends un petit peu de silence. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues... (Brouhaha. Un instant s'écoule.) C'est comme au théâtre, on attend le silence avant le début de la pièce ! (Remarque.) Comment ? (Remarque.) Les trois coups ? Non, non ! Très bien ! Mesdames et Messieurs, depuis... (Un instant s'écoule.) Mesdames et Messieurs, depuis à peu près vingt-cinq ans, de nombreux acteurs du monde culturel de la ville de Genève travaillent sur le projet dont nous parlons aujourd'hui. En 1987 est paru le rapport Langhoff qui était très intéressant et qui portait sur la Comédie ainsi que sur la possibilité d'ouvrir une Nouvelle Comédie un jour. En 2009, Anne Bisang alors directrice de la Comédie, a convoqué et animé un groupe de travail avec ces acteurs de la ville de Genève et le monde culturel genevois au sens large. Suite à ces séances qui se sont étendues sur quelques années, un rapport a été rendu à la Ville de Genève, puis celle-ci a organisé un concours. Certes les exécutifs de la Ville de Genève et de l'Etat se sont toujours parlé durant ces années, notamment à travers leurs relations dans la Fondation d'art dramatique concernant la question de la répartition des tâches dont nous parlons aujourd'hui, le désenchevêtrement, ce fameux mot magique difficile à prononcer. Tout tourne autour de cela, Mesdames et Messieurs ! Avec la petite introduction que j'ai faite, on voit bien que nous parlons aujourd'hui d'un projet municipal. Eh oui, Mesdames et Messieurs, la Nouvelle Comédie est bien un projet municipal ! C'est là que le bât blesse, parce que là, nous sommes au Grand Conseil ! Qui sommes-nous pour juger d'un projet qui ne nous appartient pas ? C'est un grand problème. Je comprends toutes les personnes qui, durant ces semaines, voire ces mois, se sont offusquées de notre manière peut-être intrusive de poser des questions: nous avons été complètement hors-jeu durant toutes ces années !
L'histoire a commencé, Mesdames et Messieurs, le 9 juin 2015. Il n'y a donc pas si longtemps. Pour la première fois, à la commission des travaux, deux conseillers d'Etat, Antonio Hodgers et Mme Emery-Torracinta, accompagnés de la directrice du service cantonal de la culture, nous ont présenté le projet de la Nouvelle Comédie et... (Remarque.) Non, il n'y a personne ! Mais tu peux rester à côté, tu as le droit ! (L'orateur s'adresse à un député assis à côté de lui à la table des rapporteurs.) Nous avons eu cette magnifique présentation d'un projet extraordinaire, d'un beau projet municipal. A l'issue de cette présentation, honnêtement, je pense que tout le monde imaginait que ce serait réglé en une séance: nous avons en effet clairement senti, Mesdames et Messieurs les députés de la commission des travaux, que tout avait été fait, organisé, pensé, et que rien ne pouvait changer, rien ne pouvait être modifié. Parce que, Mesdames et Messieurs, vous le savez bien, le chantier du CEVA va commencer et ce serait inadmissible, impensable d'ouvrir cette gare principale du CEVA avec un trou, sans Nouvelle Comédie ou, pire encore, avec, je ne sais pas, un café américain ! (Rire.) Donc, Mesdames et Messieurs de la commission des travaux, somme toute, vous n'avez que deux choses à faire maintenant: payer la subvention de 45 millions de francs qu'on vous demande et participer aux frais de fonctionnement de 15,7 millions par année. Point. (Commentaires.) Alors forcément, la majorité de la commission estime que, d'une part, les députés ne sont pas une chambre d'enregistrement; nous n'aimons pas avoir des projets qui arrivent comme ça, que nous devons voter à la dernière seconde. Personne n'aime ça, dans aucun parti ! D'autre part, la majorité de la commission a trouvé qu'on aurait peut-être pu nous demander notre avis. On aurait peut-être pu nous faire participer à ce travail mais, une fois de plus, ce travail pour la réalisation de cet ouvrage est bien un travail municipal. La majorité de la commission, dont je fais partie, a été impressionnée par ce projet. Oui, c'est un beau projet, c'est un magnifique projet: une salle de 250 places, une autre salle de 500 places, une véritable proximité entre l'artiste et le public, de nombreuses salles de répétition, des ateliers, un grand restaurant. Il n'y a rien à dire: c'est un beau projet municipal !
Là où l'ambiance a véritablement dégénéré, c'est quand une majorité de la commission a eu l'outrecuidance de commencer à poser des questions. Alors là, forcément, l'ambiance était moins bonne ! Tant à gauche qu'au sein des milieux culturels, ça a commencé à bouillir sous la marmite ! En gros, on nous répétait à longueur d'interventions dans les médias ou ailleurs que nous n'avions rien à dire, qu'il était trop tard, que le projet avait été tenu par de vrais professionnels, ce qui est vrai, je ne reviens pas dessus...
Présidence de M. Jean-Marc Guinchard, premier vice-président
Le président. Excusez-moi, Monsieur le député. Je vous informe que vous entamez le temps du groupe.
M. Frédéric Hohl. Comment ?
Le président. Vous entamez le temps du groupe.
M. Frédéric Hohl. Ce n'est pas très grave, je vais aller un peu plus vite ! Vous me dites quand même quand il leur reste deux minutes. Nous avons donc commencé à poser des questions, notamment sur les montants. La majorité de la commission a trouvé qu'avec 100 millions de francs pour un théâtre - parce qu'on parle de 100 millions pour cette construction ! - il y a un réglage qui ne correspond plus. La majorité de la commission trouvait que 100 millions pour un théâtre, c'était quand même... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Des voix. Chut !
M. Frédéric Hohl. Arrêtez le compteur, hein ! ...la majorité de la commission a trouvé que 100 millions pour un théâtre et 15,7 millions pour des frais de fonctionnement, c'était beaucoup. Je vous rappelle que notre dette s'élève à plus de 13 milliards. Nous avons été mis en place par la population genevoise aussi pour regarder cela et nous étions tout à fait en droit de nous poser des questions. Est-il juste de donner 45 millions pour ce projet alors que la Ville aujourd'hui est encore assez riche pour le faire ? Nous avons commencé à regarder ailleurs pour avoir quelques «benchmarks». Nous avons regardé par exemple le Théâtre de Carouge: une salle de 250 personnes, une salle de 500, des lieux de répétition, un restaurant. Exactement la même chose. Qu'a fait l'Etat ? Il a donné 10 millions au Théâtre de Carouge et là on s'apprête à en donner 45. Cela ne me pose aucun problème, mais je trouvais que ce n'était peut-être pas juste. (Brouhaha.) Ensuite on a beaucoup parlé de la jauge. La jauge dans ce projet municipal est parfaite... (Brouhaha. Un instant s'écoule.)
Une voix. Monsieur le président, pour être honnête, on n'entend pas ! On n'entend pas !
Le président. Mesdames et Messieurs, s'il vous plaît ! (Remarque.) Ceux qui ont des conciliabules à tenir sont priés de le faire à la salle des Pas-Perdus ou...
M. Frédéric Hohl. Combien il me reste, Monsieur le président ?
Le président. ...ou dans un autre endroit.
M. Frédéric Hohl. Combien il reste de temps ? Combien ?
Le président. Trois minutes trente.
M. Frédéric Hohl. Alors je reviendrai et je vais laisser du temps à mon groupe, mais j'ai forcément encore pas mal de choses à dire.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, nombre d'interrogations de la majorité ont trouvé réponse depuis le dépôt de mon rapport de minorité en novembre dernier sur ce projet qui répond à la déclaration conjointe du Conseil d'Etat et du Conseil administratif de la Ville de Genève sur la culture. Ce jour, j'aimerais simplement vous inviter à l'enthousiasme. En votant un crédit au titre de subvention cantonale d'investissement qui permettra enfin la réalisation de la Nouvelle Comédie, le canton de Genève peut concrétiser une formidable aventure initiée en réponse au défi lancé par Matthias Langhoff il y a presque trente ans. Ce projet témoigne que projet d'architecture de qualité et projet culturel ambitieux vont de pair. Affichons ensemble notre fierté de voir la culture des arts vivants rayonner à l'échelle locale, régionale et internationale dans ce lieu magique en devenir qu'est le secteur de la gare des Eaux-Vives qui symbolise, avec le CEVA, la rencontre des cultures. Oui, la Comédie actuelle est vétuste et ne permet pas d'accueillir de nombreuses créations. On peut citer par exemple celle de Warlikowski qui reviendra ce printemps au BFM.
La Nouvelle Comédie est la concrétisation d'un travail constant des professionnels du théâtre réunis dans l'Association pour la Nouvelle Comédie qui a permis la rédaction d'un cahier des charges architectural pour un concours d'architecture qui a abouti au projet actuel au bénéfice, je le rappelle, d'une autorisation de construire. Donnons ensemble l'opportunité de fonder une véritable politique de production et de coproduction qui tient compte de la capacité possible en termes de public et d'ouverture sur la durée des représentations et non sur un évènement ponctuel. Garantissons cette vraie fabrique pour les arts vivants et la promotion des artistes locaux émergents. Rendons également hommage à Martine Brunschwig Graf qui, la première, a compris la nécessité d'un nouveau théâtre au vu des projets de rénovation, nombreux mais peu convaincants. Je dois cette information à Anne Bisang, ancienne directrice de la Comédie. Suivons le chemin tracé par les directeurs et directrices successifs, Benno Besson, Claude Stratz, Anne Bisang et aujourd'hui Hervé Loichemol, qui ont maintenu le souffle de cette envie de faire de Genève une capitale certes petite mais ouverte sur le monde, en portant le flambeau de la culture. Leur rendre hommage à eux, à elles, aux professionnels de l'Association pour la Nouvelle Comédie, c'est relever ensemble ce défi culturel à l'heure où le principe de la culture comme ciment social et terreau de l'égalité... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...doit être réaffirmé plus que jamais avec force et conviction. Offrons à chacun et à chacune un lieu où partager avec l'autre émotions, passions, désirs, questionnements et faire l'expérience de l'altérité et des possibles. Oui, Mesdames et Messieurs les députés, votons ce projet de loi !
M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de deuxième minorité. Beaucoup de points ont déjà été soulevés, et j'aimerais répondre à quelques arguments avancés par M. Hohl, notamment pour le rassurer sur le fait que la commission n'a pas du tout été mise devant un fait accompli, ni n'a été sommée de se prononcer sans avoir pu voir le projet, puisque cela fait exactement, comme cela a été rappelé, trente-cinq ans qu'on parle de ce projet. Quand je suis arrivé à Genève dans les années 70, on n'en parlait pas encore, mais dès le début des années 80, avec Matthias Langhoff et Benno Besson, on agitait déjà l'idée d'une Nouvelle Comédie. Cela fait exactement trente-cinq ans aujourd'hui que ce projet est en cours. Il ne s'agit donc pas de quelque chose qui nous tombe dessus et que les commissaires n'auraient pas eu l'occasion d'entendre.
En outre, non seulement ce projet nous était connu, mais il a aussi été débattu dans la presse; il a été pensé, repensé, cuit et recuit à la fois dans les débats publics et dans les débats politiques depuis de très longues années, depuis maintenant presque une dizaine d'années. Pourquoi ? Parce qu'il correspond premièrement à un projet théâtral. On a vu que ce projet théâtral était effectif et qu'il répondait à un besoin, à savoir le besoin de création. Le but de la Comédie, c'est entre autres d'encourager la création; il existe une cinquantaine de théâtres à Genève et, même si certains d'entre eux font de la création, notamment le Théâtre de Carouge pour lequel j'ai le plus grand respect, les autres théâtres ont moins l'occasion d'encourager la création.
Deuxièmement, outre le projet théâtral, il y a un projet architectural qui correspond, lui, au développement du CEVA, ce que nous n'avons pas encore abordé aujourd'hui. Ce projet est important tant sur le plan artistique que sur le plan urbanistique du développement de notre ville, parce que ce futur théâtre sera situé à la gare des Eaux-Vives, c'est-à-dire au coeur d'un futur pôle de développement urbain au centre-ville; la Nouvelle Comédie sera donc le coeur de ce nouvel espace. Le CEVA n'est pas seulement un train. Ce n'est pas seulement un projet de mobilité, c'est aussi un projet sociétal, esthétique, humain et urbanistique pour l'ensemble de notre canton, et la Nouvelle Comédie en est l'un des points forts. C'est aussi pour cela que le canton s'engage à hauteur de 45 millions, et non pas seulement pour la raison artistique, par ailleurs bien développée par Mme Valiquer Grecuccio. C'est pourquoi je vous invite évidemment à voter ce crédit.
Je tiens aussi, et je profite de l'occasion d'être à côté de M. Hohl, à saluer quand même l'apport du PLR. J'avoue que dans un premier temps, j'étais un peu agacé par cette réaction que vous avez manifestée, mais je pense que cela a permis de faire mûrir le projet et de lui donner une meilleure assise. J'espère qu'à l'exception des deux groupes qui vont refuser ce soir ce projet, les autres vont largement l'accepter. C'est important parce que cela me paraît judicieux qu'à Genève un projet de cette envergure puisse être soutenu le plus largement possible. Je tiens aussi à saluer l'amendement qui a été déposé par le PLR - nous en parlerons tout à l'heure, mais j'anticipe. Evidemment, il ne va pas plaire à la Ville de Genève, puisqu'il lui demandera un effort financier supplémentaire, mais il me paraît ouvrir la voie et je salue le pragmatisme du PLR qui permet grâce à cela de pouvoir commencer les travaux, en demandant un petit effort supplémentaire à la Ville, mais enfin, c'est de bonne guerre, c'est de bonne politique et je crois que ce geste est à saluer. Puisqu'on parle de désenchevêtrement, cet amendement présente un autre avantage, à savoir de permettre l'évolution de ce désenchevêtrement, notamment avec le Grand Théâtre, car si on remet la totalité des frais de fonctionnement à la Ville, il est clair que ce n'est pas un cadeau qu'on fait aux autorités municipales, mais cela ouvre aussi la voie au transfert du Grand Théâtre à l'Etat de Genève. En effet, si nous allons dans le sens d'un transfert de frais de fonctionnement à la Ville s'agissant de la Comédie, cela signifie que le jour où l'Etat prendra à sa charge le Grand Théâtre, les frais de fonctionnement de celui-ci seront à la charge du canton. C'est donc aussi dans ce sens-là que je vois cette proposition comme une contribution utile au débat général sur l'avenir de la culture dans notre canton.
M. Cyril Aellen (PLR). Le groupe PLR dans son ensemble a toujours accueilli ce projet de loi avec la plus grande prudence. Traditionnellement attaché à la culture en général et aux scènes d'art dramatique en particulier, mais inquiet et préoccupé par les finances cantonales, le groupe PLR était également déterminé à supprimer les doublons Ville-canton. Aujourd'hui, la Comédie est une institution vieillissante cofinancée de façon indirecte par le canton et la Ville, à travers la Fondation d'art dramatique. Dans ce contexte, sans clarification des rôles de chacun et sans une répartition juste des tâches Ville-canton, il était totalement exclu de verser 45 millions de francs pour financer 50% de la Nouvelle Comédie. Mais, dans sa majorité, le groupe PLR tient à ce que la Nouvelle Comédie voie le jour. Le groupe PLR est déterminé à assainir les finances cantonales. Il s'agit de verser maintenant à crédit une subvention de 45 millions, mais le groupe PLR est attaché à soutenir également une meilleure répartition des tâches communes-canton. La première vertu de la position défendue par le rapporteur de majorité Frédéric Hohl a été de faire en sorte que la Ville et le canton, grâce notamment au président du Conseil d'Etat, trouvent un accord sur la répartition des tâches communes-canton dans le domaine culturel, cela également bien sûr avec la conseillère d'Etat chargée de ce département.
Si l'amendement présenté est accepté, il permettra à la fois le versement des 45 millions et la prise en charge par la Ville seule de l'entier du financement de la Comédie à compter de 2018, soit à peu près la date du versement de ces 45 millions et de l'ouverture de la Nouvelle Comédie, ce qui signifie un transfert de charges de 1,76 million vers la Ville et la prise en charge par celle-ci de l'entier des frais de la Nouvelle Comédie. La position du groupe PLR est que, si cet amendement est accepté, il votera ce projet de loi. A défaut, il ne pourra pas le voter, parce que la répartition des tâches communes-canton n'aura pas été faite correctement et parce que les finances cantonales n'auront pas été préservées comme il le faut, raison pour laquelle je vous invite au deuxième débat à soutenir l'amendement déposé par le groupe PLR qui va dans un esprit constructif en faveur de la Nouvelle Comédie, mais également en faveur des finances saines de ce canton et en faveur d'une meilleure répartition des tâches communes-canton.
M. François Baertschi (MCG). Nous avons affaire là non pas à une Nouvelle Comédie, mais à un nouveau délire ! C'est un nouveau délire parce que, quand on a 13 milliards de dettes et qu'on engage des dépenses tous azimuts... (Vifs commentaires. Le président agite la cloche.)
Une voix. Chut !
M. François Baertschi. ...notamment en continuant un ensemble de constructions et de données qui coûtent aux Genevois, avec le CEVA, et je vous passe la nouvelle gare pour le CEVA, avec la restauration du Grand Théâtre et du MAH, à qui pense-t-on ? A qui pense-t-on alors qu'au même moment nous avons de nombreux chômeurs dont tout le monde se fiche ! Dont tout le monde se fiche, j'utilise le terme de manière précise, parce que personne ne tient compte de ces gens; on les prend pour des moins que rien, on se fiche de tous ces gens qui n'ont pas de logement, qui n'ont pas de travail ! On dépense dans le superflu, on est en train de créer des pseudo-cathédrales, alors que le théâtre à Genève est déjà bien pourvu de manière générale ! (Remarque.) Il faut d'abord penser aux besoins prioritaires des Genevois, besoins qui ne sont pas remplis. Ce n'est pas une Nouvelle Comédie, c'est un nouveau délire ! Nous sommes très surpris que certains retournent leur veste et continuent à dépenser l'argent comme si de rien n'était ! Il faut maintenant avoir un minimum de rigueur et voir quelles sont les priorités !
Une voix. Bravo !
M. Christo Ivanov (UDC). Comme l'a relevé le rapporteur de majorité, M. Frédéric Hohl, sur le plan architectural, le projet est magnifique mais, il faut le reconnaître, l'intérieur ne l'est pas. En effet, la commission des travaux et ce Grand Conseil ont été mis devant le fait accompli, ce qui est extrêmement désagréable ! Une fois de plus, un compromis se conclut dans le dos des élus entre la Ville de Genève et l'Etat, et ce sont maintenant les députés qui doivent assumer. Dans ce complexe théâtral, il est prévu uniquement deux salles: une de 250 places et une autre de 500 places, ce qui est tout simplement insuffisant. Quel acteur privé organisera un spectacle dans la Nouvelle Comédie ? Aucun ! Telle est la réalité. Les coûts de fonctionnement seront de 15,7 millions par année, ce qui est faramineux, et le canton ne peut pas assumer cette gestion, surtout que la dette n'est pas de 13 milliards, Monsieur Baertschi - vous transmettrez, Monsieur le président - mais elle est supérieure à 20 milliards. En effet, il faut ajouter aux 13 milliards, d'une part, 7 milliards de la fonction publique et des caisses de pension - je rappelle qu'aujourd'hui la CPEG vend des obligations pour assurer les rentes du personnel - et, d'autre part, ce qui se situe en pied de bilan. Certaines personnes devraient donc peut-être faire un minimum de comptabilité.
Y aura-t-il un échange entre le Grand Conseil et la Ville pour ce qui est de la gestion du Grand Théâtre si la Ville assume la Nouvelle Comédie ? Telle est la question. Je rappelle que ce Grand Conseil a déjà donné 10 millions pour le Théâtre de Carouge et qu'il s'apprête éventuellement à voter 45 millions pour la Nouvelle Comédie. Petite parenthèse: combien avons-nous voté pour le sport genevois ici dans cette salle ? La réponse est: zéro franc !
Une voix. Bravo !
M. Christo Ivanov. Oui, une fois de plus, ce projet culturel est destiné à une petite élite favorisée et subventionnée. (Commentaires.) C'est la triste réalité ! C'est la triste réalité !
Une voix. Bravo !
M. Christo Ivanov. Ce théâtre se veut un théâtre de création qui va faire doublon avec le Théâtre de Carouge. Oui, Mesdames et Messieurs, telle est la réalité ! (Brouhaha.) Désenchevêtrer les tâches entre l'Etat et les communes doit être une priorité de ce Grand Conseil et du Conseil d'Etat; c'est vital pour notre collectivité genevoise ! Pour toutes ces raisons, le groupe UDC refusera de voter ce projet de loi. Je vous remercie.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Pascal Spuhler pour trois minutes vingt-neuf.
M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. J'ai plutôt envie d'appeler ce projet de la Nouvelle Comédie «projet mégalo» du ministre de la culture de la Ville qui a envie de se faire plaisir encore une fois au nom de l'art et de la culture. On va construire un bâtiment monstrueux avec finalement, comme l'a dit M. Ivanov, une petite contenance, pour une fortune qu'on va dépenser pour quelques privilégiés. C'est finalement ce que, pour ma part, je tire de cette affaire. Mesdames et Messieurs, cela vous a été rappelé, les finances de l'Etat sont catastrophiques, celles de la Ville ne sont guère mieux, et vous voulez aujourd'hui voter 45 millions pour un projet finalement ubuesque et mégalo, alors que nous cherchons des logements pour beaucoup de Genevois. Mais arrêtez ! Nous n'avons pas besoin d'un théâtre supplémentaire, nous en avons assez à Genève ! Nous en subventionnons assez ! Construisons des logements subventionnés, construisons un beau bâtiment en l'honneur de nos Genevois que nous aimerions loger, plutôt que de fournir des salles supplémentaires à d'éventuels pendulaires qui vont éventuellement, peut-être, venir se faire plaisir à Genève ! Non, Mesdames et Messieurs, si c'est pour nourrir le bassin genevois d'un million d'éventuels prétendus clients à la culture, non ! Le MCG ne veut pas payer ces 45 millions de francs pour une prétendue culture intellectuelle et privilégiée ! Le MCG a envie de se battre pour les citoyens qui cherchent des logements, pour les citoyens qui cherchent du travail, et les 45 millions que vous allez jeter par la fenêtre seraient bien mieux dans la poche de nos concitoyens ! Mesdames et Messieurs, j'ai entendu le rapporteur de minorité parler d'un projet humain et sociétal. Laisser des gens dans la rue alors qu'on se permet des folies culturelles, ce n'est pas ce que j'appelle un projet humain et sociétal ! Construire du logement pour nos concitoyens, ça c'est un projet humain et sociétal ! Merci, Monsieur le président.
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs, je suis né aux Eaux-Vives, je travaille aux Eaux-Vives et je suis très heureux de voir ce quartier évoluer, notamment dans cette direction culturelle, telle qu'évoquée par l'ensemble des députés autour de la table des rapporteurs. Le parti démocrate-chrétien soutient cette Comédie, qui constituera aussi un lieu de vie économique. J'ai lu dans le rapport qu'à Zurich l'économie culturelle représente une part relativement importante du PIB. La culture est un acteur économique. Je rappellerai à mes préopinants du MCG qui ont relevé qu'effectivement, à Genève, nous avons besoin d'emplois, que travailler dans un quartier, construire dans un quartier, faire vivre des associations, c'est aussi amener du travail, c'est aussi lutter contre le chômage. (Commentaires.) Dont acte, Mesdames et Messieurs !
Pour ce qui est de la symétrie des relations que nous entretenons aujourd'hui avec nos communes et notamment la Ville, nous sommes bien souvent là pour demander des efforts à la Ville. Nous devons rénover le Palais des Nations, eh bien nous allons demander à la Ville de nous aider ! Il n'y a pas seulement la Confédération, mais trois parties qui vont participer au prêt qui sera nécessaire à la réfection de l'ONU, puisqu'il y a également le canton et la Ville. Mesdames et Messieurs, je vous appelle à respecter un peu ces symétries. Au-delà des engagements que nous voulons bien prendre, on a quand même un train d'investissements culturels de plus de 250 millions de francs pour le Musée d'ethnographie et pour le Musée d'art et d'histoire sur lequel nous allons voter le 28 février; participer aujourd'hui à hauteur de 45 millions de francs me paraît donc être un effort tout à fait légitime et pertinent de la part de l'Etat vis-à-vis de notre propre municipalité. J'ajouterai que l'amendement proposé par le PLR ce soir est aussi le fruit d'une proposition que j'ai faite à la commission des travaux en relevant que notre canton pouvait continuer d'investir parce que l'investissement participe à l'effort économique. La seule chose qui aujourd'hui est indiquée pour notre Etat, c'est de prévoir des investissements qui ne coûtent pas en frais de fonctionnement. Le fait aujourd'hui d'avoir trouvé un accord avec la municipalité de Genève qui n'alourdit pas nos frais de fonctionnement, notamment de 15 millions par année, et j'en terminerai par là, représente 150 millions en dix ans. Merci, Mesdames et Messieurs.
Une voix. Bravo !
Présidence de M. Antoine Barde, président
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Stéphane Florey pour deux minutes onze.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Les débats de commission ont été ma foi tronqués par les refus des propositions d'auditions que nous avions faites. J'avais en effet proposé d'auditionner la Fondation d'art dramatique, ce qui a été refusé parce que les rangs d'en face ont eu peur de connaître le vrai bilan de ce qu'est l'art dramatique à Genève. Le bilan est catastrophique, cela fait plus de vingt ans que les fréquentations des salles sont en baisse. J'avais proposé d'auditionner Hervé Loichemol, le directeur de la Comédie justement pour qu'il vienne nous parler de la fréquentation qui est catastrophique; il le dit lui-même dans un rapport des comptes 2012-2013 de la Fondation d'art dramatique. La fréquentation de la Comédie rencontre une baisse constante depuis des années. Le rapport contenait même une conclusion indiquant que la Nouvelle Comédie représente un investissement massif risqué qui ne répond à aucun besoin prépondérant de la population. C'est cela, la réalité ! Parce que la Comédie, vous y allez, c'est maximum deux personnes, dix personnes ! (Commentaires.) Vous allez à l'assemblée générale de la CGI qui loue la salle chaque année, la salle est archipleine ! Comment comprenez-vous cela ? Il n'y a aucun intérêt à construire une nouvelle salle pour l'art dramatique. La fréquentation est quasiment à zéro ! (Rires. Commentaires.) Il y a le Théâtre de Vidy à Lausanne qui fonctionne très bien; en plus cela correspond à ce que certains appellent le Grand Genève. Les gens peuvent très bien se déplacer à Lausanne. Cet investissement est complètement surréaliste et il faut absolument le refuser. Je vous remercie.
M. Olivier Baud (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, pour débuter j'ai envie de dire, si vous me permettez ce poncif - une fois n'est pas coutume - que c'est un beau projet pour Genève. Ce n'est pas un théâtre supplémentaire, on l'a relevé, mais une Nouvelle Comédie, car tout le monde s'accorde à reconnaître que l'actuelle Comédie est obsolète et ne peut plus remplir sa fonction. Je crois que personne ne le conteste. La Nouvelle Comédie de Genève constituera donc un véritable élan pour le théâtre romand et pour la création contemporaine. Nous ne pouvons pas l'occulter non plus. Comme on vient de le confirmer, actuellement Genève ne peut pas accueillir certaines productions de grande qualité car ses infrastructures ne le permettent pas, contrairement par exemple au Théâtre de Vidy à Lausanne ou au théâtre d'Annecy, et je conçois mal qu'on puisse envoyer les spectateurs dans d'autres cantons ou en France voisine. (Commentaires.) Genève compte vingt-cinq théâtres mais serait en quelque sorte contrainte de délocaliser sa production, ce qui est un paradoxe. La Nouvelle Comédie de Genève n'est donc pas un nouveau théâtre de plus, c'est un projet dont le canton a besoin et qui est nécessaire pour valoriser la création et la production locale. (Remarque.)
Mais ce projet, Mesdames et Messieurs, n'est pas qu'un projet théâtral. Il y a bien sûr le CEVA et la gare des Eaux-Vives qui y est liée, mais aussi, et on n'en parle que très peu dans le rapport, voire pas du tout - parce que ce n'était pas forcément le sujet, mais on doit quand même aussi le considérer - il y a la construction de logements: quelque 300 logements directement, une crèche, des infrastructures sportives, etc. Il y a aussi le projet de construction dans le périmètre de la gare de quelque 3000 logements, et nous ne pouvons pas, vous ne pouvez pas l'ignorer. Mais pour que cette gare voie le jour, encore faut-il que la construction de ce théâtre débute également. Mesdames et Messieurs, c'est donc un beau projet culturel, théâtral et urbanistique, et pour lequel la Ville - c'est quand même un signe - contribuera fortement, de manière conséquente. En tant qu'ancien conseiller municipal ayant suivi ces débats sur ces travaux, j'aimerais souligner également que je suis convaincu que la Ville tiendra ses engagements. Quant à l'amendement du PLR, le groupe Ensemble à Gauche en a pris bonne note et assurera ses responsabilités afin que ce projet soit accepté ici. Mesdames et Messieurs, ne laissons pas passer une si belle occasion de soutenir un projet d'envergure dont Genève a véritablement besoin ! Je vous remercie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, dire que ce projet a été amené comme un fait accompli devant la commission des travaux est quand même fort de tabac ! (Remarque.) La commission des travaux y a consacré quatre séances où trois conseillers d'Etat et deux conseillers administratifs sont venus pour défendre ce dossier. Ce dossier a donc occupé cette commission et toutes les questions posées ont reçu des réponses d'une qualité et d'une transparence totales. Donc, soutenir que ce dossier a été réalisé à l'arrache et que nous n'avons pas eu les réponses... Eh bien tant pis, si vous n'avez pas posé les questions en temps voulu ! Mais les réponses ont été données. Ce dossier de la Nouvelle Comédie est important aussi en termes de dynamique parce qu'il est porté transversalement par tout le Conseil d'Etat: en matière de construction par M. Dal Busco; en matière de développement des périphériques autour des gares CEVA par M. Barthassat; en matière d'aménagement et d'urbanisme et, cela a été soulevé, de création d'un nouveau quartier qui va se développer autour de cette gare CEVA par M. Hodgers; en matière d'emploi et de création d'emplois par M. Poggia; en matière de culture par Mme Emery-Torracinta, et n'oublions pas le président du Conseil d'Etat qui estime que ce projet est effectivement important du point de vue de toutes ces discussions de désenchevêtrement qui sont en cours actuellement entre communes et canton.
J'aimerais aussi relever que, techniquement, ce projet est le résultat de réflexions tant des professionnels du théâtre que des urbanistes qui ont mené des études, cela a été dit, pendant de longues années. Ce théâtre sera un théâtre de création qui permettra à des comédiens et également à toutes sortes de métiers rattachés au théâtre de trouver du travail, de monter des pièces, de promouvoir l'image et la créativité de Genève. Naturellement, le rapporteur de majorité l'a relevé dans son introduction, on parle d'un théâtre, mais on parle aussi d'argent et de qui sera chargé principalement du financement de fonctionnement - cela transparaît bien sûr dans l'amendement du PLR. Il est vrai que des négociations se sont tenues jusqu'à il y a fort peu de temps. Monsieur Aellen, pour le financement de ce projet, le Conseil d'Etat et donc nous, le Grand Conseil, mettons moins de la moitié. De plus, non seulement la Ville en assure totalement le fonctionnement d'après l'amendement qui va être proposé très bientôt, mais en plus elle assure toute la gestion du chantier de cette Nouvelle Comédie, chantier qui va aussi accessoirement apporter du travail, relevons-le. Mais, les choses étant ce qu'elles sont, le groupe socialiste a décidé de mettre la priorité sur la construction de ce monument qui va représenter cette Nouvelle Comédie, de ce projet porteur, porteur bien sûr de créativité culturelle et aussi de liens dans un quartier, et cela nous semble être quelque chose d'important. Dire qu'on ne s'occupe pas de sport, alors que juste tout à l'heure dans la séance des extraits, comme ça, en quelques minutes, nous avons dépensé, comme je le relevais, à peu près 50 millions de francs pour des routes... Oui, nous en prenons acte, mais là, il est question de liens, de quelque chose de vivant et ce n'est pas en mettant les pieds contre le mur que nous allons créer ce rayonnement de Genève; ce n'est pas seulement à travers des routes que nous allons le faire, c'est bien à travers des gens qui s'impliquent dans des projets, des projets de création, que l'on va voir avec plaisir, je l'espère ! (Remarque.) Je souhaite donc simplement rappeler et demander aux groupes qui soutiennent ce projet ici d'être conséquents s'agissant de leur représentation au Conseil municipal, comme vient de le rappeler mon préopinant, et je pense que tout ira bien pour ce nouveau projet que nous espérons rayonnant pour Genève.
Mme Frédérique Perler (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, nous avons l'opportunité de valider un vrai choix en matière de politique culturelle, l'opportunité de dire oui à un projet magnifique, un nouveau projet de théâtre, celui de la Nouvelle Comédie, qui sera en mesure de répondre aux défis du théâtre contemporain et d'accueil des productions, ce qui n'est plus le cas avec notre Comédie actuelle. Nous aurons enfin à Genève une institution phare dans le domaine du théâtre, et j'aimerais ici souligner quatre choses. Premièrement, la Nouvelle Comédie émane d'un projet collectif élaboré par de nombreux professionnels qui ont travaillé bénévolement avec une large consultation des milieux professionnels. C'est un projet qui a su convaincre les autorités de la Ville de Genève ainsi que les autorités cantonales et qui a été parfaitement bien mené et maîtrisé. A cet égard, je crois que nous pouvons être reconnaissants et remercier les membres de l'Association de la Nouvelle Comédie pour le temps consacré à ce projet exemplaire. Deuxièmement, sur le plan urbanistique, nous en avons déjà parlé, c'est un projet structurant qui s'insère dans un quartier situé sur le site de la gare des Eaux-Vives et qui accueillera de nombreux nouveaux habitants. Troisièmement, on en a brièvement parlé, c'est un projet économique, puisqu'un théâtre, un lieu de création est générateur d'emplois non seulement pour les artistes, pour les métiers de la scène, mais aussi pour les intermittents du spectacle, lesquels en ont bien besoin. Ainsi que le rappelait M. Cerutti du PDC, le projet contribue aussi à diminuer le chômage. Je me permets de vous rappeler, Mesdames et Messieurs les députés, et ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'Office fédéral de la culture, qu'un franc investi dans la culture en rapporte trois. (Commentaires.) Pourquoi s'en priver ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Enfin, sur le plan culturel, il faut savoir aussi qu'il existe tout un projet culturel autour de la Nouvelle Comédie, autour de la transmission des savoirs. (Brouhaha.) Alors pourquoi se priver de ce magnifique projet, Mesdames et Messieurs ? Eh bien, j'aimerais vous dire que les Verts voteront avec enthousiasme ce projet fédérateur qui contribuera très largement au rayonnement de Genève, parce que nous voulons la construction de la Nouvelle Comédie et son développement en tant que lieu de création et de rencontre pour les artistes et les publics. Le groupe des Verts votera également l'amendement proposé par le PLR puisqu'il faut passer par là pour obtenir des majorités et puisque, je le répète, nous voulons cette Nouvelle Comédie. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. Je passe la parole à M. le député Pascal Spuhler pour une minute trente-sept.
M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. Je dirai un petit mot également sur l'amendement qui nous est proposé par le PLR sur cet objet. J'aimerais quand même dire que la Ville de Genève a voté le projet sous condition que ce parlement vote l'enveloppe de 45 millions, soit l'aide pour la construction. Aujourd'hui, le PLR aimerait à nouveau conditionner le vote de ces 45 millions à la prise en charge de la Comédie en termes d'entretien et de gestion par la Ville. Le PLR de la Ville de Genève et le PLR du Grand Conseil jouent à se refiler la patate chaude, ce qui est assez amusant. (Remarque.) Quelques petits chiffres, Monsieur le président: 125 000 F, c'est le coût de la place que nous allons construire. Très bien, c'est assez sympa, j'espère que ce sont des fauteuils confortables ! (Remarque.) Ensuite, un petit calcul concernant la fréquentation: on nous parle de 20 000 spectateurs par année à la Comédie, ce qui correspond à peu près à 75 par jour, quand il y a cinq représentations par semaine. Il me semble que nous faisons un théâtre gigantesque pour peu de spectateurs et qui coûte très cher. Je vous remercie, Monsieur le président.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je passe la parole à Mme la députée Salika Wenger pour deux minutes neuf.
Mme Salika Wenger (EAG). Je vous remercie, Monsieur le président. Chers collègues, hier: 5 milliards pour la traversée de la rade ! (Commentaires.) Cela n'a pas fait un pli ! (Commentaires.) Vous avez trouvé que c'était vraiment le projet le plus génial de la planète ! Aujourd'hui: 45 millions pour la culture, c'est une dépense faramineuse ! Nous allons ruiner l'Etat !
Des voix. Oui ! (Commentaires.)
Mme Salika Wenger. Premièrement...
Une voix. Il est déjà ruiné ! (Rires. Commentaires.)
Mme Salika Wenger. Premièrement, l'Etat est toujours endetté et il le sera toujours, parce que nous construisons, parce que nous créons des infrastructures; nous sommes toujours endettés ! (Commentaires.) Ce n'est donc pas la dette ! Et j'imagine que Genève avait déjà des dettes au moment où le Grand Théâtre a été construit ! Est-ce qu'on s'est posé la question ? (Commentaires.) Alors là, tout à coup, la culture est un luxe ! Et, je suis navrée, Messieurs, que vous en manquiez tellement que vous la considérez comme un luxe, alors que c'est une nécessité ! Le monde que vous êtes en train d'essayer de nous vendre en opposant le logement à l'art est le monde le plus triste et le plus ignorant qui soit ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Il est impossible d'imaginer que l'on puisse voter contre un espace culturel ! Il n'y a que dans vos têtes d'ignorants que c'est possible !
Une voix. Bravo ! (Quelques applaudissements. Commentaires.)
Le président. Je vous remercie, Madame la députée. La parole est à Mme Geneviève Arnold.
Mme Geneviève Arnold (PDC). Oui, bonjour... Euh, excusez-moi ! (Rires. L'oratrice rit. Commentaires.) Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, comme nous l'avons relevé, ce projet culturel s'inscrit dans un projet urbanistique d'envergure qui est intimement lié à l'aménagement du CEVA, avec le développement d'un nouveau quartier, un quartier vivant et de commerce, qui va aussi pouvoir développer l'habitat grâce à ce chantier monumental dans lequel nous avons imaginé dès le début la présence de cette Nouvelle Comédie. La Nouvelle Comédie est indispensable à ce jour. Ayons l'audace, Mesdames et Messieurs, de réaliser ce qui sera le rayonnement de la Genève de demain ! Lorsque nous voyageons à l'étranger et lorsque nous reconnaissons la culture de l'étranger, nous admirons aussi tout ce qu'il s'y dégage. Donnons-nous les moyens d'accueillir cette culture et de mieux développer le monde théâtral à Genève. Ce sera une magnifique carte de visite pour notre ville et notre canton. Les Genevois et Genevoises en profiteront bien évidemment, mais c'est aussi toute la Genève internationale qui pourra de par là rayonner. Il est donc bien du ressort du canton de participer à ce soutien. Ce projet est également impératif pour le monde du théâtre. Encourager la création et l'accueil, c'est aussi encourager le futur de nos jeunes, la reconnaissance du monde des artistes auquel nous devons aussi offrir des places. Contrairement à ce que j'ai entendu tout à l'heure, il ne s'agit nullement d'opposer le sport et la culture. Il doit bien y avoir la place pour ces deux mondes. Je vois la culture comme un lieu d'intégration, de reconnaissance, de rencontre...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Geneviève Arnold. ...et de meilleure connaissance de l'autre. A ce titre, les arts de la scène jouent un rôle indispensable. Faut-il négliger l'accueil de nos artistes à Genève et les voir ainsi quitter notre ville pour être accueillis en résidence à l'étranger ? Nous avons aussi mentionné l'emploi, un thème dont il est souvent question. Cette exploitation...
Le président. Il vous faut conclure.
Mme Geneviève Arnold. ...va produire également des emplois sur ce périmètre. Osons, Mesdames et Messieurs, faisons de Genève la ville où l'institution théâtrale...
Le président. Merci, Madame la députée.
Mme Geneviève Arnold. ...retrouvera sa place ! A cet égard...
Le président. C'est terminé.
Mme Geneviève Arnold. ...nous nous devons de perpétuer notre voie théâtrale.
Une voix. Bravo !
M. Frédéric Hohl (PLR), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, la subvention cantonale pour la culture dans l'ensemble de la Suisse est d'environ 200 à 250 F par habitant. A Zurich, elle est de 300 F et, à Genève, de 700 F. Rien à redire, c'est très bien ! Bravo ! (Commentaires.)
Une voix. Et pour le sport ?!
M. Frédéric Hohl. Toute bonne pièce mérite une bonne chute. Mesdames et Messieurs, avec cet amendement, ce soir le PLR vous offre la Nouvelle Comédie. J'espère que vous en êtes bien conscients ! Je vous encourage donc... (Protestations.) Nous n'avons pas été impressionnés par tout ce que certains ont fait, notamment la distribution de tracts tous les soirs à la Comédie; ça, ce n'était pas fin ! Nous n'avons pas été impressionnés par cela. Nous voulons le meilleur pour Genève, et le meilleur pour Genève, Mesdames et Messieurs, c'est de voter ce soir cet amendement.
Mme Nicole Valiquer Grecuccio (S), rapporteuse de première minorité. Le meilleur pour Genève et sa région est de voter tout simplement ce soir ce théâtre, ce projet de la Nouvelle Comédie. J'aimerais dire que, non, ce n'est pas un projet pour les privilégiés ! Je viens d'une ville où il n'y avait pas de théâtre et je me souviens de la création de ce que nous appelions le «Petit Théâtre», alors que j'étais adolescente. Je peux vous dire qu'en tant qu'enfant de la démocratisation des études je me battrai toujours pour que la culture soit ouverte à tous et toutes. J'aimerais terminer en rappelant les propos de Matteo Renzi: «la beauté est plus forte que la barbarie.» Le théâtre nous permet de rester humains. Je vous rappelle que lui-même a dit, après les récents évènements tragiques que nous avons connus, que pour chaque euro investi dans la sécurité, il investirait un euro dans la culture. Alors, oui, nous devons nous rappeler que l'investissement culturel est un investissement pour rester humain et que cela fonde notre société démocratique. Votons ce projet de Nouvelle Comédie !
Mme Anne Emery-Torracinta, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, ce sont sept conseillers d'Etat qui, ce soir, auraient pu prendre la parole. Je dirai quelques mots brièvement, qui seront peut-être de nature à rassurer celles et ceux de ce côté-ci de la salle qui s'inquiètent. Le président du Conseil d'Etat interviendra ensuite sur la répartition des tâches. Cela a été dit, ce projet culturel est nécessaire. J'aimerais insister sur le fait que ce n'est pas un théâtre de plus que l'on va construire à Genève, c'est simplement la Comédie, l'ancienne Comédie, celle qui existe aujourd'hui, qui a besoin d'être remplacée parce que, comme cela a été rappelé, la scène est trop petite, mal jaugée, et parce qu'on ne peut pas y créer des productions qui correspondent aux besoins de ce canton. Ce n'est donc pas un théâtre de plus ! Si vous ne votiez pas ce projet, vous seriez en train de voter la mort d'un théâtre existant ! J'ai aussi envie de vous rappeler que la particularité de la Comédie aujourd'hui et sa particularité demain, lorsqu'elle sera à côté de la gare des Eaux-Vives, c'est d'être un théâtre destiné essentiellement à la création, à la production locale. Ce sont donc des artistes locaux, des personnes d'ici qui vont trouver du travail grâce à la Comédie.
Cela m'amène aussi à parler de la jauge des salles. Certains ont dit qu'une capacité de 500 places pour la salle prévue est trop peu et qu'il faut quelque chose de plus grand pour accueillir d'autres productions. Mais pour accueillir d'autres productions et pour faire de l'évènementiel, il existe déjà des salles à Genève ! Je pense par exemple au BFM. A la Comédie, il ne s'agit pas de faire du commercial à tout prix ou de l'événementiel, mais de la production locale, de la création locale. (Commentaires.) Et là, disposer d'une salle un peu plus petite qui permet plusieurs représentations, c'est aussi répondre à ce besoin et donner du travail à des artistes plusieurs jours. (Commentaires.) Vous avez aussi parlé de fréquentation. Vous savez, le théâtre, c'est un peu comme le sport: ça va, ça vient ! Je sais que le Conseil d'Etat va prochainement vous rendre un rapport sur une motion portant sur le Stade de Genève. Eh bien, puisque vous nous demandez dans cette motion un soutien du canton, je vous invite à ne pas trop vous préoccuper de la fréquentation du stade... (Rire.) ...parce qu'à ce moment-là, je crains que vous ne soyez amenés à refuser les propositions du Conseil d'Etat ! (Commentaires.) Enfin, ce projet de Nouvelle Comédie est un projet urbanistique, un projet de quartier nécessaire dans un canton comme Genève et nécessaire dans une région qui va bientôt dépasser le demi-million d'habitants. C'est donc le Conseil d'Etat, unanime, qui vous demande de soutenir ce projet.
Permettez-moi, pour terminer, de vous citer quelques vers en italien que je traduirai ensuite. Vous reconnaîtrez certainement d'où ils viennent: «Nel mezzo del cammin di nostra vita, mi ritrovai per una selva oscura, ché la diritta via era smarrita.» «Au milieu du chemin de notre vie, je me retrouvai dans une forêt obscure, dont la route droite était perdue.» Ce sont les premiers vers d'un des plus célèbres textes italiens dont le nom est de circonstance, «La Divine Comédie» de Dante, qui s'appelait d'ailleurs à l'origine «La Comédie». Je vous invite à méditer sur ce point, puisque nous sommes en milieu de législature, et le Conseil d'Etat vous invite à retrouver la sortie de cette forêt obscure et à regagner un chemin de sagesse et de sérénité. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais donc voter l'entrée en matière sur ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11584 est adopté en premier débat par 64 oui contre 29 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 1 que je vous relis, même s'il a déjà été suffisamment débattu, avant de le mettre aux voix:
«Art. 1, al. 2 (nouveau)
2 Le versement de ce crédit est conditionné au fait que la Ville de Genève:
a) reprenne, dès l'exercice 2018, à sa seule charge la subvention de fonctionnement actuellement versée par le canton à la Fondation d'Art Dramatique (FAD) pour la Comédie;
b) assume, sans participation du canton, l'augmentation des charges liées à la Nouvelle Comédie.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 70 oui contre 25 non et 2 abstentions.
Mis aux voix, l'art. 1 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'art. 2 est adopté, de même que les art. 3 à 8.
Troisième débat
Le président. Nous sommes au troisième débat et je passe la parole à M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat.
M. François Longchamp, président du Conseil d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous allez dans quelques instants voter en troisième débat ce projet de loi. L'ensemble du Conseil d'Etat a eu des contacts encore cette semaine avec l'ensemble du Conseil administratif. J'aimerais indiquer que le projet que vous votez a démontré la nécessité qui est la nôtre de désenchevêtrer les tâches, notamment en matière de culture, dans le sens de la déclaration que le Conseil d'Etat et le Conseil administratif ont signée le 18 novembre dernier de manière à clarifier les rôles de chacun. On sent bien aujourd'hui qu'il y a à Genève, dans cette salle comme ailleurs, une volonté forte d'avoir une Nouvelle Comédie, mais qu'il y a des problèmes de principe, de financement, de répartition, et que des clarifications quant aux compétences de chacun doivent être apportées. Dans ce domaine comme dans d'autres, nous ne pouvons pas continuer à agir comme nous l'avons peut-être fait ces dix, vingt ou trente dernières années. C'est la nécessité qui vous a amenés il y a quelques mois, le 24 septembre dernier, à voter la nouvelle loi sur la répartition des tâches. Ainsi que l'amendement l'indique, en accord avec la Ville de Genève, nous allons accélérer le processus qui vise notamment, dans le cadre de la loi sur la répartition des tâches, à vous permettre d'ores et déjà au budget 2017, c'est-à-dire dans ce budget qui vous sera soumis au mois de septembre prochain, mais également dans le budget municipal de la Ville de Genève, de prendre acte d'un grand nombre d'éléments contenus dans la déclaration du 18 novembre dernier. Cela permettra à Genève de se doter dans une période particulière de son histoire d'un investissement nécessaire pour la culture genevoise, pour la capacité de Genève à rayonner notamment à l'échelle internationale, comme nous le faisons aussi en collaboration avec les autorités municipales, pour défendre des projets de musée ou la rénovation de la principale scène d'art lyrique, le Grand Théâtre, qui va débuter dans quelques semaines. Au nom du Conseil d'Etat unanime, je vous remercie du signal qui sera donné dans quelques instants avec un investissement qui permettra tout à la fois de doter Genève d'une infrastructure culturelle, mais aussi de clarifier les nécessaires relations entre les communes et le canton. (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs, nous sommes donc en procédure de vote et je mets aux voix le projet de loi dans son ensemble ainsi qu'amendé en troisième débat.
La loi 11584 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11584 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 58 oui contre 29 non et 9 abstentions. (Applaudissements. Exclamations et applaudissements à la tribune.)
Le président. Je prie les personnes qui sont à la tribune de bien vouloir s'abstenir de manifester ! (Commentaires.)
Une voix. On n'est pas à la Comédie quand même !
Débat
Le président. Nous passons à la proposition de postulat 3. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Monsieur Florey, en tant qu'auteur de ce texte, vous avez la parole.
M. Stéphane Florey (UDC). Merci, Monsieur le président. Via sicura pose énormément de problèmes dans son application. En effet, si malheureusement vous commettez une infraction, quelle qu'elle soit, vous risquez de passer pour le pire des criminels en matière d'infractions routières. Ça provient du fait que les juges n'ont plus aucune marge de manoeuvre quant aux décisions qu'ils doivent prendre, puisque finalement Via sicura, c'est quoi ? (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est un catalogue d'infractions «versus» un catalogue de peines. Aujourd'hui, pour un simple dépassement de vitesse, que fait le juge ? Il prend son catalogue, regarde sous «dépassement de vitesse» la peine prévue et dit: «Désolé, vous avez deux ans de prison, retrait de permis, inscription au casier judiciaire.» C'est ça qui ne va pas. Autrefois, quand il jugeait une affaire d'infraction routière, le juge pouvait apprécier la situation: par exemple, si vous faites un dépassement sur une route de campagne à 4h du matin... (Brouhaha persistant.) ... ça n'a bien évidemment pas les mêmes incidences...
Le président. Juste un instant, Monsieur le député. (Un instant s'écoule.) Poursuivez.
M. Stéphane Florey. Merci, Monsieur le président. Je disais que si aujourd'hui vous faites malheureusement un dépassement en pleine campagne à 4h du matin, ça n'a bien évidemment pas les mêmes incidences que si vous le faites en pleine ville à une heure de pointe. Autrefois, les juges avaient une possibilité d'appréciation et pouvaient dire: «Vous allez être condamné, c'est sûr»... - parce que le but de ce postulat n'est pas de minimiser la faute en tant que telle, mais de laisser au juge la possibilité d'apprécier la situation réelle de l'infraction, chose qui n'est plus possible aujourd'hui.
Comme vous l'avez vu, ce postulat charge le Conseil d'Etat de prendre contact avec les gouvernements des autres cantons afin de faire pression sur Berne pour demander des modifications. Ce postulat a déjà été adopté notamment en Valais et a été bien évidemment déposé dans d'autres cantons; malheureusement, je ne sais pas où en sont les procédures. Il est d'autant plus important qu'une initiative parlementaire tessinoise avait aussi été adoptée par ce canton; hélas, le Conseil des Etats l'a refusée. Ensuite, une initiative parlementaire d'un conseiller national a, elle, été adoptée, mais elle doit encore passer devant les Etats, et là, bien sûr, on ne sait pas ce qu'il en adviendra. C'est pour cette raison que ce postulat adopte un angle différent, en chargeant directement les Conseils d'Etat des cantons de prendre en charge ce dossier et d'aller porter la voix des parlements cantonaux à Berne afin qu'on puisse faire ces modifications. Je le répète, il ne s'agit en aucun cas de minimiser l'infraction, mais bel et bien de laisser une plus grande marge de manoeuvre aux juges. Car il faut aussi dire ce qui se passe aujourd'hui dans certaines communes avec les pompiers volontaires: il n'y en a plus un seul qui veut prendre le volant, parce qu'il prend un risque en conduisant un camion. (Brouhaha.) S'il lui arrive un pépin sur la route, il risque non seulement une amende, mais un retrait de permis, une inscription au casier judiciaire, mais en plus, il va peut-être perdre son emploi s'il a justement besoin d'un permis de conduire pour aller travailler. Ce sont toutes ces conséquences qui posent problème, alors que si le juge peut apprécier l'infraction différemment, l'auteur de l'infraction paiera une amende, c'est sûr, mais le juge pourra l'autoriser à prendre la voiture dans un cadre professionnel, ce qui n'est plus possible aujourd'hui avec Via sicura. C'est pourquoi je vous demande et vous remercie d'accepter ce postulat.
M. Raymond Wicky (PLR). Mesdames et Messieurs, chers collègues, il est évident que le PLR est totalement favorable à ce qu'on soit sévère quand on a affaire à des criminels sur la voie publique, qui commettent des actes méritant d'être punis, voire de l'être très sévèrement. En revanche, on a vraiment l'impression aussi, quand on se penche sur Via sicura, que le législateur fédéral a eu une approche tout de même un peu particulière, et la main particulièrement lourde. Il est pour nous nécessaire d'imaginer que l'on puisse faire un petit réglage de curseur, de manière à ne pas mettre tout le monde dans le même panier et à faire une appréciation; appréciation qui d'ailleurs doit, à notre avis, être aussi laissée au juge. Comme le disait mon préopinant, les juges ont aujourd'hui un catalogue des infractions: «Tiens, hop ! C'est à la ligne 38», et à la ligne 38, on trouve la punition prescrite. Ce n'est quand même - excusez-moi - pas le rôle des juges que nous mettons en place, qui ont des compétences, ou du moins on peut au minimum l'espérer. Nous avons constaté aussi que le Conseil national a pris les choses en main, comme il a été dit il y a quelques instants: nous pensons que le Conseil national a besoin du soutien des cantons, non pas pour revenir totalement en arrière - encore une fois, il y a des vilains qui doivent être sévèrement punis, nous sommes tout à fait d'accord - mais pour mener à nouveau une évaluation de manière que les choses soient quand même un peu plus cohérentes. C'est pour ces raisons que le PLR soutiendra ce postulat déposé par nos collègues de l'UDC. Je vous remercie de votre attention.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien ne soutiendra pas cette proposition de postulat... (Commentaires.) ...simplement parce que c'est aux Chambres fédérales de faire le travail, et elles l'ont déjà commencé. Le groupe UDC aux Chambres - le plus grand groupe politique - a un certain pouvoir pour faire changer les choses: qu'il le fasse, il en a les moyens. Dans tous les partis ici nous avons des élus à Berne que nous pouvons interpeller pour leur demander de déposer des postulats ou des motions à ce niveau. Nous ne devons pas intervenir dans le travail du Parlement fédéral sur ce sujet-là. Je suis d'accord sur certains points sur lesquels le législateur a peut-être été un peu trop sévère, mais n'empêche que lorsqu'on commet une erreur, on doit accepter d'en payer les conséquences. On sait très bien maintenant jusqu'à combien de kilomètres à l'heure on peut aller, on sait très bien qu'on doit respecter les feux rouges, qu'on ne doit pas faire certaines choses sur la route. Si on respecte les règles de la circulation, il ne nous arrive strictement rien.
Je trouve extraordinaire de la part de l'UDC de nous demander de revenir en arrière... (L'orateur rit.) ...alors qu'on va voter sur leur magnifique initiative sur le renvoi des criminels étrangers, qui tient justement compte de ces fautes pour renvoyer les criminels étrangers ! Je remercie l'UDC, c'est très gentil de sa part d'avoir pensé... peut-être à retirer son initiative ! (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Mathias Buschbeck (Ve). Je vais commencer mon intervention comme M. Buchs l'a terminée: si j'ai bien compris, ce que demande l'UDC ce soir, c'est que les juges aient une plus grande marge d'interprétation...
Une voix. Oui !
M. Mathias Buschbeck. ...lorsqu'un crime est puni et que lorsque des criminels récidivistes ont commis des délits, ils soient punis moins sévèrement. C'est bien de ça qu'il s'agit ce soir ?
Une voix. Oui !
M. Mathias Buschbeck. Parce que je voudrais juste savoir de quel texte on parle: de l'initiative de l'UDC sur laquelle nous allons voter dans un mois, ou du plus grand facteur de mortalité à Genève l'année passée, c'est-à-dire la route ? (Remarque.) Vous évoquez à longueur de journée la sécurité des Genevois. L'année passée, à Genève, il y a eu 1300 accidents de la route, 11 morts, 365 blessés graves et 927 lésions légères, soit plus de trois par jour. Si vous voulez vraiment vous soucier de sécurité, c'est par là que vous commenceriez à nous parler. Pour une fois que concernant la sécurité nous avons un vrai sujet sur lequel nous pourrions nous entendre... Alors qu'en fait, quand on tue quelqu'un sur la route, forcément, c'est un peu moins grave parce qu'il s'agit d'automobilistes. C'est un peu choquant d'entendre ça ce soir, et ce postulat n'est pas beaucoup moins grave. Il n'y a pas une semaine où l'on n'ouvre pas le journal en lisant: «rodéo urbain», «course poursuite», «mort tragique à 4h du matin»... Il y en a ras le bol de ces gens-là, ils doivent aller en prison, il faut aller au bout de la démarche de Via sicura; nous voulons que le nombre de morts diminue et que la sécurité de la population genevoise augmente. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Pascal Spuhler (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, évidemment que Via sicura peut exister quand on entend des...
Une voix. Excessifs !
M. Pascal Spuhler. ...des excessifs pareils - merci, je cherchais un terme un peu «soft» - quand on entend des discours comme celui que je viens d'entendre, où l'on qualifie de criminels tous ceux qui tiennent un volant dans la main, voire un guidon de moto. Monsieur le président, je tombe des nues, c'est n'importe quoi ! Par contre, Via sicura a totalement ignoré tous ceux qui provoquent des accidents avec des vélos ! Ça, surtout, il ne faut pas y toucher ! (Remarque.) Surtout, le cycliste, on le protège jusqu'au bout ! Mais il y a aussi des criminels à vélo, Monsieur Buschbeck, vous devriez le savoir ! (Commentaires.) Vous transmettrez le message, que M. Buschbeck en ait connaissance. Il y a aussi des criminels à vélo, et ça, on l'a complètement oublié en concevant Via sicura ! Mesdames et Messieurs, nous allons évidemment soutenir la proposition de l'UDC. Via sicura a considéré, dans sa grande largesse, que tous ceux qui conduisent un véhicule à moteur, finalement, sont des criminels potentiels. C'est bien le drame, aujourd'hui: on condamne plus sévèrement un chauffard - parce qu'évidemment, celui qui commet un délit routier est un chauffard - que celui qui commet réellement un délit à l'encontre d'un citoyen, d'un commerce ou d'une entité. Non, Mesdames et Messieurs, le crime de chauffard, l'infraction à la loi sur la circulation routière, n'est pas un crime de droit commun ! Evidemment que certains sont des récidivistes, il faut les punir, oui: les multirécidivistes, ceux qui ne savent pas bien se conduire, qui boivent, etc., bien sûr. Mais tout un chacun peut commettre un jour une incartade en matière de circulation routière. A cause de ça, on devrait être condamné à une année de prison ? Une année de prison pour quelqu'un qui n'a jamais rien fait dans sa vie, qui a toujours eu un comportement exemplaire et a une fois fait une erreur ? Mais elle est où, la largeur d'esprit qu'on entend souvent dans vos rangs s'agissant de criminels de droit commun ? Il n'y en a plus aucune, Monsieur Buschbeck. Non, Monsieur le président, ce que j'entends est complètement aberrant, et évidemment, nous soutiendrons cette proposition de postulat.
Une voix. Bravo !
M. Stéphane Florey (UDC). Ecoutez, je serais presque choqué des débilités profondes que j'ai entendues venant des bancs d'en face. (Protestations.)
Le président. Mesurez vos propos, s'il vous plaît, Monsieur le député !
M. Stéphane Florey. Non seulement M. Buschbeck - et vous lui transmettrez - n'a absolument pas lu le postulat, mais il est bien loin de la réalité des dégâts que cause Via sicura dans la vie des gens. Quand pour une simple infraction routière, comme l'a dit M. Spuhler, et sans antécédents, vous vous retrouvez aujourd'hui condamné à deux ans de prison...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Stéphane Florey. J'ai le temps du groupe, je vous remercie. (Remarque.)
Le président. Vous parlez déjà sur le temps du groupe.
M. Stéphane Florey. J'ai dû patienter deux minutes pour reprendre la parole, j'espère que... (Commentaires.)
Le président. Poursuivez, il vous reste vingt-cinq secondes.
M. Stéphane Florey. Enfin, ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a vraiment des drames qui se jouent tous les jours à cause de Via sicura. (Commentaires.) Il s'agit de rectifier quelque peu la situation en laissant une plus grande marge de manoeuvre, et en aucun cas, comme a essayé de le faire croire M. Buschbeck...
Le président. Il vous faut conclure.
M. Stéphane Florey. ...de dire que les multirécidivistes ne seront pas condamnés, c'est bien évidemment totalement faux.
Le président. Je vous remercie. Je passe la parole à M. le député François Baertschi, à qui il reste cinquante secondes.
M. François Baertschi (MCG). Merci, Monsieur le président. On se trouve dans une situation où l'on criminalise des gens qui n'ont rien fait, ou peu, alors qu'on laisse des grands criminels courir, qu'on en laisse d'autres avec des condamnations scandaleusement basses, comme pour le deal de drogue ou dans d'autres domaines où on laisse courir beaucoup de gens. On criminalise, au travers de Via sicura, qui est une véritable abomination... Combien de vies détruites par Via sicura ? Combien de familles détruites, parce qu'on veut à tout prix faire du dogmatisme... (Remarque.) ...anti-automobilistes, presque de manière criminelle ? (Remarque.) Dans toute chose... (Remarque.) ...l'abus est dangereux, et c'est ce que nous avons avec Via sicura. C'est pourquoi il faut à tout prix s'attaquer à cette abomination. Nous vous conseillons de suivre cette proposition.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, rappelons juste qu'aux Chambres fédérales, la droite est très largement majoritaire; c'est avec cette majorité de droite qu'a été voté Via sicura. Sur la forme du postulat: je ne suis pas très convaincue qu'il permette au Conseil d'Etat d'aller discuter et négocier avec les autorités fédérales; ça m'a l'air un peu timide, mais bon. En lisant cette proposition de postulat, j'ai imaginé l'UDC non par rapport à Via sicura, mais par rapport aux armes blanches: ça voudrait dire, si je suis les invites, que si on sort son cran d'arrêt dans une négociation avec quelqu'un, ce n'est pas grave. Si on lui fait une égratignure parce que cette personne est un adversaire un peu difficile, bah, on n'a pas fait exprès. Si, ma foi, un coup de couteau part dans le ventre de l'autre - il faut dire qu'il était vraiment très énervant - il faudrait quand même marquer le coup en infligeant peut-être une amende. Et si le détenteur du couteau a un couteau suisse, il est tout pardonné ! Enfin, hors boutade, on voit bien les campagnes - vous les avez vues sur vos ordinateurs; Bâle en a fait une où on adoptait la perspective des enfants. Ça s'appelait «Hauteur d'yeux 1 mètre 20», ce que l'enfant voit dans la ville et dans la circulation. C'est disproportionné: un enfant sur le chemin de l'école, face à une voiture qui va trop vite, n'a aucune chance. C'est disproportionné ! C'est un sur cinquante, un sur cent, un sur mille, avec la vitesse. Même chose, vous avez tous vu la vidéo de la police lausannoise - elle a fait un «buzz» - qui montrait qu'un moment d'inattention, pour un piéton, en l'occurrence, qui écoute un walkman, peut causer la mort déjà avec une voiture qui arrive à 50 kilomètres à l'heure. Il est impossible pour l'automobiliste de freiner en temps voulu s'il arrive quelque chose d'imprévu sur sa route. Oui, Mesdames et Messieurs, je suis d'accord avec vous, je pense que tous les automobilistes sont avant tout des personnes intègres, comme vous pouvez l'être, comme je peux l'être, comme nous pouvons l'être. Mais très souvent - je ne sais pas si ça vous arrive, mais pour ma part j'utilise de temps en temps une voiture, assez grande, d'ailleurs... (Exclamations.) Mais oui ! Chaque fois que je circule en ville, je me dis que j'espère ne pas devenir un assassin ce jour-là. (Commentaires.) C'est vrai !
Le président. Il vous reste vingt-cinq secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser. Je crois qu'il faut que vous fassiez tous cet exercice. Lors d'un moment d'inadvertance, si on dépasse les limites, il n'y a aucune garantie qu'on ne renverse pas un gamin ou un piéton et qu'il n'y ait pas un accident mortel. Ça montre la proportionnalité de cette loi. C'est indispensable. Nous ne soutiendrons pas ce postulat.
M. Bertrand Buchs (PDC). Je pense qu'on ne doit pas employer certains termes, qu'il y a des règles. L'UDC et le MCG sont des partis qui réclament le respect des règles. C'est évident que quelqu'un qui n'a jamais fait de mal à personne et qui a un accident les a dépassées, c'est comme ça. Ça peut arriver à moi, à vous, mais c'est comme ça. (Commentaires.) Il y a des règles qui prévoient une limite de 50 kilomètres à l'heure sur telle route, 30 sur une autre: eh bien ces règles, on les suit ! Ce n'est pas quelque chose qu'on peut choisir en se disant: «Aujourd'hui, il fait beau, la visibilité est bonne; sur cette route, la limite est de 60 kilomètres à l'heure, je peux aller à 90, parce que de toute façon je ne prends aucun risque, je sais très bien conduire et je suis sûr que je pourrai m'arrêter à temps !» C'est à ce moment-là qu'on a des accidents bêtes, parce qu'on se sent plus fort que la loi. La loi existe, on la respecte. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
M. Jean Batou (EAG). Chers collègues, une chose me frappe dans ce Grand Conseil où je suis nouveau: c'est le manque de cohérence des interventions des uns et des autres. L'UDC nous a habitués à une grande fermeté sur la répression. Chaque fois qu'il est question de prévention, l'UDC nous dit que la responsabilité individuelle doit primer, que c'est la répression qui va résoudre les problèmes de criminalité dans notre société. Quand il s'agit de l'automobile, on trouve toutes sortes d'excuses, on s'apitoie sur les vies qui vont être brisées. Eh bien je vous le dis, je ne suis pas pour la répression comme moyen essentiel de lutte contre les délits, mais pour la prévention. Mais alors soyez cohérents, votez pour des aménagements routiers qui ralentissent le trafic automobile, votez pour des aménagements qui favorisent la mobilité douce, votez pour des aménagements qui favorisent les transports publics, et alors les auteurs de ces infractions - des gens qui peuvent être tout à fait sincères, qui un soir ont fait une erreur, ont pressé trop fort sur la pédale de l'accélérateur... Je partage vos préoccupations, mais je les partage pour tous les responsables de délits. C'est la raison pour laquelle je refuse cette hypocrisie, je refuse ce double langage. Personnellement, je refuserai votre proposition.
M. Mathias Buschbeck (Ve). Il y a des choses que je n'ai pas forcément envie de laisser passer ! On dit que selon Via sicura, à la moindre infraction, on est lourdement condamné. Or il ne s'agit pas de la moindre infraction, mais du fait de rouler par exemple à plus de 70 kilomètres à l'heure dans une zone 30, à plus de 100 kilomètres à l'heure dans une localité; ces dépassements sont mentionnés dans la proposition de postulat que j'ai lue, Monsieur Florey. Quand on roule à 100 kilomètres à l'heure dans une localité, on accepte le risque de tuer quelqu'un qui traverse la route; donc oui, c'est un comportement criminel. (Remarque. Applaudissements.)
M. Raymond Wicky (PLR). Monsieur le président, chers collègues, très rapidement, que les choses soient claires: en ce qui me concerne en tout cas - et je ne crois pas que c'était le cas des autres intervenants favorables à ce postulat - il ne s'agit pas de favoriser le non-respect des règles. Vous avez raison, on l'a dit à plusieurs reprises, s'il y a des règles, elles sont faites pour être respectées. En revanche, j'estime tout de même que de bonnes sanctions doivent être justes et proportionnées, et beaucoup parmi les opposants l'ont souligné. Voilà tout ce que nous demandons à propos de Via sicura: d'aller dans ce sens-là.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Monsieur Voumard, vous n'avez plus de temps de parole. Nous pouvons procéder au vote.
Mis aux voix, le postulat 3 est adopté et renvoyé au Conseil d'Etat par 45 oui contre 34 non et 3 abstentions.
Débat
Le président. Nous abordons notre prochaine urgence en catégorie II, trente minutes. Je passe la parole à M. le député Yves de Matteis.
M. Yves de Matteis (Ve). Merci, Monsieur le président. Le groupe des Verts demande le renvoi de ce point sans débat à la commission des affaires communales, régionales et internationales. Je vous remercie.
M. Gabriel Barrillier (PLR). J'allais dire la même chose, je vous remercie !
Le président. Merci, Monsieur le député. J'invite l'assemblée à s'exprimer sur cette demande de renvoi.
Mis aux voix, le renvoi du rapport du Conseil d'Etat RD 1105 et de la proposition de résolution 799 à la commission des affaires communales, régionales et internationales est adopté par 73 oui et 1 abstention.
Débat
Le président. Nous abordons l'urgence suivante en catégorie II, trente minutes. Madame la rapporteure, vous avez la parole.
Mme Emilie Flamand-Lew (Ve), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de résolution a été déposée suite au refus du Conseil d'Etat de participer au Fonds national d'aide immédiate pour les enfants placés. Pour rappel, la somme demandée au canton de Genève était de 288 000 F, selon une clef de répartition basée sur la population des cantons. La commission des finances a procédé à plusieurs auditions très intéressantes, notamment celle de M. Luzius Mader, directeur suppléant de l'Office fédéral de la justice, qui a été délégué par son office pour constituer une table ronde. Celle-ci compte une vingtaine de personnes; une dizaine représentent les victimes et les associations de défense des victimes, l'autre moitié représente les collectivités publiques et les institutions qui ont participé à ces placements abusifs. A terme, cette instance propose de créer un fonds de solidarité qui serait combiné à un complément à la rente AVS pour les victimes, mais ces mesures nécessitent des décisions législatives au niveau fédéral. Dans l'attente de ces mesures qui vont prendre un peu de temps à être adoptées, et vu l'âge élevé d'un grand nombre de victimes et la situation difficile de certaines d'entre elles, la Table ronde a décidé de créer un fonds d'aide immédiate pour ces victimes de placements forcés.
Pourquoi un tel fonds ? Parce que ces victimes ont subi et subissent encore des conséquences financières liées aux situations du passé; souvent, elles n'ont pas pu suivre de véritables formations professionnelles, et n'ont donc pas exercé ensuite d'activités bien rémunérées. Elles ont souvent des retraites assez minimes et se trouvent dans des situations financières difficiles. Pour alimenter ce fonds, les cantons ont été appelés à contribuer, de même que les villes, les communes, les Eglises, aussi des entreprises, notamment pharmaceutiques, puisque certaines avaient effectué des expérimentations sur ces enfants retirés à leurs familles, ou encore des particuliers. A l'époque où nous avons traité la proposition de résolution, seuls les cantons de Schwytz et de Genève n'avaient pas versé de contribution. Aujourd'hui, Genève est le seul, bien qu'un donateur qui se trouve être un ancien enfant placé ait fait don de cette somme à la place du canton de Genève - mais il faut reconnaître que c'est assez misérable que le canton lui-même n'ait rien versé et qu'on ait dû attendre qu'un privé, qui plus est ancienne victime, se substitue à l'Etat pour cela. Symboliquement, ce refus de verser une somme dérisoire en regard de nos finances est un affront aux victimes, envers lesquelles l'Etat... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...a manqué à son devoir de protection il y a plusieurs dizaines d'années; ainsi, l'Etat manque aujourd'hui à son devoir de réparation. La bonne nouvelle dans ce tableau ma foi assez sombre, Mesdames et Messieurs les députés, c'est qu'il n'est pas trop tard pour bien faire: le fonds d'aide immédiate a encore besoin de contributions, nous pouvons envoyer un message fort au Conseil d'Etat en acceptant cette proposition de résolution et en lui demandant de verser cette contribution. C'est ce que je vous invite à faire ce soir. Je vous remercie.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, comme cela a été dit, nous avions déposé cette proposition de résolution il y a près de deux ans pour inciter le Conseil d'Etat à participer au Fonds national d'aide immédiate pour les enfants placés. Je vous rappelle brièvement que durant des décennies, et jusqu'en 1981, des enfants ont été enlevés à leurs familles pour des motifs divers - dont la pauvreté - et placés dans des institutions et chez des particuliers. L'absence de véritable contrôle des conditions d'accueil a conduit à des situations dramatiques que le rapport détaille. Nous en avons d'ailleurs eu un écho dernièrement dans les médias à propos d'une institution fribourgeoise. L'Etat a donc failli: failli à son devoir de surveillance, à son devoir de protection des enfants dont il avait la charge. Dans ce contexte, la crispation du Conseil d'Etat sur cet objet est vraiment incompréhensible, et vouloir créer sa propre structure est complètement surréaliste et déplacé. Il y a un an, nous avons appris que le Conseil d'Etat avait enfin participé à ce fonds, non par des deniers publics, mais en acceptant l'argent qu'un particulier avait bien voulu donner à l'Etat de Genève, particulier lui-même victime d'un placement. Mesdames et Messieurs les députés, personnellement, cela me choque; cela me choque que lorsqu'un particulier victime d'un placement fait cette donation, le Conseil d'Etat n'ait pas à ce moment-là le rouge aux joues et ne verse pas de sa poche l'argent qui nous est demandé. S'il faut souligner l'extrême générosité de cette personne, je ne comprends vraiment pas l'attitude du Conseil d'Etat en la matière. Aujourd'hui, le travail de la Table ronde touche à sa fin; mais pour pouvoir terminer d'indemniser les dernières victimes, il manque encore un peu d'argent. Raison pour laquelle les Verts ont demandé l'urgence sur ce texte. Nous avons en effet enfin l'occasion d'inciter le Conseil d'Etat à prendre ses responsabilités, à accepter d'assumer un passé peu glorieux et de contribuer par des deniers étatiques au fonds national. Contribuer à ce fonds participe d'une symbolique importante, d'une reconnaissance des souffrances de ces enfants. Je vous invite donc à soutenir cette résolution. (Applaudissements.)
M. Christian Frey (S). Pour illustrer ces propos et vous donner quelques chiffres très récents - ils datent d'hier - je me suis permis de prendre contact avec M. Luzius Mader, le préposé fédéral à ce fonds d'aide immédiate. Ce fonds d'urgence fédéral est actuellement épuisé et il manque de l'argent pour répondre à toutes les demandes. Le fonds d'urgence a répondu jusqu'à présent à un total de 1348 demandes, pour l'ensemble de la Suisse; le comité a déjà pu en traiter 923, 369 sont encore en suspens. Cela illustre les propos de mes deux préopinantes. Ce fonds manque donc d'argent. Maintenant, est-ce que Genève est vraiment concernée ? Là aussi, les chiffres sont clairs, vous pouvez les vérifier auprès du préposé fédéral: Genève est concernée. Pour le moment, 68 demandes au total émanant de Genève ont été traitées, dont certaines transmises par le canton de Vaud. On retrouve là un problème important: si Genève a procédé jusqu'en 1981 à des placements hors canton, cela a très souvent été dans le canton de Vaud, puisque Genève ne dispose pas d'une vaste campagne. Ces personnes ayant passé toute leur vie là-bas, et les choses étant assez difficiles à clarifier quant à la provenance, c'est très souvent le canton de Vaud qui a répondu, et le préposé vient de m'envoyer un nouveau message qui spécifie qu'il y a 8 situations de personnes relevant de Genève actuellement identifiées qui ont été dédommagées par Vaud.
Pour toutes ces raisons, parce que Genève est concernée - 68 demandes déjà traitées, 10 en suspens, plus ce que je viens d'apprendre à l'instant, à savoir que 8 personnes ont été «dépannées» par le canton de Vaud - il est important que le canton de Genève contribue, lui qui pour le moment n'a rien fait, puisqu'il s'est contenté d'utiliser les fonds d'un donateur généreux; c'est dans ce sens que va la résolution que nous vous demandons d'accepter et bien sûr de renvoyer au Conseil d'Etat.
Mme Anne Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, pour le parti démocrate-chrétien, même si à ce jour les dossiers des personnes identifiées à Genève sont en cours de traitement, notamment - et je l'apprends - dans le canton de Vaud; même si Genève fait mieux que les autres cantons en matière d'écoute et de dédommagement de victimes; même si nous sommes conscients que le Conseil d'Etat a la volonté de dédommager au mieux les victimes genevoises identifiées - pour l'instant, c'est une volonté que nous avons entendue; même si la Table ronde fédérale n'a enregistré que peu de demandes genevoises, apparemment; même si la Table ronde fédérale s'engage à faire des efforts d'explication, d'information envers les cantons concernés; même si nous faisons confiance à l'OFJ et à la Chaîne du bonheur, pour nous, le PDC, c'est très clair, le canton de Genève doit participer au dédommagement des victimes au titre d'une responsabilité collective et confédérale, en contribuant à ce Fonds national d'aide immédiate pour les enfants placés. Ainsi, nous vous demandons de renvoyer cette résolution au Conseil d'Etat. Je vous remercie.
M. Cyril Aellen (PLR). J'ai écouté avec attention mes préopinants, et en particulier la dernière intervenante, dont le groupe PLR partage entièrement les propos, avec probablement une légère nuance, même si je fais partie de ceux qui ont soutenu cette proposition de résolution dès le premier jour où elle a été déposée; je l'ai soutenue à la commission des finances de manière tout à fait claire, non pas en raison d'une responsabilité seulement, parce qu'on ne se trouve pas dans le cadre d'une punition de l'Etat de Genève, mais du fait que le canton de Genève se devait de participer à une solidarité nationale sur ce sujet, pas forcément de la manière dont le souhaitait initialement le Conseil d'Etat, qui ne voulait pas fuir ses responsabilités, mais désirait le faire de façon individuelle. Il y avait des critères objectifs qui ne dépendaient pas des cas plutôt peu nombreux à Genève - on peut s'en féliciter, même s'ils ne sont pas inexistants. Il se trouve que le canton de Genève a participé à ce fonds, on ne peut pas dire le contraire; il a participé, en effet, grâce à un généreux donateur concerné par cette situation. L'objectif de ce fonds était de venir en aide à ces enfants placés, non de punir les cantons, raison pour laquelle c'était un fonds de solidarité. Le PLR appuiera donc cette résolution, mais en partant du principe que le canton de Genève, grâce à un généreux donateur certes, a fourni sa part selon les critères qui avaient été fixés par l'ensemble des personnes entendues dans le cadre de la commission.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, il n'est plus temps de tergiverser: Genève ne peut se dérober à ses devoirs, Genève ne peut esquiver le devoir de réparation. C'est pourquoi notre groupe soutiendra la proposition de résolution telle qu'amendée.
M. Marc Falquet (UDC). Mesdames et Messieurs, durant les années 1940 à 1980, des dizaines de milliers d'enfants ont été placés abusivement, pour des raisons parfois futiles, et on leur doit - c'est la moindre des choses - une reconnaissance, d'abord, et un dédommagement. Je voudrais ajouter un élément: ce n'est pas moi qui l'invente, les directeurs d'établissements fermés pour les jeunes disent qu'il y a un net glissement du pénal vers le civil, c'est-à-dire qu'on enferme moins les enfants pour des raisons pénales, mais on les enferme pour des raisons civiles. Il y a énormément de foyers pleins: c'est un gros business qui marche très bien aujourd'hui, et j'espère que dans vingt ou trente ans, on ne va pas devoir dédommager les enfants qui aujourd'hui sont placés de force dans des foyers. Merci beaucoup.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je voulais simplement vous dire que depuis le dépôt de cette proposition de résolution, le canton a travaillé efficacement. Il est vrai, dans un premier temps, le Conseil d'Etat, parce qu'il n'y avait pas d'obligation d'intervenir financièrement à ce stade précoce qui était celui d'une aide d'urgence - je rappelle que nous en sommes maintenant à la deuxième étape, celle de la constitution du fonds, pour lequel le Conseil fédéral propose un montant de 300 millions... Mais la première étape, qui fait l'objet de cette résolution, était la participation à ce fonds d'aide immédiate. Nous voulions savoir quelle était la responsabilité réelle du canton de Genève dans la problématique. Vous savez que dans d'autres domaines, nos collègues confédérés ne manquent pas de faire appel à la solidarité genevoise, je dirais même avec excès. Je pense que certains cantons sont clairement mis en cause dans la prise en charge de ces enfants durant les périodes dites; nous considérons de notre côté que ces cantons-là sont prioritairement responsables avec la Confédération de la prise en charge du préjudice moral souvent considérable subi par ces personnes; et nous estimions que Genève n'avait pas à intervenir spontanément sur le plan financier pour un problème qui nous concerne certes moralement, mais qui en pratique ne devait pas concerner des enfants pour lesquels un placement à Genève avait été ordonné - je rappelle que ces placements ont eu lieu dans d'autres cantons, même s'il est vrai qu'ils ont souvent été ordonnés par le canton de Genève.
Quelques dizaines de cas se sont annoncés. Qu'avons-nous mis en place ? Nous avons fait en sorte que ces personnes puissent avoir accès aux archives et que les archives réunissent l'ensemble des pièces, puisque celles-ci sont dispersées selon les services qui s'étaient occupés des dossiers à l'époque. Nous considérions qu'il n'appartenait pas à ces victimes - puisqu'il faut les appeler ainsi, elles le sont réellement - d'aller faire le tour de tous ces services pour accéder à leurs archives. Nous avons donc mis en place une réponse adéquate par le centre d'aide aux victimes LAVI, qui les accompagne, aussi psychologiquement - on peut imaginer à quel point il peut être difficile pour ces personnes d'apprendre les circonstances dans lesquelles les décisions de placement avaient été prises, circonstances particulièrement douloureuses, qui font référence au contexte familial dans lequel ces enfants vivaient à l'époque. On a peu de difficultés à imaginer que pour un enfant, la vision du moment même est très modifiée: il idéalise, puisque c'est une sorte de sauvegarde psychologique qu'il met en place; il a tendance à idéaliser le noyau familial dans lequel il vivait et dont il est arraché. Or, se retrouver confronté brutalement à la réalité des faits tels qu'ils avaient été constatés et qui avaient amené les autorités à placer ces enfants ailleurs avec, bien sûr, tout le contexte moral et moralisateur de l'époque, qui n'est plus celui d'aujourd'hui, peut être particulièrement douloureux. Il ne suffit donc pas d'ouvrir les archives, il faut faire en sorte que cette prise de connaissance soit accompagnée par des professionnels; c'est ce que le Conseil d'Etat a mis en place. Les archives ont donc été ouvertes, le travail de récolte d'informations a été effectué, l'accompagnement des personnes a aussi été effectué, nous avons travaillé avec chacune de ces victimes qui le souhaitait pour préparer son dossier en vue de la présentation au fonds, d'abord le fonds d'aide immédiate; et la situation de ces personnes a été examinée en vue de cette aide immédiate qui visait précisément à répondre à des situations douloureuses dans un délai extrêmement bref, pour le motif bien compréhensible qu'il était difficile de demander à ces personnes d'attendre encore des années que nous fassions un geste concret de reconnaissance de leur souffrance. En cela, Genève considérait devoir faire son travail.
La somme demandée à Genève, de 288 000 F, sauf erreur, qui correspondait à la population, et non au nombre de cas genevois, a été prise en charge par un donateur anonyme, que j'ai rencontré avec M. le président du Conseil d'Etat, qui a souffert, qui nous a raconté son cheminement de vie, un cheminement douloureux, mais qui, finalement, a fait en sorte qu'il a eu la chance - c'est ainsi qu'il l'exprime - d'arriver dans une famille qui l'a accueilli comme son vrai enfant et lui a laissé quelques moyens. Cette personne a considéré de son devoir moral de faire ce geste, sans aucune amertume vis-à-vis de la position de Genève, allant même jusqu'à dire qu'elle comprenait cette position consistant à ne pas entrer en matière la tête dans le sac dans ce genre de processus. Cette somme a été versée au nom et pour le compte du canton de Genève par cette personne, qui a voulu faire cette démarche non pas en son nom propre, mais pour le compte de Genève, ce qui fait que Genève, aux yeux de ce fonds, a pleinement rempli ses obligations. (Remarque.) Aujourd'hui, nous sommes dans la seconde étape, comme je l'ai dit: nous allons devoir, au niveau fédéral, cette question de la mise... Monsieur Frey, je vous vois secouer la tête... Le Fonds national... (Remarque.)
M. Christian Frey. C'est la première étape ! (Commentaires.)
M. Mauro Poggia. Mais bien sûr, nous sommes dans la première étape s'agissant de cette proposition... (Remarque.) ...mais cette proposition de résolution a un train de retard, Monsieur Frey, puisque cette première étape est révolue ! (Remarque.) Donc cet objet, vous pouvez me l'envoyer, il n'est plus d'actualité: non seulement, chronologiquement les questions ont été prises en charge et réglées, mais nous avons satisfait à l'ensemble des demandes qui figurent dans cette résolution. Dans les faits, nous sommes à l'étape ultérieure au niveau fédéral, puisqu'on est en train de mettre en place à ce niveau la loi de création de ce fonds d'indemnisation de 300 millions, qui va ensuite fixer les critères d'indemnisation pour les personnes qui auront déposé des dossiers. Genève interviendra alors, évidemment, comme il lui incombe de le faire. Nous pouvons recevoir cette résolution, nous considérons que Genève a fait sa part, l'a faite même mieux qu'ailleurs, puisque ailleurs on a simplement ouvert des archives: nous n'avons pas fait qu'ouvrir des archives, nous avons donné l'accompagnement humain nécessaire et indispensable pour que la prise de connaissance de situations parfois douloureuses... (Remarque.) ...se fasse sans un dommage supplémentaire pour des personnes qui ont suffisamment souffert. Je vous remercie. (Remarque.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs, le vote sur le renvoi de cette résolution au Conseil d'Etat est ouvert.
Mise aux voix, la résolution 763 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 84 oui contre 3 non et 3 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous souhaite un bon appétit et vous retrouve à 20h30 !
La séance est levée à 18h50.