Séance du
jeudi 13 novembre 2014 à
20h30
1re
législature -
1re
année -
13e
session -
81e
séance
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Antoine Droin, président.
Assistent à la séance: MM. François Longchamp, président du Conseil d'Etat, Serge Dal Busco, Mauro Poggia et Luc Barthassat, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment d'un procureur. Je prie Mme le sautier de le faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Le procureur entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Monsieur, vous êtes appelé à prêter serment de vos fonctions de procureur. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme magistrat du Ministère public;
- de constater avec exactitude les infractions, d'en rechercher activement les auteurs et de poursuivre ces derniers sans aucune acception de personne, le riche comme le pauvre, le puissant comme le faible, le Suisse comme l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
A prêté serment: M. Antoine Hamdan.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de magistrats du pouvoir judiciaire. Je prie Mme le sautier de les faire entrer et l'assistance de bien vouloir rester debout. (Les magistrats entrent dans la salle du Grand Conseil et se tiennent debout, face à l'estrade.)
Mesdames et Monsieur, vous êtes appelés à prêter serment. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- d'être fidèle à la République et canton de Genève, comme citoyen et comme juge;
- de rendre la justice à tous également, au pauvre comme au riche, au faible comme au puissant, au Suisse comme à l'étranger;
- de me conformer strictement aux lois;
- de remplir ma charge avec dignité, rigueur, assiduité, diligence et humanité;
- de ne point fléchir dans l'exercice de mes fonctions, ni par intérêt, ni par faiblesse, ni par espérance, ni par crainte, ni par faveur, ni par haine pour l'une ou l'autre des parties;
- de n'écouter, enfin, aucune sollicitation et de ne recevoir, ni directement ni indirectement, aucun présent, aucune faveur, aucune promesse à l'occasion de mes fonctions.»
Ont prêté serment:
Mme Alessandra Armati, Mme Dania Maghzaoui, Mme Sophie Bagnoud, Mme Helena Verissimo de Freitas et M. Gregor Chatton.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment et vous souhaite une heureuse carrière. La cérémonie est terminée. Vous pouvez vous retirer. (Applaudissements.)
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: Mme et MM. Pierre Maudet, Anne Emery-Torracinta et Antonio Hodgers, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Michel Amaudruz, Anne Marie von Arx-Vernon, Michel Baud, Vincent Maitre, Guy Mettan, Jean-Charles Rielle, Pierre Ronget et Patrick Saudan, députés.
Députés suppléants présents: Mme et MM. Alexis Barbey, Maria Casares, Gilbert Catelain, Jean-Charles Lathion, André Pfeffer et Yvan Zweifel.
Annonces et dépôts
Néant.
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous traitons notre première urgence, soit la proposition de résolution 775. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Monsieur Cuendet, vous avez la parole.
M. Edouard Cuendet (PLR). Merci, Monsieur le président. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) J'aimerais seulement rappeler que cette résolution fait l'unanimité au sein de la commission législative, et qu'il s'agit cette fois-ci véritablement d'une seule rectification matérielle. Je vous invite donc à réserver un bon accueil à cette résolution.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix cette résolution.
Mise aux voix, la résolution 775 est adoptée par 73 oui (unanimité des votants).
Débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons à notre deuxième urgence, la motion 2242. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. La parole est à M. François Lefort.
M. François Lefort (Ve). Merci, Monsieur le président. C'est en tant que président de la commission de l'environnement et de l'agriculture que je vais vous présenter cet objet de consensus qui vous est arrivé, et vous relater son historique. Cette commission a traité simultanément trois motions qui abordaient le même sujet, c'est-à-dire la pollution. Il y a eu la motion 2187: «Réagissons, avec force et détermination, par la mise en place de mesures efficaces dès qu'un pic de pollution de particules fines est détecté», la motion 2200: «Diesel, agissons avant qu'il ne soit trop tard !» et la motion 2195: «Pour des mesures efficaces pour lutter contre les pics de pollution de l'air par les particules fines». Ces motions émanaient de différents partis - l'UDC, le PDC, les Verts, le parti socialiste - et ont été cosignées par un grand nombre de députés. (Remarque.) Et du PLR, merci de corriger, Monsieur Barrillier !
Des travaux passionnants, mais aussi passionnés, ont permis à toutes les parties intéressées - associations actives dans la mobilité, mais aussi associations professionnelles et spécialistes des milieux hospitaliers - de se déterminer sur ces motions, pour lesquelles la commission a également entendu le vice-président de la région Rhône-Alpes en charge de la santé. Ces travaux ont convaincu la commission de vous présenter un objet de consensus, soutenu à l'unanimité, qui matérialise ce qu'il est possible de faire lorsqu'il y aura des situations de pics de pollution à Genève. La présente motion invite donc le Conseil d'Etat à dresser un bilan des coopérations entre Genève, la France voisine et le canton de Vaud en matière de lutte contre la pollution de l'air; à élaborer un catalogue de mesures d'actions renforcées pour lutter efficacement contre le dépassement des limites de concentration en particules fines de taille inférieure à 10 microns prévues par le droit fédéral; à intensifier les mesures de prévention et d'information auprès de la population, ce qui est important; et, finalement, à rendre compte au Grand Conseil des actions effectuées dans ce sens via un rapport à émettre au cours du premier trimestre 2015. La commission de l'environnement vous recommande donc bien sûr, à l'unanimité, de soutenir cette motion et de la renvoyer directement au Conseil d'Etat, pour qu'un peu de mouvement ait lieu dans ce domaine, ces prochains mois, à Genève.
Mme Simone de Montmollin (PLR). Chers collègues, cette motion de commission a vu le jour grâce au travail de quelques personnes dans cette commission, et je les en remercie. Je pense qu'effectivement, on a réussi à limiter le travail de ce parlement et celui du Conseil d'Etat en réunissant en une motion trois objets qui avaient le même but. Depuis, on a aussi vu, dans le point presse du Conseil d'Etat, qu'un certain nombre de mesures étaient annoncées pour la saison 2014-2015; nous nous en félicitons et saluons cette décision, néanmoins nous souhaiterions tout de même obtenir, comme l'a dit le président de la commission, M. Lefort, un bilan sur toutes les actions menées durant cette campagne. C'est pourquoi nous soumettons cette motion à votre diligente attention. Nous vous remercions de lui faire bon accueil, ce qui permettra aux motionnaires des trois textes d'origine de les retirer et d'accélérer ainsi le travail de ce parlement. Je vous remercie.
Une voix. Bravo !
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues... (Le micro de l'orateur fait du bruit. L'orateur tente de le stabiliser.) Est-ce que ça va comme ça ?
Le président. Ne touchez pas votre micro, Monsieur le député, ça ira beaucoup mieux !
M. Thomas Wenger. Non, je ne le touche plus ! J'ai pris un Stabilo dans la main exprès pour ne plus le faire ! (L'orateur rit. Rires.) Cette motion de commission s'inspire effectivement de trois motions déposées au printemps, qui faisaient suite à des pics de pollution qui ont beaucoup inquiété tous les partis de ce Grand Conseil, on l'a vu dans les trois objets. Nous avons effectivement beaucoup travaillé au sein de la commission de l'environnement et de l'agriculture, nous avons effectué quelques auditions - j'y reviendrai tout à l'heure - et nous sommes dit qu'au lieu de revenir avec ces trois motions devant ce parlement, autant proposer une motion de commission signée par l'ensemble des commissaires, qui demande notamment, comme cela a été mentionné - je le répète rapidement - de dresser un bilan des coopérations entre Genève, la France voisine et le canton de Vaud. Pourquoi ? Parce que les particules fines, n'en déplaise à certains dans ce Grand Conseil, ne s'arrêtent pas à la frontière; on ne peut pas fermer les frontières et dire qu'on ne veut pas les particules fines de la France voisine ou du canton de Vaud, et inversement. C'est donc important de pouvoir travailler ensemble et d'avoir une coopération transfrontalière et transcantonale sur cette problématique. Différentes mesures étaient d'ailleurs prévues dans les motions qui ont été déposées, j'y reviendrai tout à l'heure. Pour rappel, ces particules fines et ces pics de pollution constituent un vrai problème de santé publique; je crois que c'est très bien que notre Grand Conseil, aujourd'hui, en prenne conscience avec cette motion, et que le Conseil d'Etat puisse le faire également. Le Conseil d'Etat a communiqué il y a une semaine sur une des mesures qui était prévue, c'est-à-dire limiter la vitesse sur l'autoroute, en l'occurrence l'autoroute de contournement, en cas de pic de pollution: c'est bien, mais ce n'est pas suffisant. Par conséquent, nous avons proposé d'autres mesures qui se trouvent dans la motion de commission: elles consistent à promouvoir l'utilisation des transports publics, notamment lors de pics de pollution, soit grâce à la gratuité des transports publics - nous avons eu pas mal de discussions à ce sujet - soit grâce à une baisse substantielle des tarifs. Ce sera au Conseil d'Etat de voir ce qu'il peut faire...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Thomas Wenger. ...mais je pense que c'est très important que les gens, pendant les pics de pollution, abandonnent leur voiture pour prendre les transports publics. Il y a également d'autres mesures d'incitation, dont celle qui va le plus loin, la circulation alternée, comme cela se fait à Paris ou dans d'autres villes en cas de pic de pollution... (Commentaires.) ...c'est-à-dire entre zéro et cinq fois par année, selon la météo. Il est donc important que des dispositions soient prises. Je n'ai plus le temps de parler davantage...
Le président. Non, il vous faut conclure !
M. Thomas Wenger. ...alors je vous encourage à voter cette motion de commission, qui montre le bon travail que nous avons effectué à la commission de l'environnement. Merci beaucoup.
M. Thomas Bläsi (UDC). Chers collègues, le groupe UDC, en présentant la motion 2200, souhaitait que des mesures efficaces et contraignantes soient mises en oeuvre. La réduction de l'émission des particules fines est en effet essentielle, puisque ces dernières touchent directement la santé publique et plus particulièrement celle des enfants. Nous sommes satisfaits que nos préoccupations aient été prises en compte, et notre groupe soutiendra donc la M 2242 - nous remercions, d'ailleurs, Mme Simone de Montmollin pour son travail d'explication et de liaison entre les différents motionnaires. Cependant, le groupe UDC reviendra si la mise en oeuvre de cette motion ne devait pas lui sembler suffisamment contraignante. Merci beaucoup.
M. Michel Ducommun (EAG). Monsieur le président, je dois reconnaître que lorsqu'il a été proposé de faire une motion de commission, j'étais un peu sceptique et je me suis abstenu. J'ai admis ensuite, lorsqu'on est arrivé à ce résultat, la qualité du travail qui avait été fourni. Le fait de mettre, dans cette motion, tous les éléments importants sur la question des pics de pollution, avec tout ce qu'ils représentent comme danger pour la santé, a créé une unanimité dans la commission, dont les membres étaient sur la même longueur d'onde. Je félicite en particulier Mme Simone de Montmollin pour le rôle qu'elle a joué dans l'établissement d'une motion sur laquelle nous pouvions tous nous entendre ! (Brouhaha.)
Une voix. Bravo !
M. Michel Ducommun. Je signale simplement qu'en effet, il est important non seulement que nous ayons une bonne motion, mais, puisque nous la renvoyons au Conseil d'Etat, que ce dernier aille dans une direction qui permette de diminuer les coûts. Ce qui est intéressant, c'est la différence entre les Français et les Suisses: il y a une collaboration, parce que la pollution s'occupe peu des frontières, mais les Français ont une vision plus large des maxima possibles hors pics - parce qu'on sait qu'il n'y a pas un moment particulier où la pollution est dangereuse; elle est toujours dangereuse. De ce point de vue là, la Suisse, elle, est plus exigeante. En revanche, la France est beaucoup plus sévère s'agissant du moment où il faut intervenir. Je pense donc que ce n'est pas mauvais de garder cela en tête. Quoi qu'il en soit, je crois que cette motion, suivie par le Conseil d'Etat, représentera un grand progrès par rapport à la défense de la santé dans notre ville !
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien va bien entendu voter cette motion. Le point positif, c'est que l'ensemble du parlement s'est rendu compte du problème lié aux particules fines et aux pics de pollution; c'est un pas très important. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Que l'entier des partis signe une motion de commission, c'est vraiment essentiel. Maintenant c'est vrai que, puisqu'il faut un consensus, la motion est un peu plus douce, entre guillemets, que celles qui ont été déposées précédemment. Nous serons donc extrêmement attentifs aux mesures prises par le Conseil d'Etat, et si nous considérons, dans les six mois qui viennent... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Bertrand Buchs. ...ou lors d'un prochain pic de pollution - qui risque d'avoir lieu cet hiver - que les mesures prises ne sont pas efficaces, ou qu'on se contente de simples rapports expliquant ce qui s'est passé, nous redéposerons la même motion qu'auparavant, soit la M 2187. J'annonce donc ici que nous retirons cette motion M 2187, mais que si les dispositions prises ne sont pas efficaces, nous la redéposerons dans six mois. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député, il est pris acte de ce retrait. La parole est à M. le député Jean-Marie Voumard.
M. Jean-Marie Voumard (MCG). Merci, Monsieur le président. D'entrée, je tiens à vous rassurer et à annoncer que le groupe MCG va tout de même soutenir cette motion 2242. Je voudrais simplement préciser que, comme l'a dit M. Wenger, les pics de pollution ne s'arrêtent pas aux frontières. Mais alors, quelles sont les mesures que vous allez prendre vis-à-vis de l'Etat français concernant les véhicules qui roulent à Genève... (Commentaires.) ...qui sont dans un état déplorable et qui polluent plus que les autres ? Il n'y a rien dans les invites. Par ailleurs, même si nous allons quand même soutenir cette motion, comme je l'ai indiqué, il y a autre chose qui me turlupine: l'interdiction de circuler des véhicules diesel utilisés à des fins non professionnelles, tel que cela figure dans votre invite. Je me réjouis de voir quelle suite sera donnée à cela et la réponse du Conseil d'Etat à cette motion.
M. André Python (MCG). Je voudrais juste souligner l'excellent travail qui a été effectué en commission sur cette motion: nous avions trois motions différentes, et nous avons tout de même réussi à trouver un consensus. Je félicite également Mme Simone de Montmollin pour son travail, et je vous invite à soutenir cette motion. Je vous remercie.
Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je me réjouis grandement du consensus qui a pu être établi à la commission de l'environnement quant à une volonté d'améliorer la qualité de l'air et de limiter les retombées de la pollution sur la santé, notamment en matière de coûts mais aussi de dégâts très importants.
Cela étant, comme mon collègue Bertrand Buchs l'a déjà dit, nous attendrons l'hiver et verrons de quelle manière seront traités les pics de pollution; nous évaluerons, à l'aune de ces réactions, la pertinence de redéposer notre motion, qui était nettement plus contraignante que celle-ci. Par ailleurs, je tiens à rappeler que le pic de pollution désigne un moment où la pollution est trop élevée, mais qu'il faut aussi agir par des mesures à long terme pour faire baisser la pollution de manière durable. Ces mesures à moyen ou à long terme, on peut les prendre notamment dans le domaine de la mobilité en réduisant le trafic motorisé, on peut évidemment les prendre dans le domaine du bâtiment, en particulier par rapport au chauffage, ou dans le trafic aérien. Il est essentiel d'envisager la question de la pollution de l'air non seulement en termes de pics de pollution, mais aussi d'amélioration générale de la qualité de l'air, pour ne jamais arriver à ces fameux pics. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) J'encourage donc l'ensemble du parlement à s'engager de la même manière et avec autant de consensus dans ces mesures à moyen et à long terme, pour améliorer globalement la qualité de l'air. Je vous remercie.
M. Luc Barthassat, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord j'aimerais féliciter la commission d'avoir pu trouver le moyen de regrouper en une seule motion toutes les propositions qui émanaient des différents projets. Vous savez - nous en avions parlé en début de législature - que les pics d'ozone, les pics de pollution, de particules fines, surviennent en hiver et en été. Je m'étais engagé à me calquer, par rapport à de nombreuses mesures, sur ce que fait la France; on peut mettre, par exemple, une limite de vitesse à 80 km/h, peut-être à l'essai pendant les deux premiers jours, et avec des contrôles un peu plus fermes le troisième jour. Il y a de nombreuses autres possibilités en cours d'étude, et si certaines sont réalisables, d'autres le sont un petit peu moins. On a évoqué la gratuité des TPG: nous sommes en pourparlers, ces temps, avec eux, pour essayer de voir si on ne peut pas mettre en place des mesures concernant plutôt le demi-tarif, parce qu'évidemment, la gratuité totale a un coût, et cela dépasse les 100 000 F par jour. Or, vous savez que les TPG sont plutôt en train de chercher des sous que de faire des cadeaux à toute la république.
Personnellement, je suis très sensible à ce qui se fait, à ce qui pourrait se faire, à ce qui peut être étudié, et, tout comme l'a fait la commission, à la collaboration pour trouver une solution, parce que je crois que c'est ainsi que les choses avancent. Il s'agit de sujets qui ne sont pas tellement politiques; il n'y a pas besoin d'être écologiste, de droite, de gauche ou du centre pour être sensibilisé à ce genre de questions, auxquelles nous serons confrontés toujours davantage. Et je pense qu'en regardant les choses de manière concrète et tous ensemble, nous pourrons nous mettre d'accord sur des mesures, sur lesquelles nous sommes en train de travailler. Le Conseil d'Etat, que je représente, accueille donc avec bienveillance cette motion consensuelle, soutenue de part et d'autre de cet hémicycle. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets donc la proposition de motion 2242.
Mise aux voix, la motion 2242 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 80 oui et 5 abstentions. (Quelques applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Je passe la parole à M. Lefort. (Remarque.) Non. Dans ce cas, à M. Wenger. Allez-y, Monsieur. (Un instant s'écoule.) Si le micro veut bien marcher ! Voilà, c'est bon.
M. Thomas Wenger (S). Voilà, merci, Monsieur le président ! Suite au vote de cette motion de commission, le groupe socialiste retire la M 2195.
Le président. Merci, Monsieur, il en est pris acte. Je passe la parole à M. Bläsi.
M. Thomas Bläsi (UDC). Merci, Monsieur le président. Le groupe UDC retire la M 2200.
Le président. Merci, Monsieur le député, il en est pris acte.
Débat
Le président. Nous traitons le point suivant de notre ordre du jour, la proposition de résolution 774. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. (Brouhaha.) Je passe la parole à Mme Fontanet.
Mme Nathalie Fontanet (PLR). Merci beaucoup, Monsieur le président. Monsieur le président, chers collègues, notre canton est fier de son bataillon de carabiniers 14; de nombreux bancs de cet auditoire le sont également, ce qui n'est manifestement pas le cas de ceux d'en face qui ricanent d'ores et déjà. Il s'agit du dernier corps de troupe genevois, et son importance est indéniable, tant au niveau historique que pour des raisons de sécurité. Il convient de rappeler que c'est le général Guillaume-Henri Dufour qui a fondé la Société militaire des carabiniers genevois en 1824, avant que ne soit créé, la même année, son équivalent sur le plan confédéral. Le bataillon de carabiniers 14 en est en quelque sorte son émanation. Ce bataillon participe à l'ensemble des manifestations patriotiques à Genève; il fournit également des hommes du détachement d'honneur de la bannière cantonale. En d'autres termes, le dénommé «bat 14» par les initiés est l'héritier d'une longue tradition patriotique genevoise et fait, dès lors, partie de notre patrimoine culturel militaire.
Mais ce n'est pas tout, car le bataillon de carabiniers 14 est le seul corps de troupe d'infanterie genevois; il est en mesure de fournir des prestations de base dans le domaine de la défense, mais aussi de mener à bien des opérations de sécurité sectorielles. Vous n'ignorez pas, chers collègues, que Genève constitue un élément clef de notre système de défense nationale, notamment en raison de sa situation géographique, de sa vocation internationale, de sa place financière et de ses infrastructures. La sécurité aux abords de l'aéroport pourrait par exemple être confiée au bataillon de carabiniers 14. Or, contre toute attente, selon l'état actuel du projet de développement de l'armée intitulé «DEVA», dont l'entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2017, notre canton devrait être durement touché avec la dissolution annoncée du bataillon de carabiniers 14. Notre Conseil d'Etat est d'ores et déjà intervenu à ce sujet auprès des autorités fédérales, au mois de mars de cette année. Le débat aux Chambres a cependant commencé sans qu'aucun changement s'agissant du sort réservé à ce bataillon de carabiniers 14 soit annoncé. Pour ces motifs, Mesdames et Messieurs, le groupe PLR vous demande de bien vouloir renvoyer cette résolution directement au Conseil d'Etat, l'invitant à tout mettre en oeuvre auprès des autorités fédérales pour obtenir le maintien du bataillon de carabiniers 14. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
M. François Lefort (Ve). Je dois le reconnaître, cette résolution n'est pas complètement dénuée d'intérêt; elle nous apprend plein de choses importantes ! Une vaste réforme de l'armée nommée «Développement de l'armée» est en cours. Une conséquence majeure de cette réforme sera la diminution de moitié des effectifs, qui vont passer d'environ 200 000 individus à 100 000, ce qui signifie que 72 bataillons doivent être dissous pour atteindre cet objectif. Parmi ceux-ci, bien sûr, le bataillon de carabiniers 14, basé à Genève. Mais finalement, ce ne sont là que de bonnes nouvelles ! La réforme de l'armée suit son cours ! D'après le nom de cette réforme - et là nous ne pouvons que supposer que c'est une forme d'humour suisse allemand que d'avoir appelé «Développement de l'armée» un effort de réduction aussi drastique des effectifs - son développement continue. C'est un effort de réduction sévère, certes, mais nécessaire, et proposé par le Conseil fédéral ! Nous, les Verts, sommes particulièrement reconnaissants au Conseil fédéral de mener cette réforme indispensable pour le pays, il faut le dire. Une fois n'est pas coutume, nous sommes satisfaits de ce développement de l'armée... (Commentaires.) ...ou plutôt de cette décroissance massive ! Il est des activités qui doivent décroître pour en laisser croître d'autres. Et c'est ce que fait le Conseil fédéral ! C'est ce qui lui permettra de réduire les coûts de la défense du pays à ce qui est nécessaire et de faire face à d'autres chantiers stratégiques, ceux de la transition énergétique par exemple, qui vont s'avérer extrêmement gourmands en fonds. Alors nous qui sommes pour une fois satisfaits de voir le Conseil fédéral mettre un peu de décroissance dans sa politique, nous sommes profondément éberlués, je dois le dire, de voir les grands pourfendeurs habituels des dépenses prétendument somptuaires de l'Etat, les exterminateurs patentés de la fonction publique, ceux qui chaque année nous font le grand cirque Knie du chantage au budget équilibré - oui, c'est vous, Mesdames et Messieurs du PLR - battre tambour, sonner clairon, monter au créneau pour sauver l'historique bataillon 14, qui a deux cents ans, mais qui s'appelait le bataillon 72 ! (Rires.)
Une voix. Non ?
M. François Lefort. Eh oui ! L'historique bataillon 14 a deux cents ans et a été refondé en 2010, sans que personne se soit ému de sa première disparition ! Mesdames et Messieurs, restons sérieux ! Le développement de l'armée est inéluctable. Et il n'est pas raisonnable de s'y opposer...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. François Lefort. ...si on veut une armée efficace et recentrée, et surtout ce n'est pas solidaire des 71 autres bataillons «Schnügrüz» qui vont disparaître ! (Commentaires.) Ce n'est pas judicieux et c'est même très égoïste et peu respectueux des 71 autres villages «Schnügrüz» qui vont voir leurs bataillons s'éteindre et qui n'en ont pas envie ! Imaginez l'exemple que vous allez donner ce soir !
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. François Lefort. Alors nous, les Verts, respectueux du Conseil fédéral et de sa politique de décroissance militaire exemplaire, nous ne soutiendrons pas cette résolution...
Le président. Merci, Monsieur le député !
M. François Lefort. ...car nous nous conformons aux décisions du Conseil fédéral en la matière ! Et nous serons solidaires pour que Genève fasse sa part ! Merci ! (Applaudissements.)
M. Philippe Morel (PDC). Nous sommes également pour un développement de l'armée, mais pour un développement équitable, parcimonieux et géographiquement juste. Et par rapport à cela, Genève a une place. Le bataillon 14 a été créé à une époque où l'écologie existait mais pas encore les écologistes. (Rires. Applaudissements.) Un peu facile ! En effet, en 1824 - ça remonte à loin - le colonel Guillaume-Henri Dufour fonde la Société suisse des carabiniers. Il n'était pas général à ce moment-là. La naissance de cette société fait l'objet d'une demande aux seigneurs du Conseil d'Etat de l'époque; elle a pour vocation l'instruction au tir, et ses membres participent aux fêtes de tir fédéral où ils s'illustrent régulièrement, et ce aujourd'hui encore. En 1848, le gouvernement genevois de l'époque crée le corps cantonal des carabiniers à six compagnies de 80 hommes, affectés à la réserve cantonale. En 1862, le conseiller d'Etat et conseiller national Maurice Vautier ouvre la voie en demandant à l'Assemblée fédérale d'accorder au canton de Genève une compagnie d'élite et une compagnie de Landwehr. La compagnie d'élite ainsi formée donnera naissance à la compagnie de carabiniers, c'est juste, numéro 72; mais les nombres importent peu, seuls les hommes qui la constituent nous tiennent à coeur, et ce sont des Genevois. Cette compagnie va successivement changer d'appellation et de numérotation au cours du temps jusqu'à la création, en 1968, du bataillon de carabiniers 14, qui est donc directement issu, comme bataillon strictement genevois, de l'initiative prise en 1824 par le colonel Dufour. En 1980, cette unité genevoise sera remaniée à l'occasion de la réorganisation de l'armée 80. Après une disparition très transitoire, mais qui à l'époque déjà avait été combattue, le bataillon de carabiniers 14, en tant qu'unité de la République et canton de Genève, est recréé, sur la base de troupes genevoises existantes provenant du bataillon de carabiniers 1 et du bataillon d'infanterie 19, tous deux genevois ! L'objectif du bataillon de carabiniers 14 sera d'établir la disponibilité de base de manière uniforme afin de pouvoir remplir les missions d'origine de l'infanterie, ainsi que de créer un esprit de corps solide basé sur l'héritage déjà existant et la tradition émanant du colonel Dufour. Le bataillon de carabiniers 14 étant organisé comme un bataillon d'infanterie, il peut accomplir les multiples tâches de sécurité que ma préopinante a mentionnées...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Philippe Morel. ...soit des tâches de protection et de défense qui peuvent lui être confiées sur le territoire du canton de Genève. Le bataillon de carabiniers 14 est la consécration officielle de l'existence, à Genève, d'une tradition de carabiniers bien ancrée dans l'histoire moderne de la république. Il est l'émanation et l'esprit d'une armée de milice telle que nous la voulons, telle qu'elle est voulue par nos autorités cantonales et nos autorités fédérales. De nos jours, l'armée est un instrument destiné à ramener la paix, à rétablir l'harmonie...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Philippe Morel. ...et à protéger la démocratie - je vais conclure, Monsieur le président. Le bataillon de carabiniers 14 a pour cela un exemple significatif avec le colonel Dufour, dont il est l'émanation même par l'initiative que le colonel a prise en 1824.
Le président. C'est terminé, Monsieur.
M. Philippe Morel. Nous vous recommandons donc d'accepter la résolution s'opposant à la dissolution...
Le président. Merci, Monsieur !
M. Philippe Morel. ...du bataillon de carabiniers 14 ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Pierre Vanek (EAG). Le député Morel nous a fait à l'instant un cours d'histoire sur les développements, les fusions, les machins et les trucs de cette unité militaire. Mais enfin, quand même, Mesdames et Messieurs les députés, un peu de mémoire ! (Protestations.) Si vous voulez faire de l'histoire, nous allons en faire un peu ! Le 26 novembre 1989, Mesdames et Messieurs, une majorité des citoyens et citoyennes genevois a voté, démocratiquement, en faveur de l'initiative populaire «Pour une Suisse sans armée et pour une politique globale de paix» ! (Commentaires.) Une majorité de nos concitoyens genevois, Mesdames et Messieurs du Mouvement Citoyens Genevois, a voté pour la dissolution de cette armée sur laquelle on vient ici pleurnicher ! (Protestations.) Pleurnicher ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Pleurnicher ! Et ce au nom de considérations stupides liées au prestige ! Je lis dans l'exposé des motifs que c'est dramatique parce que cela fait plus que dix ans que l'on n'a aucun officier général en activité émanant du canton de Genève ! Eh bien Mesdames et Messieurs, je m'en félicite ! Non seulement le peuple et les citoyens genevois ont voulu qu'on n'ait aucun officier général provenant de Genève, mais ils ont également voulu qu'on n'ait aucun soldat venant de Genève... (Protestations.) ...puisqu'il s'est prononcé majoritairement pour la dissolution de l'armée, dont un petit pan part en lambeaux ! Alors bien sûr, ce sont des dépenses pour la gloire, on dit que tout ça est très prestigieux, qu'il faudrait qu'on ait un officier général; mais on refait l'histoire en oubliant le fait démocratique essentiel que je vous ai rappelé ici, soit la votation du 26 novembre 1989, et puis on finit avec des arguments de défense nationale ! Non mais, Mesdames et Messieurs, on croit rêver ! Là aussi, vous ne connaissez pas l'histoire de ce pays !
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Pierre Vanek. Jamais Genève n'a été incluse sérieusement dans un périmètre de défense nationale du point de vue helvétique ! (Protestations.) Jamais ! Et, Mesdames et Messieurs...
Le président. Il vous reste vingt secondes, Monsieur.
M. Pierre Vanek. ...je conclurai par là, on invoque la sécurité autour de l'aéroport pour maintenir une unité militaire: non, Mesdames et Messieurs ! La sécurité et l'ordre dans ce canton doivent être assurés, en temps de paix, et le maintien de la sécurité pour des activités civiles...
Le président. C'est terminé, Monsieur !
M. Pierre Vanek. ...comme celles de l'aéroport doit être garanti par les forces de l'ordre...
Le président. Merci !
M. Pierre Vanek. ...par la police et non pas...
Le président. Merci, Monsieur !
M. Pierre Vanek. ...par Dieu sait quel bataillon de carabiniers ! (Protestations.) Ce n'est pas la fonction de l'armée !
Le président. C'est terminé, Monsieur Vanek !
M. Pierre Vanek. Alors l'armée, bien sûr, cherche à justifier son existence inutile...
Le président. Monsieur Vanek, c'est terminé, s'il vous plaît !
M. Pierre Vanek. ...parasitaire... (Le micro de l'orateur est coupé. L'orateur continue à s'exprimer hors micro. Protestations.)
Le président. Monsieur Vanek, c'est terminé ! Monsieur Vanek, s'il vous plaît ! (L'orateur continue à s'exprimer hors micro. Vives protestations. Chahut.) Monsieur Vanek ! (Quelques applaudissements.) Je prie chacun de respecter les temps de parole, pour une question d'équité. Monsieur Lussi, vous avez la parole.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je dirai simplement que l'histoire contemporaine et l'histoire récente ont démontré que tous ceux qui ont, par illusion, cédé aux sirènes des antimilitaristes de gauche l'ont payé excessivement cher, et je crois que cela se manifeste encore aujourd'hui. (Commentaires.) Permettez-moi juste, Mesdames et Messieurs, après l'excellent exposé de la rédactrice de cette résolution, de dire que nous sommes parfois attachés aux mots, aux principes, mais aussi à toute cette histoire qui fait notre tradition, et j'aimerais donc souligner que le bataillon 14 n'est pas le dernier corps de troupe de Genève, mais le dernier corps de troupe d'infanterie attribué au canton de Genève. En effet, comme vous le savez, depuis 2004, il n'y a plus de troupes cantonales au sens où on l'entendait, comme l'a si bien décrit mon préopinant le député Morel, mais des troupes à ancrage cantonal et régional. Mesdames et Messieurs les députés, on ne va pas rallonger, mais cette culture helvétique que nous aimons, c'est l'ensemble des formes acquises de comportement d'un groupe d'individus unis par une tradition commune. Il est clair que le sens des traditions varie selon les sensibilités politiques, mais en ce qui me concerne, je suis honoré et fier d'être un modeste élément de ce groupe et d'intervenir fermement en faveur de cette résolution, que je vous prie d'accepter. (Quelques applaudissements.)
M. Thierry Cerutti (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, naturellement, le Mouvement Citoyens Genevois soutiendra cette résolution de manière unanime. Pourquoi ? Parce que vous avez toutes et tous, à juste titre, relevé l'histoire de ce bataillon, qui a aujourd'hui plus de deux cents ans. Je suis un peu désolé que Pierre Vanek reste figé sur l'esprit militaire de l'objet; personnellement, je rappelle simplement que sans le bataillon 14, on ne pourrait pas, aujourd'hui, réaliser des projets de vie civile ! Lorsqu'il y a eu les inondations à Lully, par exemple, heureusement que le bat 14 était là !
Une voix. Bravo !
M. Thierry Cerutti. Sans le bat 14, on aurait eu des soucis d'infrastructures, des soucis de personnel, des soucis de travail. Grâce à eux, le problème a pu être résolu. Je rappelle aussi que dans le cadre du plan catastrophe, si demain Genève subit un accident quel qu'il soit - naturel, nucléaire ou autre - sans le bataillon 14 nous serions embêtés, nous aurions des difficultés à pouvoir fournir des services et des prestations à la population. Le Mouvement Citoyens Genevois fait donc abstraction du côté militaire, il pense surtout à l'aspect civil, à l'aide à la population et à la proximité avec cette population. Je rappelle aussi que le bat 14 est formé de citoyens qui représentent le peuple genevois, qui représentent des gens comme vous et moi - enfin, peut-être pas comme François Lefort parce qu'il n'a pas fait l'armée - et que ces citoyens sont des miliciens fiers d'avoir porté, un jour dans leur vie, cet uniforme. (Quelques applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de résolution vise peut-être à sauver le bataillon des carabiniers, mais en l'occurrence j'ai surtout l'impression que les signataires sont un bataillon d'hypocrites à eux seuls ! (Huées.) Proposer une telle résolution dans ce Grand Conseil quand on sait qu'au niveau fédéral, vos partis, année après année, demandent des mesures d'austérité, des mesures d'économie, proposent des baisses d'impôts pour les plus riches... (Protestations.) Et au final, qu'est-ce que vous faites ? Vous venez non pas vous battre pour des prestations sociales en faveur des personnes qui en ont besoin, mais vous sortez l'artillerie lourde pour sauver un monument historique ! Parce que j'ai bien entendu les arguments avancés; évidemment, si ce bataillon a bientôt deux cents ans, c'est très bien ! Mais ce n'est plus un problème militaire, c'est un problème de patrimoine ! Donc s'il faut sacrifier un des derniers membres de ce bataillon... (Remarque.) ...pour l'empailler au Musée d'histoire naturelle, et passer les carabiniers d'Offenbach en arrière-fond musical, eh bien pourquoi pas ! Nous soutiendrons cette proposition ! Mais, Mesdames et Messieurs les députés, si vous dites que c'est un patrimoine historique, alors à ce moment-là gardez une armée d'il y a deux siècles ! Ne venez pas proposer d'acheter des Gripen qui ne servent à rien, ne venez pas proposer de moderniser l'armée ! Si les besoins en défense évoluent, c'est bien parce qu'aujourd'hui on pense qu'il est plus efficace de réduire le nombre de bataillons, qu'il est même possible de les déplacer - vous avez peut-être déjà entendu parler des hélicoptères, qui permettent éventuellement de transporter des troupes ! Même pour des besoins civils, Mesdames et Messieurs les députés, il est tout à fait possible d'utiliser des militaires qui viennent d'ailleurs ! (Protestations.) Au demeurant, ça favorise les échanges... (Protestations. Le président agite la cloche.) ...et la solidarité à travers la Suisse.... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Roger Deneys. ...solidarité que vous mettez en cause à longueur d'année avec vos coupes absurdes au niveau fédéral ! Alors, Mesdames et Messieurs les députés de droite, prenez contact avec vos élus fédéraux et essayez simplement d'être cohérents et de penser que quand vous votez des économies, ça a des conséquences aussi à Genève...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Roger Deneys. ...et qu'il faut les assumer. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de refuser cette résolution, mais d'accueillir bien volontiers une proposition de mise au musée d'un des derniers représentants de ce bataillon. (Exclamations. Applaudissements.)
M. Raymond Wicky (PLR). Permettez à un des hypocrites signataires de prendre la parole trente secondes, pour rappeler d'abord à M. Vanek - et vous aurez la gentillesse de transmettre, Monsieur le président - qu'il a juste oublié la votation de novembre 2001, où on a plutôt plébiscité... (Remarque.) ...même à près de 60%, en ordre de grandeur, l'armée de conscription. Ça, c'est le point 1.
Deuxièmement, j'aimerais enchaîner sur les propos de M. Cerutti pour rappeler qu'il existe, dans notre pays, un concept de protection de la population, comme il l'a dit lui-même, qui englobe toutes les composantes, y compris la composante militaire. On peut donc être pour ou contre l'armée, chacun est libre de ses convictions, c'est bien évident; mais on ne peut quand même pas négliger les décisions fédérales et la mise en oeuvre d'une certaine politique de sécurité à cet échelon ! Merci ! (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Murat Julian Alder, à qui il reste deux minutes.
M. Murat Julian Alder (PLR). Merci, Monsieur le président. Contrairement à certains dans ce parlement, j'aime mon pays, j'aime mon canton, et j'aime mon bataillon. (Exclamations. Applaudissements. Le président agite la cloche.) Et parce que je suis fièrement incorporé au bat car 14, j'entends m'infliger la sanction prévue à l'article 24. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets maintenant aux voix cette résolution.
Mise aux voix, la résolution 774 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 55 oui contre 27 non. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Débat
Le président. Nous abordons la quatrième urgence de notre soirée. Nous sommes en catégorie II, pour une durée de quarante minutes. Je passe la parole à M. Frey. Allez-y, Monsieur le député.
M. Christian Frey (S). Merci, Monsieur le président. La votation sur une caisse maladie publique en Suisse a eu lieu, et il s'agit maintenant d'éviter que le soufflé ne retombe. La situation est claire: une majorité de cantons romands et de la population romande veut un changement concernant le fonctionnement des caisses maladie. La proposition de motion 2232 demande que le Conseil d'Etat se mobilise, en collaboration avec les autres cantons romands - et nous pensons plus particulièrement au Jura, à Neuchâtel et à Vaud - et à travers la CLASS, la Conférence latine des affaires sanitaires et sociales, d'une part, et la CDS, la Conférence suisse des directeurs cantonaux de la santé, d'autre part, pour obtenir une modification de la législation fédérale de manière à rendre possible la création de caisses publiques cantonales et/ou régionales. Puisque les choses se passent de manière groupée, cette motion est complétée par deux propositions de résolutions dont j'aimerais brièvement parler.
La première demande la séparation de la pratique de l'assurance de base et des assurances complémentaires privées. Pour mémoire, au niveau suisse, le parti socialiste avait déposé une motion il y a quelques années, qui avait été refusée très largement. Les médecins genevois avaient également lancé une initiative populaire qui demandait la même chose, mais comme cette initiative populaire n'avait obtenu que 70 000 signatures, elle a été traitée au Parlement fédéral comme une simple pétition. Cette pétition était en suspens devant la commission de la sécurité sociale et de la santé du Conseil des Etats, dans l'attente du vote sur la caisse publique. Ce vote ayant maintenant eu lieu, elle sera traitée le 17 novembre prochain - je n'invente rien, c'est lundi prochain - en même temps que le projet du Conseil fédéral à ce sujet. (Remarque.) Ce n'est pas nécessairement un enterrement, il faut rester optimiste !
L'autre résolution demande la création d'un fonds fédéral pour la gestion des réserves imposées aux assureurs. Sans se prononcer sur les chances d'aboutissement de ces deux résolutions, notre groupe vous invite à soutenir largement les trois objets, qui sont complémentaires et devraient permettre à terme de trouver des solutions à ce problème lancinant qui nous occupe depuis de longues années: les caisses maladie, l'augmentation des primes et les dérives liées. A titre d'exemple, j'aimerais terminer en disant que les socialistes, en 2011, avaient déposé un projet de loi, le PL 10547, qui demandait d'accorder des subsides aux personnes qui consacraient plus de 8% de leur revenu déterminant au paiement de leurs cotisations de caisse maladie. Aujourd'hui - et on en parle toujours, heureusement d'ailleurs, à la commission des affaires sociales - on en est plutôt à des estimations de 12%, 15% voire 20%, consacrés par les ménages au paiement des caisses maladie. Tout cela nous incite, Mesdames et Messieurs, à dire qu'il est urgent d'agir et de ne pas laisser retomber ce soufflé. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'accepter cette motion ainsi que les deux résolutions complémentaires. Je vous remercie.
M. Bertrand Buchs (PDC). Si nous avons déposé la proposition de résolution 772, c'est parce que le problème de la gestion des caisses maladie entre caisses de base et caisses complémentaires n'a pas été résolu, surtout après la votation sur la caisse publique. Cela fait longtemps que les médecins genevois attirent l'attention sur ce problème, et j'avais été l'instigateur de l'initiative pour laquelle nous avions essayé de récolter 100 000 signatures; malheureusement, la Suisse allemande n'avait pas participé.
Ce qui se passe dans la pratique, c'est que les assurances de base et les assurances privées sont établies dans les mêmes lieux; il n'y a pas de différence, et on ne sait pas comment circulent les flux financiers. On n'a aucune idée quant à savoir si c'est la base ou la privée qui paie les salaires, par exemple. Une secrétaire peut faire les deux choses dans la même journée, et on ne sait pas du tout qui paie les locaux, qui paie les bureaux, qui paie les employés. Et puis le gros problème - cela a été mis en évidence, on l'a vu par rapport aux réserves - est qu'on ne sait pas s'il y a des flux financiers entre la caisse de base et la caisse privée, sachant que la caisse de base est une caisse qui ne peut pas faire de bénéfices, qu'elle doit théoriquement redonner aux assurés les montants prélevés en trop, ce qui n'est pas le cas puisqu'on gonfle les réserves à la place de rendre aux assurés, alors que les caisses privées peuvent, elles, faire des bénéfices et les répartir à la fin de l'année entre les différentes personnes qui les gèrent. Il est d'ailleurs intéressant d'aller actuellement sur le site de la «Tribune de Genève»: on vient de publier le chiffre exact des rémunérations des anciens dirigeants du Groupe Mutuel. Or, vous savez que la caisse privée du Groupe Mutuel était sous enquête de la FINMA, et que l'une des parties de l'enquête concerne la rémunération de la direction. Vous allez donc apprendre que l'ancien directeur du Groupe Mutuel gagnait 2,2 millions par année, et son adjoint 1,8 million par année ! Pour diriger une caisse maladie privée ! Il y a donc un gros problème éthique et un gros problème de gestion de fonds; il est essentiel de séparer les caisses de base et les caisses privées, physiquement et juridiquement ! On ne peut pas accepter de continuer comme ça. (Brouhaha.) Le Conseil fédéral s'en était rendu compte puisqu'il avait accepté de proposer notre initiative, finalement déposée comme pétition, mais M. Berset avait repris le texte pour proposer un contreprojet sur la caisse publique, qui demandait exactement cela. Les Chambres fédérales ont ensuite décidé de ne pas accepter le contreprojet et de faire voter le plus vite possible la caisse publique pour l'éliminer. Donc si on ne prend pas des décisions drastiques sur la séparation financière entre les caisses de base et les caisses privées, Mesdames et Messieurs, vous allez probablement continuer à payer beaucoup trop cher votre caisse de base, parce qu'une partie de l'argent va dans les poches des privés. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, la proposition de résolution 772 part également du principe acquis lors de la votation du 18 septembre sur la caisse publique, où nous avons pris acte du fait que les Suisses - pas les Genevois en particulier, mais les Suisses - souhaitaient le maintien d'une concurrence dans ce secteur et l'absence de centralisation sous forme d'une caisse publique. Juste avant cela, suite à une mise au congélateur pendant quelques mois, les Chambres fédérales ont subitement et rapidement accepté, la veille de la votation, une loi sur la surveillance des assureurs-maladie, en espérant évidemment faire capoter le résultat du vote sur la caisse. Cette loi sur la surveillance permet de donner à la Confédération un certain nombre d'armes pour intervenir auprès des assureurs, mais elle n'est à notre avis pas suffisante, notamment par rapport au problème de gestion des réserves. Qu'en est-il ?
Le problème des réserves accumulées de façon indue a été soulevé déjà en 2006, et porté à Berne par les conseillers d'Etat Maillard et Unger. Il a fallu attendre 2014, soit huit ans, pour que la Confédération admette enfin que, pour Genève, ce sont plus de 400 millions de francs qui ont été perçus en trop au titre des réserves, une somme à peu près identique pour les Vaudois, quand elle atteint près de 600 millions pour les Zurichois. Nous patienterons donc jusqu'à fin 2014, voire 2015 pour être remboursés, et le remboursement ne portera que sur le tiers de ce qui a été perçu par les assureurs. Les réserves permettent normalement aux assureurs d'engranger des sommes importantes par tête d'assuré, qui correspondent au 10% ou 15% de vos primes suivant le nombre d'assurés couverts. En moyenne, en 2006, le total accumulé des caisses était de plus de 40%, alors qu'au maximum il devrait à peine dépasser 15%. Le problème de ces réserves, c'est qu'elles sont constituées par assuré. Or, chaque année, à la période où on peut quitter son assurance, comme à l'heure actuelle, puisqu'on a jusqu'au 30 novembre pour le faire, c'est un million d'assurés, Mesdames et Messieurs, chers collègues, qui changent de caisse. Les réserves constituées sur leurs têtes restent acquises à l'ancien assureur, et la nouvelle caisse doit en reconstituer d'autres, au risque, si elle reçoit trop d'assurés parce que ses prix sont favorables, de devoir augmenter des primes qui pourtant étaient alléchantes. A notre avis, il n'y a donc pas d'utilité à ce que ces réserves soient gérées par chaque assureur, qui évidemment en fait des placements qui parfois - cela s'est avéré dans le passé - sont à risque et nécessitent ensuite d'augmenter les primes pour compenser une mauvaise gestion. La meilleure solution nous paraît donc la constitution d'un fonds fédéral, dont la gestion doit être confiée à un conseil de fondation composé de représentants de la Confédération, des cantons et des assureurs. Je vous prie, dès lors, de faire bon accueil à cette résolution ainsi qu'à la résolution 773 et à la motion 2232. Je vous remercie ! (Quelques applaudissements.)
M. Cyril Aellen (PLR). Mesdames et Messieurs, j'ai procédé à la lecture des trois projets qui nous sont soumis aujourd'hui, et j'ai constaté que les contradictions étaient assez nombreuses: certains nous demandent de tout centraliser avec une caisse et des réserves uniques, quand d'autres veulent au contraire pouvoir cantonaliser ou régionaliser la chose. Ce sont des objectifs tout à fait distincts. On nous explique qu'il faut diminuer les interlocuteurs administratifs, tout en nous disant qu'on doit impérativement séparer les complémentaires et la base, ce qui multipliera dans le même temps les démarches administratives; on nous dit aussi que les coûts de la santé ont bien moins augmenté que les primes - on passerait presque du simple au double: j'imagine donc qu'aujourd'hui les coûts de la santé représentent moins de la moitié des primes qui nous sont payées ? Non, ce n'est pas très sérieux. En revanche, ce qui me paraît important, c'est que ces objets contradictoires sont signés par les mêmes personnes, je m'interroge donc un petit peu. Tout cela pour dire encore qu'il faudrait avoir une caisse non seulement unique mais publique ! Je me réjouis de voir comment nous allons faire pour avoir des coûts moindres, compte tenu des salaires qu'on a l'habitude de verser dans la fonction publique par rapport au secteur privé. Je remarque d'ailleurs que ceux qui donnent des leçons de rémunération viennent de secteurs tout à fait précaires, dont il faudra aussi se préoccuper. Il m'apparaît donc urgent de renvoyer ces objets en commission, pour que nous puissions examiner quelles sont les vraies problématiques et décider quelles sont les pistes à explorer, le cas échéant. Et puisqu'il faut tenir compte des spécificités locales, je voulais juste attirer votre attention sur le fait que certaines communes sont opposées à la caisse publique. Il faudra donc quand même, puisqu'on découpe le territoire, que celles-ci puissent conserver la liberté qui est la leur et qu'elles ont souhaitée dans l'urne. (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. J'imagine que votre demande de renvoi concerne la commission de la santé ? (M. Cyril Aellen approuve.) Merci. Je passe la parole à Mme la députée Caroline Marti.
Mme Caroline Marti (S). Merci, Monsieur le président. La rentrée scolaire, la première feuille du marronnier officiel et les augmentations des primes d'assurance-maladie reviennent irrémédiablement, année après année, ponctuer la vie des Genevoises et des Genevois. (Remarque.) Trêve de plaisanterie; le sujet qui nous occupe ce soir est grave puisque l'augmentation des primes d'assurance-maladie constitue une charge de plus en plus importante pour le budget des ménages genevois. A cela s'ajoutent, cette année, des mesures budgétaires que le Conseil d'Etat, dans son grand manque de sagesse, a additionnées à cette situation; je pense notamment à la suppression du subside de 40 F, mais également à des projets de lois concernant une coupe dans les prestations complémentaires cantonales. L'augmentation des primes - c'est très bien expliqué dans l'exposé des motifs de la proposition de motion 2232 - ne correspond d'ailleurs pas à l'augmentation des coûts de la santé, qui est nettement inférieure à l'augmentation des primes. On peut donc se demander où va le différentiel. Et c'est bien ce qui scandalise les Genevoises et les Genevois; cet argent part dans des réserves excédentaires, dans des frais publicitaires ou des frais administratifs. En outre, nous devons faire face à un manque de transparence des caisses maladie et à une chasse aux bons risques. Ce sont des dysfonctionnements graves, et les Genevoises et Genevois l'ont bien compris en votant le 28 septembre dernier à plus de 57% pour une caisse maladie publique. Mais cette motion, Mesdames et Messieurs les députés, parallèlement à un débat sur les coûts de la santé et sur le paiement des primes d'assurance-maladie, est éminemment fédéraliste. Elle demande de tenir compte des particularités et des souhaits régionaux. Il n'est pas ici question de remettre en cause le choix de la majorité helvétique sur la constitution d'une caisse unique; il est question de respecter la singularité et la particularité d'expression de la majorité de la population du canton de Genève. C'est pour cela que le parti socialiste a déposé ce texte, la M 2232, qui demande à ce que Berne entende la voix des Genevoises et des Genevois et attribue au canton de Genève l'opportunité de faire honneur aux souhaits de sa majorité. Par conséquent, nous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, le renvoi des trois objets parlementaires directement au Conseil d'Etat, pour gagner du temps sur ce sujet brûlant. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Mme Sarah Klopmann (Ve). Je ne vais pas vous réexpliquer comment les primes d'assurance-maladie plombent nos budgets, ni évoquer le scandale des assurances-maladie puisque cela a déjà été fait, mais je vais me contenter de parler des textes. D'abord, les deux résolutions, toutes deux, demandent plus de transparence. La résolution qui vise à séparer l'assurance de base des assurances privées est tout simplement frappée au coin du bon sens, comme aiment à le dire certains conseillers municipaux que j'avais l'habitude de côtoyer auparavant. Il n'est pas normal que des assurances privées profitent d'avantages, de synergies matérielles notamment, parce qu'elles travaillent avec des assurances censées être sociales, ni qu'elles bénéficient des informations obtenues par ces dernières. Le coût des assurances facultatives ne devrait pas non plus se répercuter sur les assurances sociales, parce que les directeurs savent que l'assurance sociale ne sera jamais dépourvue de clients puisqu'elle est obligatoire.
La revendication de la proposition de résolution 772, qui demande de créer un fonds de réserves centralisé et que celui-ci soit géré de manière indépendante des assureurs, est tout à fait normale. On nous parle d'une pseudo-solidarité au niveau de l'assurance sociale maladie, sauf que cette solidarité est totalement biaisée ! Soit elle est vraiment globale et effectivement, tout le monde paie la même chose, soit cette solidarité n'existe pas. Mais on ne peut pas créer une solidarité d'après des pseudo-prédictions selon lesquelles certains cantons devraient payer beaucoup plus, alors qu'en fait ils ont payé moins, et inversement. Tout cela avec de petites réserves qui se créent et qui disparaissent subitement. Comment peut-on le savoir ? Simplement parce que les coûts de la santé augmentent, oui, mais modérément, alors que les augmentations des primes, elles, sont exponentielles. Et même si les primes doivent couvrir les coûts de la santé plus le fonctionnement - on en a conscience - il y a quand même une part de fonctionnement assez opaque et obscure, qui ne devrait en tout cas pas servir à enrichir des entreprises lucratives.
Ensuite, la motion demande d'essayer de pouvoir avoir le droit de créer une assurance publique; il avait été dit pendant la campagne sur la caisse publique que si le oui l'emportait à Genève ou en Romandie, on essaierait de créer quelque chose de public pour nous, simplement parce que c'est une question de justice et de respect de la volonté populaire, d'autant que nous avons été les dindons de la farce pendant suffisamment longtemps. Or, quand cela a été accepté, le Conseil d'Etat nous a dit que c'était très bien, mais qu'il attendait un signal du Grand Conseil pour avancer. Alors ce signal, nous vous le donnons ce soir: essayez de le faire, s'il vous plaît, Monsieur le conseiller d'Etat, entendez-nous !
J'aimerais quand même préciser qu'il est dommage que cette votation pour la caisse publique n'ait pas passé, parce que même si on crée ici une caisse publique, ce ne sera pas la caisse publique que nous souhaitions, qui aurait vraiment mis l'assurance-maladie à un rang social; ce serait une assurance parmi d'autres, et le jeu de la concurrence qui enrichit certains, le jeu de la chasse aux bons risques, continuerait, ce qui est vraiment dommage.
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Sarah Klopmann. Oui ! Alors ces textes, certes, peuvent paraître contradictoires, mais le but est le même: se défaire de ce système de santé lucratif pour certains et péjorant pour d'autres. On s'approche chaque fois un petit peu plus de la caisse publique, bientôt on y arrivera, et les Verts sont favorables à tous ces textes, qu'ils renverront au Conseil d'Etat parce que la maladie des uns ne devrait pas remplir à outrance les poches de certains autres ! (Applaudissements.)
M. François Baertschi (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord pousser ici un cri de colère contre les assurances-maladie, contre ce système que je qualifierai d'arnaque, tellement il me révolte et me révulse. Les trois textes qui nous sont proposés posent les bonnes questions, mais j'ai en souvenir des actions de gel des cotisations menées dans les années 90, où nous, Genevois, étions partis en guerre - c'était un peu David contre Goliath - mais où nous avions perdu. Et quelque part, nous perdons toujours ! Or, je crois qu'il est très important, dans ce combat, de partir avec les meilleures armes. Alors je remercie mes collègues; je n'ai pas pour habitude d'être d'accord avec M. Buchs et M. Guinchard, mais là j'applaudis leur effort et je soutiens leur position. Je pense donc qu'on doit les suivre et les aider, mais qu'il faudrait peut-être retravailler ce texte en commission, et qu'il serait même nécessaire de l'y renvoyer, afin qu'il soit traité rapidement mais correctement. Quand on envoie un texte à Berne, on ne doit pas commettre d'erreur de naïveté ou autre; il faut viser le centre de la cible, la chose la plus juste possible, pour essayer de faire avancer au mieux ce débat, qui est malheureusement un débat de longue haleine. C'est un peu le mythe de Sisyphe: on se retrouve à porter une pierre au sommet d'une montagne, on la voit descendre et on doit la remonter. Je pense que dans ce combat important contre le lobby des caisses maladie, contre le système même des caisses maladie que je qualifierai de mafieux, et pour aller contre ces forces tellement importantes au niveau fédéral, au niveau des Chambres, en particulier, qui bloquent tout, je crois qu'il faut se donner toutes les chances de réussite. Et augmenter les chances de réussite de ces trois textes, c'est les renvoyer à la commission de la santé. Je ne suis sans doute pas d'accord avec l'analyse du député Aellen - vous transmettrez, Monsieur le président - mais je pense que dans le cas présent c'est la voie de la sagesse, et j'invite les députés de gauche qui seraient tentés d'aller vite, et Dieu sait si j'aimerais avancer aussi, à supprimer toute équivoque possible pour se donner toutes les chances de réussite. Je vous demande donc de renvoyer ces textes en commission.
M. Gilbert Catelain (UDC), député suppléant. Les trois objets qui nous sont soumis visent un premier objectif: réduire la hausse des primes. Le second concerne la gouvernance des caisses maladie. La proposition de résolution 772 fait référence à un problème connu et identifié qui a péjoré les assurés genevois. Nous pouvons soutenir cette résolution et la renvoyer en commission. La proposition de résolution 773 a également trait à la gouvernance des caisses, et la question est de savoir s'il faut séparer les assurances de base des assurances privées; ce point mérite à lui seul d'être approfondi en commission. Quant à la proposition de motion 2232, qui vise à créer un monopole d'Etat pour l'assurance de base comme solution à la hausse continue des primes maladie, elle nous interpelle. L'UDC n'est pas favorable sur le principe à une étatisation de l'assurance de base; les motionnaires ne veulent pas prendre en compte les modifications législatives qui entreront en vigueur l'an prochain. Un état des lieux devra être effectué à l'issue du premier exercice comptable. La majorité du peuple suisse, qui n'est de loin pas moins intelligente que le peuple genevois, a considéré que l'instauration d'une caisse unique n'était pas la bonne réponse à la hausse continue de la consommation de soins, due en particulier au vieillissement de la population. L'exposé des motifs n'établit pas de corrélation entre la hausse des différents facteurs de coûts, notamment les coûts des médecins - beaucoup plus élevés que ceux des pharmaciens, par exemple - et la solution proposée. Il y a fort à parier que la mise en oeuvre des mesures législatives fédérales votées à Berne et la résolution 772 devraient permettre de remplir l'objectif de la motion 2232, raison pour laquelle nous ne soutiendrons pas le renvoi de cette motion à la commission de la santé.
M. Pierre Weiss (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, certains, ici, s'agissant de la santé, aiment l'acharnement thérapeutique. On a entendu tout à l'heure Mme Klopmann dire qu'il fallait continuer jusqu'à la victoire finale; je ne sais pas si elle sera encore députée le jour de cette victoire, mais ce qui est certain, c'est que moi je ne le serai plus. Pour l'heure, il me semble que pour les raisons développées par notre collègue Catelain, il convient effectivement de s'opposer à ce qui a été voulu par une minorité dite progressiste, mais systématiquement battue par le peuple. Je relève au passage que le peuple genevois ne s'est distingué du peuple vaudois que par 1% de différence; c'est ce que j'appellerai l'effet Poggia par rapport à l'effet Maillard. Ce n'est pas beaucoup, 1% de différence, et je crois que cela doit nous conduire à la modestie. Je pense aussi que les mesures proposées montrent que l'espoir d'obtenir une majorité à Berne est à peu près dénué de tout réalisme, qu'il s'agisse d'avoir une caisse régionale ou de la possibilité de modifier encore une fois le montant des réserves.
Le président. Il vous reste trente secondes, Monsieur le député.
M. Pierre Weiss. On a obtenu, en matière de réserves, des montants qui certes sont peut-être insuffisants pour certains, mais qui existent réellement pour la totalité du peuple. Je pense que l'on peut, de ce point de vue là, être reconnaissant envers nos parlementaires fédéraux, qui ont fait mieux, par leur réalisme, que le jusqu'au-boutisme de certains qui nous mènent dans l'impasse. En matière de politique de la santé, les petits pas vers la guérison sont plus importants que les miracles parfois revendiqués. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Jocelyne Haller (EAG). Mesdames et Messieurs les députés, à force de faire des petits pas - et de tout petits pas - on finit par se marcher sur les pieds. Essayé, pas pu une fois, essayé, pas pu plusieurs fois, et pourtant le peuple genevois a demandé à réitérées reprises qu'une caisse publique soit mise en place. Beaucoup de choses ont été dites, je ne vais donc pas revenir sur le détail de l'opération, à plus forte raison parce que nous sortons quand même d'une campagne sur la caisse publique, et je pense qu'il n'y a plus lieu d'essayer de convaincre ceux qui ne veulent pas en entendre parler. Toutefois, s'il est une réalité, c'est que le canton de Genève et les cantons romands se sont majoritairement prononcés en faveur d'une caisse publique; nous l'avons énoncé à plusieurs reprises, le scandale des caisses maladie ne peut plus continuer. Des cotisations toujours plus hautes, des catalogues de prestations qui se réduisent, des populations qui n'arrivent plus à faire face à ces dépenses, et dans le même temps des prestations de santé qui sont menacées. Par conséquent, il nous paraît absolument nécessaire de renvoyer la première motion au Conseil d'Etat. Pourquoi attendre ? Nombre de choses ont déjà été dites; la plupart d'entre nous connaît sur le bout des doigts tous les arguments en faveur d'une caisse publique. Quant aux autres, ceux qui ne sont pas d'accord, ils peuvent en dire autant. Aujourd'hui, la chose est donc établie et il convient d'agir, c'est pourquoi je vous invite à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
Concernant les réserves, combien de fois n'avons-nous pas dénoncé ce scandale, ce hold-up ? Et on voudrait que nous continuions à faire confiance aux caisses maladie pour gérer ces fonds ? Je crois que la proposition qui nous est faite aujourd'hui de créer un fonds fédéral pour gérer ces montants de manière centralisée est tout à fait opportune, parce qu'elle permettrait effectivement d'avoir enfin une transparence par rapport à ces sommes, et ensuite d'éviter que le hold-up ne continue. C'est pourquoi le groupe Ensemble à Gauche vous invite à renvoyer ces trois objets au Conseil d'Etat, et je le remercie de leur donner la suite qui convient. Je vous remercie de votre attention.
M. Bertrand Buchs (PDC). Je pense qu'il serait dommage de renvoyer en tout cas les deux résolutions à la commission de la santé, parce qu'il s'agit de sujets traités actuellement à Berne et qui sont purement fédéraux; le canton n'aura pas grand-chose à dire sur la façon de faire. Et puisque la semaine prochaine la commission de la santé du Conseil national parlera de la pétition que nous avons déposée sur cette séparation des caisses maladie publiques et privées, il serait judicieux de renvoyer la résolution concernée directement à Berne pour qu'on puisse rendre compte rapidement de la volonté du parlement genevois. Si on la renvoie en commission, cela prendra plusieurs mois, on ne pourra pas le faire avant la fin de l'année prochaine, et alors les résolutions que nous avons déposées n'auront plus aucune valeur au niveau fédéral. Donc c'est vraiment important - c'est pour cela que nous avons demandé l'urgence et que nous avons lié ces objets - que ces résolutions soient renvoyées à Berne, tout comme la motion. En les renvoyant en commission, vous allez changer quoi ? Rien ! Renvoyer en commission, cela veut dire que vous ne voulez simplement pas accepter ces objets. Mieux vaut alors refuser de les voter aujourd'hui, comme ça on ne se réunit pas en commission. Mais savoir s'il faut séparer la caisse privée de la caisse de base, c'est un problème qui est fédéral, et cela a été bien mis en évidence, vous n'avez qu'à lire la presse. Moi qui suis pourtant un des rares vrais libéraux pure souche au niveau de mon travail, je défends cette séparation parce que je vois, à longueur de journée et à longueur de mois, que l'on est en train de voler les gens et que, comme l'a très bien dit M. Baertschi, on est dans un système mafieux à la limite d'une dénonciation à la justice. Ce qui est en train de se passer est extrêmement grave, et il est très probable que l'enquête de la FINMA sur le Groupe Mutuel mettra prochainement en évidence des choses qui seront très étonnantes. Je vous remercie.
M. Marc Falquet (UDC). Je trouve un peu trop facile de s'attaquer uniquement aux caisses maladie; est-ce qu'elles sont les seules responsables des coûts de la santé ? Est-ce qu'elles agissent toutes comme des voyous ? Qui est en train de faire un effort pour réduire les coûts de la santé aujourd'hui, en Suisse ? Ce sont les pharmaciens. Entre 2000 et 2014, on a fait passer les coûts de la santé dans leur secteur de 18% à 9%. Dans un même temps, les coûts des médecins sont passés de 60% à 80%; les honoraires des spécialistes sont exorbitants ! Vous allez dix minutes chez un spécialiste, il vous facture 300 F. Là aussi, il y a une question à se poser sur les tarifs médicaux. Evidemment, ce n'est pas de notre ressort, c'est du ressort de Berne, mais il ne faut pas seulement s'attaquer aux assurances-maladie; ce ne sont pas les seules responsables de l'augmentation des coûts.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous connaissez ma position personnelle sur le sujet; je suis donc évidemment sensible aux motifs qui vous amènent à solliciter le Conseil d'Etat sur ces deux questions. (Brouhaha.) Je considère cependant qu'il ne faut pas confondre célérité avec précipitation. Nous sommes des Genevois, et nous devons nous regarder nous-mêmes avec les yeux des Bernois, des Confédérés, qui considèrent trop souvent - peut-être à l'excès mais c'est une réalité - que Genève est un peu une anomalie dans le paysage helvétique. Lorsque nous agissons, nous devons le faire avec réflexion, avec concertation, parce qu'il serait trop facile, pour les autres, de rejeter une fois de plus les démarches que nous entreprenons. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Nous n'allons pas ici refaire le débat qui a précédé la campagne de la votation du 28 septembre; ce que pense de nos caisses maladie une majorité de Genevoises et de Genevois est connu de tous. Le système actuel est insatisfaisant... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)
Le président. S'il vous plaît !
M. Mauro Poggia. Merci, Monsieur le président. Le système actuel est insatisfaisant, même s'il est vrai aussi que les assureurs-maladie n'ont pas tous les défauts; nous avons tous une responsabilité partagée dans le domaine des coûts de la santé. Il est également juste de dire que la caisse unique ne sera pas le remède miracle à toutes les problématiques. Cette caisse est cependant un instrument indispensable de mesure, d'observation, pour la maîtrise des coûts de la santé.
Si je reprends tout d'abord, parmi les textes qui nous sont soumis aujourd'hui, la motion, je ne suis pas certain que sa forme soit le meilleur moyen pour amener le Conseil d'Etat à formuler une initiative au sens de l'article 160 de la Constitution fédérale. Cela dit, je comprends bien le but des motionnaires. Vous parlez de caisse publique: là, je pense qu'il faut réfléchir ensemble. Car s'il s'agit indiscutablement d'une entité qui aura des tâches de droit public, comme toutes les assurances-maladie qui travaillent dans ce domaine en Suisse, faut-il véritablement que sa nature soit de droit public ? Ne peut-on pas imaginer une assurance privée qui ait des tâches de droit public ? Ne peut-on pas imaginer aussi, dans un délire onirique, que le Groupe Mutuel, qui est situé en Valais - canton qui, vous le savez, a refusé l'initiative compte tenu des problématiques d'emploi qui lui sont propres - soit finalement l'instrument de cette caisse unique intercantonale romande qui pourrait voir le jour ? Rien n'est exclu à priori, et je pense que nous ne devons rien écarter dans un texte trop restrictif que nous présenterions aux Chambres fédérales. Pas plus tard que lundi prochain, la conférence latine des préposés aux affaires sociales et de santé, dont je fais partie, se réunira; la question est à l'ordre du jour. A mon avis, parmi les cantons romands, une majorité sera prête, simultanément, à saisir les parlements cantonaux respectifs pour qu'un mouvement uni et uniforme se dirige vers une initiative qui ne sera plus une initiative genevoise, mais un faisceau concordant d'initiatives vers un but commun, celui qui, nous le pensons, a été exprimé par les Genevois. Quand je dis «nous le pensons», j'estime que là aussi, en tant que démocrates, nous devons nous épargner des raccourcis dangereux. Ce n'est pas parce que les Genevoises et les Genevois ont dit oui à l'initiative fédérale qu'ils diraient forcément oui à l'initiative pour une caisse cantonale unique. Je pense personnellement qu'ils la soutiendraient davantage encore, mais ce n'est que mon avis personnel, et sur ce point, vous devrez être à mon sens les porte-parole de l'opinion qu'exprimera le peuple. Et celui-ci devrait, selon moi, se prononcer non pas sur une motion mais sur un texte plus abouti qui devrait être non pas genevois, mais négocié en commun par tous ces cantons romands - je dis «romands» car le Tessin rejoindra difficilement le mouvement - qui, ensemble, décideront de faire cette démarche pour modifier l'article 4 de la LAMal et permettre aux cantons qui le souhaitent d'instaurer sur leur territoire une caisse unique, quelle qu'en soit la forme. Raison pour laquelle je pense que cette motion devrait être renvoyée en commission, pour que nous l'affinions et que l'on ne puisse pas nous reprocher, je l'ai dit, une certaine précipitation.
En ce qui concerne le fonds unique de réserves, je crois qu'effectivement - et c'est le bon sens même - avoir un fonds unique serait une bonne chose pour tout le monde. Cela éviterait d'avoir à reconstituer systématiquement ces réserves chaque fois que l'on change de caisse, cela permettrait de ne modifier les réserves accumulées que selon les fluctuations inhérentes aux coûts de la santé, et cela permettrait surtout, puisqu'il y aurait huit millions d'assurés qui constitueraient ces réserves, d'en diminuer drastiquement le taux. Par contre, vous ne devez pas perdre d'esprit que l'article 60 de la LAMal donne une double fonction aux réserves fédérales: ces réserves doivent permettre non seulement de supporter les coûts afférents aux maladies déjà survenues, mais également de garantir la solvabilité des caisses à long terme. Alors si pour la solvabilité à long terme on peut évidemment imaginer ce fonds unique, pour garantir les coûts des maladies déjà survenues, chaque caisse vous dira, et à juste titre en l'état actuel de la législation, qu'on ne peut pas la spolier des réserves qui lui sont nécessaires précisément afin de répondre aux besoins de ses propres assurés. Faisons donc attention, là aussi, que notre rapidité de réaction ne revienne pas à de la précipitation. Raison pour laquelle, sur ce point également, je suggère que le texte soit réfléchi et affiné en commission.
Enfin, en ce qui concerne la séparation des assurances de base et des assurances complémentaires privées, c'est le bon sens également. Les médecins avaient d'ailleurs lancé une initiative qui malheureusement n'a pas réuni les signatures voulues. Par contre, il s'agit d'être, ici aussi, plus subtil. Il faut savoir qu'à la fin de l'année dernière, seules seize caisses, sur plus d'une soixantaine encore actives dans l'assurance de base, offraient simultanément des assurances complémentaires aux assurés. Cela veut dire que les assureurs, qui ont toujours un coup d'avance, savent déjà que l'on va aller dans ce sens-là, que bientôt on leur demandera de choisir et qu'ils ne pourront plus proposer à la fois l'assurance de base et des assurances complémentaires. Ils sont donc préparés à ce que vous allez leur mettre sous le nez. La séparation juridique est déjà une réalité. Mais il faut être plus subtil ! Il faut une séparation économique ! Il faut une séparation structurelle ! Aujourd'hui, vous avez des groupes de sociétés dont l'une propose l'assurance de base et l'autre l'assurance complémentaire. Mais évidemment, lorsque le courtier se rend auprès de l'assuré, il a le formulaire pour l'assurance de base - qu'il ne présente évidemment qu'au jeune et bien portant - et simultanément le formulaire d'une autre caisse pour laquelle il travaille pour l'assurance complémentaire. Vous pouvez donc dire aux assureurs que les caisses doivent être séparées, cela ne leur fera ni chaud ni froid puisqu'ils pourront toujours présenter deux feuilles avec des en-têtes différents. Par conséquent, là aussi, prenons le temps de la réflexion, parce qu'il faut être précis pour ne pas rater la cible. Sur ce point également, je vous demande donc de renvoyer cette résolution en commission. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous passons au vote sur la proposition de motion 2232. Nous avons une demande de renvoi à la commission des affaires sociales. (Protestations. Brouhaha.) Commission de la santé, pardon, nous avions tous compris ! Je mets aux voix cette demande.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2232 à la commission de la santé est adopté par 53 oui contre 38 non et 1 abstention.
Le président. Nous votons maintenant sur la proposition de résolution 772. Je vous soumets la même demande de renvoi à la commission de la santé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 772 à la commission de la santé est adopté par 60 oui contre 30 non et 2 abstentions.
Le président. Nous procédons à la même opération pour la proposition de résolution 773.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de résolution 773 à la commission de la santé est adopté par 62 oui contre 25 non et 4 abstentions.
Débat
Le président. Nous abordons à présent la motion 2241. Nous sommes en catégorie II, trente minutes. Madame Fontanet, vous avez la parole.
Mme Nathalie Fontanet (PLR). Merci beaucoup, Monsieur le président. Initialement, j'avais prévu de demander un renvoi sans débat à la commission de la santé, mais le magistrat m'a indiqué que quoi qu'il arrive, il souhaitait que ce débat ait lieu publiquement, en plénière, raison pour laquelle je vais finalement m'exprimer un peu plus longuement.
Depuis 2012, un nouveau mode de financement hospitalier est en vigueur, de même qu'une nouvelle planification hospitalière. Ce nouveau financement implique qu'il n'y a plus de subventionnement direct des hôpitaux mais un financement lié aux prestations, à savoir un financement par cas. Les coûts sont ainsi dorénavant pris en charge à 55% au moins par les cantons et à 45% au maximum par les assureurs. Aux termes de la LAMal, le canton est donc tenu de planifier les besoins en hospitalisation de sa population résidente, et il doit prendre en compte de manière adéquate les organismes privés. Selon la loi toujours, les critères de la planification sont la qualité et le caractère économique. C'est dans ce contexte, pour garantir une offre qui couvre les besoins de la population, que des mandats de prestations ont été octroyés aux cliniques privées.
Il est essentiel de relever que dans le cadre de ces mandats de prestations, les cliniques privées sont tenues de prendre en charge au moins 50% de patients assurés de base, à savoir des patients qui n'ont pas d'assurance complémentaire et qui, usuellement, ne pourraient pas avoir accès à des soins dans des cliniques privées. Ces mandats de prestations permettent donc de rétablir une forme d'égalité entre les assurés privés et les assurés de base, mais également de décharger les hôpitaux publics, de réduire les listes d'attente et, ainsi, d'améliorer l'accès aux soins et de diminuer les coûts. Comme vous l'aurez compris, ces mandats de prestations sont indispensables pour atteindre les objectifs sanitaires cantonaux; ils sont une garantie de qualité de soins, d'accès aux soins et d'économicité.
Il est important de noter que les coûts des prestations pour un assuré de base sont moins importants dans une clinique privée qu'aux HUG, cela en raison notamment de la taille et des frais d'exploitation inférieurs dans un établissement privé. Et qu'est-ce que cela signifie, chers collègues ? Eh bien tout simplement qu'un assuré de base qui se fait soigner en clinique privée, dans le cadre des mandats de prestations, coûte moins cher au canton, moins cher aux assurances et donc moins cher au contribuable que s'il se faisait soigner aux HUG. (Commentaires.) A Genève, les mandats de prestations prévoient un nombre limité de cas, soit une forme de quotas annuels. Lorsque ces quotas sont atteints, les patients assurés de base doivent être refusés par les cliniques et renvoyés vers la classe commune des HUG, engendrant de nouveaux délais d'attente et des coûts supplémentaires. Le canton de Zurich et la quasi-totalité des autres cantons ont, de leur côté, fait le choix de ne pas plafonner le nombre de cas pouvant être pris en charge par les établissements hospitaliers privés, mais au contraire de prendre en compte le potentiel d'offre de l'ensemble des établissements hospitaliers du canton.
La planification actuellement en vigueur prévoit une enveloppe de 6,7 millions pour les cliniques privées et de 6,8 millions pour la division privée des HUG. Contre toute attente et sans fondement vérifiable dès lors qu'aucun document ne la justifiant n'a jusqu'à présent été rendu public, la nouvelle planification présentée fixe une réduction de plus d'un tiers de l'étendue et du financement des mandats de prestations des cliniques privées en faveur de la division privée des HUG, l'enveloppe passant ainsi de 6,7 à 4,3 millions pour les cliniques privées et de 6,8 millions à 9,1 millions pour la division privée des HUG. Dans le même temps, la répartition des prestations entre les différents établissements privés et les HUG a été modifiée sans aucunement tenir compte des pôles de compétences des établissements concernés. Pour ne citer qu'un exemple, la Clinique générale Beaulieu, qui dispose d'un pôle de compétences reconnu en urologie, se voit subitement retirer tout mandat de prestations en urologie spécialisée et générale. Cette façon de faire n'est pas admissible et vise manifestement à protéger la division privée des HUG au détriment des cliniques privées et des patients assurés de base ! Car il faut le souligner, chers collègues, la division privée des HUG, contrairement aux cliniques privées, ne dispensera aucun soin à des patients assurés de base. Cette modification dans la planification hospitalière va manifestement à l'encontre de la loi; elle favorise la division privée des HUG au mépris du principe du libre choix de l'hôpital, de la qualité des soins et de l'économicité.
Enfin, Mesdames et Messieurs, soyez assurés que cette motion ne remet absolument pas en question ni l'existence ni le subventionnement de l'activité principale des HUG, ni encore les missions d'intérêt général comme la formation et les services d'urgence vingt-quatre heures sur vingt-quatre, qui sont hors planification ! Le budget des HUG reste identique et toute allégation contraire ne serait pas conforme à la réalité.
C'est pour ces motifs que je vous recommande de renvoyer cette motion à la commission de la santé, afin d'assurer, dans l'application de la planification hospitalière cantonale 2015, une égalité de traitement entre le secteur privé des HUG et les cliniques privées, de maintenir entre le secteur privé des HUG et les cliniques privées une répartition des prestations équitable tenant compte des spécialités des établissements concernés, et d'étudier les modèles de planification hospitalière mis en place par les cantons de Zurich et de Berne. Je vous remercie, Monsieur le président. (Quelques applaudissements.)
Présidence de M. Antoine Barde, premier vice-président
M. Pierre Vanek (EAG). Deux ou trois banalités de notre point de vue. Nous ne nous opposerons pas au renvoi en commission de cette motion. La matière est relativement complexe, et le dépôt ayant été fait le 10 novembre - nous le sommes le 13, je crois, aujourd'hui - les conditions de préparation d'un débat en plénière n'étaient pas bonnes.
Deux ou trois choses quand même. D'abord, j'aimerais réaffirmer que notre groupe est résolument opposé à une médecine à deux vitesses, à des cliniques privées ou une division privée de l'hôpital d'un côté, et à des soins et une hospitalisation de base de l'autre. Nous sommes d'avis que la santé est un bien commun à chacun, qui doit être défendu par la collectivité de manière égale pour toutes et tous, et que l'épaisseur du portefeuille et la capacité de payer telle ou telle clinique privée ou tel ou tel spécialiste ne devraient pas justifier un traitement différent. C'est un point de vue élémentaire que nous tenons à réaffirmer. Donc dans un certain sens, l'arbitrage entre les cliniques privées d'un côté, qui ont leurs lobbyistes - on le voit - et la division privée de l'hôpital ne va pas sur le fond ni sur l'essentiel ! Le fond et l'essentiel, ce sont les conditions de l'hôpital, c'est le nombre d'infirmières, ce sont les moyens mis à disposition pour faire tourner l'hôpital public en division de base, pour l'ensemble de la population. C'est cela que nous sommes attachés à défendre et que nous avons défendu systématiquement au cours de ces dernières années; des prestations pour la grande majorité de la population, des prestations que défend d'ailleurs le personnel de l'hôpital, en revendiquant aussi un certain nombre de postes. C'est là un élément fondamental pour nous, que je tenais à rappeler dans ce débat.
L'autre question essentielle est le développement du service public, et un service de santé public qui soit de qualité, qui soit à la hauteur des moyens que nous avons dans ce canton pour assurer la santé des gens, du riche comme du pauvre, indépendamment de leurs revenus et de leurs moyens. Maintenant, prenons le titre de la motion - je ne dirai pas que je n'ai pas eu le temps de lire le reste, mais quand même, vous m'excuserez de ne pas avoir pu l'analyser en détail. Vous avez indiqué «garantir l'égalité de traitement entre cliniques privées et HUG». Non, Mesdames et Messieurs ! Nous ne sommes pas pour l'égalité de traitement...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Pierre Vanek. ...entre cliniques privées et HUG, pas plus que nous ne sommes pour l'égalité de traitement entre les écoles privées et le département de l'instruction publique et ses écoles, pas plus que nous ne sommes pour une égalité de traitement entre les polices privées d'un côté et la police de l'autre ! Non ! Nous avons une posture de défense résolue du service public, financé par l'impôt, au service de l'ensemble des citoyens...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Pierre Vanek. ...et nous pensons que la santé ne devrait pas être l'occasion pour certains...
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député !
M. Pierre Vanek. ...de développer un business commercial et capitaliste. Merci, Monsieur le président, de votre tolérance pour mon petit dépassement !
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Je suis très contente de pouvoir intervenir sur un objet tel que celui-ci. Nous allons accepter cette motion, mais en appuyant un renvoi direct au Conseil d'Etat. Quelle est la mission d'un hôpital universitaire à Genève, et quelles sont celles des cliniques privées ? Je vous rappelle que fondamentalement, les Hôpitaux universitaires de Genève travaillent sur la base d'une masse critique très importante, qu'ils font de la recherche et qu'ils sont responsables de l'enseignement de la faculté de médecine, en particulier, et d'autres instituts de santé. Je voudrais qu'on fasse le corollaire avec l'implication des cliniques privées par rapport à la recherche fondamentale, à la recherche classique et à l'enseignement, qui sont bien les missions fondamentales des Hôpitaux universitaires de Genève.
Un deuxième point me paraît très important: vous savez bien qu'actuellement, la planification hospitalière est en route, elle doit être revue. Ça ne sert à rien de l'évoquer comme un fait définitif, puisque c'est un point en cours d'étude, actuellement, au département de la santé. Et par rapport à ce sujet, nous faisons totalement confiance à notre magistrat, qui connaît bien sûr extrêmement bien la situation.
Lorsqu'on est médecin ou infirmière et qu'on veut faire une carrière en milieu hospitalier, quelles sont les possibilités ? Il faut que vous y pensiez, car cette motion fait totalement abstraction de cela. C'est facile de faire une carrière dans le privé, dans le cadre de la médecine, de la physiothérapie, ou autre. Dans un hôpital, c'est beaucoup plus compliqué; pour une carrière hospitalière universitaire - il faut regarder cela de près - il y a peu d'élus pour de nombreux candidats. C'est une filière extrêmement difficile. Alors c'est vrai qu'on peut se demander pourquoi créer un service privé en milieu hospitalier. Mais c'est simplement parce que c'est aussi une façon de retenir les professeurs, féminins ou masculins...
Le président. Il vous reste trente secondes.
Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...dans le milieu universitaire, pour que la recherche avance. Et cette recherche, elle est au bénéfice de tous ! Et c'est là qu'il y a aussi une question d'égalité. Comme dernier point, j'aimerais juste dire que les hôpitaux sont obligés de recevoir tous les patients, ils n'ont pas le droit de les refuser. C'est comme l'IMAD: un service privé de soins à domicile peut refuser un patient...
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée.
Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...mais l'IMAD n'a pas le droit de le faire. Et c'est aussi la fonction des Hôpitaux universitaires...
Le président. Je vous remercie, Madame la députée.
Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...que de recevoir tout le monde.
M. Alberto Velasco (S). Mesdames et Messieurs, je crois que tout le problème vient du fait que les Chambres fédérales ont décidé qu'on ne finançait plus les établissements mais les prestations. C'est-à-dire qu'un individu qui veut aller se faire soigner pour x ou y raison à tel endroit y va. Donc ce canton, qui tient à son Hôpital cantonal - personnellement, j'y tiens énormément - nous met dans la situation qu'on connaît, parce que les Chambres fédérales, un jour, ont pris cette décision. Et, Mesdames et Messieurs, c'est un problème, tout cela, parce que l'Hôpital cantonal a une fonction qu'on appelle la fonction de pérennité; cela veut dire que si demain matin toutes les cliniques ferment, l'Hôpital doit subsister. Et ça c'est une question, Monsieur le conseiller d'Etat, que vous devriez aussi poser aux cliniques privées: la pérennité des prestations.
Cela dit, Mesdames et Messieurs, il y a quand même quelque chose qu'on doit se demander ici: pourquoi l'Hôpital cantonal doit-il développer son neuvième étage, qui est une clinique privée ? Pourquoi ? Eh bien je vais vous dire: parce que le budget de l'Hôpital cantonal étant raboté année après année, je pense qu'ils compensent par l'activité du neuvième étage ! Et cette partie privée n'est pas forcément ouverte à ceux qui sont soumis à la LAMal, et c'est aussi un problème. Là-dessus il y a un débat à avoir, et nous aimerions effectivement, nous, les socialistes, aller en commission avec cette motion, pour voir pour quelles raisons l'Hôpital cantonal doit tellement développer sa partie privée. Sa mission est une mission publique, Monsieur le conseiller d'Etat, elle doit être financée par le budget du canton, par le trésor public, dans ses missions fondamentales et dans sa pérennité, mais pas avec le marché privé ! Ça, c'est un problème qui se pose et on doit le résoudre.
Enfin, Mesdames et Messieurs, il y a la question de la planification dont vous avez parlé. Certains éléments, dans ce canton, doivent nous interroger; par exemple, j'ai appris, Monsieur le conseiller d'Etat - et là-dessus le Conseil d'Etat devrait absolument intervenir - que la Colline avait été vendue il y a trois ans pour 70 millions, et que quelque temps après elle avait été rachetée pour 120 millions. En trois ans, 50 millions supplémentaires ! Mais que se passe-t-il dans ce canton ? On voit fleurir un marché des cliniques privées. Non ! Je veux dire par là qu'à un moment donné, il y a une régulation qui se... Il y a des cliniques qui ont une tradition...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alberto Velasco. ...et tout à coup - oui, merci, Monsieur le président - on voit émerger des groupes internationaux de la santé qui posent quand même certains problèmes. Oui, Mesdames et Messieurs, il y a des questions à se poser, aujourd'hui, sur la santé à Genève. En ce qui concerne les socialistes, nous ne sommes pas d'accord de renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat, mais nous pensons qu'il est intéressant d'aller en commission de la santé pour demander toute une série de chiffres et de rapports sur des événements qui ont eu lieu.
M. Thomas Bläsi (UDC). Je pense que dans ce débat, il faut revenir aux fondamentaux. A quoi a finalement accès l'assuré de base ? A l'hôpital public. L'assuré qui dispose d'une assurance complémentaire a accès à la division privée de l'Hôpital cantonal et aux cliniques privées. Dans le cadre de la planification hospitalière, une enveloppe budgétaire de 13 millions est prévue pour permettre l'accès aux soins en clinique privée aux patients ne disposant que de l'assurance de base. Cela est conforme à la constitution genevoise qui, à son article 175, prévoit le libre choix. Grâce à cette enveloppe budgétaire, l'assuré de base peut avoir accès aux soins dans les cliniques privées, qui sont prêtes à accepter un maximum de cas AOS, c'est-à-dire de patients en assurance de base, ce qui va finalement permettre de ramener une équité par rapport à la médecine à deux vitesses dont parlait M. Vanek tout à l'heure. La division privée de l'Hôpital cantonal, elle, ne prend et ne prendra que des patients ayant cette assurance complémentaire et qui ont déjà payé, au travers de leur assurance complémentaire, le service qu'on se propose de financer avec nos impôts. Ils l'ont déjà payé puisqu'ils sont assurés en complémentaire ! Les 9 millions attribués à la division privée de l'hôpital ne bénéficieront donc pas aux assurés de base, et c'est bien là ce qui révolte le groupe UDC. Cette enveloppe n'a pas vocation à développer une division privée, accessible aux seuls bienheureux bénéficiaires d'une assurance complémentaire; elle a pour vocation de permettre au contraire une équité des soins pour ceux qui n'ont qu'une assurance de base. Le groupe UDC défend et défendra toujours l'hôpital public, accessible à l'assuré de base. Vous l'avez vu dans la démonstration que nous avons faite concernant l'ophtalmologie; nous défendions l'hôpital public. Le groupe UDC défendra l'accès aux cliniques privées pour l'assuré de base, conformément à la loi fédérale. Le groupe UDC condamne l'utilisation de fonds destinés à l'assurance de base, dans cette enveloppe perverse, pour une division privée qui reste inaccessible à l'assuré de base. Et c'est cela qui est important. Le magistrat s'exprimera tout à l'heure en nous parlant d'une expertise: dans un passage de celle-ci, on attribue à une clinique 200 naissances et 100 accouchements.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Thomas Bläsi. C'est quand même étonnant, à moins qu'on veuille développer les grossesses gémellaires !
Maintenant, sur le financement des HUG, je vais vous donner quelques tuyaux, si vous le souhaitez: on pourrait arrêter de construire des ouvrages le jour pour les détruire nuitamment ! On pourrait cesser de payer des salaires de directeurs à de simples consultants, et si on voulait réellement améliorer le système de santé, on modifierait la décision qui avait été prise par le précédent directeur sur la date d'engagement des infirmières, pour le faire correspondre à la sortie...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Thomas Bläsi. ...des études des infirmières que nous formons. (Quelques applaudissements.)
M. Bertrand Buchs (PDC). Le parti démocrate-chrétien soutiendra le renvoi en commission de cette motion. Je ne vais pas revenir sur tout ce qui a été dit, mais le problème actuel - et c'est pour cela que cette motion et deux questions écrites ont été déposées - est qu'on se trouve dans une période de crise. Et dans cette période de crise, il semble que l'Etat veuille porter plainte, que les cliniques privées veuillent porter plainte, et on ne sait pas ce qu'est en train de devenir la relation entre les cliniques privées et l'Etat. L'atmosphère actuelle est malsaine, et dans cette configuration il faut qu'on puisse discuter de façon calme en commission et voir ce qui se passe exactement entre l'Hôpital cantonal et les cliniques privées.
Depuis le premier janvier 2012, c'est une obligation fédérale que n'importe qui puisse aller dans n'importe quel hôpital et n'importe quelle clinique en Suisse, et que les frais soient pris en charge en partie par le canton d'où cette personne vient. Il y a donc une espèce de calcul qui est fait, et le canton doit payer pour l'assuré qui voudrait tout à coup aller dans une clinique située ailleurs. L'application de cette loi de planification sanitaire pose problème, parce que certains cantons, comme Zurich, permettent un libre accès pour tout le monde aussi bien à l'Hôpital cantonal de Zurich qu'aux cliniques privées du canton. Il y a des systèmes de quotas, comme on a voulu faire à Genève, ce qui fait qu'on ne sait pas du tout sur quel pied danser. En tant que médecin, je n'ai aucune visibilité sur la possibilité, en début d'année, d'envoyer mes patients se faire opérer ou hospitaliser en clinique avec une assurance de base; je n'ai aucune idée quant à savoir où je peux les envoyer et s'il y a un répertoire des possibilités d'hospitalisation. J'en ai fait la remarque aux cliniques, et c'est quelque chose qu'elles doivent absolument changer parce qu'on ne sait pas ce qui se passe. C'est la même chose pour le neuvième étage de l'Hôpital cantonal: on n'a aucune idée de ce qu'on peut faire et j'ai même entendu qu'il n'y avait jamais eu aucune hospitalisation avec une assurance de base. Pourtant la loi existe, il faut l'appliquer, et ça ne sert à rien de le faire de façon à créer une guerre des tranchées entre les cliniques privées et l'Hôpital cantonal, parce que personne n'a à y gagner. Cela veut dire qu'il faut qu'il y ait des synergies entre les cliniques privées et l'Hôpital cantonal, il faut qu'il y ait des mandats de prestations clairs entre l'Etat et les cliniques privées, sachant que les cliniques privées peuvent apporter un plus au niveau du système sanitaire genevois, parce que cela permet peut-être d'hospitaliser plus vite ou de faire opérer plus rapidement des gens qui seraient sur liste d'attente à l'hôpital. En plus, les cliniques privées amènent aussi une très bonne qualité de soins, et je peux le dire ici parce que je le vis tous les jours: la qualité de soins des cliniques genevoises est excellente. Il ne sert donc à rien, sur ce problème-là, de se faire la guerre, et ce qu'on a entendu ces dernières semaines selon quoi il y aurait une crise entre les cliniques privées et le Conseil d'Etat est dommageable. C'est pour cela que ces questions écrites et cette motion ont été déposées; nous avons besoin d'explications, nous soutiendrons donc le renvoi en commission. Je vous remercie.
Présidence de M. Antoine Droin, président
Mme Sarah Klopmann (Ve). Nous enchaînons les discussions sur la santé, et c'est dommage qu'on se retrouve finalement à parler autant de valeurs commerciales. De quoi discutons-nous ici ? Nous discutons d'une revendication des cliniques privées, qui aimeraient qu'il n'y ait aucune régulation entre les services publics et privés, pour qu'elles puissent continuer à travailler comme elles le veulent... (Commentaires.) ...pour qu'elles puissent, elles, perfectionner des pôles d'excellence et continuer à gagner de l'argent. L'ennui, c'est justement qu'il y a une inégalité de base... (Brouhaha.)
Le président. Chut !
Mme Sarah Klopmann. ...entre les cliniques privées et l'hôpital public: l'hôpital public, lui, doit soigner sans distinction et sans discrimination ! L'hôpital public a tous les devoirs, alors que les cliniques privées ne souhaiteraient disposer que des droits. Or, cela n'est pas acceptable pour nous. Si on n'a pas de régulation, étant donné que les cliniques privées peuvent choisir quels patients elles veulent traiter - soit les cas qui sont financièrement plus intéressants ou ceux qui leur permettent de développer des connaissances en médecine de pointe - les HUG, eux, n'auront finalement que le choix de perdre leurs compétences et leur excellence. Le problème avec cette façon de faire, c'est qu'on va empêcher les HUG - je rappelle que HUG, c'est quand même Hôpitaux universitaires genevois... (Remarque.) Ça n'a pas rien à voir, vous avez tous reçu le mail des cliniques privées, même si vous dites sur Léman Bleu que ce n'est absolument pas le cas ! Parce que je peine à croire qu'une clinique privée, quand elle cherche un député vers qui se tourner, me choisisse, moi ! Donc je pense que les autres ont reçu ce mail aussi. Les HUG, qui sont donc censés former les médecins de demain, ne pourront plus le faire car ils n'auront plus les compétences... (Commentaires.) ...puisque celles-ci seront parties uniquement dans le privé ! Cela, nous ne l'acceptons pas.
Ensuite, la comparaison entre la clinique privée et le secteur privé des HUG ne peut pas être faite; il faut comparer ce qui est comparable. La clinique privée doit être comparée aux HUG dans leur entier ! Parce que dans les cliniques privées aussi il y a des secteurs qui seront réservés aux patients avec une assurance complémentaire; cela est tout à fait su et n'est absolument pas condamné par vous. Donc personnellement, oui, je condamne le fait qu'aux HUG il y ait des gens assurés par l'assurance complémentaire...
Le président. Il vous reste quinze secondes.
Mme Sarah Klopmann. ...mais pour empêcher cela, il ne faut pas encourager les cliniques privées ! Pour changer cela, il faut abandonner ce système d'assurances privées. Les compétences doivent rester dans le public, là où l'on forme les médecins, là où l'on a vraiment vocation et obligation de soigner les gens, et nous ne voulons pas que cela disparaisse au simple prétexte...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît !
Mme Sarah Klopmann. ...de garantir l'égalité. Je conclus, merci, en vous disant que les Verts, seuls mais libres, vont refuser ce texte... (Commentaires.)
Le président. Merci, Madame !
Mme Sarah Klopmann. ...car nous sommes ici les seuls à défendre le service public pour la population !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Pierre Conne, à qui il reste trente-trois secondes.
M. Pierre Conne (PLR). Merci, Monsieur le président. Je prendrai la première seconde pour encourager, demain, les responsables des cliniques privées à choisir Mme Klopmann, qui est une excellente oratrice et qui serait certainement une excellente avocate cas échéant ! Cela dit, passé cette boutade, mon message n'a qu'un seul but: vous encourager, toutes et tous, à renvoyer ce texte à la commission de la santé. Pourquoi ? Parce que la question de la planification sanitaire, Mesdames et Messieurs, nous échappe, alors que c'est le seul domaine sur lequel notre parlement peut avoir des compétences politiques. On l'a vu, la LAMal est une loi fédérale, la structure tarifaire des hôpitaux est fédérale, mais la planification sanitaire est déléguée au canton. Et aujourd'hui, la loi d'application cantonale de la LAMal concernant la planification sanitaire fait qu'effectivement, tout ce qui touche à la planification sanitaire, c'est-à-dire la répartition des mandats de prestations aux différents établissements...
Le président. Il vous faut conclure, s'il vous plaît !
M. Pierre Conne. ...privés et publics du canton, nous échappe. Alors renvoyons ce texte à la commission de la santé, étudions la planification sanitaire, et ce qui en ressortira probablement, c'est un projet de modification de la loi cantonale d'application de la LAMal...
Le président. Merci, Monsieur le député !
M. Pierre Conne. ...pour la planification sanitaire. Merci.
M. Mauro Poggia, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, après une véritable mise au pilori, ces derniers jours, de la politique du département en matière de planification hospitalière, on aurait souhaité renvoyer ce qui est un véritable acte d'accusation à la discrétion des débats en commission: trop facile. Trop facile parce que le débat est important, il concerne toutes les Genevoises et tous les Genevois, et je ne peux pas laisser passer ce qui s'est dit ces derniers jours comme aujourd'hui, dans cet hémicycle. (Remarque.) Et même si je veux bien croire que les motionnaires sont les innocents véhicules des contrevérités qu'ils nous assènent et qui leur ont été susurrées à l'oreille par des cliniques dont personne ne croira une seconde qu'elles sont désintéressées et mues par des élans philanthropiques, je dois leur rappeler certains points élémentaires en matière de planification, étant précisé que la prochaine période de planification ira de 2016 à 2019. Mais nous parlons ici de la planification 2015.
Vous le savez, ou je vous le rappelle, jusqu'à fin 2011, le système était clair: si vous aviez une assurance complémentaire, vous aviez le choix de votre médecin pour votre hospitalisation, et c'est votre médecin qui vous opérait dans une clinique privée où il était accrédité. Si vous n'aviez pas d'assurance complémentaire, vous alliez à l'Hôpital cantonal, où les soins sont d'excellence, mais où vous n'aviez évidemment pas le choix du médecin qui vous opérait. A partir du 1er janvier 2012, il a été considéré, à Berne, que les cantons devaient procéder à une planification, vérifiable, reproductible, qui puisse être contrôlée par un juge, le cas échéant. Il fallait, pour cela, prendre en considération l'ensemble de l'offre de soins hospitaliers, donc non seulement celle des hôpitaux publics, qui peuvent d'ailleurs être universitaires comme non universitaires, mais également celle des cliniques privées. Contrairement à ce qui vous a été dit, et contrairement à ce qui est mentionné dans la motion, il n'y a aucune liberté de choix du patient pour aller là où il veut, à charge du canton, et il n'y a aucune obligation du canton de prendre en charge les prestations là où se présente le patient; il y a une planification, et cette planification est destinée à couvrir les besoins de la population.
Quel raisonnement avait fait jusqu'ici mon prédécesseur, pour 2012, 2013 et 2014 ? On a calculé, comme pour 2015, quelle était la part de la population qui ne disposait que d'une assurance de base, considérant que pour cette population-là, qui n'irait évidemment pas dans une clinique privée, il fallait que les Hôpitaux universitaires de Genève puissent répondre aux besoins en qualité et aussi en rapidité. Lorsque cela n'était pas possible, selon les pôles d'activités qui avaient été sélectionnés, qui étaient au nombre de neuf, des mandats de prestations étaient attribués à des cliniques privées, c'est-à-dire des contingents, pour un montant global, la première année, de 21 millions, qui comprenait l'obstétrique. En 2013, on s'est rendu compte que les cliniques n'avaient absolument pas utilisé les contingents en obstétrique, parce que les médecins obstétriciens n'avaient pas trouvé d'intérêt à opérer au tarif de l'assurance de base. Mon prédécesseur a donc enlevé cette part des contingentements pour réduire le tout à 15 millions. Dans ce cadre, la clinique privée des HUG, qui est une clinique privée au même titre que les autres dans la planification hospitalière, et qui a également des conventionnements avec les caisses privées, se voyait également répartir, en fonction de ses pôles de spécialités, des contingents, qui n'ont jamais été contestés par quiconque, ni en 2012, ni en 2013. En 2014, avant même que je n'arrive, il a été décidé de reproduire ce qui avait été fait en 2013. Toutes les cliniques l'ont accepté, bien que rechignant en disant que ce n'était pas suffisant. Une seule - l'Hôpital de la Tour, qui l'a dit, d'ailleurs, dans un média du canton - a engagé une procédure considérant que c'était insuffisant. Toutes les autres ont prévenu qu'il y aurait des procès en 2015, car elles n'accepteraient pas de reconduire ce qui leur avait été attribué en 2014. Certaines ont même considéré ce qui nous a été répété ici, soit qu'il y avait une liberté de choix et que finalement le canton devait payer systématiquement lorsqu'un assuré de base se présentait chez elles; cela au mépris le plus absolu de la jurisprudence rendue encore la semaine dernière dans le cadre des mesures provisionnelles de l'Hôpital de la Tour, décision publiée et dans laquelle les mesures provisionnelles ont été rejetées, le Tribunal administratif fédéral rappelant que le canton de Genève, comme les autres cantons, était parfaitement en droit, dans le cadre de sa planification, de fixer des contingents.
Sachant que nous partions en procédure, nous avons décidé, au sein du département, de faire appel à un expert externe, qu'on ne pourrait pas soupçonner de parti pris, pour qu'il puisse regarder non pas sur neuf pôles de spécialités, mais sur plus de trente pôles, pour avoir une vision encore plus fine, quels étaient les besoins de la population genevoise. Nous savons qu'à Genève, 63% de la population n'a qu'une assurance de base, le reste disposant en plus d'une complémentaire. Pour avoir une marge de manoeuvre, nous avons augmenté de 5% ces 63%, pour monter à 68%. Partant de l'idée que les 32% de différence iraient obligatoirement au privé en cas d'opération, nous avons dû regarder pôle par pôle - c'est l'expert qui l'a fait - si les Hôpitaux universitaires de Genève étaient en mesure de répondre à ces besoins, avec en plus des critères de qualité et d'économicité. Et pour vous dire la finesse du raisonnement et les filtres qui ont été mis en place de manière totalement égalitaire pour toutes les cliniques, y compris la clinique privée des HUG, le fait qu'une personne opérée retourne où elle a été opérée dans les trente jours, par exemple, était considéré comme un facteur négatif; le fait qu'une personne soit opérée en stationnaire alors qu'elle pouvait l'être en ambulatoire - ce qui a lieu dans nos cliniques privées qui, comme vous le savez, ont intérêt à hospitaliser les personnes pour la nuit - est aussi un critère pris en considération. Et sur cette base, sans aucun parti pris, nous sommes arrivés à un résultat qui, effectivement, augmentait les contingents de la clinique privée des HUG. S'en est suivie une levée de boucliers, qui ne concernait pourtant pas la méthode - j'attends encore des critiques là-dessus. Je suis effectivement parti du point A pour arriver à un point que je ne connaissais pas, qui aurait pu être l'inverse de celui qui m'a été présenté, c'est-à-dire que la clinique privée des HUG aurait pu obtenir moins que par le passé. Il se trouve qu'avec les critères objectifs qui ont été posés, elle obtient davantage.
Maintenant, nous sommes dans un processus de planification, le tout est remis aux cliniques, nous attendons leurs critiques. Mais que vous dit-on alors ? Que l'Hôpital entend favoriser la clinique privée des HUG. Mais nous n'entendons favoriser personne ! La seule chose que j'entends favoriser, c'est le service public ! Les cliniques privées n'ont évidemment pas ce rôle de service public; quand un pôle d'activité n'est pas rentable, elles le ferment. L'Hôpital cantonal, lui, est un gros paquebot - je le disais dans un discours bilatéral avec l'un d'entre vous - qui part le 1er janvier et qui arrive le 31 décembre, et je ne peux pas, au milieu de l'année, commencer à démonter les cabines parce qu'il n'y aurait pas assez de passagers ! Ce sont 800 millions, au total, qui sont remis aux Hôpitaux universitaires de Genève. Dans cette enveloppe, il y a trois sous-enveloppes: l'une correspond précisément à une projection de ce que seront les hospitalisations selon les différents pôles d'activité, multipliées par le point SwissDRG des hôpitaux universitaires; une autre est dédiée à la recherche, et la troisième à la formation - soit des activités que les cliniques privées n'ont évidemment pas l'obligation d'assumer. En outre, à l'Hôpital cantonal, je ne peux pas leur dire de fermer certains services qui ne sont pas rémunérateurs: les équipes doivent être présentes du 1er janvier au 31 décembre, les urgences sont ouvertes jour et nuit, alors que les cliniques, évidemment, doivent être rentables ! Je ne leur reproche pas d'être rentables, mais qu'elles ne me reprochent pas d'avoir d'autres objectifs... (Remarque.) ...que ceux de servir leurs intérêts. Car jusqu'au 31 décembre 2011, ces cliniques ont été créées, se sont développées uniquement pour une patientèle privée, et c'est ensuite sous la pression des assureurs privés, qui ont vu l'intérêt, effectivement, de faire intervenir l'argent du contribuable, qu'elles ont postulé pour obtenir des contingents. Aujourd'hui, alléchées par l'odeur du fromage comme le renard de La Fontaine, elles en demandent davantage chaque année ! Or, en tant que gestionnaire d'un service public, je dois aussi avoir à l'esprit qu'en poussant des patients de l'assurance de base à se rendre dans les cliniques privées, alors qu'il n'y a pas de nécessité puisque les Hôpitaux universitaires de Genève peuvent les prendre en charge avec une haute qualité, je démantèle le service public ! A terme, tous les grands pontes de l'Hôpital se diront: «Pourquoi rester à l'hôpital public puisqu'on peut très bien gagner sa vie dans une clinique privée, et qu'on nous y envoie en plus de la patientèle ?» Qu'est-ce que vous voulez, les HUG sont le premier hôpital de Suisse, le septième d'Europe, le quarante-neuvième au monde ! Vous aimeriez qu'il devienne un hôpital de zone ? C'est ce que voudraient, bien sûr, les cliniques; elles n'attendent que cela pour se servir du gâteau. J'ai d'autres préoccupations en ce qui me concerne, c'est d'offrir une médecine de qualité à long terme, pour la majorité de notre population. Et tant qu'il y aura des personnes qui pourront s'offrir des assurances privées, eh bien cette patientèle-là sera la patientèle des cliniques privées ! Que l'on ne marche pas sur les plates-bandes, et que l'on n'inverse pas les rôles.
Quant aux coûts qui seraient inférieurs dans les cliniques privées, ne confondons pas coûts et prix ! On nous dit que le coût SwissDRG d'une clinique privée est de 9600 F, par rapport à 10 400 F pour les Hôpitaux universitaires de Genève. Il y a effectivement une différence, mais cette différence, ce n'est pas le canton qui la fixe, ce sont les assureurs et le préposé au contrôle des prix, parce qu'ils savent très bien - tout le monde sait très bien ! - qu'un hôpital universitaire, pas public mais universitaire, coûte bien plus parce qu'il a d'autres tâches à prendre en charge qu'une clinique privée. Donc si je verse une enveloppe globale aux HUG, non pas par une vue de l'esprit mais parce qu'elle correspond à une projection des tâches que ces hôpitaux devront assumer, lorsque je dis à un patient de base d'aller en clinique privée, ce n'est pas que je vais payer 9600 F au lieu de 10 400 F, c'est qu'en plus des 10 400 F que j'ai déjà versés à l'Hôpital pour faire ce travail, je vais en plus devoir payer 9600 F à une clinique privée. Alors ne soyez pas dupes, Mesdames et Messieurs: ce que l'on vous demande, c'est simplement de suivre l'avis d'un lobby, que je respecte comme tel parce qu'il fait partie du paysage sanitaire et hospitalier genevois et que c'est un partenaire du secteur public - d'ailleurs, je salue l'ouverture de permanences - mais nous ne sommes pas là pour financer, avec l'argent public, des cliniques privées. Si nous le faisons, c'est ce service public que nous allons démanteler.
Maintenant, en ce qui concerne la motion qui vous est présentée, je vais vous dire: ne la renvoyez pas en commission ! (Commentaires.) Renvoyez-la-moi, parce que je vais la respecter ! (Exclamations.) Renvoyez-la-moi ! Qu'est-ce qu'on me dit ? Que je dois assurer, dans l'application de la planification hospitalière cantonale 2015, une égalité de traitement entre le secteur privé des HUG et les établissements hospitaliers privés. C'est ce que j'ai fait ! Et c'est ce que je continuerai à faire ! Vous pouvez me le demander ! Et je vous démontrerai que je le ferai. Vous me demandez quoi ? Maintenir, entre le secteur privé des HUG et les établissements hospitaliers privés, une répartition équitable des prestations, en tenant compte des spécificités des établissements concernés. C'est ce que j'ai fait, et c'est ce que je continuerai à faire. Enfin, on me dit d'étudier les modèles de planification hospitalière mis en place par les cantons de Berne et Zurich; vous croyez que j'ai attendu sur vous pour regarder ce qui se fait ailleurs ? (Protestations.) Bien sûr que non, nous l'avons fait ! Zurich a ouvert les vannes... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et cela lui a coûté 100 millions de plus; aujourd'hui les professeurs de l'Hôpital universitaire de Zurich s'en vont dans les cliniques privées ! Ils s'en mordent les doigts ! (Remarque.) Et cela, je ne le veux pas pour Genève. Alors j'estime que le débat sur la planification aura lieu au printemps 2015, lorsque nous préparerons et vous présenterons, conformément à nos obligations, la planification 2016-2019. Et si vous me demandiez que je vous présente ce qui se fait au département, il n'y aurait pas de problème, je le ferais. D'ailleurs je le ferais ou je le ferai, avec s ou sans s: demandez-moi de le faire, c'est votre droit et c'est même votre devoir que de poser des questions, si vous estimez que ce que nous faisons n'est pas suffisamment clair. Mais considérer, comme vous le faites dans cette motion, que l'Etat serait en train de favoriser un secteur au détriment d'un autre, vous ne pouvez pas le faire; c'est un procès d'intention à mon département, alors qu'au contraire nous avons dans nos mains uniquement le souci de protéger ce service public. Alors renvoyez-moi cette motion, et j'y donnerai suite ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je mets aux voix le renvoi de cette motion à la commission de la santé.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2241 à la commission de la santé est adopté par 50 oui contre 35 non et 2 abstentions. (Commentaires durant la procédure de vote.)
La proposition de motion 2187 est retirée par ses auteurs.
La proposition de motion 2195 est retirée par ses auteurs.
La proposition de motion 2200 est retirée par ses auteurs.
Le président. Mesdames et Messieurs, je vous souhaite une excellente soirée et vous donne rendez-vous demain à 15h. Je lève la séance.
La séance est levée à 22h45.