Séance du
vendredi 27 juin 2014 à
14h
1re
législature -
1re
année -
10e
session -
63e
séance
PL 11441-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. A présent, Mesdames et Messieurs, nous allons aborder successivement cinq duos de projets de lois sur les fondations immobilières de droit public. Tout comme pour l'objet précédent, les rapports d'activité ont été traités par la commission du logement, alors que celle des finances s'est penchée sur les états financiers. Nous commençons avec les premiers projets de lois, concernant la Fondation HBM Camille Martin. La parole est à la rapporteure pour le PL 11441-A, Mme Irène Buche.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Comme un seul rapport a été fait par la commission du logement pour les cinq projets de lois, je souhaiterais pouvoir m'exprimer sur les cinq à la fois, si cela vous convient.
Le président. Allez-y !
Mme Irène Buche. J'aimerais tout d'abord revenir sur un problème abordé tout à l'heure par M. Ivanov, à savoir que la commission du logement n'a été saisie que pour les rapports d'activité de ces cinq fondations, alors que les rapports financiers ont été traités par la commission des finances. Nous avons considéré que ce système n'était pas satisfaisant et ne nous permettait pas de faire un travail sérieux et approfondi. A l'avenir, nous aimerions donc que les rapports d'activité et les états financiers d'une même entité soient attribués à la même commission pour un travail plus efficace.
Je voudrais ensuite attirer votre attention sur le fait qu'il n'y a pas seulement les rapports des cinq fondations à examiner, mais également le rapport du secrétariat des fondations immobilières de droit public, qui chapeaute les cinq fondations. Pour avoir une vision globale, il est important de lire tous ces rapports.
Sur le fond, il faut surtout souligner le rôle primordial que jouent les fondations dans la politique du logement social à Genève, surtout en ce qui concerne les logements HBM, puisque ce sont elles qui gèrent l'ensemble de ce parc immobilier. Elles ont également un rôle éminemment social, car elles s'adressent à des personnes à petit revenu, parfois en proie à d'autres difficultés. D'ailleurs, cela se ressent aussi dans le contentieux surgissant dans ces fondations, qui est probablement plus important que pour d'autres immeubles. Je vous expliquerai tout à l'heure quelle est la solution qui a été proposée par les fondations pour tenter d'y remédier. Les chiffres sont assez impressionnants, puisque ces fondations gèrent 7000 logements HBM et qu'elles en ont environ 1000 en projet pour ces prochaines années, dont 350, je crois, qui devraient être mis sur le marché l'année prochaine. Elles mènent également de nombreux projets de rénovation du parc existant. Pour répondre à M. Genecand, j'ajoute qu'il ne s'agit pas seulement de gérer le stock. Le secrétariat et les conseils des fondations font aussi une partie du travail dévolu aux nouveaux projets. Il ne s'agit donc pas seulement d'un travail de régie.
Ensuite, la particularité du travail de ces fondations est de faire face à un contentieux assez important, essentiellement lié aux problèmes de paiement qu'ont les locataires. En effet, de nombreux locataires se retrouvent en difficulté pour payer leur loyer, n'arrivent parfois plus à gérer et laissent aller les choses, ce qui aboutit à des évacuations. Les fondations ont estimé que cela devait changer: un poste de travailleur social a ainsi été créé, dont la mission est d'intervenir auprès des locataires qui ont un retard dans le paiement de leur loyer, de voir avec eux quels sont les problèmes et comment les résoudre. Cet intervenant social les aiguille ensuite vers des instances sociales si nécessaire, le but étant d'éviter des évacuations ainsi que des pertes locatives pour les fondations.
J'aimerais enfin relever qu'il y a actuellement 7000 demandeurs de logement inscrits à l'OLO et que la moitié d'entre eux ont un revenu inférieur à 50 000 F par an, ce qui démontre bien - s'il fallait encore le démontrer ! - que les besoins en logements bon marché sont considérables et qu'il faut donc persévérer dans ces efforts, continuer à construire des logements HBM et soutenir le travail de ces fondations. Dans ce sens-là, je vous invite, au nom de la majorité, à adopter ces projets de lois.
M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs, je continue, comme tout à l'heure, à traiter ces entités de manière conjointe. D'ailleurs, je signale au passage, pour ceux qui pensent qu'elles sont extérieures à l'Etat, que dans les comptes consolidés de l'Etat, tout cela apparaît. Or aujourd'hui, ce sont ces comptes consolidés qui intéressent ceux qui évaluent notre solidité. Le propos du PLR n'est pas de dire que le travail n'a pas été fait jusqu'à maintenant; il s'agit de dire que les missions - Mme Buche l'a d'ailleurs pratiquement souligné elle-même - sont assez mal définies. Tout le monde fait à peu près tout, à savoir gérer du stock et construire. Notre doute est que, vu l'argent investi... J'ai entendu dire ici qu'il ne s'agissait pas de faire de l'argent. Personne, sur les bancs du PLR, n'a dit qu'on allait faire de l'argent ou augmenter les loyers ! Nous disons simplement que si on a 100 millions de loyers et qu'une bonne gestion permet de dégager 5 millions pour créer des logements neufs, il n'y a aucune raison de ne pas s'en servir. Il n'y a aucune raison de dilapider 5 millions dans des frais de structure si on peut en disposer pour créer chaque année une centaine de LUP supplémentaires. Voilà notre propos. Aujourd'hui, il y a une très grosse organisation qui se trouve hors du giron administratif de l'Etat, mais qui apparaît quand même dans ses comptes consolidés; il en porte donc la dette ainsi que - plus ou moins - la responsabilité. Jamais il n'a été question de concentrer les bâtiments à l'OLO. Mais l'OLO a une liste de gens qui demandent des logements, et cette liste ne cesse de s'allonger. Je ne vois pas pourquoi on tiendrait trois ou quatre listes dans le canton. Si on a une seule liste, elle devrait pouvoir servir pour tout le monde, voilà le propos. Il n'y a pas de critique quant à ce qui a été fait. Ce qui a été fait l'a été dans le cadre de ce qui était prévu par les législations en vigueur. Il s'agit davantage d'une question de réflexion quant au futur. L'enjeu du logement est stratégique. L'Etat n'a pas forcément énormément de fonds pour faire face au défi du logement et de la construction. Il s'agit ici d'entités qui ont un patrimoine extrêmement bien doté. Peut-être pourrait-on mieux utiliser l'argent du contribuable, non seulement pour garder les logements qui existent - ça, c'est sûr - mais aussi pour continuer à les gérer à destination de la population qui en a besoin de manière administrativement moins lourde et moins chère, ceci afin de réserver le capital ainsi dégagé - parce que ce n'est pas une honte - pour construire de nouveaux logements. Voilà le propos que je voulais tenir tout à l'heure et que je termine maintenant.
Mme Caroline Marti (S). Effectivement, quinze nouveaux logements ont été construits en 2013 par les fondations immobilières de droit public, quinze logements pour répondre à 7000 demandeurs ! C'est peu dire que l'offre et la création de logements sociaux à Genève sont largement insuffisantes pour répondre à la demande. J'aimerais vous rappeler que les fondations immobilières de droit public constituent l'un des leviers d'action principaux pour l'extension du parc de logements sociaux. Je vous rappelle également que l'objectif est que le parc LUP recouvre 20% du parc immobilier global. Or, en 2013, seuls 9,4% du parc total étaient du logement LUP, avec une augmentation quasi nulle pendant cette année 2013. Je n'énonce pas ces chiffres pour critiquer la gestion des fondations, mais pour souligner le manque de moyens financiers qui leur sont actuellement alloués tout comme, de manière plus générale, à la politique pour le logement social dans le canton de Genève. Celle-ci est mise à mal non seulement par le manque de moyens financiers, mais également par certains projets de lois de députés de ce Grand Conseil. Je pense notamment à celui visant à prélever de l'argent sur le fonds LUP afin de financer les espaces publics. Ce n'est absolument pas sa vocation, et cela prétérite la construction future de logements dont la population a absolument besoin.
Le parti socialiste souhaite également saluer - comme l'a fait Mme Buche - la création d'un poste d'intervenant social pour les fondations immobilières de droit public. Cette personne a pour fonction de mettre les locataires ayant de la peine à payer leur loyer en contact avec des instances sociales compétentes. Cela permet d'une part de limiter les pertes locatives et d'éviter des drames humains causés par des expulsions et, d'autre part, de réduire les dépenses de procédure liées à ces contentieux. Les fondations immobilières de droit public ont ainsi mis en place une stratégie «win-win», qui est au bénéfice des locataires tout comme des fondations elles-mêmes. C'est une politique et une décision que le parti socialiste salue et encourage pour les années à venir. (Quelques applaudissements.)
M. Pascal Spuhler (MCG). Pourriez-vous transmettre à M. Genecand, Monsieur le président, que l'office du logement et les fondations immobilières de droit public ne possèdent pas deux listes différentes de demandeurs de logement ? Je vous conseille, Monsieur, de vous renseigner auprès de votre voisin de gauche, qui connaît bien le système. Il y a bien une seule et même liste puisque les communications sont transversales et passent par l'informatique. Eh oui, l'informatique fonctionne aujourd'hui, étonnamment ! Les gens inscrits soit à l'office du logement soit auprès des fondations figurent bien évidemment dans la même base de données. Il est vrai que l'on peut déplorer qu'il y ait près de 8000 demandeurs de logement à Genève. Nous avons donc absolument besoin de construire.
Concernant le travailleur social engagé par les fondations, on ne peut que saluer son travail, qui est fantastique. Il a été engagé à la fin de l'année passée et a déjà fait un énorme travail auprès des locataires ayant des difficultés financières pour les soutenir et les diriger - comme l'a relevé ma préopinante - vers des instances qui peuvent les aider socialement et financièrement. Il fait ainsi le nécessaire pour que les fondations immobilières ne perdent pas trop d'argent avec ces gens. Rappelons que les fondations sont non seulement actives dans la construction HBM et LUP, mais effectuent aussi tout un travail social. Saluons par exemple le travail social réalisé à Versoix au lieu-dit La Potinière, où de nombreuses prestations sont offertes à la population qui y habite. Les fondations ont racheté quatre des cinq immeubles de cet endroit et, à l'heure actuelle, énormément d'activités sociales sont proposées à ces gens au revenu modeste. Je pense que les fondations font un grand travail au niveau des HBM pour les personnes en difficulté financière qui ont besoin de logements, et qu'il est important de pouvoir maintenir cette proximité avec les gens qui y travaillent et les administrateurs. C'est d'une importance primordiale ! Voilà, c'est tout. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Cyril Aellen (PLR). Monsieur le président, vous remercierez la députée Marti de nous donner un chiffre intéressant - parce que c'est de cela qu'on parle - à savoir quinze nouveaux logements. Je vais vous en donner un autre: 30 millions par an. Voilà le problème ! Voilà ce qu'il faut résoudre ! L'argent ne crée pas forcément de logements, ce n'est pas une équation automatique.
J'aimerais rompre une deuxième lance, à savoir qu'en réalité, le logement bon marché ou social n'est en rien une exclusivité du public. Il y a des fondations de droit privé qui fonctionnent - et qui fonctionnent mieux - sans subventions de la part de l'Etat, qui créent plus, qui gèrent mieux et qui n'ont pas de loyers différents de ceux des fondations de droit public. Cela n'a rien à voir. Plus encore, il faut savoir que dans le cas des attributions de logements sociaux, les appartements, même de fondations ou entités de droit privé, sont partiellement donnés à l'Etat qui, dans 20% des cas, attribue librement ces logements sociaux détenus par des privés propriétaires sans que ceux-ci aient un mot à dire. Il ne faut pas confondre logement social et logement public. De même, il ne faut pas confondre logement privé et niveau des loyers. Comme nous l'avons vu tout à l'heure - M. Poggia l'a très clairement indiqué - il y a d'autres entités comme l'Hospice général qui gèrent très bien le logement social et arrivent, sans soutien, à gérer des immeubles avec des locataires difficiles et une administration plus adéquate. Il faut dire aussi, s'agissant notamment de la FPLC, qu'une partie des biens acquis servent aujourd'hui à renflouer la RISA et en rien - je le répète, en rien ! - à créer des logements sociaux. Est-ce cela que vous voulez cautionner ? A titre personnel, pas du tout. Vous pouvez aussi prendre les comptes de la FPLC, et vous constaterez qu'elle détient par exemple des centres commerciaux. Est-ce normal ? Je pose la question. Reprenez les comptes, et vous verrez par exemple que le taux moyen des emprunts hypothécaires dans les fondations...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Cyril Aellen. Merci, Monsieur le président ! ...est supérieur au taux d'emprunt non hypothécaire de l'Etat. Ne croyez-vous pas qu'il y a des gains d'efficience sur ce point-là également ? Enfin, le dernier point - je conclurai là-dessus, Monsieur le président - concerne l'intervenant social. Je m'en réjouis, et je pense que cela fonctionne bien. La question que je me pose cependant est la suivante: est-il normal d'avoir des assistants sociaux aux niveaux cantonal, communal et des fondations de droit immobilier ? N'avons-nous pas les moyens d'avoir des gains d'efficience ?
M. Daniel Sormanni (MCG). J'aimerais juste dire quelques mots. Vous transmettrez, Monsieur le président, aux députés Genecand et Aellen, qui viennent de s'exprimer. Je crois que je n'arriverai jamais à être d'accord avec le parti libéral quant à la politique du logement. Vous êtes les premiers à vilipender d'éventuelles actions de l'Etat, et vous voudriez aujourd'hui transférer toutes ces activités à l'Etat, prétextant que ce serait plus efficace ? Non, Mesdames et Messieurs, je crois que c'est une erreur.
Vous dites que le privé fait aussi du logement social. Bien heureusement ! Ce que vous oubliez de mentionner, c'est qu'une fois sortis de la période du contrôle de l'Etat, ces loyers deviennent libres ! Voilà bien notre problème à Genève, à savoir que le parc de logements LUP n'a cessé de diminuer depuis de nombreuses années. Il ne fait que diminuer parce que les immeubles faits par les privés sortent du contrôle de l'Etat. L'avantage des fondations de droit public ainsi que de la FPLC, qui remettent des appartements à des fondations ou à des coopératives, c'est qu'on fait du logement social pérenne ! C'est ça qui est important ! On n'en arrive pas au moment où, sortis du contrôle, on se met à faire des loyers libres qui augmentent au fil du temps. Voilà ce qui est important ! Il s'agit de maintenir un socle. Dans le canton de Genève, nous sommes particulièrement en retard par rapport aux logements LUP - Mme la députée Marti l'a rappelé - c'est-à-dire qu'on se situe à 9,4% - je crois - alors qu'on devrait en avoir au minimum 20% ! Regardez ce qui se fait à Zurich ! Là-bas, il y a 20% de logement social en tout, et la population vient de décider de hausser ce taux à 30%. Ils vont y arriver, ils vont le faire avec l'aide des coopératives. Sommes-nous plus bêtes qu'ailleurs à Genève ? Non, je ne le crois pas. Simplement, il y a une volonté - et finalement une lutte - entre les promoteurs privés et les promoteurs sociaux proches de l'Etat, les fondations de l'Etat et les coopératives. Ce n'est pas ça qu'on devrait faire; on devrait être complémentaires, chacun dans son segment. A Zurich, ils n'ont pas besoin de s'en occuper. Les privés font leurs PPE, leurs logements d'un certain niveau pour une certaine partie de la population, alors que l'Etat et la Ville de Zurich s'occupent des autres logements, à savoir les logements contrôlés dans le périmètre de l'Etat - qui a aussi ses fondations - ainsi que de l'aide aux logements coopératifs. Ils font des logements sociaux pérennes ! C'est dans cette direction qu'il faut aller, et pas dans l'autre ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Cyril Aellen, à qui il reste trois minutes.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président. Je crois que ce que nous venons d'entendre est tout simplement faux. Il suffit de relire les rapports. Le nombre de LUP augmente, certes moins rapidement que vous le souhaiteriez, mais il augmente. Il ne diminue pas. Il est vrai que le nombre de loyers subventionnés diminue. Mais il diminue pour des raisons mécaniques, parce que le choix effectif de l'Etat a précisément été de changer de système et de ne plus forcément faire des HLM - comme c'était le cas à l'époque - mais de fonctionner selon une autre façon de procéder. Voilà ce qu'il faut rappeler si on dit les choses avec transparence.
En effet, les logements sociaux ne croissent pas assez vite. Je suis le premier à le dire ! Mais la plus mauvaise façon d'y remédier, c'est de tout confier aux fondations immobilières de l'Etat parce qu'on démontre - et vous pouvez le voir - que la croissance est liée non pas au public mais au privé.
Enfin, Mme Marti disait qu'il y a eu quinze nouveaux logements l'année passée. Or il y a aussi eu 30 millions d'investissements. Pensez-vous vraiment qu'il s'agisse là d'un ratio raisonnable ? Ma réponse est non. Mme Marti nous disait tout à l'heure qu'il ne fallait pas enlever l'argent consacré au développement de ces quinze nouveaux appartements et surtout ne pas le donner dans le cadre de l'investissement dans les équipements publics. Mais c'est exactement le contraire qu'il faut faire ! C'est le rôle de l'Etat que d'équiper et de procéder à des investissements dans le cadre des équipements publics, précisément pour permettre aux privés de construire les logements sociaux que vous appelez de vos voeux. Voilà la problématique. L'Etat veut tout faire mais ne fait finalement rien, alors que des privés sont là et n'attendent qu'une seule chose, à savoir que l'Etat fasse son travail pour qu'ils puissent construire.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Daniel Sormanni. Il vous reste deux minutes trente.
M. Daniel Sormanni (MCG). Merci, Monsieur le président. Je vais être très bref. C'est là une belle pétition de principe - vous transmettrez au député Aellen. Alors, faites en sorte que les promoteurs privés acceptent un contrôle des loyers pérenne dans les logements sociaux que vous voulez faire ! Mais vous n'êtes pas d'accord avec cette façon de voir. Changez aussi cette mentalité, et ce ne seront alors peut-être pas seulement les fondations de l'Etat ou les coopératives - que nous ne mettons d'ailleurs pas suffisamment en avant, et qui, sans subventions de l'Etat, font du logement social pérenne. Voilà justement l'erreur qui est faite à Genève, parce que c'est une autre mentalité. Pourquoi parvient-on à le faire ailleurs en Suisse, notamment en Suisse allemande, mais pas à Genève ? C'est une question de mentalité des promoteurs privés qui, à Genève, veulent axer leur action uniquement sur le profit !
M. Michel Ducommun (EAG). Je vais être assez bref, Monsieur le président. J'ai une question à M. Aellen. Je remarque que M. Aellen aime beaucoup certains chiffres, mais n'en donne pas d'autres. Bien sûr, quinze logements LUP faits par les fondations, ce n'est pas beaucoup, tandis que 30 millions est un chiffre qui impressionne. Le privé fait beaucoup plus ? Désolé, mais «beaucoup plus» n'est pas un chiffre concret. Personnellement, j'ai donné des chiffres concrets l'autre jour. En cinq ans, on a construit 990 LUP. Dans le même temps, on a construit 2311 appartements en PPE et 1377 villas. Quand je regarde ces chiffres-là... On devrait dire que c'est l'Etat qui va mal s'agissant des LUP, et puis un grand merci au privé ? Je ne vois pas pourquoi on dirait merci au privé !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Cyril Aellen, à qui il reste une minute vingt-sept.
M. Cyril Aellen (PLR). Merci, Monsieur le président, je n'en aurai pas besoin d'autant. Vous avez raison, Monsieur Ducommun, reprenez vos chiffres. C'est exactement ce qu'il faut faire. Il y en a quinze dans le public, et vous parlez de 990 ? Qui fait le solde ? C'est aussi du logement social. C'est aussi du logement social ! Je reconnais avec vous... (Brouhaha. Commentaires.)
Le président. Chut !
M. Cyril Aellen. Je ne vous ai pas interrompu, Monsieur Ducommun ! Je reconnais avec vous que dans les endroits où il y a plus de libertés, on construit mieux, et en particulier dans les zones villas. Vous avez raison ! C'est pour cela qu'il faut donner un peu plus de sphère de liberté pour construire plus de logements sociaux là où cela peut se faire, mais pour autant que les communes acceptent de financer les équipements publics et ne rachètent pas simplement les logements construits par le privé pour en constituer artificiellement un parc de LUP !
Mme Caroline Marti (S). Je voudrais juste rappeler à M. Aellen qu'il incombe également aux fondations immobilières de droit public d'entretenir et de gérer leur parc de logements. De plus, elles doivent construire un parc de logements, et c'est sur la question des moyens à disposition pour la construction de nouveaux logements que j'émets certains doutes. Je suis également tout à fait heureuse de vous entendre dire, Monsieur le député - vous transmettrez, Monsieur le président - que vous appelez de vos voeux une augmentation de la construction de logements LUP. J'aimerais quand même vous rappeler que votre parti et vous-même avez voté très dernièrement un renvoi en commission du projet de loi de déclassement sur les Corbillettes, en demandant de déclasser cette parcelle en zone ordinaire. Or en zone ordinaire, il n'y a aucune obligation de construire des logements LUP, ce qui est le cas lorsqu'on déclasse en zone de développement. Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que je n'arriverai décidément pas à me mettre d'accord avec M. le député Aellen - vous lui transmettrez, Monsieur le président. D'abord, la FPLC fait de l'acquisition de terrains pour les remettre à d'autres, c'est-à-dire aux fondations, aux coopératives, à toutes les fondations, y compris les communales, d'ailleurs. Elle ne construit donc pas elle-même, mais délègue à d'autres acteurs qui agissent sur le terrain du logement social, à savoir les LUP et les coopératives. M. le député Aellen a parlé d'un centre commercial. En l'occurrence, personne ne voulait de ce centre commercial à Meyrin ! Ce centre commercial sera rentable et, avec cette rentabilité, on pourra faire du logement social. Je crois que ce sont des arguments d'une parfaite mauvaise foi que de prétendre que quinze logements ont été faits par les fondations et des milliers par les privés, qui font pour l'essentiel de la PPE et ne viennent pas vraiment sur le terrain du logement social, ou si peu ! J'aimerais aussi rappeler qu'il y a des fondations, notamment la fondation de la Ville de Genève, qui travaillent énormément sur le logement social et font des HBM. A part les fondations, il n'y en a plus beaucoup sur ce terrain qui font du HBM. Par conséquent, on ne peut pas tenir ce discours. Ce sont justement les fondations et les coopératives - j'insiste là-dessus - qui font du logement social et non les privés, malheureusement. On peut le regretter, mais c'est comme ça.
M. Christian Dandrès (S). Je voulais répondre à M. Aellen. Vous avez voulu tirer prétexte de ce débat pour faire un vibrant plaidoyer pour le secteur privé et expliquer que, par essence, il serait plus efficace que le public. Avant de bazarder l'héritage de votre ancien magistrat - nous parlons là en effet de la nouvelle politique sociale du logement de M. Mark Muller, qui est aussi l'ancien secrétaire général de l'association que vous présidez - je pense qu'il faudrait faire un bilan. Vous relevez que peu de logements ont été construits par les fondations immobilières de droit public. La question doit être réglée avec la FPLC. Lorsque nous avons auditionné M. Barro, il nous a expliqué que la FPLC avait dû - vous l'avez vous-même relevé - recapitaliser la RISA, ce qui est un réel problème. En somme, c'est un «mandat» - entre guillemets - que le Conseil d'Etat a donné à la FPLC, alors qu'il n'avait pas à le faire. Ce n'est pas le rôle de la FPLC. Il s'agit là d'un point à corriger, et c'est l'une des raisons pour lesquelles le groupe socialiste s'était abstenu sur ce rapport.
Le second élément concerne un autre magistrat PLR, à savoir M. Longchamp. Lorsqu'il est arrivé au département de l'urbanisme, M. Longchamp a inscrit le principe de la subsidiarité au coeur de la politique de construction de logements HBM par les fondations immobilières de droit public et la FPLC, en soutenant que si le privé pouvait construire, ni la FPLC ni les fondations immobilières de droit public n'interviendraient. Il n'y a là donc rien de très étonnant au résultat que vous dénoncez, Monsieur; c'est malheureusement le fruit de la politique qui a été menée par le Conseil d'Etat. Je pense qu'il serait intéressant que la commission du logement du Grand Conseil puisse revoir les missions de la FPLC avec un recadrage ne nécessitant pas nécessairement de modifications de lois. Par ailleurs, je crois qu'il est relevé dans le rapport que la FPLC s'apprête à demander des modifications de lois. Cela n'est pas son rôle. Le message envoyé par la commission du logement devrait suffire à rappeler quelques règles. Si tel n'est pas le cas, il faudrait aller plus loin, et j'espère que nous pourrons compter sur le magistrat actuellement en charge du DALE pour que la FPLC se consacre à ses missions et que les 35 millions - si tant est, naturellement, que votre projet de loi ne passe pas - soient affectés à la construction de logements HBM. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Pascal Spuhler, pour dix-huit secondes.
M. Pascal Spuhler (MCG). Merci, Monsieur le président. Ce sera très court. Je voulais encore rappeler une autre mission des fondations de droit public, qui est de redonner 20% des logements pour les logements d'urgence. Ce ne sont pas les promoteurs privés qui vont le faire, Monsieur Aellen. Pour terminer, je voudrais aussi préciser, Monsieur le président, que je m'abstiendrai sur ce vote, puisque je fais partie des fondations immobilières de droit public.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée Marion Sobanek, à qui il reste une minute quarante-sept.
Mme Marion Sobanek (S), députée suppléante. Merci, Monsieur le président. J'aimerais simplement ôter quelques illusions quant à la soi-disant construction de LUP par le privé. En huit ans de commission de l'urbanisme à Chêne-Bougeries, je n'ai vu qu'un seul projet avec des LUP: on avait effectivement proposé à la commune d'en acheter, mais c'étaient de tels clapiers que nous avons renoncé. A l'unanimité, la commission a refusé d'acquérir ces logements. Voilà ce que je voulais ajouter s'agissant des constructions de logements sociaux par le privé.
Mme Irène Buche (S), rapporteuse. J'aimerais tout d'abord revenir sur deux mots que j'ai entendus tout à l'heure, à savoir «locataires difficiles». Je souhaiterais que l'on parle plutôt de «locataires en difficulté», parce que le premier terme implique d'autres choses. S'agissant ensuite de l'intervenant social, un député PLR se demandait si ce travail ne pouvait pas être réalisé pas d'autres assistants sociaux engagés par la commune ou le canton: non, car celui-ci a une mission très spécifique en faveur des fondations, d'une part pour éviter des pertes locatives et, d'autre part, pour que les locataires ne se fassent pas évacuer. Il s'agit d'une mission spécifique qui ne peut pas être effectuée par d'autres services sociaux. Bien sûr, cela renchérit les coûts de fonctionnement des fondations. Mais je rappelle une nouvelle fois que le secrétariat des fondations n'est pas une régie. Il a d'autres tâches et, forcément, les coûts sont un peu plus élevés.
Par ailleurs, je voudrais relever qu'il existe une bonne coordination entre l'office du logement et les fondations immobilières de droit public. Comme M. Spuhler l'a relevé tout à l'heure, il n'y a qu'une seule liste de demandeurs de logement. Cela fonctionne très bien. On s'inscrit à l'un, on est automatiquement inscrit aux autres. Pour terminer, j'aimerais demander la chose suivante à M. Aellen: quel propriétaire privé serait d'accord de construire des HBM ou tout du moins des logements équivalents à des HBM ? Ce serait évidemment très intéressant. On voit bien que les fondations ont leur propre rôle à jouer, à savoir construire des logements HBM pour les personnes les plus défavorisées. Je vous parlais tout à l'heure des demandeurs de logement, ces 7000 demandeurs de logement dont la moitié a un revenu inférieur à 50 000 F.
Une nouvelle fois, je vous invite à voter ces projets de lois, puisque je me suis exprimée pour l'ensemble des projets de lois. Je vous remercie.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, en 1990, notre canton comptait 23% de LUP. En 2013, il y en a moins de 10%: voilà les conséquences de la vision du logement social d'une certaine génération, à savoir des HLM qui duraient vingt ans dans leur dimension de logement social avant de rejoindre le marché. Aujourd'hui, le système a changé. Nous construisons du logement social pérenne. Cela est important, même s'il s'agit d'un pari plus triste sur l'avenir: à l'époque, on se disait que l'ascenseur social allait permettre à ces mêmes locataires de payer un loyer libre. Malheureusement, on constate que les cycles économiques et les capacités des plus faibles d'entre nous ne sont pas toujours au rendez-vous. Il est fondamental que notre canton offre des logements pour les plus modestes, faute de quoi nous nous dirigeons au-devant d'une crise sociale beaucoup plus importante. Mesdames et Messieurs les députés, la crise du logement frappe toutes les catégories de la population. Mais vous admettrez avec moi que lorsque l'on dispose de 4000 F à 5000 F par mois pour un loyer, on trouve un logement en une semaine, alors qu'avec 1200 F à 1500 F pour loger sa petite famille, cela est beaucoup plus difficile. C'est dire si le rôle des fondations immobilières dans le cadre du logement social est fondamental, même s'il est vrai que d'autres acteurs y participent, y compris le privé.
S'agissant du bilan 2013 au niveau de la construction - soit quinze logements construits - il faut rappeler que c'est toujours un phénomène de cycle. Il est donc difficile d'avoir une vue globale sur une seule année. Regardons malgré tout de plus près. Prenons par exemple le projet des Cherpines. Le Conseil d'Etat de l'époque avait explicitement interdit aux fondations d'acquérir du terrain aux Cherpines. C'est écrit noir sur blanc ! Une interdiction formelle du prédécesseur de mon prédécesseur aux fondations de postuler aux Cherpines. J'ai en tête l'exemple d'une autre commune - à majorité rose et verte, je dois dire - qui a également déclaré qu'elle ne voulait pas de fondation immobilière cantonale sur son grand projet. Mesdames et Messieurs, en tant que chef du département, j'ai pris la décision, il y a quelques mois, auprès de l'office cantonal du logement et de la planification foncière et en lien avec la FPLC, de rétablir ce qui existait avant le changement de règles intervenu il y a quelques années, c'est-à-dire le fait que la FPLC attribue 50% de ses terrains aux coopératives et 50% aux fondations. En effet, les fondations ne bénéficiaient plus - ou pratiquement plus - de terrains de la part de la FPLC à cause d'une décision politique du prédécesseur de mon prédécesseur. Aujourd'hui, je trouve délicat de blâmer la fondation pour cet état de fait, alors qu'elle a subi des décisions politiques qui l'ont effectivement empêchée de développer du logement social, parce que l'enjeu était en partie financier.
Mais ce n'est pas là l'essentiel. L'essentiel, c'est le terrain. Comment acquiert-on le terrain ? Encore une fois, nous devrons réfléchir, dans le cadre des futures «Rencontres du logement», à la façon dont se réalise l'articulation entre les promoteurs privés - qui doivent pouvoir mener leur travail et le font certainement dans des conditions parfois plus rapides que l'Etat - et les fondations, qui construisent des logements à des loyers plus abordables mais doivent aussi pouvoir bénéficier de ces terrains pour construire. Mesdames et Messieurs, la construction de logements passera par la mixité sociale ou ne passera pas.
Monsieur le président, je prends trente secondes de plus pour vous dire que nous avons un véritable enjeu de gouvernance avec les fondations immobilières. Il y a cinq conseils de fondations, septante administrateurs, un secrétariat - parfois remis en cause par les administrateurs de manière individuelle - et pratiquement cinq méthodologies d'attribution différentes. Voilà qui ne va pas ! Il est vrai que la liste de l'OLO et des fondations est la même. Mais comment distribue-t-on les appartements par la suite ? Cela dépend des critères internes aux fondations. Sachez que cette situation ne me convient pas du tout et que, pas plus tard qu'hier, j'ai donné des instructions auprès du secrétariat de la CAFI afin qu'une réflexion sur des critères uniques pour l'ensemble des fondations soit menée. Ensuite, il reviendra à chaque fondation de les appliquer.
J'aimerais par ailleurs ajouter une information quant au rôle des administrateurs. Pour un administrateur, le salaire de 100 F par heure est un bon revenu horaire. Pourquoi ? Parce qu'il y a toute la préparation des séances, ainsi qu'une certaine prise de risques. Il s'agit du rôle d'un administrateur. Or il arrive souvent, dans le cadre des fondations, que certains administrateurs s'auto-mandatent pour faire de la gestion de terrains ou pour mener différentes missions qui ne sont pas toujours bien définies. Et ils sont toujours payés 100 F de l'heure ! Ce sont là des pratiques que je ne peux tolérer de manière générale en ce qui concerne le bien public, et encore moins quand il s'agit de ressources destinées au logement des plus faibles d'entre nous. Sachez que mes ordres à l'égard des collaborateurs de l'OLO de même que du nouveau président nommé par le Conseil d'Etat - M. Lorenzini - et de la suppléante du conseiller d'Etat - Me Grobet Thorens - sont très clairs. Ces pratiques doivent être améliorées dans un délai d'un à deux ans. Si ce n'est pas le cas, je reviendrai devant vous avec des propositions de modifications législatives pour que cette gouvernance soit nettement améliorée.
Encore un tout dernier mot pour dire que les fondations immobilières ont aussi un rôle de passeur social. Malheureusement, on relève souvent une certaine stigmatisation des habitants d'HBM. Je n'ai vu aucune étude chiffrée prouvant que ces locataires seraient plus problématiques que d'autres. Evidemment, la pauvreté et la détresse entraînent parfois une difficulté sociale supplémentaire, mais celle-ci doit être régulée.
En termes de qualité du bâti, ces immeubles ne doivent pas être significatifs par rapport aux autres. Ce que je veux dire par là, c'est que ce n'est pas parce que l'on construit des HBM que l'on doit construire des logements trop bon marché. Il faut créer des logements qui ne coûtent pas trop cher, mais qu'on ne doit pas pouvoir identifier dans leur architecture ou leurs matériaux utilisés. C'est pourquoi, quand on construit pour les plus modestes d'entre nous, on doit aussi construire avec toute la qualité architecturale nécessaire pour obtenir un urbanisme de qualité. J'entends vraiment que les fondations poursuivent leur travail dans ce sens.
Voilà, Mesdames et Messieurs. Un effort sur la gouvernance, un renforcement des moyens en matière de foncier pour ces fondations, et nous pourrons gentiment commencer à imaginer augmenter le pourcentage de LUP afin d'atteindre ce que nous demande la loi, ce qui est issu de l'accord du logement, à savoir 20% de LUP dans ce canton.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons nous prononcer sur l'entrée en matière du PL 11441-A.
Mis aux voix, le projet de loi 11441 est adopté en premier débat par 65 oui et 25 abstentions.
L'article unique de la loi 11441 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11441 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 65 oui et 23 abstentions.
Le président. Nous passons au PL 11440-A.
Mis aux voix, le projet de loi 11440 est adopté en premier débat par 62 oui et 25 abstentions.
L'article unique de la loi 11440 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11440 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 64 oui et 25 abstentions.