Séance du
vendredi 27 juin 2014 à
10h10
1re
législature -
1re
année -
10e
session -
62e
séance
PL 11455-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous poursuivons nos débats sur les comptes avec les états financiers. Le temps défini est de vingt et une minutes pour l'ensemble des projets de lois du périmètre consolidé. Les rapporteurs auront trois minutes par objet. Nous commençons avec les PL 11455-A et 11454-A sur les SIG. Nous traitons ces deux objets ensemble et procéderons de même pour chaque paire de projets de lois. Je cède la parole à M. Benoît Genecand, rapporteur pour les deux objets.
M. Benoît Genecand (PLR), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une large majorité de la commission vous recommande d'accepter ces deux projets de lois. Aucun groupe n'a demandé à faire un rapport de minorité, aucun commissaire n'a voté contre. Il ne faut toutefois pas interpréter ce large soutien comme une marque de satisfaction avec la marche des affaires ou de sérénité par rapport à l'avenir: les SIG ont traversé une période de turbulences qui a eu un impact tant sur les chiffres que sur la gouvernance de l'entreprise. Disposant de beaucoup d'argent - de trop ! - les SIG se sont engagés sans grand discernement dans une série d'investissements tournant autour des énergies renouvelables en faisant des paris audacieux avec des partenaires parfois peu fiables. Cette aventure aura eu un seul bénéfice, celui de démontrer que l'on peut mener une politique d'investissement non durable dans le domaine des énergies renouvelables !
Un exercice drastique de réévaluation des risques a eu lieu en 2013 avec la constitution d'importantes provisions. Celles-ci devraient suffire pour couvrir les pertes de valeur futures. Cela dit, un risque résiduel persiste dans les contrats de fourniture d'électricité à long terme. Ce risque est important si les prix de l'électricité demeurent bas au-delà de 2016. La manière adéquate d'organiser le contrôle de cet important établissement de droit public, dans lequel le canton détient une participation de 55%, reste à définir. La difficulté sera de trouver un bon équilibre entre les intervenants, d'éviter l'amoncellement des strates de contrôle et la dilution des responsabilités. Il faut rappeler que le système actuel donne à la direction de l'entreprise la responsabilité de la gestion opérationnelle et au conseil d'administration celle de la gestion stratégique. Quant au Conseil d'Etat, qui nomme les membres du CA et surtout son président, il exerce la surveillance des établissements de droit public - et donc des SIG - alors que notre Grand Conseil se voit confier, par la constitution, des fonctions de haute surveillance. Le risque, Mesdames et Messieurs, est que plus on monte dans les degrés de surveillance, plus l'information arrive tard et filtrée, comme si le plus haut degré de cette échelle de surveillance n'était alimenté que par un mauvais café que le Grand Conseil se voit obligé qui plus est de boire froid.
Mesdames et Messieurs les députés, une nouvelle direction est désormais en place avec, à sa tête, un nouveau conseil d'administration. La nouvelle direction a fait preuve d'une grande transparence dans l'analyse des chiffres et des défis auxquels les SIG font face. La commission a souhaité encourager ces nouveaux organes dans leur effort de prudence...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Benoît Genecand. ...et de transparence, tout en soulignant leur défi qui sera d'allier un esprit d'entrepreneur avec une maîtrise des risques opérationnels et stratégiques.
Mesdames et Messieurs les députés, les SIG remplissent une fonction primordiale pour le canton...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur Genecand.
M. Benoît Genecand. Je vais le faire, Monsieur le président.
Le président. Merci.
M. Benoît Genecand. Il s'agit de favoriser un approvisionnement énergétique suffisant, sûr, économique, diversifié et respectueux de l'environnement. Cette fonction se situe au coeur du fonctionnement socio-économique de toute ville; il n'en va pas autrement pour Genève. Comme dans d'autres domaines, ce qui est acquis perd de sa valeur avec le temps, et on se demande parfois si la population se rend bien compte du privilège dont elle bénéficie d'avoir accès à l'eau potable simplement au robinet, à l'électricité par un interrupteur ou à la chaleur du radiateur. C'est en se centrant sur ce rôle crucial que les SIG...
Le président. C'est terminé, Monsieur !
M. Benoît Genecand. ...répondront au mieux au mandat des autorités et aux besoins de la population.
Mme Magali Orsini (EAG). Je voulais juste ajouter un élément en complément du rapport de la Cour des comptes s'agissant de la provision pour pertes de 188 millions et sous réserve des enquêtes encore en cours. Concernant le principe de sincérité du bilan, il me semble que des provisions auraient dû être faites au cours des exercices précédents. Il y avait suffisamment d'éléments pour les faire. Merci, Monsieur le président.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe MCG s'était abstenu en commission en attendant la reddition du rapport de la Cour des comptes. Voilà qui est chose faite. Aujourd'hui, nous devons malheureusement constater que le MCG, une fois de plus, avait eu raison avant les autres. (Exclamations.) Une fois de plus, les Services industriels ont menti au parlement et à la population, notamment en ce qui concerne EDH lorsque nous avions soulevé le cas en commission des finances et/ou en commission de contrôle de gestion. On était venu nous expliquer que nous étions des idiots, que nous ne comprenions rien, que la société EDH représentait un bon investissement et qu'il y avait une contrepartie énergétique pour de l'énergie verte. Or la Cour des comptes a statué: tel n'est pas le cas ! Il s'agissait d'un investissement purement financier. Nous parlons de 300 millions de francs, Mesdames et Messieurs, investis par des golden boys qui ont oublié qu'ils étaient des fonctionnaires avant tout au service de la population genevoise et non au service du capitalisme pour jouer les boursicoteurs ! Oui, 300 millions investis en bourse pour acheter non pas 100% d'une société mais seuls 15,2%, c'est-à-dire avec pour seul droit, en tant qu'actionnaire, celui de fermer sa gueule et d'en abuser !
Non, Mesdames et Messieurs, la gestion des Services industriels a été chaotique. Ils se sont moqués de nous autres, députés qui sommes soi-disant la haute autorité de surveillance. Encore faudrait-il que nous ayons les bonnes informations pour surveiller quoi que ce soit. Je dédouane aussi une partie - en tout cas la majorité - du conseil d'administration des Services industriels car il est maintenant établi par la Cour des comptes que la direction, dans sa globalité, a caché des informations au conseil d'administration qui n'a décemment pas pu prendre les bonnes décisions concernant les investissements.
Il y a quelques minutes, Mesdames et Messieurs, je vous disais que le précédent gouvernement fut le pire que Genève ait connu depuis l'après-guerre. J'aimerais ici rappeler qu'il y a eu successivement un Vert et une PLR qui ont littéralement détruit les Services industriels. Je le dis sans vergogne face au gouvernement. Aujourd'hui, il y a un nouveau conseiller d'Etat...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Eric Stauffer. Je vais conclure, Monsieur le président. Il y a un nouveau conseiller d'Etat en qui nous fondons quelque espoir pour remettre de l'ordre dans cette régie publique et surtout lui rappeler impérativement que sa mission est de fournir de l'eau, de l'électricité et du gaz au meilleur prix, et non pas d'aller investir dans des sociétés cotées en bourse pour faire de l'argent sur le dos des Genevois, d'autant qu'il s'agit d'un monopole d'Etat. Nous refuserons ces comptes. Merci. (Quelques applaudissements.)
M. Olivier Cerutti (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, les Services industriels sont effectivement - faut-il le rappeler ? - la propriété de l'Etat à 55%, avec 30% pour la Ville de Genève et 15% pour l'ensemble des communes. A ce stade, j'aurais imaginé entendre nos partenaires. Malheureusement, la commission ne les a pas entendus. C'est le seul grief que j'aie à retenir aujourd'hui. Pourquoi ? Parce que nos partenaires sont essentiels dans la direction des propriétaires de l'entreprise. Ce sont quand même les propriétaires du capital qui doivent déterminer quelle est l'action que doivent engager les Services industriels. J'invite le Conseil d'Etat à reprendre langue avec l'ensemble des communes afin de mieux définir la stratégie que doivent suivre les Services industriels. Voilà, Mesdames et Messieurs, je sors de la polémique. Il y a la Cour des comptes pour cela. Il y a d'autres personnes mieux placées que moi pour en parler. Je leur laisse leur liberté. Au revoir ! (Quelques applaudissements.)
Une voix. Bravo !
Mme Lisa Mazzone (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais mettre la lumière sur une autre des missions que réalisent les Services industriels de Genève. En 2013, la consommation d'électricité a baissé de 1,5% à Genève, tandis qu'elle augmentait de 0,6% dans le reste de la Suisse. Comment les Services industriels de Genève sont-ils parvenus à ce résultat aussi enthousiasmant que bienheureux pour l'avenir de notre canton et pour la transition énergétique que l'on doit mener ? Ils y sont parvenus grâce à un programme d'économie d'énergie très ambitieux, le programme éco21. Celui-ci est non seulement ambitieux, mais produit des résultats, et des résultats extrêmement satisfaisants. J'aimerais mettre la lumière sur ce programme, parce que s'il a pu être mené l'année dernière, s'il est encore mené cette année, il s'agit de trouver des solutions pour le pérenniser; ceci afin que l'on puisse poursuivre dans cette tendance de baisse de la consommation électrique, dans cette orientation en faveur d'une transition énergétique qui nous permettra de répondre aux défis de demain. C'est pourquoi, en ce qui concerne le rapport sur les SIG, il me semblait important, au-delà de certains investissements plus téméraires qui ont pu être faits, d'attirer l'attention sur ce programme qui a très bien fonctionné. En plus du service public accompli avec qualité - je pense notamment à la distribution de l'eau et du gaz, à la levée et au traitement des déchets - il est important de rappeler que les Services industriels effectuent des tâches d'intérêt public comme celle de la réduction de la consommation d'électricité. Plus globalement, ils s'inscrivent dans la transition énergétique, qui est aussi amorcée au niveau suisse avec la stratégie énergétique 2050. Il est de notre devoir de poursuivre cette orientation et de donner les moyens aux SIG de le faire à l'avenir. Je vous remercie.
M. Ivan Slatkine (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, suite à tout ce qu'on a entendu concernant les SIG, j'espère qu'il y aura une belle unanimité d'abord à la commission de l'énergie puis dans ce Grand Conseil pour soutenir le projet de loi du parti libéral-radical - le PL 11471 - qui permettra d'attribuer au minimum la moitié du bénéfice des SIG à leurs propriétaires, à savoir l'Etat et les communes. En effet, actuellement et comme vous le savez tous, dans la loi sur les Services industriels - et c'est une exception pour les établissements publics autonomes - aucun bénéfice n'est remonté aux propriétaires. Alors, quand il y a trop d'argent, on voit comment ça se passe ! Les SIG ont massacré les bénéfices qu'ils ne nous ont pas restitués. Je vous remercie.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il ne faut pas tout confondre dans le débat. Les Services industriels sont un fleuron du point de vue technologique et du point de vue de la gestion, sauf qu'une certaine tendance s'est développée au sein cette entreprise, à savoir le partenariat public-privé. Cette tendance a été couplée avec ce qu'on nous a fait miroiter: les énergies renouvelables, l'éolien. Un certain nombre de personnes ont compris que les Services industriels, contrairement à la politique qu'ils avaient menée jusqu'à maintenant, se déchargeaient de leurs compétences sur des cavaliers qui ont quitté des entreprises bien connues - je ne vais pas citer de nom - pour trouver un filon et organiser le partenariat public-privé. Celui-ci se résume en définitive à des procédés douteux, voire pénaux pour essayer de soutirer de l'argent aux collectivités publiques. Et cela se passe partout en Europe ! Tout ceci parce que les collectivités publiques ont délaissé leurs responsabilités en ce qui concerne non seulement les investissements dans les nouvelles énergies mais encore la maîtrise de ces investissements et le fait d'aller plus loin que simplement acheter des actions et confier à d'autres ces responsabilités. Voilà le véritable problème, Mesdames et Messieurs ! On le voit dans toute une série de projets que mènent et qu'ont menés les Services industriels. Personnellement, j'en appelle à la responsabilité des Services industriels, comme ils l'ont fait antérieurement. Ceux-ci devraient mettre en place des structures et une ingénierie qui leur permettent d'avoir des compétences à l'interne et de soutenir de véritables projets plutôt que des personnes qui n'ont pas les qualités requises en termes technologiques mais les ont en revanche parfaitement en termes de filouterie. Voilà qui relève de notre responsabilité. Je crois que la leçon a été comprise. Mais dans ce genre de procédures, il faut peut-être répéter les leçons. Alors quand M. Stauffer vient nous faire des leçons... Je rappelle qu'il s'est rendu au Tessin...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Rémy Pagani. ...pour essayer de sauver quelqu'un qui est un véritable filou et qui a fait perdre des millions à notre collectivité ! Je crois qu'il n'a pas de leçons à donner dans ce genre de pratiques. Je vous remercie de votre attention, Monsieur le président.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. le député Alberto Velasco. (Un instant s'écoule.) Peut-on donner le micro à M. Velasco ? (Remarque.) Il ne marche pas ? Alors essayez un autre micro à côté. (Un instant s'écoule. Commentaires.) Essayez de parler dans le micro, Monsieur. Voilà, parfait. Allez-y !
M. Alberto Velasco (S). Merci, Monsieur le président. Je remercie également mon collègue. Tout à l'heure, M. Stauffer a dit que le conseil d'administration n'avait pas eu les informations nécessaires. Je m'inscris en faux là-contre, chers collègues ! Le conseil d'administration a eu toutes les informations nécessaires. Ce dont il a manqué, c'est d'esprit critique, de suivi. Voilà tout le problème. J'aimerais dire ensuite que ce qui se passe aux SIG n'est même pas un problème financier. Les normes sont ainsi, il n'y a pas eu de pertes en soi. Le problème, c'est le virage qu'on a fait prendre aux Services industriels. A l'origine, il s'agissait d'une entreprise publique avec une mission publique. Or, Mesdames et Messieurs, peu à peu, de manière sournoise et rampante, on a fait opérer aux Services industriels des missions financières relevant presque du ressort du privé. On a fait d'un service public dédié à la population une entreprise engagée dans les affaires et les bénéfices. Evidemment, quand vous vous engagez là-dedans, vous arrivez aux résultats qu'on a connus.
Mais ce qui est grave, Mesdames et Messieurs, c'est le projet de loi que les libéraux viennent de déposer ! Celui-ci accentue encore beaucoup plus cet aspect. Qu'est-ce que vous demandez ? Le PDC ou les libéraux, je ne sais plus... (Remarque.) ...ah, les radicaux ! Vous demandez que les Services industriels fassent des résultats. Dorénavant, alors que leur mission fondamentale est d'offrir des énergies et des services à prix coûtant, vous voulez qu'ils facturent ces services de telle façon qu'ils dégagent suffisamment de bénéfices pour pouvoir en remettre une partie à l'Etat. Mais qui va payer ces bénéfices ? Qui, Mesdames et Messieurs ? Ce sont les citoyens ! C'est une manière comme une autre de fiscaliser les citoyens sans qu'ils aient la possibilité de refuser cette politique. Je trouve cela très grave. Alors qu'on a fait tout un procès aux Services industriels, voilà un projet de loi qui leur dit de continuer dans ce sens. Mesdames et Messieurs, je pense qu'il va falloir très bien étudier ce projet de loi sur les Services industriels car il est très insidieux.
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Alberto Velasco. Je voudrais faire passer le message suivant: veillons à ce que les Services industriels reviennent à leurs origines, c'est-à-dire un service public fournissant à cet Etat les énergies et les prestations dont nous avons besoin.
M. Daniel Sormanni (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce qu'il y a d'étonnant dans la gestion des Services industriels, c'est qu'avant 2013, aucune gestion des risques n'avait été mise en place. Finalement, on a fait des investissements en espérant - ou en faisant croire au conseil d'administration - qu'ils allaient se révéler rentables. Il est assez incroyable que, pour une société dont le budget annuel s'élève à un milliard, aucune matrice de risques ne soit mise en place, qui aurait peut-être permis de corriger les actifs d'une manière ou d'une autre à la fin de l'année. Il a fallu attendre 2013 pour en arriver là. Je trouve que ce n'est pas normal et qu'il y a un problème d'application des normes comptables. Peut-être la fiduciaire n'a-t-elle pas su - ou pas vu, même si je n'y crois pas - voire peut-être pas voulu attirer l'attention sur cette problématique. Il a fallu attendre cette année pour qu'un certain nombre de corrections d'actifs soit fait en fonction des risques. Je donnerai un seul exemple, celui de la fibre optique. On a espéré que les Services industriels allaient gagner de l'argent avec la fibre optique. C'est de nouveau complètement faux ! Ils ne gagneront pas d'argent avec la fibre optique, et il a fallu faire une correction d'actifs de 45 millions, et probablement encore d'autres les années suivantes. Voilà ce qui n'est pas normal. Pour terminer sur une note humoristique, il a été dit, par rapport à la gestion précédente: «Un Vert de trop, bonjour les dégâts.» J'espère que le nouveau Vert à la tête de ce département saura corriger le tir.
M. Pierre Weiss (PLR). Mesdames et Messieurs, entre le moment où le rapport a été rédigé et celui où nous en débattons dans ce Grand Conseil, il y a eu la publication du rapport de la Cour des comptes. On ne peut pas faire comme s'il n'existait pas. Que nous dit ce rapport ? Un certain nombre de choses, d'abord sur la gouvernance qui n'est pas adéquate. Il est vrai que le peuple a refusé à deux reprises des modifications allant vers plus de compétences. Maintenant, je crois que le Conseil d'Etat s'est emparé du sujet. Il conviendra peut-être de préciser encore les termes dans lesquels il souhaite qu'il y ait plus de compétences. Pour le moment, ce sont des dizaines de millions de francs - pour dire le moins - qui ont été gaspillés par incompétence et que doivent supporter les consommateurs captifs pour bonne partie d'entre eux - je parle des petits consommateurs, pas des entreprises. Cela se traduit par des prix excessifs pour l'énergie et les différents fluides qui leur sont livrés. Il y a une discussion à avoir, pas seulement sur la répartition des bénéfices, mais aussi sur les prix facturés aux consommateurs. Je crois que nous avons l'obligation de nous en faire les défenseurs ici. Je vous remercie, Monsieur le président.
M. Eric Leyvraz (UDC). Il ne s'agit pas du tout de remettre en cause la lourde responsabilité des Services industriels dans ses applications éoliennes. Mais je trouve qu'on passe un peu comme chat sur braise sur la responsabilité du Conseil d'Etat. Je vous rappelle qu'à l'époque, il y avait un conseiller d'Etat Vert qui a fortement poussé les Services industriels à s'engager dans les énergies renouvelables, que le Conseil d'Etat faisait la pluie et le beau temps; je vous rappelle aussi que notre président Longchamp, dans son discours de Saint-Pierre en 2009, se félicitait des investissements éoliens des Services industriels; je vous rappelle encore que notre commission de l'énergie avait travaillé pendant plus d'une année et demie sur la CFC - centrale chaleur-force - et que, tout comme le conseil d'administration des Services industriels de l'époque, elle avait appris par la presse que le Conseil d'Etat y renonçait. Ceci pour vous dire combien cette entreprise était sous la coupe des décisions du Conseil d'Etat. Je crois que le nouveau conseiller d'Etat a très bien compris ce problème de gouvernance. Il a très bien compris qu'il fallait donner une nouvelle gouvernance aux Services industriels en leur fixant un cadre de travail dans lequel ils puissent se mouvoir de façon plus libre. J'espère que cela continuera dans ce sens-là, qu'on arrivera à faire en sorte que cette magnifique entreprise puisse oeuvrer dans des conditions beaucoup plus calmes et que ses employés, qui travaillent de façon admirable, retrouvent le plaisir du travail et la sérénité d'esprit.
M. Eric Stauffer (MCG). Je réagis simplement aux propos complètement déplacés de M. Rémy Pagani, qui est membre du conseil d'administration des Services industriels. Visiblement, il ne comprend pas très bien les enjeux dans cette régie. Or il siégeait au conseil d'administration, ce qui n'était pas mon cas. Et j'aimerais quand même rappeler à M. Pagani - vous le ferez pour moi, Monsieur le président - que dans un communiqué de presse des Services industriels, j'ai reçu des remerciements pour avoir réussi à conserver un canal de communication alors que les négociations étaient interrompues. Monsieur le président, vous transmettrez le message suivant: heureusement que la connerie et l'incompétence ne sont pas pénalement répréhensibles, faute de quoi M. Pagani aurait pris perpétuité ! (Quelques applaudissements.)
Le président. Modérez votre langage, s'il vous plaît ! La parole est à M. le député Ivan Slatkine.
M. Ivan Slatkine (PLR). Merci, Monsieur le président. J'aimerais répondre très rapidement à M. Velasco. Il faudrait qu'il lise le projet de loi dont j'ai parlé. Il ne s'agit pas de demander aux SIG de faire des bénéfices. Mais si les SIG font des bénéfices, il est logique - comme c'est le cas avec l'aéroport ou la Fondation des parkings - que les propriétaires en touchent une partie. Voyez-vous, Monsieur Velasco, depuis la création des SIG et avec la loi actuelle, il n'y a aucun retour pour les propriétaires en cas de bénéfices. Résultat des courses ? On arrive même à faire du bénéfice en faisant des provisions à hauteur de 180 millions. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que les SIG gagnent beaucoup trop d'argent et qu'il est temps de les remettre à l'ordre. Je vous remercie.
M. Roger Deneys (S). J'aimerais simplement dire à M. Stauffer que s'il avait été un peu plus sérieux à l'époque de l'achat des actions EDH, il aurait accepté la commission d'enquête que nous avions demandée à ce moment-là. Les agissements que vous prétendez dénoncer aujourd'hui auraient pu cesser bien avant. Nous l'avions proposée, l'UDC l'avait soutenue, mais vous n'avez rien fait parce que vous étiez dans des considérations électoralistes sur la commune de Vernier, et cela ne m'étonne pas de vous !
Des voix. Onex !
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je demande au Bureau de se prononcer sur les injures qui viennent d'être proférées et d'appliquer le nouveau règlement, à savoir de déterminer s'il est normal qu'un député se comporte de la manière suivante. En termes politiques, Monsieur le président - parce que je ne m'adresserai pas à ce monsieur - je vous signale que non seulement M. Stauffer a proposé ses services à quelqu'un qui pratique des filouteries et a fait perdre des millions à la collectivité, mais il a de plus demandé à se faire rémunérer. Je trouve que ce n'est pas tellement élégant de la part d'un milicien et d'un homme politique. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. J'ai fait une remarque à M. Stauffer, mais peut-être n'a-t-elle pas été entendue correctement. Comme tout à l'heure, je pense que la politesse doit être de rigueur dans ce parlement, et j'entends que les mots prononcés par les uns et les autres restent dans des normes parfaitement acceptables. La parole est à M. le député Pierre Weiss.
M. Pierre Weiss (PLR). Monsieur le président, en dix secondes, j'aimerais vous dire qu'il y avait un engouement pour l'éolien à l'époque. Je souhaiterais aujourd'hui que l'engouement contre le gaz de schiste fasse l'objet d'une analyse critique de la part du Conseil d'Etat. Il y a une nouvelle doxa qui en remplace une autre.
Une voix. Bravo !
M. Eric Stauffer (MCG). Vous transmettrez au magistrat de la Ville, qui est également député - M. Pagani - que non seulement je ne me suis pas fait rémunérer, mais que je n'ai jamais rien demandé. Mais il est vrai que j'aurais bien aimé, j'en ai d'ailleurs discuté avec M. Hodgers. Je me suis dit que j'aurais dû envoyer une facture, parce que j'ai dépensé des heures et des heures ainsi que des voyages pour essayer de démêler l'imbroglio que vous n'avez pas été capables, en tant que membres du conseil d'administration... (Brouhaha.)
Le président. Chut ! S'il vous plaît !
M. Eric Stauffer. ...de comprendre ni de démêler. Monsieur Pagani - vous transmettrez, Monsieur le président - je n'ai pas de leçons à recevoir de vous. Je pense que votre action au conseil d'administration des Services industriels n'est de loin pas satisfaisante. Enfin, pour répondre à M. Deneys, encore faut-il rappeler que le président du conseil d'administration des Services industriels de l'époque n'était autre que Daniel Mouchet, socialiste, qui s'est bien gardé de dire qu'il gagnait... (Commentaires.)
Le président. Monsieur Deneys !
M. Eric Stauffer. ...420 000 F pour un poste à 40% ! Il a menti devant la population, et on sait bien que c'est là l'apanage des membres du parti socialiste, à savoir d'être des menteurs devant la population genevoise.
M. Antonio Hodgers, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous en avons déjà discuté à plusieurs reprises...
Des voix. On n'entend pas ! (Brouhaha.)
M. Antonio Hodgers. Oui, je ne parle volontairement pas très fort.
Le président. Monsieur Hodgers, il faudrait parler davantage dans le micro, s'il vous plaît, afin qu'on puisse vous entendre.
M. Antonio Hodgers. Volontiers, Monsieur le président. A vrai dire, je parle comme à mon habitude, mais le fond de la salle est plutôt bruyant. Mesdames et Messieurs les députés, nous en avons déjà parlé à plusieurs reprises: les Services industriels de Genève ont vécu une année difficile, de laquelle ils ne sont pas encore complètement sortis. Nous avons en effet reçu le rapport de la Cour des comptes, qui avait été largement anticipé par des audits internes lancés par mon prédécesseur. Ainsi, nous avons pu mettre sur la table un certain nombre de pratiques malheureuses, de désinformation et d'erreurs personnelles parfois graves, voire pénales. Le ménage est encore en cours, si je puis me permettre. Le nouveau président du conseil d'administration et le nouveau directeur général planchent toujours sur certains dossiers, et je pense que quelques cadavres risquent encore de sortir des placards ces prochains mois. Ceux-ci ne sont pas liés à des affaires récentes, mais représentent plutôt la queue de la comète des affaires dont nous avons abondamment parlé. J'aimerais vous dire aujourd'hui que le ménage doit être fait. Il est fait, et de manière profonde. Il est clair que certains aspects doivent clairement évoluer en termes de pratiques, également en termes de personnes en poste.
Cela dit et malgré toutes ces difficultés, il est intéressant de constater que l'entreprise est extrêmement solide d'un point de vue financier. Elle a recapitalisé ses fonds de pension, a offert des prestations aux citoyens sans le moindre problème. Personne n'a connu de rupture de courant électrique, personne n'a manqué de chauffage ou d'eau courante. Ces dix dernières années, elle a réussi à faire baisser le prix de l'électricité des consommateurs. Non seulement les prix ont baissé, mais en plus - comme cela a été rappelé par la députée Mazzone - la consommation totale du canton de Genève a diminué. Globalement, les Genevois paient moins leur électricité qu'ils ne la payaient il y a dix ans, et ceci est positif.
Cependant, il faudra mieux clarifier ce que nous attendons des SIG pour les années à venir. Certains critiquent les investissements qui ont été faits, notamment dans l'hydraulique. Certes, investir, c'est prendre un risque, et nous devons travailler à ce que ce risque soit maîtrisé. Mais, Mesdames et Messieurs les députés, si le législateur de l'époque a créé une entité autonome dotée de sa personnalité juridique avec un conseil d'administration et des cadres, ce n'était pas pour qu'elle fasse ce que l'administration de l'Etat pourrait faire, à savoir suivre les affaires courantes. Les SIG sont une entreprise industrielle qui doit investir dans son domaine - c'est-à-dire les questions énergétiques, d'eau et des déchets - et tout investissement industriel comporte une part de risques. Il y aura toujours des risques dans l'activité que mènent les SIG. J'aimerais que cela soit clair, parce que prétendre à un risque zéro revient à ne plus rien faire du tout, et ce n'est pas possible. J'attends de ce conseil d'administration qu'il évalue correctement les risques, mais aussi qu'il en prenne. Sinon, il ne ferait rien ! Pourquoi devons-nous prendre des risques ? Sans cela, le prix de l'énergie, notamment électrique, qui sera fournie aux Genevois ne dépendra que du marché européen. C'est un autre risque que de laisser notre économie subir les éventuels soubresauts d'un marché de l'électricité bien souvent variable en fonction de considérations politiques. On le voit très bien - moins dans le domaine de l'électricité mais plutôt dans celui du gaz - avec le conflit autour de l'Ukraine et de la Russie: cela peut avoir un impact sur le prix du marché. D'une manière générale - et j'en appelle là aux partis attachés à la souveraineté de notre pays - il est important que Genève et la Suisse possèdent une certaine souveraineté énergétique pour ne pas complètement dépendre de la fluctuation des marchés électriques à l'étranger. Ceci implique d'investir dans nos barrages et dans certaines installations éoliennes, solaires, géothermiques, de biomasse... Bref, toutes sortes d'énergies fabriquées sur notre territoire, et ceci est important.
Toutefois, les attentes en termes de rendement doivent être revues. Il est vrai que nous avons sur-vendu les nouvelles énergies renouvelables. Il y a quelques années, nous nous sommes dit: «C'est le nouvel Eldorado, cela va nous rapporter du 7% voire du 10% !» Non, Mesdames et Messieurs, là était l'erreur. On a commis sur le marché des énergies renouvelables ce que d'autres ont commis sur le marché des nouvelles technologies internet, c'est-à-dire qu'on a créé une bulle spéculative en ayant de trop grandes attentes sur les rendements dans des marchés émergents. Ces industries auront un avenir certain, mais peut-être plus modeste en termes de rentabilité que ce que l'on espérait. Or j'entends bien, avec la nouvelle direction, corriger le tir. Nous devons évidemment accompagner le tournant énergétique, mais également investir dans les nouvelles énergies renouvelables et, pour cela, nous devons attendre un rendement. Il n'y a aucune raison que celles-ci soient subventionnées par le contribuable. Nous devons donc attendre un rendement raisonnable pour le milieu industriel - non plus de 5% ou 7%, mais plutôt de 1% ou 2% - et je pense que ce sera là une discussion intéressante pour le conseil d'administration que de définir quel est ce rendement raisonnable.
Enfin, Mesdames et Messieurs, nous devons clarifier la gouvernance de cette entreprise. J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer devant vous à ce sujet; à présent, c'est une position officielle du Conseil d'Etat. Nous nous dirigeons vers une convention d'objectifs avec les SIG, qui serait l'équivalent d'un contrat de prestations, comme vous le connaissez ici pour les TPG ou les HUG. Une convention d'objectifs pour une entreprise comme les SIG rapporte de l'argent à l'Etat, c'est-à-dire qu'elle n'est pas subventionnée par le contribuable. Par conséquent, nous devrons bien distinguer ce qui relève du mandat donné par les pouvoirs publics - c'est-à-dire vous, parce que j'entends que cette convention d'objectifs soit soumise au parlement - de ce qui relève de l'activité courante de l'entité autonome. Nous devons clarifier nos rôles, y compris le vôtre, celui du parlement. Aujourd'hui, la direction des SIG a parfois l'impression d'avoir deux, trois, voire quatre conseils d'administration: il y a le conseil d'administration officiel, l'autorité de surveillance du Conseil d'Etat quand elle intervient, la commission de l'énergie et des Services industriels, la commission des finances voire la commission de contrôle de gestion... Voilà qui fait quand même beaucoup de monde pour une seule direction ! Là aussi, Mesdames et Messieurs, nous devrons définir qui fait quoi et qui reçoit quoi. Ainsi que cela a été souligné, l'Etat de Genève est propriétaire des SIG à 55% et, en tant que propriétaire, il est normal que si l'entreprise réalise un bon bilan, une part des bénéfices lui revienne. C'était d'ailleurs la volonté de nos prédécesseurs, qui s'étaient précipités; ils s'étaient attribué un bénéfice en spoliant les actionnaires minoritaires qui, eux, se sont battus comme vous le savez, ce qui a fortement impacté les comptes. Non, nous devons le faire proprement, avec la Ville de Genève et les communes. Nous devons clarifier ce que nous demandons aux SIG et leur donner les moyens de le faire. Ce qui vient en surplus doit, à mon sens et à celui du Conseil d'Etat, revenir à 50% dans les caisses gérées par M. Dal Busco. Cet aspect devra être réglé en parallèle à la convention d'objectifs et à la clarification des missions, afin de déterminer ce qui nous revient et ce qui reste dans l'entreprise.
Voilà, Mesdames et Messieurs, en ce qui concerne le futur. Pour ma part, j'ai pleine confiance dans le nouveau conseil d'administration, son président et le nouveau directeur général. Je vous demande de les laisser travailler de façon autonome de sorte que, l'année prochaine, ils aient un bilan un peu plus positif à vous présenter lors de vos débats sur les rapports de contrôle de gestion. Je vous remercie. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons tout d'abord voter sur l'entrée en matière du PL 11455-A.
M. Eric Stauffer. Je demande le vote nominal !
Le président. Etes-vous soutenu ? (Plusieurs mains se lèvent.) Vous l'êtes. Nous passons donc au vote.
Mis aux voix, le projet de loi 11455 est adopté en premier débat par 72 oui contre 19 non (vote nominal).
L'article unique de la loi 11455 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11455 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 62 oui contre 18 non et 8 abstentions (vote nominal).
Le président. L'assemblée se prononce à présent sur le PL 11454-A.
Mis aux voix, le projet de loi 11454 est adopté en premier débat par 67 oui contre 14 non et 1 abstention (vote nominal).
L'article unique de la loi 11454 est adopté en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 11454 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 59 oui contre 18 non et 11 abstentions (vote nominal).