Séance du
jeudi 15 mai 2014 à
17h
1re
législature -
1re
année -
8e
session -
46e
séance
IN 153-B
Débat
Le président. Nous passons à notre point fixe, en catégorie I, soit un débat libre. Le rapport est de M. Boris Calame, qui prend place à la table des rapporteurs. Nous devons traiter de la validité de l'initiative. Je passe la parole à M. le rapporteur. Je prie l'assistance de bien vouloir faire un peu de silence ! Merci. Monsieur Calame, vous avez la parole.
M. Boris Calame (Ve), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Chères et chers collègues, vous trouverez sur vos pupitres un rapport relativement succinct: il faut dire que cette initiative n'a suscité aucun débat au sein de la commission législative. Elle a été validée dans sa forme par l'entier de la commission et il n'y a eu ni débat ni audition. Nous ne pouvons donc que vous suggérer de soutenir et de valider cette initiative. C'est la dernière qui sera traitée ainsi par le Grand Conseil, l'examen de la validité étant devenu une prérogative du Conseil d'Etat avec notre nouvelle constitution. Je vous remercie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, voici donc l'initiative pour une extension souterraine de la gare reçue comme valide, exécutable, respectant le droit supérieur, tout cela dans une unité de la matière et du genre, par la commission législative. Parfait. 16 352 signatures en deux mois et demi, une mobilisation citoyenne incroyable, venant de toutes les parties du canton, en plus de la préservation d'un quartier: cette initiative a démontré l'inadéquation en matière d'infrastructures de la proposition qu'avaient faite les CFF pour l'agrandissement de la gare en surface. (Brouhaha.)
Mais trêve du passé, il est temps que cette initiative soit renvoyée en commission pour traitement sur le fond, car depuis la conférence de presse du 5 juillet 2013, durant laquelle ont été rendues publiques les premières conclusions d'une étude technique comparant le projet d'extension de Cornavin en surface et une proposition de gare en souterrain, tout est redevenu secret dans ce dossier, tout est redevenu CFF, aurait-on envie de dire. Nous nous réjouissons que la commission puisse obtenir le rapport complet de l'étude de comparaison, ainsi que l'assurance que les CFF ne nous présenteront pas un autre projet de gare souterraine qui rendrait l'augmentation des coûts exponentielle, tentant ainsi de nous intimider et de nous obliger à revenir à l'agrandissement de la gare en surface, projet qu'ils ont si intensément défendu par le passé. Les CFF et le Conseil d'Etat ont jusqu'au 18 avril 2015 pour travailler au projet de la gare en souterrain. Il est vrai que si d'ici là un projet tangible nous est présenté, cette initiative pourrait devenir caduque. Nous pouvons l'espérer; en revanche, si l'assurance d'une gare en souterrain ne pouvait être donnée, l'initiative continuerait certainement de suivre son chemin. Merci beaucoup. (Applaudissements.)
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, l'agrandissement futur de la gare de Cornavin est une affaire aussi importante que le tracé du CEVA. Il existe aujourd'hui un consensus, et des études ont prouvé que ce consensus pouvait être consolidé: une étude en juin de l'année passée a confirmé la performance d'une gare souterraine à Cornavin du point de vue de sa faisabilité mais aussi de sa fonctionnalité. Cette gare souterraine résout toute une série de problèmes, notamment l'enchevêtrement des lignes TGV, Intercity et RER. Nous attendons avec impatience le complément d'étude à plus ou moins 30% cette fois, à 1,2 milliard, je le répète. (Brouhaha.)
Cette initiative va dans le bon sens, nous espérons qu'elle sera traitée avec diligence. Le Conseil d'Etat s'est d'ailleurs engagé à nous présenter dès la finalisation de l'étude à plus ou moins 30% un projet de loi qui viserait à compléter les 780 millions voire 800 millions votés par le peuple suisse pour la gare souterraine, c'est-à-dire à préfinancer les 400 millions qui nous manqueraient. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Cette initiative devrait être adoptée rapidement, parce qu'à mon avis, elle est tout à fait constitutionnelle, elle entre tout à fait dans le cadre de la nouvelle constitution, et nous nous réjouissons de son traitement en commission; mais, comme la députée du parti socialiste, Mme Hausser, vient de le dire, nous sommes et resterons extrêmement attentifs à faire en sorte que les CFF ne dérapent pas comme ils en ont l'habitude et qu'ils nous construisent une réelle gare de métro plutôt qu'une gare de luxe avec plusieurs coursives visant à la création de galeries marchandes. Nous avons besoin d'efficacité dans ce canton, et surtout, nous n'avons pas beaucoup d'argent à consacrer à ce type d'infrastructures. Il y a de l'argent nécessaire, utile et indispensable, et il ne s'agit pas de faire dans le luxe. C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, mon groupe, Ensemble à Gauche, vous recommande de renvoyer très rapidement cette initiative en commission pour qu'elle soit validée du point de vue de sa constitutionnalité et que nous l'adoptions, j'espère, à l'unanimité. Je vous remercie de votre attention.
M. Benoît Genecand (PLR). Mesdames et Messieurs les députés, je pensais que nous n'allions pas aborder le fond, mais je me méfiais un peu, puisque chaque fois que nous parlons de cette gare, c'est l'occasion de réaffirmer un consensus qui à mon avis n'existe pas. Cette gare de Cornavin est davantage le lieu de questions ouvertes à ce jour. La première: le projet souterrain est estimé à 1,2 ou 1,24 milliard de francs. Il s'agit d'une estimation à plus ou moins 50%. Compte tenu des délais accordés aux experts, on ne pouvait pas attendre plus précis au moment de l'estimation. Cela veut dire que la fourchette va de 620 millions à 1,86 milliard. Dans ce domaine, il y a rarement des surprises à la baisse: il existe donc un risque que nous atteignions 1,86 milliard. Permettez-moi de dire en passant que quand j'entends mes deux préopinants accuser déjà les CFF, avant d'avoir lu l'expertise, de vouloir maquiller celle-ci, j'ai les plus grandes craintes. Le risque est donc aujourd'hui d'atteindre 1,86 milliard. Si le canton choisit la variante souterraine, il se passera la chose suivante au niveau fédéral: il devra porter seul l'éventualité du dépassement de coût - ou en tout cas c'est ainsi que je comprends la situation. La Confédération nous dira que, comme nous avons voulu choisir un autre projet que celui qu'elle nous offrait, c'est à nous de nous débrouiller pour financer le dépassement. Elle paiera quant à elle 835 millions, pas un franc de plus. Ce qui veut dire que ce parlement - parce que c'est bien lui qui va devoir se prononcer - ne devra pas décider sur 400 millions comme on nous le serine, mais sur 400 millions plus l'éventuel surcoût, c'est-à-dire éventuellement 1 milliard de francs à la fin des travaux. Et nous sommes bien placés pour savoir aujourd'hui que quand on commence à creuser, cela peut revenir très vite très cher.
Pourquoi choisissons-nous cette variante ? C'est là aussi le lieu de corriger certaines erreurs et affirmations qui sont tout simplement fausses. On nous dit que c'est pour sauver des logements dans le quartier des Grottes. La question est: combien de logements ? On nous parle de 350. Or, le projet en surface nécessite la destruction de 190 logements et permet d'en reconstruire quelques dizaines après travaux. On est donc autour des 150 logements net. Le chiffre de 350 vient d'une intervention possible mais non nécessaire sur un périmètre plus large. Ce chiffre est également brut; sur le périmètre plus large, 200 logements neufs peuvent être construits. On est donc toujours à 150 logements net détruits. Le montant de 835 millions pour la construction en surface comprend donc 230 millions pour le foncier qui incorpore le remplacement des 150 logements par des logements neufs à la gare de Lancy - Pont-Rouge. Il n'y a donc pas de modification du nombre de logements.
On nous dit enfin que la non-construction des sauts-de-mouton de Châtelaine et de Sécheron fait que le coût total entre les deux projets est à peu près équivalent: c'est possible, mais alors le minimum serait d'obtenir de la Confédération qu'elle reconnaisse cette économie et participe à notre financement à raison de ces 500 millions épargnés.
Le consensus dont on nous parle s'est répandu un peu comme un feu de prairie, parce que les signatures ont été récoltées très vite - et je reconnais tout à fait le travail démocratique réalisé par les initiants - mais ce n'est pas une raison pour que ce Grand Conseil se laisse enfumer par des chiffres qui pour l'instant n'ont absolument aucune solidité factuelle. Le jour où nous devrons décider, nous le ferons sur la base d'expertises qui seront effectuées convenablement, et je refuse qu'on mette la pression sur qui que ce soit, les CFF ou d'autres, pour leur intimer l'ordre d'arriver au résultat décidé à l'avance par certains de nos collègues.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je salue à la tribune notre ancienne collègue, Mme Jacqueline Roiz. (Applaudissements.) Je passe la parole à M. le député Jean-Marc Guinchard.
M. Jean-Marc Guinchard (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, je regrette quant à moi fermement qu'on entre déjà dans un débat de fond et qu'on commence une guerre des chiffres qui aurait dû se dérouler en commission. Ce qui nous est demandé ce soir, c'est simplement de nous prononcer sur la recevabilité de cette initiative, traitée correctement, en un temps tout à fait raisonnable, par la commission législative qui s'est prononcée sur les six points de recevabilité, et ce à l'unanimité. Je constate également que cette initiative a reçu un fort soutien populaire, et que les expériences de gares souterraines dans d'autres villes, en particulier en Suisse alémanique - parce qu'eux savent toujours comment obtenir plus d'argent en la matière que les Suisses romands - sont très concluantes: on est arrivé à des constructions simples, modernes, accueillantes, ménageant aussi de l'espace pour de nombreux commerces. Ce type d'infrastructures se fera à l'avenir clairement en souterrain. Le groupe démocrate-chrétien vous incite donc à accepter la recevabilité afin que cette initiative soit traitée le plus rapidement possible en commission. Je vous remercie.
Mme Christina Meissner (UDC). Comme mon préopinant l'a dit, nous devions nous préoccuper ce soir uniquement de la recevabilité de cette initiative: à l'unanimité, elle a été déclarée recevable. Cependant, le parlement est ce qu'il est, c'est-à-dire qu'il tient toujours à s'exprimer, même quand il s'agit de faire le travail en commission. Ainsi, puisqu'on a commencé à creuser le sujet s'agissant d'une variante souterraine, on pourrait en profiter pour créer plus que deux voies comme le demande l'initiative, de manière à pouvoir servir d'autres intérêts, notamment ceux de l'ouest du canton: on desservirait alors au mieux Vernier, Châtelaine, voire plus loin, pour obtenir un meilleur accès au rail dans la région à l'ouest du canton. Mais nous ne poursuivrons pas le débat plus loin ici: c'est à la commission de réfléchir à ces solutions, afin qu'elles soient les meilleures pour le canton. Je vous remercie.
Mme Sarah Klopmann (Ve). Les Verts aussi pensaient ne s'exprimer que sur la forme, mais puisque tout le monde parle du fond, nous l'aborderons également. Le développement de la gare est effectivement essentiel, non seulement pour Genève, mais pour tout le transport en Suisse: l'axe Genève-Vaud bloque l'axe Genève - Saint-Gall. Néanmoins, faut-il pour cela détruire une partie de notre ville ? Les initiants pensent que non, et nous sommes ravis que cette initiative ait été lancée. Les signatures ont été récoltées très rapidement: cela prouve l'intérêt que les gens ont montré à préserver une fois de plus le quartier des Grottes.
Il faut préserver les quartiers et les logements qui s'y trouvent. M. Genecand nous démontre que le nombre de logements qui sera détruit n'est que broutilles. On peut le voir ainsi, puisque des logements seront reconstruits, mais ce ne seront pas les mêmes logements, ce ne sera pas le même tissu social. Nous laisserons aussi disparaître des commerces si la gare se fait en surface. Finalement, c'est toute une vie de quartier qui disparaîtra. Il faut aussi savoir qu'on annonçait déjà que le projet de surface tiendrait à peu près une trentaine d'années, si je ne m'abuse. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est malheureux de penser à si court terme quand on fait des travaux de cette ampleur. Si l'on doit détruire un quartier pour tenir trente ans, il faudra détruire un autre quartier pour tenir cinquante ans, puis un autre, puis finalement, on aura une gare géante, mais plus aucune ville desservie par cette gare. Ce serait un peu dommage ! Développer la gare, oui, mais préserver les quartiers également, surtout puisque la faisabilité de cette gare en souterrain est maintenant démontrée par des études indépendantes. (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, un peu de silence !
Mme Sarah Klopmann. J'aurais aussi voulu évoquer la déception que nous avions eue à l'époque, quand ce projet a commencé à être discuté: les CFF ont élaboré tout leur projet en catimini, sans en parler aux autorités. Ils avaient d'abord juste demandé un moratoire sur les parcelles derrière la gare, sachant déjà qu'ils avaient l'intention de construire leur gare. Finalement, des habitants ont eu vent du projet un peu par hasard, des pétitions ont commencé à circuler il y a de nombreuses années, mais c'est dommage que ce soit seulement par hasard que ces projets soient annoncés et qu'il n'y ait pas de discussions un peu plus larges quand les CFF envisagent de détruire tout un quartier !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Rémy Pagani.
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il ?
Le président. Nous sommes en débat libre, Monsieur: vous disposez de trois interventions de sept minutes maximum.
M. Rémy Pagani. Ah, merci, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs, chers collègues, j'ai été assez sidéré par l'intervention de M. Genecand, parce qu'il a un train de retard, si j'ose dire. Il devrait se pencher ne serait-ce que sur les fonctionnalités de l'étude à plus ou moins 50%: il se rendrait ainsi compte que, par exemple, le cadencement du CEVA que nous sommes en train de construire en ce moment même ne peut être à quinze minutes, parce qu'il n'y a pas les fonctionnalités nécessaires, y compris si la solution en surface est choisie. Ce sont des études qui ont été rendues publiques il y a plus d'une année. Je trouve un peu surprenant qu'on puisse s'arc-bouter sur une solution que les CFF avaient alors défendue du point de vue de la fonctionnalité, mais qu'ils ne défendent plus depuis une année. On en reste à cette solution désuète évidemment pour promouvoir la mutation du quartier: je peux bien imaginer qu'un certain nombre de personnes veulent faire des affaires avec le bas du quartier des Grottes, c'est compréhensible du point de vue de la spéculation. Mais qu'on puisse s'arc-bouter sur cette étude pour déduire des choses qui ne sont pas évidentes ou en tout cas qui ont été invalidées par les CFF eux-mêmes, je trouve cela un peu fort de café, Monsieur Genecand ! (Brouhaha.)
Cela étant, je pense qu'il nous faut aller vite, parce que 2025, c'est à la fois loin et c'est demain: il y a des dispositions à prendre pour faire en sorte que les terrains soient réservés, que la programmation de ces études de construction soit mise en route, que cette gare souterraine démontre son efficacité, notamment, je le rappelle, afin de permettre l'horaire cadencé du CEVA à quinze minutes, alors qu'aujourd'hui, et aussi avec l'option en surface, il n'est cadencé que toutes les trente minutes, Mesdames et Messieurs. Nous consacrons avec le CEVA des solutions qui permettront à nos concitoyens et concitoyennes d'accéder à notre ville toutes les trente minutes, et la solution de la gare souterraine permettra de relier toutes les quinze minutes les gares des Eaux-Vives et de Cornavin: je trouve tout de même que cet avantage vaut cette initiative. Je vous remercie de votre attention.
M. Thomas Wenger (S). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, en effet, notre parlement devait juste parler - «juste» entre guillemets ! - de la recevabilité de cette initiative. Avec l'intervention de M. Genecand, nous avons pris l'aiguillage de la validité vers le fond. Permettez-moi du coup de dire deux mots sur le fond, pour déjà saluer la mobilisation collective et citoyenne du Collectif 500 et des habitants des Grottes notamment, mais aussi de l'ensemble de Genève, avec cette initiative qui a récolté plus de 16 000 signatures pour être déposée devant notre Grand Conseil. Il est vrai qu'à la base, le coût pour une extension en souterrain de la gare de Cornavin par les CFF était évalué à environ 1,8 milliard. L'expertise neutre parle plutôt aujourd'hui de 1,2 milliard. Il faudrait rappeler que le 9 février, la population suisse - et la population genevoise à 76,6% - a accepté le FAIF, le fonds d'aménagement et d'infrastructure ferroviaire, et que cette votation nous permet d'obtenir de la Confédération 790 millions pour étendre la gare de Cornavin en souterrain. Il manquerait environ - et l'on attend effectivement les chiffres définitifs - 400 millions. J'espère que le projet de loi genevois pour ces 400 millions trouvera dans ce parlement un large consensus, et du coup, je suis un peu inquiet de l'intervention de M. Genecand sur le sujet: nous avons besoin d'étendre cette gare ! Aujourd'hui, environ 50 000 passagers passent par Cornavin; en 2030, ce seront 100 000 passagers. Nous avons besoin de la rénovation de cette gare - cela vient d'être fait - mais aussi de l'extension de cette gare en souterrain; nous avons besoin du FAIF, de doubler le nombre de trains entre Genève et Lausanne et vers le reste de la Suisse; nous avons besoin du CEVA. Dans quelques années, avec toutes ces mesures, nous entrerons dans le XXIe siècle ferroviaire: Genève rattrapera trente ans de retard, et je crois que nous devons tous aujourd'hui nous en réjouir. Merci beaucoup.
M. Guy Mettan (PDC). Monsieur le président, en tant qu'ex-membre du comité d'initiative, militant pour celle-ci, et après avoir recueilli de nombreuses signatures, je me réjouis que la recevabilité soit évidemment acceptée par notre Grand Conseil. J'aimerais juste préciser à l'intention de M. Genecand que nous votons effectivement sur la recevabilité juridique, mais qu'il y a aussi une recevabilité politique des initiatives, et qu'il incombe, si possible, de les faire coïncider. Or, la recevabilité politique, c'est l'acceptation par les Genevois de cette gare souterraine. Pourquoi ? Parce que le projet en surface, que M. Genecand semble tant soutenir, serait refusé par la majorité des citoyens qui seraient évidemment appelés à voter, on l'a vu lorsqu'il s'est agi de réaménager le quartier des Grottes dans les années 70. C'est la première chose.
Ensuite - je ne veux pas être trop long puisque beaucoup de choses ont été dites - il faut quand même mentionner aussi la question du coût: pendant des années, en effet, les CFF nous ont un peu menés en bateau en parlant de prix, en ajoutant des sauts-de-mouton ici et là, pour pouvoir renchérir, au fond, le coût de la version souterraine. Il apparaît en fait - et M. Genecand, qui est soucieux des deniers publics, aurait dû le constater et nous le dire dans son intervention - que la version de surface implique des dépenses considérables pour les frais d'aménagement, qui se chiffrent à plusieurs centaines de millions de francs et qui devront naturellement être pris dans la poche des citoyens de la ville de Genève. Finalement, les deux projets sont d'un coût équivalent, c'est la raison pour laquelle, justement, on peut se féliciter que la recevabilité politique coïncide dans ce cas avec la recevabilité juridique. (Applaudissements.)
Une voix. Bravo !
M. Benoît Genecand (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je n'aurais pas abordé le fond si le député Pagani ne l'avait pas fait avant moi. C'est la deuxième fois que nous traitons de ce sujet en abordant le fond. Vous m'excuserez d'avoir voulu faire entendre une voix dissonante: c'est le rôle de ce parlement, Mesdames et Messieurs, de réfléchir sur des projets d'importance. Je ne suis absolument pas contre la gare souterraine, je suis contre le consensus de façade qui s'est créé beaucoup trop rapidement sur la base factuelle fragile qui est la nôtre actuellement. M. Mettan me confirme dans mon opinion en ajoutant cette idée de frais d'aménagement en surface qui n'ont à mon avis rien à voir avec la problématique.
Je suis très content de savoir que M. Pagani, en plus de ses talents d'urbaniste, est également un expert en mobilité. La seule chose que je demande, moi, comme parlementaire, est que les membres de ce parlement aient l'occasion de se prononcer de manière rationnelle, sans pression, qu'ils fassent leur travail. Les citoyens des Grottes ont fait le leur. Ils ont d'importants relais par ici, tant mieux pour eux, mais nous devrons faire notre propre travail pour nous prononcer en connaissance de cause sur cette gare souterraine. Si à la fin, celle-ci coûte moins cher ou le même prix que la gare en surface, évidemment qu'il faudra la faire. Pour l'instant, c'est un alignement d'hypothèses, et la seule certitude que j'ai à ce stade - en tout cas, ce qu'on peut voir comme parlementaire - est que nous avons négocié avec la Confédération de manière largement sous-optimale. En nous précipitant sur la solution souterraine, en ne demandant rien en contrepartie, nous avons offert un boulevard à la Confédération. Aujourd'hui, personne ne m'a démontré qu'elle paierait autre chose que ce qu'elle a promis pour la surface, et si nous avions fait notre travail un peu plus tranquillement, sans précipitation, sans déclarations grandiloquentes avant que les faits ne soient connus, sans un lobbying hyperactif, je pense que nous serions dans une meilleure situation. Voilà pourquoi je comptais m'exprimer aujourd'hui, parce que j'en ai un peu assez que la messe soit déjà dite ici: 400 millions, ce n'est pas rien, Mesdames et Messieurs. Certains d'entre vous ont décidé de convoquer cette assemblée samedi pour deux projets qui eux, sont déjà dans le passé: si c'est pour nous mettre la tête dans le sac aussi pour des projets d'importance appartenant à l'avenir, cela ne sert à rien de nous gâcher nos week-ends. (Quelques applaudissements.)
M. Renaud Gautier (PLR). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, nous traitons ici de la recevabilité. Mon excellent collègue préopinant a très largement exprimé les doutes qu'il pouvait avoir. Permettez-moi d'en rajouter une couche: accepter la recevabilité, ce n'est pas accepter, de quelque manière que ce soit, le potentiel coût supplémentaire. Certains, sur les bancs des préopinants, ont déjà dit: «Vous acceptez cela, cela vous coûtera 400 millions.» Non ! Il faut dire ici que la recevabilité est un acte juridique, qu'il n'implique en aucune manière une garantie que ce parlement mettra les centaines de millions qui manquent à ce projet. Il faut être tout à fait clair à ce propos.
M. Sandro Pistis (MCG). Comme l'a très bien relevé le député PLR, la question qui se pose ici est celle de la recevabilité de cette initiative. Pour le groupe MCG, elle n'est pas contestée. Nous avons en effet besoin d'une gare, et l'agrandissement de la gare ne peut se faire qu'en souterrain pour ne pas détruire le centre-ville et avoir un espace nécessaire pour l'agrandissement et le développement de Genève.
Je tenais également à rebondir sur les propos tenus par le député Genecand - vous transmettrez, Monsieur le président: ce n'est ni le groupe MCG ni le groupe UDC qui ont décidé de siéger samedi, mais bien votre groupe, le groupe PLR, soutenu par une grande majorité de la gauche.
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, je dois dire que je suis réellement surpris par les propos tenus par certains députés PLR. Aujourd'hui, on parle de la recevabilité de cette initiative, et l'on entend des déclarations d'intentions pour dire que ce n'est pas du tout la garantie qu'on financera la gare souterraine. Mais d'abord, ce n'est pas la question posée. Ensuite, certains affirment de manière assez curieuse que c'est un mauvais choix, mal fait, qu'on l'a annoncé au mauvais moment, qu'on l'a élaboré dans la précipitation... Ce sont des contrevérités ! Genève a déjà pris un retard important sur ce projet: il aurait été possible de dire que nous voulions une gare souterraine à Cornavin depuis le début de la précédente législature. Ce message, le canton de Genève ne l'a pas transmis, ni à la Confédération, ni aux CFF, et le problème est dans l'autre sens: si Genève n'est pas capable de se déterminer et par conséquent n'exprime pas son choix, il ne faut pas être surpris qu'au final les CFF décident eux-mêmes pour nous. A mon avis, les élus genevois aux Chambres fédérales auraient pu gagner du temps si nous, dans ce Grand Conseil, avec le Conseil d'Etat précédent, avions été plus clairs sur les choix indispensables pour Genève.
Ce n'est pas qu'une question financière, Mesdames et Messieurs les députés: cette gare souterraine représente aussi la possibilité d'une extension supplémentaire à plus long terme. La question du coût relativement important aujourd'hui doit être mise en perspective avec les possibilités qu'offre une gare souterraine. Alors je souris, Mesdames et Messieurs les députés, quand j'entends le PLR dire qu'on n'a pas l'argent ou qu'on ne l'aura pas, et que notre acceptation de la recevabilité, ce soir, n'est pas une garantie qu'on va construire cette gare - d'autant plus quand ces paroles viennent de PLR proches de la Fondation du stade de Genève où l'on a dépensé des millions pour une utilité bien relative et une fréquentation proche du zéro absolu en matière de température ! Réellement, Genève a besoin d'infrastructures de transports publics efficaces simplement pour qu'on évite de reporter les problèmes dans le temps et d'accentuer ces problèmes, parce que la population augmente. Il faut donc, Mesdames et Messieurs, confirmer la recevabilité de cette initiative; nous prendrons les décisions suivantes en temps et en heure, mais j'espère que le PLR assumera aussi ses responsabilités en matière de mobilité régionale. (Quelques applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député Rémy Pagani.
Une voix. Jamais deux sans trois !
M. Rémy Pagani (EAG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs, ce projet me tient suffisamment à coeur pour que j'intervienne et essaie de remettre quelques réalités en place. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Quand on dit que ces 400 millions, qui pour l'instant sont hypothétiques puisque je vous rappelle que l'étude a conclu à 1,2 milliard plus ou moins 50% - plus ou moins ! - et qu'il est aujourd'hui question de faire une étude qui doit donner des résultats dans quelques mois à 1,2 milliard plus ou moins 30% - j'espère qu'on restera dans cette fourchette-là - Mesdames et Messieurs, on est bien dans la fourchette de 400 millions ! Et puis, Monsieur Genecand, je crois savoir, parce que je siège à la commission des travaux, et nous avons auditionné l'Office fédéral des transports... Trois députés qui sont en train de babiller devant vous ont entendu comme moi les représentants de l'OFT quelque peu garantir, entre guillemets, mais garantir quand même que ces 400 millions, s'ils devaient être avancés par notre Grand Conseil, ne seraient qu'un préfinancement remboursé du fait de l'inscription dans un autre programme de la Confédération pour éviter le cisaillement, c'est-à-dire mettre des sauts-de-mouton qui coûteraient à la Confédération deux fois 250 millions. L'OFT y compris y gagne ! Je trouve donc un peu spécial, Monsieur Genecand, que vous veniez dire que ces 400 millions, si nous devions les payer - parce que tout cela serait encore hypothétique - seraient à la charge du canton. Ils feraient bien évidemment l'objet d'un préfinancement remboursable en 2025, ce qui est tout à fait acceptable pour garantir les fonctionnalités. Je vous en prie, Monsieur Genecand, étudiez vos dossiers, regardez la réalité, puis on commencera à faire de la politique. (Quelques applaudissements.)
M. Thierry Cerutti (MCG). J'aimerais simplement rectifier quelque chose que notre camarade, notre sympathique collègue Genecand a dit tout à l'heure concernant la convocation de samedi pour remettre l'église au milieu du village: les groupes MCG et UDC ont demandé une séance supplémentaire, c'est vrai, mais en aucun cas nous n'avons demandé de siéger le samedi. Nous nous sommes justement battus pour que ce ne soit pas le samedi. Que son groupe politique l'assume, que les autres qui sont mécontents de venir samedi assument, parce que vous aviez la possibilité avec les membres du Bureau de faire en sorte qu'on siège un soir, comme cela avait été demandé par la Nouvelle Force. (Brouhaha.)
Une voix. «The New Force» !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Nathalie Fontanet. (Remarque.) C'est une erreur, très bien. Nous allons pouvoir passer au vote, puisque la parole n'est plus demandée. Mesdames et Messieurs les députés, je vous fais voter sur les différents points constituant la recevabilité de l'initiative.
Mise aux voix, l'unité de la forme de l'initiative 153 est adoptée par 84 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, l'unité du genre de l'initiative 153 est adoptée par 84 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, l'unité de la matière de l'initiative 153 est adoptée par 84 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, la conformité au droit supérieur de l'initiative 153 est adoptée par 85 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, l'exécutabilité de l'initiative 153 est adoptée par 86 oui (unanimité des votants).
Mise aux voix, la validité complète de l'initiative 153 est adoptée par 87 oui (unanimité des votants).
L'initiative 153 est donc déclarée valide.
L'IN 153 et le rapport du Conseil d'Etat IN 153-A sont renvoyés à la commission des transports.
Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 153-B.