Séance du
vendredi 25 janvier 2013 à
15h30
57e
législature -
4e
année -
4e
session -
19e
séance
PL 11033-A
Premier débat
Le président. Le rapporteur est M. Michel Forni, qui veut s'exprimer. Vous avez la parole, Monsieur le député.
M. Michel Forni (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. La commission de la santé s'est réunie à deux reprises et a renoncé à entrer en matière sur ce projet de loi. Comme vous l'avez dit, cette proposition de loi entend modifier la loi genevoise qui entretient une interdiction de fumer dans les lieux publics. Elle est étrangement mélangée à d'autres lois, notamment celle qui règle les débits de boissons, la restauration et l'hébergement et qui définit, elle, les autorités compétentes et les sanctions. Enfin, elle se base bien sûr sur la loi fédérale de la protection contre le tabagisme, qui a pris effet en mai 2010.
Cette loi genevoise contre l'interdiction de fumer dans les lieux publics a deux buts: celui de protéger contre le tabagisme passif, mais aussi de mettre en oeuvre une interdiction de fumer, cela en fonction de la constitution de notre république de mai 1847. (Brouhaha.)
Elle garde cependant en réserve les dispositions fédérales qui concernent la protection contre le tabagisme passif et surtout la protection des travailleurs. (Brouhaha.) Je n'entre pas dans les détails de cette loi qui concerne l'interdiction de fumer dans les lieux publics... (Le président agite la cloche.) ...son champ d'application, ses exceptions - aéroport, hôpitaux, etc.
Ce projet de loi soulève l'aspect discriminatoire de la loi, puisque, si l'on prend le problème par l'autre bout, 70% des citoyens non fumeurs imposeraient des lois anti-tabac à 30% des fumeurs, ce qui serait la cause d'une discrimination. Or, derrière cette discrimination, il y a aussi des conséquences: un changement de comportement des uns, obligés de fumer sur le trottoir, des répercussions économiques, les commerces qui n'arrivent plus à faire le plein, ce qui se serait matérialisé par des licenciements de personnel. Il a aussi été question de dépénaliser les fumoirs, pour autant bien sûr que le personnel puisse y être autorisé, raison pour laquelle un amendement avait été proposé dans le sens d'autoriser du personnel à y entrer. Mais le problème de ce projet de loi est finalement que nous devrions modifier plusieurs articles, ce qui permettrait aussi de définir un établissement fumeur. Enfin, les auteurs ont bien sûr repris une argumentation assez intéressante, mais parfois un peu amnésique, qui parlait des problèmes de bruit, des problèmes d'absence d'effets secondaires des mesures déjà prises. Et finalement les comparaisons qui ont été établies ont été remises en cause sur le plan des statistiques.
Il n'est bien sûr pas possible, en démocratie, d'oublier et de revenir à un projet qui a une géométrie extrêmement variable, et je me suis permis de reprendre M. de La Fontaine, qui ne parlait pas de fumée, mais qui disait ceci:
«Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.»
Et c'est exactement le problème que nous avons avec ce sujet du tabac: 30% de fumeurs, 70% de non-fumeurs. Mais ce qui est plus grave encore à nos yeux, c'est que nous sommes dans une forme de stigmatisation qui demande, en réponse, une morale un peu à la tête du client, oubliant que nous avons déjà voté à trois reprises pour cette loi et que, bien sûr, sur le plan fédéral, nous avons une loi qui est tout à fait intéressante, mais qui est un peu moins calquée que celle que nous avons à Genève.
Alors, fallait-il entrer dans le compromis ou la soumission ? Fallait-il envisager des mesures de contournement ? Eh bien, finalement, la commission a décidé de ne pas donner suite à ce genre de projet et d'éviter cette tentative d'intimidation, raison pour laquelle nous n'utiliserons pas les chemins à la dérobade et nous vous demandons, comme la commission, de refuser clairement cette modification de la loi.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. La parole n'étant plus demandée, je mets aux voix ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 11033 est rejeté en premier débat par 39 non contre 15 oui et 1 abstention.