Séance du
jeudi 13 septembre 2012 à
17h
57e
législature -
3e
année -
11e
session -
59e
séance
IN 146-C
Débat
Le président. Nous passons maintenant aux points fixes, à commencer par le point 117: IN 146-C. Ce débat est classé en catégorie II: cinquante minutes, soit cinq minutes par groupe et cinq minutes par rapporteur. Mesdames les rapporteures, comme toujours, je vous rappelle de bien vouloir calibrer votre intervention si vous souhaitez avoir du temps pour réintervenir à la fin du débat. La parole est à Mme la rapporteure de majorité Anne-Marie von Arx-Vernon.
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette initiative a permis de remettre à jour la réalité des Transports publics genevois en matière de budget. Nous avons travaillé très sérieusement au sein de la commission des transports et avons relevé les points suivants, qui nous ont évidemment amenés à rejeter cette initiative.
Il faut savoir que, depuis 2009, la législation mentionne que le transport urbain doit être intégré au service direct et que ce système ne peut fonctionner que si l'ensemble des entreprises suisses de transport suit les mêmes règles, ce qui ne serait plus possible avec l'IN 146. A Genève, entre 2006 et 2009, l'offre des transports a été augmentée de 23%, alors que dans le même temps la fréquentation a connu une hausse de 35%, ce qui montre que la politique menée dans le domaine correspond aux besoins de la population en matière de tarification.
Par ailleurs, si l'IN 146 était adoptée, cela entraînerait des frais extrêmement importants: il y aurait par exemple une augmentation de 20 millions pour le budget en 2012 - sur 148 millions de francs budgétisés - de 22 millions en 2013 et de 25 millions en 2014. Mais surtout il faut relever que, s'agissant de ce que les initiants peuvent souhaiter - et cela tout à fait respectablement - eh bien les personnes les plus fragilisées aujourd'hui bénéficient de bien meilleures prestations que si l'initiative 146 passait. Par exemple, les personnes qui sont au bénéfice des prestations complémentaires AI ou AVS ont déjà droit à un abonnement mensuel au prix extrêmement préférentiel de 5 F, ce qui permet à 20 000 personnes d'obtenir des abonnements dans les meilleures conditions. Les personnes à l'assistance bénéficient des mêmes conditions, ce qui porte le nombre à 40 000 personnes disons bénéficiaires - je n'ose pas dire privilégiées... La comparaison entre les abonnements pour seniors dans les grandes villes suisses est également intéressante à relever. En 2012, l'abonnement mensuel senior coûte 50 F à Genève, 79 F à Zurich, 55 F à Bâle et Berne, et 59 F à Lausanne - soit une moyenne de 62 F - si bien que Genève ne pratique absolument pas des tarifs scandaleux.
Nous avons en outre relevé au cours des travaux de la commission que l'impact négatif de l'IN 146 amènerait une augmentation des dépenses publiques, donc bien évidemment des augmentations d'impôts. De plus, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons encore noté un point tout à fait négatif en cas d'acceptation de l'IN 146, c'est que la modification des catégories des usagers qui est demandée dans cette initiative impliquerait une double tarification. Je vous laisse imaginer la complexité ! Il y aurait ainsi une tarification cantonale, régie par des nouvelles règles, et une tarification régionale, régie par des principes nationaux.
En conclusion, vous l'avez bien compris, nous avons rejeté cette initiative 146. Mais pourquoi n'avons-nous pas proposé de contreprojet ? Eh bien parce que même si la proposition des initiants est respectable et cherche effectivement à favoriser une partie de la population âgée usagère des transports publics, mais déjà bénéficiaire d'avantages, les augmentations inévitables péjoreraient le budget des autres usagers des transports publics. Et nous ne voulons pas d'un contreprojet parce qu'il n'apporterait rien de plus que ce qui existe déjà maintenant et que la sortie des TPG d'Unireso et des avantages qu'il y a actuellement pour tous serait une véritable catastrophe.
Le président. Il vous reste une minute, Madame la députée !
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. Je vous remercie, Monsieur le président. Je reprendrai la parole avec plaisir si nécessaire et me réjouis d'entendre mon excellente collègue qui a rédigé le rapport de minorité. Pour l'heure, Mesdames et Messieurs les députés, je vous serais reconnaissante de bien vouloir suivre ce que la commission dans sa quasi-unanimité vous recommande, c'est-à-dire de rejeter l'initiative 146 ainsi que le principe d'un contreprojet.
Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de minorité. La minorité de la commission, soit les socialistes, partage en partie les critiques qui ont été faites à cette initiative, et je rejoins la rapporteure de majorité sur le fait qu'un travail sérieux a été réalisé en commission. C'est vrai qu'à certains égards cette initiative va trop loin, notamment lorsqu'elle prévoit que le prix des billets soit inscrit dans une loi, laquelle, vous le savez, serait soumise au référendum obligatoire. Ce serait donc d'un certain point de vue dommageable. La deuxième raison, c'est que cette initiative compte donner la compétence de fixer les tarifs non plus au Conseil d'Etat mais au Grand Conseil. Or cette disposition, on l'avait d'ailleurs vu lors du traitement de la recevabilité de cette initiative, pourrait - je dis bien «pourrait» - être contraire à la loi sur le transport de voyageurs au niveau fédéral. Les Chambres fédérales, qui sont en train de modifier cette loi, donneraient une marge de manoeuvre beaucoup plus importante aux entreprises pour la tarification. Voilà pour le deuxième élément.
En revanche, les socialistes soutiennent les initiants lorsqu'ils disent - et ils ont raison - que les billets des transports publics ont augmenté de près de 20%. Il s'agit d'une augmentation conséquente pour les gens. Certes, une certaine catégorie d'entre eux peuvent bénéficier d'avantages - l'article 28 de la loi fédérale prévoit aussi que les cantons ou les entreprises peuvent accorder des prix préférentiels à une certaine catégorie de personnes - mais il faut bien reconnaître qu'il y a aujourd'hui encore des gens à Genève pour qui prendre les transports publics devient cher.
Donc nous, socialistes - et nous l'avons indiqué en commission - sommes d'avis que le Conseil d'Etat doit proposer un contreprojet. Pourquoi ? Parce que vous connaissez l'ambiance actuelle face à la nouvelle réorganisation des transports publics, la révolte, la rogne même des usagers contre cette nouvelle organisation, et nous pensons effectivement que cette initiative telle qu'elle sera proposée au peuple - je vous le rappelle, in dubio pro populo - risque fort bien d'être acceptée. Et alors que compte faire le Conseil d'Etat ? C'est la question que je pose dans mon rapport de minorité. Si le peuple accepte cette initiative, le Conseil d'Etat compte-t-il faire fi de cette volonté populaire ? C'est quand même un vote démocratique ! Ou bien compte-t-il s'attaquer au fond du problème, parce qu'en définitive les personnes qui auront voté l'initiative se fichent pas mal que ce soit le Conseil d'Etat, le Grand Conseil ou les entreprises qui fixent les tarifs ? Pour les gens, ce qui est important, c'est que le prix soit accessible à leur porte-monnaie, et si le contreprojet prévoit une baisse des tarifs pour les personnes les plus pénalisées aujourd'hui, c'est-à-dire les retraités, les invalides et les jeunes, eh bien alors je suis persuadée que ce contreprojet recevrait l'aval du peuple. Actuellement, en l'état, sans contreprojet, le Conseil d'Etat prend un gros risque que cette initiative, avec les défauts que nous y avons vus, soit réellement acceptée par une grande majorité des citoyens.
M. Antoine Barde (L). Mesdames et Messieurs les députés, il nous appartient ce soir de nous prononcer sur l'initiative 146 et de répondre à deux questions, à savoir si nous acceptons ou pas l'initiative et si nous devons ou pas lui opposer un contreprojet. Le PLR suivra les recommandations de la commission des transports et refusera l'initiative ainsi que l'idée d'un contreprojet.
Cette initiative souhaite fixer dans la loi les tarifs des transports publics et ceux-ci devront être soumis au Grand Conseil en cas de modification. Mesdames et Messieurs, c'est une fausse bonne idée ! Avons-nous réellement toute la compétence nécessaire pour juger de la tarification des transports publics ? Je ne le pense pas. Imaginez un référendum sur un projet de loi qui fixe les prix des transports publics et ce tous les quatre ans. Je crains que cela n'arrange en rien la guerre des transports.
Mesdames et Messieurs, cette initiative crée en outre une inégalité entre les tarifs juniors et seniors. Elle met clairement en danger la communauté tarifaire Unireso et veut donner l'impression à la population qu'elle paiera ses billets moins cher. Malheureusement, ce n'est pas le cas: cette initiative est sournoise, pas équitable et va à l'encontre d'une politique constructive pour les usagers. Le concept même de l'initiative ne nous séduit pas, il ne nous séduit même en rien, et par conséquent il n'y a pas matière non plus à concevoir un contreprojet. En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite fermement à refuser cette initiative et à ne lui opposer aucun contreprojet.
M. Roberto Broggini (Ve). Vous le savez, les Verts sont favorables au développement des transports publics afin de disposer de transports publics performants. Maintenant il faut se donner les bonnes conditions pour avoir ce développement et nous avons encore beaucoup de travail à faire ces prochaines années pour rattraper le retard considérable que Genève a pris depuis le démantèlement de nos réseaux de trams, depuis la non-construction du CEVA en 1912, etc. Nous savons que ce développement doit se faire et que cela a un coût, un coût qui doit être payé par quelqu'un. Alors est-ce par l'impôt ? Est-ce par l'usager ? Actuellement, l'usager paie grosso modo la moitié du prix de son billet. J'imagine mal que quelqu'un propose à ce parlement un projet de loi ou une initiative pour qu'on aille gratuitement chez le cordonnier ! Moi je paie mes chaussures !
D'autre part, cette initiative a malheureusement un très gros défaut, c'est qu'elle parle des TPG et non pas d'Unireso. Or dans le cadre d'Unireso nous sommes en train de développer un ensemble de parcours entre Genève et la France, entre Genève et le canton de Vaud, et donc cela n'impliquerait justement pas tout ce développement dont nous avons besoin pour drainer toute la population du bassin du Genevois, parce que c'est bien du Genevois que l'on doit parler. C'est le gros défaut de cette initiative. Par ailleurs, on n'a pas vu de contreprojet. Le contreprojet qui est mentionné par la rapporteuse de minorité... (Remarque de Mme Loly Bolay.) ...par la rapporteure de minorité, excusez-moi, Madame Bolay ! Mais il y en a qui préfèrent «rapporteuse», d'autres qui disent «Madame le rapporteur», «Madame la rapporteure»...
Le président. Poursuivez votre argument, Monsieur Broggini !
M. Roberto Broggini. Mais c'est l'ancienne présidente qui m'interpelle ! Je disais que nous n'avons pas vu ce contreprojet, et donc en l'état nous ne pouvons pas accepter cette proposition. Nous serons ainsi malheureusement contraints, malgré notre volonté que tout un chacun puisse prendre les transports publics au meilleur prix, de refuser cette initiative.
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai qu'on peut s'interroger sur les tarifs pratiqués par les TPG dans ce canton, le PDC l'a d'ailleurs fait par le passé, notamment concernant les usagers occasionnels et les familles. Il y a donc matière à s'interroger sur la validité et la pertinence des tarifs pratiqués, mais aller jusqu'à la proposition formulée par les initiants nous semble pour le moins excessif et a paru à l'ensemble de la commission sur plusieurs points en complet décalage avec la réalité que nous vivons dans le cadre d'Unireso. Je confirme ce que disait très justement Mme von Arx, les travaux ont été menés de façon tout à fait complète, ils ont permis de traiter l'ensemble de la problématique en commission, et plusieurs défauts de cette initiative, à nos yeux rédhibitoires, sont apparus, défauts sur lesquels je me permets de revenir.
D'abord, et Mme von Arx l'a dit, les retraités, qui sont évidemment au centre des préoccupations de l'AVIVO - on le comprend, il s'agit de préoccupations légitimes - ont déjà aujourd'hui à Genève la possibilité de bénéficier de tarifs préférentiels. Il est bon de le rappeler. Mais l'AVIVO a évidemment souhaité éviter d'être accusée de ne défendre que les personnes âgées dans son initiative et a donc prévu un petit cadeau pour les jeunes également. Problème majeur, ce cadeau pour les jeunes cible une catégorie qui n'existe pas dans la communauté Unireso, à savoir qu'on s'arrêterait aux jeunes de 18 ans. Or aujourd'hui, un certain nombre de réductions existent jusqu'à 25 ans, et les initiants ont complètement oublié cette réalité. Résultat, cela a été dit, si nous allions dans le sens de l'initiative, nous devrions soit sortir d'Unireso, soit envisager une double tarification. Imaginez la difficulté dans laquelle l'on se trouverait à Genève !
Le troisième problème, chers collègues, Mesdames et Messieurs les députés - et c'est certainement le plus important - c'est celui de mettre des tarifs dans une loi. Imaginez que nous ayons dans une loi une liste de tarifs en fonction des différentes catégories d'usagers, en fonction des différentes durées ! Imaginez la difficulté: lorsqu'il s'agirait d'adapter, de modifier, de changer les catégories, nous devrions systématiquement revenir devant ce parlement ! Or il y a quelque chose d'aberrant, passez-moi l'expression, à faire remonter au rang législatif ce type d'aspects.
Donc, oui, on peut s'interroger sur les tarifs. Je vous rappelle du reste que, ici même il y a deux ans, ce parlement a fortement influencé les tarifs des TPG, puisque leur augmentation avait été reportée d'une année. Ainsi nous pouvons déjà ici, lorsque nous discutons du contrat de prestations, avoir une influence sur les tarifs des transports publics genevois en tant que parlementaires. Alors aller plus loin, imaginer introduire dans la loi ces tarifs, c'est clairement une idée qu'il faut refuser. Je crois d'ailleurs que l'ensemble des groupes était convaincu des défauts de cette initiative et de la nécessité de la rejeter, même Mme Bolay l'a rappelé. La question qui subsistait était celle de savoir s'il fallait lui opposer un contreprojet. Après de nombreuses discussions en commission, nous avons évalué le risque de partir sans contreprojet et il a semblé à la grande majorité d'entre nous - Mme von Arx l'a rappelé - que de se lancer...
Le président. Il vous reste une minute, Monsieur le député !
M. François Gillet. ...dans la rédaction d'un contreprojet, c'était d'une certaine façon attester du bien-fondé des principes mêmes de cette initiative et lui donner en quelque sorte du crédit. Nous avons donc considéré, Monsieur le président, qu'il ne fallait pas le faire et que les arguments que j'ai évoqués, ainsi que d'autres également, permettront - nous en sommes sûrs - de convaincre les Genevoises et les Genevois lors de la campagne en votation populaire que cette initiative irait à l'encontre de la défense des intérêts qu'elle prétend défendre.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord remercier Mme la ou le rapporteur de majorité - pas que je commette d'impair ! - pour son excellent rapport. Le travail en commission, vous avez pu le lire, a été long. Mon préopinant a indiqué que les tarifs des TPG étaient peut-être excessifs, trop chers; cependant, dans tout ce que j'ai entendu - et l'on reparlera de la décision de l'UDC, mais nous sommes d'accord - la question ou du moins l'argutie principale n'a pas été énoncée, à savoir que les tarifs sont peut-être excessifs, mais enfin il n'y a pas de loi miracle ou autre ! C'est soit l'utilisateur qui paie, soit le contribuable, et vous en êtes tous conscients.
Puis, à l'occasion des travaux qui ont été menés, on en est arrivé à la question de savoir s'il fallait, dans le cadre de la commission, concevoir un contreprojet. Cela a été dit, quel a été le principal obstacle, Mesdames et Messieurs les députés ? Cette initiative a un parfum désuet, parce que tout le monde voulait le CEVA - l'UDC ne le souhaitait pas, mais enfin on participe cette fois-là - tout le monde veut l'utiliser, or si cette initiative passe, votre billet ne vous permettra pas d'emprunter le CEVA. Il y a donc là quand même quelque chose de totalement incohérent !
En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, le principal vous a été dit; on se rend compte que cette initiative est complètement à côté de la plaque et l'UDC vous incite donc à la rejeter et estime qu'il n'est pas nécessaire que l'on élabore un contreprojet vu les difficultés et les problèmes que cela génèrerait pour l'utilisation du réseau des trams et du CEVA que vous avez voulu. Soyons logiques pour une fois et refusons tout ceci ! Je vous remercie.
M. Guillaume Sauty (MCG). Que dire après tous les arguments de mes excellents préopinants ? J'aimerais tout d'abord me joindre aux remerciements de mes collègues pour les excellents rapports - tant de minorité que de majorité - mais aussi soulever un point très important que vient également de relever mon collègue Patrick Lussi. Il est important, à l'heure actuelle, de garder l'aspect multimodal qui va permettre d'utiliser ces billets pour les TPG, de même qu'il est important aujourd'hui de conserver et de déployer tout ce réseau mis en place avec Unireso. D'autre part, voulons-nous d'une autre Genferei, Mesdames et Messieurs ? Cette initiative va faire en sorte que nous serons les seuls en Suisse à avoir des tarifs inscrits dans la loi, comme l'ont relevé tous mes autres collègues.
Je ne vais pas m'éterniser plus longtemps étant donné que nous avons d'autres sujets à traiter, et le groupe MCG vous recommande de refuser cette initiative et de ne pas lui opposer de contreprojet.
M. Antoine Droin (S). Durant les quelques minutes précédentes, toutes les bonnes raisons ont été évoquées pour montrer tous les méfaits que pouvait représenter cette initiative. Il est par exemple effectivement impensable d'imaginer qu'on puisse inscrire les tarifs des TPG dans une loi ! Il y a également les problèmes d'Unireso et de la région qui se construit, avec des transports publics qui vont aller de plus en plus loin, même au-delà des frontières, avec ce que cela représente comme problèmes de tarification. Mais en fait quand j'entends le débat de ce soir, il me semble - et c'est ce que j'avais soulevé en commission - que le plus gros risque est que cette initiative passe devant le peuple ! Il ne s'agit pas de savoir si nous nous l'acceptons ou non ce soir, parce que si nous ne la votons pas, elle sera soumise au peuple; la question est donc de savoir si cette initiative peut ou non être acceptée par celui-ci. Or, étant donné les mécontentements, dira-t-on, d'une grande partie de la population par rapport aux changements qui ont eu lieu, à la tarification et à d'autres éléments, et vu les milieux d'où cette initiative provient, on peut quand même imaginer qu'il y a un risque potentiel que cette dernière passe telle quelle devant le peuple. Par conséquent, la vraie question aujourd'hui est de savoir si l'on peut prendre ou non le risque de voir cette initiative acceptée par la population. Après c'est une question d'appréciation ! La majorité a décidé qu'il n'y avait pas de risque à ce que ce texte passe devant le peuple et soit adopté, alors que nous nous estimons qu'il existe un risque potentiel que cette initiative - qui n'est pas excellente, on le reconnaît volontiers - puisse être acceptée par le peuple. D'où l'idée de défendre le principe d'un contreprojet et de faire en sorte qu'on puisse répondre à une partie de la population qui est actuellement mécontente tout en essayant d'enlever ce qui ne convient vraiment pas dans les propositions qui ont été formulées par les initiants.
Vous l'avez vu, en commission nous étions non pas partagés, mais nuancés, puisqu'il y a eu une abstention et un non de la part de la représentante du rapport de minorité, ma collègue Loly Bolay. Alors voilà, nous sommes dans une situation un peu délicate, et la grande question à laquelle il nous faut répondre ce soir est de savoir si l'on peut prendre le risque que le peuple accepte cette initiative. Je vous laisse à cette responsabilité !
M. Jacques Jeannerat (R). On le sait depuis plusieurs années, le financement des transports publics genevois repose sur un subtil équilibre, composé d'une part par une subvention de la collectivité, et d'autre part par ce que les utilisateurs mettent comme argent pour acheter leurs billets ou leurs abonnements. Notre groupe avait déposé il y a sept ou huit ans une motion pour que justement le Conseil d'Etat tienne compte de cet équilibre et reste dans une proportion de 50% de subvention au maximum. Nous sommes attachés à cet équilibre qui est à peu près de 50%; c'est un équilibre subtil, que n'importe quelle idée de contreprojet viendrait faire basculer dans le mauvais sens.
Par ailleurs, Monsieur Droin, nous pensons que cette initiative va suffisamment loin et nous avons confiance dans le bon sens des Genevois pour qu'il y ait une majorité d'entre eux qui la refuse sans contreprojet.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme le rapporteur de minorité pour vingt secondes, hélas...
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC), rapporteuse de majorité. De majorité, Monsieur le président ! De majorité !
Le président. Oui, de majorité ! Je vous présente mes excuses, Madame la députée !
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon. Merci. Très brièvement, je reviens sur les conclusions de la commission à la quasi-unanimité. Aujourd'hui, l'initiative 146 a déjà les résultats qu'elle espérait, les personnes qu'elle visait sont déjà bénéficiaires d'avantages et nous nous en réjouissons. Mais nous ne voulons pas d'augmentation des tarifs des TPG et nous ne voulons pas d'augmentation d'impôts, nous voulons juste refuser ce qui est aujourd'hui proposé.
Le président. Merci, Madame le rapporteur de majorité. La parole est à Mme Loly Bolay, rapporteure de minorité, pour une minute vingt.
Mme Loly Bolay (S), rapporteuse de minorité. Je n'ai pas besoin d'une minute vingt, Monsieur le président ! J'aimerais juste dire que, une fois que cette votation sera passée, on se donnera rendez-vous et chacun et chacune prendra ses responsabilités. Je m'en réjouis déjà ! Je glose ! (Exclamations.)
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'est vrai, nous sommes appelés à prendre un risque. La majorité de ce parlement - et je crois même l'unanimité - trouve que cette initiative est néfaste et dangereuse pour les transports publics et qu'elle n'amène aucun plus pour les citoyens. Mais moi je fais confiance aux citoyens ! Ils sauront le reconnaître et refuser eux-mêmes cette initiative. Oui, c'est un risque, mais les gens prendront en considération ce risque, à savoir que cela coûte 25 millions de plus et que les jeunes sont pénalisés. Ce qui proposé est un scandale ! En effet, on veut alléger le «fardeau» - entre guillemets - des personnes âgées et on augmente les prix pour les 18-25 ans, qui bénéficient actuellement d'un tarif réduit. Mais pourquoi opposer jeunes et vieux ? Ce n'est juste pas normal ! En outre, on risque de perdre la communauté tarifaire Unireso, c'est-à-dire la vraie multimodalité. Ce qui est absurde lorsqu'on est en train de construire une région et de réaliser le CEVA. Les citoyens comprendront qu'il serait juste absurde de devoir acheter un billet spécial pour faire un trajet en Mouettes, un billet TPG pour prendre le bus ou encore un billet CFF ou SNCF pour utiliser le CEVA ou le train. Nous voulons construire une vraie unité tarifaire dans toute la région: nous l'avons déjà fait sur le canton et sommes en train de le réaliser avec la France voisine. Ça c'est un objectif, et il faut maintenant avoir le courage de dire non à cette initiative.
Je voudrais dire ici que les personnes âgées - elles sont défendues par l'AVIVO, et c'est très bien qu'elles le soient - qui ont de vraies difficultés paient actuellement 5 ou 6 F par mois pour un abonnement mensuel; 6 F par mois ! C'est donc 20 000 personnes à Genève - des personnes âgées ou à l'AI - qui bénéficient d'un abonnement au tarif de 6 F. Du reste, les personnes qui sont à l'assistance, qui sont donc aussi en difficulté et qui ont besoin d'avoir un accès aux transports, paient elles aussi le même prix, c'est-à-dire 6 F par mois. Il faut donc savoir que les gens qui rencontrent des difficultés peuvent avoir accès à des billets à un tarif vraiment concurrentiel. D'ailleurs, vous l'avez constaté, nous sommes déjà à l'heure actuelle parmi les moins chers de Suisse, et pour les tarifs seniors nous sommes même le canton le moins cher de Suisse ! Je crois que c'est un point à souligner.
Maintenant il faut simplement avoir le courage de dire non à cette initiative et s'engager dans la votation populaire pour expliquer clairement les choses, les risques que l'on prend; il ne faut pénaliser ni les jeunes ni la région, et nous devons garantir aux personnes qui ont de vrais besoins un accès aux transports publics à un tarif très réduit. C'est ce qui existe déjà maintenant ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de regagner vos places, car nous passons au vote. Je mets d'abord aux voix la prise en considération de l'initiative 146.
Mise aux voix, l'initiative 146 est refusée par 75 non et 13 abstentions.
Le président. Je vous soumets maintenant le principe d'un contreprojet.
Mis aux voix, le principe d'un contreprojet est refusé par 61 non contre 23 oui et 4 abstentions.
Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 146-C.