Séance du
jeudi 13 septembre 2012 à
17h
57e
législature -
3e
année -
11e
session -
59e
séance
GR 519-A
Le président. Je prie M. Dal Busco de bien vouloir s'installer à la table des rapporteurs pour nous présenter le dossier de grâce. Monsieur le député, vous avez la parole.
M. Serge Dal Busco (PDC), rapporteur. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs, chers collègues, la commission de grâce a examiné la demande formulée par M. A. S. F., né en 1967. Ce monsieur a deux enfants de 15 et 20 ans et exerce la profession de chauffeur de taxi. Il vit en Suisse depuis 1990 et en a acquis la nationalité.
M. A. S. F. a été condamné le 17 octobre 2011 par suite d'un jugement du Tribunal correctionnel à une peine privative de liberté de trois ans - dont douze mois ferme, sous déduction de quarante-six jours de détention avant jugement, et le surplus avec sursis - ainsi qu'à un délai d'épreuve de cinq ans. Il a été déclaré coupable de tentative de meurtre, selon les articles 22 et 111 du code pénal, et de mise en danger de la vie d'autrui, au vu de l'article 40 du code pénal. M. A. S. F. demande la remise de la partie ferme de la peine de douze mois, c'est-à-dire qu'il demande le sursis total.
Je vais vous faire part des faits que le tribunal a retenus. L'affaire prend sa source dans une altercation entre deux automobilistes qui s'est déroulée dans la nuit du 14 au 15 février 2011. Les traditionnelles queues de poisson, rabattements, etc., ont fait que les protagonistes sont sortis de leur véhicule: celui de M. A. S. F. était occupé par sa femme et lui-même, tandis que dans l'autre voiture se trouvaient deux hommes et une femme. Bousculades et insultes se sont ensuivies. L'affaire aurait pu en rester là, mais M. A. S. F. a suivi l'autre voiture dans le quartier. Dans l'intervalle, il a chargé son pistolet, est venu à la hauteur de l'autre véhicule à une distance d'environ un mètre et a ensuite tiré huit coups, dont trois dans la vitre du conducteur. Les autres coups ont atteint le véhicule et des bâtiments environnants. Fort heureusement - et c'est un miracle - personne n'a été blessé dans cette affaire. Il est ensuite parti avec son véhicule en direction de Balexert... (Brouhaha.) S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés ! (Le président agite la cloche.) ...où il a tiré encore trois coups sur une voiture stationnée dans un parking et qui appartenait à un homme avec lequel il avait eu un différend financier. L'interpellation de M. A. S. F. a eu lieu ensuite dans le garage de son immeuble et on peut la qualifier d'un peu musclée.
M. A. S. F. a donc été condamné à la peine que je vous ai indiquée, laquelle sera exécutée sous le régime de la semi-détention à l'établissement de Villars, et ce dès le 11 septembre 2012. Cela équivaut à douze heures de présence dans l'établissement par jour, plus les week-ends. A l'appui de sa demande, M. A. S. F. relève que le régime en question met en péril son activité - je rappelle qu'il est chauffeur de taxi - laquelle se déploie essentiellement le week-end, et il est inquiet de perdre sa clientèle. Le deuxième élément qu'il invoque pour justifier sa demande est le fait que son fils cadet, âgé de 15 ans, a été appréhendé par la police le 15 mai 2012 pour divers actes de brigandage commis avec d'autres jeunes de son quartier et qu'il a été incarcéré à la Clairière pendant sept jours. Compte tenu de cet élément, M. A. S. F. estime que son fils a besoin de la présence de ses deux parents à ses côtés pour lui permettre de retrouver un équilibre, en particulier dans cette période difficile du passage de l'adolescence à la vie adulte. Il considère donc que purger la peine telle qu'elle est prévue constituerait un obstacle au rétablissement de cet équilibre.
La commission, vous vous en doutez bien, a examiné cette demande avec tout le soin nécessaire, mais a estimé que les faits pour lesquels M. A. S. F. a été condamné sont extrêmement graves. Elle a considéré également que la peine qu'il doit purger est somme toute très clémente, puisqu'il s'agit d'un régime de semi-détention. La commission a en outre jugé que l'exemple transmis à son fils, si la grâce devait être accordée, serait vraiment très mauvais, car cela donnerait un sentiment d'impunité.
Pour toutes ces raisons résumées brièvement ici, la commission vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, de rejeter cette demande de grâce à l'unanimité.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur, nous allons passer au vote.
Mis aux voix, le préavis de la commission de grâce (rejet de la remise de la partie ferme de la peine) est adopté par 71 oui et 2 abstentions.