Séance du
jeudi 22 mars 2012 à
14h
57e
législature -
3e
année -
6e
session -
35e
séance
M 1935-A
Débat
Le président. Nous sommes au point 53 de notre ordre du jour. Je donne la parole à M. le rapporteur de majorité Edouard Cuendet.
M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Je crois que c'est typiquement un cas dans lequel notre parlement a l'avantage de pouvoir traiter une motion avec un certain recul, parce qu'au moment de son dépôt, le 24 novembre 2011, cette motion était encore chargée d'émotion, et cela ressort de son libellé. J'y reviendrai plus tard.
De mon point de vue, la motion n'aurait pas dû être intitulée «Pour le respect du personnel au sol à l'Aéroport international de Genève», mais bien: «Pour une action syndicale responsable».
Je vais un peu développer ce propos maintenant, parce que, du point de vue historique, il faut se souvenir que cette grève sauvage a été lancée sans préavis par le syndicat SSP/VPOD le 2 janvier 2010, alors même que 77% du personnel de l'entreprise concernée, Swissport, avaient accepté les termes et conditions de la nouvelle convention de travail. Il s'agissait d'un renouvellement se faisant à un rythme normal et périodique depuis des années. Ces 77% doivent être soulignés. Ce qui l'est également, c'est ce qui est ressorti des travaux de la commission: cette convention de travail était plus favorable que les conditions offertes à Bâle ou à Zurich, par exemple. Donc, cette action sociale sauvage était contraire à tous les principes régissant le partenariat social - d'ailleurs, il n'a pas échappé à la commission que les mots «partenariat social» n'apparaissaient pas une fois dans cette motion - et qu'elle était contraire à la paix du travail. De plus, cette action aurait pu causer de graves incidents à l'aéroport, puisque la date choisie de manière sauvage était un jour de forte affluence - même d'affluence exceptionnelle, puisque 70 000 personnes étaient présentes sur le site à ce moment-là. Vous pouvez imaginer les risques et les dangers qu'auraient pu alors causer une émeute.
Dans ce contexte, je relèverai aussi que le SSP/VPOD a refusé avec obstination une demande d'arbitrage, alors que l'autre partie était d'accord et que le Conseil d'Etat avait poussé dans cette voie.
Je tiens à rendre hommage au Conseil d'Etat en général, et à M. François Longchamp en particulier, qui, contrairement à ce que sous-entend la motion, a dégagé une énergie considérable. Il nous dira le nombre d'heures qu'il a consacrées à ce dossier épineux, pour trouver une solution pacifique et... (Remarque.) ...pour que tout cela ne finisse pas dans un pourrissement du conflit. Je tiens donc à lui rendre hommage ici.
Ce qui est également ressorti des travaux de commission, c'est que plusieurs voix se sont fait entendre pour demander comment les rédacteurs de la motion avaient pu se laisser instrumentaliser de la sorte pour soutenir une action qui s'est avérée contestable. Ce texte est très choquant, puisqu'il contient des allégations fausses, des accusations infondées dont le caractère inepte a pu être prouvé durant les auditions, et grâce aux auditions. (Brouhaha.)
Même les députés socialistes, en commission - et cela je tiens à le souligner... (Brouhaha.) Monsieur le président, si je peux avoir un petit peu de silence... Même les députés socialistes, en commission, ont admis que les invites n'étaient pas adéquates et avaient été... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...je cite: «maladroitement rédigées». C'est un euphémisme.
Les députés MCG, qui étaient a priori plutôt favorables à ce texte, ont été convaincus par les auditions de faire machine arrière, et, après avoir entendu les nombreux auditionnés, ont rejeté le texte de la motion.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Edouard Cuendet. Sur le fond, et j'y reviendrai plus tard, plusieurs invites sont illégales, contraires au droit aéroportuaire international, et puis, comme je l'ai dit, les mots «partenariat social» n'apparaissent à aucun moment. Je pense donc que c'est cela le point fort que l'on doit souligner ici, c'est l'importance de ce «partenariat social».
Le président. Monsieur le député, je pense qu'il vous faut conclure !
M. Edouard Cuendet. Je conclus ! Ainsi, je vous invite à rejeter cette motion, et je pense que je reviendrai plus tard dans le débat.
Le président. La parole est au rapporteur de minorité, M. Roger Deneys.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion a évidemment été déposée dans un moment, on va dire «de grande tension», parce que tout le monde sait qu'une grève à l'aéroport, au mois de janvier, juste après nouvel an, c'est toujours délicat ! C'est délicat à vivre pour les personnes se trouvant sur le site de l'aéroport, pour les passagers devant arriver, et surtout pour ceux devant partir... Car ils n'ont pas envie d'y rester prisonniers.
Il est vrai que l'émotion suscitée par une grève sur le site de l'aéroport est compréhensible. Elle influence - pour un aéroport qui est un établissement public autonome - logiquement les travaux de notre Grand Conseil et, en tout cas, sensibilise les députés au besoin de faire fonctionner l'aéroport d'une façon satisfaisante dans la durée.
Je dirai qu'au-delà du texte lui-même de la motion, texte qui n'est pas forcément un modèle de rédaction pour notre parlement, on peut relever que l'essentiel est de savoir ce que l'on peut faire dans notre parlement pour garantir le bon fonctionnement de l'aéroport. Et notamment garantir un partenariat social intelligent à long terme ! Au-delà de considérations qui ont tendance à se résumer à l'attaque de personnes, en commission de l'économie, le PLR et le directeur de l'aéroport l'ont rappelé, la grève, en gros, n'existerait pas parce qu'il y a un problème, mais parce qu'il y a un certain délégué syndical représentant le syndicat ! Et c'est la seule raison qui expliquerait le malaise exprimé par ce mouvement... En réalité, ce n'est évidemment pas le cas. On l'a vu, il y a eu cette grève à Swissport; six mois plus tard, il y avait une autre grève à ISS. On voit que le site de l'aéroport pose différents problèmes au niveau du partenariat social, et notamment parce qu'il est dans un contexte économique particulier ! L'aéroport est en partie régi par des conventions internationales - il y a une zone franche, il y a un certain nombre d'opérations qui se déroulent en dehors du cadre légal simplement genevois ou même fédéral - et il est vrai que la problématique est compliquée. Il y a la question des sous-traitants, il y a celle des auxiliaires... Il est exact que le volume de travail peut, d'un moment à un autre de l'année, changer de façon assez considérable, mais il est certain que l'état d'esprit dans lequel se déroule le travail à l'aéroport n'est manifestement pas satisfaisant aujourd'hui, puisque des mouvements sociaux s'expriment à plusieurs occasions.
Pour les socialistes et les Verts, auteurs de cette motion, il s'agissait surtout de donner des conditions-cadre favorables au bon déroulement du travail à l'aéroport, afin d'éviter de prendre les passagers en otage. Et je crois que l'essentiel est bien là ! Aujourd'hui, la majorité, représentée par M. Cuendet - et le Conseil d'Etat, en partie - dit la même chose: «Tout va très bien, Madame la Marquise ! Il n'y a pas de problème, c'est un syndicaliste qui dysfonctionne.» Au-delà de cette position un peu simpliste, il y a bien, en réalité, un problème de partenariat social à l'aéroport. Et je crois que l'invite essentielle de cette motion consiste à dire qu'il...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Roger Deneys. ...faut renforcer ce partenariat social. Je vous invite donc à voter l'amendement qui a été déposé pour remplacer les invites telles qu'elles étaient formulées initialement et à renvoyer ensuite cette motion au Conseil d'Etat.
M. Philippe Schaller (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, comme l'ont dit les deux rapporteurs, cette motion a été déposée lors de la grève de l'entreprise Swissport à l'Aéroport international de Genève. Le groupe PDC a pris cette motion au sérieux, car il est conscient des conséquences graves pouvant entraîner un dysfonctionnement des relations de travail au sein de l'aéroport.
Nous avons entendu les deux syndicats. Nous avons aussi entendu le directeur de l'aéroport, de même que le conseiller d'Etat en charge de ce dossier. Nous avons acquis la conviction que les invites de cette motion ne respectent ni les accords internationaux, ni les règlementations suisses, ni le partenariat social en vigueur dans nos entreprises. Par ailleurs, il ne nous semble pas adéquat que l'Etat et le Grand Conseil se substituent à l'OCIRT.
Par contre, la septième invite est intéressante - elle a d'ailleurs été traitée par le conseil d'administration de l'aéroport - soit la nécessité de pouvoir résilier une concession à une entreprise qui ne respecterait pas, au cours de son mandat, les conventions collectives.
Finalement, il n'est pas imaginable - comme vous l'aurez compris - de regrouper au sein d'une même convention collective un ensemble si différent d'entreprises oeuvrant sur ce site. Le groupe démocrate-chrétien suivra le rapporteur de majorité. (Applaudissements.)
Mme Christina Meissner (UDC). Mon préopinant a très bien parlé, je l'en remercie. Le groupe UDC partage totalement ces remarques. Il faut se rappeler que le contexte de cette grève faisait suite à l'affluence exceptionnelle ayant eu lieu à l'aéroport de Genève en décembre 2009. La grève a eu lieu entre le 2 et le 11 janvier 2010 - on est déjà largement plus tard.
Des auditions se sont succédé et nous ont permis de comprendre le contexte, comprendre surtout qu'il existait depuis dix-sept ans déjà une convention collective, et qu'il y avait deux syndicats, dont l'un d'eux, le syndicat PUSH, avait accepté son renouvellement à l'unanimité, alors que l'autre syndicat, le SSP, refusait cette reconduction - étant relevé que, s'il n'y a pas d'unanimité, le renouvellement pose problème.
J'aimerais aussi souligner que le syndicat PUSH, qui est de Swissport, regroupe des collaborateurs de Swissport travaillant sur place, alors que la personne du SSP - mise très en avant par tout ce problème de grève - n'était pas un collaborateur, elle venait de l'extérieur.
En l'occurrence, les institutions nous ont montré que les invites de la motion ne respectaient pas les législations nationales, internationales, et se retrouvaient, pour la plupart, difficilement applicables. Dans ces conditions, avec le temps qui a passé, le groupe UDC vous propose de véritablement enterrer cette hache de guerre. L'aéroport va bien. Il n'y a plus de grève. Cela fonctionne bien. Arrêtons de nous pencher sur le passé, intéressons-nous aux problèmes - et ils sont nombreux - qui nous occupent aujourd'hui. Enterrons cette hache de guerre, refusons cette motion, puisque aujourd'hui tout va bien.
En ce qui concerne l'amendement, il dit en des termes légèrement différents à peu près la même chose; on ne peut donc pas accepter davantage cet amendement. Ainsi, je vous remercie de suivre le groupe UDC et de refuser cette motion. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je vois plusieurs députés ou députées s'interrogeant au sujet de l'amendement. Je rappelle que l'amendement a été distribué ce matin sur vos places. La parole est à M. le député Renaud Gautier.
M. Renaud Gautier (L). Oui, Monsieur le président, cette douce fascination du grand soir, des lendemains qui chantent, de «tout ira mieux après», une fois que le parlement se sera saisi d'une vraie révolution... Ainsi, nous parlons normalement ici de ce que l'on appelle pudiquement «le partenariat social», tout le monde est d'accord. Nous voilà introduisant quelque chose de nouveau: un partenariat social de qualité ! Sous-entendu: les autres ne sont pas de qualité.
Alors, Mesdames et Messieurs, je crois qu'il faut prudemment, doucement, refermer la porte de ce moment de rêve qu'ont eu certains en rédigeant des propos inadmissibles du point de vue du droit cantonal comme du droit fédéral, il faut les laisser rêver dans leur coin et continuer la bonne gestion de l'aéroport, sans pour autant s'occuper de cette motion qui devrait être très discrètement déposée dans les caves de l'Histoire.
Mme Christine Serdaly Morgan (S). Mesdames et Messieurs les députés, nous vous proposons un amendement, et c'est à ce propos que je m'exprimerai, et pas sur les éléments de la motion qui seraient incorrects. Soit dit en passant, c'est bien là le résultat d'une commission qui a très bien travaillé en clarifiant certains aspects du fonctionnement de l'AIG.
Revenons d'abord à l'AIG et à la dynamique entre le Grand Conseil, le Conseil d'Etat et l'AIG. Ce dernier est un fleuron genevois: bien ! Quel est alors le problème d'en faire une place exemplaire pour sa gestion des RH et un pôle d'attraction pour l'emploi ? C'est tout ce que cet amendement demande, maintenant ainsi son prestige et son attractivité en en faisant un lieu dont il sera dit qu'il est exempt de grève et bon pour y atterrir et y travailler.
Du point de vue de la relation entre le Grand Conseil, le Conseil d'Etat et l'AIG, il nous reste la désagréable impression, dans cette affaire de grève - et la suivante - que le Conseil d'Etat a avantageusement tiré parti de la situation en passant pour le sauveur. Avec ou grâce à cette motion, nous avons découvert que le contrat établissant la concession présentait des lacunes. Ces dernières demandaient, à la signature de cette concession, le respect d'un certain nombre d'éléments relatifs aux conditions de travail, éléments qui n'étaient pas revérifiés une fois la signature effectuée, et qui n'entraînaient aucune annulation ou renégociation de la convention s'ils n'étaient pas respectés. Sa modification a bien été annoncée par le Conseil d'Etat lors des auditions début 2010; pourquoi la mise en oeuvre de cette promesse n'est-elle donc pas intervenue immédiatement, mais seulement en été ? Est-ce que de ne pas la signer permettait une deuxième grève sans trop de risques et un sauvetage par notre conseiller d'Etat président ? Parfois, les institutions publiques autonomes le sont, parfois elles le sont moins. Souvent, la gauche soulève de vrais problèmes; souvent, la droite les détourne à son profit et, entre-temps, a fréquemment oublié en route l'objectif qu'est le bon fonctionnement des institutions.
Je vous remercie de faire, tout à l'heure, bon accueil à notre amendement.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Vous ne vous étonnerez pas que les Verts soutiennent l'amendement proposé par le parti socialiste. Pourquoi y a-t-il eu une grève à ce moment-là ? C'est qu'il y a effectivement eu un conflit social. Si l'on devait se prononcer à chaque fois sur le bien-fondé d'un conflit social, eh bien, on trouverait toujours à redire.
Ce qu'a réellement permis cette motion a été souligné par Mme Serdaly Morgan: la commission de l'économie a vraiment pu se préoccuper du fonctionnement de l'AIG. Elle a même remarqué qu'il y avait une charte éthique, charte devant être signée par tous les partenaires de l'aéroport, et que ceci était probablement une bonne chose.
Il faut rappeler que, même si aucune grève ne se profile actuellement, cette dernière est malgré tout quelque chose d'exceptionnel, et surtout en Suisse. L'aéroport fonctionne. Mais, même si ses partenaires respectent au minimum les CCT qu'ils ont signées, il y a toujours des difficultés: les conditions de travail données ou les modifications de conditions de travail faites pour le personnel ne sont pas toujours très faciles. Devoir être quatre heures non-stop sur le tarmac en plein hiver n'est pas forcément aisé, et c'est ce que l'on demande actuellement à certaines personnes, qui ne le faisaient pas avant. Si avoir une meilleure condition de CCT, un bon partenaire ou un contrat à l'AIG est important, le bien-être du personnel l'est aussi. Malheureusement, il n'est aujourd'hui en tout cas pas possible pour ces personnes de dire quoi que ce soit, puisque, ce qu'elles veulent, c'est travailler et ne surtout pas perdre leur emploi.
M. Pierre Conne (R). Chers collègues, il était une fois le parti radical, puis le parti libéral, fondateurs des institutions qui nous permettent notamment d'exercer notre droit démocratique tel que nous le faisons aujourd'hui. Le principe qui a finalement conduit, depuis un siècle et demi, le travail de ces partis jusqu'à présent, c'est un Etat fort, garant des libertés individuelles. C'est dans ce cadre des libertés individuelles que s'est exercée ce que l'on appelle aujourd'hui la «paix du travail»: ce sont les relations entre les employés et les employeurs, dans le cadre de conventions collectives. Avec, pour revenir au cas qui nous intéresse, concernant Genève, une Chambre de contrôle des conventions de travail. Et si l'on prend - cela a été dit - avec le recul que nous avons aujourd'hui, les événements ayant conduit au dépôt de cette motion, force est de constater que nos institutions ont joué leur rôle.
La demande telle qu'elle émerge des sept invites de cette motion tendrait, dans le fond, à nous faire dire qu'un Etat plus interventionnel - que simplement celui d'être le garant des libertés individuelles et de la possibilité d'exercer la paix du travail comme elle se fait - serait un plus: eh bien, nous ne le pensons pas. Parce qu'un Etat plus interventionnel viendrait plutôt réduire cette liberté, qui a permis la paix du travail.
Tout cela pour aboutir à la conclusion que je voulais vous proposer: simplement demander aux motionnaires de retirer leur texte. S'ils maintiennent leur motion, nous ne la voteront évidemment pas.
M. Claude Jeanneret (MCG). Je crois qu'il faut se remettre dans le contexte de l'époque. Il y a effectivement eu, au niveau de l'aéroport, certains bruits qui ont couru - le personnel était mécontent, les employeurs aussi - et puis, il s'est avéré que, sur un prétexte - dont je ne me souviens pas exactement aujourd'hui - le Grand Conseil s'est chargé d'étudier quelque chose qui était quand même du droit privé. Mais enfin, nous l'avons examiné et cela a coûté trois séances de la commission de l'économie, où nous avons principalement analysé les doléances qui nous étaient soumises, c'est-à-dire les mauvais salaires, l'utilisation de personnel auxiliaire, et puis le déplacement du personnel fixe vers des fonctions auxiliaires. Au bout de trois semaines de travail et d'auditions, aussi bien du côté de l'employeur que de celui des employés, nous avons pu constater les choses suivantes: les mauvais salaires, c'est faux ! La moyenne des salaires à l'aéroport est supérieure à celle que l'on peut trouver ailleurs pour les mêmes fonctions. En ce qui concerne le personnel auxiliaire, eh bien, quand on a une variation d'activité, il est normal d'avoir du personnel auxiliaire ! On ne peut pas engager des personnes fixes si un avion arrive une fois à minuit - on ne peut pas payer quelqu'un toutes les nuits parce que l'avion arrive une fois à minuit... Il faut quand même être raisonnable. Quant à la question de savoir si du personnel fixe était muté en personnel auxiliaire, il est apparu que cette dénonciation était totalement fausse.
Ainsi, si l'on prend le résultat des travaux - trois semaines de travaux et d'auditions - eh bien, on peut dire que tout ce qui était dénoncé s'est révélé faux ! Donc, le problème, c'est qu'il y avait des mécontents. Et nous nous sommes vraiment laissé prendre dans le jeu du mécontentement de certains employés. Je crois sincèrement que, premièrement, ce n'est pas à nous d'intervenir; deuxièmement, cette motion avait peut-être, au départ, un bon fond - parce qu'il est vrai que lorsque quelqu'un crie au secours, il faut aller vers lui - mais, si on met cette motion en pratique aujourd'hui, dans le contexte de ce qui est, dans le contexte de ce qui a été, et de ce que l'on voit réellement appliquer, cette motion est totalement obsolète. Il faut simplement la refuser.
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Cuendet, vous avez épuisé votre temps de parole, mais il reste... (Remarque.) Vous permettez que je termine ? Il reste deux minutes à votre groupe politique. Je pense que ce dernier vous les accorde et, dans ce sens, je fais de même.
M. Edouard Cuendet (L), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Ça sera court, c'est pour parler de l'amendement. Le problème de ce dernier c'est que, au fond, il s'agit d'une reprise quasiment intégrale des invites précédentes, et surtout il ne change rien ni au titre, ni à l'exposé des motifs, exposé des motifs qui est un ramassis de mensonges et de procès d'intention. Donc, il est absolument exclu d'aller dans cette voie-là. Une fois de plus, je le répète, le Grand Conseil ne doit pas s'ériger en juge des relations du travail - comme l'ont dit plusieurs préopinants - car cela relève du droit privé, et l'Etat n'a pas à s'immiscer dans ce partenariat social. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mais il faut bien comprendre le fond des choses ! Et c'est dans une stratégie assez souvent exprimée: cette motion va dans le sens d'un affaiblissement de l'aéroport. Ce sont des attaques fréquemment répétées contre ce dernier, qui est pourtant une infrastructure essentielle - essentielle ! - pour l'économie et les entreprises genevoises. Pour ceux qui étaient là hier, chez Procter & Gamble, on a pu voir l'importance de l'aéroport pour le canton, la Ville de Genève et les entreprises. Comme par hasard, il n'y avait pas un socialiste du canton ! (Remarque.)
M. Roger Deneys. Nous n'étions pas invités !
M. Edouard Cuendet. Le maire de Lancy était présent et a fait un discours vibrant... (Remarque.) ...en faveur des multinationales, multinationales que les socialistes veulent chasser du canton. L'aéroport est une infrastructure vitale pour l'économie, donc n'entrons pas dans ce conflit idéologique et rejetons cette motion une fois pour toutes !
Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur Deneys, vous avez épuisé votre temps de parole. Il reste quarante-cinq secondes au groupe socialiste: je pense que celui-ci va vous les accorder. (Commentaires.) Bien ! Vous avez la parole pour quarante-cinq secondes.
M. Roger Deneys (S), rapporteur de minorité. Mais, à nouveau, l'objectif est ici d'anticiper les problèmes ! Vous dites que tout va très bien... Je vous rappelle que le renvoi en commission a été accepté par 84 voix, quasiment à l'unanimité ! Parce que le problème était réel, il touchait la vie de tout le monde. Et il faut anticiper les problèmes ! Dire que tout va très bien aujourd'hui, c'est une vue à tellement court terme que c'en est incroyable, dans ce Grand Conseil ! Améliorer les choses était bien le but de la commission: on a pu rétablir certaines vérités, certes, mais il n'empêche que le risque subsiste à l'aéroport, qui connaît des conditions de travail difficiles ! (Commentaires.) Et l'on sait qu'il y a une certaine précarité sur ce site. Donc, il faut essayer d'anticiper ! Nous sommes pour une politique plus...
Le président. Il faut anticiper la conclusion de votre intervention.
M. Roger Deneys. ...interventionniste. Et je vous demande donc d'accepter cet amendement.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, le 2 janvier 2010, 67 des 819 collaborateurs de la société Swissport se sont mis en grève, parce qu'un renouvellement de leur convention collective n'avait pas pu être signé avec cette entreprise, alors même - alors même ! - que le syndicat partie à cette négociation avait signé huit jours auparavant une convention collective avec l'autre opérateur chargé d'opérations au sol, la société Dnata, avec une convention collective 10% inférieure à celle qui était proposée à la signature de la société Swissport. Dans le même temps, fin décembre 2009 à Zurich, le même syndicat avait signé avec la même entreprise une convention collective 10% inférieure aux propositions de la société Swissport, propositions qui avaient été refusées et avaient amené ces 67 collaborateurs sur 819 à se mettre en grève.
La première action de ces grévistes - et Dieu sait si vous me savez attaché, avec l'ensemble du Conseil d'Etat, au droit de grève - faut-il le rappeler, le 2 janvier, jour le plus chargé de toute l'histoire de l'aéroport, puisque c'était un jour de retour de vacances scolaires, a été de bloquer l'accès à l'aéroport de tous les non-grévistes. Nous avons dû mener une négociation difficile dans la mesure où le partenariat social, que chacun vante de ses mots, est un partenariat social qui lie les syndicats et les entreprises, et non pas l'Etat, pas plus qu'il ne lie l'aéroport, entreprise qui accueille les sociétés mais qui n'a pas vocation à gérer des conventions collectives pour elle, sauf, bien sûr, pour ses propres employés - mais il ne s'agit pas de cela. Nous avons donc dû nous impliquer dans une négociation qui fut surréaliste, mais le temps a passé et l'Histoire nous permettra d'oublier.
Il n'empêche que cette proposition de motion apporte plusieurs invites qui sont fort intéressantes, mais dont nous vous avons indiqué que la plupart d'entre elles étaient simplement contraires au droit des conventions collectives. Et un certain nombre de principes, qui - Mme Serdaly Morgan, je tiens à vous le dire - ont été établis par l'aéroport lors de négociations, et qui ont été appliqués immédiatement, sans délai ni pression particulière, ont visé à contraindre les entreprises à respecter les conventions collectives dans le cadre des contrats de concession. Mais, il faut avoir l'honnêteté de le dire, le droit actuel indique que ces entreprises doivent être à tout le moins respectueuses des usages s'il y a absence de convention collective. Convention collective qui, dans ce cas précis, a été signée par un syndicat qui était plus représentatif en termes de nombre de personnes affiliées que ne l'était le syndicat d'origine, et les choses ont ainsi pu rentrer dans l'ordre.
Je vous indique donc, Mesdames et Messieurs, tout en ayant conscience du message que nous devons porter, celui de soutenir le partenariat social, que nous devons avoir l'exigence, parce que c'est une régie publique. Et même si nous avons l'obligation d'avoir un certain nombre de sous-traitants - je dis bien «l'obligation d'avoir un certain nombre de sous-traitants» - nous n'avons pas le choix d'avoir autre chose que de proposer aux compagnies aériennes clientes de l'aéroport au minimum deux entreprises de droit privé chargées des opérations au sol, et avec lesquelles elles ont la liberté de pouvoir contracter. Il n'empêche que l'aéroport doit être exemplaire en la matière; je crois pouvoir dire qu'il l'est. Et je crois pouvoir dire aussi qu'à l'exception de cette grève et d'une autre qui a suivi - autre grève qui était, mais c'est le hasard, animée par le même syndicaliste, laquelle a duré quatre mois et n'a abouti à aucun accord quelconque, les grévistes ayant mis fin à leur mouvement - l'ensemble et la plupart des entreprises présentes sur le site sont au bénéfice de conventions collectives, cherchent de manière active, comme c'est le cas encore tout récemment avec Swissport qui vient de resigner une convention collective pour l'année 2012, et sont respectueuses du partenariat social. C'est en tout cas l'engagement que le Conseil d'Etat fait ici aujourd'hui. Cependant, il vous invite, de grâce ! à ne pas voter une motion qui a probablement été déposée dans l'agitation du mois de janvier 2010, c'était parfaitement compréhensible, mais qui a sans doute été rédigée de manière un peu hâtive, puisqu'elle contient un certain nombre d'invites qui sont toutes - toutes ! - contraires au droit fédéral.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons maintenant passer au vote de l'amendement présenté par Mme Christine Serdaly Morgan, lequel remplace intégralement les invites originelles de la motion. Je vous le lis: «[...] à demander à l'AIG de mettre ne place une instance paritaire destinée aux entreprises concessionnaires de l'Aéroport, de manière à favoriser: l'application des dispositions légales en matière de travail; l'élaboration de CCT ou l'extension de l'application de celles existantes, ainsi que le suivi et le contrôle de leur application; l'intégration du personnel avec des contrats à l'heure (auxiliaires) dans le champ d'application des CCT existantes; la négociation de contrats types de travail (CTT) dans les secteurs où aucune CCT n'existe.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 54 non contre 25 oui.
Le président. Je vous soumets maintenant la proposition de motion 1935.
Mise aux voix, la proposition de motion 1935 est rejetée par 53 non contre 25 oui.