Séance du
vendredi 27 janvier 2012 à
15h
57e
législature -
3e
année -
4e
session -
20e
séance
P 1758-A et objet(s) lié(s)
Débat
M. Pascal Spuhler (MCG), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, ces trois pétitions ont tenu longuement en haleine la commission des pétitions qui a auditionné plusieurs personnes, comme vous pouvez le constater en lisant le rapport. Ces trois textes qui concernent les établissements de nuit et également culturels nous ont vraiment poussés à avoir plusieurs discussions, tant sur la façon de gérer les établissements ou de penser la culture à Genève que sur les problèmes liés à la cigarette, aux terrasses, etc. Il est évident que c'est un sujet conséquent qui ne sera pas réglé avec ces trois pétitions, mais nous tenons quand même à signaler qu'il ne faut pas confondre le divertissement et la culture - c'est ce qui a un peu été fait. La culture ne doit pas être prise en otage sous prétexte que nous avons besoin d'établissements de nuit et qu'il en faut pour tout le monde. Si l'on demandait à une centaine de personnes quel est l'établissement de nuit qu'elles aimeraient, nous aurions probablement cent possibilités différentes. Il est donc clair que les goûts et les desiderata de chacun sont très variés selon les milieux et les provenances.
Pour en revenir à ces pétitions, j'aimerais dire un mot sur la P 1759 qui demandait l'arrêt de la mise en place d'une éventuelle salle de concert au Bois de la Bâtie en raison d'un risque potentiel de nuisances aux animaux. La commission a vite tranché sur la question, puisque... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...par divers éléments, il nous est apparu que cela n'avait pas lieu d'être. La commission vous propose donc de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
J'en viens à la P 1758 qui demande des lieux de sortie à Genève. Encore une fois, nous parlons bien de lieux de sortie pour se divertir. Il faut juste savoir que nous avons 3400 établissements à Genève; si l'on n'arrive pas à trouver son bonheur dans ce choix énorme, il me semble assez aléatoire de créer d'autres possibilités...
Le président. Il vous reste trente secondes.
M. Pascal Spuhler. Très bien, merci. Nous proposons par conséquent le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.
Quant à la P 1760, il s'agit juste d'un bis repetita d'une autre pétition - la P 1722, si je ne m'abuse - qui demandait exactement la même chose... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) La commission l'avait déjà traitée et avait également procédé aux auditions. Nous vous invitons ainsi à classer purement et simplement cette pétition.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes face à une problématique du monde de la création, de l'expression, de la culture émergente, et du monde de la nuit. Nous savons que l'attente est extrêmement importante, comme les états généraux convoqués par la Ville de Genève au début de l'an passé l'avaient indiqué. Les attentes ne sont pas remplies; les boîtes de nuit actuelles sont souvent beaucoup trop chères pour une clientèle jeune et peu fortunée. La culture dite «alternative» a été largement prétéritée ces dernières années avec la fermeture de plusieurs lieux et notamment d'Artamis, qui drainait une foule considérable.
Actuellement l'Usine ne peut absorber toutes les attentes qui existent, on l'a vu avec l'heureuse ouverture de l'usine Sicli et la Gravière qui sera ouverte dans les bâtiments de l'Etat. Mais cela sera seulement provisoire, si bien qu'il convient de préparer l'avenir et de répondre aux attentes. Celles-ci avaient été très largement comprises par trois magistrats de la Ville de Genève de l'époque, c'est-à-dire MM. Haegi, Segond et Emmenegger, qui étaient respectivement libéral, radical et PDC. Ils ont permis l'existence de l'Usine à la fin des années 80, faisant ainsi preuve d'une certaine clairvoyance, ce qui n'est pas le cas de la majorité actuelle qui ne veut pas constater les attentes légitimes d'une partie de la population, non seulement festives, mais aussi, comme je l'ai dit, pour la création émergente.
C'est pour cela que la minorité vous propose de renvoyer ces pétitions au Conseil d'Etat, afin qu'il prenne les mesures avec les différentes collectivités communales à propos du travail qu'il reste à faire dans ce domaine. Je vous remercie, Monsieur le président.
Mme Prunella Carrard (S). M. Spuhler a très justement fait la différence entre divertissement et culture; ce sont deux pans essentiels de la vie nocturne et de la vie culturelle genevoise. La première pétition que nous avons à traiter, intitulée «Y a pas que Lausanne et Zurich dans la vie ! A Genève aussi, nous voulons des lieux de sorties !», parle plutôt du divertissement. J'aimerais rappeler que cette pétition a été lancée par les jeunes libéraux-radicaux et n'a pas du tout obtenu le soutien de leur groupe au sein du débat en commission, ce qui était un peu curieux. On se dit que non seulement les jeunes sont peu écoutés, mais que quand il s'agit de jeunes du PLR, leur parti ne les écoute même pas ! On comprend bien qu'il y a un problème et que le sentiment des jeunes de ne pas être entendus s'avère plus que légitime, puisqu'à l'intérieur d'un même parti, on ne s'écoute pas.
Concernant la pétition qui demandait le développement de lieux de divertissement dans les friches industrielles, j'aimerais ajouter que, si je ne m'abuse, il y avait aussi un projet de loi des Verts qui avait été déposé dans ce sens. Ce dernier est bon et nous verrons donc ce que nous pourrons en faire. Je tenais à le souligner.
Enfin, j'aimerais parler de l'autre pétition qui demandait qu'il y ait une salle de concert dans l'écoquartier de la Jonction. Ici, il est davantage question de culture et moins de divertissement. Ce texte faisait le constat qu'à Genève on manquait cruellement de petites et moyennes salles destinées aux musiques actuelles et/ou au développement de performances pluridisciplinaires. Effectivement, cette pétition intervenait deux ans après une première qui avait été balayée. Mais pourquoi intervenait-elle à ce moment-là ? C'est ce dont il est intéressant de se souvenir ! Nous étions en pleine affaire du Moa où tout le monde s'est mobilisé pour trouver une solution. Or la pétition en question qui avait été signée par 18 000 personnes n'a même pas eu l'heur d'être renvoyée au Conseil d'Etat et n'a finalement trouvé aucune écoute favorable auprès de la majorité de ce parlement. Il est dès lors totalement légitime de redéposer une pétition au moment de l'affaire du Moa, parce que l'on se dit que si d'autres sont entendus, pourquoi pas nous, puisque nous demandons aussi une écoute attentive. C'est la raison pour laquelle ils l'ont déposée.
Aujourd'hui, il y a effectivement l'usine Sicli, et on se réjouit de voir ce qui pourra être réalisé en ce lieu. Mais un seul endroit ne va pas régler le problème. Le fait qu'il y en ait aussi peu, même au centre-ville... Je pense qu'il est important de réfléchir à la manière dont pourraient être mises en place des choses au centre-ville, des lieux à des prix abordables et bien desservis...
Le président. Il vous reste trente secondes, Madame la députée.
Mme Prunella Carrard. Je vous remercie, Monsieur le président ! Ceci est une question qui reste toujours d'actualité et à laquelle nous devons répondre, c'est pourquoi nous étions pour le renvoi de ces pétitions au Conseil d'Etat, excepté la P 1759 pour laquelle nous avions également voté le dépôt à l'unanimité.
Enfin, un dernier problème a été soulevé lors des débats - il est intéressant de le rappeler - c'est que les loyers sont trop chers au centre-ville. Nous avons étudié le cas de plusieurs petits bistrots de quartier qui devaient fermer à cause des loyers trop élevés et ceci est un problème qui touche à Genève non seulement les locataires, mais également les commerçants et les lieux de divertissement.
Le président. Il vous faut terminer, Madame la députée !
Mme Prunella Carrard. Je pense que nous devrions y être attentifs. Je vous remercie, Monsieur le président, j'ai terminé.
M. Jean Romain (R). Je rassure tout de suite Mme Carrard: c'est vrai que la pétition qui demandait des lieux relativement bon marché à Genève pour pouvoir se divertir le soir émanait de la jeunesse libérale-radicale. Cependant, je vous tranquillise: il y a une certaine vision de la liberté chez nous qui permet que nous ne soyons pas - ni les vieux, ni les jeunes - inféodés les uns aux autres.
Une voix. Pas au PS ! (Exclamations.)
M. Jean Romain. Je n'ai pas dit ça ! Quant aux autres pétitions, je crois qu'elles ont été traitées comme il le fallait. Nous avons écouté les gens; nous avons évalué la situation et nous avons procédé à une pesée d'intérêts. Comme l'a très bien dit le rapporteur de majorité, le groupe PLR va exactement suivre ce que la majorité de la commission a proposé pour chacune des trois pétitions. Ce d'autant que la P 1759 ne pose pas de problème majeur. En effet, nous sommes évidemment soucieux - vous le savez - du bien-être de tout le monde, y compris de celui des animaux du Bois de la Bâtie, mais enfin là cela nous semblait un tout petit peu excessif. Je vous remercie.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pascal Spuhler, qui prend du temps sur celui de son groupe.
M. Pascal Spuhler (MCG), rapporteur de majorité. Merci, Monsieur le président. Mme Carrard a dispensé quelques informations sur l'arrivée de la pétition 1760 suite à l'affaire du Moa qui a beaucoup fait bouger la république. Or nous avons trouvé un peu exagéré que l'on revienne exactement avec la même pétition demandant des choses identiques alors qu'il avait été procédé à toutes les auditions et que des éléments suffisamment intéressants avaient été apportés pour que l'on sache qu'un établissement sera construit dans l'ancien site d'Artamis, avec une réponse aux demandes des pétitionnaires. Il n'était par conséquent pas nécessaire de revenir avec cette pétition bis repetita.
Quant aux autres pétitions, suite à l'affaire du Moa il y a effectivement eu une multiplication de projets tant par l'Etat que par la Ville de Genève, des projets dits «culturels». L'usine Sicli a été ouverte; le projet situé en dessous du Bois de la Bâtie va probablement se faire. Beaucoup de projets sont en cours. Ainsi, nous estimons qu'à l'heure actuelle il a été répondu aux demandes, si bien que nous vous suggérons de suivre les recommandations de la commission. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à présent à M. Roberto Broggini, qui s'exprimera sur le temps attribué à son groupe.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de minorité. Je serai assez bref, Monsieur le président. J'aimerais signaler que pour l'écoquartier de la Jonction qui est en fait l'ancien site Artamis, les utilisateurs ont quitté les lieux sans que cela ne provoque de troubles ou de bagarres, avec l'engagement qu'une salle allait être construite. Nous devons donc tenir nos engagements. Et si nous ne le faisons pas par rapport à une population demanderesse - comme l'a très bien signalé Mme Carrard - et à une pétition signée par 18 000 personnes, c'est ne pas prendre nos responsabilités de députés et ce n'est pas donner le mandat au Conseil d'Etat... D'ailleurs, l'Etat est propriétaire d'une partie des parcelles sur ce site. C'est faire fi d'une volonté populaire et du respect qui avait été accordé de la part des usagers de ces espaces de culture. Refuser cela est alors assez grave ! C'est une déclaration de guerre aux milieux créatifs, de la culture, et au monde de la nuit ! (Brouhaha.) Cela ne serait pas compris par la population. Je trouve cela extrêmement grave et il faudra que vous preniez vos responsabilités, Mesdames et Messieurs les députés. Je vous remercie, Monsieur le président. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Nous passons au vote sur chacune des pétitions, en commençant par la P 1758.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1758 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 43 oui contre 24 non.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur la pétition 1759.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1759 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 66 oui (unanimité des votants).
Le président. Nous votons pour finir sur la pétition 1760.
Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (classement de la pétition 1760) sont adoptées par 41 oui contre 22 non.