Séance du
jeudi 13 octobre 2011 à
20h30
57e
législature -
2e
année -
12e
session -
72e
séance
PL 10701-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Mme Marie Salima Moyard (S), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, comment gérer l'écrasante majorité des déchets produits dans le canton, à savoir les matériaux d'excavation non pollués issus des travaux de construction et des terrassements ? Comment faire de ces matériaux non plus des déchets, mais une ressource à travers le recyclage ? Ce sont des questions que peu d'entre nous s'étaient déjà posées avant d'entamer l'étude de ces deux projets de lois qui nous occupent aujourd'hui.
Rappelons rapidement le contexte. Les gravières sont des lieux d'exploitation des graves naturelles qui sont indispensables au secteur de la construction, notamment pour la production de béton. On extrait le gravier, puis on remblaie avec d'autres matériaux et, enfin, on rend à l'agriculture. Une gravière est donc temporaire, même si elle est temporaire pendant trente voire quarante ans. Or remblayer des matériaux est aujourd'hui économiquement beaucoup plus rentable que d'extraire les graves. Il manque donc des décharges dans le canton, et les constructeurs ne savent plus où décharger; quelle solution dès lors ? Recycler et trouver de nouvelles décharges !
Les matériaux d'excavation non pollués sont beaucoup trop peu recyclés aujourd'hui et c'est bien cela qu'il faut changer afin de moins remblayer, car nous n'avons plus de place, ni en France voisine ni dans le canton, afin de préserver plus longtemps les ressources en grave naturelle et, bien sûr, afin d'utiliser ces matériaux comme ressource à travers le recyclage.
Nous avons avec ces projets de lois deux solutions complémentaires. D'abord, recycler, c'est l'objectif essentiel du projet de loi 10702 et, pour la part ultime qui ne peut pas être recyclée, disposer de nouveaux volumes de stockage - c'est l'objet du PL 10701. Dans ce dossier, peut-être qu'on ne le dirait pas, mais il y a des importants enjeux écologiques, économiques, financiers, et des intérêts antagonistes. Je reviendrai donc uniquement sur certains aspects, à savoir, en premier, les gros changements introduits par ces deux projets de lois. Le principal, c'est le fait de pouvoir traiter d'une part - ce qui veut dire laver, trier, recycler, concasser, chauler - et stocker d'autre part, définitivement ou provisoirement, des matériaux qui sont étrangers à la gravière, qui ne viennent pas de la gravière. Ce n'était pas possible jusqu'à maintenant.
Cette nouvelle situation permettra de diminuer le nombre de déplacements des centaines de camions qui traversent le canton actuellement, ce qui sera une bonne chose. Des installations de traitement de déchets seront autorisées en zone agricole, alors qu'aujourd'hui elles ne le sont qu'en zone industrielle. Pourquoi faire cela ? Parce qu'il n'y a plus de place en zone industrielle et que ces entreprises sont très gourmandes en place, alors qu'elles créent pourtant peu d'emplois et qu'elles sont donc peu aimées des communes et de leur voisinage. On le comprend, mais ces entreprises sont pourtant indispensables ! Toutefois, autoriser des activités de traitement de déchets en zone agricole ne peut pas se faire sans cautèles: il faut des autorisations de construire, des autorisations d'exploiter, un plan d'extraction, des foules de statistiques et de nombreux contrôles. Ce n'est pas un blanc-seing pour faire n'importe quoi en zone agricole ! (Brouhaha.)
Pourtant, tout ne pourra pas être recyclé, c'est pour cela que ces projets de lois permettront aussi le rehaussement du niveau final d'un terrain avant qu'il ne soit rendu à l'agriculture, mais là aussi, avec un certain nombre de cautèles. Dans ces projets de lois, il y a également une extension des contrôles aux volumes qui sont stockés provisoirement - puisque ce n'est pas possible aujourd'hui - et à ceux qui sont traités. Il y a aussi l'ajout d'un contrôle pédologique. En outre, il y a des mesures de protection pour la faune et la flore pionnières car, oui, Mesdames et Messieurs les députés, les gravières ne sont pas juste des tas de cailloux de diverses compositions granulométriques, il y a aussi une faune et une flore pionnières dans ces lieux insolites !
En complément au projet de loi 10702, le PL 10701, qui modifie la loi sur la gestion des déchets, ouvre également des DCMI-ME, des décharges contrôlées de matériaux inertes pour les matériaux d'excavation, et ce nouveau projet de loi permet, comme je le disais tout à l'heure, de faire des bosses en zone agricole. Il permet de rehausser le terrain pour décharger des matériaux d'excavation non pollués, mais pas des matériaux de démolition. Car aujourd'hui, il n'est pas possible, il n'est pas facile d'ouvrir de nouvelles gravières sur le sol du canton. Or de très grands travaux, comme ceux du CEVA que nous soutenons ici, vont générer énormément de matériaux d'excavation qui vont encore accentuer la pression dans ce secteur déjà difficilement gérable aujourd'hui.
Voilà dans un premier temps ce que je souhaitais dire, Monsieur le président, pour présenter la problématique. Je reviendrai probablement en deuxième débat sur les questions de risque de pollution et de contrôle de la part de l'Etat, qui ont occupé une grande partie du temps des députés en commission.
Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole est à M. le député Eric Leyvraz.
M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. Pas facile de résumer ces deux projets de lois fleuves en quelques mots, mais je vais tâcher de le faire ! D'abord, un grand merci à Mme Moyard pour la qualité de son rapport, mais je crois qu'elle nous habitue à des rapports d'excellente qualité.
Ce sujet a été discuté et disséqué - je parle des deux projets de lois - durant dix-huit séances, incluant un nombre impressionnant d'auditions et de déplacements. Il faut dire que le sujet est bien plus complexe qu'il ne paraissait de prime abord. Nous avons déjà évoqué quelques points forts de ces deux lois, n'en rajoutons pas trop.
Disons en résumé que le projet de loi 10702 nous apporte une meilleure approche du fonctionnement et de la gestion des gravières, tandis que le projet de loi 10701 apporte une solution à la difficile problématique des décharges et du stockage définitif de matériaux non récupérables car n'étant plus valorisables.
L'adoption d'un plan de zones pour les décharges contrôlées est un réel progrès. Répartir de manière équilibrée dans le canton ces décharges, c'est ce qu'on nous propose avec la notion du besoin prouvé pour ouvrir un nouveau site. Le PL 10701 n'a pas pour fonction de résoudre le problème de la Sablière du Cannelet, qui traite des déchets en zone agricole, alors que cela devrait se faire en zone industrielle. Je suis toutefois confiant, parce que cette difficulté sera réglée et les discussions menées pour satisfaire toutes les personnes permettront d'aboutir à une solution acceptable. Je m'étais d'abord abstenu sur le PL 10701, parce que j'estimais que nous aurions dû régler ce problème avant de faire cette loi, mais maintenant je vois que ce sera fait et ne pas accepter ce projet de loi à cause d'un seul point encore litigieux ne serait pas sage, alors que nous avons pratiquement l'assurance d'arriver à un résultat.
Je vous engage donc à accepter ces deux projets de lois qui proposent une gestion prospective d'un bien non renouvelable - les graves - et qui encouragent le recyclage et l'utilisation de déchets retraités, que la technologie de nos excellentes entreprises, à la pointe de la recherche dans ce domaine, transforme en matières premières de haute qualité. De même, la motion 2027 de la commission insiste sur le rôle moteur de l'Etat pour l'utilisation de matériaux recyclés, aspect peut-être pas assez mis en valeur par les projets de lois. En conclusion, je vous demande donc d'accepter ces deux projets de lois ainsi que la proposition de motion 2027.
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je m'exprimerai en tant que président de la commission de l'environnement et de l'agriculture qui a mené ces travaux pendant près d'une année, dans un excellent état d'esprit, je dois le dire. La commission a réalisé un énorme travail, comme d'ailleurs Mme Moyard, en tant que rapporteure, qui a accompli un travail remarquable pour relater les travaux importants menés par notre commission, je le relève aussi. Je m'exprimerai également, évidemment, au nom du groupe démocrate-chrétien.
Chers collègues, je dois dire que si ce sujet paraissait anodin de prime abord, il nous est apparu au fil des auditions que les enjeux de la gestion des gravières étaient multiples et que les intérêts étaient souvent divergents. Il nous a fallu beaucoup de soin et d'efforts pour arriver à trouver des solutions, par le biais de plusieurs amendements à ces deux projets de lois, susceptibles de satisfaire les uns et les autres. Et je dois dire que le résultat, au final, est plus que satisfaisant.
Il s'agissait de satisfaire les milieux concernés par l'exploitation de ces gravières, et il y avait effectivement un certain nombre d'avis divergents. Je crois que certaines préoccupations étaient tout à fait légitimes. Certains craignaient que de nouvelles capacités de stockage de déchets deviennent un oreiller de paresse et dissuadent de pratiquer le recyclage, qui est apparu comme essentiel à l'ensemble de notre commission. Il est en effet nécessaire aujourd'hui d'éviter d'utiliser des espaces de stockage alors que certains matériaux pourraient être recyclés. Cela est apparu comme une évidence à tout le monde. Il a aussi fallu revoir un certain nombre de dispositions dans les projets de lois pour garantir que le recyclage soit réellement encouragé et qu'il soit réellement mis en oeuvre. A ce sujet, je vous dirai que si le projet de loi 10701 rend effectivement possible la création de nouvelles capacités de stockage, nous avons souhaité que la preuve du besoin de ces nouvelles capacités de stockage soit faite et que cette preuve du besoin soit établie dans un rapport du Conseil d'Etat qui devra démontrer que les capacités disponibles sont utilisées en totalité.
Ce point était important et je crois que nous avons trouvé la bonne articulation entre les deux projets de lois pour donner la garantie que, véritablement, nous souhaitions favoriser le recyclage dans ce canton. D'ailleurs, nous vous engageons aussi, chers collègues, à appuyer la motion 2027 mentionnée par M. Leyvraz, puisqu'elle va plus loin en demandant au Conseil d'Etat de tout faire, notamment dans les chantiers publics, pour inciter à l'utilisation de matériaux recyclés.
Concernant d'autres revendications qui sont apparues au cours des travaux, notamment celles des communes, nous avons là aussi été attentifs à ce que les communes puissent par exemple utiliser librement le produit des taxes prélevées sur la mise en décharge d'un certain nombre de matériaux. La répartition de ces taxes a d'ailleurs été revue en faveur des communes concernées qui, il est vrai, subissent des nuisances importantes qu'il convient de ne pas sous-estimer. Là aussi, je crois que la commission a fait un gros effort pour être à l'écoute de certaines communes et pour tenir compte de leurs situations. Je crois que nous avons également pu introduire les amendements permettant de satisfaire à ces exigences.
En conclusion, chers collègues, je dirai que les deux projets de lois tels qu'ils ressortent des travaux de la commission sont susceptibles de répondre aux besoins de notre canton et de son développement, aux nouveaux besoins en zones de stockage. Je crois que ces textes préservent à la fois les intérêts des communes et des milieux concernés, sans, il est vrai, résoudre tous les cas particuliers. Ce n'était pas la vocation de ces projets de lois que de régler tous les cas particuliers, parfois problématiques, dans certaines communes.
Pour toutes ces raisons, chers collègues, je vous invite à voter les deux projets de lois ainsi que la proposition de motion 2027.
M. René Desbaillets (L). Tout d'abord, je voulais souligner l'excellence du travail réalisé par notre rapporteuse Mme Moyard, que je remercie, parce que ce n'était pas évident, avec ces dix-huit séances, dont beaucoup ont eu lieu sur le terrain. Enregistrer et prendre des notes, lorsque vous êtes en plein milieu d'une gravière, ce n'est pas évident et c'était de fait assez difficile !
Je ne veux pas répéter ce qui a été dit, mais je pense qu'il est important de savoir que, chaque année à Genève, c'est 1 million de m3 de déchets qu'il faut éliminer, ce qui équivaut à peu près à remplir le stade de la Praille ! Il y a peu de temps encore, on bouchait les gravières existantes et le surplus des déchets, on l'envoyait aux Français ! Malheureusement, maintenant, les Français ne veulent plus de nos déchets et, vu que les exploitations de gravier sont en diminution, puisqu'il y a des zones dans le canton qui ont du gravier, mais pas toutes, on creuse de moins en moins. Il est donc important de trouver une solution pour recycler d'une part les déchets de démolition des bâtiments, les bétons - ainsi que les goudrons, lorsqu'on gratte les routes - et d'autre part les matériaux d'excavation issus des chantiers de constructions qui nécessitent de creuser des fondations d'immeubles ou autres ouvrages.
Il faut souligner l'effort qui a été réalisé par les entreprises parce que, à l'époque, ce n'était pas une obligation. Ce sont donc les entreprises elles-mêmes qui sont allées chercher des techniques, dans le nord de la France, en Allemagne ou ailleurs, pour trouver le moyen de transformer les creuses, les déchets de chantier qui ne valaient rien du tout, en les additionnant de chaux pour certains ou en en soustrayant la glaise pour d'autres, afin de les réutiliser dans la construction. Donc c'est là qu'on voit que c'est symptomatique: ça paraît tout simple parce qu'on parle de terre et de gravier, mais la petitesse de notre canton et ces problèmes de gravières et de déchets se reportent sur d'autres problèmes posés dans les zones industrielles ou ailleurs, parce que notre canton n'est pas extensible.
D'où le soutien que je vous demande pour la motion 2027, parce qu'il faudra bien trouver des zones pour trier ces déchets, car trier ces déchets dans des zones industrielles pose problème. A l'heure actuelle, il faut se rappeler que des entreprises ont acheté des terrains avant que ces zones ne soient déclassées en zone industrielle, et donc ces entreprises ont un prix de revient sur les hectares qu'elles n'utilisent pas; à l'avenir il faudra procéder différemment en zone industrielle, parce que lorsque des entreprises dans le domaine de l'horlogerie, de la micromécanique ou que sais-je veulent s'établir, vous ne pouvez pas les installer juste à côté d'entreprises qui concassent du béton !
Il faut donc absolument trouver des solutions, trouver des zones adéquates pour trier ces déchets, soit par règlement, soit par des nouvelles zones, afin d'aller de l'avant, parce qu'à l'heure actuelle le problème est assez cornélien.
En conclusion, je vous remercie, chers collègues, de soutenir les deux projets de lois ainsi que la proposition de motion.
M. Guillaume Sauty (MCG). Je vais essayer d'être bref, pour éviter de répéter tout ce que mes collègues ont dit. Je remercierai néanmoins Mme Moyard pour son excellent rapport qui a dû être fort long à rédiger.
Très brièvement, pour revenir sur les points forts de ces deux projets de lois, on peut souligner l'impact environnemental qui va être grandement amélioré, avec des résultats primordiaux, mes collègues l'ont déjà relevé: moins de camions et des déchets qui peuvent être traités sur place. Au final, on fera peut-être énormément d'économies de place, pour permettre, comme l'a soulevé M. Desbaillets, de réserver nos zones industrielles à des entreprises qui s'y prêteraient plus que l'exploitation de déchets. Tout cela pour vous dire que le groupe MCG soutiendra ces trois projets.
M. Gabriel Barrillier (R). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut souligner, fortement, que par ces deux projets de lois, ces deux révisions, le canton a voulu traduire sa volonté de maîtriser les conséquences de son développement. C'est vraiment l'élément essentiel.
Deuxièmement, ça a été dit, nous avons réussi à trouver des convergences, un équilibre entre une multitude d'intérêts. Je les cite quand même: le droit de propriété, le fonctionnement de l'industrie de la construction, les intérêts de l'agriculture qui souhaite pouvoir réutiliser ces terrains après exploitation des gravières, la protection des sites et de la nature, la lutte contre les nuisances, les problèmes de mobilité - on a parlé des camions - le développement du territoire et le rôle des communes. Il y a encore d'autres intérêts en jeu, mais je pense qu'on a trouvé la quintessence dans ces deux projets de lois pour qu'à l'avenir on puisse maîtriser le développement du canton qui, on l'a rappelé, crée beaucoup de volumes, des volumes importants de déchets de déconstruction et d'excavation.
Pour la mise en oeuvre de ce que nous avons voté, trois départements sont concernés, ce qui montre là aussi que nous devons garantir un fonctionnement transversal de toute la problématique de l'exploitation des gravières et des déchets. Là, nous avons réussi également, et je remercie la conseillère d'Etat et les conseillers d'Etat qui nous ont aidés dans notre travail. Nous avons trouvé des solutions pour simplifier les problèmes administratifs, notamment le traitement des demandes d'autorisations.
Le Grand Conseil a également un rôle à jouer et nous avons pas mal bataillé pour que le parlement - c'est-à-dire nous tous - puisse intervenir sous forme d'une résolution lorsque, dans la deuxième phase, nous aurons besoin d'emplacements pour entreposer les déchets inertes. Ce n'est donc pas un blanc-seing qui est donné au gouvernement avec ces projets de lois. Ensuite, les professionnels nous ont montré qu'ils étaient préparés au recyclage. Nous avons visité un certain nombre d'installations, c'était assez impressionnant.
Pour terminer, j'aimerais dire que la motion que nous avons rédigée à deux - avec mon collègue Lefort - a ensuite été retravaillée en commission. Cette motion est un aiguillon, pour qu'on puisse démontrer qu'il ne suffit pas de vouloir faire: vouloir c'est bien, mais faire c'est mieux ! Cette motion est assez volontariste, je le reconnais, mais je pense que c'est un encouragement, un soutien au gouvernement et aux départements concernés, pour véritablement inciter les constructeurs et les entreprises à recycler et à jouer le jeu.
Pour toutes ces raisons, le groupe radical vous demande de soutenir et de voter les deux projets de lois ainsi que la motion.
M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, ces deux projets de lois modifiant la loi sur la gestion des déchets et la loi sur les gravières apportent des modifications importantes et nécessaires.
Le but de ces projets de lois est de valoriser ce qui jusqu'à maintenant était considéré comme des déchets, les déblais de chantiers et de démolitions, et de les recycler dans la construction et dans le génie civil. L'objectif est d'accroître considérablement le recyclage et la réutilisation de ces matériaux recyclés dans le génie civil et dans la construction, de façon à pouvoir faire face d'abord à la pénurie des capacités de stockage des déchets non recyclés. Les capacités de stockage s'amenuisent à Genève et s'amenuisent en France voisine. En d'autres mots, le vide se fait rare et il se fait cher, ce qui n'est pas courant, vous en conviendrez. Il y a des vacuités qui sont moins rares ! (Exclamations.)
Ces deux projets de lois ouvrent donc la possibilité de recycler les déblais et les déchets de constructions sur les sites de gravières, et c'est ce qui est nouveau, où se trouvent justement les sites de stockage des déchets ultimes. Ces deux projets de lois sont déterminants pour développer le marché du recyclage et l'approvisionnement du canton en matériaux recyclés pour la construction et le génie civil. Ils sont déterminants en particulier dans le contexte du projet d'agglomération, pour faire face aux besoins massifs en matériaux et surtout pour économiser aussi les capacités de stockage des déchets. La part du recyclage est actuellement faible et le but ultime de ces deux modifications de lois, c'est d'augmenter la capacité de recyclage à 70% des déchets, ce qui est énorme !
Le corollaire de ces projets, c'est aussi une hausse considérable de l'activité dans le secteur du recyclage. Cela signifie de la création d'emplois, des emplois locaux, mais aussi la réduction des nuisances. Par conséquent, ces modifications permettront également de réduire les émissions de gaz carbonique et de diminuer la consommation d'énergie dans ces activités-là.
Alors, vous l'avez compris, Mesdames et Messieurs les députés, ces deux projets de lois sont très écologistes: c'est de l'écologie industrielle. Les Verts sont heureux du consensus majoritaire que nous avons trouvé en commission. Nous voterons donc ces deux projets de lois et nous vous invitons à faire de même.
Par contre, lors des travaux de commission, une certaine discrépance est apparue, entre la volonté affirmée du Conseil d'Etat d'être un acteur majeur du développement durable dans le canton et, j'en suis désolé, la mise en oeuvre de la politique de développement durable. Cette différence entre ce qui est attendu et ce qui est observé, les députés l'ont perçue en commission des travaux, en commission d'aménagement, en commission de l'énergie et en commission de l'environnement et de l'agriculture. Et dans le secteur particulier du recyclage des matériaux, les entreprises qui ont investi depuis une quinzaine d'années dans la recherche et le développement la ressentent également, cette différence.
C'est pour cette raison que la commission de l'environnement et de l'agriculture a voulu humblement attirer l'attention du Conseil d'Etat par une motion unanime qui invite ce dernier à mener justement une politique exemplaire et volontariste d'écologie industrielle, en donnant la priorité dans ce cas-là à l'utilisation de matériaux recyclés dans la construction et dans le génie civil. Pour cela, il faudra provoquer un changement des comportements de l'administration et, surtout, des mandataires du maître d'oeuvre, afin qu'ils appliquent les lois et les normes du développement durable que nous avons créées ici, par les diverses lois votées ces quinze dernières années. Cette motion invite en outre à appliquer des conditions de soumission et d'adjudication qui permettent de concrétiser cette politique de développement durable.
Les députés de la commission de l'environnement et de l'agriculture vous seront donc reconnaissants de soutenir cette motion et de la renvoyer au Conseil d'Etat. Je vous remercie. (Applaudissements. Exclamations.)
M. Jean-Louis Fazio (S). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe socialiste votera ces deux lois, mais avec un bémol. En effet, une bonne application de ces lois nécessiterait l'engagement d'inspecteurs de gravières supplémentaires par le service de l'environnement afin de surveiller et d'analyser la qualité des matériaux que l'on va stocker définitivement dans ces trous. Une absence de surveillance et une non-application de ces lois sur le terrain seraient dangereuses à terme pour les consommateurs et les exploitants agricoles concernés; cela mettrait à mal toute la filière maraîchère genevoise, anéantissant ainsi tous les efforts consentis ces dernières années dans la promotion des produits du terroir.
Par conséquent, Madame la conseillère d'Etat, les socialistes vous demandent d'être très attentive dans la mise en application de ces textes et de ne pas baisser la garde dans les contrôles que devront subir les entreprises qui stockeront les matériaux, en faisant de même avec les gravières qui recycleront des remblais de chantier.
Malheureusement, Madame, l'unique inspecteur des gravières ne suffit actuellement pas pour contrôler l'ensemble des gravières genevoises. C'est pourquoi, lors de l'étude des prochains budgets, les socialistes seront attentifs à la dotation en personnel du service de l'environnement affecté à la surveillance des gravières.
Pour ce qui est de la motion, nous soutenons tous les efforts qui pourraient être entrepris par le canton pour encourager l'utilisation de matériaux et bétons recyclés sur les chantiers genevois. Nous espérons que cette motion ne reste pas un voeu pieux et que, lors de la mise en place des critères d'adjudication de marchés publics, le coefficient d'utilisation de matériaux recyclés soit augmenté, afin de peser réellement sur le choix des entreprises.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Fabienne Gautier... (Commentaires.) Il faut vous décider: vous voulez la parole ou non ? (Remarque.) C'était une erreur ! La parole est donc à Mme la rapporteure Marie Salima Moyard, à qui il reste trois minutes.
Mme Marie Salima Moyard (S), rapporteuse. Merci, Monsieur le président. Je prends volontiers la parole une seconde fois sur trois aspects qui ont pu donner des sueurs froides à certaines personnes lors du travail sur ce dossier.
Le premier aspect concerne les risques de pollution. Je voudrais redire que, dans ces lois, il y a des garde-fous importants contre les risques de pollution en zone agricole du fait de ces activités de traitement. En effet, les matériaux qui sont stockés dans les gravières, définitivement ou provisoirement, doivent être, de par leur qualité, susceptibles d'être remblayés définitivement dans la gravière. En résumé, on ne peut pas faire n'importe quoi, on ne peut pas stocker n'importe quoi et on ne peut pas traiter n'importe quoi dans n'importe quelle gravière ! On peut uniquement faire ce que le sol permet, notamment pour ce qui relève de la protection des eaux. C'est un garde-fou extrêmement important pour l'environnement, auquel la commission a été très attentive.
Le deuxième élément, je tiens à le redire ici, c'est l'imprescriptibilité complète pour les cas de pollution. Les amendes ont été augmentées jusqu'à 400 000 F et si pollution il doit y avoir, le principe du pollueur-payeur s'appliquera. L'aspect répressif est donc tout à fait présent dans cette loi.
Pour ce qui est de la question du contrôle effectué par l'Etat, celui-ci doit être accru, on l'a dit, puisqu'il y aura plus de volumes de matériaux à contrôler. Il devra donc y avoir plus de contrôles parce qu'il y aura des volumes extraits, des volumes remblayés, des volumes traités et des volumes stockés provisoirement. Actuellement, il n'y a pas tout ça et cela devra être contrôlé. C'est pour cette raison que la commission a réaffirmé, je tiens à le rappeler, que le contrôle était une priorité pour elle. Il s'agit d'une politique publique et si, par hasard, l'inspecteur des gravières ne devait pas parvenir à effectuer tout le travail, il faudrait remédier à cette situation via l'impôt et le budget de l'Etat, étant donné que le contrôle de ces activités doit être du ressort des politiques publiques.
Le dernier élément sur lequel j'insisterai, c'est celui du contrôle à exercer par le Grand Conseil sur l'ouverture de ces décharges. Ce que l'on a voulu éviter en commission, c'est que le Conseil d'Etat soit tout-puissant pour ouvrir n'importe quelle décharge quand il le souhaite et que ce soit en quelque sorte un oreiller de paresse qui empêche le développement du recyclage, qui est pourtant le but de ces deux lois. C'est pour cela qu'il y a un dispositif d'ouverture au compte-gouttes. Il faut que le Conseil d'Etat prouve la nécessité, l'absolue nécessité d'une décharge supplémentaire. Ce n'est qu'au compte-gouttes et une fois les députés convaincus qu'une nouvelle décharge contrôlée pourra être ouverte.
Pour toutes ces raisons, avec l'ensemble de ces cautèles sur cette problématique compliquée, je vous propose d'accepter ces deux projets de lois, et je n'ai pas encore eu le temps de le mentionner, mais je le dis maintenant, il est évident que je soutiens pleinement - et vous appelle à faire de même - la motion de commission rédigée par MM. Lefort et Barrillier.
Le président. Merci, Madame le rapporteur. La parole est à Mme la conseillère d'Etat Isabel Rochat.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, cela fait très longtemps que le Petit Conseil sait qu'il n'est rien face au Grand Conseil et ce n'est certes pas le président qui me contredira.
Le président. J'ai plaisir à vous l'entendre dire !
Mme Isabel Rochat. Cela pour rassurer le rapporteur, Mme Marie Salima Moyard, que je remercie pour la qualité de son rapport, comme je remercie l'entier de la commission pour la qualité de son travail. Il est vrai que les travaux ont été compliqués, techniques, pas faciles à mener, et que la belle unanimité à venir laisse augurer d'un projet construit qu'il s'agira pour le Conseil d'Etat, je le rappelle, de surveiller avec la plus grande prudence, s'agissant de cette motion.
Le cadre général a été posé en 2002 et ces deux projets de lois comblent vraiment, par leurs éléments constitutifs, une double volonté du Conseil d'Etat: encourager le recyclage et en même temps répondre à ce qui semblait être la quadrature du cercle, à savoir de ne plus pouvoir exporter tout et n'importe quoi n'importe où, puisque la France, à juste titre, rendait le passage des déchets extrêmement difficile et très normé, ce qui semble être assez logique. Il nous fallait donc trouver une solution sur notre petit territoire. Or, en termes de résolutions de problèmes sur notre petit territoire, les deux projets de lois semblent apporter une réponse et la solution recherchée, en encourageant le recyclage.
Cela dit, ce n'est pas l'idéal, cela a été rappelé, dans la mesure où il n'y a aucune solution pérenne, et le Conseil d'Etat s'est engagé à ne pas ouvrir les vannes toutes grandes et à rester vraiment dans une optique d'encouragement au recyclage, avec surtout comme double avantage d'éviter ces transports qui génèrent les émissions de CO2 qu'il nous faut absolument contrôler sur notre territoire.
Je ne peux donc bien sûr que saluer ces deux projets de lois ainsi que la motion, tout en rappelant que les travaux budgétaires que nous menons ne vont peut-être pas me permettre d'engager le nombre de contrôleurs nécessaire à l'inspection des gravières. En revanche, je crois qu'à partir du moment où l'on fixe des normes, il s'agit de se donner les moyens de les contrôler et il n'est pas question de baisser les bras. Il convient de vraiment pouvoir surveiller avec la plus grande prudence ces décharges. Mais la responsabilisation des entreprises est un point sur lequel j'aimerais aussi insister. Il est bien de faire contrôler, mais il est encore mieux d'en appeler à la responsabilisation des différentes entreprises et des mandataires, s'agissant de la qualité des produits qu'ils vont mettre dans ces décharges.
Vous l'aurez bien compris, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage vivement à voter ces deux projets de lois, et il est certain que je reçois, au nom du Conseil d'Etat et de mon collègue Mark Muller en charge du département des constructions et des technologies de l'information, cette motion avec le plus grand sérieux.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote concernant l'entrée en matière sur le projet de loi 10701.
Mis aux voix, le projet de loi 10701 est adopté en premier débat par 85 oui (unanimité des votants).
La loi 10701 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10701 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 84 oui (unanimité des votants).
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez la preuve que, lorsque le Petit Conseil parle gentiment au Grand Conseil, ça se passe très bien !
Nous passons maintenant aux votes sur le projet de loi 10702.
Mis aux voix, le projet de loi 10702 est adopté en premier débat par 82 oui (unanimité des votants).
La loi 10702 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10702 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 85 oui (unanimité des votants).
Le président. Nous sommes toujours en procédure de vote sur la proposition de motion 2027.
Mise aux voix, la motion 2027 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 79 oui (unanimité des votants). (Applaudissements à l'annonce du résultat.)