Séance du
jeudi 1 septembre 2011 à
17h
57e
législature -
2e
année -
10e
session -
65e
séance
La séance est ouverte à 17h, sous la présidence de M. Renaud Gautier, président.
Assistent à la séance: Mmes et M. François Longchamp, Isabel Rochat et Michèle Künzler, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Mark Muller, président du Conseil d'Etat, Pierre-François Unger, Charles Beer et David Hiler, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Jacques Béné, Beatriz de Candolle, Prunella Carrard, Alain Charbonnier, Edouard Cuendet, René Desbaillets, François Gillet, Vincent Maitre, Alain Meylan, Philippe Morel, Morgane Odier-Gauthier et Daniel Zaugg, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
Premier débat
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour prévoit en point fixe la discussion du PL 10651-A. J'appelle à la table les rapporteurs, à savoir MM. Hiltpold et Broggini ainsi que Mme Schneider Hausser. J'imagine que la parole est demandée par le rapporteur de majorité ? (Un instant s'écoule.) Il ne prend pas la parole...
M. Serge Hiltpold (L), rapporteur de majorité. Si ! Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous voilà enfin en train de traiter le projet de loi sur le protocole, projet de loi qui était agendé pour ce printemps mais qui est resté en suspens en attendant une discussion entre le Bureau du Grand Conseil et le Conseil d'Etat afin de trouver un accord consensuel.
Ce projet a soulevé des questions multiples en commission des droits politiques, notamment en ce qui concerne la répartition des trois pouvoirs - le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire - et les valeurs symboliques liées à notre république. Cette discussion a débouché sur des propositions figurant dans un premier texte, puis sur un amendement général de l'auteur, et enfin nous avons voté en dernière discussion le texte qui vous est présenté ce soir.
L'intervention du rapporteur de majorité est quelque peu modifiée, parce que vous avez reçu sur vos pupitres un nouvel amendement général qui sera présenté tout à l'heure par mon collègue député Olivier Jornot. Cet amendement va dans le sens de cette discussion et de cette répartition entre l'exécutif et le législatif, afin de rendre le projet acceptable dans l'esprit de cette répartition des trois pouvoirs.
Quelques points importants doivent être relevés, car ils ont été modifiés dans l'amendement général. Notamment, à l'article 2: «b) de manifester la fidélité due par la République et canton de Genève à la Confédération et aux cantons suisses, ainsi que l'unité des autorités en tant qu'émanations de la suprême autorité du peuple». Cette magnifique phrase rassurera sans doute tous les députés que nous sommes.
Je soulèverai encore un autre point, à savoir la position entre le président du Grand Conseil et le président du Conseil d'Etat. Un arrangement a été trouvé à cet effet.
Je me réserve le droit de revenir plus tard sur ce texte de loi, mais je tiens toutefois encore à dire que, pour moi et pour la majorité de ce parlement, il ne doit pas être pris à la légère, car il parle du respect des institutions et du respect de la fonction de député. Je le répète, j'y reviendrai tout à l'heure si nécessaire, après la présentation de l'amendement général.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le rapporteur de première minorité Roberto Broggini.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, je vous remercie de me donner la parole. Nous nous sommes effectivement étonnés en commission d'avoir à élaborer une loi alors qu'un règlement concernant le protocole existe déjà. Nous avons, dans ce parlement, beaucoup entendu que nous légiférions trop, et en l'occurrence nous faisons une nouvelle loi alors que nous avons déjà un outil, le règlement concernant le protocole - B 1 25.04 - que j'ai sous les yeux. Je suis donc très étonné que des partis de droite et l'Entente, qui se plaignent du trop-plein de lois, veuillent en créer une nouvelle.
C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons rédigé ce rapport de minorité. La demande d'amendement général qui nous est soumise m'a quelque peu surpris, parce que les membres de la commission des droits politiques n'en ont pas été avisés. Ce n'est que très récemment que nous avons été interpellés à ce propos.
C'est vrai, cette loi sur le protocole demande beaucoup de tact. Je serai assez bref, Monsieur le président. Pour paraphraser Georges Clemenceau, qui disait que la guerre est une chose trop grave pour la confier à des militaires, je pense que le protocole est une affaire trop délicate pour la laisser à des politiques ! Nous avons des services qui peuvent très bien s'en occuper.
Je reviendrai tout à l'heure sur cet objet, Monsieur le président. Et si l'amendement général devait être accepté par ce Grand Conseil, je demanderais le renvoi de cet objet à la commission des droits politiques, pour le bon travail de notre parlement et afin que nous puissions l'étudier. En effet, j'ai vu qu'il est signé par Olivier Jornot, donc ni par le Bureau ni par le Conseil d'Etat, et je pense qu'il serait bon d'avoir des explications tant du Bureau que du Conseil d'Etat sur la nouvelle mouture de ce projet de loi. Quoi qu'il en soit, je vous demande de ne pas accepter cet objet.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de deuxième minorité. Mesdames et Messieurs les députés, c'est un sentiment assez étrange que j'éprouve à l'heure actuelle sur cette loi et sur ce qui s'est passé en termes de processus par rapport à celle-ci. Faisant partie d'une commission reconnue comme parlementaire, qui travaille et qui légifère sur une proposition de projet de loi, je soutiendrai, comme mon groupe, le renvoi de cet objet en commission, comme vient de le proposer M. Broggini. Il me semble en effet nécessaire que nous puissions revoir cette loi en commission, d'autant que son texte change énormément avec l'amendement général qui est proposé. Il faut pour le moins que la commission puisse en prendre acte, voire en changer des éléments si cela s'avère nécessaire. Si tel n'est pas le cas et si le renvoi en commission venait à être refusé, je me poserais beaucoup de questions sur l'utilité de ce que nous sommes en train de faire en termes de reconnaissance du travail parlementaire, du travail des députés.
Cela dit, j'en viens au projet de loi, qui fait l'objet d'un rapport de minorité déposé par le groupe socialiste. Il est axé sur trois éléments particuliers. Tout d'abord, le but de ce projet de loi est de redonner, d'après son auteur, du sens aux fonctions législatives, c'est-à-dire à la fonction de député. Pour le parti socialiste, le sens de la fonction législative, le sens de notre mandat, c'est le sérieux avec lequel chaque député assume et assure son travail parlementaire, le sérieux avec lequel il représente les idées d'une partie de la population, ce pour quoi il est ici.
Par rapport au contenu du projet de loi et sur l'amendement général que j'ai survolé, trois problèmes cruciaux se posent. Tout d'abord, est-il bien nécessaire, dans une loi édictée par ce parlement, de réglementer les tenues vestimentaires, les sorties, la manière dont on utilise les symboles de la république ? Ensuite, est-il utile de faire un projet de loi sur le protocole cantonal alors qu'il y a, à Genève, une vraie complémentarité entre le canton, la Confédération et les communes ? Enfin, le troisième point concerne la place de la Ville de Genève au niveau du protocole.
S'agissant des tenues vestimentaires, je vais juste vous rappeler - cela figure dans mon rapport de minorité - qu'en 1842 les constituants genevois, qui ont créé la constitution, ont aboli les costumes en vigueur jusque-là... Ils estimaient que tout attribut était contraire aux principes démocratiques. Le parti socialiste s'oppose donc à l'introduction, quelle que soit la loi proposée, de tenues vestimentaires réglementées, voire même de comportements réglementés. Or, dans l'amendement général proposé par M. Jornot - nous en parlerons peut-être tout à l'heure - le danger n'est pas écarté de voir une réglementation vestimentaire entrer en vigueur. En effet, à l'article 3, alinéa 3, il est stipulé ceci: «Le Grand Conseil et le pouvoir judiciaire peuvent édicter des directives...» Pourquoi pas sur les tenues vestimentaires ?
J'en viens au service du protocole. Nous en avons déjà un, qui est professionnel et qui s'appuie sur un règlement déjà existant, comme l'a indiqué M. Broggini. Nous savons qu'à Genève il y a environ deux à trois mille visites de ministres et de chefs d'Etat par année, qu'il y a des dizaines, voire des centaines de conférences à l'agenda du service du protocole, et toutes ces activités diplomatiques internationales représentent un volume économique estimé à environ 4 milliards pour notre république. Alors, dans ce contexte-là, je pense qu'il est assez futile, voire inutile de vouloir ajouter un étage, une genevoiserie qui ne ferait que compliquer le travail du service du protocole, tout cela pour savoir si notre place dans les cortèges officiels doit être dix mètres devant ou dix mètres derrière !
Ensuite, la position des autorités politiques de la Ville de Genève dans les défilés ou les cérémonies. Nous sommes convaincus que si les autorités politiques de la Ville de Genève n'étaient pas actuellement d'une majorité de gauche, leur place dans les défilés ne serait pas remise en question dans ce projet de loi sur le protocole qui nous est présenté ce soir. En demandant de modifier leur place, les auteurs de ce projet de loi mettent au panier, d'une certaine manière, toute l'histoire de Genève, y compris l'histoire actuelle, qui donne une primauté à la Ville de Genève, sachant que 40% de la population de la république se trouve sur le territoire de cette dernière.
Le président. Madame la députée, il vous faut conclure !
Mme Lydia Schneider Hausser. Tout à fait, Monsieur le président ! Ce projet de loi, en dégradant la Ville de Genève, ne reconnaît pas l'effort effectué par cette commune en termes de protocole - justement - et de représentation, que l'on peut estimer au bas mot à 75 000 F par année. Pour tous ces éléments et bien d'autres, le parti socialiste vous demande de rejeter ce projet de loi.
M. Olivier Jornot (L). Permettez-moi d'abord de vous dire, Monsieur le président, qu'il y a quelque justice à ce que vous soyez aujourd'hui en train de gérer la combustion de l'incendie que vous avez vous-même allumé, même si ce n'est pas tout à fait juste, puisque, avant vous, il y avait eu les provocations du Conseil d'Etat, ce qui a entraîné la genèse de ce projet de loi. En effet, Mesdames et Messieurs les députés, il ne faut pas oublier que le Conseil d'Etat, disposant précisément d'un pouvoir réglementaire lui permettant d'user et d'abuser des règles sur le protocole, a régulièrement joué avec la position des députés d'une manière telle que cela a fini par provoquer une réaction de leur part.
En février, après que le projet de loi fut sorti de commission, ce plénum a décidé d'ajourner ses débats dans le but de permettre aux institutions, aux pouvoirs, de débattre d'une solution négociée. Et c'est ce qui s'est passé depuis, avec des négociations dont notre président lui-même a pu dire qu'en comparaison les négociations soviéto-américaines sur le désarmement étaient une aimable plaisanterie... En effet, c'est pied à pied, lettre par lettre, que le Conseil d'Etat et le Bureau du Grand Conseil ont défendu l'un et l'autre leurs prérogatives pour aboutir, finalement, à un accord dont je ne suis que le porte-serviette, que le porte-plume, sous la forme de cet amendement général.
Dans cet amendement général, qui éclipse, en quelque sorte, les velléités parfois audacieuses, dirais-je, du projet de loi initial... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...le Conseil d'Etat fait une concession majeure: il admet que notre parlement a la compétence de légiférer en matière de protocole des institutions genevoises, alors que ses éminents juristes avaient construit des monuments de droit pour tenter de démontrer le contraire. Et le Conseil d'Etat admet aussi - c'est sa deuxième concession - que les députés de ce parlement ont une position protocolaire qui doit être respectée. Même si nous sommes cent, nous avons une position qui ne peut pas être comparée à celle de tel ou tel haut fonctionnaire.
Le Grand Conseil ou, plus exactement - pour être tout à fait précis - les auteurs du projet de loi, eux, font un nombre de concessions probablement plus important. D'abord, en renonçant à leur idée - non pas résolutionnaire, comme disait notre vice-président Losio tout à l'heure, mais proprement révolutionnaire - de remplacer la prééminence du président du Conseil d'Etat par la prééminence du président du Grand Conseil. En quelque sorte, ce compromis accepte l'histoire, puisque, de tout temps, c'est ainsi que les choses se sont produites à Genève, dans la majorité des cantons suisses et sur le plan fédéral, quand bien même on a coutume de dire dans le parler populaire - vous le savez - que le président du Conseil national est le premier citoyen du pays.
Les auteurs du projet de loi ont renoncé, Madame Schneider Hausser, à dégrader la Ville de Genève pour en faire une commune ordinaire, précisément pour respecter la tradition: c'est un peu notre district fédéral, à nous, les Genevois, et par conséquent sa position de prééminence a été préservée.
Enfin, les auteurs ont renoncé à ce qu'il y ait, s'agissant de règles aussi particulières et détaillées que celles de la tenue des uns et des autres, autre chose qu'un rappel de principe, à savoir que nous ne sommes pas des guignols. Nous ne sommes en effet pas ici pour adopter des tenues saugrenues: nous devons simplement - sans qu'il soit nécessaire de nous imposer le frac et la queue de pie - comme représentants d'une institution, adopter une tenue digne.
Au final, Mesdames et Messieurs les députés, en tant que représentant de ce compromis entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil, je vous recommande de l'accepter. Il nous permet d'enterrer une hache de guerre. Il nous permet aussi de cesser de consacrer de l'énergie, des flots d'énergie, de salive et autres à un sujet qui, soit dit en passant, ne le mérite pas en regard des véritables défis que notre république doit affronter. C'est la raison pour laquelle je vous suggère, après le débat que nous allons avoir maintenant, de tourner la page de cette affaire de protocole en acceptant cet amendement général.
M. Eric Stauffer (MCG). M. Jornot a fait un résumé très exhaustif de la question. C'est vrai que la première salve est venue du Conseil d'Etat...
Le groupe MCG soutiendra l'amendement général. Nous avons en effet estimé que notre parlement doit s'occuper de sujets plus importants pour la population que de déterminer si un député doit être placé devant ou derrière le maire de Genève dans les cortèges. C'est du temps perdu pour nos concitoyens pendant lequel nous pourrions traiter de sujets importants, et par conséquent ce débat ne mérite pas d'être.
Je relèverai simplement - c'est une petite pique - que certains députés de gauche sont quelque peu hypocrites, parce qu'ils sont tous venus en costard-cravate aujourd'hui... (Exclamations.) ...alors que, toutes ces dernières séances, nous avons vu un peu de tout: des nu-pieds, des tee-shirts, etc. C'est tout juste si certains ne sont pas venus avec leur planche de surf, le pot de cannabis sur le porte-bagages de leur vélo... (Commentaires.) ...et la charrette avec les canettes de bière ! Il faut prendre cela avec humour !
Il ne me semble pas utile de prolonger ce débat davantage et de perdre deux heures pour finir par renvoyer cet objet en commission. Votons cet amendement général, et nous verrons à l'usage si les choses s'arrangent entre le Conseil d'Etat et le parlement, tout en rappelant que ce dernier est quand même le premier pouvoir de la république.
Mme Aurélie Gavillet (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord vous parler de la demande de gel de ce projet de loi effectuée par le Conseil d'Etat, puis de l'amendement général que nous avons reçu.
Vous vous souvenez sans doute que nous étions censés voter ce texte lors de notre session des 10 et 11 février 2011. Le Conseil d'Etat nous avait alors demandé de ne pas le faire, parce qu'il avait des amendements à nous proposer. Il a été bien inspiré, Mesdames et Messieurs les députés, car il nous a épargné un ridicule considérable ! Vous vous en souvenez: notre parlement avait figuré à la une de plusieurs journaux, après sa session de février dernier, parce que certains d'entre nous s'étaient illustrés à la buvette au cours de cette session. Sans l'intervention du Conseil d'Etat, nous aurions voté ce projet de loi, qui vise - et je reprends les propos de ses auteurs, ainsi que ceux de M. le rapporteur de majorité - à conférer un statut plus élevé au Grand Conseil, à redonner du sens à notre fonction de député, parce que nous méritons plus d'égards, plus de respect, etc. Je le répète, sans l'intervention du Conseil d'Etat, Mesdames et Messieurs les députés, nous aurions voté ce projet de loi lors de la même session, et peut-être au moment même où, à la buvette, deux députés éméchés - et assurément conscients de l'importance de notre fonction - se lançaient des verres de bière à la figure... Mesdames et Messieurs les députés, nous nous serions simplement ridiculisés, et nous pouvons remercier le Conseil d'Etat.
En ce qui concerne maintenant l'amendement général que nous avons reçu, je dois tout d'abord dire que la manière de procéder n'est pas très respectueuse envers la commission des droits politiques qui avait étudié la première version du projet de loi 10651 pendant de nombreuses séances.
Sur le fond, nous ne pouvons pas voter sur le siège, sans l'avoir étudié, un texte qui s'écarte autant du projet initial. Ce texte n'est en outre pas d'une clarté absolue... Il prévoit que le Grand Conseil peut adopter des directives relatives aux cérémonies et manifestations qui lui sont propres. Or ce n'est pas le Grand Conseil, Mesdames et Messieurs les députés, qui adoptera ces directives, mais bien le Bureau. Pourquoi donc ne pas préciser que c'est le Bureau qui adopte ces directives ?
Dans ce sens, nous vous avons par conséquent proposé un amendement qui remplace notamment le terme «directive» par le terme «loi», afin de donner au Grand Conseil la compétence de mettre en forme lui-même ses directives et, le cas échéant, de déléguer au Bureau du Grand Conseil les prescriptions d'exécution qui pourraient être nécessaires.
L'expression «cérémonies et manifestations propres au Grand Conseil» constitue une autre notion juridique indéterminée... Vise-t-elle les séances plénières, les séances de commission, les sorties du Grand Conseil ? En lisant ce texte, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne savons pas, nous ne pouvons pas répondre à ces questions, ce qui fait qu'il sera incompréhensible et inapplicable, le cas échéant !
Mesdames et Messieurs les députés, il est indigne pour les personnes sensées de voter cet amendement général en l'état. Nous avons besoin de pouvoir en discuter plus sérieusement en commission. (Applaudissements.)
M. Miguel Limpo (Ve). Mon intervention ira dans le même sens que celle de Mme Gavillet. Effectivement, cette loi sur le protocole, qui est censée représenter tout le respect que nous avons pour nos institutions, représentera, en fait, le non-respect de notre coutume parlementaire. Cet amendement général, qui est déposé aujourd'hui, n'a en effet jamais été présenté au sein de la commission et, contrairement à ce qui a été indiqué, ce projet de loi concernait surtout la place des députés dans les cortèges, celle du Conseil d'Etat, etc. Certains sujets évoqués dans cet amendement général n'ont jamais été abordés en commission, ce qui est plutôt surprenant...
Par ailleurs, il nous a été indiqué en commission que le parlement n'était actuellement pas respecté par le Conseil d'Etat. Avec cet amendement général, ce sont désormais les commissions qui ne sont pas respectées et, par conséquent, notre fonction de député.
Il nous a aussi été expliqué que cette loi du protocole était extrêmement importante et qu'il fallait essayer de trouver un consensus le plus large possible. Or on nous soumet aujourd'hui un amendement général dont le porte-plume est libéral. Sachant que le président du Conseil d'Etat est libéral et le président du Grand Conseil également, je dirais que, en termes de consensus, on a vu mieux !
Enfin, il me semble - mais je suis peut-être novice dans ce parlement - que l'intention du législateur est un élément particulièrement important chaque fois que nous étudions un projet de loi. Quand il faudra connaître certains des points que nous n'avons pas étudiés en commission, nous pourrons alors demander directement au législateur - donc à M. Jornot - quel était l'esprit des éléments qu'il a ajoutés !
En somme, les Verts ont l'impression que cet amendement général a été fait dans la hâte, dans l'empressement, alors qu'il suffirait d'une simple séance de commission des droits politiques pour clarifier un certain nombre de points et pacifier cette loi sur le protocole qui est extrêmement importante pour nous. Il nous a été dit que l'on voulait diminuer le nombre des commissions... Avec cet amendement général, il me semble qu'on veut les supprimer !
Vous avez donc le choix cet après-midi de renvoyer ce projet de loi avec l'amendement général en commission pour que nous puissions l'étudier ou bien de décider, à vous tout seuls, le sens que vous donnerez à nos institutions. C'est pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, que les Verts vous demandent de renvoyer cet objet en commission. (Applaudissements.)
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, pour une fois, je suis d'accord avec le député Stauffer: il y a des textes législatifs qui nécessitent plus d'attention de notre part, ce qui n'est pas le cas de celui-ci.
Ce projet de loi est né d'un mouvement d'humeur - il faut le dire ! - d'une partie du législatif, de notre parlement, incarné dans la personne de notre estimable président du Grand Conseil. Qu'il soit justifié ou non, ce projet de loi a eu plusieurs mérites. Déjà de clarifier un point, à savoir que le Grand Conseil a le droit de légiférer sur le protocole, de mettre en place un ordre de préséance des différents corps lors des cérémonies officielles et de définir la tenue vestimentaire à adopter lors de ces cérémonies.
Mesdames et Messieurs les députés, les débats ont été vifs en commission des droits politiques. La preuve en est qu'il y a un rapport de majorité et deux rapports de minorité - excellents au demeurant: j'ai vu que vous aviez pu vous lâcher dans le contenu - et un autre groupe, le nôtre, qui s'est abstenu, parce que nous n'étions pas d'accord avec l'ordre de préséance proposé par ce projet de loi. Ce projet ne faisait par conséquent pas l'unanimité sur un sujet, le protocole, qui nous concerne tous et sur lequel nous devrions pourtant tous être d'accord. Puis survient l'été avec des négociations intenses entre le Conseil d'Etat et le Bureau du Grand Conseil, qui débouchent sur un amendement général - excellent - apportant des solutions claires, des solutions simples qui nous satisfont.
Mesdames et Messieurs les députés, j'entends les cris d'orfraie de mes préopinants, les députés Limpo et Gavillet, expliquant que la forme n'a pas été respectée - c'est vrai - et qu'il faut renvoyer cet objet en commission... Mais la question fondamentale est de savoir si cet amendement général est acceptable, s'il est bon, et si c'est le cas, épargnons-nous une séance de commission ! N'oublions pas que nous sommes redevables de l'utilisation des deniers de la république devant le peuple genevois, or une séance de commission pour dire simplement que cet amendement général est excellent coûterait 3000 F à la république ! Alors, je vous en conjure, sachons raison garder, votons cet amendement général et finissons-en avec cette méchante querelle !
M. Michel Forni (PDC). Un grief qui est souvent fait à la science politique est son conservatisme et une certaine forme d'immobilisme, comme nous pouvons l'entendre ce soir sur les bancs de la gauche. Il s'agit, derrière ce terme de «conservatisme», d'un ensemble qui est destiné à maintenir dans un état non évolutif une forme d'autorégulation, une orientation conservatrice, mais qui camoufle très souvent une objectivité apparente, c'est-à-dire le respect des institutions, de ses membres, et cela par rapport à un fond, une forme, et surtout un formalisme.
Mais, heureusement, rien n'interdisait à notre président et à plusieurs députés de droite de retailler des outils pour faire servir une réorientation institutionnelle du protocole et, indirectement, du pouvoir législatif, et surtout de sa représentation, face à certaines formes d'abstraction et à des caractères peu opératoires.
Je rappelle que plus de sept séances ont été nécessaires à la commission des droits politiques pour engager des passes d'armes avec le Conseil d'Etat et que nous avons abouti à une réinstitutionnalisation du protocole dans une loi - et non plus dans un règlement - avec une nouvelle visibilité d'un pouvoir législatif, qui reste le pouvoir suprême de l'Etat.
Il est évident que le problème du protocole, dans une ville qui reçoit plus de deux mille ministres, chefs d'Etat et de gouvernement - c'est-à-dire un peu plus que Berne - est important, et le règlement de ce protocole doit codifier des usages, préserver des rangs, développer des dénominateurs communs et, surtout, respecter la représentativité.
Il est intéressant de voir que, dans ces passes d'armes, un certain zapping historique du Conseil d'Etat a été associé à un certain empirisme en s'élevant avec force contre ce projet de loi, en le qualifiant de globalement négatif - il faut le rappeler - et en se retranchant derrière des arguments qui allaient de la séparation des trois pouvoirs, avec également certaines formes de copier-coller de ce qui se fait à Berne.
Et puis il y a le côté émotionnel - comme cela a été indiqué - qui a été dissipé par l'avis de droit du professeur Grisel. Nous avons donc la confirmation que la compétence des députés reste ce qu'elle est.
Suite à l'audition du Conseil d'Etat, la myopie hyperfactuelle de certains, qui émettaient de gros doutes sur certaines répercussions problématiques de la représentativité au niveau de la Genève internationale, a fait place à cet amendement général qui nous a été plus ou moins présenté, mais dont les auteurs permettent avec un certain brio de définir des comportements politiques, des approches d'opérationnalisation, et surtout de dresser avec pragmatisme la liste des matières qui forment principalement les grandes rubriques du protocole. Nous y retrouvons les trois pouvoirs, et des concessions majeures ont été faites, notamment celles du Conseil d'Etat.
Pour nous, PDC, l'analyse systémique qui est effectuée dans ce projet de loi incorpore les éléments du changement et maximise par ailleurs la stabilité en mettant notamment l'accent sur le tout et sur l'autorégulation, qui nous permet de bien définir les rôles auxquels nous sommes sensibles.
Epiloguer sur la tenue, sur la jarretelle, c'est ubuesque ! (Commentaires.) L'habit ne fait pas le moine ! Ce qui est important, c'est de trouver le moyen d'approcher nos défis avec ou sans habit.
C'est la raison pour laquelle, devant les solutions simples qui sont apportées, nous sommes d'accord de suivre cette analyse systémique et d'aller de l'avant avec cet amendement général. Nous vous demandons par conséquent de faire de même et d'aller de l'avant avec nous.
M. Patrick Lussi (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, contrairement aux propos que le rapporteur de première minorité a tenus au début de son intervention, l'UDC a dès le départ trouvé important, nécessaire, voire indispensable qu'une loi gère enfin cette question. Je n'ose pas rappeler au rapporteur de première minorité le nombre de décisions prises par notre Conseil d'Etat qui ont été cassées par le Tribunal fédéral, non pas parce qu'elles étaient foncièrement mauvaises, mais en raison de l'absence de base légale ou d'une base légale incomplète ! Il fallait donc tout d'abord fixer une loi, parce que, contrairement à ce que vous avez indiqué, soucieux de la démocratie et de la préséance des textes, nous savons très bien qu'un règlement doit découler d'une loi et non l'inverse. C'est la première chose que nous tenions à dire.
La deuxième chose pour laquelle, c'est vrai, nous étions un peu plus réticents était de déterminer la position des uns par rapport aux autres lors des cérémonies, qui aurait le droit de fouler en premier le tapis rouge, quelle était sa largeur, voire qui devait cheminer en fin de cortège, etc. Il est clair que cette question n'était pas primordiale pour nous, mais tout au long des débats - des débats d'ailleurs fort bien rapportés par le rapporteur de majorité - l'UDC a suivi la majorité de la commission et accepté ce projet de loi.
Pour rendre justice à notre président de commission, M. Limpo, ainsi qu'à Mme Gavillet, qui est intervenue pour le groupe socialiste, il faut reconnaître que la manière utilisée aujourd'hui pour nous présenter cet amendement général peut paraître déplaisante, voire pas adaptée à nos usages. Il est donc certain - je ne le cache pas - que ma susceptibilité de commissaire s'en trouve légèrement heurtée.
Toutefois, si vous me le permettez, pour une fois - cela vous étonnera peut-être, Madame Schneider Hausser - nous avons le droit d'élever notre esprit. Etant donné l'importance de cette loi par rapport à nos citoyens, loi qui ne sert pas à autre chose qu'à déterminer dans quel ordre les prélats vont être placés, avec quel manteau, chapelet et autre, pour assister aux grand-messes ou grandes cérémonies, je me dis que, l'amendement général ayant été concocté par le conclave - si vous me permettez cette expression - il faut l'accepter et passer outre ! C'est pour cela que le groupe UDC acceptera l'amendement général ainsi que cette loi.
Mme Catherine Baud (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je demande formellement le renvoi de cet objet à la commission des droits politiques, parce que je suis profondément choquée par cette manière de faire. Ce n'est pas parce que d'aucuns jugent que ce projet de loi est moins important que d'autres - qui, en période électorale, rapporteraient beaucoup plus de voix - qu'il faut éviter de passer par la commission des droits politiques.
Je sais qu'il est question de supprimer un certain nombre de commissions, qu'il est question de modifier leur ordre du jour, mais cette manière de faire est déjà un bel exemple de réduction de nos droits. En effet, comme cela a été dit, un conclave - le mot est joli - a décidé d'un texte, en l'occurrence signé par un seul député, l'éminent M. Jornot ! C'est toutefois une découverte de ce matin, car le texte que nous avons pu voir lors du caucus n'était pas signé. C'était une version papier. Il a circulé entre nos mains, mais nous n'avons pas vraiment eu le temps de l'étudier. Du reste, le texte que nous avons aujourd'hui est-il le même que celui dont nous avons eu connaissance en version papier ? En fait, nous ne le savons pas, puisque nous n'avons même pas eu le temps de le lire. Et il faudrait faire confiance ! Cela paraît tout à fait normal !
Alors ce texte est peut-être très bien, mais je pense que ce ne serait pas du luxe de passer deux heures en commission des droits politiques pour l'étudier ! Ce serait tout simplement respecter nos institutions. Et comme ce texte, justement, veut montrer la prééminence du pouvoir législatif, veut montrer à quel point nous nous entendons tous bien, je trouve que la moindre des choses serait de respecter ce pouvoir législatif, de respecter son fonctionnement, en nous donnant la possibilité d'étudier ce texte tout à fait normalement en commission, pendant deux heures. Ce n'est, me semble-t-il, pas la mer à boire ! Il me paraît tout à fait logique de suivre cette procédure, qui est la procédure usuelle, quoi que puissent penser certains députés de l'importance ou de la non-importance de certains textes.
Je vous rappelle que la commission des droits politiques s'occupe aussi du règlement du Grand Conseil. Sans doute un certain nombre de textes peuvent-ils paraître tout à fait anodins aux électeurs, parce que, effectivement, ils ne sont pas concernés de prime abord. Il n'empêche que c'est ainsi: une commission doit s'occuper des objets qu'elle est censée traiter ! Ce n'est pas sur le siège que nous devons voter un projet de loi intégralement !
Je vous le répète, renvoyons ce texte à la commission des droits politiques: ce sera rapide, mais au moins nous pourrons avoir une bonne connaissance du sujet et en discuter. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Roberto Broggini, rapporteur de première minorité, vous avez demandé la parole ? Je vous la donne, sur le renvoi en commission.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de première minorité. Je vous remercie, Monsieur le président. Je constate juste que le texte de l'amendement général à ce projet de loi est extrêmement bref et qu'il comporte des éléments qui donnent certains pouvoirs au Conseil d'Etat, notamment à l'article 13, qui stipule à l'alinéa 1 que «le Conseil d'Etat édicte les dispositions nécessaires à l'exécution de la présente loi», alors que nous avons actuellement un règlement, qui découle des articles 101, 122, alinéa 2, et 128, alinéa 1, de la constitution de la République et canton de Genève. Les bases légales pour ce règlement existent déjà, et en l'occurrence nous sommes en train de fabriquer encore une machine...
Le président. Monsieur le rapporteur, votre intervention doit porter sur le renvoi en commission ! (Commentaires.)
M. Roberto Broggini. Nous vous demandons donc le renvoi de cet objet en commission pour que nous puissions étudier les éléments nouveaux qui sont apportés à ce texte, car nous n'en avons pas eu connaissance jusqu'à maintenant. Et cela permettrait à la commission d'auditionner les représentants du Conseil d'Etat et du Bureau ainsi que l'auteur de ce projet de loi. Je pense que c'est extrêmement important pour que nous puissions vivre dans la concorde.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de deuxième minorité. Il a fallu quatre minutes à M. Stauffer pour nous dire qu'il fallait se dépêcher, que cela coûtait cher et qu'il ne fallait pas renvoyer ce projet en commission. La même chose pour M. Saudan: il nous a rappelé qu'une séance de commission coûtait 3000 F, etc. En réalité, nous avons déjà passé sept séances à traiter de cet objet en commission et, visiblement, cela n'a pas suffi. Il me paraît donc important de passer peut-être encore deux heures en commission pour arriver, comme l'a dit mon préopinant, à sortir une loi ou un règlement qui soit plus rassembleur et qui aboutisse, nous l'espérons, à quelque chose.
M. Serge Hiltpold (L), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, je suis assez agréablement surpris des propos qui sont tenus par rapport au fond et à la forme... Les groupes parlementaires qui s'attaquaient principalement à la forme du protocole, considérant que c'était un élément surfait, qui relevait plus de l'apparence que d'autre chose, sont les mêmes qui sont attachés aux institutions sur la forme en disant que cet amendement général doit être présenté en commission.
Pour ma part, je pense qu'il nous faut être pragmatiques. L'amendement général règle le problème et enterre la hache de guerre, si tant est qu'elle ait vraiment été déterrée entre le Bureau du Grand Conseil et le Conseil d'Etat. Et puis ce texte est consensuel.
Maintenant, pour la bonne marche des institutions, pour le respect de la commission des droits politiques, je vous demanderai d'accepter le renvoi en commission pour permettre une lecture en droit politique et aussi, bien évidemment, pour adopter cet amendement général.
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, le Conseil d'Etat n'a pas pu se prononcer formellement sur cette loi et n'a pas pu en discuter. Seul le président a participé au groupe de travail. Néanmoins, nous estimons qu'il est possible d'adopter ce projet de loi, même si beaucoup de choses pourraient encore être améliorées. C'est vrai que, une fois ce projet de loi voté, j'irai mettre une veste, car ma tenue n'est sans doute pas tout à fait correcte, même si elle est en adéquation avec le temps qu'il fait.
Je crois que, avant tout, le protocole est une affaire de respect mutuel; c'est la manière dont on s'organise en société, dont on se respecte les uns les autres. Et pour cela, il faut établir des règles du jeu qui permettent un usage fluide de la civilité. Et la politesse est vraiment l'art du respect. C'est cela, le protocole !
Il est certes regrettable que ce texte ne soit pas passé en commission... Cela n'aurait pas empêché d'adopter ce projet de loi qui est nécessaire. Il faut respecter les institutions, mais aussi les règles du jeu dans ce Grand Conseil pour faire adopter les projets de lois. Voilà ! C'est donc à vous de déterminer quelles seront les règles de politesse !
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote concernant le renvoi en commission de cet objet.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10651 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté par 44 non contre 25 oui et 3 abstentions.
Le président. Nous poursuivons le débat et je passe la parole à Mme Marie-Thérèse Engelberts.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Merci, Monsieur le président. Je suis assez choquée, même si notre parti a pris la décision de voter le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui et qui n'a pas grand-chose à voir avec le projet de loi initial que nous avions voté, en tout cas le MCG, en commission. Les choses sont suffisamment claires pour moi, à ce niveau.
Je voudrais également souligner que le protocole est aussi quelque chose qui est de l'ordre des rites, des rituels. On nous a suffisamment, entre guillemets, «bassinés» avec ce projet de loi au départ, nous faisant remarquer que nous étions soit pas bien habillés, soit pas bien coiffés, soit trop minces, soit autre chose, soit que tel ou tel devait être placé devant untel, pour pouvoir dire que je trouve cela d'une certaine futilité. Mais, en même temps, compte tenu de l'environnement dans lequel je vis, j'estime qu'il est indispensable d'avoir un service du protocole qui fonctionne plus que correctement, comme c'est le cas, et qu'un cadre soit donné.
Il avait été expliqué au départ - et nous n'étions pas tous forcément concernés - qu'il fallait surtout changer le sens des choses et mettre en avant la fonction et le rôle du législatif par rapport à l'exécutif... Qu'en est-il aujourd'hui ? Pour moi, il n'est pas important de savoir qui est devant moi ou derrière moi... Ce n'est pas cela, le problème ! Cet après-midi, j'ai vraiment eu l'impression que nous étions menés en bateau... J'aime beaucoup les négociations, mais pas de ce type-là: je n'appelle pas cela des négociations ! Les commissaires passent pour des imbéciles, que nous ne sommes pas vraiment: on leur présente un résultat et on leur demande, comme s'il y avait un droit supérieur, de l'entériner !
Honnêtement, je me suis abstenue par rapport à mon groupe pour deux raisons: la première est une raison d'éthique. Je ne peux pas tenir une position en commission, m'engager dans un vote et, ensuite, faire tout autre chose. Je respecte l'avis de mon groupe, mais je ne veux pas m'infliger cela. Deuxièmement, je trouve qu'il faudrait, dans ce type de situation, avoir beaucoup plus d'élégance. Je trouve tellement important de ritualiser les cérémonies, les fêtes, etc. ! On ne met pas n'importe quelle paire de chaussures selon les occasions ! De la même manière, on n'arrive pas débraillé ou avec des couleurs vives à un enterrement ou autre ! Il y a un minimum, et le respect c'est aussi ça: c'est un rituel, et il faut réintroduire cette notion, parce que le rituel, c'est ce qui donne du sens aux choses. On le fait au sein des familles, on peut le faire dans un parlement et à l'extérieur avec ses concitoyens. C'est la raison pour laquelle je me suis abstenue. Je trouve que la manière de faire qui a été utilisée, consistant à passer par-dessus la fonction de la commission, va à l'encontre de ce que nous sommes en train...
Le président. Madame la députée, il vous faut conclure !
Mme Marie-Thérèse Engelberts. ...de préconiser dans cette loi que nous allons voter ! (Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous propose de suivre la procédure suivante. Je vais d'abord vous soumettre ce projet de loi en premier débat. Puis, dans un deuxième temps, je vous proposerai de voter l'entrée en matière sur l'amendement général. Nous pourrons ensuite passer au vote article par article.
Mis aux voix, le projet de loi 10651 est adopté en premier débat par 46 oui contre 26 non et 5 abstentions.
Deuxième débat
Mise aux voix, l'entrée en matière sur l'amendement général est adoptée par 45 oui contre 24 non et 7 abstentions.
Le président. Nous allons donc procéder à la lecture de l'amendement général, article par article.
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 et 2.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, à l'article 3, nous sommes saisis d'une demande d'amendement. J'imagine que vous l'avez tous sur vos places. Il a été présenté tout à l'heure. Monsieur Roger Deneys, vous avez la parole.
M. Roger Deneys (S). Je ne veux pas m'exprimer sur l'amendement... J'ai autre chose à dire !
Le président. Oui, mais vous aviez demandé la parole ! Madame Gavillet, c'est à vous.
Mme Aurélie Gavillet (S). Merci, Monsieur le président. Il s'agit principalement de remplacer le terme «directive» par le terme «loi». Nous estimons en effet que de telles prescriptions doivent être contenues dans une loi édictée par le Grand Conseil. Cela nous permettrait d'avoir notre mot à dire sur ce qui se passe au sein de notre parlement en ce qui concerne le protocole. Et rien ne nous empêche, dans cette loi, de déléguer au Bureau du Grand Conseil la compétence d'adopter des directives le cas échéant.
M. Fabiano Forte (PDC). Je voudrais simplement vous indiquer qu'il faut soit demander à nouveau le renvoi en commission, puisque nous sommes saisis d'un amendement - comme cela a été le cas jusqu'à maintenant - soit refuser cet amendement, puisque tout à l'heure vous avez dit qu'il fallait étudier l'amendement général en commission. Si nous devions renvoyer tous les textes parlementaires chaque fois que nous sommes saisis d'un amendement ou d'un amendement général en plénière, nous n'avancerions pas beaucoup dans nos travaux ! Il faut donc rejeter cet amendement.
Mme Catherine Baud (Ve). Je répète encore une fois que nous souhaitons renvoyer cet objet en commission, parce que cette discussion n'a pas lieu d'être en séance plénière. C'est typiquement une discussion de commission !
Le président. Merci, Madame la députée. J'en déduis donc que vous demandez à nouveau le renvoi en commission ? Parfait ! Alors je redonne la parole à M. Roberto Broggini, rapporteur de première minorité.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de première minorité. Mme Baud a exprimé ce que je pensais... (Rires.)
Le président. Parfait ! Madame Schneider Hausser, vous avez la parole.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Je voudrais juste relever l'importance de cet amendement et à quel point il importe qu'il soit traité en commission.
Pour ce qui est des directives, ce n'est pas forcément le Grand Conseil qui doit les émettre: le Bureau peut très bien le faire ! Et puis - comme cela a été dit tout à l'heure - on ne sait pas ce que peuvent recouvrir ces directives, sur quoi elles peuvent porter. Si elles portent sur les cérémonies et manifestations, cela concerne les séances du Grand Conseil ou d'autres cérémonies où le Grand Conseil est invité, et même si nous déléguons au Bureau la compétence de les émettre, seront-elles maintenues ou faudra-t-il les rediscuter à chaque changement de majorité ?! Enfin, beaucoup de points dans l'amendement général doivent tout de même encore être clarifiés. Il faudrait en tout cas pouvoir discuter de l'amendement que nous avons déposé à l'article 3, alinéa 3, qui est très important. Pour toutes ces raisons, nous soutiendrons le renvoi de cet objet en commission.
Le président. Merci, Madame la députée. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Je vous soumets la proposition de renvoi en commission du rapport PL 10651-A.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10651 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté par 43 non contre 25 oui et 5 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous revenons à l'amendement dont nous parlions. Monsieur Deneys, souhaitez-vous prendre la parole cette fois-ci ?
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais revenir sur le vote précédent qui a consisté à remplacer le texte issu des travaux de commission par cet amendement général, sorti d'un chapeau cette semaine... Je ne trouve rien dans le règlement du Grand Conseil qui justifie le processus que vous avez utilisé, Monsieur le président, et je doute de sa légalité. En effet, ce n'est pas le texte issu des travaux de commission sur lequel nous votons, que nous amendons éventuellement article par article, mais un nouveau texte qui sert de base à nos votes de maintenant. Je le répète, je doute fortement de la légalité de ce procédé, et en tous les cas si vous continuez dans cette voie, je pense que nous contesterons formellement cette façon de faire.
Le président. Je vous remercie de l'attention que vous portez à ce sujet, Monsieur le député. Je me permets néanmoins de vous indiquer qu'il n'y a pas si longtemps, en particulier lorsque nous traitions de la loi sur l'organisation judiciaire, nous avons aussi voté sur la base d'amendements généraux. Il ne m'apparaît donc pas que ce soit une nouveauté ou une manière de faire inusitée jusqu'à maintenant.
Monsieur Stauffer, vous avez la parole.
M. Eric Stauffer (MCG). Merci, Monsieur le président. Deux choses. Premièrement, oui, les procédés ne sont pas corrects: ils sont à la limite de l'acceptable, comme l'a très bien exprimé notre collègue Marie-Thérèse Engelberts. Nous sommes d'accord sur ce point.
Maintenant, Monsieur Deneys, je suis mort de rire: vous allez contester la loi ? Vous allez faire un référendum ? Non mais juste pour rigoler: allez dans les rues genevoises expliquer que nous devons nous prononcer sur le protocole et savoir si les députés doivent être placés devant ou derrière le Conseil administratif de la Ville de Genève, etc. Mais les gens s'en foutent, que les choses soient claires !
Et puis s'il faut vous mettre les points sur les i - je vais peut-être le dire d'une manière plus claire, puisque vous ne voulez pas entendre la version diplomatique - il faut savoir à cause de qui ce projet de loi a été initié: à cause de l'arrogance du Conseil d'Etat ! L'arrogance du Conseil d'Etat, qui s'est arrogé des droits qu'il n'avait pas ! Il faut donc le cadrer, et qui peut le faire dans cette république, c'est le parlement ! Voilà, c'est tout !
Alors maintenant, si vous voulez plébisciter l'arrogance du Conseil d'Etat, continuez à faire votre guérilla parlementaire ! En revanche, si vous voulez remettre respectivement le Conseil d'Etat et le parlement à la place qui est la leur, eh bien votez et taisez-vous ! (Exclamations.)
M. Roger Deneys (S). En fait, je vais me taire dans ce débat, parce que je trouve ce sujet tellement ridicule et futile: il m'afflige profondément ! Fondamentalement, le Conseil d'Etat a raison de vouloir conserver ses prérogatives. Je pense que le fait qu'il y ait des psychodrames au sein des libéraux entre le président du Grand Conseil et le président du Conseil d'Etat ne doit pas influencer l'ensemble de ce parlement.
Ce débat, je le répète, est particulièrement ridicule et, c'est vrai, rien que pour ça je me tairai au maximum. Je tiens toutefois à relever que le procédé, comme cela arrive fréquemment cette année, n'est pas respectueux des institutions. C'est tout ce que je voulais dire !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Je vous soumets l'amendement dont nous venons de parler, qui vise à modifier l'amendement général comme suit:
«Art. 3, al. 3 (nouvelle teneur), al. 4 (nouveau) et 5 (nouveau)
3 Le pouvoir judiciaire peut édicter des directives relatives aux cérémonies et manifestations qui lui sont propres, ainsi qu'à ses relations officielles avec les autres pouvoirs et les autorités fédérales et d'autres cantons.
4 Le Grand Conseil peut édicter dans une loi des prescriptions relatives aux cérémonies et manifestations qui lui sont propres, ainsi qu'à ses relations officielles avec les autres pouvoirs et les autorités fédérales et d'autres cantons.
5 Lorsque plusieurs pouvoirs sont concernés, la présente loi s'applique à titre principal, les directives du pouvoir judiciaire et la loi du Grand Conseil s'appliquant, le cas échéant, à titre subsidiaire.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 46 non contre 22 oui et 8 abstentions.
Mis aux voix, l'article 3 est adopté, de même que les articles 4 et 5.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, je souhaite avoir une explication... Nous sommes en train de faire un travail de commission, ce qui est tout à fait malheureux, parce que nous avons d'autres objets à traiter ce soir encore. Je regrette vraiment que ce projet ne soit pas renvoyé en commission.
Par ailleurs, j'aimerais que l'on m'explique ce qu'est une «tenue adéquate»... (Commentaires. Le président agite la cloche.) Est-ce que cela veut dire qu'il faut porter un short et des tongs en période de canicule ? J'aimerais bien savoir ce que cette expression signifie.
Une voix. L'anorak !
M. Roberto Broggini. Ou l'anorak, en hiver ! Peut-on, l'hiver, assister aux séances de ce parlement en anorak ? Est-ce une tenue jugée correcte lorsqu'il fait froid ?! Nous n'avons pas de réponse à nos questions, et c'est pour cela que je vous demande encore une fois le renvoi de ce projet en commission.
Le président. Monsieur le député, j'allais vous répondre que, par définition, le jour de l'Escalade je vous laisserais venir dans ce parlement avec le déguisement de votre choix. Mais puisque vous demandez à nouveau le renvoi en commission - j'avais pourtant cru comprendre que vous trouviez que nous avions d'autres choses à faire - je passe la parole, comme c'est l'usage, à Mme la députée Lydia Schneider Hausser.
M. Eric Stauffer (hors micro). Monsieur le président, je veux déposer une motion d'ordre. Je demande que nous procédions aux votes sans débat, comme j'ai le droit de le faire... (Commentaires.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets donc cette motion d'ordre. Celles et ceux d'entre vous qui sont favorables à cette proposition votent oui, les autres non ou s'abstiennent. Le vote est lancé.
Mise aux voix, cette motion d'ordre est rejetée par 37 oui contre 32 non et 4 abstentions (majorité des deux tiers non atteinte).
Le président. Nous revenons en arrière, semble-t-il... M. le député Roger Deneys nous soumet un amendement sur un article qui a déjà été voté - l'article 5 - consistant à l'abroger. (Remarque.) Mais dans un premier temps, nous allons voter sur le renvoi en commission demandé par M. Broggini... Madame Schneider Hausser, souhaitez-vous, à ce titre-là, vous exprimer ? (Un instant s'écoule.) Votre collègue de gauche, si je puis dire, a sollicité le renvoi en commission, et vous avez demandé la parole... Dois-je en conclure que vous entendez vous exprimer sur le renvoi en commission ou que vous remettez votre tour de parole à plus tard ?
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de deuxième minorité. Monsieur le président, je maintiendrai mon droit de parole pour tout à l'heure, puisque vous m'aviez donné la parole avant que M. Stauffer ne propose sa motion d'ordre... (Exclamations. Commentaires.) Ah, la motion d'ordre n'est pas passée ! Je ne sais plus où on en est... Pourriez-vous, Monsieur le président, nous faire la lecture de l'amendement, parce qu'il ne nous a pas encore été distribué.
Le président. Avec plaisir, Madame la députée ! Je vais essayer de vous le lire... D'après ce que je crois comprendre, il est noté: «Article 5, abrogé». Vous remarquerez le côté synthétique de cet amendement, qu'on ne peut que louer ! M. le député Deneys entend-il défendre son amendement ? Ce n'est pas le cas...
M. Roger Deneys (S). Si ! Monsieur le président, si je l'ai déposé trop tard, je m'en excuse. Je croyais avoir compris de votre dernière intervention que nous en étions à l'article 4. J'admets toutefois avoir pu me tromper. Si vous préférez que je m'exprime à ce sujet tout à l'heure, au cours du troisième débat, je le fais volontiers...
Le président. Oh, je m'en voudrais, Monsieur le député ! Tant qu'on y est, allez-y ! Ne vous retenez surtout pas !
M. Roger Deneys. Je vous remercie, Monsieur le président, pour cette marque de respect du protocole... (Rires.)
Je tenais simplement à vous proposer l'abrogation de l'article 5, intitulé «Tenue et comportement», car je pense que nous sommes tous des adultes responsables, majeurs et vaccinés. La proposition qui est faite à l'article 5 me semble tout simplement hors de propos à l'endroit de députés qui sont, d'une certaine manière, des citoyens reconnus puisqu'ils sont élus au sein de ce parlement. C'est une question de liberté individuelle qui est ici mise en cause, de façon arbitraire, par le Bureau. En effet, la notion de «tenue adéquate» n'est définie nulle part, et je vous défie de trouver la définition de cette expression dans un dictionnaire. Il est tout à fait ridicule de maintenir cette notion dans une loi, alors supprimons cet article. Gardons le reste - les rapports de psychothérapie entre le Conseil d'Etat et le Grand Conseil - si vous y tenez, mais supprimons cette disposition !
Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, la parole n'étant plus demandée, je soumets à votre sagacité l'amendement déposé à l'article 5 par M. Roger Deneys, consistant à l'abroger.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 22 oui et 5 abstentions.
Le président. L'article 5 est donc maintenu tel quel. Nous passons à l'article 6.
Mis aux voix, l'article 6 est adopté, de même que les articles 7 à 14.
Le président. Monsieur le rapporteur Broggini, c'est avec joie que je vous cède la parole.
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de première minorité. Merci, Monsieur le président. Je lis à l'article 13 de la loi que nous sommes en train d'adopter que «le Conseil d'Etat édicte les dispositions nécessaires à l'exécution de la présente loi». Cela veut dire qu'il va nous faire un règlement - qui sera exactement le même que celui que nous avons maintenant - en édictant une loi supplémentaire. Cela ne fera que surcharger inutilement notre arsenal législatif ! Je n'arrive pas à comprendre cela, et c'est pour cette raison que je demande, une fois encore, le renvoi de ce projet de loi à la commission des droits politiques.
Le président. Je vous remercie de votre constance, Monsieur le député. Je vais juste me permettre de vous donner un centimètre d'explication... Vous êtes suffisamment féru des affaires politiques de cette république - vous qui avez siégé dans la plupart des conseils à différents niveaux - pour savoir que, d'une manière générale, quelle que soit la loi adoptée, c'est toujours le Conseil d'Etat qui édicte les dispositions nécessaires à l'exécution de ladite loi. Il me semblait - vous me savez courtois avec le Conseil d'Etat - qu'il n'était pas nécessaire dans cette loi-ci que nous chamboulions tout ce qui semble vous préoccuper en décidant que c'était à nous d'édicter ces dispositions. C'est effectivement - comme l'a du reste relevé tout à l'heure Mme la conseillère d'Etat - un privilège de l'exécutif que de prendre les dispositions nécessaires à l'exécution de la loi.
Cela étant dit, vous avez demandé le renvoi en commission de cet objet. Je ne sais pas si l'un des rapporteurs souhaite s'exprimer à ce sujet. Si ce n'est pas le cas, je vous soumets, Mesdames et Messieurs les députés, la proposition de renvoyer en commission le PL 10651-A.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10651 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté par 44 non contre 25 oui et 6 abstentions.
Le président. Cette ultime demande de renvoi est donc rejetée. Nous en avons maintenant terminé avec l'amendement général... Le troisième débat est-il demandé ? (Rires.) C'est le cas. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Madame Lydia Schneider Hausser, je vous donne la parole.
Troisième débat
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de deuxième minorité. Merci, Monsieur le président. Le troisième débat ayant été demandé, je me permets d'intervenir à nouveau... Il est vrai que cette loi est affligeante pour le groupe socialiste. Que nous ayons eu à un certain moment, au cours de la dernière législature ou des législatures précédentes, des différends avec le Conseil d'Etat en termes de protocole, en termes de place dans des cortèges, en termes de bienséance peut-être pas respectée à la lettre, c'est une chose. Mais de là à édicter une loi, un texte législatif qui est rétrograde par rapport à ce qui existe déjà maintenant au niveau du service du protocole, qui gère, comme je l'ai dit, des milliers de cérémonies et qui est sans doute l'un des services du protocole le plus au point de cette planète, il y a un pas !
Et malgré tout, nous allons pondre un texte qui satisfait notre ego, mais qui va nous faire revenir à des dispositions affligeantes, il faut bien le savoir ! En effet, cela revient à nous dire - à nous, députés - que les règles minimales de bienséance et de respect mutuel doivent être observées entre nous. Je ne parle pas des débats politiques qui peuvent être enflammés, et c'est d'ailleurs notre devoir de députés de nous impliquer dans ces débats. Mais nous avons besoin d'un texte législatif pour être corrects avec les autres députés ! Nous avons passé toute la journée à évoquer des sujets tels que la délinquance, l'insécurité ou la sécurité... Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pourrons plus nous regarder dans un miroir, parce qu'avoir besoin ce soir d'adopter un texte législatif qui stipule que nous devons nous respecter, je trouve ça déplorable ! Je regrette que ce texte ait été présenté à ce parlement et qu'il soit certainement sur le point d'être adopté ce soir, parce qu'il est superfétatoire et d'une futilité incroyable ! Il montre bien qu'il n'y a pas que des gens dans la rue, des étrangers ou des jeunes qui ne respectent pas certaines règles: même des députés ont besoin aujourd'hui, en 2011, à Genève, d'un texte tel que celui-ci pour croire qu'ils existent et pour se tenir correctement entre eux ! C'est déplorable, et le parti socialiste le refusera ! (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). J'aimerais remercier notre cheffe de groupe pour les propos qu'elle a tenus et que je partage, bien entendu. Je voudrais simplement relever le fait que, ce projet de loi ne prévoyant aucune sanction en cas de non-respect des dispositions qu'il contient, il est tout simplement caduc. En effet, rien ne se passera si ces dispositions ne sont pas respectées...
M. Miguel Limpo (Ve). Pour conclure, j'aimerais exprimer la grande déception des Verts par rapport à la manière dont cet amendement général a été traité ici en plénière, puisque finalement nous n'avons même pas pu discuter de certains points importants, comme la conception même de nos institutions. Sans nous prononcer jamais sur le fond de cet amendement général durant ce débat - vous l'aurez remarqué - nous avons constaté qu'en fin de compte la plupart des députés ici - vous aussi, peut-être - n'ont jamais vraiment pris connaissance de ce texte et font une confiance aveugle au Bureau, parce que c'est ce dernier qui l'a étudié. En effet, il faut savoir que la majorité des chefs de groupe n'ont pas été consultés et n'ont pas fait partie des négociations. Malheureusement, c'est aussi un certain désaveu par rapport aux travaux qui ont été effectués par la commission des droits politiques... Désormais, nous saurons tous qu'après avoir étudié un sujet en commission pendant de nombreuses séances, voire des mois entiers, nous risquons de nous retrouver avec un amendement général en plénière, élaboré par quelques personnes qui, apparemment, ont plus de légitimité que les travaux d'une commission. C'est regrettable !
Pour toutes ces raisons - et non pas sur le fond, mais sur la forme - nous refuserons ce projet de loi, et nous le regrettons fortement, car la voix des Verts, ce soir, n'a pas été entendue à propos de notre conception des institutions. (Applaudissements.)
M. Roberto Broggini (Ve), rapporteur de première minorité. C'est dans «Entreprise romande» - un journal qui n'est pas forcément de mon bord - que j'ai pu lire un éditorial dans lequel la rédactrice en chef se gaussait de la volonté d'une grande banque suisse d'avoir adopté un dress code allant du vêtement au sous-vêtement en passant par les chaussettes... Ce n'est pas correct: on ne peut pas contrôler les gens à ce niveau ! En plus, il paraît que, dans cette grande banque, il faut des habits qui ne se froissent pas ! Si c'est ce que vous voulez appliquer aux députés du Grand Conseil, peut-être que les plus pauvres d'entre nous viendront devant ce parlement - car nous ne sommes pas tous banquiers ou avocats: certains sont mécanos et doivent se changer avant de venir dans cette salle - demander des indemnités de teinturerie, et je vous remercie d'avance, Monsieur le président, de nous avoir présenté ce projet de loi. Merci pour le teinturier !
M. Serge Hiltpold (L), rapporteur de majorité. Suite au débat sur ce projet de loi, je crois que les conclusions seront brèves, car nous avons passé suffisamment de temps sur ce sujet... Le Bureau a pris ses responsabilités. Je rappelle que le Bureau n'est pas composé de super députés et que tous les groupes parlementaires y sont représentés. Les députés sont responsables du travail qu'ils accomplissent. Ce travail de liaison, ils l'ont effectué avec le Conseil d'Etat, avec le secrétariat du Grand Conseil, et ils sont arrivés à un compromis. La hache de guerre est enterrée, et je pense que, ce soir, nous avons les réponses aux demandes qui ont été faites par les Bureaux successifs du Grand Conseil. Nous ne mettons pas en péril les institutions, et je vous remercie d'accepter ce projet de loi tel qu'amendé.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Celles et ceux qui sont favorables au projet de loi 10651 ainsi amendé votent oui, les autres votent non ou s'abstiennent. Le vote est lancé.
La loi 10651 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10651 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 45 oui contre 23 non et 8 abstentions.
Premier débat
Le président. J'invite à la table des rapporteurs M. Christophe Aumeunier et M. Serge Dal Busco, déguisé en Mario Cavaleri... Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
Présidence de Mme Elisabeth Chatelain, deuxième vice-présidente
M. Christophe Aumeunier (L), rapporteur de majorité. Merci ! Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi mérite que nous rappelions très brièvement les deux philosophies existantes en matière de subventionnement de logement... L'aide personnalisée est un subventionnement du locataire: une partie du loyer est prise en charge, si celui-ci représente un taux d'effort situé entre 20 et 26% des revenus, en fonction du taux d'occupation, c'est-à-dire du nombre de personnes qui occupent le logement. Il s'agit donc de payer une partie du loyer au propriétaire en subventionnant le locataire, et c'est un subventionnement à fonds perdu.
L'autre philosophie est l'aide à la pierre. L'ancien système de l'aide à la pierre, c'est le système HLM, qui voulait subventionner la construction et l'exploitation des immeubles pendant une période de vingt-cinq ans, afin d'abaisser les loyers. Le hic, s'agissant de ce système, c'est qu'au bout de vingt-cinq ans il n'y a plus de contrôle, ce qui ne permet pas d'assurer la pérennité du logement subventionné. (Brouhaha.)
Un nouveau système d'aide à la pierre est apparu: il s'agit de la loi sur les logements d'utilité publique, pour lesquels 25 à 50% de tous les périmètres sont dédiés à de nouvelles réalisations de logements d'utilité publique, qui restent propriété de collectivités publiques... (Brouhaha.) Madame la présidente, oserais-je solliciter la police de l'audience ? Je vous prie de demander un peu de silence, parce que l'on ne s'entend plus !
La présidente. Vous avez parfaitement raison ! (La présidente agite la cloche.)
M. Christophe Aumeunier. Merci, Madame la présidente ! J'indiquais donc que le nouveau système d'aide à la pierre veut que l'on réalise des logements d'utilité publique qui restent propriété des collectivités publiques. C'est un système différent de la subvention à fonds perdu, puisque les fonds investis par l'Etat sont ainsi pérennisés.
Le choix de la commission de refuser ce projet de loi se fonde sur des constats. Le premier, c'est que l'aide personnalisée existe et fonctionne déjà: plus de 6000 foyers en sont bénéficiaires et elle n'a jamais été refusée parce que les fonds à disposition dans les budgets sont encore là. Deuxièmement, l'aide personnalisée n'incite pas à la construction et, troisièmement, ce projet de loi, singulièrement, augmenterait les dépenses de l'Etat de quelque 40 millions. En effet, 20 millions sont consacrés actuellement à l'aide personnalisée, mais les services de l'Etat nous ont indiqué que cette dépense atteindrait 60 millions si le projet de loi devait être adopté, ce qui est considérable.
Au contraire, le système des logements d'utilité publique constitue une incitation à construire, puisque 50 à 75% des logements sont construits en libre dans les périmètres, ce qui a permis finalement de doper la construction dans les PLQ. Si nous n'avions pas voté cette loi et si nous n'avions pas changé le système des deux tiers/un tiers, malheureusement nous n'en serions pas à construire péniblement 1200 à 1300 logements: nous serions contraints de construire 400 à 500 logements, parce que la situation était totalement bloquée. Le système des LUP a débloqué cette situation. Il s'agit en définitive de constituer un parc de logements d'utilité publique pour répondre aux besoins de la population la plus défavorisée et inciter à la construction. Pour cette raison, la majorité de la commission vous recommande de rejeter ce projet de loi.
Présidence de M. Pierre Losio, premier vice-président
M. Serge Dal Busco (PDC), rapporteur de minorité ad interim. Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, ce projet de loi a été déposé en 2004 - il est bon de le rappeler - par le groupe démocrate-chrétien, et c'est un député de la précédente législature, notre estimé ami Mario Cavaleri, grand expert s'il en est en matière de logement, qui a rédigé ce rapport de minorité, suite précisément au refus d'entrer en matière par la commission.
Certains sujets, lorsqu'ils sont traités par ce parlement après des années, ne sont de toute évidence plus d'actualité. Ce n'est vraiment pas le cas pour ce projet: les thèmes et les problèmes abordés sont plus que jamais d'actualité. Pourquoi le groupe démocrate-chrétien a-t-il décidé de présenter un rapport de minorité ? Comme je viens de l'indiquer, parce que les raisons qui prévalaient lors de la présentation en 2004 sont non seulement toujours valables, mais d'une actualité encore plus brûlante. La grave pénurie de logements qui sévit depuis longtemps à Genève - et qui va, hélas, en s'aggravant - fait que beaucoup de nos concitoyens ne trouvent pas d'appartements correspondant à leurs moyens financiers, voire n'en trouvent pas du tout.
Certes, comme l'a indiqué le rapporteur de majorité, dans l'intervalle est intervenue la conclusion d'un accord sur le logement, ainsi que l'adoption par le Grand Conseil de cette fameuse loi sur les logements d'utilité publique. Dans le cadre de ces nouvelles dispositions, force est de constater que, si l'ancien système n'aurait pas produit les logements escomptés, le nouveau système ne remplit pas non plus les objectifs que nous nous étions fixés. Le nombre de logements est toujours insuffisant, ce qui fait que beaucoup de familles, dans le sens large du terme, continuent à devoir consacrer une part très importante - trop importante - de leurs ressources financières pour le loyer.
La solution, on la connaît: c'est poursuivre une politique volontariste, mettre à disposition des terrains, simplifier les procédures, mettre en place des mécanismes financiers pour favoriser l'acceptation de nouveaux programmes de logements, notamment par les communes, et j'en passe. Et le parti démocrate-chrétien s'engage sans relâche pour atteindre cet objectif et remédier à une situation que je n'hésite pas à qualifier de désespérante pour beaucoup de nos concitoyens, pour notre canton, et aussi pour son économie.
Et donc ce projet de loi - que j'essaie de défendre aujourd'hui - propose l'élargissement de l'allocation logement contenue dans la loi générale sur le logement, au moins pendant un certain temps, précisément pour pallier ce manque de logements et répondre concrètement aux besoins de ceux qui connaissent des situations très difficiles, situations qui vont malheureusement perdurer encore un certain temps.
C'est d'autant plus vrai que de nombreux projets concernant des périmètres en voie de développement sont toujours empêchés d'être réalisés. On ne peut qu'espérer que les obstacles rencontrés soient bientôt levés mais, dans l'intervalle et à la lumière de ces réalités, la pertinence de ce projet est évidente. C'est une solution d'allégement des budgets pour les familles et cela offre aussi - c'est un autre élément qu'il convient de mettre en lumière et que la loi sur les LUP devrait également permettre de concrétiser lorsqu'elle aura atteint son rythme de croisière - la fameuse mixité dans les périmètres, à laquelle notre parti tient vraiment beaucoup.
Il est fort regrettable que la commission n'ait pas perçu ces enjeux ou, en tout cas, pas de la même manière que nous. Ce n'est certes pas la panacée universelle face à la pénurie de logements, mais cela pourrait occasionner, favoriser une aide temporaire aux locataires qui en ont vraiment un urgent besoin. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à revenir sur la position de la commission et à accepter ce rapport de minorité.
Mme Irène Buche (S). Si son objectif est louable, à savoir aider des locataires d'immeubles non subventionnés aux ressources modestes à payer leur loyer, ce projet de loi - qui date de 2004, il faut le rappeler - est aujourd'hui dépassé et ne constitue pas une solution aux problèmes posés.
En particulier, l'entrée en vigueur de la LUP a changé la donne. Cela est d'autant plus vrai que la LGL prévoit déjà un système d'allocations de logement pour les locataires de logements non subventionnés, cela à certaines conditions, bien évidemment. Tous les efforts de l'Etat doivent maintenant être concentrés sur la création de logements d'utilité publique et, bien sûr, sur l'octroi d'allocations de logement au sens de la LGL actuellement, mais surtout sur la construction de logements, étant donné la grave pénurie qui sévit actuellement à Genève et que personne ne conteste, bien évidemment.
Je vous invite donc à ne pas entrer en matière sur ce projet de loi, qui est dépassé et qui est devenu inutile étant donné la situation actuelle.
M. Christo Ivanov (UDC). Le projet de loi 9170, déposé par nos collègues du PDC, date de 2004. Depuis, de l'eau a coulé sous les ponts: une loi adoptée par le Grand Conseil sur les LUP - les logements d'utilité publique - est entrée en vigueur avec efficacité.
Votre projet de loi, qui veut instituer un subventionnement supplémentaire pour certaines catégories de locataires, aura un coût estimé à 60 millions de francs par an - c'est un nouveau tonneau des Danaïdes annuel ! - alors que la loi sur les LUP est active, efficace et suffisante. J'attire votre attention sur le fait que vous allez alourdir le budget 2012 dont l'équilibre est plus que précaire, sans parler des budgets suivants. Pour ces raisons, le groupe UDC refusera ce projet de loi, estimant que la loi sur les LUP est amplement suffisante.
M. Bertrand Buchs (PDC). Le PDC soutient ce projet de loi simplement parce qu'il est toujours d'actualité, parce que les gens ont de la peine à payer leur loyer, parce que les gens doivent quitter Genève pour se loger ailleurs, que ce soit en France voisine ou dans le canton de Vaud, où les loyers sont bien meilleur marché. Je connais même des personnes qui sont allées vivre dans le Bas-Valais et qui font tous les jours le trajet pour venir travailler à Genève. Il faut donc aider les familles, aider la classe moyenne: c'est de notre responsabilité, et il convient d'accepter ce projet de loi.
Mme Nathalie Schneuwly (R). Une aide à la personne plutôt qu'une aide à la pierre n'est pas une mauvaise idée en soi. Le PLR y avait déjà pensé... Certains magistrats de nos communes défendent aussi cette idée, et la Chambre genevoise immobilière a effectivement indiqué en commission que, depuis quelques années, elle soutenait cette aide.
Par contre, le Rassemblement pour une politique sociale du logement a expliqué ne pas être favorable à ce projet, car il estime que lorsque l'on subventionne des personnes, on perd le contrôle des loyers. L'ASLOCA n'est pas non plus favorable à ce projet, considérant que l'aide à la pierre a permis de construire, au cours de ces dernières années, beaucoup de logements et qu'il faut persévérer dans cette voie.
Ce projet dépasse donc les clivages politiques, et on ne pourra pas nous accuser de défendre les milieux immobiliers. La problématique du logement est bien complexe, et elle mérite des solutions plus appropriées que ce projet. Aujourd'hui, Genève subit une véritable pénurie du logement, toutes catégories confondues. Il faut donc construire et, pour cela, il faut déclasser intelligemment et délivrer des autorisations de construire.
En ce qui concerne les logements sociaux, il faut favoriser la construction pérenne plutôt que de verser... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...des allocations à fonds perdu.
Ce projet, comme cela a été dit, qui date de 2004, avait déjà été jugé trop coûteux à l'époque... Les dépenses seraient passées de 20 à 56 millions. Je vous pose la question aujourd'hui: quelle serait l'augmentation en période de crise ?
Enfin, depuis le dépôt de ce projet, cela a été indiqué, la loi sur les LUP - les logements d'utilité publique - a été votée, et il faut lui laisser le temps de produire ses effets. Ce n'est pas le moment de voter une telle loi, et une loi à titre transitoire, comme le préconisait le PDC, n'est pas une bonne idée: c'est une mesure en demi-teinte, qui ne satisfait pas le PLR. Pour toutes ces raisons, tant le groupe radical que le groupe libéral vous invitent à refuser ce projet de loi.
Présidence de M. Renaud Gautier, président
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes en procédure de vote. Je vous soumets l'entrée en matière du projet de loi 9170.
Mis aux voix, le projet de loi 9170 est rejeté en premier débat par 62 non contre 6 oui et 1 abstention.
Premier débat
Le président. La parole est à M. Pierre Weiss, rapporteur de majorité... Pardon, je vous prie de m'excuser, Madame la députée ! J'ai un problème avec les Verts ! Madame la rapporteuse de majorité, vous avez la parole.
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de majorité. Merci, Monsieur le président. J'ai pourtant les bras couverts, et il me semble que ma tenue est à peu près correcte... Mais peut-être me suis-je trompée !
Ce projet, qui est surnommé «Sycotrin» dans le jargon informatique, permettra donc de relier les radars routiers au réseau de l'Etat de Genève. Une première installation pilote donne entière satisfaction. Il faut savoir qu'aujourd'hui les données des radars sont relevées manuellement et que cela mobilise des gendarmes qui pourraient accomplir des tâches nettement plus utiles. En outre, ce travail manuel demande de nombreuses manipulations qui sont source d'erreurs ensuite dans les fichiers informatiques de l'Etat. Enfin, le stockage des données se fait sur CD-Rom et ne permet pas de recherches faciles, ce qui rend le processus de réclamation long et fastidieux, puisque les personnes souhaitant faire une réclamation doivent se rendre plusieurs fois à la brigade de sécurité routière.
Le projet de loi 10619 nous propose une mise en réseau qui permettra un téléchargement fiable et sécurisé, un stockage et un archivage sur un serveur centralisé, une reconnaissance automatique des numéros de plaques, en un mot: une rationalisation des ressources. Ce projet de loi permettra également de libérer des gendarmes de leurs tâches pour les affecter à de vraies missions de terrain, ce qui est, je crois, notre souhait à tous dans ce parlement. Enfin, ce projet de loi est également compatible avec la nouvelle application du service des contraventions, que nous avons votée en décembre dernier.
Pour l'instant, il est prévu de raccorder cinquante-sept cabines radars, soit environ un tiers des radars du canton, en fonction de l'avancement du réseau de fibre optique. Le reste sera relié au fur et à mesure des travaux d'installation de la fibre optique, car l'Etat n'a pas jugé nécessaire d'engager des travaux importants de génie civil juste pour relier des radars. Cela se fera donc au fur et à mesure.
Ce projet de loi, en bref, représente une amélioration de la prévention en matière de sécurité routière, mais également de l'efficience en matière de fonctionnement de l'Etat. Je vous engage donc à faire comme la majorité de la commission des finances, c'est-à-dire à l'adopter.
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, moi je vous engage à faire exactement le contraire, c'est-à-dire à refuser ce projet de loi ! Pour quelles raisons ? Parce que, en réalité, ce projet de loi est une scorie d'une théorie d'un projet qui avait été développé en 2005, repêché en 2007, représenté en 2010 et dont on voudrait nous faire croire qu'il est prioritaire. En d'autres termes, son histoire et sa gestation si longue sont synonymes de sa nécessité d'avortement...
La deuxième raison, c'est que ce projet de loi - qui n'est prioritaire que parce que, tout à coup, il devrait nous amener à dépenser 2 millions, alors qu'il ne l'est en réalité pas du tout - n'améliore en aucun cas la sécurité du trafic, dans la mesure où il équipera exactement le même nombre de radars qu'aujourd'hui.
Troisièmement, il n'améliore pas non plus la sécurité de ceux qui sont appelés à aller chercher dans les boîtes de radar les photos ou films des personnes qui n'ont pas respecté les limitations de vitesse. On nous a en effet bien précisé qu'aucun accident n'était survenu depuis que le système actuel existe.
Quatrième raison: il ne diminuera pas la consommation d'essence des véhicules, car que ce soit pour aller chercher les films en question ou pour toute autre raison liée au travail des policiers, les voitures circuleront quand même.
Enfin, ce projet de loi n'améliore pas l'organisation de la police, parce qu'il faut quand même savoir qu'aujourd'hui six patrouilles de deux hommes sont chargées de chercher ces films, alors que l'on pourrait très bien avoir six patrouilles de deux employés assermentés - au lieu de deux policiers - pour faire ce travail. Nous pouvons nous étonner au passage que le Conseil d'Etat n'ait pas vu là la possibilité - par manque de réflexion - d'améliorer la sécurité des Genevois en affectant douze policiers sur le terrain plutôt que de leur demander d'aller chercher des films ! Voilà qui montre fort bien que ce projet de loi a été élaboré par des informaticiens qui n'ont pas connaissance de la réalité du terrain et qui n'ont pas travaillé en coordination avec la direction de la police, ni même avec la direction du département.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi n'est pas prioritaire: non seulement il n'améliore pas la circulation, etc., mais il ne permet pas d'accroître l'efficience de l'utilisation des deniers des contribuables. Pourquoi ? On nous fait miroiter 600 000 F de recettes supplémentaires, à nombre égal de contrôles, parce que les radars fonctionneraient plus longtemps... Moi je veux bien, mais...
Le président. Monsieur le député, il vous reste vingt secondes !
M. Pierre Weiss. ...rien n'a été prouvé dans ce sens ! Il n'y a pas de retour sur investissement, il n'y a pas de réflexion !
Ce projet de loi mérite tout simplement d'être retoqué ! A la limite, que le Conseil d'Etat nous présente un projet amélioré, mais nous ne saurions aller plus loin, Monsieur le président.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Je constate avec amusement que depuis que nous avons voté la loi sur le protocole, nous avons fait fuir nos conseillères d'Etat... Mais il est vrai qu'elles n'arboraient pas une tenue de ville aujourd'hui: elles étaient donc hors la loi.
Je reviens au sujet qui nous occupe, pour vous dire que je suis quelque peu étonnée de la position de M. Weiss, dans la mesure où ce projet de loi - comme l'a très bien dit Mme Flamand - permet d'enlever des tâches administratives à des policiers pour qu'ils puissent travailler davantage sur le terrain. Ce projet de loi limite aussi la bureaucratie, puisque l'usager n'aura plus qu'un seul service à qui s'adresser. Enfin, il fait économiser de l'argent à l'Etat, car il ne sera pas nécessaire d'engager du personnel supplémentaire pour faire fonctionner tous ces radars.
J'ai vraiment du mal à comprendre pourquoi ce projet qui limite la bureaucratie et évite des coûts supplémentaires pour l'Etat est refusé par un député libéral ! Je ne vois qu'une explication: soit le parti libéral est assez systématiquement incohérent - c'est une possibilité - soit c'est en raison des prochaines élections fédérales. Il est vrai que soutenir les radars et les contrôles routiers, ce n'est pas très populaire ! (Applaudissements. Commentaires.)
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Je vais être brève. Les Verts soutiennent ce projet de loi pour toutes les excellentes raisons développées par Mme Flamand tout à l'heure, beaucoup plus intelligemment que je ne pourrai le faire. Ce projet de loi améliore en effet l'efficacité et l'efficience de la brigade de sécurité routière.
Je tiens encore à relever un élément qui me semble extrêmement parlant: ce projet améliore également la sécurité des agents qui sont actuellement obligés d'aller relever manuellement les radars et qui, ce faisant, risquent leur vie. Nous vous invitons donc à voter ce projet de loi.
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, ce projet de loi a tout à fait sa raison d'être, et nous allons le voter quasiment à l'unanimité et avec enthousiasme. Vous savez, nous avons relevé des points absolument essentiels dans ce projet de loi, et nous sommes convaincus qu'il augmentera la sécurité. Quand nous parlons de sécurité, il s'agit de sécurité routière, ce qui est un élément extrêmement important. Autre aspect très intéressant: l'allégement des charges administratives, la rationalisation des procédures. Cela va dans le sens de tout ce que nous défendons pour faciliter les procédures. Maintenant, nous voulons aussi que les forces de police soient utilisées aux bons endroits, c'est-à-dire pas pour changer les ampoules des radars.
Un autre élément, qui me semble également extrêmement important, n'a pas suffisamment été relevé: le but de ce projet de loi est de traiter les infractions sur la base de données fiables, ce qui permettra de mieux sanctionner ces criminels que sont les chauffards. C'est, à mon avis, un élément extrêmement important, et c'est pourquoi nous disons un oui massif à ce projet de loi.
M. Eric Stauffer (MCG). Je vous fais une proposition, Monsieur le président: interrompre les débats et lever la séance, car il n'y a plus aucun représentant du Conseil d'Etat et la moitié des bancs de cet hémicycle sont vides. Visiblement les gens ne sont plus intéressés par les débats parlementaires, et en premier lieu le Conseil d'Etat. Je vous propose donc, Monsieur le président, de lever la séance. Nous reprendrons le traitement de cet objet à la prochaine séance plénière, parce que, franchement, ce n'est pas possible de travailler dans ces conditions !
Le président. Monsieur le député, le règlement est très clair. En l'absence du Conseil d'Etat, le troisième débat peut être demandé par le Bureau s'il est unanime. Si tel n'est pas le cas, il est reporté à la séance suivante.
J'ai entendu tout à l'heure quelques - comment dirais-je ? - frémissements sur ma gauche lorsque j'ai levé la séance à 16h30 parce qu'il y avait une séance de la commission des visiteurs. Il m'apparaît donc en l'état que nous pouvons probablement terminer ce sujet, et nous verrons pour la suite... (Commentaires.) Monsieur le député Weiss, vous avez la parole.
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, Mme Emery-Torracinta, qui elle aussi s'est absentée, va manquer l'explication que je vais donner maintenant. En réalité, il est possible de réorganiser sans dépenser... Elle, elle veut réorganiser en dépensant 2 millions, car - et c'est vraisemblablement le sens de la réorganisation socialiste - pour réorganiser, il ne faut pas réfléchir: il faut dépenser !
Moi je vous demande simplement de relire mon rapport de minorité. On peut lire, par exemple, que le responsable SIDLO - c'est-à-dire le responsable de l'informatique du département de la sécurité - a déclaré qu'«il n'y aura pas de gain sur le terrain. Le gain est du côté de la mobilité (des brigades) et éventuellement des quelques cas de photographies jusqu'alors pas exploitables». Cela veut dire qu'on nous demande de voter 2 millions pour améliorer le confort de travail de personnes dont l'organisation du travail devrait être repensée. Ce n'est pas acceptable ! Cela a été dit en commission, cela doit être dit dans cette salle, raison pour laquelle, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, voter aujourd'hui un montant de 2 millions parce que l'on n'a pas réfléchi à une meilleure organisation du travail, c'est se moquer des contribuables genevois ! Et Mme von Arx, qui indiquait tout à l'heure que tout son groupe - composé en ce moment même de cinq personnes - allait voter ce projet de loi, aurait dû, elle qui fait partie de l'Entente, réfléchir avec plus de sérieux à l'utilisation de l'argent des contribuables genevois !
M. Eric Stauffer (MCG). Eh bien, nous allons donc aller au fond de ce sujet, même si le Conseil d'Etat n'est pas représenté ! Le MCG soutiendra ce projet de loi, mais nous tenons tout d'abord à faire passer un message au Conseil d'Etat... Nous pourrions adhérer au fait que dépenser 2 millions, c'est effectivement trop, mais nos commissaires ont privilégié la sécurité des personnes en commission et ont opté pour le oui. Nous souhaiterions toutefois que le Conseil d'Etat se préoccupe davantage du service des contraventions, qui a visiblement de la peine à accoucher du nouveau programme informatique et dont l'un des responsables a apparemment été suspendu pour sexisme. Evidemment, cela n'arrange rien ! Le projet MICADO s'était déjà écroulé, le nouveau projet de loi pour les contraventions prend encore du retard: finalement, c'est toujours Kafka au service des contraventions !
Et puis j'inviterai la Cour des comptes - au cas où certains de ses membres regardent les débats - à aller remettre son nez dans ce service, car il y a tout de même beaucoup de choses à dire.
Alors, c'est vrai, dépenser encore 2 millions n'est pas forcément judicieux - et comme je l'ai déjà dit, je pourrais adhérer aux propos de M. Weiss - mais puisque nos commissaires ont pris position, notre groupe s'y tiendra, et nous accepterons donc ce projet.
M. Patrick Lussi (UDC). Beaucoup de choses ont été dites... Contrairement à ce que d'aucuns pensent à propos d'un éventuel appel du pied à l'approche des élections, l'UDC va se prononcer négativement sur ce projet de loi... Il nous semble en effet - et le vote en commission était clair: ce n'est donc pas une surprise pour vous, puisqu'il figure dans le rapport - qu'avant de dépenser ces 2 millions simplement pour transmettre des données informatiquement pour les contrôles en matière de circulation routière, il y a bien d'autres choses à faire.
Et j'aimerais faire une remarque à Mme von Arx: il est vrai, nous sommes tous des chauffards, nous sommes tous des pécheurs devant l'Eternel. Cependant, il semblerait quand même que les chauffards et les pécheurs devant l'Eternel commettent certes des infractions, mais qu'ils sont généralement punis, et ce ne sont pas les radars qui vont changer les choses. Il vaudrait mieux mettre un peu plus d'argent pour punir les vrais criminels, car malgré tous vos effets de manche en matière de circulation routière et sur les chauffards, les contrevenants sont tout de même d'honnêtes citoyens. Je sais bien que ce que je dis vous déplaît, en face, et que vous arriverez bientôt, peut-être, à nous faire tous rouler à vélo... Quand ce sera le cas, eh bien les gens régleront leurs comptes à coups de poing car il y aura toujours des chauffards pour griller les priorités. Pour en revenir au sujet - quittons l'utopie ! - le groupe UDC refusera ce projet de loi.
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de majorité. Je reviens brièvement sur la question de la réorganisation de la police. C'est un problème tout à fait séparé de ce projet de loi. Ce n'est pas avec un crédit d'investissement que l'on peut réorganiser la police ! Ce n'est donc pas en acceptant ou en refusant ce projet que l'on va pouvoir procéder à cette réorganisation.
En revanche, il faut accepter ce projet de loi pour permettre de réallouer des ressources sur le terrain. C'est une sorte de prérequis pour adopter ensuite de nouvelles mesures quant à l'organisation de la police. Enfin, j'aimerais faire remarquer, contrairement à ce que prétend le rapporteur de minorité, que les avantages de ce projet de loi ne se limitent pas au confort des personnes chargées de relever les données dans les radars. Déjà, je ne parlerais pas de confort mais de sécurité. Assurément, l'intérêt principal de ce projet de loi se situe au niveau de la fiabilité des données, et également du contrôle interne. C'est justement l'un des points faibles du DSPE, qui pourrait être amélioré. Aujourd'hui, ces données sont traitées dans des tableaux Excel et les fonctionnaires, qui n'ont pas les outils adéquats pour accomplir leur travail, doivent faire diverses manipulations - copier-coller, etc. - ce qui peut conduire à la perte ou à la modification de données. Nous parlons donc bien ici d'efficience de l'Etat, et je vous remercie d'accepter ce projet de loi.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets l'entrée en matière du projet de loi 10619.
Mis aux voix, le projet de loi 10619 est adopté en premier débat par 42 oui contre 23 non et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 6.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, dans la mesure où il n'y a pas l'unanimité du Bureau pour demander le troisième débat, ce point sera renvoyé à la prochaine séance du Grand Conseil.
Troisième débat: Session 11 (septembre 2011) - Séance 66 du 22.09.2011
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je lève la séance. Bonne fin de journée !
La séance est levée à 18h50.