Séance du
vendredi 18 mars 2011 à
17h05
57e
législature -
2e
année -
6e
session -
32e
séance
R 626
Débat
M. Stéphane Florey (UDC). Au printemps 2010, nous apprenions par la presse que sept Villes, dont Genève, Onex, Vernier, Carouge, Lancy, Plan-les-Ouates et Meyrin, adressaient une résolution au Conseil d'Etat, demandant d'assouplir sa pratique concernant l'engagement d'apprentis étant sans papiers. Voici ce qui était extrêmement désagréable dans cette affaire... (Brouhaha.)
Premièrement, les conseils administratifs de ces Villes auraient pu, au moins, chacun, avoir la décence d'en aviser son conseil municipal et de lui demander son avis, car je sais qu'il y a eu pas mal de débats à ce sujet, notamment à Lancy, et que de nombreuses interrogations sont apparues dans d'autres communes.
Deuxièmement, cette résolution adressée par les Villes consiste à demander au Conseil d'Etat de se mettre hors la loi ! En effet, elle demande de pouvoir engager des sans-papiers, ce que nous, à l'UDC, ne pouvons bien évidemment pas accepter. En plus de cela, non seulement elles demandent, comme je viens de le dire, à l'Etat de se mettre hors la loi, mais elles se mettent elles-mêmes hors la loi en engageant des apprentis sans papiers.
C'est pour cela que nous avons déposé cette proposition de résolution, qui demande justement au Conseil d'Etat de ne pas assouplir sa pratique en la matière.
Je dirai encore deux mots sur l'amendement qui a été déposé par MM. Barrillier et Jeannerat. Bien entendu, nous l'accueillons favorablement, puisqu'il est évident que, s'il devait y avoir une éventuelle modification du droit fédéral, nous ne pourrions que prendre acte de cette pratique. Mais ce qui est paradoxal dans cette histoire, c'est que, si la loi devait être modifiée... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...le courrier et cette résolution n'auraient plus lieu d'être.
Maintenant, il faut bien savoir que c'est effectivement au niveau fédéral que ce problème doit se régler et que les débats sont encore loin d'être terminés. Le jour où une modification du droit fédéral sera présentée aux Chambres, bien évidemment, l'UDC ne manquera certainement pas, à l'occasion, de lancer un référendum concernant cet éventuel changement de droit.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Stéphane Florey. C'est pour cela que nous vous invitons à accepter l'amendement proposé par le groupe radical, à accepter cette résolution et à la renvoyer directement au Conseil d'Etat.
M. Gabriel Barrillier (R). Cher collègue, je crois que mon préopinant a bien expliqué la situation. Ce Conseil a abordé cette question à plusieurs reprises ces dernières années; c'est un problème délicat, il faut le dire. (Brouhaha.) Aujourd'hui, nous devons décider si nous acceptons ou pas cette proposition de résolution.
Effectivement, le groupe radical a déposé un amendement, étant donné que le parlement fédéral - sauf erreur les deux Chambres - a accepté une motion genevoise. (Brouhaha.) Les PDC discutent entre eux, mais je crois qu'elle provient de leur groupe. Dans la mesure où le parlement fédéral, c'est-à-dire le niveau national, a l'intention de régler cette problématique, qui, encore une fois, est très délicate, pose des tas de problèmes - de priorité - dans la formation professionnelle, l'apprentissage, il est évident que le canton de Genève ne va pas prendre des initiatives qui soient contraires au niveau supérieur.
C'est la raison pour laquelle le groupe radical a déposé la demande d'amendement que vous avez sous les yeux, qui ajoute, à la fin de l'invite, le membre de phrase suivant: «dans l'attente d'une éventuelle modification du droit fédéral.» Nous vous invitons à accepter cet amendement. S'il est adopté, il est évident que nous voterons la résolution dans son ensemble.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). Cette proposition de résolution date de juin 2010, qui est exactement le mois où a été acceptée une motion de l'un de nos anciens collègues députés au Grand Conseil, M. Barthassat. En fait, deux motions provenant du canton de Genève ont été discutées au Conseil national, dont celle de M. Barthassat, qui a été acceptée, demandant effectivement que le parlement fédéral élabore une loi - car, maintenant, c'est ce qui a été décidé - qui résolve, par rapport à leur formation, le problème des personnes et des jeunes étant sans papiers.
Pour rappel, la Suisse a signé, il y a vingt ans, la Convention internationale des droits de l'enfant et, quelques années auparavant, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui stipule que tout enfant a droit à un enseignement - cela figure en son article 13. Il précise aussi que «l'enseignement secondaire, sous ses différentes formes, y compris l'enseignement secondaire technique et professionnel, doit être généralisé et rendu accessible à tous.» Par conséquent, si je me réfère aux droits de l'Homme et au droit supérieur, la Suisse, qui a signé ce pacte, doit s'y référer et le faire appliquer. En Suisse, l'enseignement est un droit cantonal; donc le canton doit accepter le droit fédéral et, en plus, se soumettre au droit supérieur, à savoir les textes internationaux. Voilà pour le rappel de la situation. (Brouhaha.)
A Genève, pour mémoire, pas plus tard qu'il y a un mois et demi, une réunion a eu lieu au sujet du problème de l'accès à l'apprentissage, par les sans-papiers. A peu près 150 personnes se sont rendues à cette demi-journée de discussion, ce qui veut dire que non seulement le problème existe, mais qu'il est aussi reconnu comme étant le maillon faible de la formation. Pourquoi les jeunes, qui ont droit à une formation scolaire primaire et secondaire - c'est très important pour les jeunes - n'auraient-il pas...
Le président. Il vous faut songer à finir, Madame la députée.
Mme Brigitte Schneider-Bidaux. ...dans la même veine, droit aussi à un apprentissage, puisque cela fait partie de la formation ?
Je vous rappelle que notre parlement a soutenu une résolution, il y a quelques mois, par rapport au problème de l'apprentissage qu'effectueraient des sans-papiers, et qu'il l'a renvoyée au Conseil fédéral.
Le président. Il vous faut conclure, Madame la députée !
Mme Brigitte Schneider-Bidaux. C'est pourquoi je vous demande de refuser clairement et catégoriquement cette résolution. (Remarque.)
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, le parti démocrate-chrétien ne peut évidemment pas soutenir cette proposition de résolution, cela pour plusieurs raisons. D'abord, nous avons été à l'origine de la motion demandant que les jeunes sans-papiers scolarisés à Genève puissent avoir accès à un apprentissage, et nous restons convaincus du bon sens qui sous-tend cette motion; ensuite, nous avons été relayés avec succès, à Berne, grâce à Luc Bartassat. Notre conseiller national a réussi à convaincre tous les milieux de bon sens. Non seulement le Conseil national, mais aussi le Conseil des Etats a soutenu les résolutions et les motions concernant les jeunes sans-papiers. Troisièmement, nous restons convaincus que l'hypocrisie a assez duré et que les apprentis sans papiers, de même que leurs parents, ne sont pas récompensés en étant illégaux, ils sont juste là pour faire les travaux que nous ne voulons pas effectuer et qui sont essentiels à notre économie, notamment la garde d'enfants et de personnes âgées. C'est une grande méconnaissance des besoins de notre économie que de persister à vouloir les empêcher d'accéder à des formations.
Nous rejetons cette résolution, qui est totalement caduque et, aussi, totalement inadaptée à la réalité genevoise.
Mme Céline Amaudruz (UDC). «Cette résolution est inadaptée à la vie genevoise»... Je crois que Mme von Arx-Vernon devrait se renseigner un peu sur la façon dont, actuellement, nous pouvons engager des apprentis. Car, à l'époque, si les apprentis pouvaient venir de manière assez aisée au sein de diverses entreprises, aujourd'hui, les employeurs doivent suivre une formation de plus de septante heures afin de pouvoir prendre des apprentis ! Il est évident que les privés ne vont pas être en mesure de suivre cette formation, donc le nombre de place va se restreindre.
Je ne peux pas comprendre ni concevoir que, aujourd'hui, on préfère privilégier des gens qui sont de manière anormale - sans situation - et de manière illégale en Suisse, au lieu d'accepter des personnes se trouvant en Suisse de manière légale et qui ont le droit de pouvoir travailler et espérer avoir une place de travail.
Pour tous ces motifs, je vous prierai de bien vouloir suivre cette résolution.
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, une remarque. Une résolution, votée par cinq groupes sur sept dans ce plénum - évidemment sans le MCG ni l'UDC - demandant de créer la base légale sur cette problématique, a été renvoyée à Berne. Deuxièmement, au niveau Suisse, une motion déposée par deux Genevois a été votée pour régler cette question.
Mais, Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes vraiment hypocrites - et je m'adresse à ceux qui ont déposé cette motion. Vous êtes hypocrites pour plusieurs raisons. D'abord, cela vous arrange, maintenant, d'avoir dans vos listes des gens issus de l'immigration; vous êtes tout contents de les mettre en avant, vous êtes tout contents de drainer ces voix de l'immigration. (Brouhaha.) Beaucoup d'entre eux font partie de ceux qui, au départ, étaient aussi des clandestins ! Moi, j'étais clandestine, ici ! Eh bien, je vais vous dire: ils seront tout contents de savoir que vous, vous les méprisez ! Et, en même temps, vous ne leur donnez aucune chance. Car, après, vous viendrez nous dire que ces gens-là vont traîner dans les quartiers et qu'il faut les jeter dehors. Vous ne leur donnez aucune chance, parce que vous ne leur donnez même pas la possibilité d'exercer un métier. C'est inacceptable ! C'est une hypocrisie qui est inacceptable à Genève. A Berne, on a voté. Mais, à Genève, on est en pleine multiculturalité: c'est cela qui fait la richesse de ce pays, ce sont les étrangers.
Vous savez ce que c'est d'être clandestin ? Vous savez ce que c'est de se lever tous les matins et d'aller travailler en ayant peur - la peur au ventre - de se faire arrêter ? Pourtant, certains sont là depuis des années ! Ils ont des enfants, qui vont à l'école. Mais, in fine, on de donnera pas à ces gens la possibilité de pouvoir faire un apprentissage ou des études supérieures. C'est inadmissible ! Vous êtes hypocrites, parce que, quand cela vous arrange, vous avez besoin des émigrés, mais, quand cela ne vous arrange pas, vous leur fermez la porte.
Le parti socialiste refusera bien évidemment cette résolution, mais également l'amendement du parti radical. (Applaudissements.)
Présidence de M. Pierre Losio, premier vice-président
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Eric Stauffer, pour trois minutes.
M. Eric Stauffer (MCG). Monsieur le président, vous transmettrez à Mme la députée socialiste que multiculturalité ne doit pas rimer avec illégalité. Certes, à Genève, nous avons environ 40% d'étrangers, mais 40% d'étrangers respectueux du pays qui les a accueillis en parfaite légalité. Je ne comprends pas comment une partie de ce parlement, notamment un parti qui se dit de l'Entente... Quoique, vous me direz, jusqu'à récemment, c'était de droite ! Mais enfin, c'est vrai que l'on peut se poser la question, ces jours.
Cela étant dit, nous avons déjà, à Genève, toutes les peines du monde à trouver des places d'apprentissage pour nos résidents, sous-entendu nos résidents légaux. Or, aujourd'hui, vous voulez procéder à une ouverture et transmettre un message à toute la communauté internationale, consistant à dire: «Venez ici, on va former vos enfants et on va leur donner des apprentissages.» Mais je vous le dis, Mesdames et Messieurs, les hypocrites, ce sont vous ! Vous créez des conditions de travail inacceptables pour les parents, qui se sacrifieront pour leurs enfants ! Alors les vrais hypocrites, dans ce parlement, ce sont bien ceux qui, aujourd'hui, veulent qu'il y ait des places d'apprentissage pour les illégaux.
Si vous voulez faire quelque chose d'intelligent, vous modifiez le droit fédéral et vous intégrez ces gens en parfaite légalité ! Là, vous serez cohérents et honnêtes ! Mais, en attendant, vous êtes malhonnêtes ! En effet, par rapport aux gens qui travaillent au noir, on a entendu Mme von Arx-Vernon dire: «Ces besognes, on en a besoin pour l'économie.» Et encore une hypocrite de plus ! Parce que ces gens acceptent n'importe quelles conditions de travail et se sacrifient pour leurs enfants ! Vous dites que vous êtes pour le bien des familles ? Non, Madame, vous n'êtes pas pour le bien des familles !
Et c'est là que l'on doit s'insurger. Cette résolution doit être acceptée, avec l'amendement des radicaux. Si vous avez quelque chose à modifier, on vous l'a toujours dit, si vous faites un projet de loi pour intégrer une quantité de sans-papiers parce que l'économie en a besoin, vous trouverez certainement le soutien du MCG ! Mais pas dans ces circonstances, parce que vous favorisez des conditions de travail inacceptables ! La plupart des sans-papiers, les parents, n'ont pas d'assurance sociale, n'ont aucune couverture... (Remarque.) Une partie en a, mais pas tous ! Vous le savez ! Vous avez pu les quantifier, Madame la députée socialiste ? Vous avez la liste des sans-papiers à Genève ? Ah, c'est intéressant, il faudrait peut-être la donner à la police des étrangers, pour voir si, effectivement, ils ont tous des prestations sociales !
Non mais, arrêtez de vous moquer du monde ! Soyez respectueux de ces familles qui, dans leur pays, souffrent ! Vous savez très bien que la Suisse destine des centaines de millions de francs à l'aide internationale dans ces pays. C'est par là que l'on va régler le problème, pas en le prenant à l'envers...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. Je conclus, Monsieur le président. ...pas le prenant à l'envers ! Et surtout, Monsieur le président, vous transmettrez ceci à ma préopinante - qui devrait être plus à la page, car elle est issue de l'immigration, et son exemple est bien la preuve que l'on peut s'intégrer en Suisse et devenir même présidente du Grand Conseil, avec tout l'honneur que cela peut représenter - eh bien, je n'admets pas que l'on puisse se comporter ainsi, en prônant l'illégalité et en faisant preuve d'hypocrisie par rapport aux parents, qui, eux, travailleront dans des conditions détestables et sans couverture sociale ! Il faut soutenir cette proposition de résolution ! (Applaudissements.)
M. Stéphane Florey (UDC). J'ai entendu parler de la Convention des droits de l'enfant. J'aimerais juste vous dire que la Convention des droits de l'enfant n'est pas applicable par rapport au droit national. Ce que je veux dire par là... (Brouhaha.) ...c'est que ce n'est pas parce que la Suisse a signé la Convention des droits de l'enfant qu'elle doit s'asseoir sur ses propres lois et accepter de donner des statuts pseudo-légaux à des illégaux.
Mais, Monsieur le président, vous transmettrez à Mme Bolay qu'elle incarne parfaitement la multiculturalité. Mme Bolay a un statut légal et un travail; elle paie ses impôts. C'est cette multiculturalité que l'UDC veut ! Pas celle des tricheurs et des illégaux.
M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, notre collègue Loly Bolay a eu raison d'insister sur la richesse que constitue pour Genève la présence d'immigrés, qui ont d'abord, pour certains d'entre eux, vécu dans la clandestinité. Mais j'aimerais ajouter que la richesse de Genève est faite par tous ses habitants. Elle est aussi faite par ceux qui vivent dans la légalité. Elle est même faite par ceux qui sont nés ici et qui sont genevois d'origine. Donc, dans votre définition de la richesse de Genève, incluez par générosité d'âme tous ceux qui sont des travailleurs et des habitants de ce canton ! Je ne suis pas sûr d'avoir compris que vous ayez pensé à eux tout à l'heure.
J'aimerais encore ajouter que, dans votre présentation, vous avez oublié de rappeler - et je parle ici à une représentante d'un parti qui est très attaché au respect des procédures et de la légalité, y compris lorsqu'il s'agit de signer une motion sur le latin et au sujet de laquelle il faut plusieurs caucus pour réussir à se mettre d'accord... Mais je m'écarte de mon sujet, Monsieur le président... (Remarque.) J'en reviens au fait que je ne comprends pas que le parti socialiste, si attaché au respect de la légalité, et notamment de la légalité qu'elle exige des employeurs, de ceux qui concluent des contrats de travail, propose en réalité, par cette position qui a été défendue ici, d'enjoindre, de conseiller, de recommander aux employeurs de violer la loi. Pourtant, il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures. Lorsque l'on est en faveur du respect de la loi et de la légalité, l'on est en faveur de ce respect-là dans toutes les circonstances, y compris dans les circonstances qui sont celles, difficiles, que nous connaissons ici. Ces dernières devraient par conséquent pousser le groupe socialiste à accepter ce qui est proposé par l'amendement de mes collègues Barrillier et Jeannerat: «dans l'attente d'une éventuelle modification du droit fédéral.» En effet, là il y a effectivement l'important, là il y a le rappel de ce qu'il en est du droit futur, tel qu'il se dessine, à l'impulsion - qui nous a été rappelée, avec le sens de la répétition tout à fait adéquat, par Mme von Arx-Vernon - du rôle positif joué par un conseiller national PDC genevois.
Cela étant, j'aimerais aussi ajouter, à l'intention de notre collègue UDC, que les raisons qu'elle a évoquées tout à l'heure, du nombre d'heures de formation pour les employeurs afin qu'ils puissent instruire les apprentis, ne jouent strictement aucun rôle dans la question qui nous est posée ici. Je me suis demandé si elle avait véritablement une connaissance du dossier quand elle s'est prononcée. Je pense que...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Pierre Weiss. Je conclurai par là. Je pense qu'elle aurait plutôt pu évoquer ce qui se passerait s'il y avait un échec de ces sans-papiers aux examens d'apprentissage, de même que ce qui se passerait en particulier, une fois qu'ils ont réussi, concernant l'obtention d'un permis de séjour et d'un permis de travail.
Je conclurai simplement en disant que nous ne pouvons - concernant le groupe libéral, comme le groupe radical - accepter de soutenir cette... Quel est cet instrument, au fond ? ...cette proposition de résolution, seulement si les groupes qui l'ont déposée adoptent l'amendement présenté par le groupe radical. A défaut, nous nous y opposerons.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la députée Anne Marie von Arx-Vernon, à qui il reste une minute et dix secondes.
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). J'aimerais juste rectifier quelques énormités. Il est important de savoir qu'à Genève, dans certains domaines d'apprentissage, il reste des places vacantes. Savez-vous pourquoi, Monsieur le président ? Eh bien, parce que ce n'est pas forcément chez nos jeunes que l'on trouve les plus motivés, les plus courageux et les plus concernés par ce type d'apprentissage, et qu'effectivement, aujourd'hui, des patrons seraient tout à fait disposés à engager des jeunes motivés, travailleurs, courageux, qui peuvent être aussi sans papiers, Monsieur le président.
Maintenant, il est important que l'on puisse se poser la question quant à ceux qui refusent de prendre en considération cette réalité ! Car, dans le fond, cela les arrange bien d'avoir des travailleuses et des travailleurs sans papiers ! Ce sont ceux-là mêmes qui dénoncent aujourd'hui leur présence ici qui les exploitent le plus, pour leurs entreprises, pour leur famille, pour leur ménage, et qui finalement les sous-paient ! Donc l'arroseur est arrosé. Les esclavagistes sont ceux qui veulent maintenir ce statut - dans la clandestinité - et qui veulent aussi que ces personnes, surtout, ne revendiquent rien ! Mais nous, nous sommes pour les payer au juste prix, pour qu'ils puissent défendre leurs droits, pour qu'ils bénéficient d'un accès, au même titre que les autres travailleurs et travailleuses qui résident à Genève, parce que nous sommes tous utiles à la progression et à l'évolution de Genève. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. le député Marc Falquet, à qui il reste une minute et dix secondes.
M. Marc Falquet (UDC). Je voudrais dire simplement une chose: il faut arrêter de glorifier le travail au noir. Le travail au noir a énormément d'effets pervers sur ceux qui travaillent au noir et sur ceux qui ne travaillent pas. Il y a des milliers de personnes au noir, maintenant, qui ne trouvent pas de travail à Genève, et il y a des milliers de personnes qui ont un permis - des femmes de ménage - qui ne trouvent plus de travail ! Vous pouvez le contrôler auprès de l'office cantonal de la population.
Par ailleurs, je voudrais ajouter ceci: l'UDC n'en a pas contre les étrangers. L'UDC n'a rien du tout contre les étrangers ! L'UDC est pour qu'on commence à appliquer la loi, simplement. Appliquer la loi sur les étrangers résoudra bien des problèmes ! Il ne s'agit pas de renvoyer les gens, comme cela, mais de commencer à appliquer la loi. Voilà tout ce que je voulais dire.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Lydia Schneider Hausser, qui dispose de trente secondes.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Légalité, illégalité, droit supérieur, droit mondial, mondialisation, travail au noir... Mesdames et Messieurs, la réalité est que Genève vit actuellement avec des Suisses et des gens qui ont des statuts, des permis, bien sûr, mais il y a aussi ces personnes dites «illégales», qui existent, qui sont là et qui font fonctionner Genève. (Commentaires.) Par rapport à cette réalité, Genève a déjà fait des efforts: l'accès à l'école. Mais on ne peut pas se voiler la face, les jeunes se trouvent dans une impasse.
Le président. Il vous faut faire l'effort de conclure, Madame la députée.
Mme Lydia Schneider Hausser. Oui, merci, Monsieur le président. Genève est un canton attractif pour des millionnaires; Genève est attractif également pour des gens sans statut légal. Ce n'est pas une raison pour ne pas avoir de respect envers la jeunesse, envers ceux qui prendront peut-être notre relève, étant donné qu'en tant que Suisses nous n'avons pas assez d'enfants pour prendre la relève... (Commentaires.) ...d'une économie...
Le président. Madame la députée, vous n'avez pas entendu...
Mme Lydia Schneider Hausser. ...qui existe.
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Lussi, vous avez la parole: il vous reste vingt secondes.
M. Patrick Lussi (UDC). Ce sera suffisant pour relever qu'il est quand même facile de jeter l'anathème et de dire «hypocrites» à propos de gens qui ont simplement exprimé la vérité. Est-il hypocrite de dénoncer la réalité, imposée par les bancs de gauche ? Et par un laxisme pseudo-humaniste, Madame ! En effet, accueillir des sans-papiers et vouloir l'illégalité n'a jamais été le fait de l'UDC. On demande que les gens qui sont là soient légaux. Tous ceux qui sont légaux sont acceptés ! Mais c'est vous qui favorisez l'esclavage de ces pauvres gens. Ayons le courage de le dire, et acceptez cette résolution !
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il est bon, lorsque l'on examine le texte d'une résolution, que vous vous apprêtez à voter ou à refuser, de bien comprendre dans quelle situation on se trouve. J'aimerais rappeler certains faits qui président à la situation des sans-papiers. (Brouhaha.)
Premièrement, il y a aujourd'hui des lois fédérales, qui sont ce qu'elles sont et qui sont appliquées dans notre canton. J'ai entendu ici ou là que l'on appelait à l'application des lois. Le Conseil d'Etat a pour fonction principale de veiller à l'application des lois; et les lois sont appliquées.
Cela étant, le Conseil d'Etat pense que la loi fédérale en la matière n'est pas satisfaisante. C'est pour cela que nous nous sommes réjouis du vote de la motion de M. le conseiller national Barthassat à l'Assemblée fédérale. Elle appelle le Conseil fédéral à faire évoluer le droit pour trouver une solution nationale en lieu et place de solutions cantonales qui ne sont pas les mêmes selon que vous habitez Genève, le canton de Vaud ou le reste de la Suisse. La situation des apprentis sans papiers, la situation des jeunes sans statut légal, est aussi difficile à Genève, Lausanne, Zurich ou n'importe où ailleurs en Suisse. Nous appelons ainsi à une solution nationale, comme l'a proposé le conseiller national Barthassat, soutenu par une grande majorité de l'Assemblée fédérale. (Brouhaha.)
Ensuite, nous avons expliqué aux communes qui nous demandaient de ne pas appliquer la loi qu'elles étaient priées de le faire. Le Conseil d'Etat a expliqué clairement aux signataires de cette lettre, et en particulier à Mme Salerno, qui appelait à la discrimination positive en faveur des sans-papiers, que cela n'était pas acceptable. Le Conseil d'Etat applique les lois, et il les applique d'autant plus que Genève a réussi à négocier avec la Confédération des solutions qui ont permis de résoudre les situations les plus délicates.
Mesdames et Messieurs, lorsque des jeunes sont nés en Suisse, sans statut légal, et y ont fait l'ensemble de leur scolarité ou une partie prépondérante de celle-ci, ils peuvent aujourd'hui obtenir l'autorisation de suivre des apprentissages. Mais ils l'obtiennent parce que nous négocions avec la Confédération des solutions au cas par cas. Ces solutions au cas par cas, je l'ai dit, ne sont pas satisfaisantes, parce que nous souhaiterions une réponse globale. Ces solutions existent cependant et sont conformes à la loi. Nous avons l'avantage et le privilège d'entretenir des relations de confiance avec la Confédération, qui nous donne les autorisations nécessaires. Dans l'intervalle, et en attendant que le Conseil fédéral prépare une solution nationale qui ait l'agrément de tous et soit votée par l'Assemblée fédérale, nous nous en tiendrons à l'application stricte de la loi.
Je vous répète que, depuis le temps où cette résolution a été déposée, nous avons répondu au courrier des communes. Les communes, et notamment les magistrats exécutifs, que cela leur plaise ou non, sont priés d'appliquer la loi, comme nous l'appliquons nous-mêmes. Dans l'intervalle, nous sommes prêts à étudier toutes les situations pour porter devant les services fédéraux des régularisations individuelles, que nous obtenons avec une certaine facilité précisément parce que nous présentons des dossiers établis: ceux des gens qui peuvent démontrer qu'ils ont passé une partie prépondérante de leur scolarité à Genève.
J'aimerais conclure en vous rappelant un principe cardinal du Conseil d'Etat, de l'ensemble des membres du Conseil d'Etat, toutes colorations politiques confondues ces vingt dernières années. Une chose est sûre, sur laquelle nous ne reviendrons jamais: tout enfant qui est dans notre canton ne doit pas être victime de son statut légal pour accéder à l'éducation. Il y a un droit universel des enfants à accéder aux éléments les plus essentiels de l'enseignement. Sur ce point, nous n'avons jamais varié, il n'a jamais été question de varier, et nous ne varierons pas. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous passons au vote de l'amendement déposé par nos collègues Barrillier et Jeannerat. Il s'agit d'une modification de l'invite, nouvelle teneur, consistant à ajouter, à la fin du texte, les mots suivants: «dans l'attente d'une éventuelle modification du droit fédéral.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 53 oui contre 29 non et 5 abstentions.
Le président. Nous nous prononçons à présent sur le renvoi au Conseil d'Etat de la résolution amendée.
Mise aux voix, la résolution 626 ainsi amendée est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 51 oui contre 34 non.
Présidence de M. Renaud Gautier, président