Séance du
jeudi 27 janvier 2011 à
20h30
57e
législature -
2e
année -
4e
session -
20e
séance
IN 144 et objet(s) lié(s)
Débat
M. André Python (MCG), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, cette initiative présente un problème avec les articles constitutionnels 160A et 160B de la constitution genevoise. Il est dit entre autres que l'on ne saurait faire en sorte que la mobilité douce prime les autres modes de déplacement. Or l'article 2, alinéa 4, de l'IN 144 prévoit que «la régulation des carrefours est conçue pour encourager la mobilité douce». (Brouhaha.)
Une voix. Plus fort !
Le président. Monsieur le député, je vous suggère - vous connaissez le côté turbulent de cette salle - de bien parler dans le micro, si je puis m'exprimer ainsi, de façon que chacun puisse profiter de vos propos.
M. André Python. Merci, Monsieur le président. Je disais que l'article 2, alinéa 4, de l'IN 144 prévoit que «la régulation des carrefours est conçue pour encourager la mobilité douce», ce qui veut bien dire que l'on souhaite faire en sorte que les piétons et les cyclistes priment les moyens de déplacement privés et publics, comme les TPG.
Or que remarque-t-on en ville ? Que les carrefours déjà aménagés et équipés avec feux à la demande pour les piétons et cyclistes ne sont absolument pas respectés par ces derniers. Il n'est pas rare d'assister à des situations absurdes où les piétons traversent au rouge devant les voitures obligées de s'arrêter au vert afin de ne pas les renverser. Quant aux cyclistes, il suffit d'observer un carrefour pendant plusieurs minutes pour s'apercevoir que les feux rouges ne semblent pas les concerner. Combien d'automobilistes sont-ils restés arrêtés à un feu rouge alors que les piétons n'avaient pas attendu, après avoir appuyé sur le bouton, que la phase verte leur soit accordée ?
De plus, il n'y a aucune estimation de coût de l'initiative de la part des initiants. Il existe environ 200 km de réseau primaire et 210 de réseau secondaire. Il resterait environ 170 km à réaliser, et l'on parle d'un coût d'environ 1 million par kilomètre.
L'initiative prévoit entre autres de transformer dans les huit ans à venir tous les axes primaires et secondaires et les carrefours, ce qui va générer des travaux dans toute la république. N'avons-nous pas suffisamment de chantiers ouverts ? Les citoyennes et citoyens apprécieront !
Les communes font déjà d'énormes efforts en matière d'aménagement pour la mobilité douce, sans avoir besoin de la contrainte de cette initiative. Cette dernière fait également doublon avec le plan directeur de la mobilité douce qui va être déposé par le Conseil d'Etat.
Pour rappel, des itinéraires et des bandes cyclables ont été mis en place en ville, à grands frais. Or que remarque-t-on ? Que ces itinéraires ne sont pas suivis. Les bandes cyclables à contresens dans les rues sont dangereuses. Et malgré le pont des Bergues réservé aux cyclistes et aux piétons, c'est le pont du Mont-Blanc qui est utilisé, et l'on parle même d'y mettre une piste cyclable sur une parcelle jouxtant le pont, pour 14 millions de francs, selon M. Delacrétaz. Vous pouvez le lire à la page 12 de mon rapport. Quelle serait l'utilité d'aménager des infrastructures pour la mobilité douce sur des routes prévues pour détourner le trafic poids lourds, par exemple la route de Peney, ou dans des zones industrielles ? Le texte proposé ne semble pas adéquat. Ce n'est pas en fixant que chaque route doit comporter une piste ou une bande cyclable que l'on va améliorer la situation des cyclistes. Souvent, lorsqu'il est peint des bandes cyclables de chaque côté de la route, au centre de la chaussée il n'y a pas la place pour que deux voitures puissent se croiser.
Pour l'ensemble de ces motifs, la majorité de la commission vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de rejeter cette initiative.
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais commencer avec un chiffre. En 2010, 50% des personnes qui ont perdu la vie sur les routes genevoises étaient des cyclistes ou des piétons. (Commentaires.) Quand on connaît la part modale du vélo et des piétons, on voit que ce sont véritablement les usagers les plus vulnérables et qu'il faut donc les protéger. C'est le rôle de l'Etat. Un autre constat, que tout le monde a pu faire, est l'engorgement sur les routes genevoises. Il est donc nécessaire de développer des modes de transport moins gourmands en espace. L'Etat le fait déjà largement, avec un fort développement des transports publics sur ces dix dernières années. Il est temps maintenant de développer la mobilité douce, qui occupe encore moins d'espace et qui, en plus, est bonne pour la santé, puisque l'on sait que dans notre société beaucoup de gens souffrent de maladies liées à la sédentarité.
Cette initiative a également le mérite d'être une application et une concrétisation du libre choix du mode de transport, tel qu'il est énoncé à l'article 160A de la constitution et que l'on entend très souvent évoquer dans cette assemblée, car, sans sécurité, il n'y a pas de liberté. Or, aujourd'hui, de nombreux usagers de la route ne jouissent pas du libre choix, car ils ne se sentent pas en sécurité et n'osent pas se déplacer à pied ou à vélo. Sur ce point, j'aimerais rectifier l'un des propos du rapporteur de majorité, qui dit que l'initiative serait contraire à la constitution car elle tend à prioriser la mobilité douce. C'est faux, puisqu'elle parle d'«encourager» la mobilité douce aux carrefours et non pas de la prioriser.
Ajoutons encore à cela que l'Etat est en train de mettre en place un système de vélos en libre service, ou Vélib', avec la collaboration des TPG. Dès l'année prochaine, ce seront ainsi 1200 vélos qui seront mis à disposition des gens, des cyclistes donc débutants, qui n'ont pas forcément l'habitude de se déplacer dans le trafic. Nous avons véritablement besoin d'aménagements adéquats.
Concernant les coûts entraînés par cette initiative, nous avons entendu un peu tout et son contraire. Mais finalement, il est ressorti des travaux de la commission que le coût serait d'environ 80 millions pour compléter le réseau, puisqu'il s'agit bien, non pas de construire un réseau de pistes cyclables et de cheminements piétons depuis le départ, mais de compléter les lacunes qui existent dans le nôtre. Consacrer 10 millions par an pendant huit ans, Mesdames et Messieurs, lorsque l'on sait que les investissements de l'Etat représentent 600 millions pour 2011, ce n'est pas cher payé pour assurer la sécurité des cyclistes et des piétons.
Cette initiative est constructive. Elle ne propose pas d'interdire, mais de donner de nouveaux choix. Elle ne demande pas de priorité, mais un traitement équitable entre les différents modes de transport. Elle est en application de la constitution. Elle répond à des questions de sécurité, mais aussi d'utilisation rationnelle de l'espace et plus généralement d'amélioration de la qualité de l'air. Enfin, elle correspond à une véritable volonté de la population de se déplacer différemment, selon son libre choix. Cette initiative est modérée et il y a urgence à sécuriser les usagers de la route les plus vulnérables. C'est pourquoi nous ne souhaitons pas d'un contreprojet, qui ne serait fait que de demi-mesures et qui repousserait le vote populaire d'une année.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les députés, d'accepter cette initiative et, si vous deviez la refuser, de renoncer au principe d'un contreprojet, afin de laisser la population genevoise se prononcer rapidement. (Applaudissements.)
M. Antoine Bertschy (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Vous aurez remarqué que je suis étrangement installé à côté du rapporteur de majorité alors que je représente la deuxième minorité. C'est pour une raison bien simple. Sur le fond, je suis d'accord avec le rapport de majorité, soit pour un refus de cette initiative. Par contre, mon rapport de seconde minorité diverge et rejoint à ce moment-là la minorité, c'est-à-dire qu'il refuse un contreprojet. (Remarque.) Ce n'est pas une question d'extrêmes, mais d'intelligence dans ce dossier. Nous avons une initiative qui nous propose de construire des pistes cyclables dans un délai de huit ans sur l'ensemble de la voirie genevoise. La majorité nous propose de concevoir un contreprojet. Qu'y aura-t-il dans ce contreprojet ? Nous ne le savons pas. Mais il n'y a pas grand-chose à proposer contre cette initiative. C'est soit nous acceptons cette initiative, soit nous la refusons.
Le groupe UDC, que je représente - et je pense que d'autres personnes le suivront - dit non à cette initiative, parce qu'elle est totalement irréaliste et extrêmement destructrice pour la mobilité; j'y reviendrai peut-être par la suite. Cela ne sert à rien de voter cette initiative, ni le principe d'un contreprojet; nous ne pouvons rien opposer à cela. C'est soit la situation actuelle, qui convient parfaitement, soit cette initiative.
Je voudrais rappeler à nos amis du MCG, qui ont été extrêmement intelligents lors de la votation du 28 novembre, où nous avons voté pour une initiative UDC qui demandait le renvoi des criminels étrangers, que nous avons gagné le vote sur cette initiative, vous et nous, au niveau national. Pourquoi ? Parce que nous n'avons pas proposé un contreprojet bout de bois. Un contreprojet bout de bois, c'est-à-dire que le peuple ne sait plus quoi voter, donc il va voter une initiative. L'initiative qui nous est proposée, c'est l'IN 144 pour ces pistes cyclables. Je ne pense pas que ce soit un bon choix de voter pour ce texte. Il vaut mieux ne rien proposer contre cela, juste dire non, et puis en rester à la situation actuelle, qui va très bien. (Brouhaha.) Lorsque nous refaisons la voirie, que regardent les communes et l'Etat de Genève ? Ils regardent la voirie actuelle et disent: «Où pouvons-nous faire des passages pour les cyclistes ?» Et c'est adapté.
Le problème est que vous proposez, dans cette initiative... Monsieur le président, je suis désolé, parce qu'en fait je suis un rapporteur de deuxième minorité qui devrait dire non au sujet du rapport de majorité, mais je suis obligé de contrer cette initiative pour expliquer mon rapport de minorité. Cette initiative propose de réaliser, dans les huit ans, sur l'ensemble du territoire cantonal - c'est-à-dire 170 km - des pistes cyclables. Je vous laisse imaginer ce que cela signifie. Vous savez très bien que, lorsqu'il faut faire des projets, cela prend deux ans au niveau du Conseil d'Etat, un ou deux ans au niveau de notre parlement, et ensuite il restera quatre ans sur huit ans. Autrement dit, en quatre ans, vous allez ouvrir 170 km de voies publiques sur le territoire cantonal ! Nous ne pourrons donc plus circuler. Si vous avez aimé les travaux pour le tram... Les travaux pour le tram touchaient 2,8 km. Là, je vous parle de 170 km - 170 km, Mesdames et Messieurs ! - de voies publiques qui vont être ouvertes durant quatre ans ! Nous ne circulerons tout simplement plus sur ce canton. Et après, ce n'est pas pour circuler mieux; ce sera pour circuler moins bien. Nous ne pouvons donc simplement pas accepter cela.
Que peut nous proposer un contreprojet ? Un contreprojet ne peut rien nous proposer de plus, parce que, à l'heure actuelle, chaque fois qu'il y a une proposition de rénovation des voies, on regarde si l'on peut faire des voies pour la mobilité douce. La seule chose dont nous pouvons discuter, c'est la durée.
Le président. Il vous faut songer à conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Antoine Bertschy. Je vais y arriver ! Soit nous faisons cela dans les huit ans, comme c'est proposé par l'initiative, soit nous ne fixons pas de délai temporel. Et si nous ne fixons pas de délai temporel, c'est la situation actuelle; autant ne rien opposer. C'est pour cela que le groupe UDC vous propose un non à cette initiative, clair et net, parce que là nous sommes clairement dans une discussion entre les automobilistes et les cyclistes, qui représentent à peine 3% de la population. Quant à la situation actuelle, nous ne pouvons pas y opposer un contreprojet. Donc c'est non et non.
M. Alain Meylan (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais tout d'abord vous dire que, sur les objectifs de l'initiative, on l'a toujours dit au niveau du groupe et du parti libéral - c'est d'ailleurs dans notre programme de législature - nous sommes favorables à ce développement de la mobilité douce... (Rires.) ...dans un certain cadre. Au lieu de rire, relisez ! Je vous invite à relire notre prise de position. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) D'ailleurs, en commission, Mme Flamand l'a relevé...
Le président. Messieurs les Verts !
M. Alain Meylan. ...en toute objectivité, elle. (Remarque.) En préambule, je souhaitais dire ceci. Pourquoi sommes-nous contre cette initiative, en quelques points, et pourquoi, par conséquent, soutiendrons-nous le principe d'un contreprojet ?
Tout d'abord, j'aimerais que l'on parle de la clarté de cette initiative. Cette initiative mentionne des aspects qui devront être interprétés: «principaux arrêts de transports publics», «abords des lieux d'activités», «nombre suffisant»... Tous ces termes sont flous, sujets à caution, à discussion, et il faudra de toute façon, d'une manière ou d'une autre, les clarifier. Cette initiative doit donc l'être à ce point qu'elle ne peut pas sur ces termes-là être acceptée. Voilà pour le premier élément.
Le deuxième point est que l'on parle de la création - j'y reviendrai un peu par la suite - d'un plan directeur du réseau de mobilité douce. Celui-ci doit s'inscrire également dans une vision de l'aménagement du territoire, donc ne peut pas se séparer complètement de tout ce qui touche à l'approbation des plans au niveau de l'aménagement du territoire. Je ne fais que redire, relire et reprendre les propos du Conseil d'Etat, qui avait en son temps analysé cette initiative. Il l'avait approuvée du bout des lèvres - c'était d'ailleurs un Conseil d'Etat de gauche à l'époque - en amenant au sujet de cette initiative toute une série de critiques que je suis en train de relever.
Un autre point soulevé par le Conseil d'Etat à l'époque est la notion de routes primaires et secondaires, étant entendu, et il faut le préciser - ce n'est pas spécifié dans l'initiative - que l'on ne peut pas inscrire ni construire des pistes cyclables sur les routes nationales. Il y en a quelques-unes sur le plan cantonal. C'est peut-être mineur, mais il est utile de le préciser.
Le point suivant traité par cette initiative est le cheminement piétonnier. Mesdames et Messieurs, le législateur genevois a d'ores et déjà exécuté ses obligations fédérales en adoptant le 4 décembre 1998 la loi sur l'application de la loi fédérale sur les chemins pour piétons et les chemins de randonnée pédestre. La notion est donc superfétatoire dans cette initiative.
D'autre part, on parle de la constitutionnalité - Mme Flamand l'a relevé tout à l'heure - par rapport au libre choix du moyen de transport. Là aussi, un certain nombre de considérations sont amenées par le Conseil d'Etat, qui dit qu'il faut être très prudent - très prudent - afin de respecter la constitution à cet égard. Il indique par exemple, à la page 20 de son rapport IN 144-A: «Cela signifie notamment que l'IN 144 de rang législatif ne saurait faire primer la mobilité douce sur les autres modes de déplacement.» Et, Mesdames et Messieurs, je lis le terme «encourager» dans l'initiative, terme qui a d'ailleurs été un peu aseptisé, puisqu'il faut savoir que l'origine de cette Initiative des villes est actif-trafiC. Je vous propose, pour ne pas allonger le débat, d'aller lire leur site internet. C'est très clair, ce n'est pas encourager; c'est faire tout - et c'est ce qu'il y a derrière cette initiative en définitive. Les propos que transmet Mme Flamand sont un peu angéliques, sur le politiquement correct. Voilà le sous-entendu dans cette initiative. Et ce qui est malsain, en l'état, c'est précisément de profiter ou d'avoir cette arme pour limiter certaines choses et favoriser la mobilité douce.
On parle de 6% au niveau du vélo par rapport à la mobilité générale. (Remarque.) Donc cela veut dire que l'on va faire bénéficier 6% des utilisateurs de la voie publique d'une priorité par rapport à tous les autres. Et quand je dis «tous les autres», c'est le transport public également. Imaginez dans les carrefours, puisque l'on parle d'«encourager la mobilité douce» dans les carrefours... Quand je suis piéton ou cycliste, je m'arrête, j'appuie sur un bouton et on me donne le vert. Très bien, on peut l'imaginer. Simplement, il y a tout le transport privé qui est arrêté au feu rouge, les transports publics également. Les initiants n'arrêtent pas de nous dire que la vitesse commerciale des transports publics souffre, eh bien je ne vous dis pas les conséquences en termes de lenteur pour les transports publics.
On nous parle également, dans cette initiative, de résoudre ce problème en huit ans; 170 km en huit ans, cela fait beaucoup, c'est ambitieux. Mme Flamand a dit que, en commission, on avait évoqué 80 millions; cela n'a jamais été le cas. C'est une estimation des initiants. D'ailleurs, ils ne l'ont pas redit en commission, mais bref; certains parlent de 1 million par kilomètre, les initiants disent 80 millions. On est sans doute entre ces deux chiffres, entre 80 et 170 millions. Quoi qu'il en soit, en huit ans, on sait déjà que ce ne sera pas possible de faire ces 170 km de pistes cyclables. Par conséquent, dans cette initiative, on est en train de parler de quelque chose qui est irréalisable. Donc de ce côté-là, il n'est pas possible non plus d'admettre cette durée. D'ailleurs, Berne, qui ne passe pas pour une ville qui...
Le président. Monsieur le député, il vous faut songer à finir.
M. Alain Meylan. ...qui ne passe pas pour une ville insensible à la mobilité douce, a choisi de prévoir seize ans pour construire son réseau.
J'en viens au dernier point, Mesdames et Messieurs. Vous allez me dire: mais que reste-t-il à cette initiative ? Eh bien justement les points essentiels, sur lesquels nous, groupe libéral, sommes d'accord de travailler. C'est-à-dire que nous sommes d'accord de travailler sur des objectifs de construction de pistes cyclables, voire de bandes cyclables quand c'est nécessaire pour éviter des surcoûts, où cela n'est pas possible; de travailler sur des endroits où l'on peut déposer en toute sécurité des vélos, sur des espaces en ville et dans les communes où l'on peut construire ceci pour favoriser cette mobilité. Nous sommes d'accord, aussi, de travailler avec les communes. Le point du financement est important. On doit travailler avec les communes. Ce sont les communes qui doivent décider, dans un plan directeur, de ce qu'elles veulent faire, en évitant l'écueil...
Le président. Monsieur le député...
M. Alain Meylan. Je finis, Monsieur le président ! ...en évitant naturellement l'écueil de vouloir faire en sorte qu'un mode de déplacement prime un autre. C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, dans un but constructif et par rapport à tout ce que je viens de dire sur cette initiative, il faut la refuser. En revanche, il faut travailler pour un contreprojet dans le but d'améliorer la mobilité douce. (Applaudissements.)
M. Antoine Droin (S). Mesdames et Messieurs, quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. Quand on ne veut pas reconnaître que la mobilité évolue et que, inéluctablement, elle grandit et grandira de plus en plus, on développe quelques arguments dans une stratégie qui est très claire: reporter le plus loin possible l'inévitable. Alors l'inévitable, c'est quoi ?
C'est, en vertu des contraintes écologiques qui gouvernent la planète aujourd'hui, changer nos comportements et nos fonctionnements. C'est accepter la complémentarité des transports. Ce n'est pas le «tout à la bagnole». Ce sont des moyens acceptables pour tous les autres modes de transport, d'une manière cohérente. C'est considérer les autres actions constitutionnelles, notamment l'article 160E, mais on peut aussi citer le 160D, de mémoire, en lien avec les aspects écologiques. C'est considérer les espaces de mobilité douce comme une dynamique large, même internationale, puisque l'on voit que, aujourd'hui, des pistes cyclables relient la Méditerranée, par exemple, jusque chez nous par des chemins tout à fait intéressants à faire à vélo et par étape. C'est considérer que de modestes investissements sont nécessaires au regard des fortunes engagées depuis des décennies dans les transports polluants. Depuis une centaine d'années, on investit dans des routes. Si l'on mettait autant d'argent dans les autres transports, on irait beaucoup plus loin. Enfin, c'est considérer que 36% des habitants en ville n'ont plus de voiture, et que ce pourcentage ne cesse d'augmenter.
Le partage de l'espace public est donc indispensable, car tout un chacun est un piéton, tout un chacun est bientôt un cycliste, tout un chacun est souvent un automobiliste, tout un chacun est aussi dans les transports publics. Mais avant tout, ce sont les cyclistes, et de plus en plus, qui ont besoin de place disponible. On a défini des politiques de mise en place de vélos publics, notamment pour les touristes. La complémentarité est un moyen équilibré entre les modes de déplacement. Il est indispensable de concevoir des déplacements en fonction des besoins, des trajets, puisque l'on constate aujourd'hui que les trajets moyens sont longs de 3 à 5 km, des distances aisément faisables à vélo.
Donc s'opposer aujourd'hui à la stratégie, comme le fait la droite, et proposer un contreprojet, cela n'a à mon sens qu'un seul but: repousser une décision claire, volontariste et empreinte d'avenir. C'est reculer le plus loin possible des décisions qui iraient dans le sens d'une mobilité douce.
L'IN 144 est reconnue et approuvée par le Conseil d'Etat et par de nombreuses associations et acteurs progressistes. Elle est réaliste et permet d'assurer la sécurité pour tous, principalement cyclistes et piétons, qui sont, il faut quand même le relever, les tranches les plus vulnérables de la population en mouvement. J'invite donc la majorité à ne pas se voiler la face et à assumer ses responsabilités et les responsabilités d'avenir en matière de mobilité. Enfin, je dirai halte aux politiques rétrogrades et vous invite à suivre le rapport de première minorité et à refuser un contreprojet. (Applaudissements.)
Présidence de M. Pierre Losio, premier vice-président
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Le parti démocrate-chrétien soutient cette initiative. Il a été signataire et assume profondément ce choix. Pourquoi ? Parce que nous sommes, Monsieur le président, le parti du «et». Et pour le transport individuel, et pour la mobilité douce; et pour une cohabitation, un rééquilibrage entre la voiture et le vélo. Nous souhaitons qu'il y ait des scooters et des piétons qui vivent en bonne harmonie. Quant aux milieux économiques, qui pourraient s'étonner... Mais de quels milieux économiques parle-t-on ? En effet, on sait que, aujourd'hui, la méthode la plus rationnelle pour aller rapidement d'un point à un autre - ce qui est extrêmement utile lorsque l'on veut faire des affaires - est d'être parfois à vélo, voire à pied, plutôt qu'en voiture. C'est ce qui a été bien compris. Quand on défend le transport individuel comme nous le défendons, au parti démocrate-chrétien, eh bien le transport individuel est représenté par deux éléments essentiels: la voiture et le vélo. Ce sont deux structures de déplacement à choisir, qui vont laisser les gens bien équilibrés et totalement empreints de bon sens opter dans certains cas pour le vélo. Et pour cela, il faut que ce soit en toute sécurité.
Nous estimons que ce qui a été compris par les plus grands chefs d'entreprise en Europe du Nord et en Amérique peut parfaitement l'être par l'économie genevoise, en comprenant pourquoi nous soutenons cette initiative 144, dont nous avons été signataires, et refuserons le contreprojet. Nous estimons en effet que, aujourd'hui, cette initiative correspond au besoin bien compris d'une qualité de vie, d'une rapidité et d'une augmentation de la sécurité. (Applaudissements.)
M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est urgent de sortir Genève de l'immobilité, immobilité dans différents domaines - nous reparlerons du logement prochainement - mais immobilité dans le domaine de la circulation, surtout. Le PDC - Anne-Marie von Arx-Vernon vient de le dire - est convaincu que l'on n'y arrivera pas sans travailler sur tous les fronts en même temps. Vous le savez, nous sommes favorables aux grandes infrastructures dans le domaine de la mobilité privée motorisée: traversée du lac, troisième voie autoroutière, route des Nations. C'est important et nous y travaillons.
Mais il est impossible, Mesdames et Messieurs les députés, d'arriver à réduire ces blocages actuels et futurs de la mobilité genevoise sans promouvoir le transfert modal. Vous le savez aussi, nous soutenons activement la réalisation d'infrastructures dans le domaine des transports publics. De la même façon, aujourd'hui, nous soutenons le développement nécessaire des infrastructures en matière de mobilité douce. Nous avons pris un retard énorme, là aussi, par rapport à toutes les agglomérations de notre pays d'importance égale ou les grandes agglomérations européennes. Nous avons un retard considérable à combler dans le domaine de la mobilité douce. Il convient de passer à la vitesse supérieure. Certains trouvent que huit ans, c'est trop peu. Je crois qu'il est important, aujourd'hui, de donner un signal fort pour rattraper, précisément, ce retard qui nous pénalise.
Le parti démocrate-chrétien est soucieux, vous le savez, d'une véritable complémentarité des modes de transport, et cette initiative va précisément dans ce sens. Nous en sommes signataires, Anne-Marie von Arx-Vernon l'a dit. Pour nous, il est indispensable de rattraper ce retard, d'alléger le trafic des véhicules motorisés. C'est aussi, Mesdames et Messieurs les députés, en développant ces infrastructures de mobilité douce qu'une partie des automobilistes renoncera ponctuellement à la voiture, puis de plus en plus régulièrement, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, notamment grâce aux vélos à assistance électrique, et que de plus en plus de Genevoises et de Genevois prendront leur vélo et iront à pied plutôt qu'en voiture. Et ce sera évidemment de nature à alléger le trafic motorisé et à fluidifier le trafic automobile, ce dont nous nous réjouissons.
Cette initiative, Mesdames et Messieurs les députés, n'est pas excessive, comme certains veulent bien le dire. Cette initiative est modérée. On lui prête tous les défauts. On veut nous faire croire que le texte prioriserait la mobilité douce sur les autres modes de transport. C'est faux. Encourager, Monsieur Meylan, ne veut pas dire favoriser, ni privilégier. Encourager veut simplement dire créer les conditions pour que les gens qui se déplacent à vélo ou à pied, avec leurs enfants, les personnes âgées, puissent le faire en toute sécurité dans un réseau continu et adapté à la situation d'aujourd'hui. C'est cela que demande l'initiative 144. Ce n'est pas du tout de faire en sorte qu'un mode de transport prime un autre. Le PDC a travaillé, d'ailleurs, à ce que ce texte soit effectivement modéré. Nous ne sommes pas dans le cadre des textes qui ont été déposés dans d'autres cantons, qui allaient effectivement trop loin. C'est un projet tout à fait adapté à la complémentarité des modes de transport.
Anne-Marie von Arx-Vernon a parlé de l'économie genevoise. Certains craindraient que cette initiative soit néfaste pour l'économie genevoise. J'aimerais dire que, bien au contraire, il y a en jeu au minimum pour 80 millions de travaux. Or il existe à Genève de nombreuses entreprises actives dans le domaine des aménagements routiers, et je peux vous dire - pour en connaître quelques-unes - qu'elles se réjouissent de pouvoir assumer ces travaux, qui ne sont pas aussi spécialisés que ceux du CEVA et qui, certainement, pourront en grande partie leur être attribués.
C'est donc pour toutes ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il faut résolument aller dans le sens du oui à l'initiative 144 et refuser le principe du contreprojet.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, si je vous dis H1, cela vous parle ?
Une voix. N1 ?
M. Eric Stauffer. Je répète: H1.
Une autre voix. Touché-coulé !
M. Eric Stauffer. C'est la formule chimique de l'hydrogène. (Commentaires.) Le terme «hydrogène» est construit sur deux mots grecs... (Commentaires.) ...«hydro-», pour «eau», et «-gène», qui possède la même racine que le verbe «engendrer»: «engendrer de l'eau». (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mesdames et Messieurs, laissez-moi vous expliquer ce que pourrait être Genève dans vingt-cinq ou trente ans. Elle pourrait être, comme la planète entière, avec des véhicules à hydrogène, des véhicules qui ne polluent pas, qui produisent de la vapeur d'eau. Alors on pourrait s'étonner, aujourd'hui, que les Verts viennent nous servir la soupe consistant à dire qu'il faut améliorer la qualité de l'air dans le canton, alors que l'on sait que le pétrole est de toute façon condamné à un demi-siècle; il faudra donc trouver des énergies alternatives non polluantes. Et finalement, aujourd'hui, ce n'est pas cela qui importe aux Verts. Ce qui leur importe, c'est de casser tout ce qui a des roues avec un moteur. La voilà, la volonté des Verts ! Alors H1, cela doit vous causer, Mesdames et Messieurs.
Mais H est aussi l'initiale d'un autre mot, «hypocrite», qui lui vient du latin «hypocrites»... «hypocrita», excusez-moi... (Exclamations.) ...qui veut dire, Mesdames et Messieurs, «souffleur» dans un théâtre. Et vous, vous êtes en train de faire du théâtre et de tromper la population. En effet, votre but, Mesdames et Messieurs les hypocrites, ce n'est pas l'amélioration de la qualité de l'air à Genève. Tel n'est pas le cas, Mesdames et Messieurs. En effet, quand le groupe MCG vous demande de réglementer, de fermer le réseau des routes secondaires, parce que les frontaliers traversent à raison de 550 000 mouvements de véhicules par jour les petits villages - vous savez, avec toutes ces plantes vertes, avec toute cette verdure et cette nature - et polluent tous les matins, eh bien là, vous êtes aux abonnés absents. Vous vous en foutez ! Donc tout ce que vous voulez, Mesdames et Messieurs - il faut que la population le sache ! - c'est tuer la voiture. Vous voulez obliger tout le monde à aller à vélo, à pied et en bus.
Eh bien je vous encourage, Mesdames et Messieurs. Combien parmi vous ce soir sont à pied ou à vélo ? Vous verrez que ce n'est pas la majorité. Et voilà, les autres sont en voiture. Le petit confort des «bobos» bourgeois, qui veulent faire croire à la population qu'ils sont soucieux de la qualité de l'air... Vous vous moquez des citoyens, parce que, si vous êtes soucieux de la qualité de l'air, Mesdames et Messieurs, eh bien vous vous attaquez à ce qui pollue la vie des Genevois: les 550 000 mouvements de véhicules par jour aux frontières ! (Commentaires.) Mais là, non, ce serait discriminatoire, bien entendu ! Et on en revient à la lettre H, non pas H1, mais H comme «hypocrite». Alors non, Mesdames et Messieurs, je vous le dis, il faut refuser cette initiative.
Par ailleurs, lorsque l'on vient nous servir la soupe selon laquelle il y a 36% de la population qui n'a pas de véhicule et que cela augmente, eh bien laissez-moi vous donner un exemple pour démontrer le mensonge que vous dites à la population. La copine de Guillaume Sauty...
M. Guillaume Sauty. Présent !
M. Eric Stauffer. ...n'a pas de véhicule, mais lui en a un. Quant à Olivier Sauty, sa femme n'a pas de véhicule, mais lui en possède un. Cela fait déjà 50% des deux députés MCG qui n'ont pas de véhicule ! Vous vous moquez de qui, avec ces chiffres ?! (Commentaires. Le président agite la cloche.) Ensuite, vous parlez des accidents impliquant des piétons et des cyclistes. Mais évidemment: ils grillent les feux rouges à tout-va ! Ce sont des anarchistes qui roulent sur les trottoirs, qui brûlent les feux rouges, et qui arrivent encore à se tuer, malheureusement, tout seuls en entrant dans des poteaux. (Brouhaha.)
Alors, Mesdames et Messieurs, de qui vous moquez-vous ce soir ?! Cette initiative est là pour non pas améliorer la qualité de vie, mais pour polluer la vie des Genevois. Alors je vous le dis, non pas pour des raisons électoralistes, comme le PDC... (Exclamations.) ...qui, telle la girouette en haut d'un clocher, tourne avec le vent. C'est bien la preuve des travaux qu'ils ont faits en commission, puisqu'ils plébiscitent l'initiative mais s'abstiennent pour le contreprojet. Au cas où le vent tournerait, hop, on s'engage dans la voie du contreprojet, et l'honneur est sauf. Mais jusqu'à quand allez-vous vous moquer ainsi de la population, en mettant un coup de poignard dans le dos de l'Entente et en allant draguer l'Alternative quand cela vous arrange ?!
Non, Mesdames et Messieurs, soyons sérieux et responsables. Il faut faire un aménagement correct du territoire et de la mobilité sur le transfert modal, conformément à la volonté du peuple, en laissant le choix, mais en éliminant les anarchistes, les ayatollahs que vous êtes devenus avec cette mobilité douce. Et je vous le dis: le jour où vous serez sensibles à ces petits villages des communes suburbaines du canton de Genève, à ces 550 000 mouvements de véhicules par jour, alors éventuellement on entendra d'une oreille bienveillante vos discours. Pour l'instant, vous n'êtes que des hypocrites, vous mentez à la population, et tout ce qui vous intéresse, c'est créer des bouchons et provoquer l'anarchie dans la circulation à Genève.
Je vous invite, Mesdames et Messieurs, à refuser cette initiative, qui polluera la vie des Genevois.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Eric Bertinat (UDC). On va être très clair, dans la suite de ce qu'a dit M. Stauffer. Pour le groupe UDC, cette initiative n'est qu'une vaste fumisterie, qui a simplement pour objet de freiner et d'entraver la circulation. Cette initiative est purement anticonstitutionnelle, puisque la complémentarité des transports ne devient plus une priorité pour ce parlement: sa priorité est de construire des pistes cyclables là où il y a des voies pour le trafic routier, et de le gêner. Vous augmentez la largeur des trottoirs, vous insérez des pistes cyclables sur les voies routières, et vous venez nous dire que, non, vous n'en voulez pas aux voitures. Mesdames et Messieurs les députés qui avez déposé ou qui soutenez cette initiative, ce texte est clairement anti-voitures, il faut le dire et le dire bien fort !
De plus, vos idées, vos propositions sont totalement illusoires. Genève a besoin de circuler. Les gens ont besoin de leur véhicule pour se déplacer. Les familles ont besoin de leur véhicule le week-end pour aller faire leurs courses... (Brouhaha.) ...et les professionnels ont besoin de leur voiture afin de pouvoir transporter tout leur matériel. Je vous laisse imaginer, avec vos utopies, quel rôle aurait le vélo pour toutes ces personnes si d'aventure on allait dans votre sens.
M. de Rougemont, l'un des initiants, découvre que les routes ne sont évidemment pas extensibles. C'est une bonne découverte ! Mais dans ce cas, pourquoi les rétrécir tout en venant nous dire que, non, il veut respecter la constitution et la complémentarité des transports ? Non, Mesdames et Messieurs, on empêche la circulation en favorisant la construction de pistes cyclables au détriment de la fluidité. Où se trouve le libre choix du mode de transport ? Et l'on sent, derrière la volonté de construire ces pistes cyclables, celle de forcer les gens à utiliser le vélo, et pas seulement le vélo, celui qui requiert de la force et quelques efforts, mais aussi le vélo électrique. Donc on attend de vous, également, afin de pourvoir en énergie tout ce nouveau système, que vous déposiez des initiatives pour construire des centrales nucléaires ! (Rires. Applaudissements.) Il faudra bien, à un moment donné, pouvoir trouver l'électricité pour pallier votre manque de musculature, parce que le vélo, évidemment, demande des efforts.
Une autre remarque concerne le coût. A ce sujet, j'en viens à faire un lien avec une autre initiative, une initiative radicale, qui nous parle de l'horaire continu. Très bonne idée ! Visiblement, cela arrange tout le monde; vous l'avez soutenue. Le seul problème est que l'on ne sait toujours pas combien elle va nous coûter. Tout ce que l'on sait, c'est qu'elle va nous coûter très cher. Cependant, ce parlement s'est largement moqué de l'aspect financier et a choisi de l'accepter. Eh bien c'est la même chose pour cette initiative. Que vont nous coûter 170 km de constructions, outre le temps et les dérangements que cela va obliger la population à endurer ? On trouve la réponse à la page 5 du rapport, dans la bouche même des initiants: «M. de Rougemont répond qu'il ne sait pas. Il ajoute qu'il est possible que l'ATE ou ProVelo ait fait une telle étude.» Mais il ne sait pas. Tout ce qu'il peut nous dire est que cela va nous coûter quelques dizaines de millions. Sans jouer les grands prophètes, je peux vous dire que ce sera quelques centaines de millions, ou tout au moins en tout cas une centaine de millions. Pour faire mon petit calcul, je n'ai qu'à me reporter au train de crédits de programme que vous avez accepté en décembre et qui consacre 30 millions simplement pour l'entretien des actuelles pistes cyclables.
Non, Mesdames et Messieurs, l'UDC ne suivra pas cette idée géniale, parce qu'elle n'est pas géniale. Elle est avant tout illusoire. L'UDC s'opposera à l'initiative, tout comme elle s'opposera à l'idée d'un contreprojet; on ne connaît pas la teneur qu'il aura et l'on doute beaucoup qu'il ait quelque succès devant le peuple. L'initiative doit être combattue, et l'UDC entend la combattre en tant que telle.
Une voix. Bravo Eric ! (Applaudissements.)
Présidence de M. Renaud Gautier, président
Le président. Merci, Monsieur Bertinat. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste. Auront encore le droit à la parole: Mmes et MM. les députés Patricia Läser, Philippe Morel, Roger Deneys, Jacqueline Roiz, Roberto Broggini, Christian Bavarel, Guy Mettan, Emilie Flamand, Antoine Bertschy, André Python, Loly Bolay, Hugo Zbinden, Eric Leyvraz et Pierre Weiss. La parole est donc à Mme la députée Patricia Läser.
Mme Patricia Läser (R). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, les initiants reconnaissent que les routes ne sont pas extensibles. Voilà un point positif. Ils reconnaissent également le problème de congestionnement des voies de circulation. Nous relevons là leur perspicacité. Tous, dans cette salle, nous reconnaissons un problème de cohabitation des voiries. Permettez-moi à ce stade de faire un parallèle avec les différentes zones qui quadrillent le territoire. Regardez les problèmes d'une zone agricole enclavée au milieu d'une zone construite. Si Genève veut croître, chacun doit faire un bout de chemin, afin d'utiliser l'espace à bon escient, comme construire la zone agricole enclavée. Eh bien pour la mobilité, c'est la même chose. Comment mettre tous les modes de transport sur la même voirie ? C'est impossible, irréalisable, utopique, financièrement lourd, pour un résultat médiocre.
Tout comme les initiants, nous sommes pour la complémentarité et le libre choix. Tous, nous devons pouvoir relier un point A à un point B de manière continue et en sécurité. C'est indiscutable. Mais soyons réalistes. Les vélos sur certaines dessertes primaires, avec une bande peinte par terre et d'un seul côté: il n'y a rien de plus dangereux. Et comme dit précédemment, les voiries ne sont pas extensibles. Par contre, des vélos sur des itinéraires parallèles, où ils pourraient être prioritaires, là, c'est de la sécurité. Des transports publics en site propre, et voilà l'augmentation de la vitesse commerciale.
Alors, Mesdames et Messieurs, exigeons rapidement un plan global de la mobilité, et pas des plans séparés. Trouvons des solutions grâce à un contreprojet, afin que tous nous puissions rejoindre un point A et un point B en sécurité, mais pas forcément sur les mêmes voiries, et avec tous les modes de déplacement. De cette façon, nous aurons fait un grand pas en direction de la liberté de se déplacer, de la sécurité et surtout de la fluidité du trafic. Je vous invite donc à voter le principe d'un contreprojet afin d'arriver, comme le dit si bien Mme Flamand dans son rapport de minorité, à une cohabitation harmonieuse et à maintenir la paix des transports.
M. Philippe Morel (PDC). Mesdames et Messieurs, il est regrettable que ce débat, à la place d'être rationnel, devienne passionnel. Il est regrettable que ce débat, qui devait être apolitique, devienne politique. La mobilité douce est à exposer ou à opposer à la mobilité dure. La mobilité dure, c'est la réalité d'un chiffre. Il y a eu en 2010 sur les routes de Genève 15 morts, dont 4 cyclistes et 4 piétons, pas parce qu'ils ont brûlé des feux rouges, pas parce qu'ils ont fait des bêtises, mais parce que les accidents de la route arrivent même dans des conditions normales. C'est extrêmement regrettable et cela pourrait être évité.
D'ici à 2025, il y aura 40% de plus de déplacements à Genève. Comment voulez-vous faire ? Les routes ne sont pas extensibles, cela a été dit. Alors vous allez construire des voies superposées pour mettre les voitures ?! Vous allez construire des chemins sur lesquels on agglutinera des voitures tel qu'on le fait actuellement ?! Il faut développer les transports publics et les transports alternatifs que sont la marche et le vélo. (Remarque.)
Concernant le H, il y a une analogie qui n'a pas été faite: le H de Hummer. Oui, je roule en Hummer, pour me protéger des voitures ! (Rires.) Alors imaginez ce que les piétons et les vélos doivent ressentir. Je me réjouis d'abandonner ce H-là, peut-être au profit d'un autre H ultérieurement - parce que cela existe aussi, vous le savez - afin de pouvoir enfin rejoindre le parcours que font les cyclistes.
On a parlé de coût; 170 km, c'est environ 80 millions. La tranchée de Vésenaz, pour 500 m, coûte 45 millions. Nous l'avons soutenue. D'un côté, 80 millions pour 170 km; de l'autre, 45 millions pour 500 m. Le coût n'est certainement pas un argument.
Regardez les routes actuellement. Imaginez-vous dans vos esprits une route. Que voyez-vous ? Vous voyez un trafic automobile, passablement encombré; vous voyez une piste pour les transports en commun, le bus ou le tram; et vous voyez peut-être, parfois, pâle sur le côté de la route, une bande cyclable. Est-ce vraiment l'égalité de choix ? Nos concitoyens ont-ils vraiment la possibilité de choisir entre différents modes de transport ? On parle d'inégalité. Pour l'instant, cette inégalité est en défaveur des cyclistes. Il y aura dans un an plus de 1200 vélos supplémentaires, offerts par les entreprises. Les HUG, vous le savez, ont développé un programme de mobilité douce et offrent à leurs collaborateurs des vélos. Eh bien aujourd'hui, si beaucoup renoncent à prendre ce mode de transport, c'est que, sur les routes de Genève, nous ne sommes pas en sécurité.
Les villes du Nord l'ont démontré, l'Histoire ira de l'avant, quelles que soient les décisions prises sur l'initiative. La mobilité douce verra le jour. Il faut construire un avenir souhaitable par la majorité de notre population. Il faut oser. Il faut soutenir cette initiative.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, ce qu'il y a de particulièrement étonnant ce soir dans ce débat... (Remarque.) ...c'est la présentation de cette initiative comme étant anti-automobilistes, anti-automobiles, alors que, fondamentalement, elle ne se préoccupe pas des voitures, mais elle se préoccupe bien d'offrir des conditions de déplacement raisonnables aux adeptes d'autres mobilités. Aujourd'hui, il faut peut-être rappeler les enjeux et avantages de la mobilité douce, et pourquoi les sociétés occidentales font actuellement la promotion de la mobilité douce.
Les avantages, essentiellement, sont en termes de santé publique. Il convient de rappeler que, aujourd'hui, la sédentarisation de la société fait que nous avons de plus en plus de problèmes cardiovasculaires, de santé, qui touchent toute la population... (Remarque.) Moi aussi, exactement ! ...et qu'une partie de ces problèmes est évidemment réglée si l'on pratique davantage d'exercices physiques. Se déplacer en faisant un exercice physique est rationnel d'un point de vue de la santé individuelle de chacun d'entre nous, que ce soit à pied, en marchant une demi-heure à une heure par jour, ou que ce soit bien entendu en faisant du vélo ou du patin à roulettes. (Brouhaha.) Et donc cet enjeu de santé publique, je vous rappelle qu'il est fondamental, parce que les primes d'assurance-maladie viennent aussi grever le budget des ménages. Pour cette raison, il est important d'encourager l'effort physique aussi par la mobilité.
Ensuite, il y a la question de l'espace public. La voiture électrique... Le mythe de la voiture qui ne pollue pas, à hydrogène, à eau, à air comprimé, résout le problème de la pollution... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et peut-être celui du bruit, mais il ne résout pas le problème de l'occupation de l'espace. Est-il rationnel, logique, opportun d'occuper une surface de plus de 10 m2 en déplaçant 1500 kg pour une personne qui parcourt 5 km ? Est-ce rationnel, logique, opportun, quand - cela a justement été évoqué - l'espace public n'est pas extensible ? Peu importe le type de moteur, ce problème d'occupation d'espace n'est pas réglé par un changement de technologie au niveau de la motorisation.
On peut prendre un exemple qui parlera certainement à l'ensemble d'entre vous, et aussi à ceux qui nous écoutent. Quand, à quelle saison roulons-nous le mieux à Genève ? (Remarque.) Pendant les vacances, exactement, pendant les vacances d'été. (Commentaires.) Et pourquoi roulons-nous mieux l'été ? (Brouhaha.) C'est parce qu'il y a moins d'automobiles... (Commentaires. Le président agite la cloche.) ...quelle que soit leur origine. Il y a simplement moins d'automobiles sur les chaussées, et le résultat est direct, immédiat, visible pour chacun d'entre nous; nous roulons mieux en voiture quand il y a moins de voitures ! Et voilà, M. de La Palice n'aurait pas dit mieux, mais il faudrait simplement l'entendre et être cohérent, donc encourager le renoncement à la voiture, si possible dans de bonnes conditions.
Aujourd'hui, le réseau existe pour les cyclistes, il existe pour les piétons, mais il est lacunaire. Certains carrefours et certaines routes ne sont pas équipés d'aménagements suffisamment sûrs. C'est le dernier volet que je voulais évoquer: la question de la sécurité. La mobilité douce est un enjeu majeur de sécurité, à laquelle vous semblez attachés le reste de l'année, mais que vous oubliez là facilement. La sécurité est renforcée lorsque l'on se déplace à pied ou à vélo, parce que le poids du véhicule et la vitesse sont moindres, donc nous bénéficions de conditions de sécurité plus grandes en utilisant ces modes de déplacement.
Par conséquent, pour ces trois raisons, les sociétés occidentales, quels que soient les régimes politiques qui les dirigent, encouragent la mobilité douce, et bien entendu aussi dans le souci d'économiser le précieux carburant que nous avons pour le moment. Mais cela, comme je l'ai dit, ce n'est pas la question fondamentale; la question de l'espace est plus importante.
De plus, il n'y a pas que la question de la ville de Genève ! Le problème, c'est que la mobilité douce ne doit pas se concevoir comme étant opposée à la voiture, mais bien comme une solution de substitution à la voiture. Si le MCG se plaint des véhicules des frontaliers, pourquoi ne faisons-nous pas des aménagements cyclables depuis la France voisine ? Cela fonctionne à Copenhague, cela pourrait fonctionner à Genève ! (Commentaires.) La majorité des déplacements pendulaires sont effectués à vélo plutôt qu'en voiture. (Brouhaha.)
Et bien entendu, si l'on pense en dehors de la ville de Genève, nous avons l'exemple de la sécurité sur le chemin de l'école. C'est vrai que, typiquement, réaliser des aménagements cyclables, c'est garantir aux parents la possibilité d'envoyer leurs enfants à l'école dans des conditions de sécurité décentes quand ils les font s'y rendre à vélo pour montrer le bon exemple, parce que parcourir 1 km pour aller à l'école ne demande pas 1,5 tonne de ferraille pour déplacer un enfant ! (Remarque.) C'est un effort rationnel dans le sens du développement durable... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...dans une vision d'économie et de rationalité que nous devons encourager.
Cette initiative est donc très pragmatique. Si quelques pourcents d'automobilistes, parce qu'ils sont en sécurité, renoncent à la voiture, eh bien les automobilistes auront de meilleures conditions de circulation et seront les premiers bénéficiaires de cette initiative. (Remarque.) Donc, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage à soutenir cette initiative et à ne pas voter un contreprojet, qui est contre-productif et qui retarde la prise de décision populaire. (Applaudissements.)
Mme Jacqueline Roiz (Ve). Pour reprendre l'expression favorite de notre préopinant du MCG, j'ai envie de dire: qui se moque vraiment du citoyen ? (Commentaires.) Il y a eu 15 000 signatures en quatre mois. Cette initiative a été signée par énormément de personnes, de manière très facile. (Commentaires. Le président agite la cloche.) Ces personnes étaient d'orientations politiques très diverses. Pourquoi ? Parce que ces personnes souhaitaient en fait des conditions adaptées à leur volonté. Elles avaient envie de venir à vélo; elles ne pouvaient pas. J'ai justement récolté des signatures pour cette initiative, et j'ai été impressionnée et enthousiasmée par la réaction des gens qui venaient signer. C'étaient des personnes qui, précisément, se déplaçaient en voiture, qui souhaitaient se déplacer à vélo mais qui avaient beaucoup trop peur. C'étaient des personnes qui auraient souhaité que leurs enfants puissent aller à l'école à vélo, qui n'avaient pas envie de les amener chaque fois avec leur voiture, mais qui avaient en fait une perte de confiance dans le transport individuel non motorisé. Donc ces personnes désirent des conditions adaptées.
Comment imaginer alors l'avenir de Genève ? On a dit que ses routes n'étaient pas extensibles et, à moins de mettre les voitures les unes sur les autres, il n'y a pas non plus assez d'espace. Je ne comprends pas pourquoi il y a autant de réactions anti-vélos. Parce que, en fait, il y a tout le temps une réaction émotionnelle à ce sujet, alors qu'il s'agit là de toute la population genevoise, et pas seulement d'une partie de la population qui veut faire du cyclisme sportif.
Cette initiative n'est pas exigeante, on l'a relevé. Je pourrais presque dire qu'elle n'est même pas visionnaire. Elle est tellement évidente ! Elle coule de source. Elle demande aussi plus de sécurité et permet d'améliorer le transfert modal. Je me demande simplement: mais que va proposer un contreprojet ? Je ne vois pas. Cette initiative est vraiment déjà peu exigeante; elle demande simplement des pistes cyclables sur les routes primaires et secondaires, que les pistes cyclables ne soient plus des gymkhanas qui s'interrompent sans cesse. Bref, un contreprojet ne proposerait rien de mieux et ne serait qu'un subterfuge. En conséquence, je vous encourage à voter en faveur de cette initiative. (Applaudissements.)
M. Roberto Broggini (Ve). Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha.) ...il convient parfois de relire attentivement...
Des voix. Chut !
M. Roberto Broggini. ...ce que notre parlement a voté, notre constitution. A l'article 160B, sur les principes concernant les transports privés, il est bien indiqué que, «dans les limites du droit fédéral», nous devons «assurer un équilibre entre les divers modes de transport». Actuellement, cet équilibre n'existe pas. Une priorité est donnée à certains types de transport par rapport à d'autres. Cette initiative extrêmement raisonnable et modeste encourage - encourage, n'oblige pas - justement tout un chacun, qu'il soit piéton, cycliste, automobiliste, à se respecter. C'est extrêmement important. J'entends M. le député Meylan parler des routes... Ce ne sont pas les routes prioritaires, mais le réseau prioritaire... (Remarque.) Voilà, tout à fait. Nous avons un arrêt du Tribunal fédéral qui approuve, concernant la commune de Münsingen, la mise en place d'une zone à 30 km/h sur un réseau principal. C'est le Tribunal fédéral ! Ce n'est pas nous qui allons réinventer la loi sur la circulation routière. (Commentaires.)
Il est également utile de se référer à l'article 160E de notre constitution, qui dit bien que, «dans le secteur des transports», il convient de favoriser «les déplacements en transports publics, à vélo et à pied, notamment sur le plan des investissements et des équipements». C'est notre constitution ! Je souhaite que nous la respections et que l'on ne dise pas qu'il n'y a que certains types de transport - car c'est bien ce que certains essaient de nous faire comprendre - qui peuvent passer parce qu'un vélo ne le pourrait pas.
L'un des initiants que nous avons entendu devant la commission nous a bien dit que, s'il y avait des vélos sur les trottoirs, c'est parce qu'ils étaient en insécurité sur la chaussée et que, actuellement, les pistes cyclables sont colonisées par des deux-roues motorisés, ce qui fait peur à énormément de cyclistes. (Brouhaha.) Je le sais pour travailler dans la profession.
Quant à l'économie du week-end, pour M. Bertinat, faire les courses le week-end... Vous savez qu'un grand magasin de la rive droite, maintenant, propose des livraisons à vélo... Mais oui ! Cela vous coûte une tune de plus, et vous vous faites livrer à domicile. Pas besoin de s'y rendre en voiture, à moins que vous n'alliez en France voisine... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) C'est un autre problème. Et à Saint-Gall, où l'UDC est largement majoritaire, cette initiative d'actif-trafiC a été acceptée. Donc d'une extrémité à l'autre de la Suisse, l'UDC n'a pas tout à fait la même perception des choses.
A Genève, on s'enferre dans cette idée du Salon de l'auto... Mettons l'auto jusque dans le salon ! (Exclamations. Applaudissements.) C'est peut-être ce que vous voulez ! Moi, je préfère avoir un salon sans auto tout en ayant un salon de la mobilité, parce que c'est bien à cela que nous devrons arriver.
Enfin, Monsieur le président, je conclurai - mais le clabaudeur n'est pas dans la salle, il faudra lui transmettre - en disant que le Hummer H1 est un véhicule de guerre, un véhicule monstrueux qui a servi en Irak et qui a été construit aux Etats-Unis. C'est un monstre des routes. Le H1, c'est le Hummer. (Applaudissements.)
M. Christian Bavarel (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, vous comprenez bien que les Verts ont la nécessité de s'exprimer sur ce sujet, et je vais commencer avec des petites définitions, pour rappeler quelques évidences peut-être. Un piéton n'est pas forcément un automobiliste qui cherche sa voiture... (Rires.) Peut-être que certains devraient s'en souvenir. Le vélo est en principe un transport exclusivement individuel. Je dis bien «en principe»... (Remarque.) Les tandems, ou le petit siège enfant sur le vélo, Monsieur le député, bien évidemment, permettent de mettre quelques nuances à tout cela. La marche à pied est encore un mode de transport extrêmement individuel. Vous pouvez bien évidemment porter quelqu'un sur vos épaules; c'est charmant. Néanmoins, si l'on doit parler de cette confrontation entre le transport individuel et le transport collectif, nous sommes bel et bien dans la mobilité douce autour des transports individuels.
Il y a une autre réalité qui nous semble importante, chez nous les Verts, mais qui peut-être vous importe peu: nous avons aujourd'hui un pétrole à 100 dollars, à peu près. Nous avons quelques soucis avec cette ressource; or nous nous disons que, avec le pétrole, on peut faire passablement de choses intéressantes, que ce soient des médicaments, des plastiques ou d'autres choses. Brûler le pétrole pour faire bouger des voitures ou pour chauffer n'est peut-être pas la meilleure utilisation.
Nous avons un autre point de vue encore qui, pour nous, est important, ce sont nos soucis concernant le réchauffement climatique. Je suivais ce matin une formation avec le professeur Beniston et, scientifiquement, la situation, pour les Verts - mais ce n'est peut-être pas le cas sur d'autres bancs - est réellement préoccupante.
Que demande cette initiative ? Cette initiative demande le libre choix. Elle demande que les personnes qui font le choix de circuler avec ce que l'on appelle la mobilité douce, de se déplacer sans nuire à l'environnement, puissent le faire. Et vous, vous nous dites en face: «Non, non, nous voulons obliger ces dangereux cyclistes à prendre une voiture !» C'est à peu près cela, votre discours. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Dire que les piétons évitent de se déplacer à pied, que les piétons prennent une voiture. Est-ce cela que vous voulez ? (Remarque.) Est-ce cela, votre libéralisme et votre libre choix ?!
Nous revendiquons la liberté de pouvoir nous déplacer en sécurité, à pied, à vélo, en voiture pour ceux qui le veulent; mais oui, parce qu'il n'y a pas de raison. Nous ne sommes pas pour tuer les automobilistes, mais pour dire qu'il faut avoir une utilisation raisonnée de la voiture. Je vous rappelle qu'une voiture mesure 5 m sur 2 m. Et quand on prend un vélo, on vous laisse de la place pour vos voitures. Voilà quelque chose qui ne semble pas encore être entendu. Alors on pense qu'il faut arriver vers d'autres choix de société.
M. Stauffer, tout à l'heure, donnait des chiffres par rapport au nombre de ménages - c'est ce qu'il n'a pas compris - qui n'ont pas de voiture; 36% des ménages n'ont pas de voiture - et non pas des individus - en ville de Genève. Ce sont peut-être des notions un peu trop compliquées, trop sophistiquées.
Ensuite, j'ai adoré que l'on nous traite d'anarchistes et d'ayatollahs en même temps. (Rires.) Honnêtement, cela m'a beaucoup amusé. Je souhaite que certains ayatollahs, ailleurs, soient aussi un peu anarchistes, et que les lois, tant celles du talion que d'autres, soient beaucoup moins appliquées. Cela fera peut-être moins de gens pendus au bout d'une corde. En effet, je vous rappelle qu'être pour l'abolition des lois et vouloir à certains moments que les gens subissent les lois les plus dures est un peu difficile à concilier. Voilà simplement une réaction aux différentes attaques que l'on a subies.
On vous le dit très clairement. Aujourd'hui, les habitants de Genève - et nous en sommes sûrs concernant notre part d'électorat, les gens qui nous ont demandé d'être présents dans cette salle - ce qu'ils veulent, c'est pouvoir choisir. Ce qu'ils veulent, c'est pouvoir aller à vélo, en sécurité. Et nous, nous remplirons notre mandat, jusqu'au bout. Pourquoi avons-nous été élus ? C'est parce que certaines personnes entendent pouvoir être respectées, comme dans les petits villages de campagne, et aimeraient ne pas subir les nuisances de la voiture... (Remarque.) Soral, par exemple, Monsieur Weiss. Je sais que cela vous est cher; et j'ai d'ailleurs quelques amis viticulteurs à Soral qui font des vins excellents et qui ont été plutôt des gens précautionneux avec l'environnement. Mais aujourd'hui, en ville de Genève, il y a aussi des personnes qui aimeraient pouvoir vivre d'une manière plus sereine, dans des quartiers qui soient davantage protégés, avec plus de place pour la mobilité douce. Et nous, ce mandat-là, nous pensons réellement que nous devons le soutenir - jusqu'au bout - et nous allons le soutenir. Vous pouvez compter sur les Verts...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Christian Bavarel. Je conclus, Monsieur le président ! C'est vraiment sur des sujets de ce type, autour de la qualité de vie et de la qualité de notre planète, que nous nous battrons, jusqu'au bout. (Applaudissements.)
M. Guy Mettan (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, chers collègues, tout à l'heure, un député a cru bon de se gausser de la prétendue incohérence du parti démocrate-chrétien en matière de mobilité. (Protestations.) J'aimerais vous dire... (Commentaires. Le président agite la cloche.) Peut-être avez-vous mal entendu, a-t-il mal entendu, et d'autres ont-ils mal entendu ! Depuis des années, le parti démocrate-chrétien défend peut-être ce qui est la ligne la plus cohérente en matière de transports, à savoir la complémentarité des transports, inscrite dans notre constitution. Nous avons toujours voulu la complémentarité. Quand il fallait voter pour construire des routes, nous les avons acceptées, par exemple la route des Nations, qui vient d'être votée à la commission des travaux mardi, par exemple la route du barreau sud, que nous avons toujours voulue et réclamée. Quand il faut des routes, quand elles sont nécessaires, nous les acceptons. La traversée de la rade, du lac, nous l'avons toujours défendue, et nous continuerons à la défendre. Quand il s'est agi de voter des crédits pour les Mouettes et transports par bateaux, nous les avons votés. Pour la CGN, nous apportons notre soutien. Quand il s'agit de voter le transport par air, pour l'aéroport, nous le soutenons aussi, Monsieur Longchamp. Et quand il s'agit de nous prononcer sur les transports publics, pour les trams, nous votons en leur faveur, que ce soit le mandat de prestations, que ce soient les crédits d'investissement; nous soutenons évidemment les transports publics.
Et quand il s'agit d'introduire pour la première fois dans l'histoire de notre république un soutien au vélo, parce que c'est la première fois qu'une initiative ou qu'un acte législatif est introduit pour soutenir cet autre mode de transport qu'est le vélo, eh bien il faut le soutenir aussi. C'est parce que notre parti est cohérent que nous soutenons également le développement du vélo. J'appelle tous ceux et toutes celles qui prétendent ici défendre la complémentarité des transports à passer à l'acte et à soutenir également le développement du vélo.
J'aimerais aussi dire ceci à certains. J'ai entendu un député qui déclarait qu'il fallait s'opposer au développement du vélo, à cause des frontaliers... J'aimerais juste rappeler à ce député que, jusqu'à maintenant, je n'ai vu aucun frontalier venir à Genève à vélo ! Donc le développement du vélo sert d'abord - je dis cela pour qu'il se rende compte de sa propre contradiction - aux Genevois.
Ensuite, il y a des raisons pratiques pour lesquelles il nous faut soutenir cette initiative. D'abord, elle est constitutionnelle. Elle est ensuite parfaitement applicable, cela a été dit, je n'y reviens pas. Mais il y a des raisons pratiques, parce que cette initiative correspond au développement social de notre ville et de nos sociétés contemporaines. Pourquoi ? Parce que, maintenant, les citadins n'utilisent plus un seul mode de transport. Ils n'emploient pas que la voiture, que le tram ou que le vélo. Souvent, un citadin a une voiture, un vélo électrique, et il utilise le tram. Donc, effectivement, c'est une tendance lourde de la vie dans nos villes, de la vie urbaine, et il faut tenir compte de cette évolution sociologique. Cela veut donc dire qu'il y aura de plus en plus de gens qui vont utiliser le vélo, et cela dans toutes les couches sociales ! J'aimerais rappeler à MM. Meylan et Weiss que leur patron, M. Matthey, que j'ai croisé tout à l'heure à l'inauguration de la tour de la TV, utilise le vélo... (Commentaires. Le président agite la cloche.) M. Weiss utilise un vélo électrique; le patron du TCS... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...M. Zwahlen, roule à vélo, et je croise tous les jours des banquiers et des entrepreneurs qui se déplacent à vélo. Donnons à ces entrepreneurs la possibilité de rouler en toute sécurité sur des pistes cyclables.
Deuxième évolution, à part l'évolution sociologique: l'évolution technologique. On ne parlait pas de vélo électrique il y a quelques années. Désormais, le vélo électrique est en plein boom, ce qui veut dire que de plus en plus de gens vont utiliser le vélo.
Autre évolution: dans les villes du Nord, on parlait de prospérité économique. Or les pays les plus avancés - je pense notamment aux Pays-Bas et au Danemark - les plus prospères, ceux qui sont le plus proche de la Suisse, utilisent largement le vélo et les bandes cyclables, pour une raison très simple d'efficacité. On ne l'a pas dit ce soir, mais le vélo est le moyen de transport le plus rapide et le plus efficace en ville. (Remarque.) Ou on l'a déjà dit ! Mme von Arx-Vernon l'a souligné. Elle a toujours une longueur d'avance sur moi... (Exclamations.) ...et je l'en remercie. Alors je le répète: c'est simplement le moyen le plus efficace et donc technologiquement le plus approprié.
Mesdames et Messieurs, pour toutes ces raisons, j'invite les esprits les plus hésitants à rejoindre cette initiative et à s'opposer au contreprojet.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais d'abord rappeler que le parti socialiste, avec les Verts, a été partie prenante dans la récolte des signatures sur cette initiative. Je souhaite aussi dire ici que, moi, je n'ai aucun mérite. Je ne vais pas à vélo. Eh non ! Je roule en voiture. Ce qui ne m'empêche pas, Mesdames et Messieurs les députés, de rappeler la situation actuelle. Aujourd'hui, qu'est devenue Genève ? Genève est devenue une poubelle. (Brouhaha.) On a souvent mis en exergue... (Commentaires.) ...la qualité de vie de Genève. Mais aujourd'hui la qualité de vie à Genève s'étiole.
De quoi parle cette initiative ? Elle parle de mobilité douce, mais elle revendique aussi un élément extrêmement important: l'équité. L'équité, Mesdames et Messieurs les députés, entre tous ceux qui désirent se mouvoir, se déplacer à Genève comme bon leur semble, parce que c'est cela, la liberté. La liberté, c'est pouvoir se déplacer comme bon nous semble. Encore faut-il le pouvoir.
Alors aujourd'hui, qu'y a-t-il à Genève ? Des travaux conséquents pour les transports publics, et c'est tant mieux. Des travaux conséquents pour les routes - je roule en voiture - c'est tant mieux aussi. Mais pour les autres, Mesdames et Messieurs les députés... Est-il normal qu'une partie de la population soit prise en otage par les autres ? Est-il normal que des cyclistes et des piétons ne puissent pas se déplacer à leur guise ? Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut-il dire alors que les piétons et les cyclistes sont des citoyens de deuxième zone ? Voilà ce que cela signifie, tout simplement ! (Commentaires.) Et doit-on supporter cette inégalité de traitement ? Mesdames et Messieurs les députés, ce n'est pas acceptable. La liberté, c'est cela: donner la liberté à chacun de se mouvoir comme il le veut !
Le rapport de minorité de Mme Flamand le dit: le libre choix de ces personnes est bafoué - mais il est totalement bafoué ! - pour les raisons que je viens d'expliquer. Alors, Mesdames et Messieurs, afin d'éviter ou de pouvoir cohabiter, pour reprendre un terme de Mme Läser - parce que la cohabitation, c'est cela: pouvoir cohabiter de manière harmonieuse entre nous tous - eh bien il faut que chacun puisse se déplacer à sa guise. Pour cela, et si vous êtes cohérents envers les gens, que vous êtes censés aussi protéger et défendre, vous devez accepter cette initiative. Sans cela, vous n'êtes pas cohérents.
J'aimerais quand même aussi vous rappeler - je vais vite finir par là, Monsieur le président - la situation dans les pays du Nord. Comment font-ils, dans les pays du Nord, pour faire des pistes cyclables, des zones piétonnières ? Comment fait-on en Espagne, un pays archaïque il y a quarante ans ? Comment fait-elle, l'Italie, qui a totalement interdit la circulation au centre-ville ? Sont-ils plus intelligents que nous ? Non ! Ils se sont donné les moyens pour que tous les habitants soient à la même enseigne.
C'est la raison pour laquelle je vous invite encore une fois, et si vous voulez être crédibles vis-à-vis de la population, à accepter cette initiative. (Applaudissements.)
M. Hugo Zbinden (Ve). Mesdames et Messieurs, je pense que plus ou moins tout a été dit. (Brouhaha.) J'aimerais m'adresser aux automobilistes, et en particulier aux automobilistes égoïstes. M. Meylan déclare: «A quoi bon dépenser tellement de sous pour ces pistes cyclables ? Cela profite seulement à une petite partie de la population. Il y a seulement 7% des trajets qui sont effectués à vélo.» C'est faux ! Tout d'abord, le but de cette initiative est justement que cette partie augmente.
Mais cette initiative, évidemment, profite à tout le monde, en particulier aux automobilistes. Un vélo ne prend pas de place; une voiture en prend. Un vélo, c'est une voiture en moins. Donc si vous voulez rouler en voiture, il faut avoir davantage de vélos. Réfléchissez, si vous êtes dans vos bouchons, coincés, alors que des vélos passent à côté. Peut-être qu'un jour vous serez pris dans les bouchons de voitures propres à l'hydrogène; les vélos continueront à rouler. Donc si vous voulez continuer à rouler en voiture, il faut voter cette initiative. Et rassurez-vous: vous pouvez voter l'initiative sans être obligés ensuite de faire du vélo ! (Rires. Applaudissements.)
M. Eric Leyvraz (UDC). Monsieur le président, j'ai appuyé sur le bouton dans un geste d'humeur, suite à des déclarations assez ahurissantes que j'ai entendues. Je me suis demandé, vraiment, s'il n'y en a pas certains qui le fumaient, le H ! (Rires.)
Pendant qu'on y est, vous direz ceci à M. Deneys, qui nous pose la question de savoir pourquoi on circule mieux en juillet et en août à Genève, et qui nous donne des réponses bateau en enfonçant des portes ouvertes. Puisque l'on est dans le surréalisme, je pense pour ma part que l'on circule mieux à Genève en été parce qu'il y a moins de neige ! (Rires.)
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pierre Weiss. (Remarque. M. Pierre Weiss regagne sa place.) Monsieur le député Pierre Weiss, vous avez 0,1 seconde pour prendre la parole.
M. Pierre Weiss (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, vous savez que, au début de cette législature, j'avais indiqué que je traquerais les erreurs quantitatives de notre ami Stauffer. Eh bien à nouveau, ce soir, je dois malheureusement dire que ce n'est pas H1, le symbole de l'hydrogène. C'est H. De même que, pour l'oxygène, c'est O, et pas O1. Donc révisez vos classiques ! H est le symbole de l'oxygène... pardon: de l'hydrogène. (Exclamations.)
Une voix. Bravo ! (Applaudissements. Commentaires.)
M. Pierre Weiss. J'ajoute... (Brouhaha.) ...que ceci n'est rien à côté d'un autre écrit qui pourrait être tragique, s'il était rédigé précisément par un cycliste écrasé par le véhicule d'un autre de nos collègues. Il écrirait certainement: «Hummer m'a tuer.» (Exclamations.)
Une voix. Avec un H ?
M. Pierre Weiss. Avec un H, bien sûr. Toujours avec un H ! Et là, forcément, à l'hôpital, on verrait la différence entre cette initiative homéopathique et les traitements allopathiques qu'il faudrait proposer à l'accidenté, au peut-être futur mort en question.
Soyons sérieux. Il y a un argument qui n'a pas été utilisé contre cette initiative et que je me dois quand même de rappeler au nom de la complémentarité des modes de transport, ce sont ses effets sur les transports publics. Contrairement à ce qu'indiquait M. Zbinden, qui croyait que tout avait été dit, eh bien non, Monsieur Zbinden, tout n'a pas été dit; je n'avais pas encore parlé ! (Exclamations.) Cette initiative a pour effet... (Remarque. Le président agite la cloche.) ...de ralentir la vitesse moyenne de circulation des transports publics, en raison précisément du privilège qui serait donné à un type de mobilité, qui est la mobilité douce. Et je me bats, avec d'autres, au parti libéral, pour qu'il n'y ait pas de privilège, qu'il y ait une complémentarité, et que l'on ne considère pas qu'il faut un mode de transport contre les autres. Cette initiative, elle, oublie ce principe de base. De même que M. Deneys a oublié ce soir que, si en été on roule plus vite, ce n'est pas seulement parce qu'il y a moins de voitures. Il y a aussi moins de bus ! Il suffit de regarder les horaires. (Rires.)
J'aimerais maintenant m'adresser à l'UDC, parce que la position qui a été défendue par M. Bertschy me semble une position extrêmement périlleuse, dont j'aimerais que ce parti comprenne les conséquences possibles. Ce parti, en refusant le contreprojet, entend-il favoriser et l'initiative et les hérissons ? Je ne le crois pas. Mais actuellement, c'est ce qui risque de se faire, compte tenu de la répartition des forces au sein de ce Grand Conseil. Je conseille vivement... (Remarque.) ...aux députés de l'UDC de réfléchir aux conséquences. S'il n'y a pas de contreprojet qui est opposé devant le peuple, l'initiative pourrait être acceptée... (Exclamations. Applaudissements.) ...avec toutes les conséquences en termes de coût qui l'accompagnent. Messieurs de l'UDC, Madame... Mesdames de l'UDC - notre collègue, votre présidente, nous rejoindra bientôt - si vous votez contre le contreprojet, vous favorisez l'initiative, vous favorisez les dépenses qui s'ensuivent, vous favorisez le chaos que vous dites vouloir empêcher, raison pour laquelle je vous demande véritablement encore une fois de réfléchir à votre vote et de voter en faveur du contreprojet.
Le contreprojet est un compromis gagnant, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés. C'est un compromis gagnant, parce que, avec l'initiative telle qu'elle est proposée, en huit ans, ce qui est annoncé aux Genevois est impossible. Au fond, cette initiative est un peu comme l'initiative sur les EMS. Elle promet, elle ne réalise pas; elle ne tient pas, elle ne tient pas la route, je dirai presque, et les Genevois seront les dindons de la farce. Le contreprojet, en revanche...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Pierre Weiss. ...est un contreprojet réaliste, qui promet d'adapter les infrastructures en cas de réfection, exactement comme cela s'est fait pour les handicapés, par exemple pour les trottoirs. Ne soyons pas irréalistes. N'oublions pas simplement une chose. Soyons pondérés. En ville, au maximum 9% des personnes qui se déplacent utilisent le vélo. J'en fais partie...
Une voix. Bravo !
M. Pierre Weiss. ...mais cela ne suffit pas pour vouloir établir un équilibre entre vélos et voitures, entre vélos et transports publics. Il faut penser aussi aux autres, aux 91 autres pourcents. Cette initiative l'oublie, raison pour laquelle il faut voter en faveur du contreprojet.
M. Eric Stauffer (MCG). Monsieur le président, vous voudrez bien transmettre à notre ami Pierre Weiss que je n'ai pas fait d'erreur, puisque l'hydrogène est un élément chimique de symbole H et de numéro atomique 1. Donc c'est bien H1... (Protestations.) ...selon la définition de Wikipédia... (Brouhaha.) C'est sur internet, tout le monde peut le contrôler.
Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes aujourd'hui confrontés à un choix important. Le MCG se refuse à céder à cette pression mise par certains partis qui veulent prôner, avec toute l'hypocrisie qui les caractérise, la mobilité douce. Je vous ai en effet expliqué que, de toute façon, à moyen et long termes, les voitures polluantes seront éliminées naturellement. Pourquoi ? Parce qu'il n'y aura bientôt plus de ressources pétrolières. Donc les énergies alternatives verront le jour dans un avenir plus ou moins proche. Alors l'argument de la pollution de l'air est un argument qui ne tient pas.
La preuve de ce que je vous dis, que ce sont des ayatollahs anti-voitures, c'est que notre collègue M. Broggini - vous lui transmettrez, Monsieur le président - n'a rien trouvé de plus intelligent que d'allumer son collègue du PDC le député Morel en parlant du Hummer en tant que véhicule de guerre, alors que justement le PDC soutenait - soutient toujours, jusqu'aux dernières nouvelles, mais on ne sait jamais, le vent tourne parfois - l'initiative. (Exclamations.) C'est donc bien la preuve que ce n'est pas vraiment cette mobilité douce et tout ce qui l'accompagne. C'est tout ce qui est anti-voitures.
Non, Mesdames et Messieurs, il ne faut pas accepter ce contreprojet. Pourquoi ? Parce que le Conseil d'Etat s'en occupe déjà ! Il n'y a qu'à voir, il y a quelques semaines, dans le budget, ce que nous avons voté pour la mobilité, les pistes cyclables. C'est déjà fait, le contreprojet. Nul besoin d'en rajouter encore une couche, puisque le Conseil d'Etat y pourvoit déjà. Il n'y a qu'à voir la masse de chantiers qui existent dans notre ville pour s'en convaincre.
Alors non, Mesdames et Messieurs, le contreprojet - et je ne suis pas d'accord avec vous, Mesdames et Messieurs les libéraux - n'est pas bon. C'est céder à la faiblesse par peur d'une hypothétique victoire. Il faut expliquer à la population de manière claire que les contreprojets sont mal ficelés; en fait, c'est toujours une prise en otage de la population. Il faut dire non au contreprojet, expliquer aux gens que notre gouvernement et le département de l'intérieur et de la mobilité réalisent déjà bon nombre de pistes cyclables, et qu'il n'est nul besoin d'une votation populaire, qui vise davantage des fins électoralistes, pour cette initiative qu'ils ont déposée, que l'objectif d'améliorer la qualité de vie de nos concitoyens.
Voici en plus quelques arguments qui sont complètement en dehors, je dirai presque, du sujet. M. Deneys, par exemple - vous transmettrez encore, Monsieur le président - vient nous dire: «On roule mieux en été, parce que les gens sont en vacances.» Evidemment ! Je l'ai expliqué précédemment, nous avons droit, quand les gens ne sont pas en vacances, à 550 000 mouvements de véhicules par jour en provenance et à destination de la France voisine et du canton de Vaud. Alors ce sont bel et bien les pendulaires qui posent un problème de circulation et de mobilité à Genève. Ce ne sont pas les Genevois.
Aujourd'hui, Mesdames et Messieurs, vous voulez punir les Genevois qui ont un véhicule. Vous voulez les obliger à prendre un vélo ou les transports publics. Pourquoi n'allez-vous pas expliquer cela aux mères de famille, le samedi, quand elles doivent aller acheter de quoi remplir trois ou quatre sacs à la Migros, avec les enfants, la poussette... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et leur dire de prendre le bus ou d'aller à vélo en attachant les enfants derrière ou dans une charrette ? Pourquoi n'allez-vous pas leur expliquer cela ? Il faut laisser le choix. Or le choix, ce n'est pas la contrainte que vous êtes en train d'imposer partout dans le canton de Genève.
Regardez le nombre de feux qui sont désynchronisés. Aujourd'hui, on construit cette fameuse ligne, le TCOB, le tram Cornavin-Onex-Bernex. Laissez-moi juste vous expliquer...
Le président. Il vous faut songer à conclure, Monsieur le député !
M. Eric Stauffer. Je vais conclure, Monsieur le président. Sur 1,8 km, vous n'avez pas moins de 12 feux de signalisation, feux rouges, orange et verts. Je répète: 12 ! Mais imaginez-vous; aujourd'hui, ils sont désynchronisés. Pour faire ces mille et quelques centaines de mètres, il faut parfois vingt minutes alors qu'il n'y a aucun trafic. Voilà la Genève que vous voulez. C'est une Genève paralysée, autant que les doctrines que vous prônez devant la population. Eh bien, Mesdames et Messieurs les socialistes, je vous le dis, et je l'avais déjà dit ici, vous êtes l'archétype même de l'évolution inversée. Vous avez été des princes; vous finirez par être des crapauds ! (Rires.)
Une voix. Il faut remonter sur l'arbre !
M. Antoine Bertschy (UDC), rapporteur de deuxième minorité. Nous avons eu un plaidoyer contre cette initiative et contre le contreprojet par M. Stauffer précédemment. Je n'ai plus grand-chose à ajouter. J'aimerais juste peut-être, pour clore le débat, relever la position du PLR. Je sais, Monsieur le président, que vous êtes un membre éminent de ce parti. J'ose espérer que vous n'allez pas me couper la parole. Je remarque...
Le président. Ne me tentez pas ! (Rires.)
M. Antoine Bertschy. C'est ce que je cherche à faire, justement, afin de pouvoir être une victime !
Je remarque que le parti libéral-radical a un discours assez étonnant lorsque l'on parle de transports. Il se veut un parti défenseur des automobilistes, en tout cas de la mobilité professionnelle, comme l'est vraiment cette droite du parlement, la réelle droite de ce parlement. Et dans les faits, il ne l'est plus. On ne peut pas, d'un côté, dire que nous allons défendre le trafic individuel et professionnel et, d'un autre côté, tout faire pour torpiller la votation sur cette initiative 144 en déposant un contreprojet qui n'aboutira à rien. Comme nous en avons déjà eu l'exemple le 28 novembre, lorsqu'un contreprojet est un contreprojet bout de bois...
Une voix. Ça n'a rien à voir !
M. Antoine Bertschy. ...le contreprojet bout de bois vole en éclats, l'initiative passe. Alors je ne sais pas quelle est la réflexion tactique ou stratégique du parti libéral-radical. Mais en voulant absolument un contreprojet qui sera totalement inopérant, qui ne rimera à rien et qui ne satisfera personne, mis à part quelques élites politiques de ce parti... Je ne sais pas quel est le but tactique et stratégique de présenter un contreprojet.
Je relève aussi que ce même parti, lorsque nous avons voté... Je digresse un peu, Monsieur le président, c'est là que vous pourrez m'interrompre. Je rappelle simplement que, lorsque nous avons eu le vote sur le budget il y a quelques semaines, un parti a proposé que nous arrêtions tout débat à un moment X. Ce moment X était justement lorsque nous allions parler de mobilité. Le sujet qui était important, l'un des sujets importants dans cette république, qui est-ce qui n'a pas voulu en parler ? C'est le parti libéral-radical. Pourquoi ? Vous avez fait des accointances... (Remarque.) Oui, c'est le député Jornot. (Commentaires.) Vous avez fait des accointances avec les Verts afin de pouvoir passer votre budget, afin de pouvoir passer votre rapport, Monsieur Weiss - vous étiez le rapporteur de majorité...
Le président. Monsieur le député, puis-je me permettre de vous suggérer tout simplement de revenir à l'initiative...
M. Antoine Bertschy. C'est ce que j'attendais, Monsieur le président.
Le président. Le budget est voté. Je ne sais pas si vous étiez là, mais revenons peut-être à l'initiative. Votre temps de parole s'épuise.
M. Antoine Bertschy. J'étais là, et je reviens au sujet, Monsieur le président. Je recherchais précisément votre intervention pour faire le Calimero moyen.
Dès que nous discutons de mobilité, en fait, vous avez un double discours. (Commentaires.) Vous avez un double discours. Soi-disant, vous défendez les automobilistes, mais en fait, ce n'est pas vrai ! Vous ne défendez pas le transport individuel; vous ne défendez pas le transport professionnel. On ne peut pas avoir de débat, franchement, sur la mobilité sans que vous ayez un double discours. Il n'y a que deux partis qui défendent ici, dans ce parlement, le transport individuel et le transport professionnel: le MCG et l'UDC.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. Antoine Bertschy. C'est pour cette raison que ces deux partis vont dire non à cette initiative. Si elle est votée, en effet, cela va mettre un petchi incommensurable sur la voirie genevoise. On va dire non... (Remarque.) Mais Vernier fonctionne mieux que la commune où vous habitez, Monsieur le député. Ces deux partis vont dire non à cette initiative et non à un contreprojet, parce que nous n'avons pas peur. Nous n'avons pas peur d'affronter cette initiative. Nous allons gagner contre cette initiative sans contreprojet. Parce que nous ne sommes pas des petits robinets, parce que nous n'avons pas peur et parce que nous sommes courageux.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements. Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse de première minorité. Mesdames et Messieurs les députés, avant de rétablir quelques contrevérités qui ont été exprimées au cours de ce débat, j'aimerais dire à M. Stauffer, qui visiblement n'est pas là et qui nous traite toujours d'ayatollahs du vélo... (Remarque.) Il est là ! Il nous traite toujours d'ayatollahs du vélo, mais il faut qu'il change de vocabulaire. Désormais, le PDC nous a rejoints dans le rang des défenseurs de la mobilité douce; nous sommes désormais des grands inquisiteurs du vélo, et non plus des ayatollahs ! (Commentaires.)
Pour revenir aux arguments qui ont été évoqués ce soir... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...on essaie de nous faire peur en nous disant: «Huit ans, c'est beaucoup trop court; on n'y arrivera jamais.» Bien sûr, il faut se fixer des objectifs ambitieux si l'on veut arriver à quelque chose dans ce canton; c'est bien connu. Et je rappelle que le texte de l'initiative ne prévoit pas de punition ou de pendaison en place publique s'il reste un tronçon qui n'est pas aménagé au terme des huit ans.
On essaie ensuite de nous faire peur en nous parlant de chantiers partout, en comparant des chantiers visant à des aménagements cyclables avec ceux du tram, ce qui n'est, comme vous pouvez l'imaginer, absolument pas comparable. On nous parle de 170 km de tranchées ouvertes à travers tout le canton. Soyons sérieux. Aménager une piste cyclable, si c'est une piste et qu'elle se fait de manière séparée de la route, cela n'empêche pas le trafic motorisé de passer. (Commentaires. Le président agite la cloche.) Et quand il s'agit de bandes cyclables, il est question d'un coup de pinceau, et cela n'arrête pas la circulation pendant plus d'une demi-journée, je vous rassure.
Cette initiative, ce soir, on l'a accusée de tous les maux, parfois de manière un peu incohérente, puisqu'elle est à la fois trop floue et trop catégorique. On a eu des exemples de théorie du complot, de procès d'intention; on nous propose un texte, mais en fait on se prononce sur plein d'autres choses en même temps. Non, c'est faux. On se prononce sur un texte, sur quelques alinéas parfaitement clairs, tout à fait modérés et raisonnables.
La manière qu'ont certains d'interpréter ce texte est un peu curieuse. M. Meylan imagine que, en arrivant devant un carrefour où circulent des trams, des bus, des voitures, un piéton pourra d'une simple pression du bouton arrêter tout cela, traverser tranquillement et ensuite cela reprendra. Je vous en prie, soyons sérieux ! On parle dans ce texte d'encourager, et non pas de prioriser. Je crois que, si ce texte est accepté par le peuple - et je pense qu'il le sera - les libéraux n'en feront pas tout à fait la même interprétation quand il s'agira de l'appliquer. En tout cas, je me réjouis de voir M. Meylan demander des boutons poussoirs à tous les carrefours pour les piétons et les vélos !
Pour finir, deux questions, Mesdames et Messieurs. Où est le libre choix du cycliste sur le boulevard Georges-Favon ? Où est le libre choix du piéton au carrefour des Vingt-Trois-Cantons ? Respectons enfin notre constitution. Votons cette initiative et refusons le contreprojet.
Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. André Python (MCG), rapporteur de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, selon les distances parcourues, seuls 6% des déplacements se font à pied et 3% seulement à vélo. Et le vieillissement démographique fait que l'usage du vélo restera minoritaire par rapport aux transports publics et privés.
On dirait que, actuellement, les cyclistes et les piétons ne peuvent se déplacer. Mais, si l'on fait 170 km, donc 20 km de travaux par année, en plus des travaux du CEVA qui vont certainement commencer, les cyclistes et les piétons seront en danger pour de nombreuses années encore.
En conséquence, après tout ce qui a été dit et au vu des débats, le MCG vous invite à refuser l'initiative 144 et considère que la présentation d'un contreprojet pourrait créer la confusion au sein des électeurs, de sorte qu'il en refusera également le principe.
Une voix. Très bien ! (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, c'était un débat long, passionné, qui est un peu étonnant pour une initiative somme toute assez modérée... (Exclamations.) ...qui ne correspond pas à ce qui a été évoqué dans cette salle. Le Conseil d'Etat est favorable à cette initiative. Il l'a déjà dit au moment de la prise en compte. Maintenant, il pense qu'elle est réalisable, que ce n'est pas au-dessus de ses moyens d'assurer la sécurité. Cela a été un large thème de campagne électorale. Or je pense que la sécurité des cyclistes et des piétons, c'est aussi de la sécurité. C'est là qu'il y a des morts, c'est là qu'il y a un vrai danger. Je crois que, en tant que parents - et beaucoup le sont dans cette salle - vous savez que c'est un danger que vous craignez pour vos enfants. Donc c'est un domaine où l'on peut mener une vraie action publique.
D'ailleurs, le programme de législature comprend déjà un plan directeur de la mobilité douce. Il est prêt à être déposé. C'est une vision d'ensemble de la mobilité. Cela complète les autres plans directeurs déjà existants. Contrairement à ce que dit M. Pierre Weiss, ce ne sont pas 91% des personnes qui ne seraient pas concernées. Que je sache, nous sommes tous d'abord piétons ! Cette vision globale de la mobilité, c'est une vision de la mobilité qui doit être intelligente. Chacun d'entre nous doit d'abord se poser la question du moyen à utiliser pour atteindre son objectif. Parfois à pied, le plus souvent d'ailleurs. Et 40% de piétons, au moins, font un long trajet. Mais si l'on compte tous les déplacements, c'est forcément 100%, puisque nous sommes tous des êtres humains qui peuvent se déplacer, que ce soit à pied ou même lorsqu'on est à mobilité réduite.
D'autre part, cette initiative veut favoriser ces déplacements. Mon Dieu, mais est-ce que c'est mal de pouvoir se déplacer à pied, de manière raisonnable, de ne pas avoir des temps d'attente très longs qui provoquent ensuite un comportement dangereux, parce que l'on passe quand même au rouge, comme l'indiscipline généralisée le veut à Genève ? Non ! Je pense que cette initiative est modérée. Le Conseil d'Etat est prêt à la mettre en oeuvre. Ceux qui, à gauche comme à droite, espèrent qu'elle ne sera pas acceptée ce soir, n'est-ce pas un mauvais plan ? Se déchirer encore et encore sur la mobilité, est-ce cela, le bon plan ?! Je sais bien que c'est amusant. Mais après vingt ans, cela devient pesant, et j'espère que l'on pourra mettre en oeuvre cette mobilité douce. En effet, actuellement, on a des plans directeurs de la mobilité, celui des transports collectifs et celui du réseau routier. Il nous manque cet aspect-là: le plan directeur de la mobilité douce.
Tout à l'heure, si on a le temps, ou demain, vous voterez des investissements structurants pour le réseau routier, et je l'ai défendu en commission. Je crois nécessaire de voter la route des Nations, le tram, les aménagements pour les trains, ainsi que tous les aménagements du plan directeur et du plan d'agglomération. Oui, il faut le faire ! Nous sommes en retard. Nous avons plus de vingt ans de retard dans ces équipements !
Je suis sûre que la population voudra ces aménagements. La population le demande au travers de pétitions. Elle demande de la sécurité pour les enfants, aux abords des écoles, et que des pistes cyclables soient créées. C'est produire de la sécurité et de la liberté. Là, je crois que l'on devrait se rejoindre. En conclusion, le Conseil d'Etat est favorable à cette initiative. (Applaudissements. Huées.)
Le président. Je trouve ces bruits, quand une conseillère d'Etat a fini de parler, particulièrement déplacés. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes à présent en procédure de vote.
Mise aux voix, l'initiative 144 est refusée par 46 non contre 43 oui et 2 abstentions.
Mis aux voix, le principe d'élaboration d'un contreprojet est refusé par 64 non contre 25 oui et 3 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le Grand Conseil prend acte du rapport de commission IN 144-C.