Séance du
vendredi 12 février 2010 à
20h30
57e
législature -
1re
année -
5e
session -
25e
séance
RD 824
Débat
Mme Anne Mahrer (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, à l'occasion de la Journée internationale «Tolérance zéro envers les mutilations génitales féminines», nous étions conviées et conviés vendredi dernier, 5 février, à une réunion-débat à Uni Dufour.
Cette année, ce sont des hommes qui ont pris la parole et affirmé le refus de ces mutilations pour leurs filles, de même que leur volonté d'éradiquer de leur pays cette «pratique de la honte», comme le dit le professeur Sow. Ils ont confirmé qu'aucune considération religieuse, culturelle ou sociale ne justifiait de telles pratiques. Ils ont aussi admis que de tels changements prendraient du temps, beaucoup de temps, et rappelé que chaque année trois millions de petites filles sont victimes de ces pratiques. Enfin, ils ont reconnu que la pression subie par les femmes était si forte qu'elles-mêmes perpétuaient cette tradition.
Lorsque nous prenions acte, en février 2008, du rapport du Conseil d'Etat sur la motion 1694 déposée en juin 2006, les Verts attendaient que Genève devienne le canton pionnier en matière de prévention et d'action contre l'excision. Il l'est devenu, Mesdames et Messieurs les députés ! Il l'est devenu grâce au projet pilote mené sous la responsabilité de l'office des droits humains de l'Etat de Genève. Et ce projet a ceci d'exemplaire qu'il met en réseau les organisations internationales présentes à Genève, les services de l'Etat, les associations, les communautés concernées à Genève, par le biais des médiatrices culturelles et les pays concernés, grâce à des ONG actives sur le terrain et qui sont soutenues par le service de la solidarité internationale.
Nous saluons donc ce soir cette avancée importante, réponse concrète apportée à la motion que nous sommes ici plusieurs à avoir signée en 2006. Nous souhaitons cependant que ce projet ne s'arrête pas là, que les personnes fortement engagées contre les mutilations génitales féminines puissent poursuivre leur travail et compter sur un engagement politique fort de la part du Conseil d'Etat - qui, je l'espère, m'écoute. Il s'agit d'étendre la prévention à d'autres communautés, d'intégrer dans la formation des professionnels de la santé cette problématique, de renforcer ce réseau.
Cette volonté politique, Mme Isabel Rochat l'a exprimée dans son discours prononcé vendredi dernier, à la fin de cette Journée internationale. Les Verts prennent acte de cet engagement et des conclusions du rapport 824, mais ils resteront attentifs à ce que l'intention annoncée se concrétise. Je vous remercie de votre attention. (Applaudissements.)
Mme Anne-Marie von Arx-Vernon (PDC). Pour le parti démocrate-chrétien, dès la première heure, il a été une évidence que nous devions soutenir le Conseil d'Etat dans tout ce qu'il pourrait mettre en oeuvre pour lutter contre ces horreurs. Des horreurs qui ne se passent pas seulement très loin de nos frontières, mais aussi à Genève. Des horreurs qui se passent aussi en Suisse ou que subissent des petites filles ou des femmes lors de vacances forcées dans leur pays d'origine où ces pratiques sévissent encore !
Nous voulons remercier le Conseil d'Etat et rendre hommage à Mme Fabienne Bugnon, directrice générale de l'office des droits humains, pour l'excellent travail effectué. Nous rendons aussi hommage aux médiatrices culturelles, aux personnes du domaine de la santé et à celles qui se trouvent sur le terrain, qui ont réalisé un travail absolument admirable - cela a été relevé par Mme Rochat lors de la journée contre les mutilations génitales féminines, comme le soulignait ma préopinante.
Au parti démocrate-chrétien, nous nous engageons aussi à soutenir le Conseil d'Etat dans tout ce qu'il pourra mettre en oeuvre pour continuer à lutter contre ces horreurs qui, je vous le rappelle, ne se passent pas uniquement très loin d'ici, mais peut-être chez nos voisins et nos voisines de palier. Nous devons donc absolument continuer à soutenir tout ce qui est entrepris pour prévenir cela et continuer à informer, car il est possible de faire cesser ces pratiques.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette problématique est importante. Même si, chez nous, elle est heureusement marginale, elle est quand même présente. On a parlé de l'office des droits humains, mais je crois que c'est une problématique qui touche, transversalement, beaucoup de départements de notre canton et qui doit être considérée avec sérieux.
Il a fallu aux femmes des générations entières pour obtenir le droit de vote. Au niveau planétaire, il nous faudra peut-être encore des générations contre cette pratique prétendument ancrée dans la pratique religieuse, mais c'est maintenant et ici que commencent le travail et la lutte, surtout par l'éducation. Comme vient de le dire la députée Anne Mahrer, cette pratique n'a rien de religieux, et si je crois qu'il y a des coutumes qui sont bonnes et qu'il faut conserver, il y en a cependant qu'il faut combattre à tout prix. Nous serons là pour les combattre où ce sera nécessaire, et ce le sera aussi ici !
Mme Christina Meissner (UDC). Si j'avais été députée à l'époque, j'aurais volontiers signé cette motion, c'est une évidence. J'ai aussi apprécié ce qui a été dit à l'occasion de cette journée contre les mutilations génitales féminines - je ne répéterai pas ce qu'a relevé Mme Anne Mahrer. Seulement, il est important que nous ne baissions pas les bras. Un suivi est nécessaire, parce que de nouvelles migrantes arrivent chaque année; elles doivent être informées et conseillées, pour éviter la perpétuation de telles pratiques barbares. Si nous ne pouvons pas agir ailleurs, nous devons tout faire pour que ces dernières n'aient pas cours chez nous et nous devons, de toutes les manières possibles, conseiller les femmes pour qu'elles ne s'associent plus à la perpétuation de telles pratiques.
M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais simplement remercier le Conseil d'Etat de sa réponse, mais aussi remercier les motionnaires de leur motion, qui a su raison garder. Autant il est important de lutter contre les mutilations féminines, autant il l'est de ne pas verser dans l'extrémisme, comme a pu le faire un certain parti qui entend également condamner la circoncision, pratiquée pour des raisons religieuses. De ce point de vue-là, le Conseil d'Etat lui aussi a su éviter l'écueil.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). Le MCG remercie le Conseil d'Etat pour ce qui a été entrepris ainsi que pour l'originalité de cette démarche. Mais nous voudrions quand même souligner l'aspect... (Remarque.) Pardon, y a-t-il quelque chose, Monsieur le président ?
Le président. Non, je vous en prie. (Commentaires.)
Mme Marie-Thérèse Engelberts. J'étais donc en train de dire qu'il faut néanmoins prendre en considération les aspects socioculturels, qu'il faut vraiment ne pas minimiser. Peut-être qu'on le voit moins ici à Genève et en Suisse romande, mais, dans certains pays, il s'agit de pratiques absolument souterraines et extrêmement difficile à repérer, à canaliser, et même à identifier lorsqu'on est sur le terrain. Ainsi, le fait de travailler aussi avec des médiatrices culturelles est une excellente idée.
Néanmoins, il y a aussi l'aspect financier. J'ai été très surprise par la modestie de la somme allouée à ce genre de projets, car il me semble qu'il faudra multiplier les acteurs. Les médiatrices culturelles devront avoir des formations encore plus longues, probablement avec des ramifications et des réseaux qui ne sont pas seulement d'ici mais surtout ailleurs.
Nous voulions souligner ces aspects-là, afin que, si des questions financières venaient à être mises à l'ordre du jour, nous en ayons bien conscience.
Le Grand Conseil prend acte du rapport du Conseil d'Etat RD 824.